Zéro artificialisation nette des sols, acte IV : Publications des décrets d’application de la loi du 20 juillet 2023

Décret n° 2023-1097 du 27 novembre 2023 relatif à la mise en œuvre de la territorialisation des objectifs de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols

Décret n° 2023-1097 du 27 novembre 2023 relatif à la mise en œuvre de la territorialisation des objectifs de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols

Le Gouvernement poursuit la mise en œuvre de son objectif de zéro artificialisation nette d’ici à 2050 avec la publication de trois nouveaux décrets, le 27 novembre dernier, venus préciser l’application des dispositions adoptées dans le cadre des lois dites « Climat et Résilience » du 22 août 2021 et loi « ZAN » du 20 juillet 2023, présentée ici lors de sa promulgation.

Très attendus, deux de ces trois décrets avaient été mis à la consultation du public l’été dernier. Le troisième décret tend à combler le vide juridique laissé par la censure partielle par le Conseil d’Etat du décret n° 2022-763 du 29 avril 2022 modifiant l’article R. 101-1 du Code de l’urbanisme relatif à la nomenclature des espaces artificialisés et non-artificialisés.

Destiné à corriger les effets de la censure partielle du décret n° 2022-763 du 29 avril 2022, le décret n° 2023-1096 définit la nomenclature permettant la distinction entre les sols artificialisés et les sols non-artificialisés qui sera déterminée en fonction de l’occupation effective d’un terrain mesurée à l’échelle d’un polygone dont la surface est définie par un tableau annexé à l’article R. 101-1 du Code de l’urbanisme :

Le nouvel article R. 101-1 du Code de l’urbanisme précise aussi que sont comptabilisés au sein des espaces non-artificialisés :

  • Les surfaces sur lesquelles sont implantés les panneaux photovoltaïques qui n’affectent pas « durablement les fonctions écologiques du sol, en particulier ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques ainsi que son potentiel agronomique et, le cas échéant, que l’installation n’est pas incompatible avec l’exercice d’une activité agricole ou pastorale sur le terrain sur lequel elle est implantée» (6° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021)

Ces surfaces pourront être compatibilisées en fonction de leur usage dans la catégorie des sols nus (6° du tableau annexé à l’article R. 101-1), des surfaces à usage de cultures (7° du tableau) ou des autres sols végétalisés (10° du tableau).

  • Les jardins et parcs publics d’une surface minimale de 2.500 m² de terrain ou d’emprise au sol.

Ces surfaces pourront être compatibilisées comme surfaces végétalisées et qui constituent un habitat naturel (9° du tableau annexé à l’article R. 101-1) ou dans le cadre des autres sols végétalisés (10° du tableau annexé).

Pour rappel, cette nomenclature ne s’appliquera pas aux objectifs de la première tranche d’application de l’objectif ZAN. Cette tranche (2021-2031) vise uniquement la réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers.

Enfin, le décret introduit un nouvel article R. 2231-1 au Code général des collectivités territoriales précisant le contenu du rapport relatif à l’artificialisation des sols prévu à l’article L. 2231-1 du même code qui doit comprendre :

  • La consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers en différenciant ces espaces et, le cas échéant, les espaces renaturés durant cette même période ;
  • Le solde entre les surfaces artificialisées et non-artificialisées ;
  • La surface de sols rendus imperméables au sens des catégories 1° et 2° du tableau annexé à l’article R. 101-1 du code ;
  • L’évaluation du respect des objectifs de réduction de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers et de lutte contre l’artificialisation des sols fixés dans les documents de planification et d’urbanisme.

Un tel rapport est établi pour une ou plusieurs années civiles et au moins tous les 3 ans à partir des données issues de l’observatoire de l’artificialisation, mises à disposition des collectivités.

Avec ce décret, le pouvoir réglementaire vient compléter les dispositions du décret n° 2022-762 du 29 avril 2022 pris pour l’intégration et la déclinaison des objectifs de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols, tout en prenant en compte les évolutions de la loi du 20 juillet 2023.

Ayant pris en compte certaines des propositions de l’Association des Maires de France (cf. les 20 propositions de l’AMF pour la mise en œuvre du ZAN), le décret prend en compte les efforts passés ainsi que les spécificités locales de certaines communes notamment littorales et de montagne.

C’est ainsi que l’article R. 4251-3 du CGCT mentionne désormais que « les objectifs en matière de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols sont définis et sont territorialement déclinés en considérant les efforts de réduction déjà réalisés, évalués compte tenu du nombre d’emplois et de ménages accueillis par hectare consommé ou artificialisé ».

Par ailleurs, est supprimée l’obligation de prévoir une cible chiffrée d’artificialisation à l’échelle infrarégionale au sein du SRADDET (qui reste tout de même une possibilité offerte aux régions). Ainsi, toute règle prise pour contribuer à l’atteinte des objectifs ZAN pourra toujours être déclinée entre les différentes parties du territoire régional en tenant compte nécessairement des périmètres des SCOT existants, pour ne pas méconnaître les compétences des échelons infrarégionaux.

Ensuite, la déclinaison territoriale doit permettre de tenir compte de la surface minimale de consommation de l’espace garantie pour les communes qui ne disposeraient pas d’espaces à artificialiser disponibles en application de la première tranche d’application de la loi.

De même, la déclinaison territoriale doit permettre aux communes exposées au risque de recul du trait de côte de favoriser des projets de recomposition spatiale pour les relocalisations nécessaires du fait de ce recul du trait de côte. La déclinaison territoriale prendra en compte les caractéristiques géographiques locales, notamment environnementales et paysagères, et doit être proportionnée à la surface des terrains qui sont situés dans les espaces urbanisés des zones délimitées par le recul du trait de côte et qui ont vocation à être renaturés pendant la tranche de dix ans en cours.

En outre, le pouvoir réglementaire a souhaité introduire des dispositions concernant les espaces agricoles afin d’assurer un équilibre entre la lutte contre l’artificialisation des sols et la préservation des activités agricoles. A ce titre, est ajouté un critère de territorialisation pour le maintien et le développement des activités agricoles permettant de réserver une part de l’artificialisation des sols aux projets de création ou d’extension de constructions nécessaires aux exploitations agricoles, à partir de 2031.

Enfin, le décret est venu rappeler qu’une autorisation d’urbanisme conforme aux prescriptions d’un document d’urbanisme en vigueur et ayant fixé des objectifs chiffrés de lutte contre l’artificialisation des sols ne peut pas être refusée au motif qu’elle compromettrait le respect de cet objectif.

C’est en effet par le biais de la traduction des objectifs dans les documents d’urbanisme que les objectifs de lutte de l’artificialisation des sols est opposable. L’article 3 du décret précise par ailleurs qu’ « en particulier, afin de préserver les espaces affectés aux activités agricoles, une autorisation d’urbanisme relative à une construction ou installation nécessaire à une exploitation agricole ne saurait être refusée au seul motif que sa délivrance serait de nature à compromettre de tels objectifs ».

Avec ce dernier décret, le pouvoir réglementaire est venu encadrer la composition et le fonctionnement de la commission régionale de conciliation sur l’artificialisation des sols, consultée en cas de désaccord entre l’Etat et la Région sur le classement d’un projet au sein de la liste des projets d’envergure nationale ou européenne présentant un intérêt général majeur.

Pour rappel, l’article 3 de la loi du 20 juillet 2023 avait prévu une comptabilisation spécifique de l’artificialisation des sols pour ce type de projet avec un forfait de 12.500 hectares dont 10.000 hectares dédiés aux régions couvertes d’un SRADDET.

S’agissant de la composition de cette commission régionale de conciliation sur l’artificialisation des sols :

  • Elle est composée de trois représentants de la région (désignés par le président du conseil régional) ainsi que de trois représentants de l’Etat et est présidée par un magistrat administratif désigné par le président de la cour administrative d’appel dans le ressort de laquelle se situe le chef-lieu de région.
  • Le préfet de région et le directeur régional chargé de l’environnement et de l’aménagement sont membres de droit de cette commission.
  • Un représentant par commune ou EPCI compétent en matière de documents d’urbanisme et un représentant par établissement public mentionné à l’article L. 143-16 du Code de l’urbanisme sur le territoire desquels se situe un projet d’envergure nationale ou européenne peuvent être invités être conviés à siéger à titre consultatif au sein de cette commission.

La commission dispose de son propre règlement intérieur, se réunit sur convocation de son président et elle peut être saisie par le président du conseil régional en cas de désaccord sur l’identification d’un projet d’envergure nationale ou européenne.

Les propositions, formulées dans le délai d’un mois à compter de la saisine de la commission, sont affichées, tenues à disposition du public et transmises au ministre chargé de l’urbanisme. Lorsque le ministre décide de ne pas les suivre, sa décision doit être motivée et transmise aux membres de la commission.

Pas de lotissement sans construction : le Conseil d’Etat apporte une précision sur la notion de lotissement

Par un arrêt du Conseil d’Etat en date du 29 novembre 2023, le Conseil d’Etat est venu apporter des précisions quant à la qualification de lotissement au sens des dispositions des articles L. 442-1 du Code de l’urbanisme.

En l’espèce, le Maire de la commune de Maisons-Laffitte avait délivré le 9 août 2021 à la société Longueil Invest un permis d’aménager en vue de la division d’une parcelle en deux parcelles distinctes : l’une supportant déjà une construction et l’autre destinée à être bâtie, cette dernière constituant l’unique lot du périmètre du lotissement.

Par ailleurs, précédemment, le 9 juin 2021, le maire de la commune avait aussi délivré un permis de construire tenant lieu de déclaration préalable de lotissement pour l’extension d’une construction située sur une parcelle issue d’une division parcellaire. L’autre parcelle concernée par cette division supportait déjà une construction et n’était pas incluse dans le périmètre du lotissement ainsi créé.

Le Tribunal administratif de Versailles a rejeté les deux recours en excès de pouvoir de l’Association de défense de l’environnement du parc de Maisons-Laffitte, qui se pourvoit en cassation.

Le Conseil d’Etat se saisit de ces deux contentieux pour rappeler qu’un lotissement doit nécessairement comprendre un lot à bâtir (même unique). Précisant cette notion, le Conseil d’Etat affirme que ne peuvent être compris dans la notion de lotissement les détachements de terrains bâtis qui ne sont pas destinés à la démolition, y compris dans l’hypothèse d’une démolition partielle accompagnée d’une extension même significative :

« 3. Il résulte de ces dispositions que la division en propriété ou en jouissance d’une unité foncière constitue un lotissement dès lors que l’un au moins des terrains issus de cette division est destiné à être bâti. Le périmètre du lotissement peut ainsi, au choix du lotisseur, ne comprendre qu’un unique lot à bâtir ou comprendre, avec un ou des lots à bâtir, des parties déjà bâties de l’unité foncière. Il en résulte également que ne constitue pas un lotissement le détachement d’un terrain supportant un ou plusieurs bâtiments qui ne sont pas destinés à être démolis, y compris lorsqu’est envisagée l’extension, même significative, de l’un de ces bâtiments, le cas échéant après démolition d’une partie de celui-ci, ou la construction d’annexes à ces bâtiments ».

En l’espèce, le Conseil d’Etat rejette le pourvoi contre l’arrêté du 9 août 2021. En effet, il était loisible à la société Longueil Invest de limiter le périmètre du lotissement à la seule partie destinée à être bâtie si bien que la conformité des règles d’urbanisme n’avait pas à être vérifiée sur l’autre parcelle issue de la division, mais non-comprise dans le lotissement.

