Loi climat et résilience : tour d’horizon des dispositions en matière d’énergies renouvelables et de rénovation des bâtiments

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ces effets, dite « loi Climat et Résilience », a été définitivement adoptée en commission mixte paritaire le 20 juillet 2021, puis promulguée le 22 août 2021 et publiée au Journal officiel le 24 août 2021.

La loi Climat et Résilience vient traduire une partie des 146 propositions de la Convention citoyenne pour le climat retenues par le Président de la République afin de lutter contre le dérèglement climatique par la réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Le texte se décompose en huit titres visant différentes thématiques, telles que « Produire et travailler », « Se nourrir » ou encore « Se loger ».

Le projet de texte a donné lieu à l’un des plus longs débats parlementaires de la Vème République et à l’adoption de nombreux amendements. Le Conseil constitutionnel, saisi par 79 parlementaires, a d’ailleurs rendu une décision de non-conformité partielle le 13 août 2021 en censurant quatorze « cavaliers législatifs » (III.). Il sera en outre complété par un nombre important de décrets d’application.

Le texte, tel que publié au Journal officiel, présente des mesures intéressantes en matière de développement des énergies renouvelables (I.) et de rénovation des bâtiments (II.). C’est l’objet du présent Focus.

La loi Climat et Résilience comporte en outre un important volet dans le domaine de l’environnement qui fera l’objet du Focus de notre prochaine Lettre d’Actualité Juridique Energie Environnement.

 

I. Les dispositions pour le développement des énergies renouvelables

Les dispositions de la loi Climat et Résilience relatives au développement des énergies renouvelables sont présentées tout au long du texte et, plus particulièrement, au sein du Titre I « Consommer », du Titre IV « Se déplacer » et du Chapitre IV « Favoriser les énergies renouvelables » du Titre III « Produire et travailler ».

La loi Climat et Résilience entend renforcer le rôle de l’échelon local dans la lutte contre le dérèglement climatique (1.) et favoriser le développement d’autres sources d’énergie, telles que l’hydroélectricité et le biogaz (2.).

1. Renforcement du rôle de l’échelon local

En premier lieu, dans l’objectif de diminution de l’utilisation des énergies fossiles, le Maire se voit confier de nouvelles compétences liées au contrôle de la publicité.

En effet, la loi prévoit l’encadrement et la régulation de la publicité sur les énergies fossiles.

L’article 7 de la loi porte ainsi, déjà, modification du Code de l’environnement en interdisant la publicité relative à la commercialisation ou faisant la promotion des énergies fossiles, à compter du second semestre 2022, à l’exception des carburants dont le contenu en énergie renouvelable est supérieur ou égal à 50 %.

Également, la publicité relative à la vente ou faisant la promotion de l’achat des voitures neuves les plus polluantes, dont la liste sera dressée par décret en Conseil d’Etat, sera interdite dès 2028.

Enfin, l’irrespect de ces deux interdictions est puni d’une amende d’un montant minimum de 20 000 euros pour les personnes physiques et 100 000 euros pour les personnes morales.

En deuxième lieu, le Chapitre IV du Titre III de la Loi Climat et Résilience « Produire et travailler » prévoit la prise en compte de l’échelon local et de ses potentialités dans la lutte contre le dérèglement climatique.

En complément des programmations pluriannuelles de l’énergie (ci-après, PPE) nationales, l’article 83 de la loi introduit les objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables qui doivent être intégrés au schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires et, en Ile-de-France, au sein du schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie et au schéma régional éolien.

Ces objectifs régionaux, établis après concertation avec les conseils régionaux concernés, doivent prendre en compte les potentiels énergétiques, renouvelables et de récupération régionaux qui sont mobilisables tel que l’indique le nouvel article L. 141-5-1 du Code de l’énergie. Cela permet de fixer des objectifs de développement durable en adéquation avec la situation locale.

Par ailleurs, l’article 83 de la loi Climat et Résilience prévoit la création d’un comité régional de l’énergie dans chaque région afin de favoriser la concertation avec les collectivités locales sur les questions relatives à l’énergie au sein de la région.

Enfin, la loi Climat et Résilience vient modifier l’article L. 141-2 du Code de l’énergie relatif au contenu de la PPE, lequel doit désormais contenir une feuille de route pour le développement des communautés d’énergie renouvelable et des communautés énergétiques citoyennes[1].

En troisième lieu, le texte vise à renforcer le rôle des élus locaux dans l’implantation d’éoliennes afin de favoriser l’acceptabilité locale des projets.

La loi Climat et Résilience vient alors préciser les modalités de consultation préalable du Maire sur les projets d’implantation d’éoliennes dont la demande d’autorisation sera déposée à partir de six mois suivant la date de promulgation de la loi, le 22 août 2021.

Ainsi, l’article L. 181-28-2 du Code de l’environnement prévoit désormais que les observations du Maire de la commune soient adressées au porteur du projet dans un délai d’un mois à compter de l’envoi du résumé non technique et après délibération du conseil municipal. Le Maire ne peut plus formuler d’observations passé ce délai.

Le porteur du projet a ensuite la possibilité de répondre sous un mois aux observations du Maire en expliquant comment il compte en prendre compte. Cet apport, qui risque d’allonger le délai d’instruction des projets éoliens, introduit une forme de contradictoire au sein de la procédure de consultation du maire.

En revanche, l’article 82 de la loi Climat et Résilience met fin à une autre forme de consultation en abrogeant l’article L. 515-47 du Code de l’environnement. Désormais, la consultation de l’organe délibérant d’un établissement public de coopération intercommunale ou d’un conseil municipal compétent en matière de plan local d’urbanisme (ci-après, PLU) sur les projets d’implantation d’éoliennes incompatibles avec le voisinage des zones habitées lorsqu’un projet de PLU a été arrêté ne sera plus nécessaire. Cette consultation permettait d’assurer une cohérence entre le projet éolien et le document d’urbanisme en cours d’élaboration.

La loi Climat et Résilience souhaite donc faire des responsables locaux des acteurs pleinement intégrés dans la transition écologique et la lutte contre le dérèglement climatique.

Ces objectifs sont par ailleurs poursuivis par des dispositions visant à favoriser le recours à d’autres sources d’énergies renouvelables telles que l’hydroélectricité et le biogaz.

2. Favoriser le recours à d’autres sources d’énergie renouvelable

En premier lieu, la loi Climat et Résilience modifie les dispositions du Code de l’énergie sur la vente et la production du biogaz injecté dans les réseaux de gaz naturel.

La vente de biogaz injecté dans les réseaux de gaz naturel est facilitée par la loi qui ne la soumet pas à l’obtention d’une autorisation de fourniture lorsque le biogaz est vendu par le producteur à un fournisseur de gaz naturel.

Ensuite, la loi crée un dispositif de soutien à la production de biogaz injecté dans les réseaux de gaz naturel : les certificats de production de biogaz.

Ces certificats peuvent être détenus, acquis ou cédés par les producteurs de biogaz, les fournisseurs de gaz naturel ou tout autre personne morale et sont valables pendant 5 ans suivant leur délivrance.

Les fournisseurs de gaz naturel devront donc obligatoirement restituer à l’Etat des certificats de production de biogaz sauf s’ils produisent directement du biogaz injecté dans un réseau de gaz naturel ou s’ils acquièrent des certificats auprès de producteurs de biogaz.

En second lieu, en matière d’hydroélectricité, la loi Climat et Résilience fixe de nouveaux objectifs de production et de stockage d’électricité hydraulique à l’horizon 2035.

En outre, il est créé un Médiateur de l’hydroélectricité, à titre expérimental et sur un périmètre géographique pour une durée de 4 ans à compter de la promulgation de la loi. Ce Médiateur doit veiller à la recherche de solutions amiables aux difficultés et désaccords rencontrés dans la mise en œuvre ou l’instruction de projets d’installations hydrauliques relevant du régime de l’autorisation, ou à la demande du porteur de projet, du gestionnaire de l’installation ou de l’Etat[2].

Ce sont là quelques dispositions supplémentaires destinées (modestement) à promouvoir de nouvelles énergies renouvelables.

 

II. Les dispositions concernant la rénovation des bâtiments

Un nombre important d’articles de la loi Climat et Résilience concerne ensuite la rénovation des bâtiments, en particulier au sein du Chapitre 1er « Rénover les bâtiments » du Titre V « Se loger ». Leurs apports sont substantiels, même si la mise en œuvre de certaines des mesures sera éloignée dans le temps.

Le nombre et la nature des mesures adoptées conduit au recensement suivant.

1. Usage des matériaux biosourcés ou bas-carbone pour les rénovations lourdes et constructions relevant de la commande publique (article 39).

La loi vient compléter l’article L. 228-4 du Code de l’environnement pour imposer, à compter du 1er janvier 2030, l’usage des matériaux biosourcés ou bas-carbone dans au moins 25 % des rénovations lourdes et des constructions relevant de la commande publique. Un décret en Conseil d’Etat doit notamment venir préciser la nature des travaux de rénovation lourde concernés et les seuils au-delà desquels l’obligation est applicable aux acheteurs publics.

2. Obligation d’intégrer un procédé de production d’énergies renouvelables ou des toitures végétalisées en cas de rénovation lourde (article 101)

La loi étend l’obligation d’installation de systèmes de production d’énergies renouvelables ou de toitures végétalisées lors de la construction, l’extension ou la rénovation lourde de bâtiments à usage commercial, industriel ou artisanal de plus de 500 m2, et de plus de 1 000 m2 pour les immeubles de bureau (article L. 171-4.-I du Code de la construction et de l’habitation, CCH). Un décret en Conseil d’Etat viendra notamment préciser la nature des travaux de rénovation lourde concernés ainsi que les exonérations prévues à l’article L. 171-4.-IV du CCH.

3. Diagnostic de performance énergétique (articles 148 et 149)

Le diagnostic de performance énergétique (DPE) constitue un document de référence qui évalue la performance énergétique et en matière d’émissions de gaz à effet de serre d’un bâtiment ou d’une partie de bâtiment (article L. 126-26 du CCH). L’article 148 de la loi vise à donner une assise législative aux différents niveaux du DPE en introduisant au sein du CCH un article L. 173‑1‑1 classant les bâtiments ou parties de bâtiment existants à usage d’habitation de « extrêmement performants » (classe A) à « extrêmement peu performants » (classe G).

L’article 149 de la loi insère par ailleurs un nouvel article L. 126-26-1 au sein de ce Code qui prévoit que le DPE précise la quantité d’énergie issue de sources d’énergies renouvelables utilisée dans le bâtiment ou la partie de bâtiment à usage d’habitation, en distinguant celle produite par des équipements installés à demeure de celle véhiculée par des réseaux de distribution d’électricité, de gaz ou de chaleur.

