Reprise des personnels exerçant une activité accessoire en cas de substitution d’une communauté d’agglomération à un syndicat mixte

Pour rappel, l’article L. 5216-6 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que la communauté d’agglomération est substituée de plein droit au syndicat de communes ou au syndicat mixte dont le périmètre est identique au sien pour la totalité des compétences qu’il exerce. La communauté d’agglomération est également substituée de plein droit, pour les compétences qu’elle exerce, au syndicat de communes ou au syndicat mixte inclus en totalité dans son périmètre.

L’article L. 5216-6 du CGCT précise, par ailleurs, que cette substitution s’effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article L. 5211-41 du même Code.

Or le deuxième alinéa de l’article L. 5211-41 du CGCT dispose que « l’ensemble des biens, droits et obligations de l’établissement public de coopération intercommunale transformé sont transférés au nouvel établissement public qui est substitué de plein droit à l’ancien établissement dans toutes les délibérations et tous les actes de ce dernier à la date de l’acte duquel la transformation est issue. L’ensemble des personnels de l’établissement transformé est réputé relever du nouvel établissement dans les conditions de statut et d’emploi qui sont les siennes ».

Le Conseil d’Etat en déduit qu’en cas de substitution d’une communauté d’agglomération à un syndicat mixte, l’ensemble des personnels du syndicat mixte est réputé relever de la communauté d’agglomération dans les conditions de statut et d’emploi qui sont les siennes, ce qui concerne également les personnels exerçant une activité accessoire.

En effet, il considère que le législateur, qui a entendu éviter les effets de discontinuité en cas de substitution d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à un syndicat mixte, n’a assorti les dispositions prévoyant que l’ensemble des personnels de l’établissement transformé est réputé relever du nouvel établissement dans les conditions de statut et d’emploi qui sont les siennes d’aucune restriction quant à leur champ d’application de sorte que les personnels exerçant une activité accessoire n’ont pas à être exclu de ce dispositif.

Dans cette affaire, il s’agissait d’un directeur général des services d’une commune recruté par le syndicat mixte pour exercer, sans limitation de durée, une mission d’expertise et de conseil dans le domaine de la gestion administrative et financière d’une durée hebdomadaire de 5 heures dans le cadre d’une activité accessoire autorisée par son employeur principal.

Le Conseil d’Etat a, ainsi, jugé que la Cour administrative d’appel de Versailles en jugeant que le directeur général des services n’était pas un personnel de la communauté d’agglomération au sens du deuxième alinéa de l’article L. 5211-41 du CGCT, alors qu’il exerçait une activité accessoire pour le compte du syndicat mixte à la date à laquelle la communauté d’agglomération s’est substituée, a commis une erreur de droit.

Il a également estimé que la Cour administrative d’appel de Versailles, en jugeant que cet agent devrait être regardé, à compter de cette date, comme employé sur la base d’un contrat à durée déterminée, au seul motif qu’un tel contrat avait été préparé par la communauté d’agglomération et que, si ce contrat n’avait pas été signé par l’intéressé, les modifications de rémunération et de quotité de travail qu’il emportait ne pouvaient lui avoir échappé eu égard aux mentions figurant sur les bulletins de salaire qu’il avait reçus, avait commis une erreur de droit.

Compétence du Président d’un Conseil de territoire pour répartir les crédits de la dotation d’investissement

Pour rappel, la Métropole d’Aix-Marseille Provence est un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) issu de la fusion de six intercommunalités préexistantes, dont le périmètre a néanmoins perduré à travers les six « territoires » institués au sein de la Métropole (cf. décret n° 2015-1520 du 23 novembre 2015 portant fixation des limites des territoires de la métropole d’Aix-Marseille Provence). On précisera immédiatement que cette organisation a été largement modifiée par la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, qui est venue amender le régime juridique de la Métropole en supprimant les dispositions portant sur les territoires (cf. article 181 de cette loi). Les conseils de territoire étaient composés de conseillers de la Métropole des communes de son périmètre et étaient présidés par un président élu par le conseil. Les compétences de ces conseils de territoire étaient financées par une dotation de gestion.

Cette dotation de gestion comprenait une dotation de fonctionnement et une dotation d’investissement. Les sommes destinées respectivement aux dotations de fonctionnement et aux dotations d’investissement étaient calculées et réparties entre les conseils de territoire en application de critères déterminés par le Conseil de la Métropole, tenant compte des caractéristiques propres de chaque territoire, notamment la population et les attributions exercées. C’est dans ces conditions qu’un des six territoires s’est vu attribuer une dotation de gestion et que son président a procédé à la répartition des deniers métropolitains entre les communes du territoire.

Toutefois, cette répartition a été contestée par une des communes composant le territoire. Si par un jugement n° 1706788 en date du 3 mars 2020, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de la commune, la Cour administrative d’appel de Marseille a, quant à elle, fait droit à sa demande en jugeant que si le président du conseil de territoire était compétent pour engager, liquider et ordonnancer les dépenses inscrites à l’état spécial, il ne disposait, en revanche, d’aucune compétence pour définir des critères de répartition par communes des crédits votées.

Saisi de cette affaire, le Conseil d’Etat a, quant à lui, jugé que le président du Conseil de Territoire était compétent, en sa qualité d’ordonnateur, pour répartir les crédits mis à sa disposition dans la limite prévue par les dispositions de l’article L. 5218-8-5 du CGCT.

Pour rappel, l’article L. 5218-8-5 du CGCT disposait, dans sa rédaction alors applicable, que :

« Le président du conseil de territoire engage, liquide et ordonnance les dépenses inscrites à l’état spécial lorsque celui-ci est devenu exécutoire. […]. Si l’assemblée délibérante décide de voter l’état spécial par article, le président du conseil de territoire peut effectuer des virements d’article à article à l’intérieur du même chapitre dans la limite du cinquième de la dotation initiale du chapitre de l’état spécial. Au-delà, le virement fait l’objet d’une décision conjointe du président du conseil de la métropole et du président du conseil de territoire ».

Le Conseil d’Etat a, ainsi, considéré que la Cour administrative d’appel de Marseille, en jugeant que le président du conseil de territoire n’était pas compétent pour définir des critères de répartition des crédits de la dotation d’investissement entre les communes du territoire, sans rechercher si les modifications décidées par le président du conseil de territoire excédaient cette limite posée par l’article L. 5218-8-5 du CGCT, à savoir l’impossibilité pour le président du territoire de procéder à des virements d’article à article au sein d’un même chapitre au-delà du cinquième de la dotation initiale du chapitre dans le cas où l’état spécial est voté par article, avait commis une erreur de droit.

Le Conseil d’Etat a, par ailleurs, renvoyé le dossier à la Cour administrative d’appel de Marseille.

La compétence des intercommunalités en matière de règlementation du changement d’usage (Airbnb) est-elle suffisante ?

Pour faire face aux difficultés engendrées par la multiplication des locations de meublés de tourisme pour de courtes durées, plusieurs mécanismes ont été complétés, adaptés ou instaurés par la loi n° 2014-366 en date du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, aux articles L. 631-7 et suivants du Code de la construction et de l’habitation (CCH), afin précisément d’encadrer et de réguler les transformations de locaux destinés au logement en location de meublés de tourisme.

Ces dispositifs permettent de soumettre à autorisation le changement d’usage d’un local destiné à l’habitation et incluent notamment :

  • Un dispositif d’autorisation préalable de changement d’usage des locaux destinés à l’habitation, défini à l’article L. 631-7-1 du CCH, permet notamment de soumettre le changement d’usage à une obligation de compensation sous la forme de la transformation concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage. Cela consiste donc à transformer un local ayant un usage autre que l’habitation, commercial par exemple, en local d’habitation pour compenser le changement d’usage d’un local d’habitation en meublé de tourisme ;
  • Un dispositif d’autorisation temporaire de changement d’usage, permettant à une personne physique de louer pour de courtes durées des locaux destinés à l’habitation à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, défini à l’article L. 631-7-1 A du CCH.

L’autorisation de changement d’usage vise à protéger les propriétaires et les locataires, et à répondre à la dégradation des conditions d’accès au logement et à l’exacerbation des tensions sur le marché immobilier notamment en régulant ses dysfonctionnements. Ceci doit permettre l’accroissement de l’offre de logements dans des conditions respectueuses des équilibres des territoires, dans la mesure où le logement est un bien de première nécessité, que le droit à un logement décent constitue un objectif protégé par la Constitution française et que l’objectif poursuivi par l’instauration d’une autorisation de changement d’usage constitue une raison impérieuse d’intérêt général au sens du droit de l’Union européenne (CJUE, 22 septembre 2020, Cali Apartments SCI, n° C‑724/18, §65-66).

Les communes et certains établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre se partagent la mise en place de cette règlementation de sorte qu’il s’agira d’analyser la répartition des interventions entre les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les communes (I) avant de s’interroger sur les limites de cette répartition et des solutions pour y remédier (II).

I. Sur la répartition des interventions en matière de changement d’usage

La répartition des rôles entre communes et EPCI sera présentée pour la mise en œuvre de la règlementation du changement d’usage (A), pour l’instruction des demandes d’autorisation (B) ainsi que pour la mise en œuvre des contrôles et sanctions (C).

A. Sur la compétence pour mettre en œuvre cette règlementation

Conformément aux dispositions de l’article L. 631-9 du CCH, l’instauration d’un régime d’autorisation des changements d’usage est décidée par :

  • délibération de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière de plan local d’urbanisme pour les communes visées par l’article 232, I du Code général des impôts qui renvoie lui-même au décret n° 2023-822 du 25 août 2023 modifiant le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l’article 232 du Code général des impôts ;
  • arrêté du préfet sur proposition du maire pour les autres communes ou parties de communes.

Il appartient ensuite à l’organe délibérant de l’EPCI compétent en matière de plan local d’urbanisme, ou au conseil municipal le cas échéant, de fixer les conditions dans lesquelles seront délivrées ces autorisations, en application des articles L. 631-7-1 A et L. 631-7-1 du CCH.

A ce stade on précisera que le législateur n’a pas justifié l’intervention des EPCI compétents en matière de plan local d’urbanisme (PLU) pour réglementer les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage. On peut néanmoins valablement considérer que la personne publique titulaire de la compétence PLU est la plus compétente pour exercer cette mission en tant qu’elle connait parfaitement le territoire et que cela permet une application uniforme des règles en matière de changement d’usage à l’ensemble des communes membres de l’EPCI.

Cette mission se traduit par l’adoption d’un règlement des autorisations de changement d’usage sur le périmètre des collectivités concernées qui fixe les conditions de délivrance des autorisations.

Ces règlements de changement d’usage font l’objet d’une « guerrila juridique et contentieuse » selon le rapport n° 1928 fait au nom de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi n° 1176 visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue élaboré par Monsieur Inaki Echaniz et Madame Annaïg Le Meur.