Également, en application de ces règles, le Conseil d’Etat rejette le pourvoi contre l’arrêté du 9 juin 2021. En effet, dans la mesure où le permis de construire visait la démolition d’une terrasse et d’une véranda pour la construction d’une extension, d’un garage et d’une piscine notamment sans démolition complète du bien, il ne pouvait pas être considéré comme constituant un lotissement soumis à déclaration préalable ou permis d’aménager. Le permis de construire ainsi délivré était donc légal.

Précisions sur la notion d’ « entreprise » dans l’application des règles relatives aux aides d’Etat

Une « entreprise » peut être qualifiée comme telle au sens du droit des aides d’Etat du seul fait qu’elle exerce une activité économique, y compris dans le cas où elle acquiert un bien public dans des conditions lui conférant un avantage économique mais ne l’utilise pas dans le cadre de son activité et, ce, malgré ce que pouvait (sembler) indiquer une décision de la Commission européenne faisant un lien entre exploitation des biens et qualification d’ « entreprise ».

Le présent arrêt a été rendu dans le cadre d’une affaire portant sur une opération de restitution, par la République de Bulgarie à leurs anciens propriétaires, de terres forestières qui avaient été nationalisées au cours de l’année 1947. Plus précisément, un amendement de la loi sur les forêts, entré en vigueur le 22 février 2002, a permis des échanges de terres forestières privatisées contre des terres forestières de cet l’Etat bulgare, les prix des terrains échangés étant déterminés sur la base de critères fixés par la réglementation bulgare.

La Commission européenne a considéré, par une décision en date du 5 septembre 2014, que certaines aides octroyées à des « entreprises » dans le cadre des opérations d’échange de terres forestières concernées au cours de la période comprise entre le 1er janvier 2007, date de l’adhésion de la République de Bulgarie à l’Union européenne, et le 27 janvier 2009, avaient été illégalement mises à exécution par cet Etat et qu’elles étaient incompatibles avec le marché intérieur, et qu’elles devaient être récupérées.

Les autorités bulgares ont, par un acte de constatation d’une créance publique, réclamé certaines sommes à une personne physique, bénéficiaire de terrains, et une société dont cette personne était actionnaire et qui s’était vu céder les terrains.

Celles-ci ont exercé un recours contre cet acte devant l’Administrativen sad – Varna (tribunal administratif de Varna), en soutenant notamment qu’elles ne pouvaient pas être considérées comme des « entreprises » au sens de l’article 107 § 1 TFUE, dès lors que les terrains acquis dans le cadre de l’échange litigieux n’ont finalement pas été utilisés à des fins économiques.

En effet, la décision de la Commission indiquait que « certains bénéficiaires des opérations d’échange contestées n’ont pas exercé d’activité économique avec les terres forestières échangées pendant la période considérée et n’exercent pas actuellement une telle activité », de telle sorte que « ces bénéficiaires ne peuvent pas être considérés comme des entreprises au sens de l’article 107, paragraphe 1, [TFUE] et qu’il est, par conséquent, considéré qu’il n’y a pas d’aide d’État dans les opérations d’échange qu’ils ont conclues avec l’État bulgare » (§ 127). Ainsi, si les requérantes admettaient avoir bénéficié d’un avantage économique, elles soutenaient ne pas en avoir bénéficié en tant qu’entreprises visées à l’article 107 TFUE dès lors que la décision de la Commission faisait le lien, certes dans un seul passage, entre exploitation des terres forestières échangées et qualification d’entreprise.

La juridiction bulgare a saisi, dans le cadre du litige, la Cour de justice de l’Union européenne de questions préjudicielles relatives à l’interprétation de l’article 107 TFUE et de deux actes de droit dérivé (le règlement 2015/1589 du Conseil du 13 juillet 2015 portant modalités d’application de l’article 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et la décision de la Commission du 5 septembre 2014), dont une avait trait au fait de savoir si, au regard des termes de la décision de la Commission, la qualification d’« entreprise » dépendait de l’exploitation des terres forestières acquises dans le cadre des échanges de terres en cause.

La CJUE répond clairement de manière négative et exclut tout lien entre inexploitation des terres échangées et absence de qualification d’ « entreprise » en rappelant, d’une part, qu’il ne ressort aucunement que la qualification d’« entreprise », au sens de l’article 107 TFUE, serait subordonnée à la circonstance que l’activité économique concernée présente un lien avec des biens dont l’acquisition serait constitutive d’une aide d’État et, d’autre part, qu’il est de jurisprudence constante que, lorsqu’un texte du droit dérivé de l’Union est susceptible de faire l’objet de plusieurs interprétations, il convient de donner la préférence à celle qui rend la disposition conforme au traité plutôt qu’à celle conduisant à constater son incompatibilité avec celui-ci (CJUE, 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a., C‑547/14, point 70).

Sur la possibilité d’attribuer un contrat de délégation de service public sur la base des offres intermédiaires en cas de fuite d’informations confidentielles

Par une récente ordonnance[1], les Juges des référés précontractuels du Tribunal administratif de Paris statuant en formation collégiale ont eu l’occasion de rappeler que, dans des circonstances très particulières, l’autorité concédante peut décider de mettre un terme anticipé à la procédure de passation d’une délégation de service public, et d’attribuer le contrat sur la base des offres intermédiaires remises par les candidats, alors même qu’une étape de remise des offres finales était prévue par le règlement de consultation.

Dans cette affaire, le Syndicat des Eaux d’Ile-de-France (SEDIF) a lancé une procédure de mise en concurrence en vue de l’attribution d’un contrat de concession portant sur le renouvellement de la délégation de la gestion du service public de l’eau potable pour une durée de douze ans, à compter du 1er janvier 2025.

Au cours de la procédure de négociations à laquelle la Société Suez Eau France et la Société Veolia avaient été admises à participer, la Société Véolia a été destinataire de documents confidentiels relatifs aux négociations de sa concurrente et de son projet d’offre.

Après en avoir été informé par la Société Véolia (sept jours plus tard !), le président du SEDIF a missionné un expert informatique pour analyser les causes et les conséquences du dysfonctionnement, et rechercher les mesures de remédiation qui pourraient être mises en œuvre pour reprendre les négociations avec les soumissionnaires dans le respect de l’égalité de traitement. Il en est notamment ressorti que cette fuite d’informations avait été causée par une erreur de programmation de la plateforme sécurisée de mise à disposition de documents, et que la Société Veolia avait téléchargé, pris connaissance, copié et imprimé les documents relatifs à l’offre de sa concurrente.

A l’issue de cette expertise, le président du SEDIF a donc estimé, par une décision en date du 17 octobre 2023, que les conditions d’une reprise des négociations n’étaient pas réunies, et qu’il convenait d’y mettre un terme pour l’attribution du contrat. Les soumissionnaires ont alors été informés qu’ils ne seraient pas invités à soumettre d’offre finale, que l’attribution du contrat de concession s’effectuerait au regard des offres intermédiaires d’ores et déjà remises par les soumissionnaires, et qu’il serait procédé à une « mise au point » avec chacun d’entre eux.

Non contente que le SEDIF n’ait pas plutôt fait le choix d’exclure la candidature de la Société Véolia, la Société Suez Eau France a introduit un référé précontractuel aux fins d’annulation de la procédure de passation de la concession au stade de cette décision.

A l’appui de sa requête, la Société Suez Eau France arguait d’abord que le SEDIF aurait dû exclure de la procédure de passation la Société Véolia, en s’appuyant sur l’article
L. 3123-8 du Code de la commande publique, repris à l’article 10 du règlement de consultation, qui dispose que :

« L’autorité concédante peut exclure de la procédure de passation d’un contrat de concession les personnes qui ont entrepris d’influer indûment le processus décisionnel de l’autorité concédante ou d’obtenir des informations confidentielles susceptibles de leur donner un avantage indu lors de la procédure de passation du contrat de concession, ou ont fourni des informations trompeuses susceptibles d’avoir une influence déterminante sur les décisions d’exclusion, de sélection ou d’attribution ».

Les Juges des référés ont toutefois écarté ce moyen, en considérant qu’en ayant averti le SEDIF de cette fuite d’information, la Société Veolia avait renoncé à tirer parti de ces éléments confidentiels dans le cadre de cette procédure.

Dans un second moyen, la Société Suez Eau France arguait également que le SEDIF avait remis en cause, au cours de la procédure, une étape essentielle de la procédure de négociation.

Pour rappel, en droit, en vertu de l’article L. 1411-58 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) et de l’article L. 3124-1 du Code de la commande publique (CCP), l’autorité concédante dispose d’une liberté de négociation, et aucune disposition ne lui fait obligation de définir préalablement à l’engagement de la négociation les modalités de celle-ci, ni de prévoir un calendrier de ses différentes phases. Toutefois, il est de jurisprudence constante que, dans le cas où le règlement de consultation prévoit des modalités et un calendrier pour la remise des offres, le respect du principe de transparence des procédures exige, en principe, que l’autorité délégante ne puisse remettre en cause les « étapes essentielles » de la procédure et les conditions de la mise en concurrence. Cette interdiction vaut également s’agissant de l’étape de la remise d’une offre finale, qui constitue sans nul doute une étape essentielle de la procédure, en ce sens qu’elle doit permettre aux candidats d’ajuster leurs offres en fonction de leurs derniers échanges, et que cette étape fait partie intégrante de leur stratégie de négociation et de dévoilement.

Mais, pour écarter ce moyen tiré de la remise en cause d’une étape essentielle de la procédure, les Juges des référés ont pu très largement s’inspirer d’une solution qui avait été dégagée par le Conseil d’Etat en 2017, et qui avait été rendue dans des circonstances « très particulières »[2], relativement similaires au cas qui leur était soumis.

Dans cette affaire, la Haute juridiction avait en effet considéré, après avoir rappelé les principes précités, qu’il appartenait à l’autorité délégante « de veiller en toute hypothèse au respect des principes de la commande publique, en particulier à l’égalité entre les candidats et à la transparence des procédures », et que la décision consistant à figer l’état des offres à la date de la divulgation des informations confidentielles avait permis, dans les circonstances très particulières de l’espèce, de pallier une atteinte à l’égalité de traitement des candidats.

Au cas présent, les Juges ont donc, de la même manière, relevé que la décision prise par le SEDIF avait été prise précisément pour remédier à la transmission par erreur des documents confidentiels, et que les candidats avaient été mis en mesure de présenter une offre initiale et une offre améliorée, lesquelles étaient complètes et formalisées à l’issue d’échanges approfondis avec l’autorité concédante.

En substance, les Juges se sont attachés à constater que l’égalité entre les candidats avait été respectée :

« A supposer même que ces offres avaient vocation à évoluer et que l’offre finale était susceptible de comporter de nouveaux éléments, dès lors que les deux soumissionnaires, qui ont bénéficié des mêmes délais, des mêmes temps d’échanges avec l’autorité concédante et d’un volume comparable de questions, propositions d’amendements et commentaires de sa part, ont été traités dans le respect du principe d’égalité, tout au long de la procédure de négociation ».

Ils ont également noté qu’il existait un intérêt public à ce que le SEDIF demeure en mesure d’examiner des offres concurrentes en vue de la passation de la concession de la gestion du service public de l’eau potable, et que celui-ci justifie qu’il poursuive la procédure de passation de la concession de ce contrat, et ont précisé qu’il est loisible au SEDIF d’exclure la société Veolia à tout moment de la procédure jusqu’à l’attribution de la concession, sur le fondement de l’article 10 du règlement de consultation, ou de clore la procédure en la déclarant sans suite.

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[1] TA Paris, 29 novembre 2023, req. n° 2325466.