4. Mise en place d’un système d’aides publiques à la rénovation (articles 151 et 155-II)

Pour mémoire, l’article L. 100-1 A du Code de l’énergie (relatif aux objectifs de la politique énergétique nationale) prévoit qu’avant le 1er juillet 2023, puis tous les cinq ans, une loi détermine les objectifs et fixe les priorités d’action de la politique énergétique nationale pour répondre à l’urgence écologique et climatique. Cette loi doit notamment préciser les objectifs de rénovation énergétique dans le secteur du bâtiment, pour deux périodes successives de cinq ans.

La loi Climat et Résilience modifie le 5° du I. de cet article pour indiquer que ces objectifs doivent être définis en cohérence avec l’objectif de disposer à l’horizon 2050 d’un parc de bâtiments sobres en énergie et faiblement émetteurs de gaz à effet de serre. Mais, surtout, cet article précise désormais que l’atteinte de ces objectifs repose sur une incitation financière accrue aux rénovations énergétiques performantes et globales via la mise en œuvre d’un système stable d’aides accessibles à l’ensemble des ménages et modulées selon leurs ressources. Cette incitation financière vise notamment à créer les conditions d’un reste à charge minimal pour les bénéficiaires les plus modestes, en particulier lorsque les travaux sont accompagnés par un opérateur de l’Etat ou agréé par lui (cf. infra). Chacune de ces lois devra en outre déterminer le rythme des rénovations nécessaires à l’atteinte de la trajectoire de rénovation énergétique du parc de logements, en tenant compte des spécificités territoriales liées notamment aux typologies d’habitation et aux conditions climatiques.

Notons également que l’article 155-II de la loi vient compléter la loi de finances pour 2020 (dernier alinéa du 6° du I. de l’article 179) afin que le rapport sur l’impact environnemental du budget (annexe générale au projet de loi de finances de l’année) présente les moyens mis en œuvre par le gouvernement en faveur de la rénovation énergétique des logements, pour atteindre notamment l’objectif défini au 5° du I. de l’article L. 100-1 A du Code de l’énergie, en particulier l’incitation financière accrue aux rénovations énergétiques performantes et globales, ainsi que les conditions du reste à charge minimal pour les bénéficiaires les plus modestes.

5. Définition des notions de « rénovation performante » et de « rénovation globale » (article 155)

La loi ajoute au 17° bis de l’article L. 111-1 du CCH une définition de la rénovation performante. La rénovation d’un bâtiment ou d’une partie de bâtiment à usage d’habitation est ainsi par principe dite performante lorsque des travaux, qui veillent à assurer des conditions satisfaisantes de renouvellement de l’air, permettent de respecter les conditions suivantes : (i) le classement du bâtiment ou de la partie de bâtiment en classe A ou B (au sens de l’article L. 173-1-1 du CCH) ; (ii) l’étude des six postes de travaux de rénovation énergétique suivants : l’isolation des murs, l’isolation des planchers bas, l’isolation de la toiture, le remplacement des menuiseries extérieures, la ventilation, la production de chauffage et d’eau chaude sanitaire ainsi que les interfaces associées.    

Par exception, une rénovation énergétique est également dite performante : (i) pour les bâtiments qui, en raison de leurs contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales ou de coûts manifestement disproportionnés par rapport à la valeur du bien, ne peuvent pas faire l’objet de travaux de rénovation énergétique permettant d’atteindre un niveau de performance au moins égal à celui de la classe B, lorsque les travaux permettent un gain d’au moins deux classes et que les six postes de travaux précités ont été traités ; (ii) pour les bâtiments de classe F ou G avant travaux au sens du même article L. 173-1-1, lorsqu’ils atteignent au moins la classe C après travaux et que les six postes de travaux précités ont été étudiés.

En outre, une rénovation énergétique performante est aussi qualifiée de globale lorsqu’elle est réalisée dans un délai maximal ne pouvant être fixé à moins de dix-huit mois pour les bâtiments ou parties de bâtiment à usage d’habitation ne comprenant qu’un seul logement ou à moins de vingt-quatre mois pour les autres bâtiments ou parties de bâtiment à usage d’habitation et lorsque les six postes de travaux précités ont été traités. Un décret en Conseil d’Etat viendra notamment fixer ces délais.

6. Elargissement des missions du service public de la performance énergétique de l’habitat (article 164)

La loi complète les articles L. 232-1 et L. 232-2 du Code de l’énergie concernant le service public de la performance énergétique de l’habitat (SPPEH) qui a désormais aussi pour objet « d’encourager les rénovations performantes et les rénovations globales ». Le SPPEH comporte un réseau de guichets d’information, de conseil et d’accompagnement (sous réserve de l’article L. 232-3, cf. infra) à la rénovation énergétique pour les maîtres d’ouvrage privés (propriétaires, locataires ou syndicats de copropriétaires) visant à les aider à élaborer un projet de rénovation énergétique, à mobiliser les aides financières publiques ou privées ainsi qu’à les orienter vers des professionnels compétents tout au long du projet de rénovation ou encore à leur apporter des informations juridiques liées à la performance énergétique de leur logement. Les informations et conseils délivrés sont gratuits et personnalisés. Chaque guichet est prioritairement mis en œuvre à l’échelle de chaque établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, l’Etat et l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) étant chargés de l’animation nationale du réseau de guichets.

Elle ajoute surtout un article L. 232-3 qui concerne plus spécifiquement la mission d’accompagnement dont peuvent bénéficier les ménages dans la définition et la réalisation des travaux d’amélioration thermique de leur logement (appui à la réalisation d’un plan de financement et d’études énergétiques, assistance à la prospection et à la sélection des professionnels, évaluation de la qualité des travaux réalisés par ces professionnels). Il est notamment prévu que cette mission soit réalisée par des opérateurs agréés, pour une durée de cinq ans renouvelables par décision expresse, par l’Etat ou l’ANAH. Les collectivités territoriales ou groupements peuvent le cas échéant être ces opérateurs. Notons aussi que la délivrance de la prime de transition énergétique prévue par la loi de finances pour 2020 (article 15-2) et des aides à la rénovation énergétique de l’ANAH sera progressivement conditionnée au recours à un accompagnement pour certaines rénovations énergétiques performantes ou globales ou certains bouquets de travaux énergétiques réalisés par des maîtres d’ouvrage privés. Un décret en Conseil d’Etat doit en tout état de cause intervenir pour préciser les termes de ce nouvel article L. 232-3 du Code de l’énergie. Enfin, l’article 164 de la loi Climat et Résilience complète l’article L. 221-7 du Code de l’énergie de sorte que la contribution à des missions d’accompagnement puisse donner lieu à la délivrance de certificats d’économies d’énergie.

7. Enrichissement du rapport des collectivités sur la situation en matière de développement durable (article 180)

Enfin, l’article 180 de la loi vient modifier les articles L. 2311-1-1 (communes et EPCI à fiscalité propre regroupant plus de 50 000 habitants), L. 3311-2 (départements) et L. 4310-1 (régions) afin que le rapport sur la situation en matière de développement durable (qui doit être présenté préalablement aux débats sur le projet de budget) précise, à partir du 1er janvier 2024, « le programme d’actions mis en place pour assurer la réduction de la consommation d’énergie des bâtiments ou des parties de bâtiment à usage tertiaire dont la collectivité territoriale est propriétaire, dans un objectif de respect des obligations prévues à l’article L. 174-1 du Code de la construction et de l’habitation » (réduction de la consommation d’énergie finale pour l’ensemble des bâtiments soumis à l’obligation d’au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050, par rapport à 2010).

 

III. Les dispositions censurées par le Conseil constitutionnel

Par une décision rendue le 13 août 2021[3], le Conseil constitutionnel a écarté le recours formé par 79 parlementaires contre la loi Climat et Résilience. Ces parlementaires n’avaient pas demandé la censure de dispositions en particulier mais avaient formulé une critique générale de l’insuffisance de la loi prise dans son ensemble.

Cependant, le Conseil constitutionnel a procédé au contrôle des « cavaliers législatifs » et a censuré 14 articles qui n’avaient, selon lui, aucun lien avec l’objet de la loi Climat et Résilience.

Dans le domaine de l’énergie, ont ainsi été censurés, d’une part, l’article 84 de la loi qui prévoyait la compensation de la gêne résultant de l’implantation d’éoliennes soumises à autorisation environnementale pour le fonctionnement des ouvrages et installations du ministère de la Défense et, d’autre part, l’article 102 autorisant l’installation d’ouvrages photovoltaïques sur certaines friches, en exception aux dispositions de l’article L. 121-8 du Code de l’urbanisme encadrant l’extension de l’urbanisation dans les communes littorales.

Et dans le domaine de la rénovation énergétique, l’article 168, qui ouvrait la possibilité aux communes de créer, sur tout le territoire, des périmètres de ravalement obligatoire des bâtiments sans arrêté préfectoral préalable, a de même été censuré.

 

Marie-Hélène PACHEN-LEFEVRE, Alexandra OUZAR,

Thomas ROUVEYRAN et Christophe FARINEAU

 

 

 

[1] Il s’agit d’entités juridiques autonomes contrôlées par actionnaires ou membres se trouvant à proximité des projets d’énergie renouvelable souscrits et élaborés. La notion a été introduite par la loi n°2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat et est codifiée aux articles L. 291-1 et L. 291-2 du Code de l’énergie.

[2] Article 89 de la loi Climat et Résilience.

[3] Décision n°2021-825 DC du 13 août 2021

L’obligation pour les restaurateurs d’utiliser des couverts réemployables est conforme aux exigences constitutionnelles

Par un arrêt du 6 août 2021, le Conseil d’Etat a considéré que l’obligation pour les établissements de restauration de servir leurs repas et boissons dans des récipients et couverts réemployables ne méconnaissait pas le devoir de prévention, ni le principe d’égalité, ni la liberté d’entreprendre. Le Juge a ainsi rejeté la demande de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) formulée par les requérantes pour défaut de caractère sérieux de la question.

La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi AGEC, a introduit au 16ème alinéa de l’article L. 541-14-10, III du Code de l’environnement l’obligation pour les restaurateurs d’utiliser des récipients et couverts réemployables à compter du 1er janvier 2023 :

« A compter du 1er janvier 2023, les établissements de restauration sont tenus de servir les repas et boissons consommés dans l’enceinte de l’établissement dans des gobelets, y compris leurs moyens de fermeture et couvercles, des assiettes et des récipients réemployables ainsi qu’avec des couverts réemployables. Les modalités de mise en œuvre du présent alinéa sont précisées par décret ».

