La compétence GeMAPI intègre la gestion de tous les ouvrages naturels ou artificiels de défense contre la mer

Dans une réponse ministérielle du 1er septembre 2016, la Ministre chargée de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer a rattaché les opérations de gestion intégrée du trait de côte, qui contribuent à la prévention de l’érosion des côtes par des techniques dites soit « souples », soit « dures », à la compétence gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GeMAPI).

A titre de rappel, cette compétence est composée des missions visées aux 1°, 2°, 5° et 8° du I de ce dernier article, à savoir l’aménagement d’un bassin ou d’une fraction de bassin hydrographique, l’entretien et l’aménagement d’un cours d’eau, canal, lac ou plan d’eau, y compris les accès à ce cours d’eau, à ce canal, à ce lac ou à ce plan d’eau, la défense contre les inondations et contre la mer, la protection et la restauration des sites, des écosystèmes aquatiques et des zones humides ainsi que des formations boisées riveraines.

Plus précisément, dans la réponse ministérielle examinée, il a été considéré que les opérations de gestion intégrée du trait de côte relèvent du volet « défense contre la mer », énoncé par le 5° du I de l’article L. 211-7 du Code de l’environnement. La Ministre a également estimé que ces opérations peuvent porter sur les actions en lien avec la gestion des zones humides et milieux aquatiques littoraux, qui relèvent quant à elles de l’item 8° du I de l’article L. 211-7 du Code de l’environnement.

La réponse ministérielle permet de trancher un débat au sein des services de l’Etat puisque plusieurs documents élaborés par ces derniers précisaient que la lutte contre l’érosion du littoral et le recul du trait de côte ne relevaient pas des missions de la GeMAPI, ce qui a fait l’objet de vives critiques par les professionnels de la gestion de l’eau et la prévention des inondations.

 

 

Le concubin notoire du locataire défunt n’a pas à justifier de la régularité et de la permanence de son séjour en France pour obtenir le transfert de bail HLM

Au décès d’une locataire d’un bail HLM, son concubin notoire a invoqué sa qualité pour obtenir le transfert de bail de l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989 à son profit.

Ce dernier ne justifiant pas la régularité de son séjour en France, pré requis pour l’attribution d’un logement social en vertu de l’article R. 441-1 du Code de la construction et de l’habitation (CCH), il a été assigné par le bailleur social en expulsion et paiement d’une indemnité d’occupation.

Saisie du litige, la Cour d’appel a fait droit à la demande du concubin en autorisant le transfert de bail sur le fondement de l’article 40-I de la loi du 6 juillet 1989 qui prévoit que les dispositions de l’article R. 441-1 du CCH ne sont pas applicables au concubin notoire qui remplit les conditions de l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989.

La Cour de cassation a confirmé la décision des Juges du fond en considérant que :

« Les conditions d’attribution d’un logement définies par l’article R. 441-1 du Code de la construction et de l’habitation, notamment la condition tenant au fait que ces logements sont attribués aux personnes physiques séjournant régulièrement sur le territoire français dont les conditions de permanence définies par arrêté, ne sont pas applicables au concubin notoire qui remplit les conditions de transfert de bail prévues par l’article 14 de la loi du 6 juillet 198 ».

Ainsi, le bénéfice du transfert d’un bail HLM n’est pas subordonné au respect des conditions d’attribution posées par l’article R. 441-1 du Code de la construction et de l’habitation.

L’arrêté par lequel le Préfet adopte le schéma départemental de coopération intercommunale est susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir

Par une décision en date du 21 octobre 2016, le Conseil d’Etat a implicitement jugé que l’arrêté par lequel le Préfet adopte le schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI) est susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, dans la mesure où il a invoqué, pour rejeter un moyen tiré de son illégalité, l’expiration du délai de recours contentieux à l’encontre de ce schéma.

On rappellera que, à ce jour, des arrêts de Cours administratives d’appel avaient rejeté les recours contre le SDCI au motif tiré de son absence de caractère décisoire (CAA Lyon, 24 septembre 2013, Commune de Saint-Martin-de-Belleville, n° 12LY02275 ; CAA Nancy, 7 novembre 2013, Communauté de communes du Val-de-Meurthe, n° 12NC01926), en mettant provisoirement un terme à un débat doctrinal sur la question.

La circonstance que le Conseil d’Etat se fonde sur l’expiration du délai de recours à l’encontre de l’arrêté portant SDCI rendrait donc possible, pour l’avenir, la contestation de ce type d’arrêtés. En revanche, s’agissant des arrêtés déjà édictés et devenus définitifs, leur exception d’illégalité ne pourra pas même être soulevée à l’occasion de la contestation d’une procédure d’application du schéma mise en œuvre par le Préfet, le Conseil d’Etat ayant par ailleurs jugé que « les actes relatifs à l’institution des structures des organismes de coopération entre collectivités territoriales et à la répartition des compétences entre ces organismes et les collectivités qui en sont membres ne revêtent pas le caractère d’actes réglementaires » (v. également en ce sens : CE, 1er juillet 2016, Commune d’Emerainville, n° 363047).

Non-conformité à la Constitution de la procédure de rattachement d’une commune nouvelle à un établissement public de coopération intercommunale

Saisi par le Conseil d’Etat (CE, 20 juillet 2016, Communauté de communes des sources du lac d’Annecy et autre, n° 399801 et 400367) d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur le II de l’article L. 2113-5 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe), le Conseil constitutionnel a déclaré ces dispositions non conformes à la Constitution dans une décision du 21 octobre dernier.

En application du texte examiné, lorsqu’une commune nouvelle est créée à partir de communes appartenant à plusieurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, son conseil municipal choisit l’établissement public dont elle souhaite être membre. Si le Préfet n’est pas d’accord, il saisit la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) d’un autre projet de rattachement. Cette commission peut, à la majorité des deux tiers de ses membres, faire prévaloir le souhait de rattachement de la commune nouvelle. À défaut, la commune nouvelle rejoint l’EPCI à fiscalité propre retenu par le Préfet.

Il était notamment fait grief à ces dispositions de méconnaître le principe de libre administration des collectivités territoriales, garanti par l’article 72 de la Constitution.

S’agissant de ce principe, et en ce qui concerne plus particulièrement la limitation du choix des communes pour se rattacher ou non à un EPCI, le Conseil constitutionnel a déjà eu l’occasion d’affirmer que :

« Si le législateur peut, sur le fondement des articles 34 et 72 de la Constitution, assujettir les collectivités territoriales ou leurs groupements à des obligations ou les soumettre à des interdictions, c’est à la condition, notamment, que les unes et les autres répondent à des fins d’intérêt général. Ni le principe de la libre administration des collectivités territoriales, ni le principe selon lequel aucune collectivité territoriale ne peut exercer une tutelle sur une autre, ne font obstacle, en eux-mêmes, à ce que le législateur organise les conditions dans lesquelles les communes peuvent ou doivent exercer en commun certaines de leurs compétences dans le cadre de groupements » (Cons. const. 26 avril 2016, Commune de Puyravault, n° 2013-687 QPC ; Commune de Maing, n° 2013-304 QPC ; Commune de Couvrot, n° 2013-315 QPC ; 25 avril 2014, Commune de Thonon-les-Bains et autre, n° 2014-391 QPC).

Cette fois, le Conseil constitutionnel, après avoir reconnu que les règles posées par le II de l’article L. 2113-5 du CGCT, en autorisant le Préfet à imposer à la commune nouvelle un autre rattachement que celui qu’elle souhaite, affectaient bien la libre administration des communes concernées, a considéré que le législateur avait, ce faisant, poursuivi un but d’intérêt général en évitant que le choix de la commune nouvelle « puisse porter atteinte à la cohérence ou à la pertinence des périmètres intercommunaux existants » (cons. 8).

Le Conseil constitutionnel n’a toutefois pas limité son analyse à la commune nouvelle ni à l’EPCI à fiscalité propre de rattachement. Il a en effet observé que « le rattachement à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre a nécessairement des conséquences pour la commune nouvelle, pour les communes membres des établissements publics concernés et pour ces établissements publics eux-mêmes » (cons. 9).

Il a ensuite relevé que les dispositions en cause ne prévoyaient la consultation ni de l’organe délibérant de l’EPCI à fiscalité propre auquel le rattachement est envisagé, ni des organes délibérants des EPCI à fiscalité propre dont la commune nouvelle est susceptible de se retirer, ni des conseils municipaux des communes membres de ces EPCI à fiscalité propre.