Ce même rapport identifie d’ailleurs les règles les plus fréquemment introduites dans les règlements de changement d’usage :

  • « à condition de ne pas dépasser 120 jours de location cumulée par année civile, le loueur est uniquement soumis à une obligation de déclaration électronique du logement afin d’obtenir un numéro d’enregistrement, qui doit apparaitre dans les annonces publiées ;
  • au-delà de cette limite, il ne s’agit plus d’une activité occasionnelle de location du logement pendant l’absence du résident : la règlementation relative aux résidences secondaires s’applique. Outre la déclaration d’enregistrement du meublé, il est dès lors nécessaire de solliciter une autorisation de changement d’usage auprès de la mairie ;
  • s’il s’agit du premier logement mis à la location meublée touristique, une autorisation temporaire de changement d’usage d’une durée d’un an, renouvelable cinq fois, peut être accordée par propriétaire. Cette autorisation est limitée à une résidence par foyer fiscal et est personnelle, donc incessible ;
  • si la période de location s’étend au-delà de la cinquième année, le propriétaire est alors soumis à changement d’usage définitif, et donc à une obligation de compensation ;
  • une compensation est également obligatoire dès la deuxième logement mis à la location meublée touristique pour un même loueur, ce qui obligera celui-ci à transformer en logements de surface équivalente des locaux non habitables, le plus souvent des commerces ou bureaux, de surface équivalente».

A toutes fins utiles, on précisera que la Cour administrative de Bordeaux s’est d’ailleurs prononcée sur les critères de la compensation dans un arrêt récent (CAA Bordeaux, 30 janvier 2024, Association des hôtes de Bordeaux Nouvelle-Aquitaine, n° 21BX04629).

B. Sur la compétence pour instruire les demandes et délivrer les autorisations

Une fois le régime de l’autorisation du changement d’usage mis en place, il est prévu que « l’autorisation préalable au changement d’usage est délivrée par le maire de la commune dans laquelle est situé l’immeuble, après avis, à Paris, Marseille et Lyon, du maire d’arrondissement concerné » (article L. 631-7-1). Le changement d’usage doit donc faire l’objet d’une autorisation du maire (de même pour les autorisations temporaires de l’article L. 631-7-1 A du CCH).

Aussi, on relèvera qu’en principe l’instruction d’une autorisation qu’il est habilité à délivrer relève des pouvoirs propres du maire (CE, 30 juillet 1997, Association Orcet environnement, n° 136958). Ainsi, il revient en principe au maire d’instruire la demande d’autorisation.

C. Sur le contrôle et la sanction des manquements

Plusieurs sanctions sont définies par le juge en cas de manquement aux exigences de la règlementation applicable au changement d’usage et sont définies à l’article L. 651-2 du CCH.

L’article L. 651-3 du CCH prévoit également des sanctions en matière pénale.

Ainsi, la commune sur le territoire de laquelle est situé le bien utilisé en méconnaissance de la règlementation sur le changement d’usage est l’autorité compétente pour assigner le contrevenant devant les juridictions judiciaires, qui pourront le condamner au versement d’une amende civile dont le montant est versé à la commune.

S’agissant des modalités de contrôle, on précisera dès à présent qu’aucune disposition de la section des articles L. 631-7 et suivants ne prévoient des modalités de contrôle.

Toutefois, sur le fondement de l’article L. 651-6 du CCH, qui s’inscrit dans un chapitre consacré de manière générale aux sanctions sur plusieurs dispositifs de protection du logement, il est prévu que les agents du service municipal du logement se voient reconnaitre, lorsqu’ils sont assermentés, une habilitation « à visiter les locaux à usage d’habitation situés dans le territoire relevant du service municipal du logement ». La procédure d’assermentation est également définie et les agents doivent donc être nommés par le maire, puis prêter serment devant le Tribunal judiciaire pour être considérés comme assermentés. Ils ne pourront toutefois visiter que les locaux situés dans le territoire relevant du service du logement, et donc de la commune pour le service municipal.

Si l’article L. 621-1 du CCH prévoit que « plusieurs communes peuvent s’associer pour demander l’institution à titre temporaire d’un service intercommunal du logement ». et ainsi, créée un service intercommunal du logement, il ressort toutefois de ce texte que la possibilité de création d’un service intercommunal ne correspond pas à un service d’un EPCI mais à l’association de plusieurs communes.

Partant, le contrôle du respect de la règlementation sur le changement d’usage dépendrait du service municipal du logement, rattachés donc à la commune et dont les agents assermentés sont nommés par le maire.

Par ailleurs, on mentionnera que, dans le but de faciliter les contrôles opérés par les communes, le Code du tourisme prévoit également un dispositif de déclaration des locations de meublés de tourisme. L’article L. 324-1-1 de ce Code prévoit en effet que toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès du maire de la commune où est situé le meublé. En outre, les communes où la règlementation sur le changement d’usage a été introduite peuvent instaurer un dispositif d’enregistrement. Des mécanismes d’information auprès des plateformes et de sanction des contrevenants sont ainsi prévus.

A cela on ajoutera que ces mêmes agents disposent également de prérogatives pour le contrôle des manquements aux obligations de déclaration et d’enregistrement définies par le Code du tourisme (article L. 324-2-1, IV de ce Code tourisme)

En outre, les prérogatives de contrôle du respect de la règlementation du changement d’usage sont ainsi exercées par ce service dont les agents sont assermentés par le maire. Et c’est la commune qui peut assigner les contrevenants aux obligations découlant de cette règlementation. A ce stade, aucun rôle n’est donc a priori confié par les textes à l’EPCI ayant adopté le règlement sur le changement d’usage.

II. Identification des limites de cette répartition et des solutions pour y remédiées

On l’a vu, l’instruction et le contrôle des autorisations de changement d’usage sont confiées par les textes à l’échelon communal.

Or, dans le cadre de la mise en œuvre des opérations d’instruction et de contrôle du respect de la règlementation des locations de meublés pour de courtes durées applicable sur leur territoire, certains EPCI, compétents en matière de PLU, souhaiteraient procéder eux-mêmes à l’instruction et au contrôle de la réglementation qu’ils ont eux-mêmes élaborés.

Leurs objectifs sont entendables, il s’agirait d’assurer une application uniforme des règlements de changement d’usage sur leurs territoires et éventuellement pallier le manque de moyens de certaines communes en la matière.

Si l’on peut envisager de mettre en œuvre des outils de mutualisation entre les communes et les ECPI compétent en matière de PLU, au moins sur la question de l’instruction, il n’en reste pas moins qu’il ne s’agit pas d’une solution pérenne dès lors ces outils reposent essentiellement sur la volonté des acteurs concernés.

La proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue qui est actuellement en cours de discussion devant le parlement prévoit que de nouvelles prérogatives soient attribuées aux EPCI en matière de règlementation du changement d’usage sans pour autant proposer que l’instruction et le contrôle de la réglementation en matière de changement d’usage relèvent exclusivement de l’EPCI compétent en matière de PLU.

Plus exactement, à l’heure où nous écrivons ces lignes, les propositions de modifications suivantes sont en cours d’analyse par le Sénat :

  • L’article L 651-2 du CCH permettrait à l’autorité organisatrice de l’habitat ou l’EPCI compétent en matière d’urbanisme d’assigner en justice la personne qui enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 précité, à des fins d’application de l’amende administrative :

« Toute personne qui enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 € par local irrégulièrement transformé.

Cette amende est prononcée par le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, sur assignation de la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé, de l’autorité organisatrice de l’habitat, de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’urbanisme ou de l’Agence nationale de l’habitat. Le produit de l’amende est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé ce local. Le tribunal judiciaire compétent est celui dans le ressort duquel est situé le local. […]. »

  • Introduction d’un nouvel article L. 151-14-1 au sein du Code de l’urbanisme qui donne la faculté à l’autorité compétente en matière de PLU d’instituer, dans le règlement de ce document, des secteurs où les constructions nouvelles à destination d’habitations soumises à une obligation d’usage au titre de résidence principale. Cette capacité ne sera ouverte qu’aux seules collectivités qui connaissent un taux de résidences secondaires supérieur à 20 % :

« Le règlement [du PLU] peut délimiter, dans les zones urbaines ou à urbaniser, des secteurs dans lesquels toutes les constructions nouvelles de logements sont à usage exclusif de résidence principale, au sens de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n 86-1290 du 23 décembre 1986 ».

On précisera néanmoins que pour le contrôle de cette mesure, le législateur a introduit un nouvel article (article L.481-4 du Code de l’urbanisme) en application duquel « en cas d’occupation d’un logement en méconnaissance de l’obligation prévue à l’article L. 151-14-1, constatée par l’agent d’une collectivité publique commissionné par le maire en application de l’article L. 480-1, le maire, après avoir invité l’intéressé à présenter ses observations, met en demeure le propriétaire du logement de régulariser la situation ».

Dans ces conditions, la question se pose de créer une compétence relative au marché locatif en zone tendue qui pourrait le cas échéant être transférée aux EPCI compétents en matière de PLU et qui pourrait être accompagnée du transfert des pouvoirs de police comme c’est le cas pour d’autres compétences (article L. 5211-9-2 du Code général des collectivités territoriales).

Raccordement au réseau de distribution d’électricité : réponse étonnante du Ministre sur les modifications à venir du Code de l’urbanisme

Une question au Gouvernement a permis au Ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement, de tenter d’apporter des précisions sur les modifications à venir du Code de l’urbanisme pour le mettre en cohérence avec les modifications du Code de l’énergie relative aux raccordements aux réseaux d’électricité. Les modifications du Code de l’énergie relatives au raccordement aux réseaux d’électricité ont été apportées par la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (article 29) et par l’ordonnance n° 2023-816 du 23 août 2023 relative au raccordement et à l’accès aux réseaux publics d’électricité. A titre liminaire, il convient d’opérer une distinction entre raccordement au réseau de distribution, extension du réseau de distribution et branchement au réseau. Ces opérations sont définies comme suit par le Code de l’énergie :

  • Le raccordement comprend « selon le cas, de manière combinée ou séparée, la création d’ouvrages d’extension, la création d’ouvrages de branchement en basse tension ou le renforcement des réseaux existants» (article L. 342-1 du Code de l’énergie) ;
  • L’extension est « constituée des ouvrages, nouvellement créés ou créés en remplacement d’ouvrages existants dans le domaine de tension de raccordement et nouvellement créés dans le domaine de tension supérieur qui, à leur création, concourent à l’alimentation des installations du demandeur ou à l’évacuation de l’électricité produite par celles-ci» (article D. 342-2 du Code de l’énergie) ;
  • Le branchement est « constitué des ouvrages basse tension situés à l’amont des bornes de sortie du disjoncteur ou, à défaut, de tout appareil de coupure équipant le point de raccordement d’un utilisateur au réseau public et à l’aval du point du réseau basse tension électriquement le plus proche permettant techniquement de desservir d’autres utilisateurs, matérialisé par un accessoire de dérivation» (article D. 342-1 du Code de l’énergie).

Dès lors, le raccordement est composé, en général, de l’extension du réseau et du branchement du demandeur au réseau.