A l’appui de leur recours dirigé contre le décret d’application de cette disposition, plusieurs sociétés spécialisées dans les emballages plastiques ont alors formulé une QPC, aux motifs que la disposition précitée méconnaitrait :

  • le devoir de prévention inscrit à l’article 3 de la Charte de l’environnement et aux termes duquel « Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences » ;
  • le principe d’égalité des personnes devant la loi, protégé par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ;
  • la liberté d’entreprendre, inscrite à l’article 4 de cette Déclaration.

Le Conseil d’Etat devait se prononcer sur le caractère sérieux de cette question afin de déterminer si elle pouvait faire l’objet d’une transmission auprès du Conseil Constitutionnel.

Et, la Haute juridiction administrative a estimé que cette question était dépourvue de caractère sérieux dès lors que :

  • sur le principe de prévention, le Conseil d’Etat relève tout d’abord que l’obligation contestée a pour objectif de mettre en œuvre ce principe et que l’argumentaire des requérantes, selon lequel cette obligation aurait dû, d’une part, être définie au regard d’études précises et, d’autre part, prévoir la possibilité pour les restaurateurs de proposer des solutions alternatives « présentant un meilleur résultat global », ne permet pas de critiquer utilement cette disposition ;
  • sur le principe d’égalité, les requérantes soutenaient que la disposition contestée instaurerait une différence de traitement entre les restaurateurs utilisant déjà des couverts réemployables, ou pour lesquels cette transition serait aisée, et ceux ayant recours à des ustensiles jetables, mais également entre les producteurs français de vaisselle jetable et les producteurs des autres Etats de l’Union européenne. Le Conseil d’Etat relève toutefois que « les dispositions contestées s’appliquent indifféremment à tous les établissements de restauration sur le territoire national et n’interdisent pas en elles-mêmes la vente de vaisselle à usage unique par les producteurs français et européens » ;
  • sur la liberté d’entreprendre, le Conseil d’Etat rappelle qu’il est tout à fait possible d’y apporter des limites si l’atteinte à cette liberté n’est pas disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi. Or l’obligation contestée, si elle limite la liberté d’entreprendre, vise à favoriser la réduction des déchets plastiques et s’inscrit ainsi dans l’objectif d’intérêt général de protection de l’environnement. Et cette atteinte n’est pas manifestement disproportionnée dès lors qu’elle n’impose pas aux restaurateurs « un choix particulier de procédé industriel, de distribution, de commercialisation et de consommation, et s’appliquera seulement à partir du 1er janvier 2023 ».

Faute de caractère sérieux, la demande de transmission de QPC est donc rejetée.

Pouvoirs d’enquête de l’administration : constat et préconisations du Conseil d’Etat

En juillet 2021, le Conseil d’Etat a publié une étude en date du 15 avril 2021, réalisée à la demande du premier ministre, sur les pouvoirs d’enquête et de contrôle de l’administration. Cette étude ne porte pas spécifiquement sur les seuls pouvoirs d’enquête et de contrôles en matière environnementale et s’étend bien au-delà, mais les constats et préconisations formulés incluent notamment la protection de l’environnement.

S’agissant donc plus précisément des enquêtes et contrôles en matière de protection de l’environnement, le Conseil d’Etat fait le constat que, malgré un premier travail de réforme qui a défini un socle commun applicable aux 25 polices de l’environnement (réforme portée par l’ordonnance n° 2012‐34 du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du Code de l’environnement), « les polices de l’environnement constituent un ensemble disparate, mis en œuvre par des organisations administratives morcelées, avec des différences culturelles et procédurales mais aussi d’approches sectorielles qui ne facilitent pas la cohérence d’ensemble » (p. 245). A titre d’exemple s’agissant des pouvoirs de police judiciaire définis au sein du Code de l’environnement, les plus intrusifs, tels que les relevés d’identité au titre de l’article L. 172-7 du Code de l’environnement et les perquisitions au titre de l’article L. 172-5 du même Code, relèvent de « 70 catégories d’agents dans 25 polices différentes » (p. 272). Notamment, le recensement précis des autorités de contrôle s’avère parfois impossible, particulièrement s’agissant des polices de l’eau, de la nature et des sites relevant du Préfet de département. En effet, il revient au Préfet d’organiser, au sein de ses services et au titre de son pouvoir d’organisation (CE, 1936, Jamart), la compétence de contrôle et de l’attribuer à ses agents, rendant impossible le recensement précis de l’ensemble des autorités de contrôle sur le territoire national.

Face aux constats de ce rapport, le Conseil d’Etat dresse trois séries de recommandations, trouvant à s’appliquer de manière générale et au-delà de la protection de l’environnement aux activités de contrôle et d’enquête de l’administration :

  1. Harmoniser les pouvoirs d’enquête et de contrôle des administrations. Il s’agirait, face à la disparité des procédures et à l’unicité de chacune d’entre elles, de définir un socle commun qui serait codifié dans le Code des relations entre le public et l’administration et qui fixerait un cadre commun des garanties s’appliquant lors d’un contrôle administratif aux personnes qui en font l’objet (notamment en matière d’information sur les modalités du contrôle, de protection du domicile et d’origine des informations sur laquelle se fonde la décision issue du contrôle). Outre ce cadre commun, il s’agirait également d’harmoniser les pouvoirs les plus coercitifs détenus par l’administration, et qui trouvent notamment à s’appliquer en matière environnementale (perquisitions et relevés d’identité).
  1. Simplifier et rationnaliser les attributions et la répartition des compétences. De manière générale, le Conseil d’Etat préconise de simplifier la rédaction des textes, mais vise en particulier le Code de l’environnement, qui désignent les agents compétents pour rechercher et constater les infractions, en évitant les multiples renvois qui rendent ces textes peu compréhensibles. Le Conseil d’Etat suggère également que, lors de l’attribution d’un pouvoir d’enquête à une catégorie d’agents, une grille d’analyse soit mise en œuvre « prenant en compte l’adéquation de ces pouvoirs à la finalité d’intérêt général qu’ils poursuivent, leur nécessité et leur proportionnalité » (p. 272). Une évaluation de la mise en œuvre de ces pouvoirs et de leur utilité est également recommandée, ce qui permettra d’instaurer « une règle de caducité des pouvoirs inutilisés et des pouvoirs dont l’utilisation n’est pas mesurée lorsque leur pertinence, leur nécessité et leur proportionnalité ne sont pas démontrées » (p. 272).

    S’agissant

    plus spécifiquement de la protection de l’environnement, le Conseil d’Etat préconise une « simplification radicale de la matrice des compétences exercées par 70 catégories d’agents [qui] passe par la réduction du nombre des polices spéciales, de 25 à moins d’une dizaine » (p. 246) et propose un regroupement selon les rubriques suivantes, avec des logiques d’interventions communes :

« 1° (Livre II) Police de l’eau et des milieux aquatiques, relevant des inspecteurs de l’environnement des DDTM et de l’Office français de la biodiversité,

2° (Livre II) Polices des pollutions en mer, relevant du contrôle des affaires maritimes, et de façon incidente des autres capacités maritimes de l’Etat (marine nationale, douanes, Ifremer) et des officiers des ports,

3° (Livre III) Polices des espaces naturels (littoral, parcs nationaux, réserves naturelles, sites, circulation motorisée dans les espaces naturels), exercées par les agents des établissements chargés de leur conservation, par les agents des DREAL et par les agents chargés de la police du domaine public (DDTM),

4° (Livre IV) Protection de la faune et de la flore (accès aux ressources génétiques, espèces protégées, chasse, pêche), exercée par l’Office français de la biodiversité, par les agents des établissements chargés des espaces naturels et de l’ONF, et sur certains enjeux par les agents des douanes, avec les gardes champêtres, les gardes particuliers et les agents de développement des fédérations de chasse et de pêche,

5° (Livre IV, se substituant au Code forestier) Police de la forêt, relevant de l’Office national des forêts, des DDTM et des directions régionales de l’agriculture et de la forêt (DRAAF), les gardes particuliers contribuant à la constatation des infractions,

6° (Livre V) Inspection des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), police des produits chimiques et biocides (compétence partagée avec la DGCCRF), contrôle des utilisations confinées d’OGM à des fins de production industrielle, relevant des DREAL et des DDPP,

7° (Livre V) Inspection des installations nucléaires (INB), exercée par l’Autorité de sûreté nucléaire,

8° (Livre V) Polices de proximité, relevant principalement des municipalités : déchets, lutte contre le bruit (avec les ARS), publicité et enseignes (avec les DREAL) ».

Et, tant que la liste des agents compétents pour les contrôles en matière d’environnement n’aura pas été réduite et clarifiée, ni des données récoltées sur l’utilisation des pouvoirs existants, le Conseil d’Etat s’oppose à l’extension de leurs pouvoirs d’enquête.

Mais un élargissement du périmètre des compétences des agents municipaux est également souhaité par le Conseil d’Etat, au regard des faibles effectifs des gardes-champêtres, des inspecteurs de l’OFB et de l’ONF. Le Conseil d’Etat recommande particulièrement en matière environnementale de veiller « à assurer une couverture territoriale de proximité grâce aux agents municipaux » (p. 272).

En outre, afin de clarifier la répartition des compétences de contrôle administratif liées aux polices de l’environnement entre les services déconcentrés de l’Etat et les établissements publics, il est recommandé de présenter cette répartition dans un document public tel qu’une circulaire ou un plan précisant les catégories d’agents compétents pour les diverses interventions et d’adopter un décret en Conseil d’Etat définissant les catégories d’agents compétents pour les contrôles administratifs.

  1. Enfin, il s’agirait de mieux connaître et faire connaître les activités d’enquête et de contrôle. Cette préconisation se traduirait par la définition d’indicateurs de suivi et par la réalisation d’un rapport annuel d’activité au sein duquel les administrations devront rendre compte de l’utilisation de leurs pouvoirs d’enquête et de contrôle.

Annulation du cahier des charges des éco-organismes en cas d’absence de procédure de consultation du public

Par un arrêt du 7 juillet 2021, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur la nécessité de mettre en œuvre une procédure de consultation du public pour l’adoption du cahier des charges d’un éco-organisme.

 

Dans ce contentieux, la société requérante sollicitait l’annulation de l’arrêté interministériel du 20 août 2018 fixant la procédure d’agrément et le cahier des charges des éco-organismes de la filière des déchets diffus spécifiques (DDS) ménagers, s’agissant de certaines catégories de produits chimiques. La requérante invoquait notamment que ce cahier des charges n’a pas fait l’objet d’une procédure de participation du public et plus particulièrement de celle définie à l’article L. 123-19-1 du Code de l’environnement, laquelle s’applique à certaines décisions des autorités publiques ayant une incidence sur l’environnement.