En outre, le Conseil constitutionnel a indiqué que ni ces établissements publics, ni ces communes ne bénéficiaient, en cas de désaccord avec le projet de rattachement, d’une garantie similaire à celle de la commune nouvelle, qui peut voir son projet validé par un vote en ce sens à la majorité des deux tiers de la CDCI.

Ces deux lacunes ont conduit les Sages à conclure à la méconnaissance du principe de libre administration des collectivités territoriales, en incluant les EPCI à fiscalité propre.

Comme il peut le décider sur le fondement de l’article 62 de la Constitution, le Conseil a décidé de reporter l’abrogation des dispositions concernées au 31 mars 2017, dès lors qu’une abrogation immédiate aurait créé un vide juridique quant à la détermination de l’EPCI à fiscalité propre de rattachement de la commune nouvelle issue de la fusion de communes membres d’EPCI à fiscalité propre différents (cons. 12).

Il a également précisé que, dans le cadre des instances en cours ou à venir, en cas d’annulation, par le Juge administratif, de l’arrêté préfectoral prononçant le rattachement de la commune nouvelle à un EPCI à fiscalité propre, par exception à la règle qui interdit à une commune d’appartenir à plusieurs EPCI à fiscalité propre, la commune nouvelle reste membre des établissements publics auxquels appartenaient ses communes d’origine, en étant représentée par les anciens conseillers communautaires de ces dernières jusqu’à l’entrée en vigueur du nouvel arrêté préfectoral (cons. 13).

Le législateur n’a, au demeurant, pas tardé à prendre en compte la décision du Conseil constitutionnel puisque les sénateurs ont introduit, en première lecture, un amendement en ce sens à la proposition de loi tendant à faciliter la mise en place et le fonctionnement des intercommunalités.

Le dispositif proposé est assez complexe.

Le principe posé est le suivant : lorsque les communes délibèrent sur la création de la commune nouvelle, elles précisent l’EPCI à fiscalité propre auquel elles souhaitent que celle-ci soit rattachée.

Si une majorité se dégage en faveur d’un EPCI à fiscalité propre, le Préfet consulte ce dernier ainsi que les autres EPCI à fiscalité auxquels appartiennent les communes concernées et leurs communes membres.

En cas de désaccord, ceux-ci, comme le Préfet, pourront saisir la CDCI.

La CDCI pourra imposer son choix au Préfet à la majorité des deux tiers, sinon, c’est l’option du représentant de l’État qui l’emporte.

Si la CDCI, saisie par un EPCI ou une commune « tierce », propose un autre rattachement à la majorité des deux tiers, s’engage une nouvelle consultation des intéressés (EPCI de rattachement proposé par la CDCI, autres EPCI dont sont membres le communes constitutives de la commune nouvelle et conseils municipaux des autres communes membres de ces EPCI).

Si cette proposition ne recueille pas l’accord de l’EPCI de rattachement proposé et d’une majorité de ses communes membres, le rattachement se fait à l’EPCI envisagé à l’origine.

Cette procédure doit désormais être examinée par l’Assemblée nationale. Il conviendra dès lors d’en suivre l’éventuelle évolution.

Précisons enfin, pour être complet sur le sujet des communes nouvelles, qu’une loi n° 2016-1500 du 8 novembre 2016 tendant à permettre le maintien des communes associées, sous forme de communes déléguées, en cas de création d’une commune nouvelle a été publiée au JO du 9 novembre dernier.

L’exploitation des services de transport et la loi NOTRe

Si l’article 15 de la loi NOTRe du 7 août 2015 (1) entérine le transfert de la compétence d’organisation des services de transports routiers interurbains, réguliers et à la demande, et scolaires des départements aux régions, il reste silencieux sur les conséquences qu’un tel transfert entraîne nécessairement sur les modes d’exploitation de ces services et les structures mises en place pour ce faire.

En effet, si les autorités organisatrices de transports (AOT) décident des modalités d’exploitation des services de transports, elles ne sont que très rarement directement leurs exploitants.

C’est dans ces conditions qu’il faut distinguer la compétence organisationnelle des services de transports de la compétence strictement opérationnelle d’exploitation.

A cet égard, s’il ressort expressément de cet article 15 que la région sera la nouvelle AOT routier interurbain (2) et scolaire (3), on identifie bien difficilement comment, en pratique, la continuité du service public de transport pourra être assurée dans un certain nombre de situations.

Pourtant, le transfert de ces compétences des départements aux régions conduit à s’interroger sur le sort des structures d’exploitation de transport et sur l’obligation ou la faculté pour la région de perpétuer un mode d’exploitation précédemment mis en œuvre par le département.

I. Le traitement des différents modes et structures d’exploitation dans la loi NOTRe

Traditionnellement, les AOT ont recours soit à une entreprise privée avec laquelle elles contractualisent, soit à une régie pour l’organisation des services de transport public de personnes réguliers et à la demande (4).

Ainsi, l’AOT a in fine le choix entre l’externalisation de l’exploitation des services en recourant à une entreprise et la réalisation de prestations intégrées en créant une régie.

A cet égard, il peut s’agir d’une régie de transport ayant la forme d’un établissement public industriel et commercial (EPIC) disposant d’une personnalité morale et d’une autonomie financière (5) ou bien l’AOT peut se contenter de créer un budget annexe (6) et de désigner un directeur chargé de gérer le service (7).

Le recours à l’opérateur externe de transport octroie une marge de manœuvre importante à l’AOT qui peut décider de lancer des procédures de passation d’un marché public ou d’une délégation de service public et qui peut également choisir de créer une société d’économie mixte (SEML) (8) ou une société publique locale (SPL) (9).

Dans ces deux derniers cas, on peut considérer que l’externalisation de l’exploitation des transports n’est que relative, l’AOT étant actionnaire de l’opérateur.

I.1- L’exploitation externalisée des services de transport

A.Les contrats d’exploitation avec une entreprise à l’actionnariat exclusivement privé

En premier lieu, il est permis de s’interroger sur le sort des contrats publics, qu’il s’agisse de marchés publics ou de délégations de service public, conclus par les départements avec des opérateurs privés, à compter du 1er janvier 2017.

On pourrait faire application du VI de l’article 15 de la loi NOTRe qui prévoit une succession de la région dans les droits et les obligations du département à l’égard des tiers (10). Il semble en résulter qu’une région poursuit les engagements du département, qu’il s’agisse d’actes unilatéraux ou de contrats.

Toutefois, la différence de formulation entre le VI de l’article 15 qui évoque une succession et le XII de l’article 133 (11) de la loi NOTRe qui énonce la substitution de plein droit de la collectivité bénéficiaire du transfert de la compétence pourrait faire douter d’une telle interprétation.

Cependant, il est prévu, pour d’autres compétences, que la collectivité territoriale bénéficiaire de la compétence succède à la collectivité qui la transfère dans l’ensemble de ses droits et obligations à l’égard des tiers.

Tel est notamment le cas de l’article 21 de la loi NOTRe (12) qui organise le transfert des aérodromes appartenant à l’Etat vers la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales qui en fait la demande. Sur ce point, les débats parlementaires ont conduit à préciser que cette succession impose la reprise du concessionnaire en place sur l’aéroport.

Par conséquent, la succession de la région dans les droits et obligations du département à l’égard des tiers semble emporter la substitution dans les engagements contractuels, et notamment les marchés publics ou les délégations de service public conclus pour l’exploitation des services de transport par le département.

Cependant, en l’absence de doctrine ou de jurisprudence pour l’instant, les modalités opérationnelles d’une telle substitution restent floues.

B. Les sociétés d’économie mixte de transport

Si l’AOT a fait le choix de créer une SEML avec une ou plusieurs personnes privées, le sort de cette structure de transport à compter du 1er janvier 2017 interroge.

En effet, la loi NOTRe a prévu des dispositions permettant à un département actionnaire d’une SEML ou d’une SPL d’aménagement (SPLA) de conserver un tiers de ses actions quand bien même l’objet social de ces sociétés s’inscrit dans le cadre d’une compétence que la loi attribue à un autre niveau de collectivité territoriale (13).

Pour maintenir son actionnariat, le département doit céder au bénéficiaire de la compétence, « dans l’année qui suit l’entrée en vigueur de la présente loi », plus des deux tiers de ses actions. Bien entendu, si le département n’entend pas se maintenir, aucune disposition ne s’oppose à ce qu’il cède l’intégralité des actions détenues.

