Expropriation : précisions sur la nécessité ou non d’annexer le document d’arpentage à l’arrêté de cessibilité

Par une décision en date du 28 octobre 2021, le Conseil d’Etat a précisé les exigences en matière d’arpentage préalables à un arrêté de cessibilité. 

Le Conseil d’Etat a d’abord rappelé son considérant de principe de sa décision du 9 juillet 2018 (CE, 9 juillet 2018, n° 406696), selon lequel : « Lorsqu’un arrêté de cessibilité déclare cessibles des parties de parcelles, ce qui implique de modifier les limites des terrains concernés, un document d’arpentage doit être préalablement réalisé afin que l’arrêté de cessibilité désigne les parcelles concernées conformément à leur numérotation issue de ce document ; que le défaut d’accomplissement de cette obligation, qui constitue alors une garantie pour les propriétaires concernés par la procédure d’expropriation, entache d’irrégularité l’arrêté de cessibilité ».

Selon ce dernier état de la jurisprudence, le Conseil d’Etat a considéré que lorsque sont déclarées cessibles des parties de parcelles – impliquant de modifier les limites des terrains en litige -, un document d’arpentage doit être réalisé antérieurement à l’arrêté de cessibilité, et ce, afin que l’arrêté désigne les parcelles concernées conformément à leur nouvelle désignation, telle qu’elle résulte de ce document.

Toutefois, le Conseil d’Etat est venu ici préciser, après avoir rappelé le considérant de principe précité, qu’il n’en résulte pas pour autant que « le procès-verbal d’arpentage doive être joint à l’arrêté de cessibilité dès lors que les annexes de cet arrêté, établies d’après un document d’arpentage, délimitent avec précision la fraction expropriée de la parcelle dans sa superficie et indiquent les désignations cadastrales de cette parcelle, ainsi que sa nature, sa contenance et sa situation ».

Cette dernière décision ne remet donc pas en cause le principe selon lequel le document d’arpentage doit bien être réalisé avant l’arrêté de cessibilité.

Mais, en l’espèce, la problématique résidait dans le fait que seul l’état parcellaire avait été joint à l’arrêté de cessibilité et non le procès-verbal d’arpentage. Autrement posé, la question était de savoir si le document d’arpentage doit obligatoirement être annexé à l’arrêté de cessibilité.

Le Conseil d’Etat a jugé que la Cour n’avait commis aucune erreur de droit en relevant que la différence de surface mentionnée dans le cadre de l’enquête parcellaire et celle mentionnée dans le tableau joint à l’arrêté de cessibilité (différence de 8 m²) n’était pas de nature à induire les propriétaires de la parcelle en litige en erreur quant à la nature et aux conséquences de l’opération, compte tenu de la faible différence de métrage et de l’indication exacte des références cadastrales.

En effet, le Conseil d’Etat a considéré que l’état parcellaire annexé mentionnait bien la situation, la contenance et la désignation cadastrale du terrain initial, ainsi que l’emprise à acquérir, le surplus restant, et précisait aussi la superficie de la surface à acquérir et celle du surplus restant. Ces annexes à l’arrêté de cessibilité avaient donc été établies en considération du document d’arpentage, lequel n’avait, lui, pas obligatoirement à être joint à l’arrêté de cessibilité.

Motivation d’une décision de préemption : éviter les listes à la Prévert

Par un arrêt en date du 9 février 2022, la Cour administrative d’appel de Marseille a censuré une décision de préemption dont la multiplicité des objets invoqués ne caractérisait pas un projet réel à la date à laquelle elle a été prise. 

En l’espèce, le Maire de Roquecourbe-Minervois a décidé de préempter un ensemble immobilier à usage de cave viticole appartenant à une société coopérative agricole.

Les acquéreurs évincés ont saisi le Tribunal administratif de Montpellier, lequel a, par un jugement en date du 31 décembre 2019, annulé la décision de préemption du Maire.

La Commune a donc interjeté appel devant la Cour administrative d’appel de Marseille, laquelle a rejeté la requête de la Commune.

Selon la Cour, la Commune ne justifiait pas, à la date de la décision de préemption, de la réalité d’un projet d’action ou d’opération d’aménagement au sens des dispositions de l’article L. 300-1 du Code de l’urbanisme.

Plus précisément ici, la Cour a reproché à la Commune la « multiplicité des objets invoqués » dans sa décision de préemption, cette dernière ayant pour objet : « la mise en place et la sauvegarde du patrimoine historique de la commune[…], la mise en œuvre du développement touristique par la création d’espaces culturels, musée de la vigne et du vin et de manufacture textile[…], le maintien et l’extension des activités économiques liées au produit du terroir par location de la cuverie existante, l’aménagement urbain de cœur du village afin de développer les activités de loisir (salles des fêtes pouvant recevoir des manifestations culturelles à vocation intercommunales aux normes d’accessibilité exigées par la loi – parking désengorgeant les rues du village – salles réservées aux associations culturelles et sportives du village[…], l’aménagement de locaux municipaux adaptés et fonctionnels, notamment pour les services techniques. La superficie préemptée permet d’envisager la réalisation des projets urbains ci-dessus sur plusieurs années[…].La priorité sera donnée dès 2019 à l’aménagement d’une salle des fêtes aux normes[…].de locaux municipaux fonctionnels pour les services techniques et d’un parking avec matérialisation de places adaptées[…] ».

La Cour a donc étudié, pour apprécier la réalité d’un projet à la date de la décision querellée, et en particulier l’existence d’un projet suffisamment précis et identifié, la cohérence d’ensemble de la motivation de la décision de préemption.

Le préfet n’est pas tenu de recueillir l’avis de la Commission régionale du patrimoine et de l’architecture pour rejeter une demande de radiation de l’inventaire des monuments historiques

Par une décision en date du 7 mars dernier, sur le fondement du principe du parallélisme des formes, le Conseil d’État a rappelé que le préfet de région n’était pas tenu de recueillir l’avis de la Commission régionale du patrimoine et de l’architecture pour refuser de faire droit à une demande de radiation, dès lors d’un monument de l’inventaire des monuments historiques.

Dans cette affaire, par un premier jugement en date du 14 mars 2017, le Tribunal administratif d’Amiens avait annulé la décision par laquelle le Préfet de la région Picardie avait refusé de faire droit à la demande de la société requérante de radier un monticule de terre se trouvant sur la commune de Moulin-sous-Touvent (Oise), inscrit à l’inventaire des monuments historiques.

Suite à un nouvel examen de la demande, sur injonction du Tribunal, le Préfet de la région Picardie a, de nouveau, rejeté la demande de radiation. Cette nouvelle décision de refus a fait l’objet d’une annulation par un jugement du Tribunal administratif d’Amiens du 31 décembre 2019, confirmé par la Cour administrative d’appel de Douai par un arrêt en date du 1er décembre 2020.

