Précisions sur la nullité de la désignation du syndic non mis en concurrence

En l’absence de disposition en ce sens, le non-respect par le conseil syndical de son obligation de mise en concurrence n’est pas sanctionné par la nullité de la désignation du syndic par l’assemblée générale.

La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 dite « ALUR » a introduit à l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 une procédure de mise en concurrence obligatoire des contrats de syndics. Dès alors se posait la question des conséquences du défaut de son exécution.

Saisies de ce problème, plusieurs cours d’appel ont rendu des solutions contradictoires. Il y a peu, celle de Chambéry, par exemple, prononçait la nullité de la décision d’une assemblée générale de copropriétaires ayant adopté le contrat d’un syndic non mis en concurrence tandis que celle de Colmar rendait une solution strictement inverse (CA Chambéry, ch. civ. sect. 01, 9 mars 2021 et CA Colmar, 1er avr. 2021, n° 19/02686).

À ce titre l’arrêt rendu le 3 juin 2021 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation est intéressant en ce qu’il mettra fin à une incertitude et à une divergence naissante.

En l’espèce, un syndicat de copropriétaires avait adopté le contrat d’un syndic sans qu’il ne soit procédé à sa mise en concurrence. Un copropriétaire avait alors assigné le syndicat en nullité de cette décision. Débouté par la cour d’appel, le copropriétaire forma un pourvoi devant la Cour de cassation qui confirma la solution retenue par le second juge, au motif « qu’en l’absence de disposition en ce sens, le non-respect par le conseil syndical de son obligation de mise en concurrence n’est pas sanctionné par la nullité de la désignation du syndic par l’assemblée générale ».

Ainsi, la Haute Cour a ainsi fait explicitement sien l’adage « pas de nullité sans texte », sans écarter par ailleurs le risque d’autres sanctions pouvant consister en la condamnation pour faute des membres du conseil syndical ou du syndic.

COVID-19 et copropriété : La fin des mesures dérogatoires en matière de tenue des assemblées générales à compter du 30 septembre 2021

Initialement, l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 a institué plusieurs mesures afin de permettre le fonctionnement des assemblées générales durant la période d’urgence sanitaire et notamment la convocation des assemblées générales par visioconférence ou autre moyen de communication électronique ainsi que le vote des copropriétaires par correspondance.

Ces mesures ont été prorogées aux termes de l’ordonnance n° 2021-142 du 10 février 2021, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la fin de l’état d’urgence sanitaire.

La loi du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire vient modifier les articles 22-2, 22-4 et 22-5 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 et la date d’expiration de ces mesures exceptionnelles.

Ainsi, aux termes de ces nouvelles dispositions législatives les mesures dérogatoires en matière de convocation des assemblées générales et vote des copropriétaires prennent fin au 30 septembre 2021.

Servitude de passage pour cause d’enclave et détermination judiciaire de l’assiette

L’article 682 du Code civil institue une servitude légale de passage pour les terrains enclavés. Ainsi, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui ne dispose d’aucune issue ou une issue insuffisante sur la voie publique, est en droit de solliciter un passage suffisant pour assurer la desserte complète de sa propriété.

Il est prévu que le passage doit être pris du côté où le trajet est le plus court vers la voie publique et qu’il doit être fixé à un endroit peu dommageable au fonds servant. (Article 683 du Code civil).

Aux termes de cet arrêt, la Cour de cassation devait se prononcer sur l’état d’enclave du terrain ainsi que sur la détermination de l’assiette de la servitude de passage à instituer.

Le propriétaire d’un fonds enclavé, à assigné plusieurs de ses voisins, après expertise judiciaire, afin d’obtenir le désenclavement de son fonds et l’établissement d’une servitude de passage suivant l’un des tracés proposés par l’expert judiciaire.

La juridiction de premier degré fait droit aux demandes du propriétaire en retenant le tracé sollicité par ce dernier.

Néanmoins, la Cour d’appel, bien que caractérisant la situation d’enclave de la parcelle, ne retient pas le tracé sollicité par le propriétaire, mais une autre assiette pour la détermination de servitude de passage.

Certains propriétaires forment alors un pourvoi reprochant aux juges du fond d’avoir retenu un autre tracé que celui sollicité par le demandeur dans ses écritures et ainsi d’avoir modifié l’objet du litige.

La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par ces propriétaires en retenant que :

« 4. Lorsque les propriétaires intéressés sont parties à l’instance, le juge qui constate l’état d’enclave d’un fonds est légalement tenu de déterminer, conformément aux dispositions de l’article 683 du code civil, l’assiette de la servitude de passage en faveur de ce fonds.

5. C’est par conséquent sans modifier l’objet du litige que la cour d’appel a fixé, selon le tracé n° 3 proposé par l’expert, l’assiette de la servitude de passage bénéficiant au fonds enclavé de Mmes [C] sur les parcelles appartenant au syndicat des copropriétaires et aux consorts [V], parties à l’instance. »

Aux termes de cet arrêt, la Cour de cassation rappelle qu’il appartient au juge du fond, saisi d’une demande de désenclavement d’une parcelle, de déterminer l’assiette précise de la servitude de passage.

La Haute juridiction en profite également pour préciser que les juges du fond ne sont pas tenus par les demandes des parties concernant le tracé de la servitude.

Les juges du fond disposent ainsi d’une interprétation souveraine afin de déterminer l’assiette de la servitude de passage et les fonds servants.

La signature d’une convention d’occupation précaire dans le cadre d’un acte de vente

Le 30 juin 2016, une promesse de vente d’un appartement a été signée entre deux particuliers.

Par acte notarié daté du même jour, les parties ont conclu une convention d’occupation précaire portant sur le bien objet de la promesse de vente, autorisant le futur acquéreur à l’occuper dans l’attente de la signature de l’acte authentique de vente.

Le futur acquéreur avait ainsi le droit d’occuper le bien pendant une durée de neuf mois expirant le 31 mars 2017, dans l’attente de la signature de l’acte, conditionnée par l’obtention d’un crédit immobilier.

La vente n’est finalement pas intervenue, mais l’occupant bénéficiaire de la promesse s’est pourtant maintenu dans les lieux ; c’est dans ces conditions que le promettant l’a assigné en expulsion et paiement d’une indemnité d’occupation.

La cour d’appel a constaté qu’il était occupant sans droit ni titre, a ordonné son expulsion, et l’a condamné à une indemnité d’occupation ainsi qu’au paiement de dommages-intérêts.

L’occupant a alors formé un pourvoi en cassation, demandant la requalification de la convention d’occupation précaire en bail d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi aux motifs suivants :

« La cour d’appel a relevé que l’intention commune des parties, expressément consignée dans l’acte du 30 juin 2016, avait été de permettre à M. [B], moyennant une redevance modique, d’occuper les lieux pendant une durée de neuf mois, expirant le 31 mars 2017, en l’attente de la signature de l’acte authentique de vente qui était conditionnée par l’obtention d’un crédit immobilier.

Elle a ainsi caractérisé l’existence de circonstances particulières, indépendantes de la seule volonté des parties, permettant de retenir la qualification de convention d’occupation précaire et justifiant le rejet de la demande de requalification du contrat en bail d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989 ».

Dans cette espèce, c’est la condition suspensive d’obtention du prêt qui permet à la Cour de cassation de caractériser une circonstance particulière « indépendante de la seule volonté des parties » et donc de ne pas procéder à la requalification du contrat.

La proposition de loi en faveur de l’engagement associatif et la responsabilité des dirigeants bénévoles

La troisième lecture de la proposition de loi en faveur de l’engagement associatif débute le 24 juin prochain à l’Assemblée nationale. Ce texte, déposé initialement en avril 2018, a notamment pour objet d’atténuer la responsabilité financière des dirigeants bénévoles d’association.

Cela se comprend au vu du régime qui aujourd’hui s’applique aux dirigeants associatifs bénévoles, construit à partir de celui qui s’applique aux dirigeants de sociétés commerciales et encadré par les dispositions du Code de commerce et du Code civil (la loi de 1901 ne prévoyant rien à ce sujet).

C’est ainsi, à titre d’exemple, qu’en cas de liquidation d’une association et en vertu de l’article L. 652-1 du Code de commerce, son dirigeant peut être amené à supporter personnellement, sur ses deniers personnels, tout ou partie des dettes alors même que son patrimoine est bien distinct de celui de l’association.

Or, le dirigeant bénévole associatif est un dirigeant particulier, ce dernier n’étant pas un professionnel et ne disposant pas, par conséquent, des mêmes moyens qu’un dirigeant salarié.

De plus, les cas d’engagement de la responsabilité des dirigeants associatifs se sont multipliés notamment du fait de la professionnalisation du secteur et de la multiplication des règlementations juridiques ou sociales.

En outre, les questions qui leur sont soumises sont de plus en plus complexes et le pouvoir qui leur est dévolu est de plus en plus important.

C’est ainsi que la proposition de loi modifie l’article L. 651-2 du Code de commerce relatif à la responsabilité des dirigeants de société pour insuffisance d’actif.

Depuis la loi Sapin II du 11 décembre 2016, cet article prévoit que :

« […] en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée […] ». 

Ainsi, le dirigeant ne peut voir sa responsabilité engagée pour insuffisance d’actif lorsque l’ouverture de la procédure collective a été causée par sa simple négligence. Une simple négligence dans la gestion de la société ne peut plus, depuis cette loi, être qualifiée de faute de gestion.

Cependant, seul le dirigeant de société semble bénéficier de cette « exception de négligence » et non le dirigeant d’association. Or, l’engagement de la responsabilité financière d’un dirigeant en cas de simple négligence est une crainte des bénévoles et, par conséquent, constitue un frein réel à l’acceptation des fonctions d’administrateur au sein des associations.

La proposition de loi en faveur de l’engagement associatif modifie l’article L. 651-2 du Code de commerce afin de prévoir explicitement que l’exception de négligence s’applique aux « personnes morales » et non plus seulement aux « sociétés », intégrant ainsi les associations.