En outre, cette disposition prévoit expressément une cession à destination de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales bénéficiaire de la compétence que la loi NOTRe lui attribue et dans laquelle s’inscrit l’objet social de la SEML.

Ainsi, si l’on transpose ce mécanisme à une SEML de transport, le département devrait céder les deux tiers de ses actions à la région.

Partant, on pourrait considérer à la lecture de cette disposition que le sort des SEML de transport est aisément réglé. Il n’en est pourtant rien et l’application de cette disposition se heurte au calendrier distinct de transfert des compétences de transport retenu par la loi NOTRe et à des problématiques de droit des sociétés (ainsi qu’il le sera exposé dans la seconde partie).

C. Les sociétés publiques locales de transport

Enfin, le devenir d’une SPL de transport soulève également des interrogations.

Contrairement aux SEML et aux SPLA, la loi NOTRe n’a pas envisagé le cas de l’actionnariat d’un département dans une SPL.

Aussi se pose la question du maintien de l’actionnariat du département au sein d’une SPL dont l’objet social correspond à une compétence qu’il n’exerce plus. En effet, il convient d’indiquer que, à la différence des SEM, les SPL exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et nécessairement dans le cadre des compétences que ceux-ci détiennent (14).

De plus, les SPL ne peuvent être créées par des collectivités territoriales que « dans le cadre des compétences qui leur sont attribuées par la loi ».

A ce titre, une circulaire du 29 avril 2011 rappelle l’importance du lien devant exister entre les compétences des collectivités publiques et l’objet social de la société créée (15). 

Partant, le maintien d’une collectivité territoriale au sein d’une SPL dont l’objet social ne se rattache plus à ses compétences parait exclu.

Ainsi, il semble difficile de considérer que le département ne soit pas contraint de céder l’intégralité des actions d’une SPL de transport.

Pour autant, l’évolution de l’actionnariat d’une SPL doit être analysée en prenant en compte le calendrier distinct de transfert des compétences de transport et les difficultés relatives au droit des sociétés.

I.2- Les structures d’exploitation intégrée

S’agissant de l’internalisation de l’exploitation, aucune disposition de la loi NOTRe ne traite du devenir d’une régie autonome ou personnalisée gérant un service public se rattachant à une compétence transférée.

En effet, la loi NOTRe ne prévoit pas expressément le transfert des régies personnalisées de transport, qui sont des établissements publics, à la région simultanément ou consécutivement au transfert des compétences de transport.

Force est de constater qu’aucune disposition du CGCT ne prévoit davantage les modalités de transfert d’une régie personnalisée à une autre collectivité territoriale.

Ainsi, dans le silence des textes, il pourrait être considéré qu’un tel transfert de plein droit de la structure départementale de gestion du service public de transport n’est pas possible compte tenu de la spécificité d’une régie personnalisée.

***

C’est en ce sens que le sort des modes et structures d’exploitation de transport semble devoir être abordé au regard des dispositions éparpillées et floues de la loi NOTRe.

Au surplus, l’existence d’un calendrier différé de transfert des compétences de transport routier interurbain et scolaire, alors que l’exploitation de ces services est souvent conjuguée, provoque d’intenses difficultés de mise en œuvre.

II. Le devenir opérationnel des contrats et des structures d’exploitation à compter des transferts de compétence

A. Le sort des contrats d’exploitation

Si l’on a vu supra que la région devrait se substituer au département dans les contrats publics conclus avec des prestataires privés à l’issue d’une procédure de publicité et de mise en concurrence, une telle substitution parait impraticable lorsque le contrat a un caractère mixte.

En effet, dans certaines zones, un seul et unique contrat est conclu avec un prestataire portant sur les services de personnes avec certaines adaptations prévues pour assurer le transport scolaire.

On s’interroge alors sur les modalités de substitution de celle-ci au département dans un tel contrat qui doit aussi permettre au département d’assurer les services de transport scolaire jusqu’au 1er septembre 2017.

Hormis le recours à une délégation de compétences (16), les solutions dans ce cas semblent très limitées.

De la même manière, la loi NOTRe ne règle pas le cas où une procédure de passation d’un contrat public est en cours au jour du transfert. Concernant les modalités pratiques de la substitution de la région au département dans les termes du contrat, l’article 15 de la loi NOTRe est muet.

Par analogie avec le XII de l’article 133 de la loi NOTRe, on peut considérer que ces contrats seront exécutés dans les conditions antérieures jusqu’à leur échéance et que leur transfert n’emporte pas de droit à résiliation mais seulement une information du cocontractant.

Pour faciliter cette substitution, le transfert du contrat peut donner lieu à la conclusion d’un avenant pour traiter les conséquences pratiques liées au changement de pouvoir adjudicateur.

B. Les SEML

Il est très rare qu’une structure soit créée seulement pour l’exploitation d’un unique service de transport. La plupart du temps, les SEML de transport exploitent des services de transport urbains, routiers interurbains et scolaires.

Or, force est de constater que le VII de l’article 133 de la loi NOTRe n’évoque pas le cas dans lequel son objet social relèverait pour partie de compétences attribuées par la loi à d’autres collectivités et pour partie de compétences maintenues au niveau du département.

La situation va pourtant se présenter lorsque le département va perdre seulement une partie de ses compétences au 1er janvier 2017 et conserver l’autre jusqu’au 1er septembre 2017.

Toutefois, l’article 133 VII prévoit que l’obligation pour un département de céder au moins les deux tiers de ses parts ne concerne que l’hypothèse dans laquelle l’objet social de la SEM s’inscrit dans le cadre d’une compétence attribuée à un autre niveau de collectivité.  

De sorte qu’il devrait être considéré qu’un département peut conserver l’intégralité de ses actions jusqu’au 1er septembre 2017 si la SEML a pour objet social d’exploiter, outre des services de transport de personnes, des services de transport scolaire. En revanche, à compter du 1er septembre 2017, le département aura un an pour céder les deux tiers de ses actions.

Quoi qu’il en soit, plusieurs incertitudes demeurent quant à l’application de cet article. En effet, il est notamment permis de se demander la date exacte à laquelle les actions du département devront être cédées dans le délai d’un an suivant l’entrée en vigueur de la loi.

En effet, si l’on retient littéralement cette date, il s’agit du 8 août 2016, voire du 31 décembre 2016. Toutefois, une telle interprétation conduirait donc le département à céder les actions de la SEML de transport, à une collectivité qui n’est, pour sa part, pas encore compétente.

Ne doit-on pas considérer que le point de départ du délai d’un an est la date du transfert de la compétence concernée ?

C. Les SPL

De la même manière que pour les SEML, les interrogations portent principalement sur les SPL de transport qui ont un objet pluriel (17).

Ainsi, s’agissant d’une SPL de transport à l’objet multiple, on retient que :

  • si le département a confié à la SPL seulement l’exploitation des lignes de transport routier interurbain, il devra envisager la cession de ses actions pour que celle-ci soit effective le 1er janvier 2017 à minuit ;
  • en revanche, si le département a également confié à la SPL l’exploitation des lignes de transport scolaire, ou s’il lui a seulement attribué la gestion de ses lignes, il devra envisager la cession de ses actions pour que celle-ci soit effective le 1er septembre 2017 à minuit.

Enfin, la possibilité du maintien du département dans une SPL de transport au-delà du 1er janvier ou du 1er septembre 2017, pourrait être recherchée sous deux angles à la sécurité juridique plus ou moins aléatoire :

  • la délégation de compétences confiée au département ;
  • le maintien de la qualité d’AOT du département au titre de l’organisation du transport spécial des élèves handicapés.

D. Les Régies de transport

Si le transfert automatique des régies de transports n’a pas été envisagé, le transfert conventionnel de ses actifs semble possible quand bien même il pourrait se heurter à plusieurs difficultés.

Pourtant, l’analyse du Ministre de l’aménagement va en sens contraire en indiquant que le sort des régies personnalisées départementales de transport est réglé par le III de l’article 114 de la loi NOTRe (18) et qu’elles doivent donc être reprises par les régions si ces dernières exercent directement leurs compétences.

Une telle interprétation nous parait relever nécessairement d’une confusion entre l’organisation et l’exploitation des services de transport. En effet, une régie personnalisée de transport, qui est un EPIC, emploie des salariés de droit privé (19) dont le statut ne peut être assimilé à celui des agents de droit public affectés dans les services départementaux dédiés au transport strictement visés par l’article 114 III de la loi NOTRe.

Bien plus, une régie personnalisée de transport ne peut être assimilée à un service du département dès lors qu’elle exerce directement et en autonomie son pouvoir hiérarchique sur ses salariés.