Pour rappel, les modalités de répartition du coût d’extension du réseau public de distribution d’électricité sont partagées entre le Code de l’urbanisme et le Code de l’énergie. Jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi APER précitée, ces dispositions organisaient la répartition du coût de l’extension, comme suit :

  • Le demandeur du raccordement était débiteur du coût de l’extension pour la partie située sur le terrain d’assiette de l’opération (article L. 332-15 du Code de l’urbanisme) ;
  • La collectivité ayant accordé l’autorisation d’urbanisme était débitrice du coût de l’extension située en dehors du terrain d’assiette de l’opération (article L. 342-11 ancien du Code de l’énergie).

Par ailleurs, par exception aux dispositions précitées, aux termes du quatrième alinéa de l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme, lorsque le raccordement emprunte en toute ou partie des voies ou emprises publiques, qu’il est destiné à desservir uniquement l’installation du demandeur et qu’il n’excède pas cent mètres, il peut être à la charge du demandeur. Dans un tel cas, le demandeur, qui doit donner son accord, sera alors débiteur du raccordement dans son ensemble, c’est-à-dire du branchement et de l’extension du réseau.

A contrario, lorsque le raccordement excède cent mètres et qu’il ne respecte pas les critères mentionnés au paragraphe précédent, il sera à la charge de la collectivité, dans les limites rappelées ci-dessus. Le Ministre était interrogé sur l’obligation faite à certaines petites communes de prendre en charge les coûts de raccordement de plus de cent mètres. Sa réponse est toutefois incomplète.

En premier lieu, le Ministre rappelle les modifications apportées par la loi d’accélération des énergies renouvelables relatives à l’extension des réseaux de distribution d’électricité, quand la question qui lui était posée portait sur le raccordement dans son ensemble. L’article 29 de la loi APER a supprimé le deuxième alinéa du 1° de l’article L. 342-11 du Code de l’énergie, dans sa version alors applicable. Cet alinéa mettait à la charge de la collectivité ayant accordé l’autorisation d’urbanisme à l’origine de la demande de raccordement la part de l’extension du réseau de distribution située en dehors du terrain d’assiette de l’opération. L’ordonnance du 23 août 2023 relative au raccordement a modifié le Code de l’énergie pour prévoir que le demandeur du raccordement est le débiteur du coût de l’extension. Malgré une lacune temporelle observée dans notre lettre d’actualité juridique de septembre 2023 (consultable ici), les dispositions du Code de l’énergie sont désormais cohérentes entre elles, mais restent en contradiction avec celles du Code de l’urbanisme.

En second lieu, ainsi que le relève le Ministre, l’article 26 de la loi APER donnait habilitation au Gouvernement pour modifier les dispositions relatives au raccordement prévues par le Code de l’énergie. Elle ne lui donnait pas de pouvoir de modifier le Code de l’urbanisme. Ainsi, les dispositions du Code de l’énergie sont toujours en contradiction avec celles prévues par l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme, d’une part avec son troisième alinéa relatif à l’extension du réseau et d’autre part, avec son quatrième alinéa, relatif au raccordement. Toutefois, en dépit de la contradiction, il conviendra de faire application de la loi nouvelle, soit des nouvelles dispositions du Code de l’énergie.

En troisième lieu, le Ministre indique que la modification du Code de l’urbanisme est en cours d’élaboration. Il est étonnant que le Ministre n’ait pas cité le projet de loi de ratification de l’ordonnance raccordement qui prévoit en son article 2 la mise en cohérence du Code de l’urbanisme, et dont il convient de faire mention. Ce projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2023-816 du 23 août 2023 relative au raccordement et à l’accès aux réseaux publics d’électricité et modifiant le code de l’urbanisme, prévoit notamment de modifier l’article L. 332-15 du code de l’urbanisme, source de contradiction avec le code de l’énergie, en :

  • Supprimant le troisième alinéa limitant la prise en charge de l’extension par le demandeur à la partie de l’extension située sur le terrain d’assiette de l’opération ;
  • Supprimant au quatrième alinéa les références au réseau d’électricité.

Si ce projet de loi est voté en l’état, les demandes du député à l’origine de la question objet du présent commentaire seront résolues : les communes n’auront définitivement plus à verser de contribution pour les raccordements des tiers au réseau public de distribution d’électricité. Le nouvel article L. 342-21 du Code de l’énergie, aux termes duquel « le demandeur est le débiteur du raccordement », pourra s’appliquer sans contradiction. Espérons que ce projet de loi sera mis incessamment à l’ordre du jour de l’une des chambres du Parlement pour mettre fin à ces incohérences, qui pour rappel n’auront pas nécessairement un impact sur l’application des nouvelles dispositions du Code de l’énergie du fait de la primauté de la loi nouvelle sur la loi ancienne.

En quatrième lieu, dans l’attente de cette modification des dispositions du Code de l’urbanisme relatives au raccordement aux réseaux d’électricité, le ministre encourage les autorités compétentes à ne plus prendre en compte le critère des cent mètres ci-avant énoncé. La réponse du ministre dispose :

« En attendant une modification législative du Code de l’urbanisme dont l’élaboration est en cours, le critère des 100 mètres prévu à l’alinéa 4 de l’article L. 332-15 du code de l’urbanisme n’est plus à prendre en compte, dans le cadre de l’instruction d’une autorisation d’urbanisme, pour déterminer la personne qui doit assurer le financement de l’extension du réseau électrique en dehors du terrain d’assiette du projet ».

Ainsi, le Ministre incite à faire application d’une loi qui n’a pas été votée par le Parlement : proposition pragmatique mais illégale.

En cinquième et dernier lieu, le Ministre indique que « s’agissant de la situation de la commune de Montussan, le devis étant antérieur à la date du 10 septembre, la commune aurait en effet dû s’acquitter de l’opération en cas de délivrance du permis ». Or, c’est l’autorisation d’urbanisme et non le devis de raccordement qui détermine les débiteurs du raccordement (délibération de la Commission de régulation de l’énergie n° 2023-300 du 22 septembre 2023 ; article 3 du projet de loi de ratification de l’ordonnance n° 2023-816 du 23 août 2023 relative au raccordement et à l’accès aux réseaux publics d’électricité et modifiant le code de l’urbanisme). Il reste à espérer que la nouvelle composition du Gouvernement et l’exercice des compétences relatives à l’énergie par Bercy remettent la lumière à tous les étages.

Contrats d’obligation d’achat d’électricité : modification et parution de plusieurs arrêtés tarifaires

Plusieurs arrêtés tarifaires ont été publiés aux journaux officiels de décembre et janvier. Ces arrêtés déterminent les modalités d’acquisition de l’électricité produite par les installations de production d’électricité éligibles aux contrats d’obligation d’achat.

Aux termes du Code de l’énergie, les producteurs d’électricité peuvent bénéficier de contrats de soutien conclus avec l’Etat lorsqu’ils remplissent les conditions fixées par ledit Code (article D. 314-15 du Code de l’énergie notamment). Ces conditions sont précisées par des arrêtés spécifiques à chaque type de production, dits arrêtés de filière ou arrêtés tarifaires.

Par trois arrêtés, le Ministre en charge de l’énergie a modifié les arrêtés tarifaires applicables :

  • Aux installations de production d’électricité implantées sur bâtiment, hangar ou ombrière utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 500 kilowatts ;
  • Aux installations de production d’électricité implantées sur bâtiment, hangar ou ombrière utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 500 kilowatts et situées dans les zones non interconnectées ;
  • Aux installations de production d’électricité utilisant à titre principal le biogaz produit par méthanisation de déchets non dangereux et de matière végétale brute implantées sur le territoire métropolitain continental d’une puissance installée strictement inférieure à 500 kW.

Sur l’arrêté du 22 décembre 2023 modifiant l’arrêté du 6 octobre 2021 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations implantées sur bâtiment, hangar ou ombrière utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 500 kilowatts telles que visées au 3° de l’article D. 314-15 du code de l’énergie et situées en métropole continentale

L’arrêté en date du 6 octobre 2021, dit arrêté tarifaire S21, fixe les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations photovoltaïques implantées sur bâtiment, hangar ou ombrière d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 500 kW.

L’arrêté tarifaire S21 a été modifié par l’arrêté du 22 décembre 2023. On retiendra notamment les modifications suivantes :

  • Refonte du mécanisme de dégressivité tarifaire détaillé au sein de l’annexe 1 de l’arrêté tarifaire S21 ;
  • Modification de la méthode de calcul du bilan carbone des installations. Pour les installations dont la demande de raccordement a été déposée jusqu’au 31 mars, il conviendra de se référer aux annexes 6 et 6 bis. Pour les installations dont la demande de raccordement a été déposée postérieurement, il conviendra de se référer aux annexes 6 ter et 6 quater ;
  • Précisions sur les pièces à fournir par le producteur lors de la demande de raccordement, de contrat d’achat et en amont de la prise d’effet du contrat ;
  • Clarification sur l’application de la formule de calcul de la puissance (dite « P + Q ») dans le cas des installations réparties sur plusieurs bâtiments.

Aux termes de l’article 18 de l’arrêté du 22 décembre 2023, les conditions d’achat modifiées s’appliquent aux installations pour lesquelles une demande complète de raccordement a été déposée entre le 1er août 2023 et le 21 décembre 2023. Les modifications s’appliquent dans leur ensemble aux installations dont la demande complète de raccordement est déposée postérieurement au 22 décembre 2023.

Arrêté en date du 5 janvier 2024 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations implantées sur bâtiment, hangar ou ombrière utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 500 kilowatts telles que visées au 3° de l’article D. 314-15 du Code de l’énergie et situées dans les zones non interconnectées en Corse, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Wallis-et-Futuna, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans certaines îles du Ponant non interconnectées au réseau métropolitain continental et habitées à l’année.

Les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental, dites ZNI, font l’objet d’arrêtés tarifaires spécifiques pour prendre en compte les particularités de ces territoires. Un nouvel arrêté tarifaire concernant les installations photovoltaïques sur bâtiment est paru. Il réhausse le plafond de puissance des installations de 100 kWc à 500 kWc.

Les conditions d’achat d’électricité produite à partir d’installations utilisant l’énergie photovoltaïque implantées sur bâtiment, hangar ou ombrière utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 500 kilowatts, étaient jusqu’alors prévues par un arrêté du 4 mai 2017.

Par un arrêté du 5 janvier 2024, l’arrêté précité de 2017 a été abrogé et remplacé. Il convient dès lors de se référer à ce nouvel arrêté pour connaitre les conditions d’achat de l’électricité produite par les nouvelles installations implantées sur bâtiment, hangar ou ombrière utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 500 kilowatts situées en ZNI. Les dispositions de l’arrêté du 4 mai 2017 resteront applicables aux contrats en cours (article 16 de l’arrêté du 5 janvier 2024).

Arrêté du 29 décembre 2023 modifiant l’arrêté du 13 décembre 2016 fixant les conditions d’achat pour l’électricité produite par les installations utilisant à titre principal le biogaz produit par méthanisation de déchets non dangereux et de matière végétale brute implantées sur le territoire métropolitain continental d’une puissance installée strictement inférieure à 500 kW telles que visés au 4° de l’article D. 314-15 du Code de l’énergie. Aux termes du 4° de l’article D. 314-15 du Code de l’énergie, l’électricité produite par les installations utilisant à titre principal le biogaz produit par méthanisation de déchets non dangereux et de matière végétale brute implantées sur le territoire métropolitain continental d’une puissance installée strictement inférieure à 500 kilowatts peuvent bénéficier d’un contrat d’obligation d’achat.