[2] CE, 8 novembre 2017, Société Transdev, req. n° 412859. Dans cette affaire, l’un des deux candidats avait été destinataire, par erreur, d’une clé USB contenant un certain nombre d’éléments qui portaient sur l’offre de son concurrent. L’autorité concédante avait alors décidé de supprimer la phase de remise des offres finales, et de procéder au choix du délégataire sur la base des offres intermédiaires d’ores et déjà remises par les candidats. La société qui avait été destinataire de ces documents avait ensuite saisi le juge des référés précontractuels d’une demande d’annulation de cette décision.

Loi SRU : Le Tribunal administratif de Versailles ramène de 250 % à 100 % le taux de majoration appliqué à la commune de l’Étang-la-Ville au titre de la triennale 2017-2019

Pour faire face à la pénurie de logements sociaux, l’article 55 de la loi no 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (dite « loi SRU ») impose à certaines communes[1] un seuil minimum de production de logements sociaux sur leur territoire.

Lorsqu’une commune n’a pas respecté ses objectifs de réalisation de logements sociaux, le préfet peut alors, en tenant compte de l’importance de l’écart entre les objectifs et les réalisations constatées au cours de la période triennale échue, des difficultés rencontrées le cas échéant par la commune et des projets de logements sociaux en cours de réalisation, prononcer la carence de la commune.

C’est ainsi que, par un arrêté du 28 décembre 2020, le préfet des Yvelines, après avoir constaté le non-respect par la Commune de l’Étang-la-Ville de ses objectifs de réalisation de logements sociaux sur la période triennale 2017-2019 a, d’une part, prononcé la carence de cette commune et, d’autre part, fixé à 250 % le taux de la majoration appliqué sur le montant du prélèvement par logement manquant pour une durée de trois ans à compter du 1er janvier 2021.

Saisi d’un recours en annulation de l’arrêté préfectoral, le tribunal, statuant comme juge de plein contentieux, était amené, d’une part, à déterminer si le prononcé de la carence procédait d’une erreur d’appréciation du préfet et, d’autre part, dans la négative, d’apprécier si, compte tenu des circonstances de l’espèce, la sanction retenue était proportionnée à la gravité de la carence.

Si le tribunal a écarté le moyen tiré de l’erreur d’appréciation, les circonstances de l’espèce ne permettant pas d’exclure le prononcé de la carence, il a, en revanche, retenu le caractère disproportionné du taux de majoration au regard de la situation particulière de la Commune et des efforts consentis par celle-ci.

En effet, la Commune justifiait d’une contrainte naturelle importante dès lors que la forêt domaniale de Marly occupe 65 % de son territoire, qui ne peut ainsi être entièrement mobilisé pour la réalisation de logements sociaux.

Elle avait par ailleurs développé, à partir de 2019, des outils pour faciliter l’atteinte des objectifs fixés par le préfet, avec notamment la révision de son plan local d’urbanisme et la signature du protocole « Prevention Carence » avec le conseil départemental des Yvelines.

Ainsi, le tribunal a considéré que le taux de majoration de 250 % appliqué par le préfet présentait un caractère disproportionné et l’a en conséquence ramené à 100 %.

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[1] Les communes d’au moins 1 500 habitants en IDF et 3 500 habitants sur le reste du territoire, qui sont comprises dans une agglomération ou un EPCI de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, et dans lesquelles le nombre total de logements locatifs sociaux représente, au 1er janvier de l’année précédente, moins de 25 % des résidences principales ; ce taux peut être ramené à 20 % pour les communes appartenant à des territoires dont la situation locale ne justifie pas un renforcement des obligations de production de logements sociaux (Art. L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation).

Précisions sur les conséquences de la modification d’un projet objet d’une demande d’autorisation d’urbanisme en cours d’instruction

Rappel des faits et de la procédure :

Dans cette affaire, une société a sollicité, le 22 juillet 2016, un permis de construire portant sur deux immeubles à usage d’habitation sur le territoire de la commune de Gorbio.

Par une lettre en date du 19 août 2016, la Commune a demandé des pièces complémentaires à la société pétitionnaire.

Les pièces complémentaires ont été transmises à la Commune le 29 août 2023.

Le dossier était alors en état d’être instruit.

Plus précisément, le délai d’instruction, ici de trois mois, a donc commencé à courir à compter du 29 août 2023.

C’est ici bien comprendre que, sauf intervention préalable d’une décision expresse, un permis de construire tacite serait né le 29 novembre 2023.

Toutefois, le pétitionnaire a produit de nouvelles pièces – nullement sollicitées par la Commune – les 27 octobre et 25 novembre 2016. Ces éléments correspondaient à des modifications de la demande de permis de construire initiale portant, d’une part, sur l’implantation d’un ouvrage d’art et, d’autre part, sur l’insertion paysagère du parking.

Le maire a finalement rejeté la demande de permis de construire de la société le 26 décembre 2016.

Le pétitionnaire a exercé un recours pour excès de pouvoir à l’encontre de cette décision de refus devant Le Tribunal administratif de Nice, qui l’a annulée.

La Commune a interjeté appel mais la Cour administrative d’appel de Marseille a confirmé le jugement de Nice.

La Commune s’est donc pourvue en cassation.

 

Analyse de la décision du Conseil d’Etat :

D’abord, le Conseil d’Etat a rappelé les articles L. 423-1 et L. 424-2 du Code de l’urbanisme et également leur pendant réglementaires -, qui disposent, en substance les cas dans lesquels le service instructeur peut réduire ou prolonger les délais classiques d’instruction (considérants n° 2 et 3).

Pour rappel, le délai d’instruction d’une déclaration préalable est d’un mois à compter du dépôt du dossier de déclaration préalable complet.

De même, le délai d’instruction d’une demande de permis de construire classique est de deux mois. Ce délai peut être prolongé pour des projets plus techniques, et notamment lorsqu’il est nécessaire de saisir l’architecte des bâtiments de France pour avis.

Aussi, l’on rappelle que le dossier est réputé complet si l’autorité compétente n’a pas, dans le délai d’un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur la liste des pièces manquantes. A l’inverse, dès réception d’une telle demande de pièces complémentaires, le demandeur aura trois mois pour transmettre les pièces sollicitées. A défaut, l’administration considérera que le demandeur a abandonné sa demande d’autorisation d’urbanisme.

Ensuite, le Conseil d’Etat a rappelé que les juges d’appel avaient rejeté l’appel de la Commune au motif que l’envoi par la société pétitionnaire, les 27 octobre et 25 novembre 2016, de pièces nouvelles au service instructeur de la Commune, n’était pas susceptible d’influer sur la date de naissance d’un permis tacite, le 29 novembre 2016, consécutif à l’expiration du délai d’instruction de trois mois.

Or, le Conseil d’Etat a considéré que, ce faisant, la Cour avait commis une erreur de droit car il appartenait au service instructeur de rechercher si des modifications intervenues en cours d’instruction par le pétitionnaire, compte tenu de leur objet, de leur importance ou de la date à laquelle elles ont été présentées, pouvaient être prises en compte dans le délai qui lui était imparti pour se prononcer sur la demande initiale ou, à défaut, d’informer le pétitionnaire qu’elles avaient pour effet d’ouvrir un nouveau délai d’instruction de la demande ainsi modifiée.

Le considérant de principe est le suivant :

  1. En l’absence de dispositions expresses du Code de l’urbanisme y faisant obstacle, il est loisible à l’auteur d’une demande de permis de construire d’apporter à son projet, pendant la phase d’instruction de sa demande et avant l’intervention d’une décision expresse ou tacite, des modifications qui n’en changent pas la nature, en adressant une demande en ce sens accompagnée de pièces nouvelles qui sont intégrées au dossier afin que la décision finale porte sur le projet ainsi modifié. Cette demande est en principe sans incidence sur la date de naissance d’un permis tacite déterminée en application des dispositions mentionnées ci-dessus. Toutefois, lorsque du fait de leur objet, de leur importance ou de la date à laquelle ces modifications sont présentées, leur examen ne peut être mené à bien dans le délai d’instruction, compte tenu notamment des nouvelles vérifications ou consultations qu’elles impliquent, l’autorité compétente en informe par tout moyen le pétitionnaire avant la date à laquelle serait normalement intervenue une décision tacite, en lui indiquant la date à compter de laquelle, à défaut de décision expresse, la demande modifiée sera réputée acceptée. L’administration est alors regardée comme saisie d’une nouvelle demande se substituant à la demande initiale à compter de la date de la réception par l’autorité compétente des pièces nouvelles et intégrant les modifications introduites par le pétitionnaire. Il appartient le cas échéant à l’administration d’indiquer au demandeur dans le délai d’un mois prévu par l’article R. 423-38 du Code de l’urbanisme les pièces manquantes nécessaire à l’examen du projet ainsi modifié.»

Il convient d’analyser précisément ce considérant en trois temps.

  • En premier lieu, ce considérant a pour intérêt d’indiquer que, dans la mesure où aucune disposition du Code de l’urbanisme ne l’interdit, le demandeur peut, pendant la phase d’instruction de sa demande d’autorisation d’urbanisme et avant l’intervention d’une décision expresse ou tacite, apporter des modifications à son projet dès lors que celles-ci ne changent pas la nature dudit projet. Pour ce faire, le demandeur devra adresser une demande en ce sens au service instructeur, accompagnée de ses nouvelles pièces.

Sous cette réserve, cette modification en cours d’instruction, à l’initiative du demandeur qui vient apporter de nouveaux éléments et pièces ne changeant toutefois pas la nature même du projet, n’aura en principe pas d’incidence sur la date de naissance d’un permis tacite.

  • En deuxième lieu, par exception, lorsque le service instructeur ne s’estimera pas en mesure d’instruire la demande selon les modifications du projet apportées en cours d’instruction par le demandeur, dans le cadre du délai initial, le service instructeur en informera par tout moyen le pétitionnaire avant la date à laquelle devait initialement intervenir la décision tacite, et lui indiquer la nouvelle date qui fera naître, à défaut de décision expresse, la délivrance d’un permis.

Cette prolongation pourra être justifiée par le fait que les modifications, du fait de leur objet, de leur importance ou de la date à laquelle elles sont présentées, notamment car les modifications et nouvelles pièces, impliquent de nouvelles vérifications et/ou consultations, de sorte que leur examen ne pourra être mené à bien dans le délai d’instruction découlant de la demande initiale.

  • En troisième lieu, le Conseil d’Etat considère que, lorsque le service instructeur reçoit une demande de modification du projet et de nouvelles pièces, par le demandeur lui-même, en cours d’instruction, cette action doit se regarder comme une nouvelle demande qui se substitue à la demande initiale.

Par conséquent, le Conseil d’Etat a considéré que la Commune était fondée à solliciter l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel confirmant le jugement du tribunal administratif de Nice. Le Conseil d’Etat a donc renvoyé l’affaire devant la Cour de Marseille.

Enfin, cette nouvelle décision peut, selon nous, être mise en parallèle avec deux autres décisions récentes du Conseil d’Etat, à savoir :

  • La décision en date du 9 décembre 2022 (n° 454521, publié au Recueil). Dans cette affaire, le Conseil d’Etat a jugé que la production, en cours d’instruction, d’une pièce demandée par l’administration, demande illégale en ce qu’elle n’est pas exigée par le Code de l’urbanisme, n’aura pas pour objet d’interrompre, ni de modifier le délai d’instruction.
  • La décision en date du 24 octobre 2023 (n° 462511, publié au Recueil). Par cette décision, le Conseil d’Etat a jugé que la modification du délai d’instruction notifiée après l’expiration du délai d’un mois prévu pour ce faire, ou qui, bien que notifié dans ce délai d’un mois, ne correspond à aucune des hypothèses permettant de majorer le délai d’instruction, n’a pas pour effet de modifier le délai d’instruction de droit commun à l’issue duquel nait un permis tacite ou une décision de non-opposition à déclaration préalable.