Par conséquent, on ne peut affirmer que les régies personnalisées de transport feront l’objet d’un transfert automatique du département à la région (20), et encore moins sur le fondement avancé par le Ministre. En revanche, il est clair que l’on peut envisager le transfert du personnel de ces régies sur le fondement de l’article L. 1224-1 du Code du travail à l’exploitant des transports de la région, si le  transfert d’une entité économique est caractérisé.

En outre, le calendrier distinct de transfert de compétences est de nature à compliquer le transfert conventionnel d’une régie départementale vers la région. Le fonctionnement et la gouvernance de la régie pourraient alors s’en trouver bouleversés. Pour autant, aucune de ces problématiques ne trouve d’échos dans la loi NOTRe ou les différentes réponses ministérielles apportées, qui sont davantage sources de confusion que de clarification.

***

Ainsi, ni la loi NOTRe, ni les réponses incomplètes et discutables du ministre ne permettent à ce jour d’envisager sereinement la continuité des modes et des structures d’exploitation des services de transport du département vers la région.

Seul l’engagement rapide de discussions entre les protagonistes et l’étude juridique approfondie de différents scénarios en fonction du contexte local sont susceptibles d’assurer un transfert efficace des compétences de transport et une continuité des services indispensable pour les usagers.

Aloïs RAMEL et Alexandra ADERNO

(1) Article 15 – Loi n° 2015-991, 7 août 2015, portant nouvelle organisation territoriale de la République
(2) Au 1er janvier 2017
(3) Au 1er septembre 2017(4) Article L. 1221-3 du Code des transports
(5) Il s’agit d’une régie personnalisée
(6) Il s’agit alors d’une régie de la seule autonomie financière
(7) Article R. 1221-1 du Code des transports
(8) Article L. 1521-1 du Code général des collectivités territoriales
(9) Article L. 1531-1 du Code général des collectivités territoriales
(10) VI de l’article 15 de la loi NOTRe : « La région bénéficiaire du transfert de compétences prévu au présent article succède au département dans l’ensemble de ses droits et obligations à l’égard des tiers »
(11) XII de l’article 133 de la loi NOTRe : « Sauf dispositions contraires, pour tout transfert de compétence ou délégation de compétence prévu par le code général des collectivités territoriales, la collectivité territoriale ou l’établissement public est substitué de plein droit à l’Etat, à la collectivité ou à l’établissement public dans l’ensemble de ses droits et obligations, dans toutes ses délibérations et tous ses actes »
(12) Article 21 de la loi NOTRe : «  La collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert succède à l’Etat dans l’ensemble des droits et obligations à l’égard des tiers »
(13) VII de l’article 133 de la loi NOTRe : « Le département actionnaire d’une société d’économie mixte locale ou d’une société publique locale d’aménagement dont l’objet social s’inscrit dans le cadre d’une compétence que la loi attribue à un autre niveau de collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités territoriales peut continuer à participer au capital de cette société à condition qu’il cède, dans l’année qui suit l’entrée en vigueur de la présente loi, à la collectivité territoriale ou au groupement de collectivités territoriales bénéficiaire de cette compétence, plus des deux tiers des actions qu’il détenait antérieurement »
(14) 3ème alinéa de l’article L. 1531-1 du CGCT
(15) Circulaire N°COT/B/11/08052/C du 29 avril 2011 du Ministère de l’intérieur relative au régime juridique des SPL et des SPLA
(16) Article L. 1111-8 du CGCT
(17) Elles exploitent des services de transport routier interurbain et scolaire
(18) Note de Monsieur le Ministre de l’aménagement  du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, 7 juillet 2016 ; DGCL/DGTIM, Problématiques juridiques soulevées par le transfert aux régions des compétences départementales transports interurbains et transports scolaires, 31 août 2016 ; Réponse ministérielle, 29 septembre 2016, JOSénat, p. 4185
(19) A l’exception du directeur et du comptable public
(20) L’information des départements, Le devenir des régies départementales de transports, 12 septembre 2016, n° 1035

                             

 

Le Conseil d’Etat précise les conditions de régularité de l’installation d’une crèche de Noël dans un bâtiment ou un emplacement public

CE, 9 novembre 2016, Fédération départementale des libres penseurs de Seine-et-Marne, n° 395122

CE, 9 novembre 2016, Fédération de la libre pensée de Vendée, n° 395223

Par deux arrêts en date du 9 novembre 2016, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur l’installation temporaire de crèches de Noël par des personnes publiques, à la suite de la position divergente des Cours administratives d’appel de Nantes et de Paris, la première ayant jugé légale l’installation d’une telle crèche au sein de l’Hôtel de Département du Département de la Vendée, là où la seconde s’est prononcée, à l’inverse, dans le sens de l’illégalité de principe d’une telle installation, en l’occurrence au sein de l’Hôtel de ville de la Commune de Melun.

A ce titre, le Conseil d’Etat a tout d’abord rappelé la portée du principe de laïcité et plus précisément celle de l’article 28 de la loi de 1905, dont il a considéré qu’il avait pour effet d’interdire l’installation par des personnes publiques, de signes ou d’emblème manifestant la reconnaissance d’un culte ou marquant une préférence religieuse.

Cela étant précisé, il a toutefois souligné, dans un second temps, que l’installation temporaire de crèches de Noël était susceptible de revêtir des significations multiples, empêchant par conséquent, la consécration d’une règle absolue, applicable de façon uniforme à l’ensemble des installations procédant de personnes publiques.

Plus particulièrement, dans une formulation, non dénuée d’une certaine ambiguïté, laissant augurer, à notre sens, de nouvelles divergences d’application, il a affirmé, en ces termes, qu’eu « égard à cette pluralité de significations, l’installation d’une crèche de Noël, à titre temporaire, à l’initiative d’une personne publique, dans un emplacement public, n’est légalement possible que lorsqu’elle présente un caractère culturel, artistique ou festif, sans exprimer la reconnaissance d’un culte ou marquer une préférence religieuse. Pour porter cette dernière appréciation, il y a lieu de tenir compte non seulement du contexte, qui doit être dépourvu de tout élément de prosélytisme, des conditions particulières de cette installation, de l’existence ou de l’absence d’usages locaux, mais aussi du lieu de cette installation ».

En conséquence, il a jugé, en outre, que les conditions de légalité d’une telle installation devaient être distinguées selon qu’elle était effectuée au sein d’un bâtiment public siège d’une collectivité publique ou d’un service public, ou d’un autre emplacement public.

De sorte qu’il convient de retenir que, dans l’enceinte des bâtiments publics, sièges d’une collectivité publique ou d’un service public, l’installation d’une crèche de Noël est par principe interdite, sauf si certaines circonstances bien particulières permettent de lui reconnaître un caractère culturel, artistique ou festif.

A l’inverse, dans les autres emplacements publics, notamment sur la voie publique, le principe est celui de la légalité de telles installations dès lors qu’elles ne constituent pas un acte de prosélytisme ou de revendication d’une opinion religieuse.

Considérant enfin que les deux cours administratives d’appel n’ayant pas procédé à l’examen approfondi des circonstances attachées à l’installation des crèches sur lesquelles elles étaient amenées à se prononcer, le Conseil d’Etat a annulé les deux arrêts objets des pourvois en cassation et renvoyé ces affaires à un examen au fond.

Il n’est dès lors pas exclu que les deux cours administratives d’appel restent chacune sur leur position initiale, l’une considérant au terme d’un examen des circonstances approfondi, mais non moins pour partie subjectif, que cette installation revêtait un caractère festif, là où l’autre ne le percevrait pas !

L’application de cette jurisprudence, pour le moins subtile et laissant libre cours aux solutions casuistiques, s’annonce donc particulièrement intéressante et à suivre donc.

Adoption en lecture définitive de la loi dite « Sapin 2 »

L’Assemblée Nationale a adopté le 8 novembre, en dernière lecture, la version définitive du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (dite loi « Sapin 2 »).

Il en ressort que les députés ont finalement renoncé à intégrer à ce projet une mesure visant à rendre inéligible toute personne ayant été condamnée pour « atteinte à la probité », ainsi qu’ils en avaient pourtant décidé lors du passage du texte en seconde lecture.

Cependant, plusieurs autres mesures relevant de ce que l’on pourrait qualifier de « moralisation de la vie publique » intéressant directement les collectivités territoriales ont été maintenues, au terme de cette dernière lecture, et méritent à ce titre d’être signalées.