Ces installations font donc également l’objet d’un arrêté tarifaire. L’arrêté tarifaire en vigueur (arrêté du 13 décembre 2016, dit arrêté tarifaire BG16) a été très légèrement modifié par un arrêté du 29 décembre 2023.

Aux termes de l’arrêté en date du 29 décembre 2023, l’une des variables de la formule de calcul du tarif d’achat de l’électricité produite a été modifiée. Ainsi, le 3° du A du I de l’annexe 1 de l’arrêté du 13 décembre 2016 est modifié comme suit :

« 3° ICHTrev-TS10 et FM0ABE00000 sont les dernières valeurs définitives à la date de demande complète de contrat des indices ICHTrev-TS1 et FM0ABE0000 connues à la date de demande complète de contrat ».

Comme le relève la Commission de régulation de l’énergie dans sa délibération portant avis sur le décret, cette modification a pour but de « pallier les difficultés économiques subies par les contrats ayant pris effet après le 1er janvier 2021 » (délibération de la CRE n° 2023-306 du 5 octobre 2023 portant avis sur un projet d’arrêté modifiant l’arrêté du 13 décembre 2016 fixant les conditions d’achat pour l’électricité produite par les installations utilisant à titre principal le biogaz produit par méthanisation de déchets non dangereux et de matière végétale brute implantées sur le territoire métropolitain continental d’une puissance installée strictement inférieure à 500 kW telles que visées au 4° de l’article D. 314-15 du code de l’énergie)

En effet, l’arrêté vise à en modifier la date de référence pour le calcul du coefficient d’indexation L. Ainsi, ce dernier est calculé à partir de la date de demande complète de contrat, et non plus à partir de la prise d’effet de celui-ci.

Litige de la Métropole Européenne de Lille contre Alstom, le juge des référés ne peut pas tout …

Le 21 juin 2012, la métropole européenne de Lille (ci-après la MEL) a conclu avec la société Alstom Transport un marché public ayant pour objet la production des études, des fournitures, des travaux et des essais d’un système de « matériel roulant et contrôle commande et supervision des trains ». Le marché devait être exécuté en sept ans. Il devait donc être achevé en 2019. Nous sommes en 2024 et il n’est toujours pas achevé.

De guerre lasse, la MEL a introduit un référé mesures utiles devant le juge des référés du Tribunal administratif de Lille. Plus précisément, la MEL formulait trois demandes :

  • d’ordonner à la société Alstom transport de définir et de s’engager à prendre les mesures essentielles et indispensables pour assurer la continuité et la qualité du service public du métro ;
  • pour assurer plus précisément la continuité de service du métro, d’ordonner à la société de définir et de s’engager sans réserve sur les moyens et les délais de mise en service des 27 rames de nouvelle génération prévues pour circuler sur la ligne 1 ;
  • de contraindre la société Alstom transport à mettre en œuvre tous les moyens permettant de conserver la capacité totale de transport des deux lignes du métro, qui est actuellement de 143 rames, les modèles les plus anciens circulant sur la ligne 2 devant être mis au rebut à partir du mois d’août 2025.

Sauf que, dans son ordonnance en date du 25 janvier 2024 (TA Lille, 25 janvier 2024, Métropole européenne de Lille, n° 2310410) le juge des référés rappelle que saisi dans le cadre des relations contractuelles, ses pouvoirs restent limités :

  • il rejette la première demande au motif que la satisfaction de la demande impliquerait nécessairement des transferts de matériel d’une ligne (la ligne 1) vers l’autre (la ligne 2). Or, Alstom transport n’ayant pas en charge le fonctionnement de la ligne 2, il s’agirait d’aller au-delà de ses obligations contractuelles ;
  • Il rejette la deuxième demande en rappelant qu’il ne peut adresser d’injonction à un cocontractant que s’il existe une atteinte ou un risque avéré d’atteinte à la continuité du service public ou à son bon fonctionnement et que cette atteinte procède du refus caractérisé du cocontractant d’accomplir ses obligations contractuelles dans le délai fixé. Or, dans le cas présent, le juge reconnait un retard important à ALSTOM et de nature à porter atteinte à la continuité du service. Cependant, il note les moyens importants mis en œuvre par cette dernière pour exécuter le contrat et considère que, de ce fait, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de la société ;
  • Enfin, il rejette la dernière demande qui ne correspond pas à la satisfaction d’une obligation contractuelle.

Le juge des référés rappelle, au détour d’un moyen à la MEL qu’elle peut toujours introduire un recours pour obtenir l’indemnisation de son préjudice. Notons toutefois que ce recours n’aura de chances de succès que si le retard n’est pas déjà sanctionné par des pénalités, par nature forfaitaires et libératoires.

Première décision du Conseil d’Etat dans le recours opposant SNCF Réseau et l’ART à 8 régions

Rappelons que sept régions (Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Centre-Val de Loire, Hauts-de-France, Occitanie, Nouvelle-Aquitaine et Grand-Est) et Ile-de-France Mobilités (IDFM) ont déposer un recours devant le Conseil d’Etat contre le Document de référence du Réseau Ferré National (ci-après le DRR) publié par SNCF réseau et l’avis conforme de l’Autorité de Régulation des Transports (ART) ; le contentieux portant sur le montant des péages pour l’utilisation du réseau ferré national sur les années 2024-2026.

Comme le note la Rapporteure publique, Dorothée PRADINES, dans ses conclusions sous l’arrêt portant sur l’avis de l’ART, le contentieux est très intéressant et éminemment technique. Il s’agira en effet de se prononcer sur la refonte des bases de calcul de ces redevances d’utilisation qui a pour objet d’en augmenter la part forfaitaire et d’en réduire la part variable (part de la redevance fixée au sillon/km).

Cependant, c’est sur un point de droit bien loin des considérations ferroviaires que le juge vient de rejeter le recours contre l’avis de l’ART. Faisant application d’une jurisprudence classique, dans un arrêt en date du 5 février 2023, (CE, 29 janvier 2023, IDFM et autres, n° 473507) il a jugé que l’avis conforme de l’ART était un acte préparatoire à la décision de publication de l’ART et n’était donc pas, en tant que tel, un acte susceptible de recours. Il a donc rejeté le recours contre l’avis de l’ART.

Mais que nos lecteurs se rassurent, le Conseil d’Etat se penchera bientôt sur cette belle question des conditions de fixation des redevances en appréciant le recours au fond contre le DRR lui-même. Et nous ne manquerons pas de commenter cette décision.

Aéroport Nantes-Atlantique : Ouverture d’une instruction par l’Autorité de Régulation des Transports tendant à la recherche et à la constatation de manquements à l’obligation de réunion de la CoCoéco

Conformément aux articles R. 6325-54 et suivants du Code des transports, les aéroports d’une certaine envergure sont dotés d’une commission consultative économique (CoCoéco) au sein de laquelle sont notamment représentés l’exploitant de l’aérodrome, les compagnies aériennes et les représentants d’organisations professionnelles du transport aérien.

Au titre de ses compétences, la CoCoéco doit se réunir au moins une fois chaque année afin d’émettre un avis sur les modalités d’établissement et d’application des redevances pour services rendus et sur les programmes d’investissement de l’aérodrome considéré. Elle débat également des perspectives d’évolution de la qualité des services rendus.

Dans ce contexte réglementaire, et sur le fondement des dispositions de l’article L. 1264-1, 5 du Code des transports, l’Autorité de Régulation des Transports (ART) a décidé, le 18 janvier dernier, d’ouvrir une procédure d’instruction tendant à la recherche et à la constatation de manquements de la société concessionnaire Aéroports du Grand Ouest (AGO) à l’obligation de réunir la CoCoéco de l’aéroport de Nantes-Atlantique, conformément aux articles R. 6325-54 et suivants précités.

La libéralisation du fret ferroviaire et ses conséquences pour l’avenir

L’Assemblée nationale a publié, le 13 décembre 2023, le rapport d’une commission d’enquête sur la libéralisation du fret ferroviaire et ses conséquences pour l’avenir. Le rapport opère le constat d’une inversion de la place du fret ferroviaire dans l’activité de la SNCF et d’une accélération de ce phénomène. En 1938, première année d’existence de la SNCF, la part du transport de marchandises était légèrement majoritaire avec 26 milliards de tonnes-kilomètres de fret et 22 milliards de voyageurs-kilomètres. La prépondérance du fret ferroviaire a été notable durant les trente glorieuses avant de connaître un progressif décroît à compter des années 2000 qui ne cesse depuis lors de s’accentuer au profit du transport routier de marchandise.

Le rapport impute trois grandes causes à ce déclin progressif du fret ferroviaire :

  • En premier lieu, la désindustrialisation de la France. La part de la valeur ajoutée industrielle dans le produit intérieur brut (PIB) a été divisée par deux en cinquante ans et cette désindustrialisation diminue le volume de marchandises à transporter sur de longues distances au sein du territoire national ;
  • En second lieu, la nouvelle logique du zéro stock limite le fret ferroviaire. Le travail en flux tendu qui repose sur une étroite synchronisation entre la production et la demande réelle aboutit à privilégier le transport routier dès lors que le fret ferroviaire se révèle moins adapté à une telle logistique ;
  • En troisième lieu, le rapport estime que la libéralisation du fret a eu un effet délétère sur ce dernier notamment en raison d’une insuffisante préparation. La dérégulation du marché n’a pas été accompagnée par les politiques publiques qui auraient été nécessaires, permettant aux nouveaux entrants de se concentrer sur l’activité qui était la plus accessible et probablement la plus rentable, c’est-à-dire les trains complets, laissant les wagons isolés[1], qui représentaient une part importante du fret ferroviaire, à Fret SNCF. Or, l’opérateur historique s’est lui-même orienté vers une logique de rentabilité qui l’a conduit à délaisser les wagons isolés, ce qui a accentué davantage le déclin du fret ferroviaire.

La commission d’enquête a proposé une série de recommandations pour répondre à ces problématiques et revaloriser l’activité de fret ferroviaire. En substance, elle propose d’instituer un dialogue entre les pouvoirs publics et les entreprises pour opérer une revue des embranchements de fret ferroviaire et opérer une réorganisation stratégique des dessertes ferroviaires permettant de répondre au besoin des entreprises.

La commission propose également de « rétablir des conditions de concurrence entre le ferroviaire et le routier ». Elle estime effectivement que le transport routier échappe en partie aux péages et aux taxes, tout en générant « gratuitement » des externalités négatives très coûteuses pour la société. Plusieurs propositions visent donc à remédier à cette sorte de « concurrence déloyale » notamment en instaurant une écotaxe sur les poids lourds de l’ordre de 3 centimes d’euro par tonne et par kilomètre mais également à interdire la circulation des poids lourds de 44 tonnes, sauf transport combiné et véhicules zéro émission et le transport de nuit sauf pour le transport combiné.