C’est dans ce contexte que le Conseil d’État, saisi par la Ministre de la Culture, a été amené à se prononcer sur la nécessité, pour le préfet, de recueillir l’avis de la commission régionale du patrimoine et de l’architecture lorsqu’il entend refuser de faire droit à une demande de radiation d’un immeuble inscrit à l’inventaire des monuments historiques.

A ce titre, il convient de rappeler qu’aux termes des dispositions de l’article R. 621-54 du Code du patrimoine :

« L’inscription d’un immeuble au titre des monuments historiques est prononcée par arrêté du préfet de région après avis de la commission régionale du patrimoine et de l’architecture réunie en formation plénière […] ».

Aux termes des dispositions de l’article R. 621-59 du même Code :

« La radiation de l’inscription d’un immeuble est prononcée et notifiée selon la même procédure et dans les mêmes formes que l’inscription ».

Ainsi, après avoir rappelé que si la décision d’inscrire ou de radier un immeuble au titre des monuments historiques suppose l’intervention de la Commission régionale du patrimoine et de l’architecture, le Conseil d’État a indiqué que tel n’était pas le cas de la décision refusant de faire droit à une demande de radiation. A ce titre, il a indiqué l’article R. 621-59 du Code du patrimoine prévoit uniquement la consultation de cette commission en cas de décision de radiation et non en cas de rejet de la demande.

Le Conseil d’État a donc considéré qu’en jugeant que le préfet de région devait recueillir l’avis de la Commission régionale du patrimoine et de l’architecture même en cas de rejet de la demande de radiation, la Cour administrative d’appel de Douai avait commis une erreur de droit.

Confirmation de l’annulation du contrat d’exploitation des services ferroviaires régionaux conclu entre la Région PACA et SNCF Mobilités en raison de l’illégalité de ses clauses financières

En 2006, la Région PACA et SNCF Mobilités (ancien nom de SNCF Voyageurs) ont conclu un contrat d’exploitation des services ferroviaires régionaux pour 10 ans. Dans le cadre de leurs relations financières, SNCF Mobilités a adressé à la Région son devis pour l’exercice 2016 ainsi que le montant de la contribution financière régionale. Estimant le niveau de charges identifié par SNCF Mobilités trop élevé et insuffisamment justifié, le conseil régional a arrêté une contribution prévisionnelle inférieure à celle retenue par l’exploitant.

SNCF Mobilités a donc saisi le Tribunal administratif de Marseille, qui avait alors annulé le contrat au motif que ses clauses financières, qui instituent un mécanisme d’évaluation forfaitaire des charges, ne permettaient pas à la Région de s’assurer de la juste évaluation de la compensation de service public et seraient donc susceptibles d’entraîner le versement d’une aide d’État (TA Marseille, 15 octobre 2019, n° 1705056).

C’est dans ces conditions que la Cour administrative d’appel de Marseille a été saisie du litige par SNCF Mobilités.

Appelée à se prononcer à son tour sur la conformité des clauses financières du contrat, celle-ci rappelle dans un premier temps le principe posé par le règlement (CE) n° 1370/2007 du 23 octobre 2007 (dit OSP), aux termes duquel toute compensation liée à un contrat de service public ne peut excéder ce qui est nécessaire afin de couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations du service, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable.

Une surcompensation doit alors être assimilée à une aide d’État et faire, à ce titre, l’objet d’une notification préalable à la Commission européenne. Dès lors, la Cour précise que pour assurer la conformité des clauses financières du contrat au droit de l’Union européenne, le montant de la compensation financière versée à l’exploitant doit être établi de façon objective et transparente.

Or, au cas présent, la Cour juge que le mécanisme de forfait de charges pratiqué par SNCF Mobilités ne permet pas une identification objective et transparente des charges liées aux obligations de service public. En effet, sans condamner de manière générale la détermination forfaitaire des charges, elle considère qu’en l’espèce, le mécanisme utilisé par SNCF Mobilités comporte un risque induit de surcompensation en raison de l’absence de séparation comptable des différentes activités de l’exploitant, et plus largement, du défaut de transparence financière. 

De fait, la Région n’avait pas d’autre choix que d’écarter les stipulations financières du contrat, sauf à engager sa responsabilité en cas de condamnation de l’État par la Cour de justice de l’Union européenne pour aide publique illégale.

Ainsi, à l’instar des premiers juges, la Cour administrative d’appel considère que la contribution régionale constitue une aide publique non notifiée. Partant, cette surcompensation est une cause d’illicéité du contrat, justifiant son annulation. Il s’agirait d’une décision très importante pour l’ensemble des conventions TER monopolistiques, si elle devenait définitive.

Les projets passant en dessous des seuils de la nomenclature de l’évaluation environnementale pourront tout de même faire l’objet d’une telle procédure

Pour rappel, par une décision du 15 avril 2021, n° 425424, le Conseil d’Etat avait censuré une partie du décret n° 2018-435 du 4 juin 2018 « en tant qu’il ne prévoit pas de dispositions permettant qu’un projet susceptible d’avoir une incidence notable sur l’environnement pour d’autres caractérise que sa dimension puisse être soumis à une évaluation environnementale ».

Ce faisant, le Conseil d’Etat avait enjoint au Premier ministre de réviser toute la nomenclature des projets soumis à évaluation environnementale pour qu’aucun « projet susceptible d’avoir une incidence notable sur l’environnement ou la santé humaine » ne soit automatiquement dispensé d’évaluation environnementale.

Il était ainsi demandé la rédaction d’un décret instaurant une « clause filet », tel que cela est imposé par la directive du 13 décembre 2021. Plus concrètement, cette clause filet doit permettre d’éviter que, du seul fait de sa dimension, un projet puisse être dispensé automatiquement de toute évaluation environnementale, alors que, même en-dessous des seuils, des projets peuvent tout de même avoir une incidence notable sur l’environnement et la santé humaine.

Pour répondre à cette injonction, a été publié un projet de décret qui a été soumis à la consultation du public du 20 janvier 2022 au 10 février 2022. Celui-ci nous a permis d’en savoir un peu plus sur la forme que prendra concrètement cette « clause filet ».

Le projet de décret créé un article R. 122-2-1 prévoyant que l’autorité compétente pour autoriser ou recevoir la déclaration d’un projet soumet à examen au cas par cas tout projet situé en-deçà des seuils de la nomenclature annexée à l’article R. 122-2, mais qui lui apparaît toutefois susceptible d’avoir des incidences sur l’environnements.

La décision de soumettre le projet au cas par cas revient à l’autorité compétente en charge de la première procédure d’autorisation du projet, dans les 15 jours à compter du dépôt du dossier d’autorisation ou de déclaration. Mais il faut noter en outre que le projet de décret prévoit également la faculté pour le porteur de projet de saisir, de sa propre initiative, l’autorité chargée de l’examen au cas par cas.

