La loi ouvre le tiers‑financement à l’Etat et aux collectivités pour favoriser les travaux de rénovation énergétique : quelles avancées concrètes ?

Afin de massifier le recours aux marchés globaux de performance (ci-après « MGP ») en matière de travaux de rénovation énergétique des bâtiments publics et ainsi d’accélérer la rénovation énergétique des bâtiments publics, la loi du 30 mars 2023 introduit une expérimentation, pendant cinq ans, d’un MGP dérogeant au droit de la commande publique pour la réalisation de ces travaux.

La levée des freins à l’investissement en matière de rénovation énergétique est d’actualité alors que les eurodéputés, les États membres et les représentants de la Commission européenne viennent de trouver un accord à l’issue d’un trilogue en date du 10 mars 2023 pour rehausser l’ambition de la directive sur l’efficacité énergétique (EED), en imposant aux Etats membres de rénover chaque année au moins 3 % de la surface totale des bâtiments appartenant à des organismes publics.

Face à l’effet ciseau auquel sont confrontées les personnes publiques, par suite tout à la fois de la hausse des coûts de l’énergie et de l’obligation d’investir massivement dans des opérations de rénovation énergétique, la loi précitée tend à rendre plus attractif les MGP.

Le recours à ces machés constitue en effet un outil à la rénovation énergétique, dont il convient néanmoins de souligner qu’il ne saurait en aucun cas suffire pour atteindre les objectifs de réduction de la consommation énergétique des bâtiments[1], et qu’il n’est que complémentaire aux autres outils à la disposition de l’Etat et des collectivités territoriales.

1. Quel est le régime des MGP ?

Rappelons que parallèlement à la fixation d’objectifs ambitieux de réduction de la consommation d’énergie finale, la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement a créé les « contrats de performance énergétique » (ci-après les « CPE ») qui peuvent prendre la forme soit d’un MGP, soit d’un marché de partenariat de performance.

Ces contrats globaux confient au prestataire aussi bien la réalisation des travaux rénovation énergétique que l’exploitation du bâtiment une fois ceux-ci terminés et ont comme particularité d’imposer que « les améliorations de l’efficacité énergétique sont garanties contractuellement », la rémunération du prestataire dépendant de l’atteinte des objectifs fixés.

Autrement dit, le CPE se distingue des autres services énergétiques par le couplage entre un investissement (dans des travaux, des fournitures et/ou des services) destiné à améliorer l’efficacité énergétique d’un bâtiment et la garantie de diminution des consommations d’énergie[2].

Ces mêmes caractéristiques sont logiquement reprises dans la définition du MGP énoncée à l’article L. 2171-3 du Code de la commande publique.

Outre, les garanties contractuelles quant à l’atteinte des objectifs de réduction de la consommation d’énergie, il en ressort que le MGP déroge aux règles d’allotissement de la commande publique en confiant l’ensemble du marché à un même prestataire, à savoir en matière de rénovation énergétique :

  • la conception des actions d’efficacité énergétique ;
  • la réalisation des actions d’efficacité énergétique (travaux sur le bâti, interventions sur les systèmes, optimisation des systèmes, actions de pilotage, actions de sensibilisation) ;
  • l’exploitation et la maintenance des installations et équipements durant la phase de garantie du résultat d’exploitation.

Néanmoins, à la différence d’un marché de partenariat de performance énergétique, l’acheteur public d’un MGP conserve la maîtrise d’ouvrage et le contrat demeure soumis à l’interdiction du tiers-financement, du paiement différé ou de la rémunération des opérations de construction sur celles liées à l’exploitation en vertu des articles L. 2171-5 et L. 2171-96 du Code de la commande publique.

Or, ces dernières contraintes financières expliquent en partie l’insuffisant recours aux MGP en matière de travaux de rénovation énergétique des bâtiments publics : en effet, seuls 380 CPE ont été conclus par des structures publiques depuis 2007 et le nombre de CPE publics se maintient autour de 30 à 40 CPE par an de 2012 à 2021[3].

C’est précisément la lacune que tente combler la loi commentée en permettant aux acheteurs, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, de différer le paiement des travaux, l’investissement financier initial reposant sur un tiers.

2. La loi du 23 mars 2023 créé-t-elle une nouvelle catégorie de contrat de performance énergétique ?

  • Une dérogation à l’interdiction de paiement différé

La loi autorise, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, l’État, ses établissements publics, les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements à déroger aux articles L. 2191‑2 à L. 2191‑8 du Code de la commande publique – en particulier à l’interdiction de paiement différé – pour les contrats de performance énergétique conclus sous la forme d’un MGP pour la rénovation d’un ou plusieurs de leurs bâtiments.

Autrement dit, ce dispositif permettra de contourner les insuffisances budgétaires de l’Etat et des collectivités territoriales en ajoutant le portage financier de la rénovation énergétique du bâtiment aux prestations de conception-réalisation et d’exploitation ou de maintenance mises à la charge du titulaire d’un contrat de performance énergétique. Par suite, la personne publique bénéficiaire des travaux pourra rembourser l’investissement réalisé par le tiers sous forme d’avance ainsi que les intérêts associés à compter de la date de livraison des travaux.

Le rattachement du dispositif expérimental aux marchés globaux de performance énergétique est censé garantir aux acheteurs publics l’atteinte d’économies substantielles d’énergie, auquel cas des pénalités financières s’appliqueront.

A ce titre, l’article 1er de la loi précise que lorsque le CPE conclu sous la forme d’un MGP porte sur la rénovation de plusieurs bâtiments, les objectifs à atteindre en matière de performance énergétique doivent être établis pour chaque bâtiment pris séparément et non de manière globale pour le lot de bâtiments. Des dérives ont effectivement pu être constatées de la part de certaines collectivités publiques, avec le recours à des CPE où les objectifs étaient fixés pour l’ensemble du lot, avec pour conséquence des difficultés à sanctionner les cas de non-respect des obligations de résultat.

Par suite, en cohérence avec la dérogation à l’interdiction de paiement différé, ces MGP expérimentaux ne seront pas soumis à :

  • l’obligation de verser des avances, dont le taux et les conditions de versement ne peuvent être modifiées en cours d’exécution[4];
  • l’obligation de verser des acomptes lorsque les prestations ont commencé à être exécutées[5].

De même, par dérogation à l’obligation de paiement direct par l’acheteur, le paiement du sous-traitant suivra les conditions prévues par le titre III de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance – soit à la charge du titulaire du marché – quel que soit le montant du contrat de sous-traitance. Le sous-traitant conservera néanmoins la possibilité d’une action directe contre le maître d’ouvrage.

Enfin, il résulte également de cette dérogation à l’interdiction du paiement différé, que, par exception aux règles applicables aux marchés publics, la loi précise que la durée du MGP est déterminée en fonction de la durée d’amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues.

  • Un dispositif au champ d’application étendu aux actions de mutualisation des EPCI et syndicats d’énergie

Une mesure intéressante est introduite par l’article 1er de la loi commentée : ce dispositif expérimental pourra s’appliquer également aux MGP conclus dans le cadre de la prise en charge des études et des travaux par des syndicats d’énergie, des EPCI ayant adopté un plan climat-air-énergie territorial mentionné à l’article L. 229-26 du Code de l’environnement, ou par la métropole de Lyon, pour le compte de leurs collectivités membres (comme le prévoit déjà le dernier alinéa de l’article L. 2224-34 du CGCT). Ces actions de mutualisation resteraient cependant soumises à l’accord des membres de ces groupements de collectivités, les travaux ne pouvant être initiés qu’après la signature de conventions entre toutes les parties.

Si d’autres hypothèses de mutualisation ressortent des II et III de l’article 2 de la loi commentée, tant leur rédaction que les débats parlementaires ne permettent malheureusement pas d’identifier avec certitude les cas envisagés. Ces articles disposent effectivement que :

I. le MGP peut être conclu pour la réalisation d’une opération répondant aux besoins d’une autre personne morale de droit public ou de droit privé en vue de l’exercice de ses missions.

A cet égard, il semble toutefois que l’article vise ici le mandat que pourrait accorder une personne publique ou privée à un tiers et qui se concrétiserait dans une convention signée entre l’acheteur et la personne morale pour les besoins de laquelle le MGP serait conclu. Cette hypothèse pourrait notamment correspondre au mandat de maîtrise d’ouvrage accordé par une commune à son EPCI ou son syndicat d’énergie (article L. 2224-34 du CGCT).

II. lorsqu’un projet relève simultanément de la compétence de plusieurs acheteurs, ils peuvent désigner par convention celui d’entre eux qui conduira la procédure de passation et, éventuellement, signera le contrat et en suivra l’exécution.

Cette hypothèse pourrait correspondre à celle d’un groupement de commandes constitué entre plusieurs acheteurs publics qui confieraient à l’un des membres dudit groupement la charge de mener tout ou partie de la procédure de passation ou de l’exécution du MGP au nom et pour le compte des autres membres. Dès lors que ces dispositions prévoient également que la convention précise, le cas échéant, les conditions de ce transfert de compétences et en fixe le terme, il n’est pas exclu que le législateur ait également entendu permettre aux acheteurs de procéder à un nouveau type de transfert de maîtrise d’ouvrage, à l’instar de celui prévu à l’article L. 2422-12 du Code de la commande publique.