Loi Industrie verte : coup d’œil sur les quelques ajustements et assouplissements apportés au Code de la commande publique

Dans le prolongement de la loi dite Climat et résilience[1] – dont certaines des dispositions poursuivant l’objectif fixé de « verdissement » de la commande publique n’entreront en vigueur qu’à compter du 22 août 2026 – la loi Industrie verte publiée au JO du 24 octobre dernier, dont nous avons commenté ses apports en droit de l’environnement dans notre précédente Lettre d’actualité, comporte également des modifications en matière de commande publique.

Loin de porter des évolutions fondamentales permettant la prise en compte effective des enjeux environnementaux dans la commande publique, elle intègre des assouplissements et ajustement de dispositifs existants de nature à faciliter le verdissement de l’achat public pour certains d’entre eux.

  1. Les dérogations à certaines règles de la commande publique pour les entités adjudicatrices

Pour les entités adjudicatrices, exerçant notamment des activités d’opérateurs de réseaux dans lesquelles les enjeux environnementaux occupent une place centrale, la loi Industrie verte prévoit certaines exceptions aux règles de droit commun de la commande publique.

D’abord, la loi Industrie verte modifie l’article L. 21113-11 du Code de la commande publique (ci-après CCP) pour permettre de ne pas allotir un marché public « lorsque la dévolution en lots séparés risque de conduire à une procédure infructueuse » (article 26 de la loi).

Également, les entités adjudicatrices pourront prévoir pour leurs accords-cadres une durée supérieure à huit ans, lorsque cela est justifié « par un risque important de restriction de concurrence ou de procédure infructueuse dans le cadre de la procédure de passation d’un accord-cadre engagée par une entité adjudicatrice ». Il s’agit là d’une dérogation supplémentaire apportée au principe encadrant la durée des accords-cadres des entités adjudicatrices tel qu’il est fixé par l’article L. 2125-1 du CCP (article 27 de la loi).

Par ailleurs, celles-ci peuvent désormais, par exception au principe posé à l’article L. 2151-1 du CCP, autoriser les opérateurs économiques à présenter une offre variable selon le nombre de lot susceptibles d’être obtenus (article 28 de la loi).

Enfin, l’article 29 de la loi permet aux entités adjudicatrices de rejeter certaines offres présentées dans le cadre de la passation d’un marché de fournitures ou d’un marché de travaux de pose et d’installation de ces fournitures lorsqu’elles proposent des produits originaires d’un pays tiers à l’Union européenne avec lequel aucun des accords visés par cet article 29 n’a été conclu et qui représentent une part majoritaire de la valeur totale des produits contenus dans l’offre qui serait ainsi rejetée.

  1. Les nouvelles possibilités d’exclusion des procédures de mise en concurrence

Sur ce terrain, la loi Industrie verte habilite, d’une part, le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures permettant la mise en œuvre d’un dispositif d’exclusion des procédure de marchés publics et de concessions pour les opérateurs qui n’auraient pas procédé aux publications d’information en matière de durabilité telles qu’elles résulteront de la transposition de la directive du 14 décembre 2022 en la matière[2]. Cette transposition devant être effectuée dans les trois mois à compter de la promulgation de la loi Industrie verte (article 25 de la loi).

Et d’autre part, elle insère un article L. 2141-7-2 au sein du CCP permettant aux acheteurs d’exclure de la procédure de passation d’un marché « les personnes soumises à l’article L. 229-25 du Code de l’environnement qui ne satisfont pas à leur obligation d’établir un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre pour l’année qui précède l’année de publication de l’avis d’appel à la concurrence ou d’engagement de la consultation ». La même disposition est intégrée dans un nouvel article L. 3123-7 du CCP pour les contrats de concession.

  1. Le Schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER) étendu et étayé

Le SPASER, prévu par l’article L. 2111-3 du Code de la commande publique doit être établi par les acheteurs soumis au Code de la commande publique dont les achats sont supérieurs à un certain montant[3], et ce afin de déterminer leurs objectifs de politique d’achat en matière sociale et écologique par l’utilisation de certains indicateurs.

La loi Industrie verte vient préciser le contenu de ce schéma s’agissant des informations et objectifs qu’il expose au plan écologique.

Elle loi permet par ailleurs à plusieurs acheteurs de mettre en commun leur SPASER, y compris lorsqu’ils ne sont pas soumis à l’obligation de l’établir en raison du montant de leurs achats.

  1. L’insertion de la possibilité de fixer des critères environnementaux parmi les dispositions légales

Pour mémoire, ainsi que le prévoit loi Climat et Résilience précitée, les acheteurs publics auront l’obligation, à partir du 22 août 2026, et dès le 1er juillet 2024 s’agissant des contrats portant sur l’implantation ou l’exploitation d’installations de production ou de stockage d’énergies renouvelables au sens de l’article L. 211-2 du Code de l’énergie, de fixer au moins un critère de sélection des offres portant sur les caractéristiques environnementales de la prestation objet du contrat. Et ce, y compris lorsqu’un critère unique relatif au « coût » a été fixé (la possibilité de ne retenir qu’un seul critère de sélection fondé sur le « prix » de l’offre étant supprimée)[4].

D’ici là, la loi Industrie verte vient, sans instaurer d’obligation en ce sens, intégrer à l’article L. 2152-7 du Code de la commande publique la possibilité pour les acheteurs publics de prendre en compte les aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux de l’offre.

Et ce, alors que cette précision figurait déjà parmi les dispositions réglementaires du CCP (article R. 2152-7). A ce titre le Conseil d’Etat, dans son avis du 17 mars 2023 sur le projet de loi relatif à l’Industrie verte, avait pourtant considéré quant à cette disposition que « l’explicitation de cette notion d’offre économiquement la plus avantageuse a été inscrite jusqu’à présent dans la partie réglementaire du code de la commande publique et aucune raison valable ne conduit à revenir sur le partage entre loi et règlement auquel il a ainsi été procédé ».

Aucune évolution notable de la loi Industrie n’est donc pour l’heure à retenir au plan de l’intégration de la considération environnementale dans les critères de sélection des offres.

Toutefois, le communiqué de presse du Conseil des ministres du 16 mai 2023 sur loi Industrie verte ayant envisagé « l’accélération de la mise en œuvre obligatoire (dès juillet 2024 au lieu d’août 2026) de critères environnementaux dans les marchés publics pour des produits clés de la décarbonation », il convient de rester attentif à la parution d’un décret permettant l’entrée en vigueur anticipée de ce dispositif pour certains marchés publics.

Marie-Hélène Pachen-Lefèvre et Ana Nuytten

 

[1] Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets

[2] DIRECTIVE (UE) 2022/2464 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) no 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises.

[3] Fixé à cinquante millions d’euros hors taxes par l’article D. 2111-3 du Code de la commande publique.

[4] Pour plus de précision, voir notamment en ce sens Contrats Publics n° 243, Juin 2023, Favoriser l’utilisation des énergies renouvelables dans les marchés publics, Ana Nuytten et Alexandra Ouzar, avocates à la Cour, Cabinet Seban et Associés : https://www.seban-associes.avocat.fr/wp-content/uploads/2023/07/A.-Nuytten-et-A.-Ouzar-Favoriser-lutilisation-des-energies.pdf

SPECIALE 100ème : la LAJEE intègre les mobilités et devient la LAJEEM !

Pour répondre aux besoins d’information et d’analyse croissants et interdépendants de ses lecteurs, notre Lettre d’actualités juridiques Energie et Environnement (LAJEE) s’enrichit en s’ouvrant au secteur de la mobilité : à l’occasion de ce 100ème numéro, elle devient la Lettre d’actualités juridiques Energie, Environnement et Mobilité (LAJEEM).

Notre Cabinet a créé la LAJEE en 2014 avec la certitude que la transition écologique constituait un défi majeur pour le secteur public.

Aujourd’hui, le secteur des transports est, et de loin, le plus grand poste d’émissions de CO² en France. La révolution des mobilités sera donc une des clés de la transition écologique. Et les chantiers sont nombreux : développement des bornes de recharge de véhicules électriques et de toutes formes de mobilité douce, accroissement de l’intermodalité avec notamment le billet unique promis par le Gouvernement, développement du ferroviaire pour les transports publics de voyageurs (ouverture à la concurrence, mise en œuvre des services express régionaux métropolitains, développement des trains de nuit).

Le développement de la mobilité propre comme l’évolution de tous les usages consommateurs d’énergie nécessitent plus que jamais que la production d’énergie renouvelable et l’alimentation en énergies soient au rendez-vous de la transition écologique. Ces sujets juridiques d’actualité se nourrissent les uns les autres et leur maitrise fait la force de SEBAN & ASSOCIES.

C’est donc tout naturellement que nous avons décidé d’ajouter un « M » à notre LAJEE.

Bonne lecture à toutes et tous

Marie-Hélène Pachen-Lefèvre, Marion Terraux, Didier Seban, Thomas Rouveyran et Guillaume Gauch

Marchés globaux de performance énergétique à paiement différé : Fin Infra publie la méthodologie de réalisation de l’étude préalable

Le décret n° 2023-913 relatif aux marchés globaux de performance énergétique à paiement différé, publié le 3 octobre dernier en application des dispositions de la loi n° 2023-222 en date du 30 mars 2023, a précisé les modalités selon lesquelles les avis de la Mission d’appui au financement des infrastructures (ci-après « Fin Infra ») et du Ministre chargé du budget seront rendus respectivement sur l’étude préalable qui a objet de démontrer l’intérêt du recours à un marché global de performance énergétique à paiement différé (ci-après « MGPEPD »), et sur l’étude de soutenabilité budgétaire qui apprécie notamment les conséquences du contrat sur les finances publiques et la disponibilité des crédits.

S’il ressort aujourd’hui une volonté manifeste de Fin Infra[1] de favoriser le déploiement des opérations de rénovation énergétique des bâtiments publics à l’occasion des avis que ce service aura à rendre sur les études préalables qui lui seront soumises, notre analyse du décret révèle une complexité non négligeable pour les collectivités territoriales et leurs groupements, et tout particulièrement dans l’élaboration des dossiers constitutifs de l’étude préalable et de l’étude de soutenabilité budgétaire.

A ce titre, les éléments méthodologiques de Fin Infra étaient particulièrement attendus pour mieux évaluer, dans la pratique, le niveau de précision de l’étude préalable qui est soumise à son avis, et pour évaluer globalement la lourdeur de la procédure à mettre en œuvre pour passer des MGPEPD.

Selon la méthodologie publiée par Fin Infra, les éléments que doit comprendre l’étude préalable du MGPEPD qui lui sera soumise pour avis, sont les suivants :

  1. Une présentation générale du projet à propos de laquelle il convient d’apprécier que, selon Fin Infra, les éléments qu’elle est censée inclure sont seulement utiles à l’acheteur sans constituer des données nécessaires afin qu’elle prononce un avis favorable[2].

Cette présentation devra inclure :

  • les caractéristiques du projet, son équilibre économique et ses enjeux.

Si les caractéristiques du projet qui doivent être développées au titre de l’étude préalable comportent en partie des éléments financiers, ces derniers ne semblent pas devoir être précisément détaillés. Il s’agit seulement d’indiquer la répartition des coûts prévisionnels du projet par grande typologie de coûts d’investissement et les paramètres de l’équilibre économique prévisionnel de l’opération (coût d’investissement, aides/subventions, projets de valorisation, économies d’énergie attendues).

Outre ces éléments, les caractéristiques du projet devront également rappeler son contexte (niveau de maturité, objectifs poursuivis, inscription dans un plan pluriannuel d’investissement ou dans une stratégie immobilière) ainsi que les modalités de mutualisation envisagées.

  • les compétences de l’acheteur, son statut et ses capacités financières.