Cette proposition de loi peut sembler modeste puisqu’elle ne traite que de la question de la responsabilité financière du dirigeant associatif en cas de faute de gestion et ne s’attèle pas à une véritable actualisation du statut des dirigeants bénévoles. Toutefois, cela constitue d’ores et déjà une réelle avancée pour les associations qui peinent souvent à rassembler des administrateurs au vu des responsabilités en jeu.

Etant précisé par ailleurs que le juge détient une grande marge d’appréciation pour décider ou non de tenir compte du caractère bénévole du dirigeant associatif conformément à l’article 1992 du Code civil, selon lequel la responsabilité d’un mandataire est appréciée moins sévèrement en cas de mandat exercé à titre gratuit, afin apprécier la mise en jeu de sa responsabilité civile.

Taxe d’enlèvement des ordures ménagères : un excédent de 14,6 % pas manifestement disproportionné

La taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), régie par l’article 1520 du Code général des impôts (CGI), est une « taxe affectée », c’est-à-dire qu’elle n’a pas vocation à pourvoir à l’ensemble des dépenses budgétaires de la collectivité mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées pour assurer l’enlèvement et le traitement des déchets ménagers et assimilés non couvertes par des recettes non fiscales. Par conséquent, son produit ne doit pas excéder de manière disproportionnée le montant des charges à couvrir.

Or, la rédaction initiale de l’article 1520 du CGI ne permettait ni d’identifier les charges devant être intégrées dans le calcul de proportionnalité ni de déterminer au-delà de quelle mesure un excédent de TEOM devait être considéré comme manifestement disproportionné.

Le Conseil d’Etat et le législateur ont donc progressivement apporté des précisions sur les dépenses pouvant être financées par le produit de la TEOM.

Ainsi, en se fondant sur la rédaction antérieure de l’article 1520 du CGI, le Conseil d’Etat a jugé que la TEOM n’avait pas pour objet de financer l’élimination des déchets non ménagers (CE, 31 mars 2014, Société Auchan, n° 368111). Quelques mois plus tard, constatant qu’il était en pratique bien souvent difficile pour les collectivités de distinguer, d’une part, les dépenses afférentes à la gestion des déchets ménagers et, d’autre part, les dépenses afférentes à la gestion des déchets assimilés, du fait que ceux-ci sont collectés et traités dans les mêmes conditions, le législateur a modifié l’article 1520 du CGI afin de préciser que le produit de la TEOM a vocation à financer non seulement la collecte et le traitement des ordures ménagères, mais aussi des déchets assimilés. Cette modification est entrée en vigueur à compter du 1er janvier 2016 et s’applique donc aux taux de TEOM votés à compter de cette date.

Par la suite, le Conseil d’Etat a précisé que seules les dépenses réelles de fonctionnement et les dotations aux amortissements des immobilisations affectées à la collecte et l’enlèvement des déchets ménagers et assimilés pouvaient être financées par la TEOM, ce qui excluait du calcul les dépenses réelles d’investissement (CE, 19 mars 2018, Société Cora, n° 402946). Constatant que cette décision allait à rebours de la pratique budgétaire des collectivités, le législateur a, là encore, modifié l’article 1520 du CGI afin d’autoriser celles-ci à prendre en compte, pour un même investissement, les dépenses réelles figurant dans la section « investissement » ou les dotations aux amortissements correspondantes figurant dans la section « fonctionnement ». Cette modification s’applique aux taux de TEOM votés à compter du 1er janvier 2019.

Toutefois, une incertitude demeurait sur le niveau d’excédent au-delà duquel un produit de TEOM devait être considéré comme manifestement disproportionné par rapport aux dépenses à couvrir. La jurisprudence du Conseil d’Etat a même varié au fil des années : en 2014, un excédent de 2,4 % a été jugé comme étant manifestement disproportionné (CE, 31 mars 2014, Société Auchan, précitée) alors qu’en 2019, le Conseil d’Etat a jugé qu’un produit de TEOM excédant de 6,2 % les charges à couvrir ne pouvait être regardé comme manifestement disproportionné (CE,  20 septembre 2019, Société Sogefimur, n° 419661).

Par sa décision du 5 mai 2021, le Conseil d’Etat augmente encore son niveau de tolérance. En effet, dans ce litige où une société sollicitait la décharge des sommes versées à la Communauté d’agglomération de Roissy-Pays-de-France au tire de la TEOM pour les années 2013 et 2014, il constate que le produit attendu de TEOM (6.178.388,51 €) excédait le montant des charges qu’elle avait vocation à couvrir (5.389.212 €) de 14,6 % et en conclut que « le taux fixé ne peut ainsi être regardé comme manifestement disproportionné ».

Le Conseil d’Etat semble ainsi consacrer un pourcentage de 15 % comme plafond en-deçà duquel il ne peut être retenu une erreur manifeste d’appréciation, à l’instar de ce que l’administration fiscale défendait depuis 2015.

RAPO et requête prématurée : la régularisation en cours d’instance est possible

Par une décision en date du 16 juin 2021, le Conseil d’Etat s’est à nouveau positionné sur la régularisation d’une requête prématurée en cours d’instance, cette fois lorsque l’administration saisie d’un recours administratif préalable obligatoire (RAPO) ne s’est pas encore prononcée.

Ce n’est pas la première fois que la Haute juridiction administrative est confrontée à cette problématique des requêtes prématurées.

A cet égard, on rappellera qu’un recours contentieux n’est possible qu’à l’encontre d’une décision administrative (article R. 421-1 du Code de justice administrative). Cela suppose donc logiquement que ladite décision existe au jour de l’introduction du recours.

En matière de recours en annulation, cela ne pose, en principe, guère de difficulté.

En revanche, en matière indemnitaire, nombre de requérants n’effectuent pas de demande indemnitaire préalable, et, ce faisant, ne font pas naître de décision de l’administration susceptible de lier le contentieux.

Si la position du Conseil d’Etat sur ce sujet peut paraître stable depuis plusieurs décennies, elle évolue tout de même, se précise, et prend en compte la volonté du pouvoir réglementaire.

On peut ainsi établir trois temps forts relatifs à cette problématique :

La décision « Etablissement Français du sang » rendue par le Conseil d’Etat le 11 avril 2008, dont il résultait que le requérant pouvait saisir l’administration postérieurement à la saisine du juge administratif, tant que, à la date où ce dernier statuait, la décision était intervenue. C’était la consécration d’une analyse de la recevabilité du recours au moment où le juge statue.

Le décret « JADE » (justice administrative de demain) du 2 juin 2016, qui a remis en cause la décision de 2008 en ajoutant un nouvel alinéa à l’article R. 241-1 du Code de justice administrative. Ce nouvel alinéa précise qu’une requête indemnitaire introduite devant le Tribunal administratif n’était recevable qu’après l’intervention d’une décision de l’administration sur une demande préalablement formée devant elle.

Enfin, par son avis du 27 mars 2019 (n° 426472), le Conseil d’Etat a interprété le décret JADE en faveur du requérant. Il a en effet considéré que la décision de l’administration doit être préalable à la date de jugement et non à la date de la requête.

Outre l’hypothèse d’un recours indemnitaire, une autre hypothèse de requête prématurée concerne les recours devant être précédés d’un RAPO.

Pour rappel, lorsque les textes prévoient un tel recours, la décision prise par l’administration à l’issue de ce RAPO se substitue à la décision initiale et c’est cette seconde décision qui doit être attaquée devant le juge administratif.

De sorte qu’un recours introduit avant l’intervention de la décision de l’administration prise sur un RAPO est prématuré.

Le Conseil d’Etat a néanmoins de nouveau adopté une solution souple en la matière à l’occasion de sa décision du 16 juin dernier.

Dans cette affaire, la requérante réclamait l’annulation d’une décision de la Caisse d’allocations familiales demandant le reversement d’un indu de revenu de solidarité active (RSA). Elle avait saisi le Tribunal administratif et s’était vu opposer un rejet pour irrecevabilité au motif qu’elle n’avait pas exercé de RAPO. 

En réalité la requérante avait bien exercé un recours administratif préalable ; seulement, l’administration ne s’était pas encore prononcée.

C’est ce que le Conseil d’Etat relève dans sa décision et c’est sur ce point que la Haute juridiction axe son raisonnement. Le considérant de principe est le suivant :

« […] dès lors que le recours administratif obligatoire a été adressé à l’administration préalablement au dépôt de la demande contentieuse, la circonstance que cette dernière demande ait été présentée de façon prématurée, avant que l’autorité administrative ait statué sur le recours administratif, ne permet pas au juge administratif de la rejeter comme irrecevable si, à la date à laquelle il statue, est intervenue une décision, expresse ou implicite, se prononçant sur le recours administratif ».

Cette décision dresse alors deux conditions pour qu’une requête puisse être régularisée en cours d’instance :

  • le RAPO est toujours nécessaire en amont de la requête contentieuse ;
  • l’administration doit s’être prononcée avant que le juge administratif ne statue.

Ainsi, le Conseil d’Etat ne remet pas en question l’exigence du RAPO, il vient plutôt dire qu’il n’est pas nécessaire d’attendre la réponse de l’administration pour saisir le juge administratif. Si l’administration répond négativement à la demande, alors la procédure est régularisée et le recours suit son cours. Si l’administration répond positivement à la demande, alors le recours est caduc et il n’y a plus lieu de statuer.

Responsabilité contractuelle de l’Etat pour non-respect d’une convention de partenariat conclue avec un département visant à financer l’acquisition de matériel informatique pour les élèves des collèges

Par une ordonnance en date du 16 avril 2021, rendue dans le cadre d’un référé provision, la Cour administrative d’appel de Paris a jugé qu’une convention de partenariat conclue entre l’Etat et un département pour le financement de matériel informatique destiné à des collèges, par laquelle le premier s’engageait notamment à verser au second une subvention, avait bien une nature contractuelle et non unilatérale.