 

Comme le rappelle le Conseil d’Etat, le cahier des charges ainsi arrêté fixe, d’une part, notamment les orientations générales de gestion des DDS ménagers ainsi que les relations entre les éco-organismes et les autres acteurs de cette gestion et régit, d’autre part, les missions des éco-organismes. En outre, le Juge rappelle que ceux-ci ont notamment pour mission d’assurer, conformément au cahier des charges, financièrement et techniquement la collecte séparée, le transport et le traitement des DDS ménagers. Par ailleurs, le cahier des charges fixe des objectifs chiffrés de collecte de déchets au niveau national, de valorisation énergétique et un taux de recyclage.

 

Le Juge administratif en déduit ainsi que l’arrêté attaqué, et le cahier des charges, produisent des effets directs et significatifs et ont une incidence sur l’environnement. Cet acte aurait donc dû être soumis à la procédure de consultation du public définie à l’article L. 123-19-1 du Code de l’environnement.

 

Une telle procédure de participation du public n’ayant pas été mise en œuvre pour l’adoption du cahier des charges de ces éco-organismes, l’arrêté attaqué est donc annulé par le Conseil d’Etat, qui diffère toutefois l’effet de l’annulation jusqu’au 1er janvier 2022 au regard de l’intérêt général qui s’attache au maintien temporaire des effets du cahier des charges des éco-organismes.

Dispositif du « bac à sable règlementaire » : bilan du premier guichet de ce dispositif et ouverture du second guichet

A l’occasion de l’ouverture du second guichet de candidatures, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) fait un état des lieux et formule des recommandations à la suite du premier guichet du dispositif d’expérimentation réglementaire prévu par la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat[1] (ci-après « la loi Energie Climat »).

Ainsi qu’il a été exposé dans notre précédente LAJEE[2], la loi Energie Climat a introduit un dispositif d’expérimentation réglementaire dans le secteur de l’énergie, également appelé « bac à sable réglementaire ».

Aux termes de l’article 61 de cette loi, la CRE et, dans le cadre des échanges transfrontaliers d’électricité, l’autorité administrative compétente, « peuvent, chacune dans leur domaine de compétence, par décision motivée, accorder des dérogations aux conditions d’accès et à l’utilisation des réseaux et installations pour déployer à titre expérimental des technologies ou des services innovants en faveur de la transition énergétique et des réseaux et infrastructures intelligents ».

A l’issue du premier guichet du bac à sable réglementaire, 12 projets ont bénéficié d’une dérogation sur 42 dossiers reçus.

La CRE donne un aperçu des différentes thématiques abordées lors de ce premier guichet :

  • la participation des stockages aux services système ;
  • l’insertion des véhicules électriques dans le système électrique ;
  • l’exploitation des données des compteurs évolués ;
  • l’optimisation des raccordements de parcs EnR aux réseaux ;
  • le développement du power-to-gas, en permettant l’injection du méthane de synthèse dans les réseaux ;
  • l’expérimentation d’un signal économique mobilisant la flexibilité des consommateurs au service des contraintes locales des réseaux de distribution.

 

Face à ce succès, un second guichet de candidatures se déroulera du 15 septembre au 31 décembre 2021 selon les modalités définies par la délibération n° 2020-125 du 4 juin 2020[3].  Dans ce même rapport portant état des lieux et annonçant l’ouverture de ce second guichet de candidatures, la CRE précise qu’une attention particulière sera accordée aux projets liés à la valorisation des données, au développement du stockage et à la mobilité électrique.

A cet égard, la CRE formule plusieurs recommandations destinées aux porteurs de projets : 

  • la CRE insiste sur la nécessité d’identifier précisément les dispositions législatives et réglementaires faisant obstacle à la réalisation des projets.

 

Lors du premier guichet, le défaut de référence aux freins réglementaires a rallongé l’instruction et donc les délais de décision sur l’éligibilité des candidatures. La CRE précise ainsi que « les dossiers [i] n’identifiant pas précisément une ou des disposition(s) législative(s) et/ou réglementaire(s) ou [ii] ne précisant pas les raisons pour lesquelles ces dispositions constituent un obstacle à la réalisation des projets concernés seront jugés incomplets et donc inéligibles ». Les porteurs de projets sont invités à échanger avec la CRE afin de bénéficier de conseils pour compléter leurs dossiers.

 

  • L’éligibilité des dossiers s’appréciera également au regard des dérogations déjà accordées : les projets ne présentant pas de caractère innovant supplémentaire pourront être déclarés inéligibles.

 

  • Chaque projet devra faire l’objet d’un dossier spécifique, même s’ils sont portés par le même demandeur.

 

  • Les candidats sont invités à déposer une première version de leur dossier assez tôt, afin de bénéficier des conseils de la CRE pour compléter les dossiers avant la date de clôture du guichet de candidatures.

 

C’est sur ces bases que les projets pourront être déposés auprès de la CRE.

 

_______________________________________

[1] Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, dite loi « Energie Climat »

[2] https://www.seban-associes.avocat.fr/la-cre-precise-les-conditions-de-mises-en-oeuvre-du-dispositif-dexperimentation-reglementaire-introduit-par-la-loi-energie-climat-et-ouvre-un-premier-guichet-de-candidature-afin-dy-p/

[3] https://www.cre.fr/content/download/22400/283388

Pass Sanitaire : information et consultation obligatoire du CSE sur les mesures de contrôle en vigueur et à venir

Dans le cadre de l’entrée en vigueur de la loi 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, le Pass sanitaire est désormais exigé depuis ce 10 août jusqu’au 15 novembre 2021 aux publics âgés d’au moins douze ans pour une série d’activités définie à l’article 1er (services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, loisirs transport, foires et salons professionnels ainsi que les séminaires professionnels, restauration commercial).

Depuis le 10 août 2021, les établissements concernés ont dû organiser leur activité pour contrôler leurs usagers et public quant à la détention du « Pass sanitaire ».

A cette première obligation, s’ajoutera à compter du 30 août 2021 pour ces mêmes établissements, celle du contrôle du « Pass sanitaire » « de leur propre personnel en contact avec le public concerné »  (art.1 de la loi du 5 août 2021).

A cela s’ajoute la spécificité des soignants et travailleurs pour le secteur médico-social qui devront présenter un schéma vaccinal complet à compter du 16 octobre 2021.

 

  • Une procédure dérogatoire d’information/consultation du CSE

Conscient que ces obligations de contrôle du Pass sanitaire et de vaccination affectent l’organisation des entreprises et organismes, le Législateur a expressément prévu une procédure d’ information et consultation spécifique des représentants du personnel du comité social et économique (CSE).

Le Parlement a ainsi retenu l’amendement n°959 du gouvernement devenu l’article 15 de loi du 5 août 2021 :

« Par dérogation aux articles L. 2312-8 et L. 2312-14 du Code du travail, dans les entreprises et établissements d’au moins cinquante salariés, l’employeur informe, sans délai et par tout moyen, le comité social et économique des mesures de contrôle résultant de la mise en œuvre des obligations prévues au 2° du A du II de l’article 1er de la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire et au I de l’article 12 de la présente loi. L’avis du comité social et économique peut intervenir après que l’employeur a mis en œuvre ces mesures, au plus tard dans un délai d’un mois à compter de la communication par l’employeur des informations sur lesdites mesures ».

Eu égard au bref délai laissé à l’employeur, celui-ci devant procéder à ces contrôles dès le 10 août dernier, les modalités de consultation ont été aménagées pour que l’employeur puisse agir sans tarder et consulter le CSE après la mise en place de ces mesures de contrôle.

Dans le cadre du Q/R du Ministère du Travail sur le Pass Sanitaire publié le 9 août et mis à jour le 18 août 2021, il est indiqué que si les mesures de contrôle ayant été normalement mises en place le 10 août avec une information « sans délai » la consultation devrait être formalisée d’ici le 10 septembre 2021.

 

L’illustration du Q/R confirme l’urgence d’organiser cette consultation dans les meilleurs délais.

  • La nature de l’information consultation du CSE concernant le contrôle du Pass sanitaire

L’information et consultation du CSE sur le contrôle du Pass sanitaire a pour objectif principal de préciser :

  • La détermination des salariés dans l’établissement soumis à l’obligation de disposer d’un « Pass sanitaire » ou d’une vaccination complète pour le secteur médico-social (Q/R p.5 à 8) ;
  • La détermination des salariés qui assureront le contrôle des pièces justificatives (Q/R p.12).

Le protocole sanitaire en entreprise insiste sur le fait que « les employeurs doivent porter une attention particulière aux salariés chargés de vérifier la validité du Passe sanitaire en adaptant en tant que de besoin l’évaluation des risques aux difficultés spécifiques liées à cette activité et en apportant à ces salariés l’accompagnement adapté pour faire face aux difficultés éventuelles. Ces mesures sont prises dans le cadre habituel fixé par l’article L.4121-3 du Code du travail »

Il s’agit donc de prendre en compte les difficultés que peuvent rencontrer ces salariés dans l’exercice de ce contrôle. L’actualité a fait état de plusieurs faits divers sur les réticences, voire l’agressivité à l’encontre du personnel astreint à cette obligation de contrôle.

  • Les modalités des contrôles du public, des usagers et du personnel (Q/R p12 à 14).

Il convient de préciser les outils mis à disposition pour assurer ces contrôles, tel l’usage de smartphone pour la lecture des QR Code (téléphone professionnel / personnel).

Pour le contrôle du personnel, l’employeur ne pouvant pas conserver le QR Code, un dispositif de conservation du résultat de l’opération de vérification doit être mis en place.

Absence de force probante de la simple copie d’un testament olographe

Se prévalant d’un testament olographe établi à son bénéfice portant sur une parcelle sur laquelle était établi un temple, une partie a sollicité l’expulsion de l’association tamoule y exerçant son culte.

L’original du testament n’était pas versé au débat mais sa copie, ainsi qu’une attestation notariée selon laquelle l’acte de disposition à cause de mort était établi.

La Cour d’appel dénie toute force probante à la copie du testament et rejette en conséquence les demandes du prétendu propriétaire.

Ses ayants droit se pourvoient cassation et reprochent à la Cour d’appel de s’être abstenue d’examiner l’attestation notariée et de s’être bornée à faire état de la seule production de copies de ce testament olographe pour le priver de toute force probante.

La Cour de cassation, pour qui les juges du fond n’étaient pas tenus d’examiner l’attestation notariée, rejette le pourvoi en ces termes :

« La Cour d’appel, devant qui [les demanderesses au pourvoi] n’ont pas soutenu que l’original du testament n’aurait pas été conservé, a exactement retenu que cet original était seul de nature à établir l’existence du testament au jour du décès du testateur dès lors que sa copie était contestée ».