A cet effet, il sera tout d’abord indiqué la création d’une nouvelle autorité appelée « Agence française anticorruption » (AFA), dirigée et animée par des magistrats, qui aura pour mission, en lieu et place de l’actuel Service central de prévention de la corruption (SCPC) « d’aider les autorités compétentes et les personnes qui y sont confrontées à prévenir et à détecter les faits de corruption, de trafic d’influence, de concussion, de prise illégale d’intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme » (article 1er du projet de loi).

Selon des contours et des modalités que l’on peine toutefois à identifier, il appartiendra notamment à cette agence de contrôler, de sa propre initiative et/ou d’un certain nombre d’autres autorités parmi lesquelles la Haute autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP), la qualité et l’efficacité des procédures mises en œuvre au sein des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et sociétés d’économie mixte pour prévenir et détecter les faits de corruption, de trafic d’influence, de concussion, de prise illégale d’intérêts, de détournement de fonds publics et de favoritisme. 

Il sera également signalé, au sein de ce projet de loi, des dispositions tendant au renforcement de la protection des lanceurs d’alerte, lequel se concrétise, entre autres, par l’obligation faite aux régions, aux départements, aux communes de plus de 10.000 habitants ainsi qu’aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elles sont membres d’établir des procédures appropriées de recueil des signalements, selon des conditions qui devront être définies par un décret en conseil d’Etat.

Enfin, il sera rapporté la création d’un répertoire numérique des « représentants d’intérêt » sous le contrôle de la HATVP, sur lequel les lobbyistes seront tenus de s’inscrire, s’engageant, par voie de conséquence, au respect d’un certain nombre de règles de probité, pour rencontrer ceux qui participent à la décision publique et à la fabrication de la loi (soit de façon schématique ceux qui sont aujourd’hui soumis à une obligation de déclaration de patrimoine et d’intérêts).

Mise en cause de la convention collective et disparition d’une organisation professionnelle signataire à la suite d’une fusion

Par un arrêt en date du 13 octobre 2016, la Cour de cassation énonce que la mise en cause d’une convention ou d’un accord collectif de travail résulte de plein droit de l’événement qui l’a entraînée, en l’espèce, la disparition d’une organisation signataire, laquelle a fusionné avec un autre syndicat pour créer un syndicat commun.

Au cas particulier, un syndicat d’employeurs, signataire d’un accord collectif conclu en 1968, avait fusionné en 1973 avec un autre afin de former un nouveau groupement professionnel.

Une salariée d’une entreprise créée vingt ans plus tard et adhérente de ce groupement issu de la fusion entendait se prévaloir de certaines dispositions de l’accord collectif de 1968.

C’est dans ces conditions que la Cour de cassation a eu à s’interroger sur l’effet de la disparition d’une organisation professionnelle signataire par fusion avec une autre et création d’une organisation nouvelle sur la convention conclue antérieurement à cette fusion.

Pour la chambre sociale, la fusion des organisations a entraîné de manière automatique la mise en cause de l’accord de 1968 et la salariée d’une entreprise adhérente à l’organisation issue de la fusion ne peut donc réclamer l’application d’une disposition qui n’est plus en vigueur.

Fin du détachement et rémunération du fonctionnaire ne pouvant être immédiatement réintégré après la fin du détachement

Par un arrêt en date du 21 octobre 2016, le Conseil d’Etat a jugé que « l’administration d’origine, en tant qu’autorité investie du pouvoir de nomination, est seule compétente pour mettre fin au détachement avant le terme fixé. Saisie d’une demande en ce sens du fonctionnaire intéressé ou de l’administration ou de l’organisme d’accueil, elle est tenue d’y faire droit. Si elle ne peut le réintégrer immédiatement, le fonctionnaire continue à être rémunéré par l’administration ou l’organisme d’accueil jusqu’à ce qu’il soit réintégré, à la première vacance, si la demande de fin de détachement émanait de cet administration ou organisme d’accueil. Il cesse d’être rémunéré et est placé en position de disponibilité jusqu’à ce qu’intervienne sa réintégration à l’une des trois premières vacances dans son grade, si la demande émanait de lui ».

Au cas d’espèce,  M. B., agent de l’État, avait été placé en position de détachement sans limitation de durée auprès de la région Auvergne, pour occuper les fonctions d’ouvrier d’entretien et d’accueil dans un lycée. Ayant par la suite présenté une inaptitude physique aux fonctions de maintenance technique qui lui étaient confiées, lui-même et la région Auvergne ont demandé au recteur de l’académie de mettre fin à son détachement.

Devant le refus de l’administration d’origine, la Région avait saisi le Tribunal administratif d’une demande tendant à l’annulation de cette décision et à ce que l’État lui verse une indemnité en remboursement des rémunérations versées à M. B. à la suite de ce refus.

Pour rejeter cette requête, la Cour administrative d’appel de Lyon avait jugé qu’elle n’était pas recevable, dès lors que la région avait le pouvoir de décider elle-même de mettre fin au détachement de l’intéressé.

Le Conseil d’État estime que la Cour a commis une erreur de droit.

En effet, il résulte des dispositions de l’article 24 du décret du 16 septembre 1985 « que l’administration d’origine, en tant qu’autorité investie du pouvoir de nomination, est seule compétente pour mettre fin au détachement avant le terme fixé ». Cependant, « saisie d’une demande en ce sens du fonctionnaire intéressé ou de l’administration ou de l’organisme d’accueil, elle est tenue d’y faire droit ».

Par ailleurs et comme le prévoit le même article 24, les conséquences de la fin anticipée du détachement sont différentes selon la personne qui en a pris l’initiative. En effet, si l’administration d’origine ne peut réintégrer immédiatement son agent, celui-ci « continue à être rémunéré par l’administration ou l’organisme d’accueil jusqu’à ce qu’il soit réintégré, à la première vacance, si la demande de fin de détachement émanait de cette administration ou organisme d’accueil ». En revanche, « il cesse d’être rémunéré et est placé en position de disponibilité jusqu’à ce qu’intervienne sa réintégration à l’une des trois premières vacances dans son grade, si la demande émanait de lui ».

Il ressort donc de cette décision que :

– l’administration d’origine, en tant qu’autorité investie du pouvoir de nomination, est seule compétente pour mettre fin au détachement d’un fonctionnaire avant le terme fixé ;

– saisie d’une demande en ce sens du fonctionnaire intéressé ou de l’administration ou de l’organisme d’accueil, l’administration d’origine est tenue d’y faire droit ;

– si l’administration d’origine ne peut réintégrer immédiatement le fonctionnaire, il continue à être rémunéré par l’administration ou l’organisme d’accueil jusqu’à ce qu’il soit réintégré, à la première vacance, si la demande de fin de détachement émanait de cette administration ou cet organisme d’accueil. Il cesse d’être rémunéré et est placé en position de disponibilité jusqu’à ce qu’intervienne sa réintégration à l’une des trois premières vacances dans son grade, si la demande émanait de lui.

Une différence de traitement peut être justifiée sous certaines conditions

Par un arrêt en date du 14 septembre 2016, la Cour de cassation énonce « qu’une différence de traitement établie par engagement unilatéral ne peut être pratiquée entre des salariés relevant d’établissements différents et exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si elle repose sur des raisons objectives, dont le Juge doit contrôler la réalité et la pertinence ».

Au cas d’espèce, une société appliquait dans ses établissements situés en Ile-de-France des barèmes de rémunération supérieurs à ceux qu’elle appliquait au sein de son établissement de Douai.

Pour justifier la différence de traitement qu’il avait mise en place entre les salariés d’un établissement situé en Ile-de-France et ceux d’un établissement de Douai, l’employeur invoquait la disparité du coût de la vie entre ces deux régions.

C’est dans ces conditions que la Cour de cassation a eu à se demander si une telle différence de traitement portait atteinte au principe de l’égalité de traitement.

La Haute juridiction répond par la négative et rappelle qu’une différence de traitement peut se justifier « si elle repose sur des raisons objectives, dont le Juge doit contrôler la réalité et la pertinence ».

La TVA grevant les dépenses de fonctionnement d’un Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EPHAD) est intégralement déductible

Dans un arrêt en date du 5 octobre 2016 (CE, 5 octobre 2016, n° 390874) le Conseil d’Etat a estimé que les dépenses de fonctionnement qu’un Ehpad est tenu, en vertu du Code de l’action sociale et des familles, de répercuter dans le prix de ses opérations taxées sont intégralement détaxables, bien que ces dépenses soient également utilisées pour la réalisation de ses prestations de soins exonérées.