Dans cette affaire, l’Etat s’était engagé, par le biais de plusieurs conventions pluriannuelles, à verser chaque année une subvention au département qui, lui, promettait de fournir aux élèves et à leurs enseignants un ordinateur portable. La convention définissait, outre sa durée, le principe et les modalités de calcul de la subvention, déterminée en fonction du nombre d’élèves et de professeurs à doter. Le montant annuel de la subvention et les modalités de versement devaient, quant à eux, être fixés chaque année par voie d’avenant. En somme, les avenants avaient simplement vocation à constater le nombre d’élèves et de professeurs à doter chaque année, et à en déduire le montant de la subvention annuelle, et non à modifier le contrat initial.

Toutefois, au cours de la dernière année d’exécution de la convention, l’Etat a cessé de verser les dotations et n’a pas répondu aux différentes demandes d’information du département à ce sujet. Le département, qui avait, quant à lui, rempli ses engagements en fournissant le matériel informatique, a donc saisi le juge des référés d’une demande de provision afin d’obtenir le versement de la somme correspondante.

Le juge des référés du Tribunal administratif de Melun a répondu favorablement à la demande du département sur le fondement de l’article R. 541-1 du Code de justice administrative (CJA). Selon lui, la dette de l’Etat envers le département n’apparaissait pas sérieusement contestable. En effet, les avenants avaient simplement pour but de fixer les modalités de calcul de la subvention mais ne remettaient pas en cause son existence. Le juge des référés a donc estimé que la responsabilité contractuelle de l’Etat pouvait être engagée en raison du non-respect de ses obligations découlant de la convention. L’Etat a ainsi été condamné à verser au département une somme de 2 733 720 euros.

En appel, l’Etat a soutenu que seule sa responsabilité délictuelle pouvait, le cas échéant, être mise en œuvre, alors que le recours du département était fondé sur la responsabilité contractuelle.

Il s’est, pour cela, notamment appuyé sur l’avis par lequel le Conseil d’Etat a affirmé que les recours relatifs à une subvention ne peuvent être portés que devant le juge de l’excès de pouvoir, la décision d’octroyer une subvention ayant, quelle que soit sa forme – unilatérale ou conventionnelle –, le caractère d’une décision unilatérale (CE, 29 mai 2019, n° 428040).

Toutefois, le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Paris a rejeté ces arguments après avoir estimé que les dotations de l’Etat ne pouvaient en l’espèce être regardées comme de simples subventions mais comme faisant partie d’un véritable contrat de partenariat.

Celles-ci visaient en effet à mettre en œuvre une politique publique qui s’inscrivait dans le cadre d’un vaste projet éducatif et procédaient de l’initiative de l’Etat, qui avait lancé, en 2015, plusieurs appels à projets dans le cadre de son plan numérique pour l’école visant à une généralisation de l’usage du numérique dans les établissements auxquels avait répondu le département et qui avaient donné lieu aux conventions en cause. De plus, ces dernières mettaient en place des obligations réciproques entre les parties, qui ne se limitaient pas qu’au versement des subventions en échange de l’achat du matériel informatique.

Dans ces conditions, le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Paris a confirmé le bien-fondé de la provision obtenue par le département en première instance

Tracts électoraux : attention à l’usage des logos

Par deux décisions récentes des 12 avril et 19 mai 2021, le Conseil d’Etat a confirmé l’annulation d’opérations électorales en raison de l’utilisation irrégulière de logos sur les tracts électoraux, après avoir jugé que celle-ci constituait une manœuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin (CE, 12 avril 2021, Elections municipales de Notre-Dame-de-Bondeville, n° 445515 ; CE, 19 mai 2021, Elections municipales d’Oppède, n° 442678).

Dans ces deux affaires, le juge a estimé qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit des électeurs. Pour l’une d’elles, il existait une ambiguïté quant aux soutiens associatifs reçus par la liste électorale. Pour l’autre, le risque résidait dans l’utilisation des symboles de la République sur les tracts. 

Pour rappel, d’origine purement prétorienne, la notion de « manœuvres » découle d’un « principe général de loyauté de la campagne électorale » (J.C Masclet, Droit électoral, PUF, 1989, p. 223). Selon Bernard Maligner, elles peuvent être définies comme « les multiples procédés par lesquels la volonté du corps électoral peut être faussée voire dénaturée ou viciée par des actions destinées à induire en erreur les électeurs ou à les tromper à quelque moment que ce soit du processus électoral » (B. Maligner, Droit électoral, Ellipses, 2007, p. 863).

Le contenu de la notion de manœuvres relève donc essentiellement de la jurisprudence.

En matière de logos, le Conseil d’Etat a pu juger que l’utilisation du logo d’une collectivité territoriale sur un tract électoral n’était pas de nature à altérer la sincérité du scrutin (CE, 18 décembre 1992, Élections régionales d’Île-de-France, département des Hauts-de-Seine, n° 135650 139894).

Concernant les logos des partis politiques, le Conseil d’Etat a notamment pu juger que leur reproduction sur un tract électoral n’avait pas le caractère de manœuvre dès lors que l’intéressé était membre du parti en cause (CE, 30 novembre 1998, Elections régionales de Languedoc-Roussillon, n° 195128), même si ce parti avait officiellement investi un autre candidat (CE, 20 février 1987, Elections cantonales de Marseille, n° 70576).

Toutefois, le Conseil d’Etat n’avait jamais eu à se prononcer sur la question des logos d’associations figurant sur un tract électoral.

Dans l’affaire ayant donné lieu à la décision du 12 avril 2021, un tract électoral faisait figurer le logo de trente-six associations locales sur une page dédiée aux propositions de la candidate en faveur de la vie associative.

Le Conseil d’Etat a estimé que l’apposition de ces logos constituait une manœuvre de nature à faire croire au soutien des associations, alors même que certaines d’entre elles n’avaient jamais supporté publiquement cette candidate et n’avaient pas non plus exprimé leur consentement à figurer sur le tract.

La seconde décision (CE, 19 mai 2021, Elections municipales d’Oppède, n° 442678) concernait quant à elle un tract électoral sur lequel figurait « un logo […] reproduisant un profil de Marianne sur fond bleu en tout point identique à la marque de l’Etat et faisant apparaître, dans son coin supérieur droit, une portion de forme triangulaire du drapeau tricolore ».

Le Conseil d’Etat a rappelé les termes de l’article R. 27 du Code électoral selon lequel :

« Sont interdites, sur les affiches et circulaires ayant un but ou un caractère électoral, l’utilisation de l’emblème national ainsi que la juxtaposition des trois couleurs : bleu, blanc et rouge dès lors qu’elle est de nature à entretenir la confusion avec l’emblème national, à l’exception de la reproduction de l’emblème d’un parti ou groupement politique ».

En vertu de ces dispositions, la Haute juridiction a estimé que, malgré la dimension réduite du logo, l’utilisation qui a été faite des trois couleurs nationales a pu créer une confusion dans l’esprit des électeurs.

Le rapporteur public indiquait d’ailleurs que : « Même si la Marianne n’est pas visée par l’article R. 27, on peut admettre que sa présence en sus des trois couleurs nationales est de nature à renforcer le caractère institutionnel du logo ».

Dans ces deux affaires, eu égard au très faible écart de voix entre les listes en présence, le Conseil d’Etat a confirmé les jugements de première instance qui avaient annulé les élections.

Loi de sécurité globale et polices municipales

Les dispositions concernant les polices municipales intégrées dans la loi de sécurité globale ont deux principales origines.

D’un côté, le rapport parlementaire Fauvergue / Thourot, qui faisait le constat selon lequel « le niveau pertinent de coordination et d’articulation entre les forces de sécurité de l’État et les personnels des polices municipales doit être le bassin de vie. Or, le ressort des polices municipales est, par nature, celui de la commune. Pour être pleinement efficace, leur périmètre devrait dépasser ce cadre pour embrasser celui des EPCI, qui correspondent davantage à l’objectif cible »[1]. Les mesures de dépassement croissant de l’échelon municipal pour la mise en œuvre des pouvoirs de police sont inspirées par ce rapport.

D’un autre côté, un rapport de la Cour des comptes sur les polices municipales[2] qui a identifié certains angles morts dans le cadre juridique de ces services et que la présente loi vise à combler.

 

I. Un ensemble de dispositions favorisant une démunicipalisation relative des polices administratives

C’est un mouvement de fond qui conduit le législateur à transférer des compétences ou le contrôle de services de police municipale à d’autres collectivités.

Ainsi, les présidents des EPCI à fiscalité propre peuvent déjà disposer d’un ensemble de compétences de police municipale spéciale en vertu des dispositions de l’article L. 5211-9-2 du Code général des collectivités territoriales (ci-après, CGCT), (notamment en matière d’assainissement, de collecte des déchets ménagers, de réalisation d’aires d’accueil, de police et de stationnement, prérogatives des présidents des EPCI en matière de polices administratives).

Dans le même sens, la loi n° 2019-1461 avait déjà assoupli les conditions de mutualisation des agents de police municipale en confiant au président de l’EPCI un pouvoir d’initiative partagé avec les maires pour le recrutement d’agents de police municipale au niveau intercommunal, dès lors que l’EPCI comptait moins de 80 000 habitants.

a. Faciliter la mutualisation des services de polices administratives

Ce seuil est désormais supprimé via une modification de l’article L. 512-1 du Code de la sécurité intérieure (ci-après, CSI) : des ensembles de communes dont le total des habitants excède ce seuil de 80 000 habitants pourront désormais mutualiser leurs services de police municipale, qu’ils appartiennent ou non au même EPCI.

En permettant également aux communes qui le souhaitent de se retirer de ces conventions sans effet sur son application sur les autres parties prenantes, la loi donne une souplesse au dispositif qui sera de nature à le rendre plus attractif[3].