En effet, pour la Cour de cassation, la partie qui se prévalait du testament ne précisait pas si l’original existait encore, et ce alors même qu’en vertu de l’article 1379 alinéa 3 du Code civil, « si l’original subsiste, sa présentation peut toujours être exigée ».

Or, et comme le rappelle la Cour de cassation, celui qui prévaut d’un testament olographe doit nécessairement en produire l’écrit original et qu’à défaut, et de jurisprudence constante en matière de preuve testimoniale (résultant notamment de l’ancien article 1348 du Code civil), la preuve de l’existence d’un tel acte par un autre moyen n’est admise qu’en cas de force majeure ou cas fortuit justifiant que l’original ne peut être produit (Cass. Civ. 12 déc. 1859, DP 1860, I, p. 334 ; Cass,. req., 15 nov. 1926, DH 1926, p.545).

 

Manquement du maître d’œuvre à son devoir de conseil : désordres apparents à la réception

Cette décision vient illustrer l’obligation de conseil du maître d’œuvre vis-à-vis du maître d’ouvrage dans le cadre de l’exécution de sa mission d’assistance lors des opérations de réception, en ce compris la levée des réserves.

Dans cette affaire, la commune de Saint-Avre avait demandé au tribunal administratif de Grenoble : de condamner solidairement sur le fondement de la garantie décennale plusieurs sociétés au versement d’une somme de 239 114,86 euros au titre des travaux de reprise des désordres des bordures de trottoir du lotissement Chanet du Rivet II, et 22 607,76 euros au titre des honoraires du maître d’œuvre y afférents

Par un jugement n° 1605761 du 9 mai 2019, le tribunal administratif de Grenoble avait  rejeté sa demande. La commune avait alors interjeté appel de ce jugement.

Selon un principe bien connu, la responsabilité contractuelle du maître d’œuvre peut être recherchée pour manquement à son devoir de conseil lorsque celui-ci s’est abstenu d’attirer l’attention du maître d’ouvrage sur des désordres affectant l’ouvrage et dont il pouvait avoir eu connaissance en cours de chantier (Voir par exemple CE, 8 juin 2005, n° 264490 ; CE, 10 décembre 2020, n° 432782 déjà cité dans notre lettre d’actualité juridique de février 2021).

En effet, le maître d’ouvrage peut, en raison de ce manquement, être privé de la possibilité de refuser la réception des ouvrages ou de l’assortir de réserves, et ainsi subir un préjudice.

Pour retenir la responsabilité du maître d’œuvre, la Cour retient que :

« […] En l’espèce, la Selarl Vial, maître d’œuvre, dont la mission AOR impliquait d’assister le maître d’ouvrage lors des opérations de réception, a nécessairement commis un manquement à son devoir de conseil en proposant la levée des réserves alors que les travaux concernant la reprise des joints des bordures et des bordures cassées n’avaient pas été réalisés ».

Ce manquement n’est pas sans conséquence puisque, dès lors que les désordres affectant les trottoirs étaient apparents à la réception, le maître d’ouvrage ne pouvait pas rechercher la responsabilité décennale des constructeurs.

De plus, le maître d’œuvre est ici partiellement exonéré de sa responsabilité contractuelle, à hauteur de 50 %, en raison de la négligence fautive du maître d’ouvrage lors de la levée des réserves, et est condamné à lui verser la somme de 119.557,43 euros (voir par exemple CE, 20 mai 2009, n° 296628 ; CE, 7 mars 2005, n° 200454) :

 

« 9. Eu égard au caractère apparent des désordres dans les conditions décrites au point 3, le maître de l’ouvrage a commis une négligence fautive en acceptant de lever les réserves sans s’assurer que les travaux de reprise des bordures cassées et des joints des bordures avaient bien été réalisés, qui est de nature à exonérer partiellement la Selarl Vial de sa responsabilité […] ».

 

Ainsi, quand bien même le maître d’ouvrage serait assisté d’un maître d’œuvre avec une mission AOR[1], celui-ci ne doit pas négliger les opérations de réception, d’autant plus s’il a eu connaissance en cours de chantier de l’existence de désordres, au risque de se voir imputer une part de responsabilité, parfois non négligeable, dans la survenance de son préjudice.

Ainsi, les appels en garantie ont été rejetés : « […] le préjudice subi par le maître d’ouvrage qui a été privé de la possibilité de refuser la réception des ouvrages ou d’assortir cette réception de réserves, du fait d’un manquement du maître d’œuvre à son obligation de conseil, et dont ce dernier doit réparer les conséquences financières, n’est pas directement imputable aux manquements aux règles de l’art commis par les entreprises en cours de chantier. Il en résulte que dans une telle hypothèse, les appels en garantie formulés par les maîtres d’œuvre à l’encontre des entreprises chargées de la réalisation des travaux ne peuvent être que rejetés ».

 

 

[1] Assistance apportée au maître de l’ouvrage lors des opérations de réception

Manquements du maître d’œuvre : absence de vérification des projets de décomptes mensuels

Cette décision vient rappeler que la réception sans réserve n’empêche pas le maître d’ouvrage de rechercher la responsabilité de son maître d’œuvre en cas de manquement à son obligation de vérification des projets de décomptes mensuels par rapport aux prestations réellement exécutées.

En effet, il n’existe qu’une extinction partielle de la responsabilité contractuelle du maître d’œuvre après la réception des travaux, notamment en ce qui concerne le contrôle des situations de travaux et l’établissement des décomptes des intervenants (voir par exemple CE, 1er octobre 1993, n° 60526). 

C’est pourquoi, la Cour écarte logiquement la fin de recevoir soulevée par la maîtrise d’œuvre :

« […]la réception de l’ouvrage ne met fin aux rapports contractuels entre le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre qu’en ce qui concerne les prestations indissociables de la réalisation de l’ouvrage, au nombre desquelles figurent les missions de conception de cet ouvrage. En l’espèce, les prestations pour lesquelles le département recherche la responsabilité de la maîtrise d’œuvre portent sur le contrôle des factures mensuelles des entreprises en charge des travaux en cours de chantier et non sur la conception de l’ouvrage. Elles sont donc dissociables de la réalisation de l’ouvrage. Cette fin de non-recevoir, réitérée en appel, doit donc être écartée ».

Elle retient également le bien-fondé de l’action en responsabilité dirigée contre le maître d’œuvre, lequel n’a pas, alors même qu’il était chargé d’une mission de direction de l’exécution des travaux, contrôlé les acomptes versés par rapports aux prestations réalisées.

Le trop-perçu n’était pas négligeable : lors de la situation établie en 2014, il a été constaté que l’entreprise de travaux n’avait réalisé que pour 567.453,70 euros TTC de travaux de son marché mais que les acomptes mensuels visés et transmis par le maître d’œuvre au maître d’ouvrage pour paiement s’élevaient à 889.968,40 euros TTC.

Pour autant, une faute exonératoire du maître d’ouvrage à hauteur de 30 % est retenue, peut-être un peu sévèrement par la juridiction :

« Le département avait donc connaissance dès cette date des difficultés de son co-contractant, même s’il ne pouvait en connaître l’ampleur. Il aurait pu s’enquérir dès cette époque de l’exécution du marché et vérifier l’absence de trop-perçu qu’il n’a fait constater que trois mois plus tard. Il sera fait une juste appréciation de cette imprudence du maître d’ouvrage en limitant la responsabilité de la maîtrise d’œuvre à soixante-dix pour cent du montant du préjudice ».

Il est vrai que ce dernier était informé du placement en procédure de redressement judiciaire de l’entreprise de travaux et aurait sans doute pu se montrer plus diligent.

Pass sanitaire : les nouvelles règles s’imposant aux salariés et agents publics

Depuis le 30 août 2021 et au moins jusqu’au 15 novembre 2021, la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire impose la présentation du pass sanitaire à 1,8 million de professionnels « travaillant dans les établissements où il est demandé aux usagers », a précisé le ministère du Travail.

Cette obligation sera étendue pour les salariés de moins de 18 ans à compter du 30 septembre 2021.

La liste de établissements concernés n’a cessé d’être modifiée depuis les différentes annonces sur le projet de loi sur le pass sanitaire et sa promulgation à travers la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire avec un dernier rebondissement lié à la publication le 27 août du décret du 26 août 2021 n° 2021-1118, excluant le secteur de la protection de l’enfance de cette obligation de présentation du pass sanitaire.

A cette liste des établissements concernés (1), il convient d’analyser les conséquences pour les salariés dans la mise en œuvre de ces nouvelles règles de présentation du pass sanitaire voire de l’obligation vaccinale (2) et les sanctions pour les employeurs et les salariés ne respectant pas ces mesures (3).

 

1) Les établissements concernés par l’obligation de présentation du pass sanitaire pour leur personnel

L’exigence d’un pass sanitaire s’applique aux salariés des établissements qui exigeaient un tel pass sanitaire aux participants, visiteurs, spectateurs, clients ou passagers pour accéder aux établissements, lieux, services et évènements suivants :

  • les activités de loisirs : salles d’auditions, de conférences, de projection, de réunions, de concert et de spectacle, cinémas et salles d’exposition temporaire ; festivals ; évènements sportifs (manifestations sportives amateur en plein air), établissements sportifs clos et couverts ; établissements de plein air ; conservatoires et autres lieux d’enseignement artistique quand ils accueillent des spectateurs, à l’exception des professionnels et personnes engagées dans des formations professionnalisantes, bibliothèques (sauf universitaires et spécialisées), manifestations culturelles organisées dans les établissements d’enseignement supérieur ; salles de jeux, escape-games, casinos ; parcs zoologiques, d’attractions et cirques, fêtes foraines comptant plus de 30 stands ou attractions ; chapiteaux, tentes et structures ;  navires et bateaux de croisière avec restauration ou hébergement ; évènement culturel, sportif, ludique ou festif organisé dans l’espace public ou dans un lieu ouvert au public susceptible de donner lieu à un contrôle de l’accès des personnes ;

 

  • les services et établissements de santé sociaux et médico-sociaux, à l’exclusion du secteur de la protection de l’enfance. Cette exclusion était sujette à débat car les dispositions de la loi du 5 août 2021 ne présentaient pas une telle exception mais la position contraire de la Direction Générale de la cohésion sociale (DGCS) dans son instruction du 13 août 2021 n’a pas manqué de semer le trouble. Ce point vient d’être régler à 3 jours de son entrée en vigueur à travers le décret du 26 août 2021 n° 2021-1118 publié le 27 août excluant expressément ce secteur de la protection de l’enfance de l’obligation du pass sanitaire.