Le Conseil d’Etat, se fondant sur l’arrêt AB SKF de la CJUE du 29 octobre 2009 (aff. 29/08), a ainsi jugé que les dépenses d’administration générale et de fonctionnement ainsi que les dépenses d’entretien général des bâtiments qu’un Ehpad est tenu de répercuter dans le prix de ses seules opérations taxées (hébergement, restauration et assistance à la dépendance) ouvrent intégralement droit à déduction de la TVA les ayant grevées, bien que ces dépenses soient également utilisées pour la réalisation de ses prestations de soins exonérées.

La portée de cet arrêt au regard des principes généraux régissant la déductibilité de la TVA  et notamment de l’application du coefficient de déduction aux dépenses concourant à la fois à la réalisation d’opérations imposables et d’opérations exonérées de TVA reste à déterminer.

En effet, cet arrêt ne tranche pas expressément la question de la déduction de la TVA grevant des dépenses à usage mixte dont le coût est intégralement répercuté dans le prix des opérations taxées, il ne précise également pas si ce principe de déduction intégrale doit être réservé aux seuls cas où la répercussion des dépenses mixtes est prévue par la loi ou le règlement.

Parution du décret dit « Justice administrative de demain » portant modification du Code de justice administrative

Face à l’augmentation soutenue et continue du contentieux administratif dans un contexte budgétaire de plus en plus restreint, le Conseil d’Etat a confié à la Présidente de la Mission d’inspection des juridictions administratives la mission de proposer des pistes d’évolution et de modernisation du rôle et des pouvoirs du Juge administratif. Paru un an après la remise du rapport sur la justice administrative de demain en résultant et entrant en vigueur le 1er janvier 2017, le décret « JADE » a pour objet de retranscrire une partie de ses propositions. Selon les termes du Conseil d’Etat, il vise ainsi à « accélérer le traitement de certaines requêtes, à renforcer les conditions d’accès au juge, à dynamiser l’instruction et à adapter l’organisation et le fonctionnement des juridictions administratives à de nouveaux défis ».

S’agissant de l’ « accélération du traitement de certaines requêtes », le recours aux ordonnances est étendu en ce que (voir article 3 du décret modifiant l’article R. 222-1 du Code de justice administrative) :

  • le pouvoir de statuer par ordonnance, aujourd’hui réservé aux Présidents de juridiction et de formation de jugement, pourra être délégué aux premiers conseillers ayant au moins deux ans d’ancienneté ;
  • des ordonnances de séries pourront être prises sur les requêtes qui présentent à juger en droit des questions identiques à celles tranchées ensemble par un même arrêt devenu irrévocable de la Cour administrative d’appel dont il relève, et non plus seulement sur une de ses propres décisions ou sur un arrêt du Conseil d’Etat ;
  • les requêtes d’appel et les pourvois en cassation manifestement mal fondés pourront être rejetés par ordonnance dans tous les contentieux, et non plus seulement en matière d’obligations de quitter le territoire français.

S’agissant du « renforcement des conditions d’accès au Juge », le décret a pour objet d’accentuer l’obligation de liaison préalable du contentieux, en réduisant les cas de dispense d’avocat et en augmentant le montant des amendes pour recours abusifs.

En premier lieu, l’obligation de liaison préalable du contentieux est étendue dès lors que (voir article 10 du décret modifiant l’article R. 421-1 du Code de justice administrative) :

  • d’une part, la dispense de liaison du contentieux en matière de travaux publics est supprimée ; et
  • d’autre part, la latitude accordée par la jurisprudence en matière indemnitaire permettant au requérant de régulariser en cours d’instance l’absence de demande indemnitaire est également supprimée (CE, 11 avril 2008, Etablissement français du sang, n° 281374).

En deuxième lieu, les cas de dispense d’avocat sont rationnalisés en ce que la dispense est supprimée pour les litiges de travaux publics et d’occupation domaniale et, en appel, pour les contentieux d’excès de pouvoir de la fonction publique (voir article 11 du décret modifiant l’article R. 431-3 du Code de justice administrative et article 30 du décret modifiant l’article R. 811-7 du même Code).

En troisième lieu, le montant maximal de l’amende pour recours abusif est fixé à 10.000 euros, alors qu’il était, depuis 1990, fixé à 3.000 euros (voir article 24 du décret modifiant l’article R. 741-12 du Code de justice administrative).

S’agissant du « renforcement du dynamisme de l’instruction », les pouvoirs du Juge administratif sont considérablement renforcés :

  • à la suite de l’expérimentation menée depuis 2013 en matière d’urbanisme, il peut d’office fixer une date à partir de laquelle les moyens sont cristallisés(voir article 16 du décret modifiant l’article R. 611-7 du Code de justice administrative) ;
  • il peut sanctionner par un désistement d’office l’absence de production d’un mémoire récapitulatif dans le délai imparti, étant précisé que la possibilité de demander aux parties de récapituler leurs conclusions existait d’ores et déjà, sans être toutefois accompagnée de sanction (voir article 17 du décret modifiant l’article R. 611-8 du Code de justice administrative) ;
  • il peut inviter le requérant à confirmer expressément le maintien de ses conclusions, et à défaut de réponse dans le délai imparti prononcer un désistement d’office, lorsque l’état du dossier permet de s’interroger sur l’intérêt que la requête conserve pour son auteur (voir article 20 introduisant l’article R. 612-5 du code de justice administrative) ; et
  • à l’instar de ce que prévoit déjà l’article R. 611-7 du Code de justice administrative en cas d’information sur un moyen d’ordre public, il peut inviter une partie à produire des éléments ou pièces en vue de compléter l’instruction, postérieurement à la clôture de l’instruction et sans que cette demande ait pour effet de rouvrir l’instruction. De même, désormais, les mémoires produits après la clôture de l’instruction peuvent, en cas de réouverture de l’instruction, donner lieu à communication (voir article 21 du décret introduisant l’article R. 613-1-1 et du Code de justice administrative et article 22 du décret modifiant l’article R. 613-3 du même Code).

Le décret JADE semble ainsi répondre à l’accroissement du contentieux en cherchant, dans une mesure qui reste à déterminer, à décourager certaines requêtes en renforçant l’obligation de lier le contentieux, en élargissant le ministère d’avocat obligatoire ou encore en étendant les possibilités de rejet par ordonnance.   

 

 

Copropriétés en difficulté et lutte contre l’habitat indigne : le Ministère du logement entend renforcer la lutte contre l’habitat indigne dans le parc privé

C’est à l’occasion d’une communication en Conseil des Ministres que celui du logement et de l’habitat durable, Madame Emmanuelle COSSE, a exprimé le 26 octobre dernier sa volonté de renforcer la lutte contre l’habitat indigne affectant le parc privé.

Bien qu’ayant enregistré une diminution de l’ordre de 15 % ces dix dernières années, les logements du parc privé potentiellement dangereux pour la sécurité et la santé de leurs occupants représentent encore près d’un demi-million d’unités.

Pour accentuer la réduction du volume de ces logements sur les territoires, quatre nouvelles mesures ont été dévoilées par la Ministre :

1) Mise en place de nouvelles opérations de requalification de copropriété dégradées (ORCOD) au 1er semestre 2017 : ce dispositif, originellement conçu pour les copropriétés de très grandes tailles en très grande difficulté de Clichy-sous-Bois et de Grigny, permettra de favoriser le redressement des copropriétés en difficulté notamment par l’emploi de nouveaux outils à disposition de l’administrateur provisoire (cf. décret n° 2015-999 du 17 août 2015 relatif aux procédures judiciaires applicables aux copropriétés en difficulté) : procédure formalisée d’apurement des dettes et procédure d’administration renforcée.

Des copropriétés en difficulté des Yvelines, du Val d’Oise ou encore de Marseille sont d’ores et déjà pressenties pour faire l’objet de ces nouvelles ORCOD.

2) Nomination d’un Sous-préfet en charge de la lutte contre l’habitat indigne dans chaque département: chargé de piloter le pôle départemental de lutte contre l’habitat indigne, il aura non seulement pour mission de renforcer l’interaction entres les services de l’Etat et les acteurs locaux, mais également de veiller à ce que les actes délictueux soient poursuivis.