 

[1] L’activité repose sur la constitution de trains à partir de l’assemblage de wagons individuels isolés provenant de différents clients. Ces wagons ont des origines et des activités différentes ce qui implique des activités de tri et d’assemblage supplémentaires. Le coût est donc significativement plus élevé que les trains complets qui n’implique que l’acheminement des wagons entre les plateformes de départ et d’arrivée.

Lyon-Turin : un dossier de financement État – Région Auvergne-Rhône-Alpes (AURA) finalisé et envoyé à l’Union européenne

L’État avait jusqu’au 30 janvier pour présenter à l’Union européenne un plan de financement à hauteur de 130 M€ pour les études relatives à la partie française de la liaison ferroviaire Lyon – Turin. Ce projet franco-italien doit notamment contribuer à la décarbonation du transport frontalier. Les études portent sur la définition du tracé du contournement ferroviaire de Lyon et des voies d’accès au tunnel sous les Alpes, en cours de creusement. Les études intègrent une réévaluation des conséquences environnementales et sociales car l’enjeu est de taille. Il s’agit de réduire le trafic de camions de 1 million par an.

En cours depuis trois ans, le projet en est au stade des études d’avant-projet détaillé (APD). Le projet étant transfrontalier, il doit être co-financé par l’Union européenne. Or, le financement européen était conditionné par un dossier de préfinancement par l’État et les collectivités territoriales à hauteur de 130 M€. Il manquait 20 M€ pour boucler le dossier.

L’État et la Région Auvergne-Rhône-Alpes ont chacun consenti un effort financier supplémentaire conséquent à hauteur de 90 M€, dans le cadre du contrat de plan État – Région, après de longues négociations conduites par la Préfète de région Fabienne Buccio pour l’État. Pour parvenir à cet accord, la Région AURA, représentée par son Président Laurent WAUQUIEZ, a obtenu de l’État un engagement supplémentaire sur le volet mobilité du Contrats de plan État-Région (CPER).

Concernant le CPER, la participation de l’État s’élèvera à 690 M€, dont 300 M€ au transport ferroviaire, 194 M€ au transport routier, 147 M€ aux services express régionaux métropolitains et 40 M€ aux véloroutes.

Contrats de vente directe d’électricité : avis de la Commission de Régulation de l’Energie sur le projet de décret précisant leur régime

Par une délibération en date du 18 janvier 2024, la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a rendu son avis sur le projet de décret que lui avait soumis le Gouvernement le 20 novembre 2023 afin de fixer « les modalités de l’autorisation dont les producteurs d’électricité concluant un contrat de vente directe d’électricité à des consommateurs finals ou à des à des gestionnaires de réseaux pour leurs pertes doivent être titulaires ». On rappellera que les contrats de vente directe d’électricité (en anglais « Power Purchase Agreement » ou « PPA ») entre un producteur et un consommateur ont été introduits en droit interne par la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (ci-après, APER). Si cette catégorie de contrats est désormais consacrée par le Code de l’énergie (art. L. 333-1 et L. 331-5), un texte réglementaire d’application, initialement annoncé pour septembre 2023, est encore attendu afin de préciser en particulier « le contenu du dossier de demande d’autorisation et […] les obligations en matière d’information des consommateurs d’électricité » pesant sur les producteurs (art. L. 333-1 III du Code de l’énergie).

En effet, aux termes de l’article L. 333-1 I du Code de l’énergie issu de la loi APER les producteurs concluant ce type de contrats doivent être titulaires d’une autorisation ministérielle, similaire à celle dont bénéficient les fournisseurs, sauf à « désigner un producteur ou un fournisseur tiers, déjà titulaire d’une telle autorisation, afin qu’il assume, par délégation, à l’égard des consommateurs finals, les obligations incombant aux fournisseurs d’électricité ». Tel est l’objet du projet de décret transmis par le Gouvernement et sur lequel la CRE s’est prononcée le 18 janvier dernier dans sa délibération ici commentée, dont on retiendra en particulier les éléments suivants.

D’abord, au sujet du contenu du dossier d’autorisation devant être déposé par le producteur, diverses modifications seraient apportées aux articles R. 333-1 à R. 333-9 du Code de l’énergie initialement applicables uniquement aux fournisseurs, en prévoyant notamment l’obligation de transmettre « les caractéristiques commerciales du projet, les caractéristiques techniques de la ou les installations de production, les clients avec lesquels le producteur envisage de signer un contrat de vente directe d’électricité ou les catégories de clients auxquelles il souhaite s’adresse », « les modalités de prise en compte des écarts entre la production effective de la ou des installations et les engagements de disponibilité et de production pris par le producteur auprès du consommateur ainsi que les contrats associés le cas échéant, à défaut de pouvoir transmettre le contrat visé à l’article L. 321-15 du code de l’énergie concernant le règlement des écarts » ou encore « une note précisant les caractéristiques techniques de la ou les installations de production sur lesquelles porte le contrat de vente directe d’électricité et notamment les informations relatives à la localisation, à la technologie de production, à la puissance installée et au productible ». La CRE se prononce favorablement sur la définition du contenu du dossier propre aux producteurs, jugeant les adaptations envisagées pertinentes.

Ensuite, le projet de décret créerait une définition du contrat de vente directe d’électricité comme étant « tout contrat ayant pour objet la vente d’électricité, d’un producteur à un consommateur final à des fins de consommation finale ou à un gestionnaire de réseaux pour ses pertes, sans cession ultérieure ».De cette définition la CRE tire deux enseignements relativement intéressants et faisant écho à des questionnements auxquels les collectivités et les praticiens en général n’ont pas manqué d’être confrontés depuis l’adoption de la loi APER.

D’une part, la CRE déduit de cette définition que les producteurs concluant des contrats purement financiers (« financial PPA » ou « virtual PPA »), dans lesquels « la totalité de la consommation demeure fournie par le fournisseur dans le cadre d’un contrat de fournitureclassique″ », ne sont pas concernés par le régime ainsi défini et par l’obligation de disposer de l’autorisation. La CRE s’estime favorable à cette exclusion compte tenu de la configuration contractuelle.

D’autre part, la CRE interprète cette définition comme confirmant la distinction entre la notion de contrat de vente directe d’électricité et celles d’autoconsommation collective ou collective étendue. En effet, un doute a pu naître sur ce point après la loi APER, au regard notamment du rejet de certaines propositions d’amendements qui avaient pourtant été soumises afin d’inscrire dans la loi le principe selon lequel les producteurs vendant de l’électricité dans le cadre d’opérations d’autoconsommation collective n’étaient pas soumis à l’obligation de disposer d’une autorisation, et plus globalement au régime applicable aux contrats de vente directe d’électricité. La CRE souligne dans sa délibération qu’en plus des règles distinctes posées par le code de l’énergie s’agissant de ce type d’opérations « une opération d’autoconsommation collective s’inscrit dans un cadre conventionnel multipartite, s’organisant autour d’une personne morale organisatrice à la différence d’un contrat de vente directe d’électricité au sens d’un PPA ». Si la CRE appelle de ses vœux une clarification encore plus explicite de la différence de nature entre le contrat de vente directe d’électricité et l’autoconsommation collective, elle fournit ici une interprétation éclairante de la distinction qu’il y a lieu de faire, à ses yeux, entre ces deux dispositifs.

Enfin, la CRE souligne néanmoins deux lacunes du projet de décret. La première concerne l’absence de précision fournie sur la répartition des obligations liées à la consommation d’un consommateur ayant signé un contrat de vente directe d’électricité et qui disposerait de plusieurs fournisseurs. En effet, dans ce cas, « les gestionnaires de réseau ne sont pas en mesure de distinguer quelle part de la consommation de chaque site affecter à chacun des fournisseurs, ce qui complexifie la répartition des obligations entre fournisseurs ». Les obligations ici visées sont celles en matière d’obligation de capacité ou encore de certificats d’économie d’énergie.

La seconde carence pointée par la CRE concerne l’absence de précision sur le dispositif de délégation de l’autorisation dont doivent sinon disposer les producteurs. En particulier, la CRE pointe l’absence d’anticipation des difficultés que ledit dispositif de délégation pourrait générer vis-à-vis des fournisseurs qui pourraient jouer le rôle de délégataire à l’égard des producteurs (en cas de refus d’endosser cette fonction notamment et s’agissant de l’articulation entre la durée des contrats de fourniture et la durée des contrats directs d’achat d’énergie).

Nouveaux tarifs réglementés de vente applicables au 1er février 2024

Par un ensemble de décisions et d’arrêtés en date du 29 janvier 2024, les nouveaux Tarifs Réglementés de Vente d’Electricité (TRVE) applicables à compter du 1er février 2024 ont été fixés. Ces différentes décisions et arrêtés font suite aux propositions formulées par la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) par une délibération du 18 janvier 2024.

Ont ainsi été fixés :

Ainsi que le Gouvernement a pu l’expliquer, la hausse des TRVE de presque 10 % qui intervient au 1er février 2024 résulte en réalité, non pas des nouveaux tarifs en tant que tels, mais de la fin progressive du bouclier tarifaire et de l’augmentation de la Taxe Intérieure sur la Consommation Finale d’Electricité.

Enfin, une autre décision du 29 janvier 2024 du Ministre de l’Economie a fixé les tarifs de cession de l’électricité aux entreprises locales de distribution (ci-après « ELD »). Pour rappel, les tarifs de cession permettent aux ELD de s’approvisionner auprès d’EDF en électricité pour la fourniture de leurs clients aux TRVE et, pour celles desservant moins de 100.000 clients, pour la fourniture de leurs pertes réseau. Les ELD bénéficient donc du mécanisme dérogatoire des « tarifs de cession » lorsqu’elles achètent de l’électricité pour la revendre aux TRVE et pour l’approvisionnement des pertes d’électricité sur leurs réseaux.

Ces nouveaux tarifs sont entrés en vigueur depuis le 1er février 2024.

Remaniement ministériel : par qui sont désormais exercées les compétences en matière d’énergie ?

Décret n° 2024-38 du 24 janvier 2024 relatif aux attributions du Ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

A la suite du remaniement du 11 janvier 2024 et à la suppression du ministère de la transition énergétique, les compétences en matière d’énergie sont désormais réparties entre le ministère de l’économie et le ministère de la transition écologique.

Le décret n° 2024-28 du 24 janvier 2024 fixe les attributions du Ministre en charge de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

A ce titre, le Ministre de l’économie dispose d’une compétence générale en matière de transition énergétique et d’énergie (Article 1 du décret n° 2024-28 du 24 janvier 2024), tandis que les compétences du Ministre de la transition écologique en matière d’énergie sont quant à elles circonscrites au climat et à l’efficacité énergétique (Article 1 du décret n° 2024-38 du 24 janvier 2024).

Toutefois, en cas de compétences communes, les décrets précités prévoient une association des deux ministres.

D’abord, le Ministre de l’Économie prépare et met en œuvre la politique du Gouvernement en matière de transition énergétique et d’énergie (Article 1 du décret n° 2024-28).