 

  • les activités de restauration commerciale ou de débit de boisson, à l’exception de la vente à emporter de plats préparés. La restauration collective d’entreprise, ainsi que la restauration professionnelle routière et ferroviaire, le service d’étage des restaurants et bars d’hôtels sont des services accessibles sans qu’il soit nécessaire de présenter un pass sanitaire.
    Le dernier Q/R du Ministère du travail précise pour les restaurant que
    « Dès l’instant où l’espace de cuisine n’est pas ouvert au public et que le personnel de cuisine n’intervient jamais aux heures d’ouverture dans les espaces ouverts au public, il n’est pas soumis au pass sanitaire. En revanche, dès l’instant où ces conditions ne sont pas réunies (cuisine ouverte, personnel de cuisine servant les plats en salle ou participant au service), le personnel de cuisine devra disposer d’un pass sanitaire valide comme tout salarié du restaurant intervenant auprès du public » ;

 

  • les foires et salons professionnels ainsi que, lorsqu’ils rassemblent plus de 50 personnes, les séminaires professionnels organisés en dehors de l’entreprise (où s’exerce l’activité habituelle);

 

  • les déplacements de longue distance par transports publics interrégionaux, sauf en cas d’urgence ne permettant pas l’obtention d’un pass. Cela concerne les transports publics aériens, les transports ferroviaires à réservation obligatoire et les services collectifs réguliers de transports routiers ;

 

  • les grands établissements et centres commerciaux dont la surface commerciale utile cumulée est supérieure ou égale à 20 000 m² sur décision de restriction prise par le préfet de département lorsque les caractéristiques de ces établissements et la gravité des risques de contamination le justifient. Les restrictions doivent toutefois garantir l’accès aux biens et services de première nécessité.

 

A ce titre, une série de jugements rendus par différents Tribunaux administratifs se sont prononcés sur les arrêtés des Préfets concernant la mise en place du pass sanitaire au sein des centres commerciaux. Cet abondant contentieux de ces derniers jours a abouti à des résultats partagés. Ainsi le Tribunal administratif de Versailles a suspendu les arrêtés du Préfet des Yvelines puis celui de l’Essonne au motif que des aménagements n’étaient pas prévus pour accéder aux commerces qui vendent des biens de premières nécessité » (TA de Versailles 24 et 28 août 2021 n° 2107184 et n° 2107186). Cependant, une autre série de décisions a validé les restrictions liées à l’exigence du pass sanitaire pris par les Préfets du Rhône et de la Seine Saint Denis au regard de « la situation sanitaire et de l’intérêt de la santé publique conte la propagation de l’épidémie de covid -19 » (TA Lyon du 28 août 2021 n° 2106797 et n° 2106798 ; TA Montreuil 27 août 2021 n° 2111642 et TA Montreuil n° 211748 du 30 août 2021).

 

Le ministère du Travail précise que l’obligation de présentation du pass sanitaire ne s’applique pas seulement aux salariés mais à tous ceux qui interviennent sur le site, à savoir les « bénévoles, prestataires, intérimaires et sous-traitants », sauf lorsque leur activité se déroule « dans des espaces non accessibles au public » ou « en dehors des horaires d’ouverture au public. » (Q/R du 9 août 2021 p.7).

 

2) Les obligations des salariés travaillant et ou intervenant dans les établissements concernés

Les salariés travaillant dans les établissements précités et étant dans un espace en contact avec le public ont l’obligation de présenter un pass sanitaire ou une obligation vaccinale pour les personnels des établissements de soins, médico-sociaux et sociaux listés à l’article 12 de la loi précitée du 5 août 2021.

  • Concernant l’obligation de présentation du pass sanitaire

Le pass sanitaire correspond à trois situations distinctes :

  1. Un schéma vaccinal complet obtenu à l’issue d’une délai nécessaire après l’injection finale, soit :
    • 7 jours après la 2e injection pour les vaccins à double injection (Pfizer, Moderna, AstraZeneca) ;
    • 28 jours après l’injection pour les vaccins avec une seule injection (Johnson & Johnson) ;
    • 7 jours après l’injection pour les vaccins chez les personnes ayant eu un antécédent de Covid (1 seule injection).

 

  1. La preuve d’un test négatif de moins de 72h.

Les tests valides sont les test RT-PCR, antigéniques et désormais les autotests sous la supervision de professionnels,

Les délais en vigueur pour la validité des tests de 72h au moment de l’entrée sur le site de l’événement.

 

  1. Le résultat d’un test RT-PCR ou antigénique positif attestant du rétablissement de la Covid-19, datant d’au moins 11 jours et de moins de 6 mois.

Les tests positifs RT-PCR ou antigénique de plus de 11 jours et moins de 6 mois (pris en compte à date) permettent d’indiquer un risque limité de réinfection à la Covid-19.

La validité du pass sanitaire implique le respect d’une procédure qui génère une preuve dès la saisie du résultat par le personnel de santé dans le Système d’Informations de DEPistage (SI-DEP). Ce résultat et le code QR afférent peuvent être imprimés ou mis à disposition du patient via un mail et un SMS pour aller la récupérer sur le portail SI-DEP ou bien en l’important sur TousAntiCovid.

Ce dispositif ne peut en l’état de la législation être suppléé par un autre mécanisme.  Ces derniers jours des attestations « sur l’honneur de résultat négatif d’autotest » sont apparues et ils ne peuvent être acceptées par l’employeur. Une telle attestation n’est aucunement reconnue par la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 et le décret afférent n° 2021-1059 du 7 août 2021 qui précise que l’autotest doit être réalisé sur la supervision d’un professionnel de santé et aboutir à la saisie sur SI-DEP.

 

  • Concernant l’obligation vaccinale

Depuis le 9 août 2021, les personnels des établissements de soins, médico-sociaux et sociaux listés à l’article 12 de la loi relative à la gestion de la crise sanitaire du 5 août 2021 et précisé par décret du 26 août 2021 n° 2021-1118 publié le 27 août 2021, devront obligatoirement être vaccinés, sauf contre-indication médicale.

Cette obligation connait des aménagements jusqu’au 15 octobre prochain détaillé dans le Q/R du Ministère du travail , à savoir :

    • Du 9 août au 14 septembre 2021 inclus, les personnels concernés devront présenter un pass sanitaire conformément aux dispositions de droit commun précités.

 

    • Entre le 15 septembre et le 15 octobre inclus, une période transitoire est prévue par la loi. Lorsque le salarié a justifié d’une première dose de vaccin, il pourra continuer à exercer son activité à condition de présenter le résultat négatif d’un test virologique.

 

    • À compter du 16 octobre 2021 , les personnes concernées devront justifier, auprès de leur employeur, avoir un schéma vaccinal complet ou ne pas y être soumises en raison de contre-indication médicale ou d’un rétablissement après une contamination par le COVID-19.

Le Ministère du travail a précisé que les salariés intervenant pour des tâches ponctuelles dans ces établissements échappent à l’obligation vaccinale (QR p. 9). Ces derniers devront respecter l’ensemble des gestes barrières (QR p. 10). Une tâche ponctuelle est définie comme celle qui n’est pas liée à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Les travailleurs effectuant ces tâches n’exercent pas leur activité en lien avec le public. Cela peut concerner une simple réparation ou encore une livraison sur le site. En revanche, ne sont pas des tâches ponctuelles les services de nettoyage.

Les dispositions relatives à l’obligation vaccinale s’imposant aux employeurs et aux salariés selon les dispositions légales, le Ministère du travail précise qu’il n’y a pas d’obligation à les intégrer au règlement intérieur (QR p. 11).

 

  • La régularisation de la situation du personnel

En l’absence de pass sanitaire, les salariés, stagiaires et les agents publics : « bénéficient d’une autorisation d’absence pour se rendre aux rendez-vous médicaux liés aux vaccinations contre la covid-19.autorisation d’absence pour se faire vacciner sur (son) temps de travail avec maintien de (sa) rémunération ». (Art. 17 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire).

Le Q/R du Ministère du travail précise que si aucune durée maximale n’est fixée, celle-ci dépendant du temps nécessaire pour le salarié pour se rendre sur le lieu de vaccination où il a pu obtenir un rendez-vous. La durée d’absence devra toutefois être raisonnable au regard du temps de déplacement nécessaire, soit depuis le domicile du salarié, soit depuis son lieu de travail.

Ce dispositif d’absence rémunérée est réservé à la seule vaccination. Il n’y a aucune autorisation d’absence et encore moins un temps d’absence rémunérée pour les tests.

 

3) Les modalités de contrôle du pass sanitaire par l’employeur

Le Ministère du travail précise que c’est « l’employeur » qui « doit procéder à la vérification du respect » de l’obligation par le salarié. En cas de non-contrôle du pass sanitaire, l’entreprise risque en premier lieu une mise en demeure. En l’absence de régularisation sous 24 heures, l’employeur encoure un risque d’une fermeture administrative jusqu’à sept jours, puis une condamnation pouvant atteindre 9 000 euros d’amende en cas de récidive.

Par ailleurs c’est l’employeur qui est chargé de contrôler ses employés. Il lui revient « d’habiliter nommément les personnes autorisées à contrôler les justificatifs pour leur compte. Ils doivent également tenir un registre détaillant les personnes ainsi habilitées et la date de leur habilitation, ainsi que les jours et horaires des contrôles effectués par ces personnes » conformément au Q/R ministère du Travail.

 Dans chaque entreprise, « un référent » doit être désigné afin de faire respecter l’ensemble du protocole sanitaire. Dans les petites entreprises, c’est le dirigeant qui pourra s’en charger.

 

  • Une procédure dérogatoire d’information/consultation du CSE

Conscient que ces obligations de contrôle du pass sanitaire et de vaccination affectent l’organisation des entreprises et organismes, le Législateur a expressément prévu une procédure d’ information et consultation spécifique des représentants du personnel du comité social et économique (CSE) dans les entreprises de plus de 50 salariés.

Eu égard au bref délai laissé à l’employeur, celui-ci devant procéder à ces contrôles dès le 10 août dernier pour les usagers et clients de son établissement, les modalités de consultation ont été aménagées pour que l’employeur puisse agir sans tarder et consulter le CSE après la mise en place de ces mesures de contrôle.

Dans le cadre du Q/R du Ministère du Travail sur le pass sanitaire publié le 9 août et mis à jour le 18 août 2021, il est indiqué que si les mesures de contrôle ayant été normalement mises en place le 10 août avec une information « sans délai », la consultation devrait être formalisée d’ici le 10 septembre 2021.