  • Un dispositif contraint pour prévenir toute situation de surendettement

Le législateur a toutefois conditionné son soutien à cette expérimentation au renforcement de son suivi et de son évaluation dès lors que le tiers-financement, s’il peut être une solution utile dans certaines situations, ne doit pas être favorisé de façon systématique en raison des surcoûts finaux qu’il peut entraîner.

En effet, il n’est acquis que le tiers-financement demeure, au total, moins cher que l’emprunt bancaire classique auquel pourrait recourir une collectivité territoriale, puisque le tiers-financeur ne bénéficierait pas des mêmes conditions de crédit que l’État ou les collectivités territoriales et répercuterait, in fine, ce coût supplémentaire lors du remboursement de sa créance.

 

D’une part, dans un souci de transparence sur les engagements financiers contractés par les personnes publiques qui auront recours à cette expérimentation et compte tenu des réserves de nature financière, l’article 1er de la loi comporte des précautions visant à identifier clairement les coûts et la dette que représenteront ces nouveaux contrats.

Il en résulte que le MGP devra préciser les coûts d’investissement, les coûts de fonctionnement, les coûts de financement ainsi que les revenus issus d’activités annexes ou de la valorisation du domaine.

De même, les documents budgétaires devront être assortis (i) d’une annexe retraçant l’ensemble des engagements financiers de la collectivité ou de l’établissement public résultant des CPE avec tiers-financement, (ii) d’une annexe retraçant la dette liée à la part d’investissements de ces contrats.

D’autre part, le législateur a instauré des garde-fous visant s’assurer de l’intérêt et de la viabilité financière des projets s’inscrivant dans le cadre de l’expérimentation, dont il ressort qu’ils sont clairement inspirés du régime de passation des marchés de partenariat.

En premier lieu, avant de décider de recourir à un MGP, le IV de l’article 2 de la loi impose de procéder à une étude préalable démontrant l’intérêt du recours à ce marché et soumise à l’avis de la mission d’appui au financement des infrastructures du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique (ci-après « Fin Infra »).

Il est indiqué que la procédure de passation de ce marché ne pourra être engagée que si cette étude préalable démontre que le recours à un tel contrat est « plus favorable » que le recours à d’autres modes de réalisation du projet, « notamment en termes de performance énergétique », étant précisé que le critère du paiement différé ne peut à lui seul constituer un avantage.

Il convient de relever à ce sujet que la commission mixte paritaire a délibérément refusé de reprendre la proposition des sénateurs laquelle tendait à assouplir les conditions de mise en œuvre de l’expérimentation et permettant de recourir à ce type de MGP s’il était démontré que ce contrat était « au moins aussi favorable » que le recours à d’autres modes de réalisation du projet.

En second lieu, avant de décider de recourir à un MGP, le V de l’article 2 de la loi contraint l’acheteur à réaliser une étude de soutenabilité budgétaire qui apprécie notamment les conséquences du contrat sur les finances publiques et la disponibilité des crédits. Lorsque le MGP est conclu pour les besoins de plusieurs personnes morales, cette étude précise les engagements financiers supportés par chacune d’elles. De plus, cette étude est soumise pour avis au service de l’État compétent, en particulier les préfectures dans le cas des collectivités territoriales.

A ce titre, les débats parlementaires ont effectivement tenu pour acquis qu’il était nécessaire « d’évaluer la capacité de l’acheteur public à honorer à terme ses engagements contractuels, étant entendu que les économies d’énergie réalisées ne pourront pas compenser intégralement les importants coûts que représentent les travaux de rénovation énergétique ».

Par suite, les assemblées ou organes délibérants des collectivités et établissements publics devront se prononcer sur le principe du recours à un MGP sur présentation de l’étude préalable, l’étude de soutenabilité et au regard des avis rendus à leur égard.

De la sorte, si l’ensemble de ces dispositions doivent permettre de limiter les risques de surendettement, en particulier des petites collectivités qui auraient pu être tentées de recourir à un MGP à paiement différé sans disposer d’un financement viable, elles alourdissent nécessairement ce dispositif pourtant censé accélérer et massifier la rénovation énergétique des bâtiments publics.

Ceci est d’autant plus vrai qu’à la différence du marché de partenariat, la maîtrise d’ouvrage demeurera dans ce MGP expérimental du côté de la collectivité – dès lors qu’elle ne sera pas transférée au titulaire du contrat –, ce qui lui fera supporter davantage de risque en matière responsabilité ainsi que le coût d’assurance.

Toutefois, ce MGP présentera un avantage non négligeable par comparaison avec le régime des marchés de partenariat dont la valeur du marché doit être supérieure à un seuil – fixé par voie réglementaire à deux millions d’euros[6] – afin de réserver ce type de contrat aux marchés les plus importants : en effet, aucun seuil minimal de valeur de marché n’est imposé pour recourir au dispositif expérimental instauré par la loi.

Or, ceci est important dès lors qu’il ressort des chiffres-clés de l’Observatoire National des Contrats de Performance Energétique dans son édition de novembre 2022 que le CPE est un outil qui se prête à des travaux de rénovation énergétique pour des bâtiments ou des ensembles de bâtiments de taille très variables, étant précisé que 31 % des CPE sont menés sur des bâtiments dont la surface est inférieure à 10.000 m2, et 35 % d’entre eux portent sur un seul bâtiment ou un seul site.

  • Des précisions relatives à la procédure de passation du MGP

Lors de la passation d’un MGP à paiement différé, le IX de l’article 2 de la loi permet à l’acheteur de prévoir que les modalités de financement indiquées dans l’offre finale présentent un caractère ajustable, dès lors que ces ajustements n’ont pas pour effet de remettre en cause les conditions de mise en concurrence en exonérant l’acheteur de l’obligation de respecter le principe du choix de l’offre économiquement la plus avantageuse ni de permettre au titulaire pressenti de bouleverser l’économie de son offre.

De plus, le X de l’article anticipe l’hypothèse dans laquelle le soumissionnaire pressenti ne parvient pas à présenter le financement définitif dans un délai fixé par l’acheteur. Dans ce cas, le MGP ne pourra lui être attribué et le soumissionnaire dont l’offre a été classée immédiatement après la sienne pourra être sollicité pour présenter le financement définitif de son offre dans le même délai.

Enfin, la signature du MGP ne pourra intervenir qu’après une autorisation de l’exécutif par l’assemblée délibérante de la collectivité territoriale ou l’organe délibérant de l’établissement public local. Le contrat devra être par la suite transmis à Fin Infra.

En outre, en cas d’annulation ou de résiliation du MGP par le juge faisant à la suite du recours d’un tiers, le titulaire pourra prétendre à l’indemnisation des dépenses qu’il a engagées conformément au contrat dès lors qu’elles auront été utiles à l’acheteur, en particulier les frais liés au financement mis en place dans le cadre de l’exécution du marché, y compris, le cas échéant, les coûts pour le titulaire afférents aux instruments de financement et résultant de la fin anticipée du contrat.

*

Afin de dresser un bilan à mi-parcours de l’expérimentation créée par la loi, l’article 3 prévoit la remise au Parlement d’un rapport d’évaluation sur les MGP à paiement différé conclus dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi. Il sera par la suite mis à jour et transmis de nouveau six mois avant le terme de l’expérimentation afin de déterminer l’opportunité de son éventuelle prorogation ou pérennisation.

D’ores et déjà, on peut prévoir un recours plus fréquent aux MGP même si, il a été vu, les conditions de passation de tels marchés à paiement différé s’alourdissent fortement. Le seul intérêt du tiers-financement ne pourra dans tous les cas constituer un objectif unique de recours à cette nouvelle formule du CPE et l’acheteur public devra bien apprécier ses avantages et inconvénients en comparaison avec à d’autres formes de contractualisation des opérations de rénovation énergétique.

 

Thomas ROUVEYRAN et Yann-Gaël NICOLAS

 

[1] Pour rappel, les objectifs de la politique énergétique à atteindre pour répondre à l’urgence écologique et climatique (art. L. 100-4 du Code de l’énergie) visent à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % entre 1990 et 2030 et d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 en divisant ces dernières par un facteur supérieur à six entre 1990 et 2050 (i) ; à réduire la consommation énergétique finale de 50 % en 2050 par rapport à la référence 2012, en visant les objectifs intermédiaires d’environ 7 % en 2023 et de 20% en 2030 (ii) ; ou encore à disposer d’un parc immobilier dont l’ensemble des bâtiments sont rénovés en fonction des normes « bâtiment basse consommation ou assimilées, à l’horizon 2050» (iii). De plus, les collectivités propriétaires ou exploitantes de plus de 1000 m² de surfaces tertiaires sont soumises au décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire qui prévoit une réduction des consommations d’énergie primaire de 40 % à échéance 2030, 50 % d’ici à 2040 et 60 % d’ici à 2050 (par rapport à une année de référence ne pouvant être antérieure à 2010).