Il conviendra donc de surveiller de près la date de publication de ce décret, et d’être très vigilant, aussi bien pour les autorités compétentes en matière d’autorisation (loi sur l’eau / ICPE / autorisation d’urbanisme / etc.), que pour les porteurs de projet, dans la mise en œuvre de ces nouvelles dispositions qui ne manqueront pas de créer de nouvelles problématiques contentieuses.

Arrêté relatif à l’indemnisation des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques

Pris en application de l’article R. 1613-12 du Code général des collectivités territoriales qui précise les modalités de calcul du montant total maximum de la dotation de solidarité en faveur de l’équipement pouvant être alloué aux collectivités territoriales et à leurs groupements touchés par des évènements climatiques ou géologiques (DSEC) lorsque le montant des dégâts éligibles est inférieur à six millions d’euros hors taxes, l’arrêté du 7 février 2022 fixe le taux à appliquer au produit du montant total des dégâts éligibles à indemnisation pour déterminer le montant total maximum de la DSEC. Cette dotation, instaurée par l’article 160 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 et prévue à l’article L. 1613-6 du Code général des collectivités territoriales, est issue de la fusion des deux fonds de soutien aux collectivités territoriales touchées par des intempéries de grande ampleur : le fonds catastrophes naturelles et le fonds calamités publiques.

Il convient de souligner d’une part qu’au sens des articles L. 1613-6 et R. 1613-6 du CGCT, est considéré comme un événement climatique ou géologique tout événement localisé survenu en métropole qui cause des dégâts d’un montant total supérieur à 150.000 euros hors taxes aux biens qui sont énumérés à l’article R. 1613-4 du CGCT (infrastructures routières et ouvrages d’art, digues, réseaux de distribution et d’assainissement de l’eau, stations d’épuration, parcs, jardins, …) et qui appartiennent aux collectivités territoriales ou groupements.

D’autre part, seuls les travaux de réparation des dégâts causés à ces biens et les travaux urgents de restauration des capacités d’écoulement des cours d’eau, dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par la collectivité ou le groupement intéressé, peuvent donner lieu à l’attribution de subvention par la DSEC (article R. 1613-5 du CGCT).

Ainsi, en application de l’arrêté du 7 février 2022, pour déterminer le montant total maximum de la DSEC lorsque le montant des dégâts éligibles est inférieur à six millions d’euros hors taxe, le taux de référence est de 40 % dudit montant.

L’arrêté du 16 septembre 2008 relatif au Fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des catastrophes naturelles est par ailleurs abrogé. Cet arrêté était pris sur le fondement de l’article R. 1613-7 du CGCT dans sa rédaction antérieure à la réforme des procédures d’indemnisation opérée par le décret n° 2015-693 du 18 juin 2015.

Etendue de l’obligation de collecter des déchets non ménagers

La Cour administrative d’appel de Lyon s’est prononcée sur l’existence d’une obligation pour une communauté d’agglomération, compétente en matière de collecte et de traitement des déchets, d’assurer la collecte des déchets non ménagers d’un établissement médical.

En l’espèce, l’établissement médical, géré par une association, a demandé au président de la communauté d’agglomération dans le territoire duquel il se trouvait, le rétablissement du service public de collecte des déchets ménagers sur le site de cet établissement ou, à défaut, l’indemnisation du préjudice financier subi du fait de l’interruption du service de ramassage de ses déchets. Saisi par l’association du refus opposé par le président à l’une et l’autre de ces demandes, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions indemnitaires de l’association, et celle-ci a donc relevé appel du jugement. 

La Cour administrative d’appel de Lyon a jugé que la suppression du service public de ramassage des déchets sur le site de l’établissement de santé n’est pas constitutive, en l’espèce, d’une faute de nature à engager la responsabilité de la communauté d’agglomération à son égard.

Précisément, l’arrêt rappelle que l’obligation pour les communes, la métropole de Lyon ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents de collecter et de traiter des déchets prévue à l’article L. 2224-13 du CGCT (Code général des collectivités territoriale)s s’étend, en application des articles L. 2224-14 et R. 2224-23 du CGCT et R. 541-8 du Code de l’environnement, aux « déchets non ménagers que ces collectivités peuvent, eu égard à leurs caractéristiques et aux quantités produites, collecter et traiter sans sujétions techniques particulières ».

La Cour relève d’abord que les déchets produits par l’établissement ne peuvent être considérés comme des déchets ménagers. Ainsi, pour que la collectivité publique soit tenue de procéder à la collecte et au traitement des déchets non-ménagers de l’établissement, il est nécessaire d’établir l’absence de sujétion technique particulière eu égard à leurs caractéristiques et aux quantités produites.

Or, la Cour a jugé qu’en l’espèce, l’association requérante n’a pas démontré que ces déchets peuvent être collectés et traités par le service sans sujétion technique particulière, et ce même si l’association assure que les déchets en litige sont exclusifs des déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés (DASRI) produits sur le site, dont la collecte et l’élimination sont confiées à une société spécialisée, et même si le volume moyen théorique quotidien de déchets produit, rapporté au nombre de personne présente sur le site, serait inférieur à la moyenne nationale. 

La Cour souligne par ailleurs que la circonstance selon laquelle l’association s’est acquittée de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) pour l’année en question, « est sans incidence dès lors que cette taxe, qui relève d’un régime d’imposition, n’est pas la contrepartie financière de l’utilisation du service ».

La Cour a donc rejeté la requête de l’association.

Décharges : aide aux collectivités et préconisations

1°) Le 25 février 2022, un rapport d’information parlementaire a été déposé au Sénat sur la question des décharges sauvages et plus particulièrement du rôle des élus locaux. Ce rapport d’information a formulé 9 préconisations :

  • « Légiférer pour clarifier l’usage des pièges photographiques et caméras de chasse ; […]
  • Mettre en place une amende forfaitaire délictuelle en cas de décharges sauvages afin de permettre une sanction pénale plus rapide ; […]
  • Contraindre les professionnels du bâtiment chargés d’éliminer les déchets de présenter au commanditaire des travaux une preuve de dépôt en déchetterie ; […]
  • S’appuyer davantage sur les gardes-champêtres dans la lutte contre les décharges sauvages ; […]
  • Réfléchir à l’échelon d’intervention le plus pertinent entre la commune et l’intercommunalité ; […]
  • Renforcer la coopération entre les maires et le parquet dans la sanction des auteurs de décharges sauvages (information, coordination, notification au maire des suites données à leurs signalements) ; […]
  • Encourager les particuliers victimes d’un dépôt sauvage sur un terrain privé à déposer plainte, voire à se constituer partie civile ; […]
  • Mener des actions de prévention et de sensibilisation auprès des professionnels et des particuliers, notamment au travers des Opérations Territoire Propre (OTP) ; […]
  • Instaurer un partenariat entre les communes et les chasseurs et/ou les associations de chasse, pour prévenir les dépôts sauvages ».