 

  • La nature de l’information consultation du CSE concernant le contrôle du pass sanitaire

L’information et consultation du CSE sur le contrôle du pass sanitaire a pour objectif principal de préciser :

    • La détermination des salariés dans l’établissement soumis à l’obligation de disposer d’un « pass sanitaire » ou d’une vaccination complète pour le secteur médico-social  (Q/R p.5 à 8);

 

    • La détermination des salariés qui assureront le contrôle des pièces justificatives (Q/R p.12).

 

Le protocole sanitaire en entreprise insiste sur le fait que « les employeurs doivent porter une attention particulière aux salariés chargés de vérifier la validité du passe sanitaire en adaptant en tant que de besoin l’évaluation des risques aux difficultés spécifiques liées à cette activité et en apportant à ces salariés l’accompagnement adapté pour faire face aux difficultés éventuelles. Ces mesures sont prises dans le cadre habituel fixé par l’article L. 4121-3 du Code du travail »

Il s’agit donc de prendre en compte les difficultés que peuvent rencontrer ces salariés dans l’exercice de ce contrôle. L’actualité a fait état de plusieurs faits divers sur les réticences, voire l’agressivité à l’encontre du personnel astreint à cette obligation de contrôle.

 

    • Les modalités des contrôles du public, des usagers et du personnel (Q/R p12 à 14).

 

Il convient de préciser les outils mis à disposition pour assurer ces contrôles, tel l’usage de smartphone pour la lecture des QR Code (téléphone professionnel / personnel).

 

Pour le contrôle du personnel, l’employeur ne pouvant pas conserver le QR Code, un dispositif de conservation du résultat de l’opération de vérification doit être mis en place.

 

Il convient de noter que la Direction générale du travail a précisé que les inspecteurs du travail ne sont pas compétents pour contrôler la façon dont les employeurs et responsables des sites appliquent les obligations liés à la présentation du pass sanitaire et de l’obligation vaccinale qui relèvent de la politique de santé publique  (Note interne de la DGT du 11 août 2021).

Ils restent toutefois compétents pour s’assurer que la procédure d’information et la consultation du CSE a bien eu lieu, que les principes généraux de prévention devant figurer dans le protocole sanitaire en entreprise et des règles de prévention des risques biologiques sont bien respectées.

Par ailleurs, les inspecteurs du travail ne sont pas soumis à la présentation du pass sanitaire ou à l’obligation vaccinale pour assurer leur contrôle quand bien même ils interviendraient dans les établissement astreint à une telle obligation.

 

 

4) La gestion des salariés refusant de s’astreindre à l’obligation du vaccinal ou de présentation du pass sanitaire

Si des salariés concernés par la présentation d’un pass sanitaire refusent de le faire, le législateur a prévu plusieurs mesures dont l’articulation et l’issue d’un potentiel licenciement demeurent incertaines.

 

  • Suspension du contrat de travail immédiate à défaut de prise de congés par le salarié

L’article 1er de la loi du 5 août 2021 précise que le salarié soumis à l’obligation du pass sanitaire « ne présente pas les justificatifs, certificats ou résultats dont ces dispositions lui imposent la présentation et s’il ne choisit pas d’utiliser, avec l’accord de son employeur, des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés , ce dernier lui notifie, par tout moyen, le jour même, la suspension de son contrat de travail ».

Il apparait donc que face à un salarié ne présentant pas de pass sanitaire, l’employeur doit échanger avec lui sur la possibilité immédiate de prise de jours de congés ou à défaut le contrat de travail est immédiatement suspendu. Cette prise de congés ne peut être imposée par l’une des parties.

Le Ministère du travail a précisé que la suspension du contrat de travail ne vaut que pour les lieux pour l’accès desquels ces justificatifs sont exigés, au prorata du temps de travail que le salarié aurait dû effectuer dans ces lieux (QR p. 20).

Pour les salariés en CDD, la suspension du contrat ne reporte pas l’échéance du contrat, conformément à l’article L. 1243-6 du Code du travail (QR p. 21).

Un telle suspension du contrat de travail reste toutefois sans effet sur le mandat du représentant du personnel. Ce dernier continuera d’exercer ses mandats. Pour concilier la liberté syndicale et le respect des obligations sanitaires, l’employeur peut aménager les modalités d’exercice du dialogue social, notamment en facilitant les échanges à distance (QR p. 21).

Cette suspension du contrat de travail s’accompagne de l’interruption de la rémunération. Cette situation prend fin dès que le salarié produit les justificatifs nécessaires à l’exercice de ces fonctions.

Le salarié, qui voit sa rémunération suspendue au regard du défaut de son obligation vaccinale, doit bénéficier du maintien des garanties de protection sociale complémentaire (Loi du 5 août 2021 article 14, II, alinéa 2). Un tel maintien soulève de nombreuses questions sur la charge du financement répartie entre l’employeur et le salarié avec le recouvrement de cette cotisation salariale sur un bulletin de paie potentiellement négatif en l’absence de salaire versé. Cela revient à demander à l’employeur d’assurer l’avance de cette contribution due par son salarié. 

 

  • L’organisation d’un entretien au-delà d’une suspension de trois jours

L’article 1er de la loi du 5 août 2021 précise que si la suspension se « prolonge au-delà d’une durée équivalente à trois jours travaillés, l’employeur convoque le salarié à un entretien afin d’examiner avec lui les moyens de régulariser sa situation, notamment les possibilités d’affectation, le cas échéant temporaire, au sein de l’entreprise sur un autre poste non soumis à cette obligation ».

Les dispositions légales ou précisions ministérielles ne font état d’aucune disposition particulière s’agissant des modalités de convocation du salarié à cet entretien.  Le Q/R se limite à faire état d’un conseil de sécuriser la procédure pour éviter toute contestation de forme en convoquant le salarié. Dès lors,  en pratique la notification d’une convocation écrite par courrier recommandé passé le troisième jour implique dans les faits un entretien ne pouvant avoir lieu avant le sixième jour au regard des délais postaux.

 

  • L’hypothèse d’une nouvelle affectation du salarié et avenant au contrat de travail

L’employeur doit envisager la possibilité d’une affectation à des tâches qui ne nécessitent pas la présentation du pass, donc pas de contact avec le public.

Si une telle modification de l’affectation s’avère possible,  il convient de voir si elle modifie le contrat de travail (baisse de la rémunération, , changement de classification). Le cas échéant, elle devra être consolidé par un avenant signée par le salarié. Si cette affectation ne porte que sur un changement des conditions de travail, il est simplement conseillé de notifier par écrit les modifications de l’affectation du salarié pour information (QR p. 22).

Cette affectation sur un autre poste du salarié refusant de présenter un passe sanitaire ou de satisfaire à l’obligation vaccinale est présentée comme une simple faculté pour l’employeur. Cependant, cette faculté s’apparente à une obligation puisque le Ministère du travail précise que « tout doit être mis en œuvre pour régulariser la situation et, en cas de contentieux, la recherche d’affectation sera un des éléments que le juge pourra prendre en compte » (QR p. 23).

 

  • Le Placement en télétravail

Le QR du Ministère du travail indique que si l’employeur ne peut pas en principe imposer le télétravail, dans ce cadre d’urgence sanitaire « comme actuellement et jusqu’au 15 novembre, l’employeur peut imposer à son salarié de télétravailler un certain nombre de jours par semaine si ses activités sont éligibles à ce mode de travail » (QR p. 23).

La solution du télétravail parait peu opportune puisque les obligations liées à la présentation du pass sanitaire concernent principalement les fonctions ayant un contact avec le public soit les postes les moins propices à une organisation à distance.

Il convient également de noter que pour le personnel de santé soumis à l’obligation vaccinale, le FAQ du Ministère des solidarités et de la santé en date du 18 août 2021 indique qu’il « n’y a pas de distinction pour les personnes en télétravail, donc l’obligation vaccinale leur est applicable ».

Il y a ici une contradiction avec l’obligation vaccinale qui ne concerne légalement que les personnes « exerçant leur activité dans les établissements ». Face à cette incertitude, l’employeur pourrait se limiter à privilégier la suspension du contrat.

En pratique, si le télétravail peut limiter la désorganisation de son service, il semble opportun de favoriser cet aménagement en privilégiant la position développée par le Ministère du travail.

 

  • L’incertitude d’un licenciement sanctionnant l’absence de pass sanitaire

Le Questions-réponse du 9 août prévoit que, après échec de ces différentes procédure de régularisation, « à l’issue et dans le cas d’une situation de blocage persistante, les procédures de droit commun concernant les contrats de travail peuvent s’appliquer ».

Il n’est pas expressément fait état de la possibilité d’un licenciement car le sujet est discuté et a fait l’objet d’importants débats lors des discussions parlementaires.

La Ministre du travail, soutenue par une partie de la doctrine, affirme que cette possibilité d’un licenciement existe. Ses opposants rappellent que le Parlement a expressément rejeté dans le projet de loi, la création d’un motif de licenciement sui generis et de surcroît le Conseil constitutionnel s’est fondé sur cette suppression pour censurer la disposition de la loi prévoyant la rupture anticipée des CDD et des contrats de mission.

Dès lors, s’il doit être renvoyé au droit commun du licenciement, il convient de prendre en compte les possibilité de licenciement en caractérisant le trouble occasionné au sein de l’entreprise et non pas uniquement du service occupé par le salarié (Cass. Soc., 26 juin 2018, n° 15-28.868).

Cette désorganisation est à rapprocher au situation où un employeur licencie un chauffeur qui ne dispose plus de son permis de conduire ou d’un salarié qui est incarcéré à la suite d’une condamnation pénale.

En pratique, l’employeur devra démontrer la désorganisation de son entreprise pendant cette absence présentée comme temporaire jusqu’au 15 novembre 2021. Cette situation implique de pouvoir démontrer qu’il n’a pas pu recourir à un contrat durée déterminée pour assurer le remplacement de son employé, que la réorganisation de son service, la nouvelle affectation du salarié ou encore la mise en place du télétravail n’ont pas été possibles ou concluantes.

Le renvoi au droit commun du licenciement n’offre pas de sérieuses garanties en cas de contentieux face à cette situation inédite d’une suspension temporaire du contrat de travail.

 

 

Pour la fonction publique, le flou persiste dans la mise en œuvre des dispositifs sanitaires

 

Le dispositif d’obligation vaccinale et de pass sanitaire s’impose pour l’essentiel selon les mêmes règles que celles applicables aux salariés, décrites ci-dessus : l’obligation vaccinale s’impose aux professionnels désignés par les textes, sans considération du statut de salarié ou d’agent public. La présentation d’un pass sanitaire valide s’impose en revanche au titre de l’établissement dans lequel les agents publics exercent leurs fonctions, qu’il soit de nature publique ou privée.