Au titre de la politique de l’énergie, le Ministre de l’Économie est chargé d’assurer :

  • la lutte contre le changement climatique et la promotion de la maîtrise de l’énergie et la transition énergétique, en association avec le Ministre de la transition écologique (11°, Article 2 du décret n° 2024-28) ;
  • la programmation pluriannuelle de l’énergie, l’évolution des réseaux de transport d’énergie, l’exploitation et le développement des filières énergétiques, les tarifs de l’énergie, la lutte contre la précarité énergétique et la politique de certificats d’économie d’énergie, à laquelle il associe le Ministre de la transition écologique (11°, Article 2 du décret n° 2024-28).

Au titre des actions de politique industrielle, de recherche et d’innovation, le Ministre de l’Économie est compétent concernant le secteur de l’énergie, y compris les marchés carbone, à laquelle il associe le Ministre de la transition écologique, et la décarbonation de l’industrie (13°, Article 2 du décret n° 2024-28).

Au titre des compétences du Ministre de la transition écologique, le Ministre de l’économie est simplement associé à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques en matière de développement de la chaleur renouvelable, de décarbonation des transports et des bâtiments, de promotion de l’efficacité énergétique, de sûreté et de sécurité nucléaires et de transition vers une économie circulaire (Article 4 du décret n° 2024-28). Le Ministre de la transition écologique met quant à lui en œuvre la politique du Gouvernement en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, d’efficacité énergétique, notamment la rénovation et la performance énergétiques des bâtiments (Article 1 et 2 du décret n° 2024-38). Il définit et met en œuvre, en y associant le Ministre de l’Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, la politique en matière de développement de la chaleur renouvelable ainsi que la politique en matière de décarbonation et d’électrification du secteur des transports routiers, en particulier, de conversion du parc automobile et de développement des infrastructures de recharge des véhicules électriques. Il est associé par le Ministre de l’Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique à l’élaboration de la politique de l’énergie, en particulier à la politique de certificats d’économie d’énergie et en matière de marchés carbone, afin, notamment, d’assurer la lutte contre le changement climatique et de promouvoir la transition énergétique.

Ensuite, le Ministre de l’Économie représente le Premier ministre en matière de planification énergétique, dans les négociations européennes et internationales sur l’énergie, en concertation avec le Ministre de l’Europe et des affaires étrangères, et veille à l’application des accords conclus (Article 1 du décret n° 2024-28).

En outre, dans le cadre de ses attributions, le Ministre de l’économie a autorité générale sur la direction générale de l’énergie et du climat (Article 5 du décret n° 2024-28) et sur le secrétariat général de l’administration centrale des ministères chargés de la transition écologique, de la cohésion des territoires et de la mer (Article 5 du décret n° 2024-28 ; Article 1 du décret n° 2008-680 du 9 juillet 2008 portant organisation de l’administration centrale des ministères chargés de la transition écologique, de la cohésion des territoires et de la mer). L’autorité sur la direction générale de l’énergie et du climat s’exerce en revanche conjointement avec le Ministre de la transition écologique en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, d’adaptation au changement climatique, d’efficacité énergétique, de décarbonation, de développement de la chaleur renouvelable, de qualité de l’air et de réglementation technique des véhicules.

 

De plus, le Ministre de l’économie exerce une autorité sur le Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies, laquelle est partagée avec le Ministre de la transition écologique pour l’exercice des compétences relatives à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, à l’adaptation au changement climatique, à la qualité de l’air et à la réglementation technique des véhicules (Article 5 du décret n° 2024-28).

 

Enfin, le Ministre de l’Economie dispose de la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature dans l’exercice des attributions relatives aux matières premières et aux mines, à la transition énergétique et à l’énergie, et de la direction générale de la prévention des risques pour l’exercice de ses attributions relatives à la transition énergétique et à l’énergie, aux matières premières et aux mines (Article 7 du décret n° 2024-28).

Majoration controversée des tarifs normaux de l’accise sur l’électricité à compter du 1er février 2024

Proposition de loi contre la surtaxation des prix de l’électricité :

Dans un contexte de crise énergétique accompagnée d’une hausse importante des prix de l’énergie, les lois de finances pour 2022 et 2023 étaient venues minorer l’accise sur l’électricité (anciennement appelée TICFE ou CSPE) jusqu’au 1er janvier 2024.

Dans ce prolongement, l’article 92 de la récente loi de finance pour 2024, dont la publication a été commentée dans notre précédente lettre d’actualités juridiques, a étendu jusqu’au 31 janvier 2025 ce dispositif, selon une accise sur l’électricité fixée à son niveau minimum.

Ces mêmes dispositions ont en parallèle autorisé le Gouvernement à majorer, par voie d’arrêté et avant le 31 janvier 2024, l’accise sur l’électricité pour les consommations relevant des tarifs normaux mentionnés à l’article L. 312-37 du Code des impositions sur les biens et les services (correspondant aux catégories « ménages et assimilés », « petites et moyennes entreprises », « hautes puissances »). Et ce, sans que ladite augmentation ne puisse être supérieure à 10 % TTC du tarif réglementé de vente d’électricité dit « tarif bleu ».

C’est ainsi que l’arrêté du 25 janvier 2024, publié au Journal Officiel en date du 30 janvier, modifie lesdits tarifs, pour leur appliquer une majoration uniforme de 20 euros par mégawattheure.

Les tarifs réglementés de vente Tarifs bleus sont donc, depuis le 1er février 2024 et jusqu’au 31 janvier 2025, respectivement les suivants :

  • Ménages et assimilés : 21 €/ MWh ;
  • Petites et moyennes entreprises : 20,5 €/ MWh ;
  • Haute puissance : 20,5 €/ MWh.

On notera toutefois qu’a été déposée le même jour, par divers députés du groupes socialistes et apparentés, une proposition de loi contre la surtaxation des prix de l’électricité, dont l’objectif est d’éviter un retour au niveau de taxation de l’électricité antérieur à la crise énergétique. Cette proposition de loi vise à :

  • Geler l’accise sur l’électricité, à son niveau actuel supprimant la possibilité pour le Gouvernement de la majorer par arrêté ministériel ci-avant décrite (Article 1er) ;
  • En « tirer les conséquences pour le budget de l’État ainsi que pour les départements et les communes qui perçoivent une fraction de cette ressource, par la mise en œuvre d’un gage de perte de recettes» (Article 2).

Nous ne manquerons pas de suivre le processus législatif de cette proposition.

Contrat de fourniture d’énergie à prix variable : le Médiateur National de l’Energie rappelle les conditions que doivent respecter les fournisseurs pour assurer une information transparente des consommateurs sur l’évolution des prix

Les offres de fourniture d’énergie à tarification dynamique, également appelées « offres à prix variables », sont définies par l’article L. 332-7 du Code de l’énergie comme celles reflétant « les variations de prix sur les marchés au comptant, y compris les marchés journaliers et infra-journaliers, susceptible d’être proposée par tout fournisseur aux clients équipés d’un dispositif de comptage mentionné à l’article L. 341-4 ». En tant qu’elles sont ainsi susceptibles de faire fluctuer le tarif de fourniture de manière récurrente, elles présentent un risque dont les consommateurs doivent être avertis et font donc l’objet, en vertu de l’article L.224-3 du Code de la consommation ainsi que de l’article L.332-7 du Code de l’énergie, d’un devoir d’information renforcé de la part des fournisseurs.

La CRE relevait d’ailleurs, dans une délibération en date du 20 mai 2021, que ces offres de fourniture d’énergie à tarification dynamique « comportent des risques économiques dont il est indispensable que les consommateurs soient pleinement conscients. Ces offres reflétant les prix de marché, elles exposent le consommateur à leurs fluctuations ce qui peut créer de graves difficultés si celui-ci ne peut y réagir, en particulier lors des situations de pics de prix exceptionnels ». Il n’est donc pas étonnant que ces offres aient généré des litiges entre les consommateurs et les fournisseurs d’énergie en cette période de crise énergétique. Dans la recommandation du Médiateur National de l’Energie (ci-après MNE) ici commentée, un consommateur, qui avait souscrit à une offre de fourniture de gaz et d’électricité à prix variable auprès de son fournisseur, conteste le prix du KWh facturé par ce dernier dans le cadre d’une de ses factures dont il était étonné du montant. Et si le fournisseur en cause indiquait sur l’espace client du requérant, un mois avant le début de leur facturation, les prix du kWh de gaz et d’électricité qui seraient facturés le mois suivant, ce dernier n’avait aucun moyen de savoir qu’il disposait de ces renseignements, le fournisseur ne l’en ayant pas informé, pas même par l’intermédiaire de ses conditions générales de vente.

Le MNE considère alors que cette information est insuffisante à double titre : en raison de l’absence d’information du consommateur sur les modalités selon lesquelles le fournisseur communiquait les données sur l’évolution mensuelle des prix mais également, dès lors qu’en toute état de cause, une simple information sur un espace client un mois avant la facturation est à son sens insuffisante. Il recommande ainsi audit fournisseur d’accorder un dédommagement (de 80 euros TTC) au requérant et de mettre en place, le cas échéant, un dispositif de facilité de paiement au profit de ce dernier afin qu’il puisse s’acquitter de sa dette. Au-delà, le MNE soulève que l’information livrée par ce fournisseur sur l’évolution du prix du kWh d’énergie ne satisfait pas les conditions d’une information transparente et lui recommande ainsi :

  • D’une part et en sus des informations déjà présentes sur l’espace client, d’informer ses clients par courriel ou par courrier (au choix du consommateur) un mois avant leur mise en application des prix du kWh d’énergie répercutés dans la facturation. Et ce, en accompagnant cette information du rappel de l’ancien prix applicable et du pourcentage d’évolution que représente le nouveau prix par rapport à l’ancien ;
  • D’autre part, de préciser, dans ses conditions générales de vente, les modalités selon lesquelles les prix du kWh sont portés à la connaissance de ses clients un mois avant qu’ils ne s’appliquent à leur facturation et, par voie de conséquence, de supprimer la mention « sans notification préalable du Client » qui y figure actuellement.

Avis favorable de la Commission de Régulation de l’Energie sur le projet de loi relatif à la souveraineté énergétique précisant le dispositif post-ARENH (Accès Régulé à l’Energie Nucléaire Historique)

Par une délibération en date du 1 janvier 2024, la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a rendu son avis sur le projet de loi relatif à la souveraineté énergétique soumis par le Ministre en charge de l’énergie.

Pour rappel, ce projet de loi s’articule autour de trois titres relatifs à l’information et à la protection des consommateurs d’électricité et de gaz, aux réformes visant à « garantir aux consommateurs l’accès aux coûts complets du mix et la sécurité d’approvisionnement » à l’échéance du dispositif de l’Accès Régulé à l’Energie Nucléaire Historique (ARENH) qui prendra fin le 31 décembre 2025 et à la réforme du régime des installations hydroélectriques concédées. Plus précisément, s’agissant du second titre relatif au dispositif post-ARENH, le projet de loi réserve un rôle accru au marché de gros de l’électricité et prévoit le versement aux consommateurs des revenus issus du parc nucléaire d’EDF si les prix sur le marché restent durablement élevés.