 

b. La création de syndicats intercommunaux en matière de police

L’article L. 512-1-2 nouveau du CSI offre la possibilité aux communes, dès lors qu’elles sont limitrophes ou appartiennent à une même agglomération au sein d’un même département ou d’un EPCI, de « former un syndicat de communes afin de recruter un ou plusieurs agents de police municipale en commun, compétent sur le territoire de chacune des communes ».

Ce sont les statuts des syndicats qui fixeront les modalités d’organisation et de financement de la mise à disposition des agents et de leurs équipements. La signature d’une convention de coordination des interventions avec les forces de sécurité de l’Etat sera rendue obligatoire.

Le maire conserve cependant un certain contrôle puisqu’il conserve l’autorité exercée sur lesdits agents du syndicat lorsqu’ils exercent leurs fonctions sur le territoire de sa commune. De même, les demandes de port d’arme pour les agents du syndicat devront être établies conjointement par l’ensemble des maires des communes et par le président du syndicat, conférant par là un droit de veto aux maires, à l’instar de ce qui prévaut dans les cas de simple mutualisation des services prévue par les dispositions de l’article L. 512-1 du CSI.

 

c. Mise en commun des moyens et situations exceptionnelles

La loi de sécurité de globale étend la possibilité de mise en commun temporaire d’agents de police municipale pour faire face à un évènement exceptionnel. Jusqu’à présent, l’article L. 512-3 du CSI permet une telle mise en commun temporaire dans trois cas limitativement énumérés[4].

Les conditions de mise en œuvre de ces dispositions sont les suivantes : les communes autorisées à mutualiser de manière temporaire doivent être limitrophes ou appartenir à un même EPCI et l’autorisation est délivrée par le préfet au moyen d’un arrêté, qui en fixe les conditions et les modalités au vu des propositions des maires des communes concernées.

La présente loi a fait évoluer ce cadre en créant un régime assoupli de mutualisation des moyens, en cas de catastrophes naturelles ou technologiques afin, selon le député Alain PEREA, auteur de l’amendement ayant introduit cette disposition dans le texte, « d’assurer une réaction rapide ».

Ainsi, en cas de catastrophes naturelles ou technologiques, les communes pourront mutualiser leurs moyens, non plus seulement dès lors qu’elles appartiennent à une même agglomération, mais seulement à condition d’appartenir à un même département, voire à un département limitrophe.

Il est également prévu de permettre aux communes de conclure au préalable une convention cadre avec le représentant de l’Etat dans le département, qui permettra d’autoriser ladite mise en commun sans attendre l’arrêté préfectoral.

II. Dispositions techniques et sécurisation juridique de la mise en œuvre des pouvoirs de police municipale

 

a. Création des brigades cynophiles de police municipale

Le rapport de la Cour des comptes relatif aux polices municipales[5] avait identifié le fait que 178 communes ou EPCI étaient dotés de brigades canines alors qu’aucune disposition n’en régissait l’utilisation.

Un nouveau cadre juridique a donc été créé pour ces brigades, structuré autour du nouvel article L. 511-5-2 du CSI, selon lequel la création de telles brigades intervient sur décision du maire, après délibération du conseil municipal, ou, s’agissant des EPCI, sur décision conjointe de son président et des maires des communes concernées.

Par ailleurs, ces brigades n’interviennent que pour l’accomplissement des missions mentionnées dévolues aux agents de polices municipales dans le cadre de l’article L. 511-1 du CSI.

 

b. Un diagnostic préalable à la signature des conventions de coordination rendu obligatoire

La loi a également modifié l’article L. 512-6 du CSI, rendant obligatoire l’inclusion d’un diagnostic préalable des problématiques de sûreté et de sécurité auxquelles sont confrontées les communes. Cette mesure fait suite au constat selon lequel ces conventions de coordination étaient trop souvent des documents types. L’introduction d’un tel diagnostic devrait rendre ces conventions plus opérationnelles.

c. La possibilité d’arrêter les véhicules béliers pour les agents de police municipale

Une disposition permet aux agents de police municipale de « faire usage de matériels appropriés pour immobiliser les moyens de transport dans les cas prévus à l’article L. 214-2 du CSI » (nouvel article L. 511-4-1 du CSI), à savoir dans les cas où un conducteur n’arrête pas son véhicule après sommations, ou bien lorsque le comportement d’un occupant du véhicule est de nature à mettre en danger délibérément la vie d’autrui, ou encore dans certains cas de fuites.

Ces dispositions, jusqu’alors applicables uniquement aux personnels de police nationale ou aux gendarmes, avaient été introduites à la suite de la série d’attentats en 2015-2016.

d. Une obligation renforcée de service au bénéfice de la commune ayant pris en charge la formation de l’agent

La loi de sécurité globale crée par ailleurs un nouvel article au sein du Code des communes, permettant d’imposer un engagement de servir au sein de la commune ou de l’EPCI qui a pris en charge sa formation d’une durée maximale de trois ans pour les agents de police municipale[6].

L’agent peut être libéré de cette obligation s’il rembourse une somme correspondant au coût de la formation. Dans le même sens, le maire ou président d’EPCI peut l’en dispenser, exceptionnellement et pour des motifs impérieux.

Cette disposition crée donc une exception au sein du droit de la fonction publique territoriale, qui fait peser le risque financier, en cas de mutation de l’agent dans les trois ans suivant sa titularisation, sur la collectivité qui le recrute.

e. Un nouveau cadre pour la police municipale parisienne

Les nouvelles dispositions désormais inscrites aux articles L. 511-2 et L. 533-1 et suivants du CSI ouvrent la voie de la création d’une force de police municipale à Paris, dont celle-ci était privée pour des raisons historiques, malgré un élargissement des pouvoirs de police du maire.

En outre, les articles L. 533-1 du CSI prévoient que les fonctions d’agent de d’agent de police municipale ne peuvent être exercées à Paris que par des fonctionnaires de la ville de Paris. Par ailleurs, il est précisé que les corps de la police municipale à Paris seront créés par décret en Conseil d’État après avis du Conseil de Paris.

L’article L. 533-4 élargit quant à lui les pouvoirs des policiers municipaux, qui pourront constater par PV les contraventions aux arrêtés du préfet de police relatifs au bon ordre, à la salubrité, à la sécurité et à la tranquillité publiques (à l’exception toutefois des interdictions de manifestations sur la voie publique).

III. Une censure du Conseil constitutionnel aux impacts limités pour les collectivités

Le Conseil constitutionnel a été saisi de 22 articles de la loi et en a validé 15, dont 4 ont fait l’objet d’une réserve d’interprétation, 7 ont donc été totalement censurés. Parmi eux, deux articles du Titre 1er de la loi relatif aux polices municipales sont concernés par la décision du juge constitutionnel : l’article 1er est censuré ; l’article 4 fait l’objet de réserves d’interprétation.

L’article 1er, permettait, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, aux agents de police municipale d’exercer des attributions de police judiciaire en matière délictuelle.

Le Conseil constitutionnel a considéré que cette mesure, très demandée par certaines municipalités, est contraire à l’article 66 de la Constitution. Si le dispositif prévoyait une transmission au procureur de la République des rapports et procès-verbaux établis par les agents de police municipale, la loi n’a pas assuré un contrôle « direct et effectif » des directeurs de police municipale par le procureur, ce dernier ne pouvant leur adresser des instructions.

Quant à l’article 4 de la loi, qui étend à l’ensemble des manifestations sportives, récréatives ou culturelles la possibilité pour les agents de police municipale de procéder à l’inspection visuelle et à la fouille des bagages ainsi qu’à des palpations de sécurité, le Conseil a rappelé que la mise en œuvre de ces nouvelles prérogatives ne pourrait s’opérer qu’en se fondant sur des critères excluant toute discrimination entre les personnes.

Thomas CHEVANDIER & Aloïs RAMEL

 

[1] Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue, D’un continuum de sécurité vers une sécurité globale, septembre 2018, p. 61

[2] Cour des comptes, Les polices municipales, octobre 2020

[3] CSI, article L. 512-1, alinéa 3

[4] lors d’une manifestation exceptionnelle, notamment à caractère culturel, récréatif ou sportif ; à l’occasion d’un afflux important de population ; en cas de catastrophe naturelle

[5] Cour des comptes, Les polices municipales, octobre 2020

[6] Code des communes, article L. 412-57

C’est la reprise et on s’en réjouit.

De nouveaux modes d’activité économique et commerciale ont vu le jour et sont en expansion. D’un côté, les entreprises cherchent à minimiser leurs frais liés à la location de locaux d’activité dont ils n’ont la nécessité pour certaines que de façon temporaire, voire éphémère et, de l’autre, les propriétaires fonciers souhaitent que leurs biens ne restent pas inoccupés. Les collectivités cherchent à redynamiser leur centre-ville dont les commerces sont pour certains restés fermés durant la crise sanitaire pour leur redonner vie.

 

Plusieurs outils juridiques s’offrent à eux comme la constitution de foncières, mais aussi des mises en location de courte durée à travers les boutiques éphémères et les restaurants 2.0 dit Dark kitchen dont nous avons choisi de faire le sujet principal de cette LDPA.

 

Bonne lecture et bel été.

 

My-Kim YANG-PAYA

Plus besoin de produire son extrait Kbis ou répertoire des métiers pour les démarches administratives

Principe :

Le décret n° 2021-631 du 21 mai 2021 supprime à compter du 1er novembre 2021 (sous réserve d’un décret de prorogation de l’entrée en vigueur) tous les textes qui obligent les entreprises, commerçants, artisans de produire leur extrait Kbis au répertoire des métiers et remplace cette obligation par la nécessité de communiquer leur numéro unique d’identification auprès de l’INSEE, soit leur numéro d’immatriculation auprès du Registre du Commerce et des Sociétés (R.C.S.).