[2] Cette exigence de résultats a été accentuée lors de la redéfinition récente des contrats de performance énergétique, l’article 1er de l’arrêté du 24 juillet 2020 relatif aux contrats de performance énergétique disposant que ces derniers sont « un contrat conclu entre un donneur d’ordre et une société de services d’efficacité énergétique visant à garantir une diminution des consommations énergétiques du maître d’ouvrage, vérifiée et mesurée par rapport à une situation de référence contractuelle, sur une période de temps donnée grâce à un investissement dans des travaux, fournitures ou prestations de services. En cas de non atteinte des objectifs du contrat, celui-ci prévoit des pénalités financières ».

[3] Selon la quatrième édition des chiffres-clés de l’Observatoire National des Contrats de Performance Energétique, publiée en novembre 2022.

[4] Articles L. 2191-2 et L. 2191-3 du Code de la commande publique. A ce titre, l’article R. 2191-3 du même code prévoit une avance obligatoire de 5 % pour les marchés dépassant 50 000 euros et 2 mois.

[5] Article L. 2191-4 du Code de la commande publique.

[6] Article L. 2211-5 du code de la commande publique.

Eau : présentation du plan d’action du Gouvernement

53 mesures pour l’eau, plan d’action pour une gestion résiliente et concertée de l’eau

Le 30 mars, le Gouvernement a publié son Plan d’action pour une gestion résiliente et concertée de l’eau. Ce plan s’articule autour de 6 axes :

  • Organiser la sobriété des usages de l’eau pour tous les acteurs ;
  • Optimiser la disponibilité de la ressource ;
  • Préserver la qualité de l’eau et restaurer des écosystèmes sains et fonctionnels ;
  • Mettre en place les moyens d’atteindre ces ambitions ;
  • Être en capacité de mieux répondre aux crises et aux sécheresses ;
  • S’assurer des engagements tenus en rendant régulièrement compte des avancées du plan et de son actualisation le cas échéant.

Ces objectifs se déclinent en 53 mesures. Sans être exhaustif ici, on peut particulièrement retenir certaines d’entre elles. Notamment, il est intéressant de noter les annonces d’aides supplémentaires qui seront accordées par les agences de l’eau pour, par exemple : sécuriser l’alimentation en eau potable (180 M€/an supplémentaire) conditionnées à des objectifs de performance de gestion du patrimoine des collectivités ; favoriser la récupération des eaux de pluie sur les toitures des bâtiments agricoles ; soutenir les pratiques agricoles à bas niveau d’intrants sur les aires d’alimentation de captage. Est ainsi annoncée une hausse des moyens des agences de 475 M€ pour mettre en place le plan.

En matière de gestion de crises, la mise en place d’outils est annoncée pour améliorer l’anticipation des années sèches ou encore l’identification des territoires les plus à risque.

S’agissant des mesures visant à préserver la qualité de l’eau, elles visent à prévenir les pollutions des milieux aquatiques et la restaurer le grand cycle de l’eau pour restaurer la fonction filtre de la nature. Il s’agira notamment d’assurer une meilleure protection des points de captage d’eau potable. La sobriété des usages de l’eau, visant à réduire de 10 % les prélèvement d’eau d’ici 2030, devra quant à elle notamment passer par l’intégration, dans les SAGE, lors de leur révision, des trajectoires de prélèvement de l’eau alignées avec les objectifs chiffrés de réduction de ces prélèvements qu’ils doivent définir.

Le plan souhaite également renforcer la gouvernance en modernisant notamment les SAGE, en dotant chaque sous-bassin d’une commission locale de l’eau ou encore en rendant plus efficace l’assistance technique des départements dans le domaine de l’eau et de l’assainissement. On relèvera également que le Président, dans son discours de présentation, à évoquer à demi-mot des assouplissements dans l’obligation du transfert des compétences eau et assainissement aux intercommunalités pour les « communes isolées en situation de crise ».

Le bailleur n’a pas d’obligation de fournir un DPE valide lors de la reconduction tacite mais le locataire peut l’exiger

En application de l’article L. 126-29 du Code de la construction et de l’habitation, le bailleur doit lors de la conclusion du bail, quel que soit le type de location, à l’exception du bail rural et du bail saisonnier, y annexer un diagnostic de performance énergétique dont la validité est de 10 ans.

Rien n’étant précisé par le législateur s’agissant de l’actualisation d’un tel document lors des reconductions tacites du bail d’habitation, une députée a interrogé le gouvernement sur la possibilité de rendre périodique pour 10 années la réalisation d’un diagnostic de performance énergétique pour éviter que les locations reconduites ne soient sans DPE valides

Le ministère en charge de la ville et du logement a confirmé qu’ « en application de l’ article 3-3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, l’obligation d’annexer les diagnostics au contrat de bail ne vise que la signature du contrat mais pas la reconduction tacite qui n’implique aucune signature ».

Mais il rajoute que « si le propriétaire n’a donc pas d’obligation de fournir pro-activement un DPE à son locataire lors de la reconduction tacite du bail en application de la loi, ce dernier est en revanche en droit d’exiger un DPE valide lors d’une reconduction tacite pour pouvoir justifier du respect du critère de décence ».

A cette occasion, le ministère a rappelé que la durée de validité des DPE a été modifiée par le décret n° 2020-1610 du 17 décembre 2020, et est inscrite à l’ article D. 126-19 du Code de la construction et de la construction . Ainsi, bien que la durée de validité du DPE soit de 10 ans, lorsque les diagnostics de performance énergétique ont été réalisés entre le 1er janvier 2013 et le 1er juillet 2021, leur durée de validité est fixée dans les limites suivantes :

  • les diagnostics réalisés entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017 sont valides jusqu’au 31 décembre 2022 ;
  • les diagnostics réalisés entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021 sont valides jusqu’au 31 décembre 2024.

La réponse ministérielle, rendue à la suite d’une question en matière de bail d’habitation, ne semble pas pouvoir être étendue à des locations civiles, professionnels ou commerciales, puisque la décence a trait exclusivement à l’habitation.

Sur le droit à une indemnité au profit des propriétaires, des titulaires de droits réels ou de leurs ayants droit lorsque l’institution des servitudes prévues à l’article L. 515-8 du Code de l’environnement entraîne un préjudice direct, matériel et certain

1. En droit, l’article L. 515-8 du Code de l’environnement dispose que des servitudes d’utilité publique peuvent être instituées concernant l’utilisation du sol ainsi que l’exécution de travaux soumis au permis de construire. Ces servitudes peuvent ainsi comporter :

«  […] 1° La limitation ou l’interdiction de certains usages susceptibles de porter atteinte aux intérêts mentionnés à l’article L. 511-1, du droit d’implanter des constructions ou des ouvrages ou d’aménager les terrains ;

2° La subordination des autorisations de construire au respect de prescriptions techniques tendant à limiter l’exposition des occupants des bâtiments aux phénomènes dangereux ;

3° La limitation des effectifs employés dans les installations industrielles et commerciales ».

L’article L515-11 alinéa 1 du même code indique que :

« Lorsque l’institution des servitudes prévues à l’article L. 515-8 entraîne un préjudice direct, matériel et certain, elle ouvre droit à une indemnité au profit des propriétaires, des titulaires de droits réels ou de leurs ayants droit ».

L’article L515-12 dispose que des servitudes d’utilité publique peuvent être instituées sur des anciens sites ayant fait l’objet d’installations classées protection de l’environnement (ICPE). Les alinéa 3 et 4 de l’article susmentionné précise que :

« Sur les terrains pollués par l’exploitation d’une installation classée ou constituant l’emprise d’un site de stockage de déchets, lorsque les servitudes envisagées ont pour objet de protéger les intérêts mentionnés au premier alinéa et concernent ces seuls terrains, le représentant de l’Etat dans le département peut, lorsque le petit nombre des propriétaires ou le caractère limité des surfaces intéressées le justifie, procéder à la consultation écrite des propriétaires des terrains par substitution à la procédure d’enquête publique prévue au troisième alinéa de l’article L. 515-9.

Ces servitudes sont indemnisées dans les conditions prévues à l’article L. 515-11. Pour l’application de cet article, la date d’ouverture de l’enquête publique est, lorsqu’il n’est pas procédé à une telle enquête, remplacée par la date de consultation des propriétaires ».

2. Dans le cas d’espèce, par arrêté du 22 septembre 2015, un site anciennement exploité comme fonderie, propriété de la société AKWEL et relevant des installations classées pour la protection de l’environnement, a fait l’objet d’une servitude d’utilité publique, en raison d’une pollution aux hydrocarbures, métaux et solvants chlorés constatés dans les sols et au droit de ces sites.

L’arrêté édictait notamment une interdiction des usages et aménagements de type « résidentiel » ou assimilé.

Dans ces conditions, en sa qualité de propriétaire, la société AKWEL sollicitait la condamnation de la société TSA, dernière exploitante de la fonderie, à l’indemniser du préjudice résultant de l’institution des servitudes d’utilité publique, au regard de la perte de valeur vénale de son terrain, et du coût de la franchise locative.