2°) S’agissant des décharges situées en zone littorale, le Gouvernement a en outre annoncé le 18 février 2022 le lancement de son Plan national de résorption des décharges littorales qui identifie 55 décharges qui bénéficieront d’un soutien afin d’obtenir leur résorption d’ici dix ans. Parmi ces décharges, trois sites ont été identifiés comme prioritaires : la décharge de Dollemard (76), de l’Anse Charpentier (972) et de Fouras Pré-Magnou (17). Les collectivités bénéficiaires pourront solliciter le CEREMA qui apportera gratuitement son expertise dans les projets de résorption, et l’Etat financera la réalisation des études et travaux à hauteur de 50 % des coûts de l’opération, via un fonds de l’ADEME qui sera doté de 30 millions d’euros pour l’année 2022.

Ces décharges sont situées à moins de 100 mètres du trait de côte et, en raison de l’érosion dudit trait de côte notamment, présentent en effet de forts risques de déversement dans la mer ou l’océan. Il ne s’agit pas de décharges sauvages proprement dit, mais plutôt d’anciennes décharges dont la trace a pu être « perdue ». Le gouvernement précise également que la liste de ces 55 décharges n’est pas exhaustive et a vocation à évoluer, en prenant notamment en compte les décharges littorales abandonnées qui seraient signalées au Préfet par les associations et les maires.

Déchets : refus de transmission d’une QPC sur la vente sans conditionnement plastique des fruits et légumes

CE, 28 février 2022, Syndicat Alliance plasturgie et composites du futur (Plastalliance), n° 458440 

 

Par deux décisions du 28 février 2022, le Conseil d’Etat a rejeté, pour défaut de caractère sérieux des griefs invoqués, les demandes de transmission de questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) relatives à la conformité avec les normes constitutionnelles de l’interdiction de présenter les fruits et légumes à la vente avec conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique.

Il faut rappeler tout d’abord que l’article 77 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi AGEC, dont le contenu figure aujourd’hui à l’article L. 541-15-10 du Code de l’environnement, régit l’obligation pour les commerces de détail d’exposer les fruits et légumes frais non transformés sans « conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique » à compter du 1er janvier 2022. La portée de cette interdiction a été précisée par le décret n° 2021-1318 du 8 octobre 2021 relatif à l’obligation de présenter à la vente des fruits et légumes frais non transformés sans conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique, qui faisait justement l’objet de la contestation par les requérantes.

Il a été soutenu dans les recours que cette interdiction méconnaissait plusieurs normes constitutionnelles, ce qu’écarte le Conseil d’Etat.

  • S’agissant tout d’abord des griefs tirés de la méconnaissance du préambule de la Charte de l’environnement et de son article 6, relatif à la promotion du développement durable, le Conseil d’Etat indique que ceux-ci n’instituent pas un droit ou une liberté que la Constitution garantit et qu’ils ne peuvent donc pas être invoqués dans le cadre d’une QPC. En outre, selon le juge, l’interdiction mise en place ayant un caractère pérenne, elle n’est pas fondée sur le principe de précaution;
  • Les requérantes soutenaient ensuite que cette interdiction n’aurait pas d’effet sur la réduction du plastique dès lors que des emballages qui pourront toujours entourer les produits jusqu’à leur livraison aux commerces de détail et qu’elle aurait au contraire pour effet d’accroitre le gaspillage alimentaire. Le Conseil d’Etat relève toutefois que cette mesure poursuit un objectif de réduction du plastique et de protection de l’environnement dès lors que les livraisons pourront avoir lieu sans emballage ou qu’un déconditionnement pourrait être instauré dans le commerce. Dès lors, ne présentent pas un caractère sérieux les griefs tirés de la méconnaissance du droit à un environnement sain, ni du devoir de prendre part à la préservation de l’environnement, ni de l’objectif à valeur constitutionnelle de protection de l’environnement;
  • Les requérantes invoquaient également un grief tiré du 11ème alinéa du préambule de la Constitution de 1946 relatif à la protection de la santé dès lors que les nouveaux conditionnements pourraient avoir un effet néfaste sur la santé. Le Conseil d’Etat considère que ce grief n’est pas sérieux dès lors que le texte n’impose pas de recours à un conditionnement de substitution ;
  • Enfin, cette interdiction ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre dès lors qu’elle est lien avec les objectifs de valeur constitutionnelle de protection de la santé et de l’environnement poursuivis, que des dérogations à cette interdiction sont prévues et que les professionnels du secteur ont eu près de deux ans pour s’adapter.

ICPE et sites et sols pollués : définition des modalités de certification des entreprises

Il est prévu par les textes que des entreprises certifiées, ou de compétences équivalentes, doivent attester de la réalisation ou de l’adéquation de certaines mesures prises dans le cadre de procédures de cessation d’activités des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) ou de remise en état des sites et sols pollués.

Un arrêté du 19 décembre 2018 définissait les modalités de certification ou d’équivalence de ces entreprises, mais a été annulé par le Conseil d’Etat en juillet 2021 (CE, 21 juillet 2021, Union des consultants et ingénieurs en environnement et autres, n° 428437). Le gouvernement a donc adopté l’arrêté du 9 février 2022 qui fixe les référentiels de certification ou de reconnaissance professionnelle équivalente, le processus de certification, le processus de certification complémentaire relatif aux entreprises constituées de plusieurs établissements, les exigences pour les organismes de certification ainsi que les modalités de transfert de certification et les équivalences à la certification, dans le cadre des procédures suivantes :

  • Pour la certification, ou équivalence, des bureaux d’étude attestant de la prise en compte des mesures de gestion de la pollution des sols dans le cas d’un changement d’usage des terrains ayant accueilli une installation classée mise à l’arrêt définitif et régulièrement réhabilitée, et dans le cas des projets de construction ou de lotissement prévus dans un secteur d’information sur les sols (articles L. 556-1 et L. 556-2 du Code de l’environnement) ;
  • Pour la certification, ou équivalence, des entreprises attestant, pour les ICPE soumises à autorisation et enregistrement mises à l’arrêt définitif, de la mise en œuvre des mesures relatives à la mise en sécurité ainsi que de l’adéquation des mesures proposées pour la réhabilitation du site, puis de la mise en œuvre de ces dernières. Et pour les ICPE soumises à déclaration, la certification, ou équivalence, des entreprises attestant de la mise en œuvre des mesures relatives à la mise en sécurité du site.

Zone à faibles émissions mobilité : précisions sur les procédures de consultation engagées avant l’adoption de la loi climat et résilience

En application de l’article L. 2213-4-1 du CGCT, certains maires ou présidents d’EPCI peuvent, ou ont l’obligation dans certaines agglomérations, définir par arrêté des zones à faibles émissions mobilité au sein desquelles des mesures de restriction de circulation sont applicables.