 

 

En pratique :

Plus besoin de fournir ce document pour :

  • L’ouverture d’une procédure de sauvegarde (C. Com., art. R. 621-1 modifié), de redressement (art. R. 631-1 modifié) ou de liquidation judiciaire (art. R. 631-1 précité sur renvoi de l’art. R. 640-1) ;
  • L’autorisation d’exploitation commerciale (C. Com., art. R. 752-7 modifié) ;
  • L’inscription d’un transfert de droits sur un brevet ou une marque par suite d’une fusion ou d’une scission (Code de la Propriété Intellectuelle art. R. 613-56 et R. 714-4 modifiés).

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My-Kim Yang-Paya

Confirmation de la charge de la preuve partagée en matière d’existence de nombre de jours travaillés dans le cadre d’une convention de forfait en jours

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre de jours de travail effectués par le salarié dans le cadre d’une convention de forfait en jours, la preuve n’incombe spécialement à aucune des parties. Le juge ne peut, se fonder sur l’insuffisance des preuves apportées par le salarié pour rejeter une demande de paiement de jours travaillés, mais doit examiner les éléments que l’employeur est tenu de lui fournir.

Le juge ne peut pas rejeter une demande de paiement de jours travaillés au seul motif que le salarié n’apporte pas la preuve qu’il a travaillé au-delà du nombre de jours prévu dans sa convention de forfait.

En l’espèce, une cour d’appel avait débouté un salarié de sa demande de rappel de salaire en retenant que les relevés de badgeage produits par le salarié pour la première fois un mois avant l’audience d’appel ne sont pas de nature à étayer sa demande, la situation de ses anciens collègues, dont la durée de travail était calculée en heures et qui relevaient des accords de modulation, ne pouvant être comparée à la sienne. L’arrêt ajoute que les attestations versées aux débats par le salarié sont dépourvues de précision. La cour d’appel en déduit que l’existence d’heures supplémentaires n’est pas établie.

Sans surprise, et dans la continuité de sa jurisprudence (voir par ex. Cass. Soc., 23 septembre 2009, nº 08-41.377), la Cour de cassation censure l’arrêt en relevant que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre et, d’autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément sur le nombre de jours effectivement travaillés par le salarié. La cour d’appel ne pouvait donc faire peser la charge de la preuve sur le seul salarié.

L’employeur préviendra utilement ce type de contentieux en établissant un document de contrôle qui est généralement intégré dans le bulletin de paie. Pour consolider la charge de la preuve, il est conseillé de privilégier un document signé par le salarié et le représentant de l’employeur faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées afin de répondre à l’obligation prévue à l’article L.3121-65 du Code du travail concernant la convention individuelle de forfait-jours.

Benoit Roseiro

Location en meublés touristiques et trouble manifestement illicite : le syndicat des copropriétaires à intérêt à agir

Les locations en meublés touristiques de courte durée sont particulièrement encadrées et surveillées dans les grandes villes françaises et ce, notamment, afin de lutter contre la pénurie de logements destinés à la location.

Il n’est pas rare que certaines locations en meublés touristiques engendrent des nuisances ainsi que des désagréments aux autres occupants, dans les immeubles en copropriété.

Les faits :

Dans un immeuble haussmannien de standing, à destination d’habitation bourgeoise, professionnelle et commerciale, deux sociétés copropriétaires ont décidé, d’exercer une activité de locations meublées de courte durée destinée à une clientèle touristique de passage.

Les copropriétaires réunis en assemblée générale ont décidé d’agir à l’encontre de ces sociétés, estimant que ces locations étaient non conformes aux termes du règlement de copropriété, en sollicitant notamment la cession des nuisances liées à ces activités.

 

Principe :

Le Juge des référés retient que le demandeur à un intérêt à agir pour faire cesser les nuisances liées aux locations de courte durée, dans la mesure où ces nuisances sont de nature à atteinte indivisiblement l’ensemble des parties communes et privatives.

Le Tribunal rappelle, aux termes de son ordonnance, que la liberté d’usage et de jouissance des parties privatives est ainsi tempérée par le droit concurrent des autres copropriétaires et par l’intérêt supérieur de l’immeuble qui résulte de sa destination.

Ainsi, bien que l’activité de location saisonnière ne constitue pas, en elle-même, une violation des stipulations du règlement de copropriété c’est sous réserve qu’elle n’engendre pas de trouble aux autres copropriétaires et qu’elle ne porte pas atteinte à la destination de l’immeuble.

Or, en l’espèce, les pièces produites aux débats permettaient de caractériser de nombreuses nuisances et des troubles manifestement illicites, justifiant ainsi que le Tribunal ordonne la cessation, pour une durée de 16 mois, les activités de location saisonnière au sein des locaux, et ce sous astreinte.

 

 

Apport :

Le Syndicat des copropriétaires a donc un intérêt pour agir afin de faire cesser l’ensemble et nuisances et troubles manifestement illicites et garantir le respect des termes du règlement de copropriété par les copropriétaires et les tiers et plus particulièrement la destination de l’immeuble.

Le Juge des référés peut, dès lors, ordonner toute mesure et notamment la cessation d’activités, lorsqu’elles occasionnent un trouble manifestement illicite et porte atteinte aux droits des autres copropriétaires.

 

Myriam Dahmane

SCI : responsabilité pour fautes de gestion et quitus de l’assemblée des associés

Les faits :

Une société civile immobilière a assigné son ancien gérant en réparation de ses préjudices en invoquant des fautes commises dans sa gestion. La Cour d’appel de Bastia a condamné le gérant à verser la somme de 120 000 € en réparation du préjudice financier. Celui-ci a alors formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

Le demandeur au pourvoi soutient que l’assemblée des associés lui a donné quitus en « pleine connaissance » des actes de vente qui lui ont été ensuite reprochés au titre des fautes de gestion.

 

Ainsi, la Cour de cassation devait donc se prononcer sur la question classique de la valeur libératoire de responsabilité du quitus donné par l’assemblée des associés.

 

Principe :

La Haute Cour rejette le pourvoi et rappelle, en application de l’article 1843-5, alinéa 3, du Code civil, qu’aucune décision de l’assemblée des associés ne peut avoir pour effet d’éteindre une action en responsabilité contre les gérants pour les fautes commises dans l’accomplissement de leur mandat.

Elle précise que la Cour d’appel n’avait pas à rechercher si les associés avaient été spécialement informés. Elle conclut donc que le quitus donné par l’assemblée des associés ne peut avoir d’effet libératoire pour les fautes de gestion du gérant.

 

Apport :

Ordinairement, le quitus ne vaut pas décharge de responsabilité pour le gérant.

En effet, il est traditionnellement admis que si les associés disposent d’une action personnelle contre le gérant en réparation d’un préjudice personnel distinct de celui de la société, le quitus donné au gérant par l’assemblée générale ne peut l’éteindre (v. par ex., Cass, Civ., 3ème, 4 novembre 1976, n° 75-14.195, Bull. civ. III, n° 381).

Ainsi, la présente décision est donc conforme à la jurisprudence et contribue à renforcer ce qui apparaît comme un principe du droit des sociétés, à savoir l’indisponibilité de l’action sociale.

Néanmoins, le quitus peut parfois couvrir certaines irrégularités comme celles affectant la convocation à l’assemblée entraînant la nullité des résolutions. Il est alors possible d’en déduire que l’efficacité du quitus pourrait aussi s’apprécier au regard de la qualité de l’information fournie aux associés. Dès lors qu’elle est loyale et claire, le quitus pourrait produire ses effets.

Il s’agit toutefois dans cette hypothèse d’un quitus ratifiant une résolution d’assemblée générale, ce qui n’est pas le cas en l’espèce puisqu’était ici en cause une action en responsabilité pour faute de gestion et non une action en nullité d’une résolution de l’assemblée.

 

Elie Lellouche

Cautionnement : recevabilité de l’action paulienne du créancier

Les faits :

Une banque bénéficiaire d’un cautionnement s’est vu débouter de l’action paulienne qu’elle avait formée contre les cautions aux fins de voir constater l’inopposabilité à son égard d’une donation-partage consentie par ces dernières à leurs enfants, au motif que le cautionnement ayant, dans une autre instance, été jugé manifestement disproportionné aux biens et revenus des cautions sur le fondement de l’article 341-4, devenu les articles L. 332-1 et L. 343-4, du Code de la consommation, elle ne disposait plus d’une créance certaine au moment où le juge saisi de la fraude paulienne statuait, peu important l’appel de la banque sur la disproportion.

 

Principe :

La Cour de cassation rappelle au visa de l’article 1341-2 du Code civil que  si le créancier qui exerce l’action paulienne doit invoquer une créance certaine au moins en son principe à la date de l’acte argué de fraude et au moment où le juge statue sur son action, il est néanmoins recevable à exercer celle-ci lorsque l’absence de certitude de sa créance est imputée aux agissements frauduleux qui fondent l’action paulienne.

 

Apport :

D’une part, l’arrêt se prononce sur le fait que, même au moment où le juge statue, le créancier est admis à se prévaloir d’un principe certain de créance – et ne doit donc pas justifier d’une créance certaine.

En effet, l’action paulienne se rapprochant davantage d’une mesure conservatoire que d’une mesure exécutoire, une créance certaine en son principe lorsque le juge statue suffit.

D’autre part, si les cautionnements litigieux avaient été jugés disproportionnés lors de leur conclusion, pour autant la banque pouvait encore s’en prévaloir en établissant que le patrimoine des cautions, au moment où celles-ci étaient appelées, leur permettait de faire face à leur obligation.

La Cour d’appel saisie de la fraude paulienne ne pouvait, dès lors, la débouter, sans rechercher, comme la banque l’y invitait, si, en l’absence des actes que celle-ci arguait de fraude paulienne, le patrimoine des cautions ne leur aurait pas permis de faire face à leur obligation au moment où elles ont été appelées, ce qui, le cas échéant, doit permettre de lui reconnaître un principe certain de créance, en dépit de la disproportion des engagements des cautions au moment de leur souscription. La Cour d’appel aurait aussi pu surseoir à statuer dans l’attente de la décision du juge du cautionnement, saisi de l’appel de la banque.