A ces éléments visés par le décret du 3 octobre 2023, la méthodologie de Fin Infra a ajouté la présentation des capacités techniques de l’acheteur, notamment ses moyens techniques et humains – qui pourraient être mobilisés sur d’autres projets en cours –, son expérience à conduire le projet – au regard de projets comparables qu’il aurait conduit – et le recours à des compétences externes (techniques, financières, juridiques).

Ceci semble de nouveau confirmer que l’avis de Fin Infra portera essentiellement sur les éléments qualitatifs du projet – en l’espèce, la capacité du maître d’ouvrage à mettre en œuvre un MGPEPD – et non financiers.

  • un état de la consommation énergétique et des émissions de gaz à effet de serre de référence retenus pour apprécier la performance énergétique du projet.

Cette situation de référence sera appréciée bâtiment par bâtiment et inclura également une présentation de l’état initial (caractéristiques du bâti et notamment son isolation thermique, la liste des équipements de chauffages, la présence ou non de systèmes de gestion technique du bâtiment ou centralisée, la situation du ou des bâtiment(s) au regard des obligations relatives au décret tertiaire – à savoir la réduction du niveau de consommation d’énergie par paliers, la communication des données de consommation d’énergie sur la plateforme OPERAT).

  1. Une description des options de montages contractuels de la commande publique qui sont écartées, et des options qui sont envisagées pour mettre en œuvre le projet.

A ce titre, Fin Infra indique qu’il s’agira pour l’acheteur de présenter de façon synthétique les options de montage contractuel envisageables pour mettre en œuvre le projet et de vérifier juridiquement s’il peut y recourir, en précisant le cas échéant les motifs qui le conduisent à exclure tel ou tel montage.

  1. Une appréciation portant sur l’ensemble des avantages et inconvénients du marché par rapport aux options de montages contractuels écartées.

A ce titre, Fin Infra précise que les marchés de partenariat n’auront pas à être inclus dans cette analyse dans la mesure où ils autorisent également le paiement différé. Ceci est issu de la rédaction du décret n° 2023-913 du 3 octobre 2023 qui a indiqué que cette analyse comparative des avantages et inconvénients du MGPEPD devait être réalisée au regard des options qui n’autorisent pas le paiement différé, ce qu’autorise à titre dérogatoire le marché de partenariat.

Ceci étant relevé, l’analyse doit comparer les avantages et les inconvénients des différents montages sur la base d’une durée correspondant à la durée d’amortissement des investissements, au regard :

  • des objectifs de performance retenus par l’acheteur, étant précisé que le directeur de Fin Infra a pu indiquer que les objectifs que se fixe l’acheteur ne seront pas appréciés par son service[3].

En premier lieu, il conviendra de comparer les montages contractuels au regard des estimations du gain attendu – notamment de l’objectif attendu par rapport à la situation de référence – en matière de consommation énergétique exprimée en énergie finale et du gain attendu en matière d’émission de gaz à effet de serre.

En deuxième lieu, devront être comparés le calendrier comprenant la phase de consultation et la phase de conception et de réalisation des travaux, ainsi que la durée sur laquelle porte l’engagement d’exploitation et de performance énergétique.

En dernier lieu, l’acheteur devra comparer les différents mécanismes :

    • d’incitation créés par le calendrier de paiement des prestations ;
    • de garantie de paiement des pénalités (garanties ou mécanismes de compensation des pénalités sur les rémunérations) ;
    • et des sanctions pour chaque phase du projet (construction, exploitation).
  • du périmètre des missions susceptibles d’être confiées au titulaire.

A ce titre, Fin Infra précise qu’il s’agira notamment de comparer les missions restant à la charge de l’acheteur notamment au titre des missions d’exploitation-maintenance, ce qui sera notamment le cas, à la différence des MGPEPD, des marchés de travaux non accompagnés d’un marché d’exploitation-maintenance, ou des marchés de conception-réalisation.

  • des principaux risques du projet et de leur répartition entre l’acheteur et le titulaire.

A ce titre, Fin Infra identifie quatre risques que l’acheteur sera libre de modifier et de compléter, à savoir :

  • le risque lié à l’état du bâti initial, à la complétude et à l’exactitude des études préalables, ainsi qu’à la connaissance du patrimoine ;
  • les risques « construction » liés au choix des matériaux, aux approvisionnements en phase travaux, aux causes d’interruption de chantier, aux modifications demandées par l’acheteur, ainsi que les risques de défaillance du titulaire et liés à la maîtrise d’ouvrage ;
  • les risques « exploitation technique » liés aux usages du bâtiment, à la performance des installations techniques dans le temps, à la disponibilité de l’ouvrage et à la défaillance du titulaire ;
  • le risque financier lié à l’évolution des taux de financement et à l’évolution des indices de prix.

Pour chaque catégorie identifiée, l’acheteur devra ainsi apprécier le niveau du risque en fonction de leurs effets sur les coûts et les délais et de leur probabilité d’occurrence.

Enfin, l’acheteur portera une appréciation sur la pertinence du transfert de risque opéré en fonction du niveau du risque et de ses capacités.

  • de la structure de financement ainsi que de son incidence sur le coût du projet.

Fin Infra indique à cet égard que l’acheteur devra présenter pour chaque mode de réalisation et à titre prévisionnel :

  • les conditions de financement, en distinguant le coût de la dette et, le cas échéant, le coût des fonds propres, y compris du financement public ;
  • le coût moyen pondéré du capital (en %) ;
  • le coût du capital (dette et fonds propres en euros sur la durée du marché.
  • le cas échéant, des effets de la mutualisation du projet avec d’autres acheteurs, au titre de laquelle il peut être relevé de manière satisfaisante que le directeur de Fin Infra a confirmé que les projets mutualisés seront favorisés[4].

A ce titre, Fin Infra précise que l’analyse devra détailler les impacts de la mutualisation, notamment en matière d’économies d’échelle, et indiquer si ces derniers sont de nature à favoriser la réalisation du projet dans son ensemble ou s’ils génèrent des risques ou des contraintes supplémentaires.

Enfin, Fin Infra apporte d’autres précisions qui étaient attendues dans sa méthodologie, en particulier que :

  • le MGPEPD peut porter sur des prestations qui ont pour objet de réduire la consommation énergétique d’un ou plusieurs bâtiments, quelle que soit la nature de ces dernières, de sorte qu’il peut porter sur des travaux d’isolation, de remplacement d’équipements techniques (chauffages, traitement d’air, ventilation…), sur la mise en place d’outils de pilotage et de contrôle de la consommation, ou encore de sur l’installation d’unités de production d’électricité ou de chaleur renouvelable en autoconsommation ;
  • si l’objet principal des MGPEPD doit bien porter sur la rénovation énergétique d’un ou de plusieurs bâtiments ainsi que sur les travaux qui lui sont indissociablement liés, cela n’exclut pas d’autres travaux dans le périmètre de ces contrats pour autant que ces derniers ne remettent pas en cause cet objet principal (réaménagement des espaces, végétalisation, amélioration du confort des usagers…).

En définitive, si Fin Infra entend apprécier de manière conciliante les projets qui seront soumis à son avis, il ressort de ce qui précède que l’élaboration de l’étude préalable représentera une certaine complexité pour les collectivités territoriales et leurs groupements disposant de peu de moyens internes, et restreindra l’intérêt de recourir à des MGPEPD à des opérations atteignant une taille critique, notamment via les mécanismes de mutualisation.

 

[1] Commande publique : « Un outil plus simple, plus souple que le marché de partenariat », Jean Bensaïd – Le Moniteur – 27 novembre 2023.

[2] « Néanmoins, ces éléments ne contribuent pas directement à la comparaison entre les montages et peuvent donc être adaptés en fonction des données dont dispose l’acheteur » (Commande publique : « Un outil plus simple, plus souple que le marché de partenariat », Jean Bensaïd – Le Moniteur – 27 novembre 2023).

[3] Commande publique : « Un outil plus simple, plus souple que le marché de partenariat », Jean Bensaïd précité.

[4] « On va favoriser les opérations qui concernent plusieurs personnes publiques, plusieurs sites, plusieurs écoles par exemple, en même temps » (Commande publique : « Un outil plus simple, plus souple que le marché de partenariat », Jean Bensaïd – Le Moniteur – 27 novembre 2023).

Alstom, pas prête de voir le bout du tunnel …

Alors que son carnet de commandes est bien rempli, la situation d’Alstom interroge. Ainsi, elle a annoncé la suppression de 1500 emplois. Et ce n’est pas la décision de la Métropole de Lille qui va venir mettre du baume au cœur des dirigeants.

 

Rappelons en effet qu’en 2012, la MEL avait décidé de confier à Alstom l’implantation d’un nouveau pilote automatique et l’acquisition de plusieurs rames, pour une mise en service en 2016. Or, ce pilote n’est toujours pas efficient et selon la MEL, le délai serait aujourd’hui reporté à 2026, soit 10 ans de retard… une procédure de médiation avait été engagée. Et, dans un communiqué en date du 29 novembre dernier, la MEL a décidé de rompre les négociations et d’introduire un recours en référé devant le Tribunal administratif. Notons, pour être complet, que dans un communiqué en réponse, Alstom s’est étonnée de la décision de la MEL en considérant avoir fait la démonstration que le système de métro fonctionnait. Affaire à suivre, donc…

A69 : feu rouge pour la procédure de référé engagée par les associations.

L’A69 est le nouveau symbole du combat entre deux exigences inconciliables. D’un côté du ring, la lutte contre le réchauffement climatique, passant par une réduction de l’usage de la voiture et de l’artificialisation des sols, de l’autre côté, une région, celle de Castres, enclavée et qui verrait réduire de 12 minutes le trajet vers Toulouse.

 

Et, une nouvelle fois, le juge administratif comme arbitre. En effet, plusieurs syndicats et associations avaient contesté en référé la légalité de l’arrêté par lequel le Préfet de région Occitanie, le Préfet de la Haute-Garonne, et le Préfet du Tarn avaient délivré à la société concessionnaire de la future autoroute A69, l’autorisation environnementale octroyant notamment une dérogation à l’interdiction de destructions d’espèces protégées et de leur habitat. Par une ordonnance en date du 1er aout 2023, le Tribunal administratif de Toulouse avait rejeté leur recours en considérant qu’il n’y avait pas de doute sérieux quant à la légalité de cette décision. Et, par une décision en date du 29 novembre dernier, le Conseil d’Etat vient de rejeter leur pourvoi.

Autorité de la Concurrence, le saut d’obstacles de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de personnes

Soulignant l’importance du secteur public de transports dans la transition écologique, l’Autorité de la Concurrence avait lancé une consultation en mars 2023 portant sur ce secteur afin d’apprécier si ses précédentes recommandations avaient été respectées et en formuler de nouvelles. Elle a donc rendu son avis le 29 novembre 2023.

En ce qui concerne l’ouverture à la concurrence, l’Autorité de la concurrence note que les barrières sont « hautes et multiples ». Et dans ce cadre, l’Autorité de la Concurrence s’interroge notamment sur les conditions d’ouverture à la concurrence du secteur ferroviaire, qu’il s’agisse des services librement organisés ou des services conventionnés. Elle note ainsi une mauvaise qualité de l’infrastructure, des difficultés d’accès pour les nouveaux entrants au matériel roulant et aux équipements embarqués.