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi climat et résilience, a modifié le contenu de l’information devant être mise à disposition du public et des parties prenantes lors de la procédure d’adoption de l’arrêté portant création de ces zones. Il est en effet désormais prévu que l’étude accompagnant le projet d’arrêté expose les impacts socio-économiques attendus à l’échelle de la zone urbaine.

Et en principe, la loi nouvelle s’applique aux procédures en cours (CE, Section, 19 décembre 1980, Revillod et autres, n° 12387).

Toutefois, le décret n° 2022-99 du 1er février 2022 instaure une dérogation à ce principe et précise que les procédures de consultation du public et des parties prenantes qui étaient engagées avant l’entrée en vigueur de la loi climat et résilience se dérouleront selon les textes en vigueur avant l’adoption de cette loi.

Le Conseil d’Etat refuse de suspendre l’autorisation provisoire d’utilisation des semences de betteraves sucrières traitées avec des néonicotinoïdes

Saisi par quatre associations et fédérations de défense de l’environnement, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur l’autorisation provisoire, accordée par arrêté des Ministres de la Transition écologique et de l’Agriculture et de l’alimentation, permettant l’emploi de semences de betteraves sucrières traitées avec des néonicotinoïdes jusqu’en 2025, par dérogation à l’interdiction d’utilisation de ces produits. Cette dérogation a été adoptée au regard du danger représenté par le puceron pour les cultures de betteraves sucrières.

En effet, par un arrêt du 17 mai 2018 (T. 429/13 et T. 451/13), le Tribunal de l’Union européenne a jugé que les Etats membres peuvent autoriser, « pour une période n’excédant pas 120 jours, des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives, y compris pour des utilisations qui ne sont pas approuvées au niveau de l’Union, lorsqu’il n’existe pas de solution de remplacement. […] cette disposition permet aux États membres d’éviter de graves conséquences pour l’agriculture et vise des situations où il n’existe pas d’autre solution pour lutter contre un ravageur déterminé ».

Les requérantes soutenaient notamment que l’arrêté contesté ne respectait pas les conditions posées par le droit de l’Union européenne en ne faisant état d’aucune « circonstances particulières » justifiant la dérogation contestée, les risques de maladies de la betterave imputables aux pucerons n’étant ni nouveaux ni particulièrement forts en 2022. L’arrêté ne met pas non plus, selon elles, en place un « usage limité et contrôlé », puisqu’il ne fixe aucune limite spatiale et que les substances toxiques en cause continueront à être présentes dans les sols bien au-delà de la durée de 120 jours. Il ne serait en outre pas démontré que la dérogation s’imposait « en raison d’un danger qui ne peut être maîtrisé par d’autres moyens raisonnables », dans la mesure où l’étude de l’Anses sur les alternatives à l’autorisation de l’utilisation de produits contenant des néonicotinoïdes souligne au contraire l’existence de plusieurs solutions alternatives possibles, dont quatre au moins sont disponibles à court terme.

Le Conseil d’Etat écarte toutefois ces moyens en retenant que le risque d’une nouvelle infestation massive par des pucerons porteurs des maladies de la betterave au printemps 2022 devait être regardé comme sérieux et qu’il n’existe pas encore, à ce stade, malgré les recherches en cours, de solutions alternatives suffisamment efficaces pour éviter les dommages graves subis en 2020 par ces cultures. La Haute juridiction rejette ainsi la requête et refuse de suspendre l’autorisation provisoire contestée.

Publication du décret identifiant les communes dont les rejets d’eaux usées ont une incidence sur les épreuves olympiques en Seine

L’article 11-1 de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 prévoit que, sur les territoires dont les rejets d’eaux usées et pluviales ont une incidence sur la qualité de l’eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine, les travaux prescrits par le document établi par la Commune à l’issue du contrôle du raccordement au réseau public doivent être réalisés. Ces travaux doivent être réalisés dans un délai de 2 ans à compter de la notification de ce document. 

Cette obligation vise ainsi à éviter les rejets d’eaux usées en Seine et en Marne en résolvant notamment les erreurs de branchements des immeubles dont les eaux usées se déversent dans le réseau d’eaux pluviales pour aboutir dans ces cours d’eau ou leurs affluents.

C’est dans ce cadre qu’a été publié le décret n° 2022-93 du 31 janvier 2022, lequel fixe la liste des territoires dont les rejets d’eaux usées et pluviales ont une incidence sur la qualité de l’eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine. Le décret identifie ainsi 71 communes des départements de Paris, de l’Essonne, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, dans lesquelles cette obligation s’impose.

Proposition de loi nº 5020 visant à maintenir les barrages hydroélectriques dans le domaine public et à créer un service public des énergies renouvelables.

Le 8 février 2022, une proposition de loi nº 5020 visant à maintenir les barrages hydroélectriques dans le domaine public et à créer un service public des énergies renouvelables a été déposée. Elle vise à faire échapper les concessions hydrauliques aux règles de mise en concurrence qui s’imposent pourtant en application des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité posées par la Directive 96/92/CE du parlement européen et du conseil du 19 décembre 1996.

  • L’article 1er prévoit d’appliquer aux installations hydrauliques dont la puissance excède 4,5 mégawatts un dispositif de « quasi‑régie », permettant ainsi aux concessions de déroger à l’application des règles de concurrence, conformément à la Directive européenne 2014/24/UE sur la passation des marchés publics et l’article L. 3211‑1 du Code de la commande publique.

Il s’agit ainsi de mettre l’État au cœur de la stratégie énergétique afin qu’il en soit le planificateur et la quasi-régie « permettrait de sortir de la mise en concurrence des barrages et permettrait à l’État d’en faire une production stratégique d’avenir, la gestion d’un bien commun, l’aménagement de nos territoires, une source de revenu pour nos collectivités territoriales, une composante essentielle de nos paysages et de notre sécurité ».

Cet article 1er fait application du principe de liberté de choix du mode de gestion pour les pouvoirs adjudicateurs.

Il reste que pour que le statut de quasi régie s’applique, les concessionnaires des installations hydrauliques devraient être détenus par l’Etat avec lequel ils contractent. L’application de ce statut est en outre subordonnée à l’exercice, par l’Etat, d’un pouvoir analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services et à la réalisation, par la personne morale contrôlée, de plus de 80 % de son activité dans le cadre des tâches qui lui seront confiées par l’autorité concédante. Sans cela, il existerait un risque de détournement des procédures de mise en concurrence prévues par les directives et l’octroi d’un avantage concurrentiel au concessionnaire.