 

Aliénor De Roux

« Dark Kitchen » : quel encadrement juridique pour ces nouveaux restaurants 2.0 ?

Également appelé « restaurant virtuel » ou encore « restaurant fantôme », le concept de Dark Kitchen connaît un succès croissant depuis la crise sanitaire avec le confinement et la fermeture des restaurants traditionnels.

Ce nouveau concept soulève toutefois bon nombre de questions juridiques (s’agissant notamment de la flexibilité du type de bail, des obligations de déclaration et de formation, du permis éventuel d’exploitation, etc.) et pose plusieurs défis pour l’avenir (dépendance économique aux plateformes sur Internet, risques de concurrence déloyale….).

Il peut recouvrir plusieurs types de situations :

  • Il peut s’agir d’une structure qui n’est pas destinée à recevoir de la clientèle, mais qui est optimisée pour la vente à emporter. En ce sens, les locaux d’une Dark Kitchen ne sont composés que d’une cuisine et n’ont pas de salle de restaurant pour accueillir clients et serveurs ;
  • Une Dark Kitchen peut aussi être caractérisée par une société spécialisée qui va prendre à bail le local en le divisant en plusieurs espaces de cuisines sous-loués par différents restaurateurs au titre d’un abonnement mensuel « clé en main » moyennant le versement d’une redevance additionnelle fixée en fonction d’un pourcentage du chiffre d’affaires ;
  • Il peut aussi s’agir d’un laboratoire équipé d’une cuisine avec extraction, qui livre d’autres restaurants virtuels ou physiques en centre-ville, lesquels n’ont plus qu’à réchauffer, conditionner, et livrer les plats préparés sous leur enseigne.

Ce nouveau mode d’exploitation de l’activité de restauration permet ainsi, grâce à une optimisation évidente des coûts d’exploitation, de générer une rentabilité plus importante en échappant aux contraintes réglementaires d’un Etablissement Recevant du Public (ERP).

Il se conjugue par ailleurs parfaitement avec les nouvelles obligations de distanciation sociale. C’est là tout l’avantage d’une zone de chalandise virtuelle car la clientèle potentielle est bien plus importante qu’une clientèle de quartier attachée à sa boutique physique.

 

Mais comment matérialiser la virtualité de ce type d’activité sur un plan juridique ?

Le contrat de location d’une Dark Kitchen

Ces établissements sont généralement à la recherche de souplesse et de flexibilité. L’idée est de pouvoir s’installer rapidement, tester immédiatement son concept de cuisine et, si cela ne marche pas, déménager dans les meilleurs délais.

Ces structures ne sont pas attachées à la localisation comme peut l’être un restaurant traditionnel et elles peuvent ainsi facilement déménager sans perdre leur clientèle. Dans ces conditions, le statut strict des baux commerciaux ne semble pas adapté.

Deux alternatives au bail commercial pourraient donc être envisagées :

  • Le contrat de bail dérogatoire d’une durée maximale de 3 ans. Ce type de contrat offre évidemment en apparence une grande flexibilité à la structure exploitant le restaurant virtuel. Il conviendra toutefois de rester vigilant pour éviter tout risque de requalification en bail commercial en cas de maintien dans les lieux à l’expiration du contrat.
  • Le contrat de prestation de services avec mise à disposition d’un espace de travail (cuisine) : c’est le type de contrat que l’on retrouve souvent pour les espaces de coworking de type WeWork. Dans cette situation, la mise à disposition du local n’est qu’accessoire. Le contrat est plus complet, puisqu’il inclut également la fourniture de prestations de services annexes (service de référencement du restaurant sur Internet et livraison des repas, fourniture des équipements nécessaires au stockage des denrées et à leur préparation type fours, lave-vaisselles, friteuses, meubles réfrigérés, etc.).

Quel que soit le type de contrat choisi, il conviendra de s’assurer que la destination contractuelle du contrat choisi offre bien la possibilité de pratiquer la vente à emporter, bien que la jurisprudence semble s’être tout récemment assouplie sur ce point (CA Paris, Pôle 5 – Chambre 3, 17 février 2021, n° 18/07905).

 

La formation hygiène liée à l’exploitation d’une Dark Kitchen 

Dès lors qu’il y a manipulation de denrées alimentaires, l’exploitant doit s’inscrire à une formation Hygiène Alimentaire en application de l’article L. 233-4 du Code rural et de la pêche maritime. De fait, dans la mesure où les Dark Kitchen sont des établissements de production, transformation et vente de produits alimentaires, elles sont soumises à cette règlementation.

En cas de non-respect de l’obligation du suivi de cette formation, le professionnel pourrait se voir délivrer une mise en demeure d’avoir à s’y conformer. A défaut, il s’exposerait à une contravention de 5e classe, avec une amende pouvant s’élever jusqu’à 3.000 euros.

 

L’obligation de déclaration d’une Dark Kitchen auprès de la Direction Départementale de la Protection des Populations (DDPP).

En application de l’article L. 233-2 du Code rural et de la pêche maritime, tout exploitant d’un établissement produisant, manipulant ou entreposant des denrées d’origine animale destinées à la consommation humaine doit déclarer son établissement auprès de la DDPP ou obtenir son agrément.

Pour les Dark Kitchen qui vendent à des consommateurs (via des plateformes types Deliveroo ou UberEat) c’est ainsi le régime de la déclaration qui s’applique. Pour les restaurants virtuels qui vendent à d’autres professionnels, le régime de l’agrément serait susceptible de s’appliquer sauf dispenses exceptionnelles.

 

Le permis d’exploitation d’une Dark Kitchen 

Ces restaurants doivent être titulaires d’une licence de vente à emporter s’ils souhaitent vendre de l’alcool en ligne. Il en existe deux :

  • la petite licence à emporter (pour le cidre, le vin et la bière) ;

     

  • la licence à emporter (grande licence), pour les alcools de plus de 18°.

Aucun permis d’exploitation n’est nécessaire pour détenir une telle licence. À noter toutefois qu’un permis d’exploitation s’avèrera indispensable pour ceux qui souhaitent vendre de l’alcool de nuit entre 22h et 8h du matin.

 

***

 

Si ces nouveaux restaurants 2.0 se présentent comme un concept incontournable dans nos sociétés ultra connectées, il pose en droit plusieurs questions notamment celle de la valorisation d’un « fonds de commerce numérique » composé d’une clientèle, d’une enseigne, mais également d’une position référentielle dans l’algorithme des plateformes de référencement (marketplaces). Ainsi, en raisonnant par analogie avec le bail commercial et son statut protecteur, on peut se demander s’il n’existerait pas à terme un moyen légal de protéger cette position référentielle, afin de pouvoir la valoriser et la céder, comme un fonds de commerce classique.

 

Par Alexane Raynaldy, Avocate directrice en Baux commerciaux

Paris – Stage – Fonction publique

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Le renouveau des infrastructures de recharge de véhicules électriques

Schémas directeurs de développement et nouveau cadre règlementaire

 

Les ventes de véhicules électriques et hybrides rechargeables neufs sont en nette augmentation depuis 2019. Cette forte progression, qui s’explique notamment par la mise en œuvre récente d’un plan de déploiement massif d’infrastructures de recharge pour véhicules électriques et hybrides rechargeables (IRVE)[1], a vocation à se poursuivre.

Un décret pris en application de l’article 68 de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (loi « LOM ») et publié le 10 mai 2021, porte sur  les schémas directeurs de développement des IRVE ouvertes au public, lesquels permettent aux collectivités territoriales et leurs groupements qui le souhaitent d’élaborer une stratégie locale de déploiement desdites infrastructures afin de parvenir à une offre de recharge suffisante sur leur territoire. Ce texte, qui apporte de nombreux éclaircissements concernant la réalisation, la validation ainsi que l’actualisation desdits schémas, s’accompagne de la parution d’un guide exhaustif en la matière à destination des collectivités et établissements publics établi par le ministère de la transition écologique. Issu d’une importante concertation avec les acteurs de la filière, il devrait largement soutenir le développement des IRVE (I).

Ensuite, la poursuite d’une transition généralisée vers l’électromobilité par une amélioration du service rendu aux utilisateurs de bornes de recharge est soutenue par un décret portant modification du décret n° 2017-26 du 12 janvier 2017 relatif aux IRVE. Ce décret, publié le 4 mai dernier, qui était très attendu par la filière de l’électromobilité, établit un cadre règlementaire qui devrait permettre auxdits usagers de bénéficier d’infrastructures optimisées ainsi qu’une prise en charge renforcée de ces dernières en termes de maintenance (II).

Les nouveaux textes :

Le guide du ministère de la transition écologique à l’attention des collectivités et établissements publics :

 

I. Les schémas directeurs de développement des IRVE

La loi LOM a créé la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements titulaires de la compétence IRVE d’élaborer un schéma directeur de développement des  infrastructures de recharge des véhicules électriques et hybrides rechargeables ouvertes au public (ci-après « schémas directeurs »).

Rappelons que, sauf dans le cas de métropoles ou de communautés urbaines qui exerceraient cette compétence de plein droit, celle-ci incombe initialement aux communes en vertu de l’article L.2224-37 du Code général des collectivités territoriales. Aux termes du deuxième alinéa de cet article, il est néanmoins loisible aux communes de transférer cette compétence aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) exerçant des compétences en matière d’aménagement, de soutien aux actions de maîtrise de la demande d’énergie ou de réduction des émissions polluantes ou de gaz à effet de serre, aux autorités organisatrices d’un réseau public de distribution d’électricité (AODE) ainsi qu’aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM).

Dans la mesure où, à compter de 2022[2], seuls les territoires couverts par un schéma directeur pourront bénéficier de la prise en charge de 75% de leur raccordement au réseau de distribution d’électricité, de nombreux schémas directeurs de développement devraient voir le jour (art. 68 de la loi LOM).