Par un arrêt en date du 6 juillet 2021, la Cour d’appel de Lyon rejetait les demandes indemnitaires formulées par la société AWKEL, qui formait dès lors un pourvoi en cassation.

3. En premier lieu, la société AWKEL arguait que l’existence d’une servitude d’utilité publique sur le terrain dont elle est propriétaire constituait un préjudice lié à une perte de constructibilité du site, notamment dans la perspective d’une éventuelle conversion en usage d’habitation, ce qui entraînait une dépréciation de sa propriété. La société TSA soutenait pour sa part que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle envisageait de reconvertir sa propriété à l’usage d’habitation.

Aux visas des articles L. 515-12 et L. 515-11 du Code de l’environnement, la Cour de cassation rejetait sur ce point le pourvoi formé par la société AWKEL, au motif que pour l’estimation d’un tel préjudice, seul est pris en considération l’usage possible des immeubles et droits immobiliers « un an avant la date d’ouverture de l’enquête publique » ou, le cas échéant, avant la consultation des propriétaires.

Or, à la date de référence retenue pour l’application des textes susvisés, il apparaissait que la société AWKEL ne justifiait pas en l’état de la situation du bien et de ses caractéristiques d’un usage possible d’habitation ou résidentiel.

4. La société AWKEL soutenait dans un second temps que les contraintes engendrées par l’instauration de servitudes d’utilité publique en raison de l’exploitation sur son terrain d’une installation classée pour la protection de l’environnement avaient entraîné une perte de jouissance. Pour débouter la société de sa demande, la Cour d’appel retenait que cette dernière ne rapportait pas la preuve de sa volonté de vendre ou louer les terrains litigieux.

Au visa de l’article L. 515-8 du Code de l’environnement, la Cour de cassation est venue sur ce second moyen cassé l’arrêt rendu par les Juges d’appel, en rappelant que dès lors que l’instauration d’ une servitude d’utilité publique entraîne un préjudice direct, matériel et certain, les propriétaires, titulaires de droits réels ou leurs ayants droits disposent d’un droit à une indemnité, peu important que ces derniers rapportent la preuve de leur intention de vendre ou louer les terrains litigieux.

Par cet arrêt, la Cour de cassation est ainsi venue préciser la méthode d’évaluation des dommages résultant de l’institution d’une servitude d’utilité publique, en admettant notamment que la perte de jouissance était constitutive d’un tel préjudice, à condition de rapporter la preuve de son caractère direct, certain et matériel. Il apparait en revanche que la preuve d’une perte de valeur du terrain faisant l’objet d’une servitude d’utilité publique, compte tenu de l’impossibilité qui en résulte de l’affecter à un usage d’habitation, n’est pas rapportée lorsqu’à la date de référence, le site ne pouvait recevoir qu’une activité industrielle.

Nouvelle règle de majorité pour l’installation d’ouvrages nécessaires à la production d’énergie solaire

Jusqu’à présent, la décision d’installer des ouvrages nécessaires à la production d’énergie solaire photovoltaïque et thermique sur un immeuble en copropriété relevait de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965, qui fixe le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Il fallait donc qu’une telle décision soit adoptée à la majorité des voix de l’ensemble des copropriétaires.

La loi n° 2023-175 en date du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, qui entend faciliter l’installation de ce type d’ouvrages, a modifié les dispositions de la loi du 10 juillet 1965. La décision d’installer des ouvrages nécessaires à la production d’énergie solaire relève désormais de l’article 24 : elle doit être adoptée par la majorité des voix exprimées par les copropriétaires présents ou représentés.

Le champ d’application de cette modification reste toutefois limité aux installations faites sur les toits, sur les façades et sur les garde-corps de l’immeuble. La décision d’installation sur tout autre emplacement reste soumise à la majorité de l’article 25.

Nouveau dispositif de concertation préalable à l’élaboration de la programmation pluriannuelle de l’énergie ainsi que de la stratégie bas carbone

Aux termes de l’article L. 141-1 du Code de l’énergie, la programmation pluriannuelle de l’énergie (ci-après PPE) « définit les modalités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie sur le territoire métropolitain continental, afin d’atteindre les objectifs définis aux articles L. 100-1, L. 100-2 et L. 100-4 du présent code ainsi que par la loi prévue à l’article L. 100-1 A[1] ».

Elle est actuellement fixée, pour la période 2019-2028, par le décret n° 2020-456 du 21 avril 2020 dont nous avons commenté, dans une précédente lettre d’actualités juridiques, le contenu relatif notamment aux objectifs de réduction de la consommation d’énergie primaire fossile et de production d’électricité d’origine renouvelable.

Cette PPE doit notamment être conforme avec la stratégie bas carbone, qui a quant à elle pour objet de définir la marche à suivre pour conduire la politique d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre afin d’atteindre les objectifs définis par la loi prévue à l’article L. 100-1 A du Code de l’énergie susvisé (article L. 222-1.B du Code de l’environnement ). Cette stratégie est pour sa part fixée jusqu’en 2033 par un décret du 21 avril 2020.

C’est dans ce cadre que le décret du 7 mars 2023 ici commenté vient prévoir un dispositif de concertation préalable associant le public à l’élaboration de la PPE ainsi que de la stratégie nationale bas-carbone susvisées, en l’intégrant au sein des dispositions réglementaires des Codes de l’énergie et de l’environnement qui leur sont applicables.

Ces concertations préalables seront effectuées dans les mêmes conditions puisqu’ainsi que le précisent les articles 1 et 2 dudit décret, elles seront toutes deux organisées sous l’égide d’un garant selon les modalités de concertations préalables prévues par les articles L. 121-16 et L. 121-16-1 du Code de l’environnement.

Une concertation préalable unique pourra également être effectuée pour la PPE et la stratégie nationale bas-carbone, le public devant en être informé selon les mesures de publicités prévues par l’article L. 121-16 du Code de l’environnement.

 

[1] L’article L. 100-1-A disposant ; « I.-Avant le 1er juillet 2023, puis tous les cinq ans, une loi détermine les objectifs et fixe les priorités d’action de la politique énergétique nationale pour répondre à l’urgence écologique et climatique ».

Promulgation de la loi relative à la production d’énergie renouvelables après la censure de onze de ses articles par le Conseil Constitutionnel

CC, 9 mars 2023, Décision DC n° 2023-848

La loi relative à l’accélération des énergies renouvelables – dont le contenu de la version définitive du projet, tout comme les étapes de son adoption, ont été largement analysés dans nos précédentes lettres d’actualités – a été publiée au Journal officiel du 10 mars dernier.

Cette promulgation faisait suite à la saisine du Conseil Constitutionnel de deux recours introduits le 9 février par plus de soixante députés dans le cadre des dispositions de l’article 61 de la Constitution.

Etaient alors critiqués la procédure d’adoption de la loi quant à l’étude d’impact jointe au projet de loi et l’absence de consultation du Conseil Economique Social et Environnemental, la conformité des articles 19, 24, 17, 23, 40, 41, 43 et 56 à la Constitution et la conformité de la loi dans son ensemble aux exigences découlant de la Charte de l’environnement (ayant, pour mémoire, valeur constitutionnelle).

Toutefois, le Conseil Constitutionnel juge successivement, par l’ensemble de ses motifs, l’ensemble de ces dispositions conforme à la Constitution.

Il rejette notamment, dans la matière qui nous occupe, l’allégation soutenue par les députés selon laquelle l’article 17 de la loi, en prévoyant la possibilité de modulation du tarif de rachat d’électricité pour certains projets d’énergies renouvelables retenus dans le cadre de la procédure de mise en concurrence à laquelle l’Etat peut recourir pour ajuster les capacités de production d’électricité[1], instituerait une différence de traitement injustifiée :

  • entre les opérateurs produisant des énergies renouvelables comme le soutenaient les auteurs de la première saisine ;
  • entre les opérateurs produisant de l’énergie à partir de sources renouvelables (critique également formulée par les députés à l’origine de la seconde saisine).

En effet sur ce point, le Conseil Constitutionnel considère, d’une part, que ces dispositions permettant la modulation du tarif de rachat d’électricité pour les projets lauréats situés dans une zone d’accélération pour l’implantation d’installations terrestres de production d’énergies renouvelables n’institue aucune différence de traitement entre producteurs d’énergies renouvelables mais vient permettre de compenser des pertes de production dues aux conditions d’implantation moins favorables dans ces zones que la moyenne dans la zone du projet.

Et ce, conformément aux dispositions de l’article L. 311-10-1 du Code de l’énergie que cet article vient compléter, prévoyant que les conditions d’exécution du projet peuvent prendre en compte « des considérations à caractère social ou environnemental et poursuivre des objectifs de développement durable conciliant développement économique, protection et mise en valeur de l’environnement et progrès social ».

D’autre part, le Conseil constitutionnel rappelle que les producteurs d’énergie renouvelable sont dans une situation différente des autres producteurs d’énergie au regard de l’objet de la loi critiqué, laquelle vise à encourager une répartition territoriale équilibrée des projets de production d’énergies renouvelable, différence de situation qui justifie la différence de traitement instituée.