  • Pour atteindre cet objectif, l’article 2 de la proposition de loi complète l’article L. 100‑4 du Code l’énergie relatif aux objectifs de la politique énergétique nationale pour répondre à l’urgence écologique et climatique avec six nouveaux objectifs :
  • Participer à la structuration de la recherche et du développement ;
  • Planifier et coordonner le déploiement des énergies renouvelables sur l’ensemble du territoire et dans une logique de péréquation tarifaire et de solidarité territoriales ;
  • Favoriser l’organisation de filières industrielles de production et la gestion des matériaux sur l’ensemble de leur cycle de vie ;
  • Accompagner les porteurs de projets publics et privés ;
  • Encourager l’appropriation citoyenne et la création de communautés énergétiques locales ;
  • Favoriser l’atteinte des objectifs de développement des énergies renouvelables dans un cadre de sobriété et d’efficacité énergétique.
  • La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du Code général des impôts.

Cette proposition de loi a été renvoyée à la Commission des affaires économiques

Publication du décret relatif à la réforme des taxes locales sur la consommation finale d’électricité

Le décret n° 2022-129 du 4 février 2022 relatif à la part communale et à la part départementale de l’accise sur l’électricité précise la réforme des taxes locales sur la consommation finale d’électricité.

La gestion de ces taxes, qui est aujourd’hui partagée entre l’administration des douanes et des droits indirects, les services communaux, les services départementaux, les préfectures et les comptables assignataires de ces collectivités, a vocation à être regroupée dans un guichet unique à la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP)[1] 

Le décret du 4 février 2022 précise :

Les modalités de calcul des produits de la taxe sur la consommation finale d’électricité : les montants pris en considération pour les années 2022 et 2023 sont ceux inscrits aux comptes dédiés à la « taxe sur la consommation finale d’électricité » dans les comptes de gestion de la collectivité ou de l’établissement public de coopération intercommunale, établis au titre de l’année précédente.

  • la provenance des données utilisées ainsi que les conditions dans lesquelles sont constatées les quantités d’électricité fournies à l’échelle des territoires.

La mise en œuvre de la réforme étant progressive, la méthode et le calendrier utilisés :

  • le calcul de la part départementale au titre de 2022, le produit versé prendra en compte les données de 2020 pour le premier semestre, et les données de 2021 pour le second semestre ;
  • le calcul de la part communale au titre de l’année 2023, le produit versé prendra en compte les données de 2021 pour le premier semestre, et les données de 2022 pour le second semestre .

Enfin, le service de l’administration fiscale compétent pour recevoir les délibérations concordantes des affectataires légaux de la part communale de l’accise sur l’électricité :

  • si l’établissement public de coopération intercommunale ou le département devient affectataire en lieu et place d’une commune dont la population est supérieure à 2.000 habitants au 1er janvier de l’année précédant celle au titre de laquelle la taxe est due, les délibérations concordantes devront être transmises au service de la fiscalité directe locale placé au sein de la direction départementale des finances publiques compétente ;
  • si le syndicat intercommunal ou le département reverse à une commune ou à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre une fraction de la taxe perçue sur son territoire, les délibérations concordantes devront être transmises au comptable assignataire de la collectivité concernée.

 

[1] https://www.seban-associes.avocat.fr/taxes-locales-sur-la-consommation-delectricite-une-reforme-a-venir/

Précision sur le calcul du Terme T de la redevance de Concession de distribution d’électricité

Dans une décision du 14 février 2022, le Conseil d’Etat a apporté une intéressante précision sur la détermination du terme T de la formule de calcul de la redevance d’investissement dite « R2 » contenue dans les contrats de concession de distribution d’électricité conclus entre les Autorités Organisatrices de la Distribution d’Electricité (AODE) et les sociétés Enedis et EDF établis sur la base du modèle négocié en 1992 par EDF et la Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et des Régies (modèle applicable dans l’affaire ici jugée ainsi qu’aujourd’hui encore sur plusieurs territoires, quoique ce modèle ait été révisé en décembre 2017 en supprimant, notamment, le terme « T » objet de la présente affaire).

Ces contrats comportent en effet une redevance R2 versée par le concessionnaire à l’autorité concédante en contrepartie des travaux réalisés sur le réseau de distribution publique d’électricité, et dans l’intérêt dudit réseau, sous maîtrise d’ouvrage de l’autorité concédante. Cette redevance R2 est calculée par l’application d’une formule mathématique constituée de plusieurs termes et figure à l’annexe 1 du cahier des charges des contrats de concession.

Ladite formule comporte un terme « T » contractuellement défini comme le « produit net des taxes municipales sur l’électricité sur le territoire de la concession, ayant fait l’objet de titres de recettes de l’autorité concédante l’année pénultième ; T ne peut toutefois être inférieur au produit net des taxes municipales sur l’électricité sur le territoire des communes rurales de la concession ». Le terme T vient en déduction de la formule de calcul de la redevance R 2 puisqu’il est soustrait aux autres termes de calcul de la cette redevance. Ainsi plus le terme « T » est faible, plus la part « R2 » de la redevance est élevée.

La taxe visée par le terme T en cause est, actuellement, la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (ci-après, TCCFE) mentionnée à l’article L. 2333-2 du Code général des collectivités territoriales (ci-après, CGCT). Dans les communes de plus de 2.000 habitants, sauf délibération contraire, la taxe est perçue et conservée par la commune, et ce, même si elle a transféré sa compétence d’AODE à un Syndicat ou à un établissement public de coopération communale à fiscalité propre et ne l’exerce donc plus. La commune et l’AODE pouvant néanmoins, par délibérations concordantes, autoriser l’AODE à percevoir ladite TCCFE et à la conserver en tout ou partie.

Dans les affaires qui avaient été soumises au Tribunal administratif de Nantes, puis à la Cour administrative d’appel de Nantes (avant de parvenir au Conseil d’Etat), étaient en cause trois contrats de concession conclus par trois communes ayant, ensuite, transféré leur compétence d’AODE ainsi que les contrats de distribution publique d’électricité à Nantes Métropole. Cependant, ces trois communes, de plus de 2.000 habitants, avaient, malgré le transfert de leur compétence d’AODE à Nantes Métropole, décidé de continuer à percevoir elle-même et de conserver la TCCFE correspondant à leur territoire.

Ne percevant aucun montant de TCCFE au titre de ces trois communes, Nantes Métropole avait décidé, au titre de la redevance R2 des années 2015 et 2016, de ne déduire de la redevance R2 aucune somme au titre du terme T. La société Enedis a contesté ce raisonnement et introduit des recours en annulation contre ces deux titres exécutoires auprès du Tribunal administratif de Nantes.

Si le Tribunal administratif de Nantes a censuré la position de Nantes Métropole, la Cour administrative d’appel de Nantes, a au contraire considéré que l’AODE avait valablement estimé que le terme T devait être nul.