Et elle formule des inquiétudes nettes sur les conditions d’ouverture à la concurrence des TER, soulignant tout à la fois le manque de moyens des régions pour procéder à ces ouvertures à la concurrence, leur dépendance à l’égard du groupe SNCF. Elle constate aussi que la multiplication des procédures dans des délais serrés empêchera les opérateurs de répondre à toutes les procédures. Elle invite enfin les régions à tout mettre en œuvre pour ne pas intégrer dans leurs procédures des éléments venant réduire la concurrence. Elle invite également les Autorités à se saisir de la possibilité de gérer les gares telle qu’offerte par le décret n° 2021-966 du 20 juillet 2021 relatif à la gestion et à l’exploitation des gares de voyageurs principalement utilisées par des services publics de transport ferroviaire de voyageurs, dit décret « mono-transporteur ».

S’agissant des transports urbains, l’Autorité de la Concurrence appelle à stimuler la concurrence, notamment en procédant à des allotissements et ajoutant des systèmes de contrôles des engagements des cocontractants.

Enfin, l’Autorité invite les AOM à stimuler la concurrence en la matière sur le marché de la distribution et à rendre possible l’interopérabilité avec leur propre système de distribution.

Si ces recommandations sont cohérentes, force est de constater qu’elles ne prennent manifestement pas en compte le manque de moyens des régions et leurs difficultés de recrutement.

Publicité : encadrement de la publicité en mer

Le décret en date du 17 novembre 2023 introduit au sein du Code de l’environnement un nouveau paragraphe, composé des articles R. 581-52-1 et suivants, intitulé « publicité en mer » et visant à encadrer cette activité.

Cette règlementation s’applique à compter du 1er mars 2024 en mer territoriale et sur les eaux intérieures maritimes françaises.

Il est ainsi désormais prévu que :

  • La publicité lumineuse est interdite ;
  • La publicité non lumineuse n’est admise que sur les navires, qui ne doivent pas être équipés ni exploités à des fins essentiellement publicitaires ;
  • La surface totale des publicités non lumineuses apposées ou installées sur un navire ne peut excéder 4 m², cette disposition ne s’appliquant toutefois pas à la marque, au constructeur, à l’exploitant ou au parraineur des navires, y compris au parraineur des évènements nautiques lors de ces évènements.

Des dérogations peuvent être accordées à titre exceptionnel pour des manifestations particulières.

Autorisation environnementale : quel intérêt à agir des collectivités ?

CE, 1er décembre 2023, Département de la Charente-Maritime, n° 467009

Par deux arrêts en date du 1er décembre 2023 portant sur des recours dirigés contre les autorisations environnementales accordées à des projets d’exploitation d’énergie éolienne, le Conseil d’Etat a eu l’occasion de préciser les modalités d’appréciation de l’intérêt à agir des collectivités territoriales contre les autorisations environnementales.

Le principe qui ressort de ces décisions est le suivant :

« une personne morale de droit public ne peut se voir reconnaître la qualité de tiers recevable à contester devant le juge administratif une autorisation environnementale que dans les cas où les inconvénients ou les dangers pour les intérêts visés à l’article L. 181-3 sont de nature à affecter par eux-mêmes sa situation, les intérêts dont elle a la charge et les compétences que la loi lui attribue ».

Le Conseil d’Etat a ensuite appliqué ce principe aux différents échelons de collectivité territoriale :

  • Sur l’intérêt à agir des régions : la circonstance que le projet d’implantation d’éoliennes soit situé sur son territoire et que la Région avait défini des règles et objectifs portant sur le développement de l’énergie éolienne visant à assurer la protection des paysages et de l’environnement au sein de son schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) ne permet pas de caractériser un intérêt à agir direct, la Région n’étant investie d’aucune responsabilité en matière de protection des paysages et de la biodiversité contre les atteintes que l’installation d’éoliennes pourrait provoquer sur son territoire ;
  • Sur l’intérêt à agir des départements : le juge relève que le département ne justifie d’aucune compétence propre en matière de protection de l’environnement, des paysages ou du patrimoine, d’aménagement du territoire ou de lutte contre l’effet de serre par la maîtrise et l’utilisation rationnelle de l’énergie susceptible de lui conférer un intérêt direct à agir contre un projet d’implantation d’éoliennes. Il pourrait en aller autrement s’il était démontré que le projet portait atteinte à des espaces naturels sensibles ou à une politique touristique départementale (qui comprend notamment l’élaboration d’un plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée) ;
  • Sur l’intérêt à agir des communes : commet une erreur de droit le juge qui considère que l’intérêt à agir de communes limitrophes au projet n’est pas caractérisé alors que le projet litigieux affecterait directement la qualité de leur environnement et aurait un impact sur leur activité touristique, en raison notamment de nuisances paysagères et patrimoniales résultant de la proximité ou covisibilité du site d’implantation du projet avec plusieurs monuments historiques et sites inscrits et de la présence de zones naturelles à préserver, dont une zone Natura 2000, susceptibles d’être affectées par le fonctionnement du parc éolien et situées à proximité immédiate de ce dernier.

Autorisation environnementale : attention à l’irrecevabilité des recours

Le 29 novembre 2023 est paru au Journal officiel le décret visant à préciser l’obligation de notification des recours exercés contre des autorisations environnementales à l’auteur et au bénéficiaire de ces actes.

En effet, la loi n° 2023-275 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables avait introduit un nouvel alinéa au sein de l’article L. 181-17 du Code de l’environnement, aux termes duquel « l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et au bénéficiaire de la décision. Les conditions d’application du présent alinéa sont précisées par décret en Conseil d’Etat ».

Le décret du 27 novembre 2023 complète les articles R. 181-50 et R. 181-51 du Code de l’environnement et précise les conditions dans lesquelles cette double notification devra être réalisée :

  • Sur le champ d’application de cette obligation, qui concerne les recours contentieux et administratifs, elle vise tant le recours dirigé contre une autorisation environnementale que celui visant un arrêté fixant une ou plusieurs prescriptions complémentaires ou une demande tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant une telle autorisation ou un tel arrêté. Sont également concernées les décisions refusant de retirer ou d’abroger une autorisation environnementale ou un arrêté complémentaire ;
  • Sur les modalités de la notification, elle doit intervenir par lettre recommandée avec avis de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours contentieux ou de la date d’envoi du recours administratif. Il s’agit de la date d’envoi de cette lettre, attestée par le certificat de dépôt, qui doit être prise en compte.

Il sera nécessaire que l’affichage et la publication de ces décisions mentionnent cette obligation de notification ainsi que les conséquences du défaut de réalisation de cette formalité.

Cette obligation est applicable aux recours relatifs aux autorisations environnementales et aux arrêtés complémentaires pris à compter du 1er janvier 2024.

Suites et fin de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique : une esquisse de l’après

Le dispositif de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ci-après, ARENH) a été mis en place par la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l’électricité (dite loi NOME). L’ARENH est entré en vigueur le 1er juillet 2011 et s’applique jusqu’au 31 décembre 2025.

Le dispositif de l’ARENH visait alors deux objectifs :

  • Encourager la concurrence sur le marché de détail tout en permettant aux consommateurs finals de bénéficier de l’électricité produite par le parc nucléaire ;
  • Concourir au développement de la concurrence en amont, en permettant aux fournisseurs d’investir dans des moyens de production.

Pour rappel, le fonctionnement de l’ARENH est le suivant : 100 TWh sont accordés chaque année aux fournisseurs alternatifs en fonction des prévisions de consommation des consommateurs finals. La Commission de régulation de l’énergie (ci-après, CRE) opère un contrôle a posteriori des consommations réelles. Les fournisseurs ayant bénéficié de volume supérieur à la consommation réelle doivent s’acquitter de compléments de prix.

L’exercice de l’ARENH est encadré par un arrêté du Ministre en charge de l’énergie et par un accord-cadre conclu avec les fournisseurs alternatifs souhaitant en bénéficier. Par une délibération du 15 novembre 2023, la CRE a proposé une modification de l’arrêté du 28 avril 2011 définissant les conditions de vente d’électricité d’EDF aux fournisseurs alternatifs et un nouveau modèle d’accord cadre pour prendre en compte les modifications réglementaires récemment intervenues (I.). Par une communication du 21 novembre 2023, le Ministre en charge de l’énergie a donné des indications sur l’après ARENH, le dispositif n’ayant pas vocation à perdurer au-delà du 31 décembre 2025 (II.).

I. Sur la délibération de la CRE

La délibération de la CRE propose notamment les modifications suivantes :

  • Facturation des frais prévisionnels de la Caisse des dépôts et consignations en cas de cessation des livraisons : la CRE propose ainsi une modification de l’article 6 de l’arrêté du 28 avril 2011 prévoyant que les frais prévisionnels des fournisseurs soit dus, même en cas de cessation des livraison d’ARENH auxdits fournisseurs ;
  • Modalités de rétrocession des garanties de capacité en cas de cessation des livraisons : la CRE propose une évolution de l’article 7-1 l’arrêté du 28 avril 2011 pour prendre en comptes les évolutions du mécanisme de capacité intervenues depuis la dernière modification de l’arrêté ;
  • Suppression des dispositions relatives aux volumes d’ARENH additionnels mis à disposition en 2022 et au guichet infra-annuel : pour faire face à la crise des prix de l’énergie, le gouvernement avait décidé d’augmenter la quantité d’ARENH cédée par EDF de 20 TWh pour 2022. Cette augmentation était temporaire et le modèle d’accord cadre peut désormais en être allégé ;
  • Clarification de la procédure de contestation des montants dus : la CRE propose d’intervenir aux côtés de la caisse des dépôts et consignations en cas de contestation des montants dus au titre de l’accord cadre ;
  • Précisions relatives à la mise en œuvre des cas de cessation de livraisons : la CRE propose donc plusieurs modifications du modèle d’accord cadre permettant d’indiquer la procédure s’appliquant en cas de cessation des livraisons, en matière de notification, de facturation et de paiement des sommes dues ;
  • Définition de la procédure de cession de l’accord-cadre en cours de période de livraison : la possibilité de cession de l’accord-cadre en cours de livraison a été introduite par l’arrêté du 25 mars 2022 portant modification de l’arrêté du 28 avril 2011. Toutefois, la procédure de cette cession n’a pas été précisée.

II. Sur la consultation du Gouvernement du 21 novembre 2023

L’ARENH prendra fin le 31 décembre 2025. Le mécanisme qui s’y substituera commence à se profiler. Par une consultation du 21 novembre 2023, le gouvernement a présenté un outil qui pourrait prendre la suite de l’ARENH.

Le dispositif envisagé a pour objectif de sécuriser dans la durée l’accès des consommateurs français d’électricité à un prix de vente cohérent avec la structure de coûts du mix électrique. Il vise en outre à maintenir le bénéfice de l’électricité produite par le parc nucléaire français aux consommateurs.

Aux termes de la consultation présentée par le Gouvernement : « cette nouvelle organisation consiste à encourager le développement de contrats de moyen-long terme conclus entre acteurs sur les marchés de gros et négociés avec les consommateurs pour leur approvisionnement et adaptés à leurs besoins, accompagné d’un contrôle des prix protégeant les consommateurs en cas de situations de prix élevés. Pour sa composante administrée, ce mécanisme de contrôle des prix consisterait à (i) prélever une fraction des revenus du parc de production nucléaire au-delà d’un certain seuil, et (ii) redistribuer ce montant à l’ensemble des consommateurs ».

Le dispositif aurait donc une double facette :

  • Encourager les contrats moyen-long terme conclus entre les acteurs du marché (fournisseur, producteur…) et les consommateurs ;
  • Encadrer les prix de revente de l’électricité nucléaire produite par EDF.

La consultation du Gouvernement est marquée par une volonté de redonner à EDF sa liberté contractuelle en deçà du plafond actuel d’accès à l’ARENH tout en l’encadrant pour protéger les consommateurs d’électricité.