Il est utile d’exposer les principaux points d’attention sur ces schémas directeurs :

 

Réalisation d’un schéma directeur commun

En ce qui concerne les éléments de précisions importants introduits par le décret du 10 mai 2021, celui-ci prévoit que différentes entités peuvent élaborer de concert un schéma directeur dès lors que ce dernier a vocation à s’appliquer sur un territoire constituant un ensemble d’un seul tenant (art. R. 353-5-7 du Code de l’énergie). Comme cela est indiqué dans le guide à l’attention des collectivités et établissements publics de mai 2021, une telle mutualisation des expertises et des ressources est susceptible de permettre une meilleure cohérence territoriale, l’établissement d’un schéma sur un trop grand périmètre – tel qu’à l’échelle régionale par exemple – étant cependant déconseillé.

 

Articulation entre le schéma directeur et d’autres documents de planification

Le nouveau décret précise par ailleurs que lorsque la personne chargée d’élaborer le schéma directeur est également en charge de l’élaboration du plan de mobilité (PDM) ou du plan climat-air-énergie territorial (PCAET), ces documents tiennent lieu de schéma directeur dès lors qu’ils respectent les exigences des articles R.353-5-1 à R.353-5-9 du Code de l’énergie (art.R.353-5-1 du Code de l’énergie).

En tout état de cause, si, le cas échéant, l’entité chargée de la réalisation du PDM ou du PCAET diffère de celle qui est responsable de la conception du schéma directeur, cette dernière devra recueillir auprès de la première collectivité les éléments devant être pris en compte par le schéma directeur.

 

Etapes d’élaboration du schéma

S’agissant plus spécifiquement des étapes d’élaboration d’un schéma directeur, le décret du 10 mai 2021 indique que celui-ci comprend un (1) diagnostic, un (2) projet de développement et des objectifs chiffrés, un (3) calendrier de mise en œuvre précisant les ressources à mobiliser ainsi qu’un (4) dispositif de suivi et d’évaluation.

 

Mise en œuvre d’une concertation

En amont toutefois de cet exercice de planification que constitue la conception d’un schéma directeur mais également de façon ponctuelle, tout au long des différentes étapes de sa constitution, plusieurs acteurs doivent participer à une concertation dont les conditions d’organisation sont librement fixées par la collectivité en charge de l’établissement du schéma précité. Il s’agit d’une concertation ayant notamment pour objectif de sensibiliser les entités en présence aux problématiques soulevées par le déploiement des IRVE, d’identifier les différents besoins locaux et de parvenir à la définition d’un projet adapté à ces derniers.

En outre, aux termes de l’article R.353-5-2 du Code de l’énergie, doivent y participer la région, les gestionnaires de voirie concernés, le ou les gestionnaires de réseaux de distribution publique d’électricité concernés et, lorsqu’elles ne sont pas chargées de l’élaboration du schéma directeur, les autorités organisatrices de la distribution d’électricité, les autorités organisatrices de la mobilité, les acteurs publics ou privés qui sont aménageurs d’infrastructures de recharge ouvertes au public sur le territoire couvert par le schéma directeur, ainsi que toute personne amenée à assumer la responsabilité d’aménageur de nouvelles infrastructures de recharge.

De plus, le guide susmentionné préconise d’associer à cette consultation les communes et EPCI compétents pour la gestion du stationnement du fait de leur connaissance du parc, tout comme d’associations d’usagers de véhicules électriques ainsi que celle d’entreprises du domaine de la logistique et du tourisme.

 

Établissement d’un diagnostic

Durant une période dont la durée est estimée entre six et huit mois par les rédacteurs du guide susmentionné, la personne chargée de la réalisation d’un schéma directeur doit établir un diagnostic comprenant (art. R.353-5-3 du Code de l’énergie) :

  • Un état des lieux de la mobilité électrique et de l’utilisation des infrastructures de recharge ouvertes au public existantes réalisé eu égard, d’une part, aux données statiques disponibles sur la plateforme publique gouv.fr, lesquelles correspondent aux caractéristiques techniques des stations et des points de recharge de véhicules électriques ouverts au public et, d’autre part, au regard des données dynamiques fournies par les opérateurs s’agissant de la manière dont ces stations et bornes sont utilisées en pratique.

  • Une évaluation de l’évolution des besoins en infrastructures de recharge ouvertes au public (i) à une échéance de long terme, supérieure ou égale à cinq ans et (ii) à une échéance de moyen terme de trois ans au plus. Cette évaluation est entreprise au vu d’une analyse de l’existant ainsi qu’au regard des spécificités territoriales qui sont susceptibles d’impliquer des usages variés de la mobilité électrique. Un profil type des utilisateurs du territoire doit également être dressé.

  • Une évaluation du développement de l’offre de recharge induit par la mise en œuvre de dispositions législatives et réglementaires ou par des projets éventuels d’implantation d’infrastructures de recharge ouvertes au public. Il s’agit d’une étude des projets publics et privés planifiés dans le périmètre du futur schéma directeur aux fins de permettre une coordination optimale des différents projets.

  • Une évaluation, fournie par les gestionnaires du réseau public de distribution d’électricité concernés, des capacités d’accueil d’infrastructures de recharge ouvertes au public par le réseau à une échéance de long terme, supérieure ou égale à cinq ans, et, d’autre part, à une échéance de moyen terme de trois ans au plus. Cette évaluation menée en collaboration avec les gestionnaires de réseau a notamment vocation à éviter que des extensions de réseau soient entreprises inutilement.

 

Identification des priorités et définition des objectifs poursuivis par la collectivité

Sur la base des concertations engagées avec les différents acteurs du territoire et des résultats du diagnostic précité, il appartient à la collectivité sur laquelle pèse la réalisation du schéma directeur d’établir une stratégie territoriale consistant notamment en la définition des priorités de déploiement des points et stations de recharge, en l’établissement d’une articulation entre les offres privées et les offres publiques ainsi qu’en la détermination d’un modèle économique de déploiement viable, le tout en s’efforçant de garantir la mise en œuvre d’une politique de tarification cohérente et attractive pour les futurs utilisateurs (art. R.353-5-4 du Code de l’énergie).

 

Description du calendrier de mise en œuvre précisant les ressources à mobiliser

La mise en œuvre de ce calendrier d’actions est l’occasion pour la collectivité ou l’établissement public de définir les moyens techniques et financiers à engager dans le but d’atteindre les objectifs identifiés (art. R.353-5-5 et R.353-5-9 du Code de l’énergie). Une illustration du calendrier pouvant être élaboré est à cet égard proposée dans le guide précité. Ses rédacteurs y présentent notamment deux scénarios destinés à permettre à la collectivité de parvenir au déploiement d’une infrastructure. À titre d’exemple, le premier consiste à déployer un faible nombre de stations de recharge et ce, à leur capacité maximale, avec un maillage minimal et d’y installer progressivement de nouvelles stations tandis que dans le second scénario, il est question de déployer un grand nombre de stations avec un effectif de points de recharge limités (2 au minimum), et augmenter la capacité des stations progressivement en fonction de l’évolution des besoins.

 

Validation du schéma directeur

Après une première adoption, un projet de schéma directeur accompagné d’un fichier comprenant les principales données chiffrées du diagnostic et des objectifs retenus est transmis pour avis au préfet de département. Sans réponse dans un délai de deux mois ou après validation du préfet, le schéma directeur est réputé approuvé. Dans le cas contraire, le schéma est modifié pour tenir compte de l’avis du préfet et est soumis à une nouvelle adoption par l’organe délibérant de la collectivité ou de l’établissement public. Les différentes données contenues dans le fichier susmentionné doivent être rendues publiques par ces derniers sur data.gouv.fr dans un délai de deux mois (art. R. 353-5-6 du Code de l’énergie).

 

Actualisation du schéma directeur

La mise à jour du schéma directeur requiert, au regard de l’actualisation préalable du diagnostic et d’une évaluation chiffrée, la définition de nouvelles échéances de moyen et long terme. Le schéma actualisé est adopté à l’issue du même processus d’approbation que celui qui prévaut en matière de validation (art. R.353-5-9 du Code de l’énergie).

Au total, si les collectivités territoriales et leurs groupements compétents en matière d’IRVE bénéficient dans ce nouveau cadre d’une certaine marge de manœuvre pour définir les modalités d’élaboration de leurs schémas directeurs, leur adoption devrait dans tous les cas favoriser un maillage territorial optimisé en renforçant la maitrise des risques et des coûts induits par le développement sur leur territoire d’IRVE.

 

 

II. Modification du décret du 12 janvier 2017 relatif aux IRVE

Pris en application cette fois-ci de l’article 67 de la loi « LOM », le décret n° 2021-546 du 4 mai 2021, venu partiellement modifier le décret n° 2017-26 du 12 janvier 2017 relatif aux IRVE et portant diverses mesures de transposition de la directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs, contrairement au précédent décret étudié, concerne tout autant les IRVE ouvertes aux publiques que celles qui ne le sont pas et entend favoriser la qualité de services offerts aux utilisateurs ainsi qu’une meilleure interopérabilité et maintenance des bornes de recharge.

Il sera exposé les principaux apports de ce texte :

 

Élargissement du champ d’application du décret IRVE de 2017

Le décret du 4 mai 2021 retire du premier article du décret de 2017 la référence faite aux « véhicules de catégorie L, au sens de l’article R. 311-1 du code de la route, dont la puissance maximale de recharge ne dépasse pas 2 kW » auxquels ce décret n’était pas applicable jusqu’alors. Le décret de 2017, tel que nouvellement modifié, comprend désormais un chapitre III pleinement consacré aux points de recharge réservés à ce type de véhicules.