La Cour avait en effet relevé que le fait pour les trois communes d’avoir transféré la compétence d’AODE à Nantes Métropole tout en décidant de conserver la perception de la TCCFE avait eu pour conséquence une dissociation entre le bénéficiaire de la taxe et l’autorité concédante. Or, pour la Cour, il y avait lieu de s’en tenir à la lettre et à l’esprit du contrat qui définit le terme T comme visant le montant de TCCFE effectivement perçu par l’autorité concédante, soit Nantes Métropole en l’occurrence.

Ce raisonnement est confirmé par le Conseil d’Etat dans sa décision du 14 février 2022, celui-ci jugeant « que le produit net de la taxe communale sur la consommation finale d’électricité sur le territoire de la concession n’est imputé, à hauteur de 50 %, sur le montant de cette redevance, que s’il a fait l’objet de titres de recettes de l’autorité concédante». Or, en l’espèce, « la taxe communale sur la consommation finale d’électricité ayant fait l’objet de titres de recettes émis par les communes de Nantes, Rezé et Indre qui avaient perdu la qualité d’autorité concédante, le terme  » T  » de la part  » R2  » de la redevance était nul ».

Le Conseil d’Etat censure toutefois l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes du 13 février 2020, celle-ci ayant omis de statuer sur les conclusions de l’appel incident qu’avait formé Enedis. L’affaire est renvoyée sur ce point en Cour administrative d’appel.

Actualités en matière d’injection de biogaz dans les réseaux de gaz naturel

Consultation publique et projet de décret relatif au dispositif de certificats de production de biogaz

 

L’injection de biogaz dans les réseaux de gaz naturel a fait l’objet de deux actualités au cours du mois écoulé.

D’une part, la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a validé, dans une délibération du 3 février 2022, 12 nouveaux zonages de raccordement d’unités de production de biométhane.

En application de l’article D. 453-21 du Code de l’énergie, les gestionnaires des réseaux de distribution de gaz naturel sont en effet tenus d’établir des zonages de raccordement des installations de production de biogaz à un réseau de gaz naturel. Ces zonages doivent définir « pour chaque zone du territoire métropolitain continental située à proximité d’un réseau de gaz naturel, le réseau gazier le plus pertinent d’un point de vue technico-économique pour le raccordement d’une nouvelle installation de production de biogaz qui s’y implanterait » et sont soumis à la validation de la CRE.

La délibération du 3 février 2022 porte sur 13 projets de zonage soumis à la CRE entre le 29 octobre 2021 et le 25 janvier 2022. Sur ces 13 projets, dont 5 constituent des révisions de zonages précédemment validés, la CRE en valide 12, qui viennent s’ajouter aux 287 zonages déjà validés.

S’agissant du projet de zonage non validé par la présente délibération, la CRE considère que les éléments communiqués à ce stade nécessitent d’être complétés pour démontrer l’avancement effectif des projets concernés dans le registre de gestion des capacités.

D’autre part, le Gouvernement a mis en consultation du 23 février au 15 mars un projet de décret mettant en œuvre le dispositif de soutien à la production de biogaz et à son injection sur les réseaux de gaz naturel créé par la loi dite « climat et résilience » (loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets) sous la forme de certificats de production de biogaz.

Ce dispositif consiste à imposer aux fournisseurs de gaz naturel une obligation de restitution à l’Etat de certificats. Les fournisseurs de gaz naturel peuvent s’acquitter de cette obligation, soit en produisant directement du biogaz injecté dans un réseau de gaz naturel, soit en acquérant des certificats auprès de producteurs de biogaz.

Le texte du projet de décret soumis à consultation prévoit :

  • que dans un premier temps le dispositif de certificats sera réservé au biogaz produit par méthanisation en digesteur ou capté sur une installation de stockage de déchets non dangereux ;
  • les informations devant figurer sur les certificats de production de biogaz ;
  • les conditions de désignation du gestionnaire du registre des certificats de biogaz  (celui-ci sera désigné par le Ministre de l’énergie, après mise en concurrence, pour une durée maximale de cinq ans) ;
  • les missions précises dudit gestionnaire ;
  • les conditions auxquelles est soumise la délivrance des certificats de production de biogaz ;
  • la procédure de délivrance des certificats ;
  • les critères d’identification des fournisseurs de gaz naturel soumis à l’obligation de restitution à l’Etat de certificats de production de biogaz (étant entendu qu’au terme d’un délai de cinq ans, tous les fournisseurs seront soumis à l’obligation) ;
  • les contrôles et sanctions applicables aux producteurs de biogaz et aux fournisseurs de gaz naturel qui ne respectent pas leurs obligations respectives.

Proposition de loi portant diverses mesures visant à renforcer la sureté nucléaire, la transparence financière et le contrôle parlementaire

Le 9 février 2022, le groupe Ecologiste, solidarité et territoires du Sénat a présenté une proposition de loi « portant diverses mesures visant à renforcer la sûreté nucléaire, la transparence financière et le contrôle parlementaire ».

Le premier chapitre, intitulé « Renforcer la sûreté des centrales nucléaires », est composé de deux articles. Le premier vise à modifier l’article L. 593-19 du Code de l’environnement et à assurer un suivi opérationnel des recommandations de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN). Le second entend compléter l’article L. 311-5-5 du Code de l’énergie en prévoyant notamment la possibilité pour le Ministre de la Transition écologique de retirer une autorisation d’exploiter une installation nucléaire pour atteindre les objectifs de diversification des sources d’énergie.

Le deuxième chapitre a pour objectif de « renforcer la transparence démocratique et l’expertise indépendante ». A cette fin, l’article 3 entend créer, en substance, une délégation parlementaire au nucléaire civil commune à l’Assemblée nationale et au Sénat ayant pour mission de suivre l’organisation et le déroulement des activités nucléaires civiles sur le plan de la sûreté et de la sécurité. L’article 4 propose une intensification du contrôle parlementaire des sanctions de l’ASN. L’article 5 prévoit la remise d’un rapport au Parlement, établi par le Gouvernement, sur le financement de l’expertise indépendante dans le domaine du nucléaire civil.

Au sein d’un troisième chapitre formulé « Renforcer la transparence financière dans le nucléaire », les articles 6, 7 et 8 suggèrent respectivement la création d’une commission nationale des provisionnements pour servitudes nucléaires, la remise, par le Ministre de l’Énergie, d’un rapport au Parlement exposant un prévisionnel de l’ensemble des coûts financiers du nucléaire et la remise d’un rapport sur les charges de démantèlement des centrales nucléaires françaises.

Enfin, le dernier chapitre de cette proposition de loi, dont la vocation est d’« Assurer une gestion responsable des déchets nucléaires », vise à consacrer à son article 9 l’établissement d’un rapport exposant un comparatif financier des pistes de gestion des déchets radioactifs de long terme énoncées par les articles 4 de la loi n° 91-1381 du 30 décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs et 3 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs. Enfin le dernier article aborde la problématique de la gestion des substances radioactives et leur requalification en déchets.