Après avoir rejeté les arguments soulevés par les députés auteurs des deux saisines, le Conseil constitutionnel s’est saisi d’office de la conformité de certaines dispositions de la loi à la Constitution, pour les censurer.

Il juge ainsi que l’article 65 de la loi, qui se borne à prévoir que « l’État, en cohérence avec les collectivités territoriales et leurs groupements, favorise par son action, dans certains ports, les opérations d’aménagement des infrastructures portuaires, industrielles et logistiques nécessaires au développement des projets de production d’énergies renouvelables en mer », est dépourvu de valeur normative et donc contraire à l’article 6 de la Déclaration de 1789.

En outre, il considère que 10 autres articles de la loi, et notamment ses articles 48 et 49 liés aux opérations d’autoconsommation dont les apports ont été commentés dans notre précédente lettre d’actualités juridiques, sont sans lien, même indirect, avec le projet de loi initial, constituant ainsi des cavaliers législatifs.

Au total, le Conseil Constitutionnel censure donc 11 articles de la loi avant sa promulgation.

 

[1] Article L. 311-10 du Code de l’énergie

Actualités relatives au contrat unique à conclure entre le gestionnaire de réseau de distribution d’électricité et les fournisseurs

Cass. Com., 22 mars 2023, n° 22-7.596

Afin d’harmoniser les pratiques et d’améliorer le fonctionnement des marchés, la CRE a organisé, du 9 novembre 2021 au 15 octobre 2022, une concertation entre le Gestionnaire de Réseau de Distribution (GRD) et les acteurs de marché en vue de définir un modèle de contrat GRD-Fournisseurs (GRD-F) commun à tous les GRD d’électricité. Par une délibération en date du 1er décembre 2022, la CRE a adopté des orientations pour un modèle commun de contrat.

Le modèle de contrat GRD-F énonce les droits et devoirs du gestionnaire du réseau public de distribution et du fournisseur en matière d’accès au réseau public de distribution d’électricité, d’utilisation de ce réseau et d’échange des données, en vue de permettre au fournisseur de proposer au client qui dispose d’un raccordement dans la zone de desserte du GRD, un contrat unique regroupant la fourniture d’électricité, l’accès au réseau public de distribution et son utilisation.

Ce modèle définit, en particulier, les engagements des parties en matière de comptage, puissance souscrite, continuité et qualité d’alimentation, articulation avec le dispositif de responsable d’équilibre, tarification, garantie bancaire, responsabilité et exécution du contrat.

Enedis a ainsi saisi la CRE le 2 février 2023 d’une demande d’approbation de la version 10.0 du modèle de contrat relatif à l’accès au réseau public de distribution.

Cette version est approuvée par la CRE.

On signalera sur ce point que la Cour de cassation s’est récemment prononcée sur la responsabilité respective des différents intervenants dans le cadre  du contrat unique et a jugé qu’ il « résulte, d’un côté, des dispositions d’ordre public précitées du code de l’énergie, de l’autre, de celles du code de la consommation, que les contrats conclus entre le gestionnaire de réseau et les fournisseurs d’électricité ne peuvent avoir ni pour objet ni pour effet de laisser à la charge des fournisseurs des coûts supportés par eux pour le compte du gestionnaire de réseau, lequel ne saurait, ce faisant, se soustraire à des sujétions et au risque qui lui incombent, comme inhérents à ses missions de service public, notamment celui de devoir supporter le défaut de paiement par les consommateurs finaux des charges d’accès au réseau » (Cass. Com., 22 mars 2023, n° 22-17.596).

La Commission de Régulation de l’Energie émet un avis favorable sur les conditions contractuelles des offres de bascule soumises par les entreprises locales de distribution

En application de l’article 63 X de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, dite « Loi énergie climat », la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a analysé les conditions contractuelles des offres de bascule soumises par les entreprises locales de distribution de gaz naturel disposant de clients perdant l’éligibilité aux tarifs réglementés de vente de gaz (TRVG) et qui n’auraient pas souscrit d’offre de marché au 30 juin 2023.

L’article 63 de la « Loi énergie climat » prévoit que les fournisseurs de gaz naturel communiquent à leur client qui bénéficiaient des TRVG jusqu’au 30 mars 2023 les nouvelles conditions contractuelles de leur contrat de fourniture au plus tard le 15 avril 2023, en prévision de la fin du TRVG au 30 juin 2023.

La CRE devait donner un avis conforme sur ces nouvelles conditions.

La CRE a analysé les conditions contractuelles soumises par les ELD de gaz naturel listée dans la délibération afin de s’assurer qu’elles permettent à la concurrence de s’exercer librement. La CRE a notamment analysé les stipulations relatives à la durée du contrat, aux modalités de résiliation et à l’évolution des conditions contractuelles.

Les conditions contractuelles des offres de bascule des ELD de gaz naturel soumises à la CRE pour avis conforme n’étant pas de nature à verrouiller le marché, la CRE émet donc un avis favorable sur l’ensemble des conditions contractuelles qui lui ont été soumises.

Nouvelles précisions de la Commission de Régulation de l’Energie sur le fonctionnement des mécanismes de compensation ouverts aux fournisseurs au titre des dispositifs des boucliers tarifaires et des amortisseurs électricité

Dans le contexte de la hausse exceptionnelle des prix de gros de l’électricité et du gaz naturel depuis le deuxième semestre 2021, plusieurs mécanismes ont été mis en place dans l’optique de protéger les consommateurs : un bouclier tarifaire électricité, un bouclier tarifaire gaz et un amortisseur électricité.

La limitation des hausses tarifaires qui auraient dû être supportées par les consommateurs se traduit, mécaniquement, par des pertes de recettes pour leurs fournisseurs d’énergie. C’est la raison pour laquelle un mécanisme de compensation de ces pertes de recettes a été mis en place en parallèle par l’Etat (voir notamment l’un de nos commentaires précédents dans la Lettre d’actualités juridiques énergie environnement de mars 2023).

Néanmoins, la loi de finances pour 2023 a introduit trois contraintes additionnelles qui viennent limiter les montants de compensation versés dans un objectif de proportionnalité de ces derniers. Ces contraintes, dont les temporalités d’application par les fournisseurs sont différentes, sont les suivantes :

  • Pour les boucliers électricité et gaz : deux contraintes d’utilisation de la compensation par les fournisseurs dans la réduction des prix qu’ils proposent aux consommateurs sont prévues par la loi de finances. Ces contraintes ont vocation à limiter à un niveau plancher l’application de la compensation par le fournisseur, tout en encadrant les modalités de foisonnement des surplus éventuels de compensation à destination de consommateurs les plus défavorisés par leurs contrats de fourniture ;
  • Pour les boucliers électricité et gaz et les amortisseurs électricité : Une limitation du montant de la compensation ayant vocation à réduire le montant de la compensation allouée à un fournisseur qui aurait bénéficié de conditions d’approvisionnement favorables.

La délibération en date du 23 mars 2023 de la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE) s’inscrit dans ce contexte et vient préciser les modalités de mise en œuvre de ces différentes contraintes.

Ainsi, après avoir rappelé dans le détail le mode de fonctionnement des trois dispositifs protecteurs, la CRE explique chacune des trois contraintes de fonctionnement susmentionnées au moyen notamment, compte tenu de la grande complexité des dispositifs, de schémas illustrant leur fonctionnement.

Tarification des prestations annexes des gestionnaires de réseaux de distribution de gaz naturel : consultation publique de la Commission de Régulation de l’Energie

Jusqu’au 14 avril prochain, une consultation publique est ouverte par la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) sur le sujet de la tarification des prestations annexes réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de réseaux de distribution (ci-après, GRD) de gaz naturel.

Les GRD de gaz naturel sont en effet chargés de réaliser les missions de service public liées à la distribution du gaz naturel, lesquelles sont rémunérées à travers les tarifs d’utilisation des réseaux publics de distribution (dits tarifs « ATRD ») fixés par la CRE.

Et, comme leurs homologues en matière de distribution d’électricité, en parallèle de leurs missions d’acheminement de l’énergie, les GRD réalisent certaines prestations annexes à titre exclusif, c’est-à-dire en dehors du champ concurrentiel, et donc en dehors de toute concurrence avec d’autres opérateurs. Ces prestations en sont en conséquence régulées quant à leur contenu autorisé et leur tarification.

Un catalogue regroupe ces différentes prestations destinées, selon les cas, aux fournisseurs, aux producteurs et aux consommateurs finals. C’est par ailleurs la CRE qui, en vertu des articles L. 452-2 et L. 452-3 du Code de l’énergie, est compétente en matière de tarification des prestations annexes réalisées à titre exclusif par les GRD de gaz naturel.

Les tarifs actuellement en vigueur résultent d’une délibération du 22 juin 2022, que la CRE envisage de faire évoluer, raison pour laquelle elle soumet à la consultation publique commentée un certain nombre de propositions d’évolutions.