3) Elaboration d’une circulaire interministérielle : elle aura pour objet de promouvoir la mise en œuvre des astreintes administratives dirigées à l’encontre des propriétaires ne réalisant pas les travaux ordonnés par la voie judiciaire

4) Création d’une société publique avec l’EPF ILE-DE-FRANCE et ACTION LOGEMENT au 1er janvier 2017 : laquelle aura pour objet de lutter en Ile-de-France contre le développement des divisions abusives de maisons individuelles opérant une sur-densification des logements et suscitant des conditions de vie indignes pour leurs occupants.

Ces nouveaux outils de lutte contre la dégradation de l’habitat s’inscrivent dans le déploiement de ceux récemment mis en œuvre, telle que l’immatriculation obligatoire des copropriétés au sein d’un registre national désormais accessible en ligne depuis le 1er novembre. D’après le Ministère, ces mesures devraient être prochainement complétées par d’autres outils, notamment en direction des syndics de copropriété.

La confirmation tacite d’un acte de vente nul, déduite de l’exécution volontaire de l’acte par le débiteur, n’est admise que s’il est rapporté la preuve préalable de la connaissance par ce dernier du caractère vicié de l’acte

Les propriétaires d’un immeuble mandatent un cabinet à la recherche d’un acquéreur, puis vendent finalement leur bien à une société civile immobilière, dont le capital est détenu par le gérant de ce cabinet.

Les vendeurs ont poursuivi l’annulation de la vente pour violation de l’article 1596 du Code civil, lequel dispose qu’un mandataire ne peut se porter acquéreur, directement ou par personne interposée, du bien que son mandant l’a chargé de vendre, sauf à rendre l’acte nul en raison du conflit d’intérêts qui résulterait d’une telle situation. Cette nullité relative étant destinée à protéger le vendeur, ce dernier a la faculté d’agir en annulation du contrat de vente, ou bien au contraire de renoncer à cette action en confirmant l’acte nul à certaines conditions, postérieurement à la conclusion définitive du contrat.

La Cour de cassation rappelle que pour se prévaloir de la confirmation d’un acte nul, même tacite, ou d’une renonciation à agir, il faut que le créancier prouve que le débiteur avait bien conscience du vice qui affectait l’acte, lorsqu’il a commencé à l’exécuter, et rejette en conséquence le pourvoi :

« Mais attendu qu’ayant relevé que les consorts X… n’avaient pas conscience de la nullité édictée par l’article 1596 du Code civil, la Cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit, sans inverser la charge de la preuve, qu’ils n’avaient pas renoncé à invoquer la nullité de la vente ni n’avaient confirmé l’acte argué de nullité et a légalement justifié sa décision de ce chef ».

Cette condition est néanmoins difficile à caractériser en matière de confirmation tacite, en ce qu’elle constitue d’une part un élément intentionnel impossible à déduire de la seule exécution de l’acte par le débiteur et, d’autre part, en ce qu’elle implique de démontrer la connaissance par ce dernier de la règle juridique conduisant à la nullité.

Parution du « guide méthodologique » relatif aux aux agents contractuels de l’Etat : éclarcissements sur la question de la réévaluation de la rémunération

Le 20 octobre 2016, le Ministère de la fonction publique a publié une circulaire dite  « guide méthodologique » relatif aux dispositions applicables aux agents contractuels de l’Etat », qui a pour objet de clarifier le régime juridique applicable aux agents contractuels de l’Etat en explicitant les modifications récentes apportées au décret n° 86-83 du 17 janvier 1986.

Les dispositions applicables aux agents contractuels de l’Etat avaient en effet fait l’objet d’une réforme en 2014 tendant à améliorer les conditions d’emploi des agents contractuels.

Cette réforme a été suivie, en 2015, d’une réforme propre aux agents contractuels des collectivités territoriales, fortement inspirée de celle précédemment adoptée pour les agents de l’Etat (cf. décret n° 2015-1912 du 29 décembre 2015 portant diverses dispositions relatives aux agents contractuels de la fonction publique territoriale).

Entre autres nouveautés, l’obligation de « rééxamen » de la rémunération prévue à l’article 1-3 du décret du 17 janvier 1986 s’est vue substituer une obligation de « réévaluation », et il en est de même dans la nouvelle version du décret n° 88-145 du 15 février 1988 afférent aux contractuels des collectivités.

La question se pose cependant du sens à donner à cette substitution de vocabulaire, et en particulier, de l’éventuelle obligation d’augmentation de la rémunération que le terme de « réévaluation » pourrait impliquer.

La circulaire rappelle ainsi que les employeurs publics ne peuvent prévoir de règles d’avancement que si elles « n’impliquent aucun automatisme ni ne présument le sens de l’évaluation de la rémunération ». Elle rappelle également que le Conseil d’Etat a jugé illégale une délibération organisant des perspectives automatiques d’avancement dans une grille de rémunération, dès lors qu’elle  contrevenait à la volonté du législateur de n’autoriser qu’à titre dérogatoire le recrutement d’agents contractuels (CE, 30 juin 1993, Préfet de la Martinique, n° 120658, 129984 et 129985).

La circulaire précise également que sur le fondement de cette règle, un avis du Conseil d’Etat du 30 septembre 2014 avait précisé que l’obligation de réévaluation prévue à l’article 1-3 du décret du 17 janvier 1986 n’impliquait pas systématiquement une augmentation de la rémunération perçue par l’intéressé.

Elle vient ainsi conclure que le dispositif de réévaluation doit donc simplement offrir le cadre d’une « discussion entre l’employeur et l’agent au moins tous les trois ans ».

Le passage d’une obligation de réexamen à celle de réévaluation apparaît sans effet automatique sur la rémunération des agents contractuels.

Pour la majoration des redevances, les dispositions du CG3P ne sont pas applicables aux logements de fonction attribués aux fonctionnaires territoriaux

Dans cette affaire, la requérante, une ancienne gardienne, bénéficiait d’un logement de fonctions pour nécessité absolue de service. Cependant, après sa mise à la retraite, elle devait refuser de quitter son logement, si bien que la Ville de Paris, propriétaire des lieux, l’avait assujettie au versement d’une redevance mensuelle en se fondant sur les dispositions de l’article R. 2124-74 du Code général de la propriété des personnes publiques (CG3P).

Pour mémoire, cet article dispose en effet que : « […] pour toute la période pendant laquelle il occupe les locaux sans titre, notamment dans le cas où son titre est venu à expiration, [L’occupant qui ne peut justifier d’un titre] est astreint au paiement d’une redevance fixée par le directeur départemental des finances publiques, égale à la valeur locative réelle des locaux occupés. Cette redevance est majorée de 50 % pour les six premiers mois, de 100 % au-delà ».

Cependant, la Cour administrative d’appel de Paris a annulé le jugement du Tribunal administratif de Paris qui avait rejeté la requête de cet agent tendant à l’annulation de la redevance pour occupation d’un logement de fonction au motif que « si la ville de Paris soutient avoir appliqué ces pénalités sur le fondement de l’article R. 102 du Code du domaine de l’Etat, cet article, abrogé par le décret n° 2011-1612 du 22 novembre 2011 et repris à l’article R. 2124-74 du Code général de la propriété des personnes publiques, […], n’est applicable qu’aux concessions de logement dans les immeubles appartenant à l’Etat et non aux agents territoriaux bénéficiant d’un logement dans un immeuble appartenant à une collectivité territoriale ; que cet article ne pouvait donc fonder la majoration appliquée ».

Il semble que les collectivités locales ne pourraient donc plus se fonder, en l’absence de titre d’occupation, sur l’article R. 2124-74 du CG3P, étant cependant entendu que la Cour a précisé qu’une commune reste « fondée à réclamer à l’occupant sans titre de son domaine public, au titre de la période d’occupation irrégulière, une indemnité compensant les revenus qu’elle aurait pu percevoir d’un occupant régulier pendant cette période ».

La portée de cet arrêt est cependant à relativiser au regard de ce qu’une jurisprudence constante du Conseil d’Etat précise que les collectivités ne peuvent attribuer à leurs agents des prestations venant en supplément de leur rémunération qui excéderaient celles auxquelles peuvent prétendre des agents de l’Etat occupant des emplois équivalents (CE, 2 décembre 1994, Préfet de la région Nord-Pas-de-Calais, n° 147962 et CE, 25 septembre 2009, Union fédérale des cadres des fonctions publiques – CFE-CGC, n° 318505). Cela est d’autant plus important qu’il ne ressort pas de l’arrêt que la Ville de Paris aurait opposé ce moyen en défense.

C’est ainsi que, pour l’heure, la prudence permet de considérer les dispositions du CG3P applicables au moins aux agents territoriaux en fonctions, et ce malgré le champ d’application du CG3P.