Concrètement, l’outil envisagé fonctionnerait par seuils de prix au-delà desquels EDF serait tenue de verser à l’Etat une fraction des revenus tirés de la production du parc nucléaire. Aux termes de la consultation publique, sont envisagés :

  • Un premier seuil d’activation qui correspond à l’addition du coût comptable complet de production du nucléaire existant et d’une composante représentative du coût du programme : nouveau nucléaire de France. Ce seuil est évalué à l’heure actuelle à 78 euros par MWh et son taux de prélèvement serait fixé à 50 % ;
  • Un deuxième seuil, fixé à 110 euros par MWh, de nature à protéger les consommateurs contre les épisodes de prix élevés sur les marchés. Son taux de prélèvement serait fixé à 90 %.

Les montants récupérés par l’Etat seraient par suite reversés aux consommateurs sous forme d’un versement apparaissant sur la facture en déduction du prix de l’électricité conclu avec le fournisseur.

En outre, le Gouvernement précise que ce nouveau dispositif n’aurait pas d’impact sur les tarifs réglementés de vente, qui devront nécessairement être modifiés pour le prendre en compte.

Modification du cadre réglementaire applicable aux garanties d’origine : précisions sur la préemption des garanties d’origine par les collectivités

Le décret n° 2023-1048 en date du 16 novembre 2023 traduit dans la partie réglementaire du Code de l’énergie les modifications de la partie législative dudit Code introduites par l’ordonnance n° 2021-236 du 3 mars 2021. Cette ordonnance visait à transposer en droit interne certaines dispositions des directives n° 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et n° 2019/944 du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité.

Le décret déplace les articles relatifs aux garanties d’origine du chapitre relatif à la production d’électricité d’origine renouvelable au chapitre relatif aux dispositions générales relatives à la production d’électricité. Mais surtout, le décret apporte plusieurs modifications au système des garanties d’origine en droit interne en venant :

  • Étendre la possibilité d’émettre des garanties d’origine électriques à l’ensemble des sources d’énergie primaire et notamment à l’énergie nucléaire ;
  • Permettre l’organisation d’enchères à terme de garanties d’origine issues d’installations bénéficiant d’un soutien public ;
  • Mettre en œuvre l’achat préférentiel ouvert aux producteurs bénéficiant de mécanismes de soutien public ;
  • Préciser la faculté de certaines collectivités territoriales (communes, groupements de communes ou métropoles) de préempter gratuitement les garanties d’origine des installations situées sur leur territoire.

En premier lieu, le bénéfice des garanties d’origine électriques a été étendu à l’ensemble des sources d’énergie primaires par l’ordonnance n° 2021-236 du 3 mars 2021. Cette ordonnance a notamment modifié l’article L. 314-14 du Code de l’énergie, devenu L. 311-20 du même Code. L’article 2 du décret présentement commenté adapte la partie réglementaire du Code de l’énergie pour que l’ensemble des sources d’énergie, et non plus exclusivement les sources renouvelables, puissent donner lieu à délivrance de garanties d’origine.

L’article précité modifie notamment, pour l’application des articles L. 311-20 et suivants du Code de l’énergie, l’article R. 311-48 du Code de l’énergie qui dispose désormais que : « l’électricité produite par n’importe quelle source d’énergie primaire ou par cogénération par des installations de production d’électricité régulièrement déclarées ou autorisées peut donner lieu à l’émission de garanties d’origine ».

Les articles suivants du Code de l’énergie sont également modifiés afin notamment d’étendre les missions du gestionnaire du registre des garanties d’origine aux sources d’énergie primaire non renouvelable, et de modifier le contenu des demandes d’émission de garantie d’origine pour y indiquer la source d’énergie utilisée pour produire l’électricité. A cet égard, ainsi que le relevait, en le critiquant, la Commission de régulation de l’énergie dans sa délibération n° 2023-294 du 27 septembre 2023 portant avis sur le décret ici commenté, l’objet de cette extension des garanties d’origine aux autres sources d’énergie est essentiellement d’étendre le dispositif à l’électricité produite à partir d’énergie nucléaire.

En deuxième lieu, le décret n° 2023-1048 du 16 novembre 2023 introduit la possibilité des enchères à terme pour les garanties émises pour des installations bénéficiant d’un soutien public. La mise en enchères des garanties d’origine émises au titre de l’électricité produite par les installations bénéficiant d’un contrat d’obligation d’achat ou de complément de rémunération était déjà permise au Ministre en charge de l’énergie. Cette mise aux enchères avait lieu postérieurement à l’émission des garanties d’origine. Le décret ici commenté permet désormais la tenue d’enchères à terme.

Les garanties d’origine pourront dès lors être cédées par le biais d’enchères avant même leur émission. Le nouvel article R. 314-62, prévoyant notamment le cas des garanties d’origine mises aux enchères avant leur émission, dispose : « les garanties d’origine allouées à l’issue d’une mise aux enchères réalisée avant leur émission donnent lieu à la conclusion d’une promesse de vente entre l’organisme et le lauréat. Elles sont réputées vendues après avoir été émises et payées par leur acquéreur ». En outre, le décret apporte des précisions sur l’allotissement des garanties d’origine en codifiant un nouvel article R. 314-60.

En troisième lieu, le décret apporte les précisions réglementaires sur la faculté offerte aux exploitants d’installations de production d’énergie renouvelable d’acheter de manière préférentielle les garanties d’origine de leurs installations dans le cadre de leur mise aux enchères. Pour rappel, les exploitants d’installations de production bénéficiant d’un contrat d’obligation d’achat ou de complément de rémunération ne peuvent pas bénéficier des garanties d’origine émises au titre de leur production, sous peine de voir leur contrat résilié.

Toutefois, aux termes du cinquième alinéa de l’article L. 314-14 du Code de l’énergie, les exploitants ont la possibilité d’acquérir les garanties d’origine de leurs installations. Le nouvel article R. 314-67 vient préciser ce dispositif d’acquisition préférentielle.

Ainsi, lorsqu’ils souhaitent bénéficier de l’achat préférentiel des garanties d’origine issues de leurs installations, les exploitants informent le gestionnaire du registre des garanties d’origine de leur souhait de disposer de l’ensemble des garanties d’origine correspondant à une période de production donnée. Ils sont tenus de transmettre à l’organisme chargé de la mise aux enchères leur demande d’achat préférentiel en amont de l’enchère :

  • au minimum deux mois avant l’ouverture des enchères organisées pour la vente de garanties d’origine réalisée après leur production en l’absence d’enchères à terme ;
  • au maximum un mois avant l’ouverture des enchères à terme dans le cas des enchères à terme, en précisant la durée sur laquelle un tel volume est souhaité.

Ils s’engagent à acquérir ces garanties d’origine selon les conditions générales de la mise aux enchères mentionnées au R. 314-57 qui peuvent prévoir notamment une durée minimale et maximale sur laquelle l’exploitant s’engage à acheter les garanties d’origine de son installation, le niveau de la prime qu’il doit payer pour chacune des GO achetées, les modalités de rupture de l’engagement de l’exploitant, une limitation du volume de garanties d’origine pouvant faire l’objet d’un tel achat préférentiel.

En quatrième et dernier lieu, le décret apporte les précisions réglementaires sur la préemption des garanties d’origine par les collectivités. Cette faculté a été ouverte par l’ordonnance n° 2021-236 du 3 mars 2021 précitée. Le troisième alinéa de l’article L. 314-14 du Code de l’énergie dispose désormais :

« à la demande de la commune, du groupement de communes ou de la métropole sur le territoire desquels est implantée une installation mentionnée au premier alinéa et afin d’attester de l’origine locale et renouvelable de leur propre consommation d’électricité, ladite commune, ledit groupement de communes ou ladite métropole peuvent bénéficier à titre gratuit de tout ou partie des garanties d’origine de ladite installation, selon des modalités prévues par décret, en vue de leur utilisation immédiate. Les garanties d’origine dont bénéficient ainsi ladite commune, ledit groupement de communes ou ladite métropole ne peuvent être vendues ».

Aux termes de cet article, les communes ou leur groupement peuvent bénéficier des garanties d’origine émises par les installations bénéficiant d’un contrat d’obligation d’achat ou de complément de rémunération situées sur leur territoire, pour attester de l’origine renouvelable de l’électricité qu’elles consomment. Les modalités d’application du troisième alinéa de l’article L. 314-14 précité sont désormais connu. On retiendra notamment que :

  • la commune ou le groupement doit détenir un compte sur le registre des garanties d’origine ;
  • la demande de préemption des garanties d’origine doit être adressée au gestionnaire du registre au moins cinq jours avant leur mise aux enchères ;
  • la demande doit indiquer le volume de garanties souhaité et la période concernée : « dans la limite du volume de la production des installations implantées sur leur territoire et de leur propre consommation d’électricité sur la même période» ;
  • la consommation d’électricité de la collectivité est définie comme : « la consommation des équipements faisant l’objet d’une facturation directe» à ladite collectivité.

Il convient de souligner que l’ensemble des règles permettant de mettre en œuvre cette préemption n’est pas encore connu. En effet, aux termes de l’article R. 314-66 précité, les conditions générales de la mise aux enchères, arrêtées par le Ministre de l’énergie, apporteront des précisions portant notamment sur :

« 1° Des frais d’accès à la plateforme ainsi que des frais de gestion, à la charge de la commune, du groupement de communes ou de la métropole ;

2° Une limitation du volume des garanties d’origine dont peuvent bénéficier la commune, le groupement de communes ou la métropole, cette limitation pouvant être exprimée en pourcentage de la production mensuelle des installations implantées sur leur territoire ;

3° Les conditions dans lesquelles sont allouées les garanties d’origine dont l’acquisition est souhaitée à la fois par la commune, le groupement de communes ou la métropole ».

Gageons que le Ministre laissera les collectivités s’emparer de ce mécanisme sans trop le limiter.

Adoption de la directive n° 2023/2413 du 18 octobre 2023 dite « RED III » : synthèse des modifications apportées au droit européen de l’énergie

La directive (UE) 2023/2413 du Parlement européen et du Conseil en date du 18 octobre 2023, dite directive « Red III » a été adoptée par le Parlement européen.

S’inscrivant dans le cadre du plan RePower EU et de la trajectoire Ajustement à l’objectif 55 du pacte vert pour l’Europe énoncé dans la communication de la Commission du 11 décembre 2019, la directive commentée vient modifier en profondeur le droit européen de l’énergie.

La directive 2023/2413 ici commentée modifie trois textes :

  • Directive 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables ;
  • Règlement 2018/1999 du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l’union de l’énergie et de l’action pour le climat ;
  • Directive 98/70/CE du 13 octobre 1998 concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel.

L’essentiel des modifications concerne la directive 2018/2001 et n’est pas sans rappeler la récente loi n°2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergie renouvelable, dite loi « APER ».

En premier lieu, la directive 2023/2413 insère de nouvelles définitions dans la directive 2018/2001. Sont ainsi notamment consacrées les définitions suivantes :

  • « zone d’accélération des énergies renouvelables» : un lieu ou une zone spécifique, terrestre, maritime ou d’eaux intérieures, qu’un État membre a désigné comme étant particulièrement adapté pour accueillir des installations d’énergie renouvelable à partir de sources renouvelables, autres que des installations de combustion de biomasse ;
  • « technologie innovante en matière d’énergie renouvelable» : une technologie de production d’énergie renouvelable qui améliore au moins un aspect d’une technologie de pointe comparable en matière d’énergie renouvelable, ou qui rend exploitable une technologie en matière d’énergie renouvelable qui n’est pas entièrement commercialisée ou qui comporte un degré de risque clair ;
  • « accord d’achat d’énergie renouvelable» : un contrat par lequel une personne physique ou morale convient d’acheter directement à un producteur de l’énergie renouvelable, qui englobe, sans s’y limiter, les accords d’achat d’électricité renouvelable, les accords d’achat d’électricité renouvelable et les accords d’achat de chauffage et de refroidissement renouvelables ;
  • « combustibles renouvelables » : les biocarburants, les bioliquides, les combustibles ou carburants issus de la biomasse et les carburants renouvelables d’origine non biologique.