Ces évolutions seraient les suivantes :

  • La reconduction, comme en 2022, du recours à l’indice des prix à la consommation pour l’évolution des tarifs des prestations annexes au 1er juillet 2023, et non à l’indice des prix à la production de l’Industrie, le recours à cet indice risquant sinon d’entraîner une hausse trop importante des tarifs dans le contexte actuel de crise énergétique ;
  • L’introduction, à titre expérimental, d’une prestation de « mise à jour des capacités d’injection sur demande » proposée par GRDF afin de fournir, à la demande des producteurs, une étude actualisée des capacités d’injection dans le réseau de distribution, étude pouvant être réalisée entre l’étude détaillée initiale et la mise en service du poste d’injection (prestations également accomplies par GRDF) ;
  • La suppression pour GRDF de la prestation « fréquence de relevé supérieure à la fréquence standard » dans un contexte de fin du déploiement massif du compteur évolué Gazpar (prestation en revanche conservée pour les Entreprises Locales de Distribution – ELD) ;
  • La modification de certaines prestations afin de les rapprocher des pratiques opérationnelles, consistant en particulier à :
    • ajouter la possibilité, pour un fournisseur, de demander la vérification des données de comptage sur la base d’un index collecté par le GRD lors d’un changement de tarif d’acheminement ;
    • clarifier la description de la prestation « Enquête », afin d’expliciter son objet, à savoir notamment l’analyse par le GRD du bon fonctionnement du compteur d’un utilisateur, à la suite de l’expression d’un doute par son fournisseur.
  • L’alignement de certaines notions et définitions précisées dans le catalogue de prestations annexes de GRDF avec celles présentes dans le contrat distribution de gaz – fournisseur (CDG-F), celui-ci ayant été validé par la CRE dans le cadre des travaux portant sur le modèle commun du CDG-F.

Si elles sont finalement retenues par le CRE à l’issue de cette consultation publique, ces évolutions qui donneront lieu à une délibération de la CRE, s’appliqueraient au 1er juillet ou au 1er août 2023 selon les GRD concernés.

Rehaussement du plafond d’éligibilité au chèque énergie

L’arrêté en date du 3 mars 2023 fixant les critères d’éligibilité au chèque énergie et le plafond aux frais de gestion pouvant être déduits de l’aide spécifique se substitue à l’arrêté du 24 février 2021.

En premier lieu, reprenant à l’identique les termes de l’arrêté du 24 février 2021, l’arrêté du 3 mars 2023 opère un rehaussement du montant du revenu de référence annuel par unité de consommation grâce auquel est déterminé l’éligibilité au dispositif du chèque énergie. Aux termes de l’arrêté du 24 février 2021, les ménages disposant d’un revenu de référence annuel par unité de consommation inférieur à 10.800 euros étaient éligibles au chèque énergie. Aux termes de l’article 1er de l’arrêté du 3 mars 2023, ce seuil est désormais fixé à 11.000 euros.

Le tableau prévu à l’article 2 de l’arrêté, précisant le montant du chèque énergie, est modifié en conséquence. Les valeurs faciales du chèque énergie, déterminées en fonction du revenu de référence annuel par unité de consommation, ne sont pas modifiées.

En second lieu, aux termes de l’article 3 de l’arrêté, la valeur faciale de l’aide spécifique aux résidences sociales et le pourcentage des frais de gestion pouvant être prélevés par les gestionnaires de résidences sociales sont inchangés, ils sont respectivement fixés à 192 euros et 5 %.

Tour d’horizon des principales modifications apportées à la partie réglementaire du Code de l’énergie par le décret n° 2023-214 du 27 mars 2023

Le décret n° 2023-214 en date du 27 mars 2023 modifie de façon transverse la partie règlementaire du Code de l’énergie, et en particulier les dispositions relatives au contrat d’achat, au contrat de complément de rémunération et aux procédures de mise en concurrence en vue d’obtenir le bénéfice de l’un de ces contrats.

En premier lieu, le décret crée de nouveaux mécanismes de communication d’information à la charge des gestionnaires de réseaux publics d’électricité et de gaz (art. R. 111-29-1 inséré dans la section relative à la confidentialité des informations sensibles détenues par les gestionnaires de réseaux et art. R. 111-58-1 inséré dans la section relative à la mise à disposition d’informations par les gestionnaires de réseaux publics aux personnes publiques).

Ainsi, les gestionnaires de réseaux publics d’électricité et de gaz doivent transmettre les informations d’identification ou de caractérisation des installations bénéficiant d’un soutien public, ainsi que les informations relatives à l’avancement des travaux de raccordement afférents, au Ministre en charge de l’énergie, au préfet et à la Commission de régulation de l’énergie (ci-après, CRE), à leur demande (article R. 111-58-1 du Code de l’énergie).

L’article R. 111-29-1, concernant spécifiquement les gestionnaires de réseaux publics de distribution d’électricité, prévoit une liste plus étendue des bénéficiaires des informations détenues par les gestionnaires de réseaux publics de distribution. Peuvent ainsi avoir accès aux informations susmentionnées, lorsqu’ils en font la demande, le ministre en charge de l’énergie, les entreprises locales de distribution, la CRE, Électricité de France, les organismes agréés et les producteurs concernés.

En deuxième lieu, les articles 2 et 3 du décret procèdent à des modifications relatives aux appels d’offres organisés par le Ministre en charge de l’énergie pour les installations de production d’électricité.

D‘abord, concernant le contenu du cahier des charges des appels d’offres, l’article R. 311-13 du Code de l’énergie, modifié par l’article 2 du décret, indique désormais que la garantie financière devant être constituée par le candidat à l’appel d’offres peut notamment prendre la forme d’une consignation auprès de la Caisse des dépôts et consignations. Cette possibilité concerne aussi bien les installations de production d’électricité situées sur terre que les installations situées sur le domaine public maritime (article R. 311-13-1 du Code de l’énergie, modifié par l’article 2 du décret).

Ensuite, un délai minimum de 15 jours avant la date d’ouverture du dépôt des offres est imposé à la CRE pour publier les réponses aux questions adressées par les candidats aux appels d’offres (article R. 311-18 du Code de l’énergie, modifié par l’article 2 du décret).

L’impossibilité d’exclusion d’un candidat durant la phase de dialogue concurrentiel, prévue par l’article R. 311-25-11 du Code de l’énergie, est assortie d’une exception. En effet, le candidat ne respectant pas les dispositions du règlement de consultation pourra désormais être exclu de la procédure (article R. 311-25-11 du Code de l’énergie, modifié par le 5° de l’article 2 du décret).

Enfin, concernant l’avis de la CRE sur les modifications du cahier des charges envisagées par le Ministre en charge de l’énergie, prévu par l’article R. 311-27-14 du Code de l’énergie, l’article 3 du décret apporte une précision.

D’une part, lorsque l’avis de la CRE est favorable, elle peut alors publier sur son site internet le cahier des charges tel que modifié par le ministre en charge de l’énergie. Son avis est par ailleurs réputé favorable si elle ne se prononce pas dans un délai de 15 jours.

D’autre part, lorsque son avis est défavorable, alors le Ministre en charge de l’énergie dispose d’un délai de 15 jours pour confirmer la modification envisagée. Si le Ministre ne confirme pas sa volonté de modifier le cahier des charges dans ce délai, il est regardé comme ayant renoncé à la modification envisagée.

En troisième lieu, l’article 4 du décret modifie la procédure de levée de suspension du contrat d’achat prévue par l’article R. 311-31 du Code de l’énergie. Le producteur doit désormais fournir une attestation de conformité, selon les mêmes modalités que celles prévues aux articles R. 311-27-1 et R. 314-7 du Code de l’énergie, pour obtenir la levée de la suspension du contrat.

En quatrième lieu, aux termes de l’article 5 du décret, le producteur peut demander une modification des informations relatives à la tension de raccordement contenues dans sa demande de contrat jusqu’à l’obtention de l’attestation de conformité initiale. En outre, la tension de livraison peut désormais faire l’objet d’une demande de modification, quand bien même cette modification ne serait pas prévue par l’arrêté tarifaire applicable (article R. 314-5 du Code de l’énergie, modifié par l’article 5 du décret).

En cinquième lieu, le décret organise les conséquences de la situation dans laquelle l’organisme qui s’est vu céder un contrat d’achat ou de complément de rémunération perd l’agrément qui lui permettait de bénéficier d’une telle cession. Dans ce cas, il pourra lui être substitué, à la demande du producteur, Électricité de France ou une entreprise locale de distribution. Le contrat durera alors jusqu’au terme initialement prévu et dans les mêmes conditions (article R. 314-52-6, modifié par l’article 6 du décret).

Actualité réglementaire en matière de diagnostic de performance énergétique

Une actualité réglementaire est à relever en matière de diagnostic de performance énergétique.

Un arrêté publié le 16 mars 2023 est venu modifier l’arrêté du 15 septembre 2006 relatif au diagnostic de performance énergétique pour les bâtiments ou parties de bâtiments existants, autres que des habitations, et proposés à la vente en France métropolitaine.

Pour mémoire, l’annexe 4 de l’arrêté du 15 septembre 2006 précise les valeurs à retenir pour les émissions de dioxyde de carbone consécutives aux consommations d’énergie et son annexe 7 fixe la part des énergies renouvelables et de récupération dans la production de chaleur des réseaux de chaleur ou de froid.