Une insuffisance professionnelle « managériale » peut justifier suspension conservatoire et licenciement de l’agent contractuel

Dans cette affaire, le Conseil d’Etat était saisi de la situation du Directeur de la culture de la Communauté urbaine de Strasbourg, lequel tenait régulièrement en présence de ses subordonnés des propos grossiers, déplacés et dévalorisants, de nature à heurter gravement certains collaborateurs.

L’autorité territoriale l’avait ainsi suspendu de ses fonctions « dans l’intérêt du service », puis licencié pour insuffisance professionnelle.

Au terme d’une procédure contentieuse défavorable à l’établissement, le Conseil d’Etat a finalement validé ces deux décisions, en jugeant qu’en l’espèce le fait de tenir des propos vexatoires et des réflexions à connotation sexiste présentait un caractère de gravité portant atteinte au bon fonctionnement du service. Ainsi, après avoir rappelé que « la suspension d’un agent, lorsqu’elle est prononcée aux fins de préserver l’intérêt du service, est une mesure à caractère conservatoire qui peut être prise lorsque les faits imputés à l’intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité », il a validé la première des deux décisions en cause.

Le Juge administratif semble donc estimer que – même sans texte – l’intérêt du service seul peut motiver, sous réserve de la gravité des faits, la suspension de l’agent contractuel, quel que soit le fondement de la procédure par la suite engagée, disciplinaire ou en lien avec une insuffisance professionnelle.

Le second intérêt de l’arrêt est que c’est une insuffisance dite « managériale » qui a justifié le licenciement pour insuffisance professionnelle de l’agent, et ce malgré les connaissances techniques  de ce dernier, dès lors que : « la fonction de directeur de la culture exercée par M. A, de nature essentiellement managériale, ainsi que la mission de réorganisation et de rationalisation du service culturel qui lui était également confiée exigeaient des qualités professionnelles de gestion, de communication, de dialogue et de conduite du changement [] ».

 

Responsabilité civile : prédisposition de la victime

Cass. civ., 2ème, 19 mai 2016, n° 15-18.784

Cass. civ., 2ème, 14 avril 2016, n° 14-27.980

Les 14 avril et 19 mai derniers, la 2ème Chambre civile de la Cour de cassation se sont prononcées sur la question de la prédisposition de la victime dans la survenance de son dommage corporel.

Dans la 1ère espèce – du 14 avril 2016 –, un chauffeur routier avait eu un accident de la circulation ayant entraîné des séquelles qui avaient eu des répercussions professionnelles.

La Cour d’appel de Grenoble avait alors considéré que la perte de gains professionnels futurs n’était pas exclusivement imputable à l’accident mais lié à une hernie discale, limitant dès lors le montant à allouer à la victime au titre de son préjudice.

Dans la 2ème affaire – du 19 mai 2016 –, la Cour d’appel de Poitiers avait eu le même raisonnement que la Cour d’appel de Grenoble, considérant que l’existence d’un état psychique fragile du requérant antérieur à l’accident de la circulation justifiait de limiter le montant qui devait lui être alloué au titre de sa perte de gains professionnels futurs.

Dans les deux affaires, la Cour de cassation a cassé les décisions des Juges du fond, rappelant, au visa de l’article 1382 du Code civil et selon la même formule consacrée, que le droit de la victime à obtenir l’indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d’une prédisposition pathologique lorsque l’affection qui en est l’issue n’a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable.

La Cour de cassation rappelle ainsi fermement que la victime peut prétendre à une réparation intégrale sans perte ni profit dès lors que ses prédispositions ne s’étaient pas manifestées avant l’accident.

Projet de loi SAPIN II : il est adopté !

Le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique – dite loi Sapin II – a été adopté en lecture définitive par l’Assemblée Nationale le 8 novembre 2016.

L’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux concessions ont été ratifiées.

Dans le cadre de cette ratification, l’Ordonnance relative aux marchés publics est modifiée à plusieurs égards :

  • l’article 32 régissant l’allotissement est modifié : il n’est plus possible de présenter des offres variables et lorsque l’acheteur décide de ne pas allotir, il doit désormais énoncer « les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision » ;
  • l’article 45 régissant les interdictions de soumissionner obligatoires et générales prévoit désormais qu’une simple déclaration sur l’honneur devient une preuve suffisante attestant que le candidat ne se trouve pas placé dans une situation d’interdiction de soumissionner ;
  • l’article 52 régissant les critères d’attribution est complété de la façon suivante : « l’attribution sur la base d’un critère unique est possible dans des conditions fixées par voie réglementaire ». Le décret est en attente de publication ;
  • l’article 53 régissant les offres anormalement basses est modifié, dans l’objectif de renforcer l’obligation de détecter les offres anormalement basses selon les modalités suivantes : « l’acheteur met en œuvre tous moyens pour détecter les offres anormalement basses lui permettant de les écarter » ;
  • l’article 69 impose désormais à l’acheteur l’obligation suivante dans le cadre des marchés de partenariat : « lorsque l’acheteur confie tout ou partie de la conception des ouvrages au titulaire, les conditions d’exécution du marché doivent comprendre l’obligation d’identifier une équipe de maîtrise d’œuvre chargée de la conception des ouvrages et du suivi de leur réalisation » ;
  • l’article 74 régissant l’évaluation et étude préalables précise les exigences auxquelles doit satisfaire l’évaluation préalable ;
  • l’article 89 relatif à l’exécution des marchés de partenariat encadre les conditions d’indemnisation « en cas d’annulation, de résolution ou de résiliation du contrat par le Juge, faisant suite au recours d’un tiers ».

En plus de modifier l’Ordonnance relative aux marchés publics, la loi Sapin II modifie également le Code général des collectivités territoriales (CGCT).  Ainsi, les articles L. 1414-2 et 3 du CGCT ont évolué sur un point : les commissions d’appels d’offres (CAO) des Offices publics de l’Habitat (OPH) ne relèvent plus du CGCT, mais d’un décret en Conseil d’Etat qui a vocation  à intervenir.

Une consultation a été lancée par la Direction des affaires juridiques de Bercy sur ledit projet de décret ; les remarques susceptibles d’être présentées sur ce projet de décret peuvent être envoyées à l’adresse suivante : concertation2.daj@finances.gouv.fr, jusqu’au 24 novembre 2016 inclus.

Généralisation de la saisine par voie électronique de l’administration – Entrée en vigueur du décret n° 2016-1411 du 20 octobre 2016

Le décret n° 2016-1411 du 20 octobre 2016, entré en vigueur le 7 novembre 2016, généralise le droit pour toute personne (particuliers, entreprises, associations) de saisir les administrations de l’Etat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics administratifs ainsi que les organismes et personnes chargés d’une mission de service public administratif, y compris les organismes de sécurité sociale, par voie électronique. Il abroge le décret n° 2015-1404 du 5 novembre 2015 qui réservait jusque là cette possibilité aux services de l’Etat et à ses établissements publics administratifs.

Par cette seule voie, l’usager pourra adresser une demande, une déclaration, un document ou une information ou une réponse à l’administration, dès lors qu’il aura préalablement procédé à son identification. L’identification de l’usager en ligne peut notamment prévoir l’utilisation d’un identifiant ou d’autres moyens d’identification électronique.

Pour que ce droit soit rendu pleinement effectif, il est prévu que l’administration informe le public des téléservices qu’elle crée, notamment en donnant accès aux modalités d’utilisation. Les téléservices peuvent prendre la forme d’une téléprocédure ou d’une procédure de saisine par voie électronique (formulaire de contact, adresse électronique dédiée à recevoir les envois du public). A défaut, le public peut la saisir par tout type d’envoi.

Le décret précise également les modalités selon lesquelles il est accusé réception des saisines adressées par voie électronique : soit un accusé de réception électronique (AR) est délivré instantanément, soit, à défaut (l’accusé de réception peut en effet être délivré au plus tard dans un délai de dix jours ouvrés à compter de la réception de l’envoi de la demande), l’usager reçoit un accusé d’enregistrement électronique.

En matière de demande adressée à l’administration, l’AR doit indiquer si une décision implicite d’acceptation ou de rejet est susceptible de naître ainsi que la date d’intervention de cette décision.

S’il s’agit d’une décision implicite de rejet, les voies et délais de recours ouverts à l’encontre de la décision devront être mentionnés dans l’AR pour être opposables au demandeur.

Rappelons que ces dispositions ne sont pas applicables aux relations entre l’administration et ses agents.