De nombreuses autres définitions sont intégrées, par référence à d’autres textes européens : point de recharge (règlement 2023/1804), marché de l’électricité (directive 2019/944) …

En deuxième lieu, la directive 2023/2413 vient rehausser les objectifs contraignants d’augmentation de la part d’énergie renouvelable dans le mix énergétique européen. Ainsi, l’article 3 de la directive 2018/2001 est modifié de sorte que la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie dans l’Union atteigne nécessairement 42,5 % et potentiellement 45 % d’ici 2030 (l’objectif était jusqu’à lors fixé à 32 %).

En outre, la directive 2023/2413 modifie le règlement 2018/1999 du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l’union de l’énergie et de l’action pour le climat en précisant les objectifs de la feuille de route de cet objectif d’augmentation de la part des énergies renouvelables. Aux termes de l’article 2 de la directive commentée :

« sur la base d’une trajectoire indicative de l’Union qui part de 20 % en 2020, atteint des points de référence d’au moins 18 % en 2022, 43 % en 2025 et 65 % en 2027 de l’augmentation totale de la part d’énergie provenant de sources renouvelables entre l’objectif spécifique de l’Union en matière d’énergies renouvelables pour 2020 et l’objectif spécifique de l’Union en matière d’énergies renouvelables pour 2030, et atteint l’objectif spécifique contraignant de l’Union pour les énergies renouvelables pour 2030 fixé à l’article 3, paragraphe 1, de la directive (UE) 2018/2001 ».

En troisième lieu, la directive 2018/2001 est complétée de deux nouveaux articles relatifs aux zones d’accélération des énergies renouvelables.

D’une part, l’article 15 ter impose aux Etats membres de réaliser une « cartographie coordonnée en vue du déploiement de l’énergie renouvelable sur leur territoire, afin de recenser le potentiel national et les zones terrestre, souterraine, maritime ou en eaux intérieures disponibles qui sont nécessaires pour l’établissement d’installations d’énergie renouvelable et leurs infrastructures connexes » pour atteindre l’objectif de 42,5 % d’énergie produite à partir de source renouvelable dans la consommation finale brute d’énergie de l’Union.

D’autre part, l’article 15 quater impose aux Etats membres de désigner à partir de cette cartographie des zones d’accélération des énergies renouvelables pour un ou plusieurs types de sources d’énergie. Ces zones devront être identifiées au plus tard le 21 février 2026.

En outre, les Etat membres sont encouragés à adopter des plans identifiant les zones d’infrastructures spécifiques destinées au développement de projets de réseau ou de stockage nécessaires à l’intégration de l’énergie renouvelable dans le système électrique (nouvel article 15 sexies de la directive 2018/2001).

En quatrième lieu, la directive 2023/2413 s’efforce de simplifier les procédures d’obtention de permis nécessaires à l’implantation des installations de production d’énergie renouvelable, notamment dans les zones d’accélération.

Ainsi, aux termes de l’article 16 modifié de la directive 2018/2001, les Etats membres devront :

  • Respecter des délais réduits de traitement des demandes ;
  • Mettre en place des points de contact facilitant les démarches des demandeurs des permis ;
  • Rendre facilement accessibles les informations liées à la délivrance des permis ;
  • Veiller à ce que les recours contre les permis s’exercent le plus rapidement possible.

La directive 2023/2413 insère un nouvel article 16 bis dans la directive 2018/2001 concernant spécifiquement les permis délivrés au sein des zones d’accélération des énergies renouvelables. Ces permis devront notamment être délivrés dans un délai maximum de douze mois et pourront être exemptés, sous conditions, d’évaluation spécifique des incidences sur l’environnement et d’évaluation de leurs incidences sur les sites Natura 2000 (point 3 de l’article 16 bis précité).

En cinquième lieu, la directive consacre la présomption d’intérêt public majeur des projets de production d’énergie renouvelable récemment consacrée en droit interne (voir notre brève dans la présente Lettre d’actualité sur ce sujet). En effet, la nouvel article 16 septies dispose : « les États membres veillent à ce que, dans le cadre de la procédure d’octroi de permis, la planification, la construction et l’exploitation d’installations d’énergie renouvelable, le raccordement de ces installations au réseau, le réseau connexe proprement dit et les actifs de stockage soient présumés relever de l’intérêt public majeur et de l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques lors de la mise en balance des intérêts juridiques dans les cas individuels ».

En sixième lieu, la directive 2023/2413 intègre dans la directive 2018/2001 de nouvelles dispositions relatives à la décarbonation du secteur du transport, modifie en conséquence la directive 98/70/CE du 13 octobre 1998 concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel et abroge la directive 2015/652 du Conseil du 20 avril 2015.

Il convient de souligner pour conclure que les nouvelles dispositions des directives modifiées devront être transposées par les Etats membres afin d’être opposables. La date limite de transposition est fixée au 21 mai 2025. Reste que de nombreuses dispositions trouvent déjà un écho en droit interne du fait de l’adoption de la loi APER.

Le CoRDiS rappelle les obligations d’Enedis en matière de qualité de l’alimentation électrique d’une installation de consommation

Le Comité de règlement des différents et des sanctions (CoRDiS) de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a publié une décision de sanction le 24 octobre 2023 à l’encontre d’Enedis relative à la qualité de l’alimentation électrique d’une installation de consommation.

En l’espèce, des variations de tensions sur le réseau électrique avait été constatés par une cliente, provoquant des dysfonctionnements de ses appareils électriques. Le CoRDiS a à cette occasion rappelé qu’il résulte des dispositions des articles L. 121-1, L. 322-12 alinéas 1 et 2 et D. 322-2 du Code de l’énergie et de l’article 4 de l’arrêté du 24 décembre 2007 pris en application du décret n°2007-1826 du 24 décembre 2007 relatif aux niveaux de qualité et aux prescriptions techniques en matière de qualité des réseaux publics de distribution et de transport d’électricité, « que le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité est tenu de mettre en œuvre tous les moyens techniques à sa disposition lui permettant d’assurer une desserte en électricité de qualité régulière, définie et compatible avec les utilisations usuelles de l’énergie électrique ».

Ainsi, pour se conformer à cette obligation, la société Enedis doit « s’assurer, d’une part, que la tension normale de distribution basse-tension (BT), moyennée sur 10 minutes, correspond à une plage de plus ou moins 10 % autour des valeurs nominales, et d’autre part, que la valeur maximale admissible du gradient de chute de tension soit inférieure à 2 % ».

Le CoRDiS a alors constaté les manquements avérés et persistants de la société Enedis aux obligations susvisées alors que les remèdes aux dysfonctionnements constatés sont connus.

Il a ainsi enjoint sous astreinte à Enedis d’entreprendre les travaux nécessaires à l’accomplissement de ses obligations dans un délai d’une semaine suivant la notification de sa décision.

Marché en détail de l’électricité et du gaz naturel : la Commission de Régulation de l’Energie publie son rapport sur les années 2020 à 2022 et formule des propositions pour renforcer la protection des consommateurs

Les propositions de la CRE pour renforcer la protection des consommateurs d’énergie et améliorer le fonctionnement du marché de détail

1. La Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a publié son rapport sur le fonctionnement des marchés de détail français de l’électricité et du gaz naturel entre 2020 et 2022.

Malgré le contexte de crise des prix de l’énergie sur cette période, le rapport indique d’abord que l’objectif premier de protection des consommateurs contre la hausse des prix de gros de l’énergie a été globalement atteint.

Notamment, la souscription par de nombreux consommateurs de gaz naturel et d’électricité d’offre à prix fixe leur a assuré une protection plus importante durant la crise. Les différents dispositifs mis en place pour faire face à la hausse des prix de l’énergie ont en outre, selon la CRE, fait leurs preuves dès lors que les consommateurs français ont bénéficié de prix parmi les moins élevés en Europe.

Enfin, les effets des hausses de prix ont pu être amortis en partie grâce au dispositif de l’Accès Régulé à l’Energie Nucléaire Historique (ARENH), et notamment grâce à la mise à disposition de 20 TWh d’ARENH supplémentaire.

Passé ce constat positif, la CRE relève néanmoins qu’il existe des marges d’amélioration du fonctionnement du marché de détail. Celles-ci passeraient notamment par un meilleur encadrement des comportements abusifs dans le recours et le bénéfice à l’ARENH, l’introduction d’obligations prudentielles afin que les fournisseurs s’approvisionnent sur le marché en cohérence avec leurs engagements de prix auprès de leurs consommateurs, et par la prise de mesures permettant de garantir à tous consommateurs un choix éclairé.

Sur ce dernier point, la CRE indique plaider pour « un maintien pendant au moins un an des caractéristiques principales des offres souscrites par les consommateurs et pour une information claire et transparente en cas de changement de conditions tarifaires ».

Au-delà de la protection des consommateurs, le Régulateur observe que le marché de détail a été fortement impacté par la crise de l’énergie. Il indique en effet que les mesures de protections ont réduit la diversité des offres sur le marché et, plus globalement, que le marché s’est concentré autour des trois principaux fournisseurs, EDF, Engie et Total Energies, au détriment des fournisseurs alternatifs.

S’agissant des perspectives de sortie de crise du marché de détail, la CRE note notamment que la fin des Tarifs Réglementés de Vente de Gaz Naturel (TRVG) s’est déroulée sans difficulté notable et que, de façon encourageante, depuis début 2023, les prix de gros de l’électricité sur le marché sont à la baisse.

2. La CRE a par ailleurs publié les propositions formulées lors de la réunion qui s’est tenue le 8 septembre 2023 sous l’égide du Ministre de la transition énergétique avec l’ensemble des fournisseurs d’énergie, le Médiateur national de l’énergie, les associations de consommateurs, pour renforcer la protection des consommateurs d’énergie et améliorer le fonctionnement du marché de détail. Ces propositions sont intégrées aux réflexions sur la future loi de programmation énergétique.

D’abord, le Régulateur propose de mieux encadrer les informations et conditions contractuelles proposées par les fournisseurs aux consommateurs afin d’améliorer la transparence.

Il s’agirait notamment de mettre en place une catégorisation des formules de fixation des prix s’appliquant aux contrats d’énergie afin que les clients aient pleinement conscience de leur impact sur les contrats. Il est proposé de créer trois catégories : les offres à prix fixe, les offres à prix indexés sur une référence publique (telle que les tarifs réglementés de vente), et les autres offres.

En outre, la CRE considère que les évolutions contractuelles et les renouvellements automatiques doivent être mieux expliqués par le fournisseur d’énergie aux clients dès lors qu’ils peuvent avoir un impact important sur le prix final payé. Il est également proposé d’interdire expressément les offres de fourniture d’électricité et de gaz dont le prix n’est pas connu au moment de la consommation.

Ensuite, la CRE rappelle la nécessité de prévoir un cadre de régulation prudentielle sur le marché de la fourniture d’électricité et du gaz naturel pour éviter que certains fournisseurs adoptent des comportements risqués répercutés sur les consommateurs. Ce cadre interviendrait en sus d’une révision générale du cadre d’attribution et de contrôle des autorisations de fourniture d’énergie.

Enfin, la CRE, qui a vu ses missions de surveillance et de contrôle des fournisseurs renforcées pour l’année 2023, a identifié les mesures permettant d’accélérer les délais de traitement des dossiers de sanction devant le CoRDiS et plaide pour l’introduction d’une procédure de transaction.