L’arrêté en date du 16 mars 2023 vient remplacer le tableau de données environnementales des réseaux de chaleur ou de froid urbains de l’annexe 7 susvisée pas un nouveau tableau figurant en son annexe.

Projections des gestionnaires de transport et de distribution d’électricité pour les années à venir

Enedis – Plan de développement de réseau, Document préliminaire 2023

Le 28 février 2023, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, RTE, a ouvert une consultation publique avant la publication cet été de son bilan pluriannuel de l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité en France, qui portera sur la période 2024-2035, afin d’alimenter le débat sur la future programmation énergie-climat et sur le mix énergétique.

Ce document, qui interviendra en sus du rapport « Futurs énergétiques 2050 » publié en 2021 et commenté lors d’une précédente lettre d’actualité, présentera des trajectoires actualisées entre 2023 et 2035.

Le bilan prendra en compte l’évolution du contexte géopolitique international et économique. En effet, pour RTE, la maîtrise des prix de l’électricité acquittés par les consommateurs et le maintien d’un mix de production compétitif au cours de la prochaine décennie, malgré la nécessité d’investissements importants dans la production et les réseaux, est un point central de sa réflexion. Les solutions pour contribuer à la sécurité d’approvisionnement seront aussi explorées.

Le gestionnaire du réseau de transport a ainsi lancé un appel à contributions aux acteurs du marché sur ces différentes thématiques, sur la base d’hypothèses de travail provisoires. Les réponses étaient attendues avant le 28 mars 2023.

Par ailleurs, la gestionnaire du réseau de distribution d’électricité, Enedis, a publié le 13 mars 2023 le document préliminaire de son premier plan de développement du réseau (PDR) pour la période 2027-2032.

Ce rapport doit également être soumis à une consultation publique avec toutes les parties prenantes avant d’être approuvé par la Commission de Régulation de l’Energie et publié dans les mois à venir. Sa rédaction intervient dans le cadre des nouvelles obligations réglementaires à la charge des gestionnaires de réseau de distribution qui les enjoint à décrire les investissements prévus sur le réseau dans les cinq à dix prochaines années au périmètre de leur maîtrise d’ouvrage (article 32 de la directive européenne 2019/944 sur le marché intérieur de l’électricité, transposé à l’article L. 322-11 du Code de l’énergie). Ce document à vocation a être mis à jour tous les deux ans.

Pour sa part, Enedis annonce déjà, à ce stade, que son plan de développement de réseau reposera sur trois principes fondamentaux : la stabilité du raccordement des consommateurs ; le fort développement des infrastructures de recharge des véhicules électriques (IRVE) ; le fort développement des installations de production d’énergie renouvelable. La réalisation de ces trois objectifs supposera une hausse des investissements du gestionnaire sur le réseau de distribution, comme l’indique Enedis dans son document préliminaire.

Ce sont là des objets d’investissements qui pourraient (devraient) utilement être déclinés localement dans les programmes pluriannuels des investissements (PPI) des gestionnaires de réseaux (Enedis particulièrement), à l’heure des renouvellements des PPI à discuter avec les autorités organisatrices de distribution d’électricité.

Publication du décret n° 2023-173 du 8 mars 2023 modifiant les critères d’exemplarité énergétique et d’exemplarité environnementale et de l’arrêté de la même date

Arrêté du 8 mars 2023 modifiant l’arrêté du 12 octobre 2016 relatif aux conditions à remplir pour bénéficier du dépassement des règles de constructibilité prévu au 3° de l’article L. 151-28 du Code de l’urbanisme

Le décret en date du 8 mars 2023, et l’arrêté de la même date précisent les règles permettant aux constructions faisant preuve d’exemplarité environnementale de bénéficier :

  • D’une majoration de construction en application de l’article L. 151-28 3° du Code de l’urbanisme ;
  • D’un dépassement des règles de hauteur du PLU en application de l’article L. 152-5-2 du Code de l’urbanisme.

En effet, il est constant qu’une meilleure exemplarité des constructions implique souvent une épaisseur supplémentaire des murs, sols et plafond, ce qui induit un gabarit et une hauteur complémentaire, ce qui peut parfois poser problème au regard des règles d’urbanisme. C’est pourquoi il est proposé des dérogations pour permettre d’améliorer la performance énergétique des constructions.

Tout d’abord, le décret et l’arrêté du 8 mars 2023 actualisent la définition de l’exemplarité énergétique en s’appuyant sur les indicateurs de la nouvelle réglementation environnementale pour le bâtiment RE2020 (R. 171-2 Code de la construction et de l’habitation)

En outre, l’article R. 171-3 du Code de la construction et de l’habitation est modifié pour revoir et simplifier la définition de l’exemplarité environnementale permettant de justifier de la dérogation de l’article L. 151-28 et du bonus de constructibilité de l’article L. 152-5-2.

A cet égard, il est prévu qu’« une construction fait preuve d’exemplarité environnementale si elle atteint des résultats minimaux en termes d’impact sur le changement climatique liés aux composants du bâtiment et évalué sur l’ensemble du cycle de vie du bâtiment ». C’est l’arrêté du 8 mars 2023 qui a fixé ces résultats minimaux. Ces résultats minimaux attendus en matière de besoin en énergie, de consommation d’énergie primaire et d’énergie primaire non renouvelable sont renforcés et doivent être inférieurs de 10 % par rapport à ceux imposés par la RE2020.

Ensuite, le décret modifie le périmètre de cette dérogation, pour permettre son application à tous les bâtiments soumis à l’application de la nouvelle règlementation RE2020 (R. 171-1 du Code de la construction et de l’habitation).

S’agissant de la possibilité de la majoration de la hauteur, l’article R. 152-5-2 prévoit désormais que l’augmentation de la hauteur ne peut être supérieure :

  • A 25 centimètres par étage ;
  • Et ne peut augmenter de plus de 2,5 mètres la hauteur permise par le PLU.

Le pétitionnaire doit démontrer que l’augmentation de la hauteur est rendue nécessaire par les efforts d’exemplarité énergétique. L’ajout d’un étage n’est en outre pas autorisé à ce titre.

Le nouvel article R. 431-31-3 du Code de l’urbanisme prévoit donc une nouvelle pièce du dossier de demande de permis de construire lorsque le pétitionnaire entend bénéficier de cette dérogation, visant à prouver l’exemplarité environnementale de la construction par la prise en compte des critères de performance environnementale requis.

Ces dispositions sont applicables depuis le 11 mars 2023.

Information environnementale : le secret des affaires ne peut faire obstacle à la communication des informations relatives aux émissions de substances

Le Conseil d’Etat a, par un arrêt en date du 15 mars 2023, apporté d’utiles précisions sur les informations environnementales relatives aux émissions de substances dans l’environnement susceptibles d’être communiquées.

Une spécificité existe en effet s’agissant des informations relatives aux émissions dans l’environnement. Ainsi, l’article L. 124-5, II du Code de l’environnement dispose que l’autorité publique ne peut rejeter la demande d’une information relative à des « émissions de substances dans l’environnement » que dans le cas où sa consultation ou sa communication porte atteinte, notamment, à la sécurité publique, mais le secret des affaires ne figure pas dans la liste des causes pouvant justifier ce refus de communication. Or la règle générale définie aux articles L. 124-4 du Code de l’environnement et L. 311-6 du Code des relations entre le public et l’administration prévoit qu’en matière d’information environnementale le secret des affaires peut être un motif de refus de communication.

La notion « d’information relative à des émissions de substances dans l’environnement » est donc centrale pour apprécier si le régime général (art. L. 124-4) ou spécial (art. L. 124-5) est applicable, et donc déterminer l’étendue du droit à communication. La Cour de justice de l’Union européenne avait défini les notions suivantes (CJUE, 23 novembre 2016, C-442/14) :

  • Emission dans l’environnement : rejet de produits ou de substances, pour autant que ce rejet soit effectif ou prévisible dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation ;
  • Informations relatives à des émissions dans l’environnement : les indications concernant la nature, la composition, la quantité, la date et le lieu des émissions dans l’environnement ainsi que les données relatives aux incidences, à plus ou moins long terme, de ces émissions sur l’environnement. Sont ainsi exclues du champ d’application de ce régime les émissions purement hypothétiques. Dans un autre arrêt, la CJUE avait indiqué que ces informations sont celles qui concernent ou qui sont relatives à de telles émissions, et non les informations présentant un lien, direct ou indirect, avec les émissions dans l’environnement, et que cette notion concerne notamment, mais pas uniquement, les émissions provenant d’installations industrielles comme des usines ou des centrales (CJUE, 23 novembre 2016, C-673/13).

Le Conseil d’Etat en conclut que « la sécurité publique et le secret des affaires sont au nombre des motifs pour lesquels l’exploitant peut refuser, après une appréciation au cas par cas de son intérêt, la communication de telles informations. Par exception, le secret des affaires n’est pas opposable lorsque les informations demandées se rapportent à des émissions dans l’environnement effectives ou prévisibles dans des conditions normales ou réalistes de fonctionnement de l’installation, ce qui n’est pas le cas des émissions susceptibles de résulter d’un accident éventuel, lesquelles présentent un caractère purement hypothétique ».