 

Introduction de nouvelles définitions

Au-delà de la correction de certaines confusions rédactionnelles présentes au sein de l’article 2 du décret du 12 janvier 2017 consacré aux définitions afférentes au champ lexical des IRVE – l’on songe notamment à la définition de la station de recharge ou bien encore à celle du point de recharge qui méritaient d’être rectifiées -, le nouveau décret définit notamment et ce, de façon inédite, les contours de la notion essentielle « d’interopérabilité », laquelle se caractérise dorénavant comme étant « la capacité d’un composant ou d’un ensemble de composants d’un système utilisé pour la recharge d’un véhicule électrique à fonctionner avec d’autres composants ou systèmes de même finalité sans restriction de mise en œuvre ou d’accès à la recharge, en respectant des interfaces standardisées ouvertes en termes mécaniques, électriques et de protocoles d’échanges de données ».

 

Mise à disposition des données des stations de recharge

En outre, s’agissant de la mise à disposition des données des stations de recharge, il est constant que pèse sur l’opérateur d’infrastructure une obligation d’utilisation d’un système de supervision qui permet notamment l’échange de données avec chaque point de recharge (art.11 du décret du 12 janvier 2017 modifié). Le nouveau décret exonère toutefois de cette obligation l’aménageur « qui met à la disposition du public une seule station de recharge d’une puissance maximale appelable inférieure ou égale à 36 kVA, de 5 points de recharge au plus, et qui n’est pas intégrée à un réseau d’infrastructures de recharge », lequel demeure tout de même tenu de s’assurer notamment de l’état de fonctionnement des points de recharge  (art.12 du décret du 4 mai 2021).

De plus, en sus des données relatives à la localisation géographique ainsi qu’aux caractéristiques techniques des stations et points de recharge ouverts au public, lesquelles doivent être accessibles sur la plateforme publique data.gouv.fr (voir en ce sens l’arrêté du 4 mai 2021 relatif aux données concernant la localisation géographique et les caractéristiques techniques des stations et des points de recharge pour véhicules électriques), l’aménageur doit désormais rendre publique l’indisponibilité d’une infrastructure de recharge résultant d’un incident affectant l’utilisation de tout ou partie de cette dernière pendant plus de deux heures (art.14 du décret du 4 mai 2021).

 

Qualité du service rendu aux usagers

Sur ce point enfin, il ressort du récent décret que les travaux de maintenance sur les IRVE doivent dès à présent être effectués par des professionnels habilités (art.15 du décret du 4 mai 2021). De plus, les éléments constitutifs des infrastructures ouvertes au public doivent désormais être soumis à des exigences techniques à des fins de sécurité, de fiabilité et d’interopérabilité (art.18 du décret du 4 mai 2021). En ce sens, ces mêmes IRVE seront dorénavant contrôlées au moins une fois par an par une personne ou un organisme compétent (art.17 du décret du 4 mai 2021). Par ailleurs, il importe de souligner que l’article 15 du décret du 4 mai 2021 impose désormais la réalisation d’une étude de conception électrique pour tout projet de création d’une infrastructure de recharge dans un parc de stationnement comportant au moins 50 places ainsi que dans les bâtiments d’habitation collectifs pour tout projet de création d’une infrastructure de recharge prévoyant au moins quatre points de charge.

De façon générale, le nouveau décret fait peser sur l’aménageur d’une IRVE ouverte au public une obligation de prendre « les mesures appropriées pour assurer la continuité du service de recharge » (art.17 du décret du 4 mai 2021).

 

Par Thomas Rouveyran

[1] Voir notre précédent article dans la Lettre d’actualités juridiques Energie & Environnement de Seban & Associés de février 2021 : « Planification 2020/2021 : un soutien renforcé au déploiement des bornes de recharge pour véhicules électriques ». (https://www.seban-associes.avocat.fr/planification-2020-2021-un-soutien-renforce-au-deploiement-des-bornes-de-recharge-pour-vehicules-electriques/)

[2] Le projet de loi Climat et Résilience actuellement débattu devant le Parlement pourrait toutefois prévoir que ce dispositif incitatif soit prolongé au 30 juin 2022.

Risques naturels : évolution de la réglementation relative au Fonds Barnier

Décret n° 2021-518 du 29 avril 2021 relatif au fonds de prévention des risques naturels majeurs (modification de la partie réglementaire du code de l’environnement)

La loi de finances pour 2021[1] a réécrit l’article L. 561-3 du Code de l’environnement (C. env.) relatif au fonds de prévention des risques naturels majeurs, également appelé « Fonds Barnier », en intégrant celui-ci dans le budget de l’Etat. Ce fonds est chargé de financer les indemnités allouées dans le cadre de l’expropriation de biens exposés à un risque naturel majeur ainsi que les dépenses liées à la limitation de l’accès et à la remise en état des terrains accueillant les biens exposés

 

Deux décrets du 29 avril 2021 tirent les conséquences de ce changement et apportent des précisions quant à l’utilisation et au fonctionnement du Fonds.

 

En premier lieu, le décret n° 2021-516 du 29 avril 2021 portant abrogation de certaines dispositions relatives à la prévention des risques naturels majeurs abroge et supprime certaines dispositions réglementaires relatives à la prévention des risques naturels majeurs dans la partie réglementaire du Code de l’environnement, notamment celles relatives à la gestion du Fonds comme fonds de nature extra-budgétaire. Il simplifie également la procédure d’expropriation des biens exposés à un risque naturel majeur en chargeant le Préfet de piloter intégralement cette procédure, en supprimant toute intervention du ministre chargé de la prévention des risques majeurs.

 

En second lieu, le décret n° 2021-518 du 29 avril 2021 relatif au fonds de prévention des risques naturels majeurs (modification de la partie réglementaire du code de l’environnement), quant à lui, met en œuvre l’intégration du Fonds au budget général de l’Etat et précise les taux, les plafonds et les durées des contributions du Fonds. Il modifie (« améliore » selon les termes de la notice du décret) en outre la prise en charge par le Fonds des mesures de prévention des risques naturels et hydrauliques.

 

Parmi les nouvelles dispositions notables mises en place par ce décret, on peut notamment relever la possibilité pour le Fonds de financer, dans les mêmes conditions que l’expropriation jusqu’alors en vigueur, l’acquisition amiable de biens exposés à un risque naturel majeur ou de leurs terrains d’assiette par une commune, un groupement de communes, un établissement foncier ou l’Etat. Cette contribution se fait alors sous réserve que les terrains acquis soient rendus inconstructibles dans un délai de trois ans, sans quoi la collectivité (à l’exclusion de l’Etat donc) devra rembourser les fonds, et à la condition que le prix de l’acquisition des biens exposés ou sinistrés n’excède pas le montant des éventuelles indemnités permettant le remplacement des biens. La contribution du Fonds au financement de ces acquisitions s’effectue alors à raison de la totalité des dépenses éligibles, dans la limite toutefois de 240.000 euros par bien acquis. Sa contribution au financement des mesures nécessaires pour remettre en état les terrains, limiter l’accès à ces terrains ou empêcher toute occupation des biens expropriés s’effectue, de la même façon que précédemment, à 100% des dépenses éligibles, dépenses non comprises dans le plafond précité de 240.000 euros. Enfin, les expropriations et acquisitions amiables effectuées par un établissement public foncier sont conditionnées, lorsqu’elles sont financées par le Fonds à la signature préalable par l’établissement public foncier d’une convention cadre avec l’Etat et de conventions opérationnelles avec les communes concernées ou leurs groupements (nouvel article D. 561-12-1 C. env.).

 

Par ailleurs, désormais, un plafonnement de la participation du Fonds est appliqué au financement des études et actions de prévention ou de protection contre les risques naturels entrepris par les collectivités territoriales. Ce plafonnement varie en fonction du statut du plan de prévention des risques naturels prévisibles arrêtés par les collectivités concernées : un plafonnement plus élevé est appliqué aux plans approuvés par rapport à ceux qui sont seulement prescrits (nouvel article D. 561-12-3 du C. env).

 

Un plafonnement est également désormais prévu s’agissant du comblement des cavités souterraines menaçant gravement les vies humaines. Le financement des opérations de reconnaissance, études ou travaux réalisés dans ce cadre ne peut ainsi dépasser 80% du montant total, dans la limite de 36.000 euros par bien et sans être supérieur à 50% de la valeur vénale du bien (nouvel article D. 561-12-5 du C. env.).

 

Le fond peut également prendre en charge les études et travaux de prévention rendus obligatoires par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, à hauteur de 20% des dépenses éligibles réalisées sur des biens utilisés dans le cadre d’activités professionnelles dans la limite de 10% de la valeur vénale du bien, à hauteur de 50% du montant des études de diagnostic de la vulnérabilité des biens et à hauteur de 80% des dépenses éligibles réalisées sur des biens à usage d’habitation ou à usage mixte pour les études travaux de prévention, dans la limite de 36 000 euros et de 50% de la valeur vénale du bien (nouvel article D. 561-12-7 du C. env.).

 

Toutefois, les travaux de prévention et de protection relatifs aux infrastructures de transport et aux réseaux ne peuvent par être pris en charge par le Fonds (nouvel article D. 561-12-6 du C. env.)

 

En revanche, les études menées pour le compte de l’Etat pour l’évaluation des risques naturels ainsi que les mesures de préventions à mener pour prévenir ces risques peuvent être prises en charge à hauteur de 100% de la dépense (nouvel article D. 561-12-9 du C. env.).

 

Le décret prévoit également l’insertion dans le Code de l’environnement de plusieurs articles relatifs au Conseil d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs. Ce conseil est placé auprès du ministre chargé de l’environnement. Il est chargé de donner des avis et de faire des propositions en matière de prévention des risques naturels, en particulier dans le domaine de l’amélioration de la connaissance des risques et du renforcement de leur surveillance et de leur prévention, du renforcement de la prise en compte des risques dans l’utilisation des sols et dans la construction, du développement des méthodes d’analyse et d’expertise dans le domaine du risque naturel et s’agissant des mesures d’intervention soutenues par le Fonds (nouveaux articles D. 565-8 et suivants du C. env.).

[1] Loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021