Intercommunalité
le 15/02/2024

Compétence du Président d’un Conseil de territoire pour répartir les crédits de la dotation d’investissement

CE, 22 décembre 2023, n° 464881

Pour rappel, la Métropole d’Aix-Marseille Provence est un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) issu de la fusion de six intercommunalités préexistantes, dont le périmètre a néanmoins perduré à travers les six « territoires » institués au sein de la Métropole (cf. décret n° 2015-1520 du 23 novembre 2015 portant fixation des limites des territoires de la métropole d’Aix-Marseille Provence). On précisera immédiatement que cette organisation a été largement modifiée par la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, qui est venue amender le régime juridique de la Métropole en supprimant les dispositions portant sur les territoires (cf. article 181 de cette loi). Les conseils de territoire étaient composés de conseillers de la Métropole des communes de son périmètre et étaient présidés par un président élu par le conseil. Les compétences de ces conseils de territoire étaient financées par une dotation de gestion.

Cette dotation de gestion comprenait une dotation de fonctionnement et une dotation d’investissement. Les sommes destinées respectivement aux dotations de fonctionnement et aux dotations d’investissement étaient calculées et réparties entre les conseils de territoire en application de critères déterminés par le Conseil de la Métropole, tenant compte des caractéristiques propres de chaque territoire, notamment la population et les attributions exercées. C’est dans ces conditions qu’un des six territoires s’est vu attribuer une dotation de gestion et que son président a procédé à la répartition des deniers métropolitains entre les communes du territoire.

Toutefois, cette répartition a été contestée par une des communes composant le territoire. Si par un jugement n° 1706788 en date du 3 mars 2020, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de la commune, la Cour administrative d’appel de Marseille a, quant à elle, fait droit à sa demande en jugeant que si le président du conseil de territoire était compétent pour engager, liquider et ordonnancer les dépenses inscrites à l’état spécial, il ne disposait, en revanche, d’aucune compétence pour définir des critères de répartition par communes des crédits votées.

Saisi de cette affaire, le Conseil d’Etat a, quant à lui, jugé que le président du Conseil de Territoire était compétent, en sa qualité d’ordonnateur, pour répartir les crédits mis à sa disposition dans la limite prévue par les dispositions de l’article L. 5218-8-5 du CGCT.

Pour rappel, l’article L. 5218-8-5 du CGCT disposait, dans sa rédaction alors applicable, que :

« Le président du conseil de territoire engage, liquide et ordonnance les dépenses inscrites à l’état spécial lorsque celui-ci est devenu exécutoire. […]. Si l’assemblée délibérante décide de voter l’état spécial par article, le président du conseil de territoire peut effectuer des virements d’article à article à l’intérieur du même chapitre dans la limite du cinquième de la dotation initiale du chapitre de l’état spécial. Au-delà, le virement fait l’objet d’une décision conjointe du président du conseil de la métropole et du président du conseil de territoire ».

Le Conseil d’Etat a, ainsi, considéré que la Cour administrative d’appel de Marseille, en jugeant que le président du conseil de territoire n’était pas compétent pour définir des critères de répartition des crédits de la dotation d’investissement entre les communes du territoire, sans rechercher si les modifications décidées par le président du conseil de territoire excédaient cette limite posée par l’article L. 5218-8-5 du CGCT, à savoir l’impossibilité pour le président du territoire de procéder à des virements d’article à article au sein d’un même chapitre au-delà du cinquième de la dotation initiale du chapitre dans le cas où l’état spécial est voté par article, avait commis une erreur de droit.

Le Conseil d’Etat a, par ailleurs, renvoyé le dossier à la Cour administrative d’appel de Marseille.