Sur ce fondement, le juge indique que ne constituent pas des informations relatives à des émissions de substances dans l’environnement, susceptibles de ne pas faire l’objet d’une communication au titre du secret des affaires, celles relatives aux équipements et méthodes destinés à empêcher des émissions accidentelles (ici relatives à la teneur des outils de surveillance utilisés dans la piscine d’entreposage et à la température de l’eau).

Déchets : actualités jurisprudentielles sur le rôle de l’Etat dans la sanction des dépôts sauvages

CAA Toulouse, 16 mars 2023, Société Umicore France, n° 21TL00688

Deux décisions des juridictions administratives, rendues par la Cour administrative d’appel (CAA) de Toulouse et le Conseil d’Etat, ont apporté des précisions sur la mise en œuvre des pouvoirs de police administrative en matière de lutte contre les dépôts sauvages de déchets, et plus particulièrement sur les modalités d’intervention de l’Etat.

L’article L. 541-3 du Code de l’environnement définit en effet des prérogatives de police permettant à l’administration compétente d’intervenir pour sanctionner la gestion irrégulière des déchets et notamment veiller à ce que ceux-ci ne soient pas entreposés de manière à former des dépôts sauvages.

1°) La première précision, apportée par le Conseil d’Etat par un arrêt en date du 27 mars 2023, tient à ce que l’éventuelle carence de l’autorité de police dans la mise en œuvre des pouvoirs de police définis à l’article L. 541-3 du Code de l’environnement ne fait pas obstacle à l’engagement de la responsabilité du détenteur des déchets ou propriétaire du terrain sur lequel ils sont stockés.

A titre préalable, on indiquera que le responsable d’un dépôt sauvage de déchets est leur producteur ou détenteur. Toutefois, la responsabilité du propriétaire du terrain sur lequel les déchets sont entreposés peut être engagée à la double condition qu’il n’existe pas d’autres producteur ou détenteur connu et que le propriétaire ait fait preuve de négligence.

Dans cette affaire, des déchets résultant de l’exploitation d’une ancienne ICPE n’avaient pas été éliminés à la suite de la cessation d’activités, et l’exploitant de cette ICPE avait fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire avant que les déchets ne soient gérés. L’Etat s’était donc tourné vers l’indivision propriétaire du site. La CAA avait considéré que la circonstance que l’Etat n’avait pas agi à l’encontre de l’exploitant caractérisait une carence de sa part faisant obstacle à ce que la responsabilité des propriétaires soit engagée.

Le Conseil d’Etat censure ce raisonnement et indique que « l’éventuel manquement de l’autorité administrative dans l’exercice de ses pouvoirs de police, s’il peut donner lieu à la mise en jeu de la responsabilité de l’administration, ne peut conduire à écarter le régime de responsabilité prévu par [les articles L. 541-2 et L. 541-3 du Code de l’environnement], notamment en tant qu’il s’applique au propriétaire du terrain sur lequel sont déposés des déchets ».

Le juge relève ensuite que les propriétaires du terrain ont fait preuve de négligence, dès lors que la pollution du site était établie depuis au moins vingt ans, que les propriétaires résidaient sur place et n’en avaient pas averti l’administration alors qu’ils ne pouvaient ignorer la présence des déchets, qu’ils n’avaient procédé à aucuns travaux avant 2020 et que certains d’entre eux avaient eux-mêmes exploité l’ICPE responsable de ces déchets.

2°) D’autres précisions ont ensuite été apportées sur l’articulation entre la police des déchets et la police des mines, par un arrêt du 16 mars 2023 de la CAA de Toulouse.

Dans cette espèce était en cause un dépôt de résidus de traitement découlant d’une ancienne exploitation minière. Le préfet avait d’abord mis en demeure le maire de la commune sur le territoire de laquelle les déchets étaient entreposés de mettre en œuvre ses pouvoirs de police en matière de déchets pour qu’il soit procédé à l’élimination du dépôt de résidus. Le maire n’a toutefois pas répondu à la mise en demeure et le préfet s’est donc substitué à lui et a mis en œuvre les prérogatives de l’article L. 541-3 du Code de l’environnement.

La CAA de Toulouse a précisé, sur le rôle de l’Etat, que :

  • Il n’existe pas d’obligation pour l’Etat d’assurer, après l’expiration du titre minier, la surveillance et la prévention des risques miniers autres que ceux tirés de l’affaissement de terrain ou d’accumulation de gaz dangereux, susceptibles de mettre en cause la sécurité des biens ou des personnes (dans les conditions de l’article L. 174-1 du Code minier). En l’espèce, les risques en cause étaient liés à la contamination de l’environnement des déchets en raison de leur teneur excessive en métaux lourds. L’Etat ne s’était donc pas vu transférer la surveillance et la prévention des risques liés aux résidus miniers ;
  • Aucun texte n’exclut l’exercice de la police spéciale des déchets sur un site minier et sur le site d’une ancienne exploitation qui n’est plus soumis à la police des mines. Les prérogatives de l’article L. 541-3 peuvent donc être mises en œuvre sur un site, ou ancien site, minier à l’encontre de l’exploitant de ce site. Dans le même sens, la circonstance que l’exploitant s’est conformé aux obligations qui lui ont été prescrites lors de la cessation des travaux miniers ne fait pas obstacle à ce que l’autorité compétente intervienne à son encontre en cas de violation de la législation relative aux déchets ;
  • En cas de carence du maire dans l’exercice des prérogatives de l’article L. 541-3, il revient au préfet d’intervenir.

Déchets : Adoption du plan national de prévention des déchets 2021-2027

Plan national de prévention des déchets 2021-2027 – Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Le plan national de prévention des déchets (PNPD) pour la période 2021-2027 a été publié au Journal officiel du 25 mars 2023.

Le PNPD est régi par l’article L. 541-11 du Code de l’environnement et doit notamment fixer les objectifs nationaux et les orientations des politiques de prévention des déchets, l’inventaire des mesures de prévention mises en œuvre ou encore l’énoncé des mesures de prévention qui doivent être poursuivies et des mesures nouvelles à mettre en œuvre, notamment celles permettant d’éviter la production de déchets et celles visant à prévenir et réduire l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement, en particulier le milieu aquatique, et sur la santé humaine.

Le PNPD 2021-2027 prend en compte les évolutions législatives et règlementaires intervenues depuis 2017 (principalement l’adoption de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire et ses décrets d’application donc) et s’articule autour de cinq axes :

  • Axe 1 – Intégrer la prévention des déchets dès la conception des produits et des services ;
  • Axe 2 – Allonger la durée d’usage des produits en favorisant leur entretien et leur réparation ;
  • Axe 3 – Développer le réemploi et la réutilisation ;
  • Axe 4 – Lutter contre le gaspillage et réduire les déchets ;
  • Axe 5 – Engager les acteurs publics dans des démarches de prévention des déchets.

S’agissant de ce dernier axe, celui-ci vise à mobiliser l’Etat et les collectivités territoriales et comprend les actions suivantes s’agissant des collectivités :

  • Accompagner les politiques territoriales en faveur de la prévention des déchets avec le label « économie circulaire », cette action étant menée avec l’ADEME ;
  • Favoriser le retour et l’échange d’expériences entre régions sur le volet prévention des Programmes régionaux de prévention et de gestion des déchets ;
  • Accompagner les collectivités territoriales qui souhaitent développer la tarification incitative.

Les plans régionaux de prévention et de gestion des déchets (PRPGD), les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), les programmes pluriannuels de mesures du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et les programmes de mesures du plan d’action pour le milieu marin doivent être compatibles avec le PNPD.

Publicité : chartes d’engagement pour l’extinction des publicités lumineuses dans les transports

Le décret n° 2022-1294 du 5 octobre 2022 a étendu à l’ensemble du territoire français l’obligation d’extinction nocturne, entre 1 heure et 6 heures, à toutes les publicités lumineuses à l’exception de celles à image fixe implantées sur l’emprise des aéroports et sur le mobilier urbain affecté aux services de transport durant les heures de fonctionnement desdits services (voir notre article sur le sujet).

Dans le but affiché « d’aller plus loin que la règlementation relative à la publicité extérieure », une charte d’engagement a été signée par plusieurs exploitants de gares, stations et aéroports, sous le patronage de l’Etat.

Les signataires de cette charte s’engagent à :

  • Equiper ou faire équiper progressivement les dispositifs de publicité lumineuses situés dans les aéroports, gares et stations qu’ils gèrent afin que ceux-ci puissent être éteints ou, à défaut, mis en veille pendant les horaires de fermeture au public, avec un objectif d’équipement à 100 % au 1er janvier 2024 ;
  • Procéder à l’extinction ou mise en veille de ces dispositifs lors des fermetures ;
  • Etablir une stratégie sobriété

Certains de ces acteurs ont également pris des engagements individuels de réduction de la consommation électrique et des émissions carbone des dispositifs de publicité lumineuse.