La CRE accueille favorablement ce nouveau dispositif et salue les garde-fous prévus par le projet de loi visant à garantir un fonctionnement efficace du marché sur lequel EDF est un acteur intégré détenant une position dominante. Parmi les mécanismes prévus, figurent notamment le renforcement du pouvoir de surveillance du régulateur et la mise en place d’obligations de transparence supplémentaires. Le projet de loi intègre sur ce point la plupart des propositions que la CRE a formulé conjointement avec l’Autorité de la concurrence (ADLC) à destination du Gouvernement fin 2023 pour la mise en place d’un régime post-ARENH qui prévoirait des garde-fous en matière de concurrence pour garantir un marché de l’électricité équitable, efficace et dynamique. Le Régulateur alerte d’ailleurs sur le fait que « le retrait des garde-fous inclus dans le projet de loi relatif à la souveraineté énergétique déséquilibrerait le texte, et porterait atteinte au bon fonctionnement des marchés de l’énergie au détriment des consommateurs et de l’atteinte des objectifs de décarbonation ».

En l’état, la CRE considère que le mécanisme envisagé fournit un cadre clair et lisible sur le long terme qui contribue à la stabilisation des prix. En effet, « en cas de période prolongée de prix de gros élevés consécutive à un choc exogène, il a vocation à protéger les consommateurs sans compromettre la capacité d’EDF à financer son parc nucléaire existant et à venir ». Elle préconise tout de même l’ajout de neuf dispositions pour s’assurer d’un bon fonctionnement du marché et une surveillance des acteurs adéquate.

Enfin, s’agissant de l’hydroélectricité, on rappellera que le projet de loi prévoit d’habiliter le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance pour réformer le régime des installations hydroélectriques. La CRE considère notamment que « la réforme du régime des installations hydroélectriques doit contribuer à la réalisation des investissements nécessaires au développement des actifs de production hydroélectrique et à la poursuite de leur exploitation, dans le respect des règles de concurrence ».

On rappellera à ce titre qu’à la fin de l’année 2023, un décret, commenté dans une de nos précédentes lettres d’actualités, a été publié afin de fixer un cadre aux investissements réalisés par les concessionnaires titulaires de concessions hydroélectriques prorogées en application de l’article L. 521-16 du Code de l’énergie.

Annulation partielle par le Conseil d’Etat de l’arrêté prévoyant une bonification au titre des Certificats d’Economies d’Energie pour le remplacement de chaudières au fioul

Arrêté du 22 octobre 2022 modifiant l’arrêté du 29 décembre 2014 relatif aux modalités d’application du dispositif des certificats d’économies d’énergie

Le 4 janvier 2024, le Conseil d’Etat a partiellement annulé l’arrêté du 22 octobre 2022 modifiant l’arrêté du 29 décembre 2014 relatif aux modalités d’application du dispositif des certificats d’économies d’énergie pour cause d’irrégularité de forme. Pour mémoire, l’arrêté du 22 octobre 2022 a notamment introduit un nouveau mécanisme de bonification au titre des Certificats d’Economies d’Energie (ci-après, CEE) lors du remplacement d’une chaudière au fioul par une pompe à chaleur, un système solaire combiné, une chaudière biomasse ou un raccordement à un réseau de chaleur alimenté majoritairement par des énergies renouvelables ou de récupération. Le syndicat Fédération Française des Combustibles, Carburants & Chauffages (FF3C), a formé une demande d’annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté devant le Conseil d’Etat.

Après avoir écarté plusieurs moyens présentés par le syndicat requérant à l’appui de sa demande, le Conseil d’Etat a considéré que les dispositions des I et III à VII de l’article 1er de l’arrêté en litige, qui prévoient expressément la bonification susvisée, tendent, au regard de leur finalité et leur portée, à développer l’utilisation des énergies renouvelables en réduisant les émissions de dioxyde de carbone. Il s’en suit que ces dispositions ont une incidence directe et significative sur l’environnement. Leur adoption aurait dès lors dû être précédée d’une consultation du public dans les conditions précisées par l’article L. 123-19 du Code de l’environnement.

Le Conseil d’Etat a ainsi fait droit à la demande d’annulation de l’arrêté en cause. Il a toutefois rejeté la demande d’annulation rétroactive de ces dispositions au regard de ses conséquences manifestement excessives sur les personnes éligibles à la délivrance des CEE liés à cette bonification, lesquelles pourraient être exposées au rejet de leur demande de certificat, à la réduction du volume de certificats correspondant à l’opération objet de la demande ou au retrait des certificats octroyés. De même, une annulation rétroactive aurait porté atteinte à l’intérêt général qui s’attache à la confiance des agents économiques dans le fonctionnement du dispositif des CEE.

L’annulation des I et III à VII de l’article 1er de l’arrêté du 22 octobre 2022 n’emporte donc d’effet rétroactif qu’à compter du 1er avril 2024.

Autorisation environnementale et entretien des milieux aquatiques : ajustements des textes règlementaires

Publié au Journal officiel du 1er février 2024, le décret n° 2024-62 a apporté diverses simplifications et clarifications sur le régime de l’autorisation environnementale et de l’entretien des cours d’eau.

S’agissant du régime de l’autorisation environnementale :

  • Il est précisé, au sein des dispositions applicables à l’autorisation environnementale, que lorsqu’un projet envisagé sur le territoire d’un parc naturel régional est soumis à cette autorisation et relève également de l’évaluation environnementale, le syndicat mixte en assurant la gestion est saisi pour avis sur l’étude d’impact. Cette exigence figurait déjà au sein de l’article R. 333-14 du Code de l’environnement ;
  • Pour l’autorisation des projets d’installations de production d’énergie éolienne, les critères de distance et de hauteur des aérogénérateurs sur lesquels le Ministre de l’aviation civile rend son avis sont fixés par arrêtés interministériels, dépendant de la localisation du projet à terre ou en mer ;

S’agissant de la règlementation sur les milieux aquatiques :

  • Des renvois aux dispositions d’autres Codes sont actualisés et précisés au sein de l’article R. 211-3 du Code de l’environnement ;
  • Pour les déclarations du caractère d’intérêt général d’une opération, il est renvoyé à la définition d’une modification substantielle fournie par les dispositions applicables à l’autorisation environnementale (R. 181-46) ;
  • Il est précisé que le curage ponctuel des cours d’eau non-domaniaux « ayant pour objectif de remédier à un dysfonctionnement du transport naturel des sédiments de nature à empêcher le libre écoulement des eaux ou à nuire au bon fonctionnement des milieux aquatiques ou de lutter contre l’eutrophisation est une intervention ayant uniquement pour objet la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques ».

Pesticides : annulation de chartes départementales d’engagement

Le Tribunal d’Orléans s’est prononcé sur la régularité de plusieurs chartes départementales d’engagement des utilisateurs de produits phytopharmaceutiques.

Aux termes de l’article L. 253-8 du Code rural et de la pêche maritime (CRPM), des mesures doivent être mises en œuvre pour protéger les riverains lorsque des produits phytopharmaceutiques sont utilisés à proximité des habitations. A cet égard, il est notamment prévu qu’une charte d’engagement à l’échelle départementale devant formaliser les mesures de protection des personnes habitant à proximité des zones d’épandage soit mise en place, les utilisateurs des produits phytopharmaceutiques s’engageant alors à respecter ladite charte. Ces chartes peuvent prévoir, sous conditions et contrôle du préfet, une réduction de la distance minimale d’utilisation des produits phytopharmaceutiques avec les habitations.

Deux moyens sont retenus par le juge de 1ère instance pour annuler certaines chartes :

  • L’illégalité de la notion de « zones d’habitation protégées » retenues par les chartes, dès lors que les préfets avaient irrégulièrement ajouté deux conditions tenant au caractère irrégulier ou discontinu de l’occupation d’un bâtiment, et, au caractère de « très grande propriété » et de « lieu très étendu » ;
  • Les modalités d’information des riverains préalablement à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques étaient trop imprécises. Il est notamment précisé par le juge que l’utilisation d’un gyrophare pendant l’utilisation ne constitue pas une information préalable à l’utilisation des produits phytopharmaceutique.

Loi de finances pour 2024 : focus sur les dispositions relatives aux budgets locaux et à la fiscalité environnementale

La loi de finances pour 2024 a été publiée au Journal officiel du 30 décembre 2023. Riche de 264 articles, ce focus reprend certaines de ses dispositions qui s’inscrivent plus particulièrement dans le cadre de la transition écologique.

I. Disposition visant à favoriser l’investissement « vert »

A. Création de budgets verts

En premier lieu, les articles 191 et 192 de la loi de finances pour 2024 introduisent de nouvelles dispositions relatives aux comptes administratifs et budget des collectivités territoriales, leurs groupements et des établissements publics locaux soumis à l’obligation de la tenue d’un rapport d’orientation budgétaire et d’un document d’orientation budgétaire de plus de 3 500 habitants. Ceux-ci :

  • Rendent obligatoire l’élaboration d’un état intitulé « impact du budget pour la transition écologique » annexé à leur compte administratif ou financier unique. Cet état doit présenter les « dépenses d’investissement qui, au sein du budget, contribuent négativement ou positivement à tout ou partie des objectifs de transition écologique de la France » définis par le droit de l’Union européenne. Cette mesure prend effet dès l’exercice 2024 ;
  • Donnent la possibilité de prévoir, à l’annexe de leur budget et de leur compte administratif ou financier un état intitulé « état des engagements financiers concourant à la transition écologique ». Cet état permet d’identifier la part d’endettement consacré à la couverture des dépenses d’investissement qui, au sein du budget, contribuent positivement à tout ou partie des objectifs environnementaux européens et indique également « la part cumulée de cette dette au sein de l’endettement global de la collectivité». Cette disposition vise à lever certains freins à l’emprunt et à faciliter le recours à l’endettement.

En second lieu, l’article 206 de la loi de finances pour 2024 étend à certains opérateurs de l’Etat l’obligation de réaliser un « budget vert ». Il impose en effet la réalisation, à partir de l’exercice comptable 2026, d’une synthèse de leurs travaux afin d’évaluer « l’ensemble de leurs dépenses ayant un impact favorable ou défavorable significatif sur l’environnement ».

B. Incitation à la production de « technologies essentielles à la transition énergétique »

Par son article 35, la loi de finances pour 2024 introduit un nouvel article 244 quater İ Code général des impôts, applicable aux crédits d’impôt calculés au titre de projets agréés jusqu’au 31 décembre 2025. Sur ce fondement, certaines entreprises industrielles et commerciales peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre de dépenses d’investissements « engagées pour leurs activités contribuant à la production de batteries, de panneaux solaires, d’éoliennes ou de pompes à chaleur ». Les dépenses d’investissement et les activités en question sont définies au sein de cet article.

Le taux du crédit d’impôt sera en principe et sauf exceptions égal à 20 % tandis que son montant total ne pourra excéder 150 millions d’euros par entreprise, des exceptions étant toutefois prévues.

 

II. Dispositions visant à soutenir l’action des collectivités territoriales et leurs groupements

A. Compensations relatives aux transferts de compétence et de pouvoirs de police

Les transferts de compétence résultant de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite loi 3DS, doivent faire l’objet d’une compensation financière au profit des collectivités territoriales concernées.