Aux termes de l’exposé des motifs de cette proposition de loi, les sénateurs écologistes soutiennent que « la période actuelle est charnière et verra de nombreuses décisions être prises quant à l’outil nucléaire français » et que dans ces conditions, « il n’est plus acceptable que ces choix structurants soient faits sans aval démocratique ni état des lieux technique ».

Le texte est toujours, pour l’heure, en première lecture devant le Sénat.

Confirmation, par le Conseil d’Etat, d’une sanction pécuniaire d’un montant d’un million d’euros prononcée par le CoRDIS à l’encontre de la société BPGM pour manipulation de marché

CE, 9ème chambre, 2 février 2002, Société BPGM, n° 438866

 

Le 12 février 2019, à la suite d’une enquête concluant à des comportements de la société BPGM susceptibles d’enfreindre le règlement (UE) n° 1227/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie (règlement REMIT), le Président de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions (CoRDiS) sur le fondement de l’article L. 134-25 du Code de l’énergie.

Pour mémoire, ledit article L. 134-25 prévoit que le CoRDiS peut, soit d’office, soit à la demande notamment du Président de la CRE, sanctionner divers manquements et notamment le non-respect des règles définies par le règlement REMIT.

Par une décision du 19 décembre 2019, le CoRDiS a retenu que la société BPGM, exerçant principalement dans le négoce de gaz, de gaz naturel liquéfié et de produits énergétiques au Royaume-Uni et à l’international, a procédé à des manipulations de marché entre le 1er octobre 2013 et le 1er mars 2014 sur le point d’échange gaz sud.

Le CoRDiS a ainsi estimé que le comportement de la société BPGM était susceptible d’influencer la perception que les acteurs de marché pouvaient avoir de l’état de l’offre et de la demande et a sanctionné ladite société à hauteur d’un million d’euros.

Dans ce contexte, la société BPGM a saisi le Conseil d’Etat afin d’obtenir, à titre principal, l’annulation et, à titre subsidiaire, la réformation de cette décision.

Par une décision en date du 2 février 2022, le Conseil d’Etat rejette la requête de la société BPGM et confirme en conséquence la sanction pécuniaire prononcée par le CoRDiS. A cette fin, la Haute juridiction considère, s’agissant de la proportionnalité de la sanction :

« Compte tenu du caractère répété des comportements constitutifs d’une manipulation de marché, observés dans 56 cas répartis sur 37 journées d’échange durant la période du 1er octobre 2013 au 1er mars 2014, de leur effet potentiel sur les prix dans un contexte de marché peu liquide, de l’atteinte à la confiance des consommateurs qui en résulte, ainsi que du gain qui en a été tiré, évalué à 367 570 euros par l’agent enquêteur, la sanction pécuniaire d’un million d’euros prononcée à l’encontre de la société BPGM, qui représentait alors moins de 0,02 % de son dernier chiffre d’affaires connu, et sa publication au Journal officiel, ne sont pas disproportionnées ».

On précisera qu’à l’occasion de la confirmation, par le Conseil d’Etat[1], de la première sanction du CoRDiS[2] portant sur la surveillance des marchés de gros de l’énergie, la CRE s’en était félicitée en indiquant qu’une telle issue contentieuse « démontre que la surveillance des marchés de gros et la procédure de sanction sont efficaces. Cela constitue un tournant dans la mise en œuvre pratique du règlement REMIT ».

La décision du 2 février 2022 ici commentée, démontre à nouveau l’effectivité des dispositions du règlement REMIT.

 

[1] CE, 18 juin 2021, Société Vitol S. A., req. n° 425988

[2] Décision n° 02-40-16 du CoRDiS de la CRE en date du 5 octobre 2018 portant sanction à l’encontre de la société Vitol

Gel des TRVE et compensation des charges de services publics de l’électricité

Communiqué de presse de la CRE « Limitation à 4% TTC en moyenne de la hausse des TRV d’électricité : Versement anticipé pour la compensation des pertes prévisionnelles des fournisseurs d’électricité de moins d’un million de clients résidentiels » 

 

Pour mémoire, le Gouvernement à, par cinq arrêtés publiés le 28 janvier 2022, refusé les barèmes tarifaires présentés par la Commission de régulation de l’énergie (ci-après « CRE ») et présenté un barème correspondant à une augmentation des tarifs règlementés vente de l’électricité (ci-après « TRVE ») de 4 % TTC en moyenne.

Cette mesure permettant de faire face à l’augmentation exceptionnelle des prix de l’électricité a été consacrée au sein de la loi de finances pour 2022 qui prévoit, en outre, des mécanismes de compensation permettant d’y parvenir.

Tel que nous le présentions au sein de notre précédente LAJEE[1], le gel des TRVE peut entrainer des pertes de recettes pour les fournisseurs d’électricité et de gaz naturel et, aux termes de l’article 181 de la loi de finances pour 2022, les fournisseurs proposant des offres de marché à destination des consommateurs résidentiels seront compensés de leurs pertes au titre des charges imputables aux obligations de service public de l’énergie.

Or, aux termes de l’article L. 121-6 du Code de l’énergie, les opérateurs supportant des charges de services public de l’électricité bénéficient d’une compensation intégrale de ces charges.

A ce titre, par un communiqué de presse publié le 14 février 2022, la CRE a d’abord demandé aux fournisseurs ayant moins d’un million de clients résidentiels et pouvant bénéficier, par dérogation, d’un versement anticipé pour compenser leurs pertes de recettes prévisionnelles, de lui adresser avant le 1er mars 2022 les éléments justificatifs des pertes de recettes. La CRE publiera avant le 1er avril 2022 une délibération pour évaluer le montant du versement anticipé pour chaque fournisseur concerné.

Ensuite, la CRE a rappelé au sein d’une délibération publiée le 17 février 2022 que les opérateurs supportant des charges imputables aux obligations de service public de l’énergie doivent, conformément aux articles L. 1212-9 et R. 121-30 du Code de l’énergie, lui adresser chaque année avant le 31 mars une déclaration relatives aux charges qu’ils ont supportées au titre de l’année précédente, et avant le 30 avril une déclaration relative aux charges prévisionnelles au titre de l’année suivante et la mise à jour de la prévision des charges au titre de l’année en cours.

Par cette délibération, la CRE vient donc fixer :

  • les règles de la compatibilité appropriée qui s’appliquent pour le calcul des charges supportées par les opérateurs au titre des années 2021 et suivantes ;
  • le format de déclaration de charges prévisionnelles au titre des années 2022 et suivantes.

 

[1] https://www.seban-associes.avocat.fr/les-dispositions-de-la-loi-n-2021-1900-du-30-decembre-2021-de-finances-pour-2022-qui-concernent-le-droit-de-lenergie/?idlajee=107988