Ces transferts concernent, d’une part, la gestion des sites terrestres Natura 2000 au profit de la région (article 61 de la loi 3DS), la loi de finances pour 2024 ajustant le montant de ces compensations. D’autre part, ils concernent le transfert du réseau routier national aux départements, pour lesquels les modalités de la compensation financière sont détaillées à l’article 133 de la loi de finances pour 2024.

Par ailleurs, le transfert au maire ou au président de l’EPCI de la police de la publicité (article 17 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 dite « Climat et Résilience) fait elle aussi l’objet d’une compensation financière, versée aux collectivités territoriales concernées et à leurs groupements, calculée sur la base de la rémunération de certains agents et des moyens de fonctionnement associés, à condition que « le nombre total d’agents chargés de la compétence au 31 décembre 2023 ne soit pas inférieur à celui constaté au 31 décembre 2022 » (article 250 de la loi de finances pour 2024).

B. Autres modalités de financement

En premier lieu, conformément à l’article 135 de la loi de finances pour 2024 et à compter du 1er janvier 2025, les communes et EPCI dont l’exécutif a mis en place sur leur territoire une zone à faibles émissions mobilité (ZFE-m) se voient affecter « le produit des amendes forfaitaires et des amendes forfaitaires majorées perçues au titre de l’année écoulée sanctionnant les infractions aux règles de circulation » sanctionnant les infractions à ces ZFE-m.

En second lieu, la loi de finances pour 2024 réforme, par son article 243 la dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité et pour la valorisation des aménités rurales. À compter de 2024, une nouvelle dotation d’un montant de 100 millions d’euros, intitulée « dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales » sera attribuée aux communes rurales dont une partie significative du territoire comprend une aire protégée ou jouxte une aire marine protégée (article L. 2335-17 du Code général des collectivités territoriales). Sont considérées comme rurales, en métropole, les communes « caractérisées comme rurales, au sens de l’Institut national de la statistique et des études économiques » ; en collectivités d’outre-mer « les communes de moins de 10 000 habitants ». Il s’agit donc d’une extension du champ d’application de la dotation, même si les conditions d’éligibilité des communes doivent encore être fixées par décret.

 

III. Dispositions relatives à la préservation de l’environnement

A. Réforme des redevances des Agences de l’eau

Afin de financer le Plan eau du Gouvernement, l’article 101 de la loi de finances pour 2024 opère une réforme des redevances perçues par les agences de l’eau qui entrera en vigueur au 1er janvier 2025. Notamment :

  • Le régime juridique de la redevance sur la consommation d’eau potable est nouvellement défini à l’article L. 213-10-4 du Code de l’environnement, précisant notamment les personnes assujetties (abonnés au service d’eau potable), le fait générateur de la redevance (facturation du prix de l’eau consommée) et son assiette (volume d’eau facturé à la personne abonnée au service d’eau potable) ;
  • En ce qui concerne les redevances pour la performance des réseaux d’eau potable et la performance des systèmes d’assainissement, trois nouveaux articles sont créés (L. 213-10-5 à L. 213-10-7 du Code de l’environnement) afin d’encadrer leur application ;
  • Par ailleurs, le texte précise également que « constituent les redevances pour pollution de l’eau, d’une part, la redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique des industriels non raccordés au réseau public de collecte des eaux usées et, d’autre part, la redevance pour pollution de l’eau par les activités d’élevage». Ce nouveau champ d’application du régime de redevance pour pollution de l’eau s’appliquera, toujours à compter du 1er janvier 2025 et sauf exception prévue au I bis de l’article L. 213-10-2 du Code de l’environnement, à toute personne dont les activités entraînent le rejet dans le milieu naturel d’un des éléments de pollution mentionnés au IV du même article ;
  • Enfin, les montants, tarifs, taux ou plafonds utilisés pour le calcul des redevances des agences de l’eau seront indexés sur l’inflation.

B. Extension du régime du « forfait forestier »

L’article 6 de la loi de finances pour 2024 modifie le 1° de l’article 76 du Code général des impôts, qui concerne le bénéfice agricole imposable provenant des coupes de bois, aussi appelé « Forfait forestier » qu’un propriétaire forestier doit déclarer annuellement. Il s’agit d’un régime d’imposition spécifique visant à lisser l’imposition des bénéfices. Dans l’objectif de limiter le coût budgétaire des projets contribuant à la réduction d’émissions de gaz à effet de serre, la loi de finances ajoute ainsi un alinéa qui prévoit que ce régime s’appliquera désormais également « au bénéfice agricole provenant de la captation de carbone additionnelle réalisée dans le cadre de projets forestiers admis au label “ bas-carbone ” mentionné à l’article L. 121-2 du Code forestier et qui sont mis en œuvre pour assurer le boisement ou la reconstitution de peuplements forestiers dégradés ».

C. Évolution des règles en matière de taxation des déchets

a. Sur les conditions d’application de la taxe générale sur les activités polluantes

En premier lieu, conformément à l’article 102 de la loi de finances pour 2024, la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) est dorénavant due pour la réception des déchets radioactifs métalliques et par les exploitants d’une installation de stockage de ces déchets soumise à autorisation. La notion de déchets radioactifs métalliques, pour l’application de la TGAP, est précisée par le texte. À l’inverse, ces déchets bénéficient d’une exonération lorsqu’ils sont issus d’une valorisation de matière radioactive et réceptionnés au sein d’une installation de stockage autorisée au titre du régime des ICPE (1 octodecies de l’article 266 Code des douanes).

Les travaux parlementaires ont précisé que « l’objectif de l’article est ainsi de remplacer une part de la taxe sur les installations nucléaires de base, qui est une taxe de rendement, par une taxe incitative encourageant le recyclage des déchets métalliques radioactifs » (Rapport général déposé le 21 novembre 2023).

En deuxième lieu, l’article 103 de la loi de finances pour 2024 modifie également l’article 266 sexies du Code des douanes en ce qu’il exonère de la TGAP les réceptions de déchets en provenance d’un dépôt de déchets, identifié par arrêté ministériel, situé à moins de 100 mètres du trait de côte dans une zone soumise à érosion ou dans une zone de submersion marine potentielle. Cette mesure s’inscrit dans le cadre du Plan national de résorption des décharges littorales présentant des risques de relargage de déchets en mer et vise donc à inciter la réhabilitation et la sécurisation des décharges qui présentent un risque pour l’environnement.

En troisième lieu, la loi de finances pour 2024 étend le dispositif de réfaction concernant les déchets non-dangereux en outre-mer pour une année supplémentaire.

En quatrième lieu, la loi introduit également une majoration de ce tarif pour la réception de déchets non dangereux en installation de stockage « pour la fraction des déchets qui sont réceptionnés à compter de l’atteinte de l’objectif annuel » fixé par le préfet de Région.

b. Sur la mise en œuvre de la tarification incitative des déchets

L’article 150 de la loi de finances pour 2024 ajoute de nouvelles dispositions à l’article 1522 bis du Code général des impôts relatif à la part incitative de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), dans le but d’assouplir sa mise en œuvre.

La loi permet ainsi à un EPCI de ne pas instituer cette part incitative « sur le territoire de ses communes membres dont la proportion de logements situés dans des immeubles collectifs est supérieure à 20 % du nombre total de logements dans chacune de ces communes ». Toutefois, la part incitative est maintenue lorsque cette proportion excède 20% sur le territoire d’une commune, sauf délibération contraire de l’EPCI.

 

IV. S’adapter au dérèglement climatique : gestion des risques naturels

 A. Fonds de prévention des risques naturels majeurs

Au titre de l’article L. 561-1 du Code de l’environnement, l’État peut déclarer d’utilité publique l’expropriation des biens exposés à un risque prévisible de mouvements de terrain ou d’affaissement de terrain ; sous réserve que « les moyens de sauvegarde et de protection des populations s’avèrent plus coûteux que les indemnités d’expropriation ».

Depuis le 31 décembre 2023, l’article 227 de la loi de finances pour 2024 prévoit que les expropriations réalisées par les agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques pourront être déclarée d’utilité publique par l’Etat, dans les mêmes conditions.

En outre, le fonds de prévention des risques naturels majeurs (dit Fonds Barnier) peut s’appuyer sur ces agences lorsqu’il finance les indemnités allouées en cas d’expropriation ainsi que les dépenses liées à la limitation de l’accès et à la remise en état des terrains accueillant les biens exposés aux risques et ce, « afin de les confier après remise en état aux collectivités compétentes en matière d’urbanisme » (article L. 561-3 Code de l’environnement).

Enfin, il est ajouté au même article L. 561-3 du Code de l’environnement que le fonds « peut contribuer au financement des études et des actions de prévention des risques naturels majeurs dont les agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques […] assurent la maîtrise d’ouvrage. »

B. Prorogation de l’expérimentation « Mieux reconstruire après inondation »

Le dispositif expérimental « Mieux reconstruire après inondation » (MIRAPI), financé par le Fonds Barnier, est destiné aux communes « faisant l’objet, depuis moins d’un an, d’un arrêté portant reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle à la suite d’inondations » (loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021). Il a pour but d’améliorer la résilience aux inondations des biens à usage d’habitation sinistrés et couverts par un contrat d’assurance.

La loi de finances pour 2024 proroge de 2 ans cette expérimentation.

 

V. Favoriser la mobilité durable des salariés

Enfin, des mesures issues de la loi de finances pour 2024 interviennent en faveur de la mobilité des salariés.

L’article 29 prévoit ainsi que « l’avantage résultant de la prise en charge par l’employeur des frais de carburant ou des frais exposés pour l’alimentation de véhicules électriques, hybrides rechargeables ou hydrogène engagés par les salariés » sera exonéré de l’impôt sur le revenu pour une année supplémentaire (jusqu’en 2024). Rappelons que cette exonération ne peut excéder 700 € (900 € Outre-Mer) par an, dont 400 € (600 € Outre-Mer), au maximum pour les frais de carburant.

Pour l’année 2024 également, l’employeur pourra continuer à prendre en charge ces mêmes frais « engagés par ses salariés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail ». Cette prise en charge peut être cumulée, au titre des années 2022 à 2024, avec la prise en charge des frais de transports publics par l’employeur. Par ailleurs, cette dernière est aussi concernée par l’exonération de l’impôt sur le revenu si elle excède la prise en charge obligatoire de 50 % et dans la limite de 25 % du prix des titres d’abonnement.

Quant à l’article 37 de la loi de finances pour 2024, il proroge jusqu’au 31 décembre 2027 la réduction d’impôt sur les sociétés pour les entreprises qui mettent à disposition gratuite de leurs salariés une flotte de vélo pour leurs déplacements entre leur domicile et le lieu de travail et ce, dans la limite de 25 % du prix d’achat ou de la location de ladite flotte de vélos.

Enfin, peuvent désormais être financés par le produit du droit départemental de passage entre une île maritime et le continent l’aménagement et l’entretien « de pistes cyclables en site propre en revêtement ni cimenté, ni bitumé, permettant le développement de la pratique du vélo du quotidien ».