 

Le dispositif de suspension, à défaut pour l’agent d’avoir satisfait à ses obligations vaccinales ou sanitaires, est rédigé à l’identique de celui des salariés et s’impose donc selon les mêmes modalités : la suspension sans rémunération est impérativement adoptée par l’administration employeur lorsque l’agent ne justifie pas satisfaire à ses obligations sanitaires ou vaccinales. La possibilité d’un changement d’affectation temporaire doit également être examinée par l’administration pour les agents ne justifiant pas d’un pass sanitaire après trois jours de suspension (Article 1er, C.-2 de la loi du 31 mai 2021). Ceux concernés par l’obligation vaccinale restent en revanche suspendus et sans rémunération jusqu’à ce qu’ils s’y soient conformés (cf. Article 14, III de la loi du 5 août 2021).

 

Deux incertitudes importantes pèsent en revanche déjà sur les employeurs publics en particulier et peuvent être relevées :

 

  • D’une part, le régime de suspension créé par les textes précités étant un régime spécifique, qui n’est pas rattaché, notamment, à celui de la suspension disciplinaire prévu à l’article 30 de la loi du 13 juillet 1983, on ignore de quelle façon la suspension « sanitaire » s’articulera avec les droits à congés de maladie. L’agent en congé de maladie au moment de l’entrée en vigueur de l’obligation sanitaire peut-il, et doit-il, faire l’objet d’une suspension ? Surtout, l’agent suspendu produisant un arrêt de travail doit-il être placé en congé de maladie et sa rémunération rétablie ? Aucune réponse n’a pour l’heure été communiquée par les instructions et circulaires publiées.
  • D’autre part, alors que, comme mentionné plus haut, un processus clair a été défini pour les employeurs quant à leur obligation de consultation des institutions représentatives du personnel privés (consultation un mois après la mise en place des dispositifs), les textes demeurent silencieux sur ce point pour les employeurs publics, et les instructions et circulaires publiées n’en font pas davantage : la circulaire du 10 août 2021 émise par la DGAFP se borne ainsi à indiquer que : « l’attention des employeurs publics concernés est également appelée sur la nécessité d’entretenir un dialogue social régulier avec les organisations syndicales représentatives ». De même, le « questions / réponses à l’attention des employeurs et des agents publics », mis à jour sur ce point le 10 août 2021, en réponse à la question « La mise en place du contrôle du pass sanitaire nécessite-t-elle de consulter les organisations syndicales représentatives ? » donne une réponse similaire et malheureusement avare de précisions sur les obligations des employeurs. Ils « sont invités à entretenir un dialogue social régulier avec les organisations syndicales représentatives siégeant dans l’organisme consultatif compétent sur la mise en place opérationnelle de ce nouveau dispositif et dans le respect de leurs compétences en matière de consultation ».

 

Alors qu’à la lecture des textes, une consultation du comité technique comme du CHSCT devrait a priori s’imposer aux employeurs publics, rien ne leur permet de savoir comment satisfaire à cette obligation compte tenu du calendrier serré imposé par les textes pour la mise en place du pass sanitaire et de l’obligation vaccinale. Faut il considérer cette formalité impossible et l’administration dispensée totalement de la respecter, ou rechercher une consultation la plus rapide possible, y compris postérieurement à la mise en place des dispositifs de contrôle sanitaire ? Quelles conséquences d’une éventuelle carence sur ce point sur les mesures qui seront prise à l’encontre des agents publics défaillants ?

 

Le flou important qui pèse sur les obligations des employeurs publics dans cette nouvelle phase des mesures sanitaire appliquées aux ressources humaines depuis le début de la crise se maintient donc. Déjà pendant le mois d’août, alors que les textes et plusieurs acteurs du secteur établissaient que l’obligation vaccinale s’imposait aux personnels des crèches, la DGCL a publié, deux jours après l’entrée en vigueur de l’obligation, une mise à jour de sa circulaire, excluant ces personnels de l’obligation vaccinale. L’interprétation reste à ce jour douteuse et qui devra attendre la confirmation des juridictions, naturellement non liées par une publication dont la valeur juridique reste très incertaine malgré l’importance qui lui a été accordée depuis le début de la crise.

 

L’administration-employeur continue donc de naviguer à vue dans le brouillard des dispositifs sanitaires.

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Article écrit par Benoit Roseiro, avocat directeur. 

Focus sur la fonction publique rédigé par Lorène Carrère, avocate associée  &  Vincent Cadoux, avocat à la cour. 

Loi Climat & Résilience : quelles conséquences en matière d’aménagement commercial ?

Enfin promulguée !

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a été publiée au journal officiel ce 24 août 2021.

Se félicitant de la promulgation de la loi, Barbara Pompili indique « Nous y sommes ! Après deux années de travail intense, la transformation écologique de notre société va s’accélérer grâce à la loi Climat & Résilience. Riche de près de 300 articles, c’est un texte complet et ambitieux qui ancre durablement l’écologie dans notre modèle de développement. […] »

Issu de la Convention citoyenne pour le climat lancée par Emmanuel Macron en avril 2019 à la suite du Grand débat national, le projet de loi n° 3875 a été présenté en Conseil des ministres le 10 février 2021.

Le projet de loi est adopté par l’Assemblée Nationale le 4 mai 2021.

Il est ensuite modifié et adopté par le Sénat le 29 juin 2021.

Contre toute attente et après de vifs débats, députés et sénateurs ont finalement réussi à s’entendre dans le cadre de la commission mixte paritaire et les travaux de ladite commission ont ainsi abouti à un texte comportant 305 articles contre 69 dans le projet de loi déposé.

Le 20 juillet 2021, le Parlement a adopté le projet de loi Climat et Résilience avec 233 voix en faveur et 35 voix contre le projet.

Saisi par 79 députés, le Conseil constitutionnel a rendu sa décision le 13 août 2021[1] en validant en grande partie le projet de loi.

Forte de ses 305 articles, la loi s’articule en huit titres et rappelle dans son tout premier article (Titre I), l’engagement de l’Etat à respecter l’objectif européen de baisse d’au moins 55% des émissions des gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport à 1990 :

  • Titre I : Atteindre les objectifs de l’accord de Paris et du Pacte Vert pour l’Europe (Article 1er)
  • Titre II : Consommer (Articles 2 à 29)
  • Titre III : Produire et travailler (Articles 30 à 102)
  • Titre IV : Se déplacer (Articles 103 à 147)
  • Titre V : Se loger (Articles 148 à 251)
  • Titre VI : Se Nourrir (Articles 252 à 278)
  • Titre VII : Renforcer la protection judiciaire de l’environnement (articles 279 à 297)
  • Titre VIII : Dispositions relatives à l’évaluation climatique et environnementale (Articles 298 à 305)

Une centaine de décrets est annoncée.

Elle comporte, notamment, un titre V intitulé « Se Loger » dont les chapitres III et IV ont trait à la « lutte contre l’artificialisation des sols ».

L’instruction du gouvernement du 29 juillet 2019 relative à l’engagement de l’Etat en faveur d’une gestion économe de l’espace appelait déjà au renforcement de la mobilisation de l’élu local pour porter les enjeux de lutte contre l’artificialisation des sols et à la mise en place du principe « Zéro Artificialisation Nette » (ZAN) inscrit dans le plan biodiversité présenté à l’été 2018.

La loi pose le principe que le rythme d’artificialisation devra être divisé par deux d’ici 2030 et le « zéro artificialisation nette » atteint d’ici 2050 :

« Afin d’atteindre l’objectif national d’absence de toute artificialisation nette des sols en 2050, le rythme de l’artificialisation des sols dans les dix années suivant la promulgation de la présente loi doit être tel que, sur cette période, la consommation totale d’espace observée à l’échelle nationale soit inférieure à la moitié de celle observée sur les dix années précédant cette date. Ces objectifs sont appliqués de manière différenciée et territorialisée, dans les conditions fixées par la loi ».[2]

Elle inscrit expressément cet objectif à l’action des collectivités publiques en matière d’urbanisme par l’ajout sous l’article L. 101-2 du code de l’urbanisme d’un 6° bis relatif à « La lutte contre l’artificialisation des sols, avec un objectif d’absence d’artificialisation nette à terme »[3].

Est inséré un nouvel article L. 101-2-1 du Code de l’urbanisme ainsi rédigé :

« Art. L. 101-2-1. – L’atteinte des objectifs mentionnés au 6° bis de l’article L. 101-2 résulte de l’équilibre entre :

  1. La maîtrise de l’étalement urbain
  2. Le renouvellement urbain
  3. L’optimisation de la densité des espaces urbanisés
  4. La qualité urbaine
  5. La préservation et la restauration de la biodiversité et de la nature en ville
  6. La protection des sols des espaces naturels, agricoles et forestiers
  7. La renaturation des sols artificialisés ».

La notion d’artificialisation est désormais définie juridiquement sous ce même article :

« L’artificialisation est définie comme l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage ».

La notion de friche qui figurait parmi les surfaces artificialisées dans le projet de loi adopté par le Sénat ne figure plus dans la loi publiée.

La loi précise qu’il faut entendre par « friche » au sens du Code de l’urbanisme « tout bien ou droit immobilier, bâti ou non bâti, inutilisé et dont l’état, la configuration ou l’occupation totale ou partielle ne permet pas un réemploi sans un aménagement ou des travaux préalables. Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret ».[4]

La « renaturation » est quant à elle définit de la manière suivante :

« La renaturation d’un sol, ou désartificialisation, consiste en des actions ou des opérations de restauration ou d’amélioration de la fonctionnalité d’un sol, ayant pour effet de transformer un sol artificialisé en un sol non artificialisé.»[5]

Il est également précisé qu’un décret en Conseil d’Etat « établira notamment une nomenclature des sols artificialisés ainsi que l’échelle à laquelle l’artificialisation des sols doit être appréciée dans les documents de planification et d’urbanisme. »

Au sein des titres III et V figurent plusieurs mesures qui concerne directement l’aménagement commercial.

Que contient le texte publié en matière d’aménagement commercial ?

A la suite de l’instruction du gouvernement du 29 juillet 2019 relative à l’engagement de l’Etat en faveur d’une gestion économe de l’espace, le Premier Ministre Jean Castex rappelait, dans une circulaire datée du 24 août 2020 sur le rôle des préfets en matière d’aménagement commercial, que « la lutte contre l’artificialisation des sols est en effet un des objectifs assignés à l’aménagement commercial : les projets, pour être autorisés, ne doivent pas compromettre cet impératif ». Il leur est « demandé de faire usage des pouvoirs dont ils disposent en la matière pour lutter contre l’artificialisation des sols générée par les équipements commerciaux soumis à autorisation d’exploitation commerciale. »

Aussi la loi prévoit-elle en son article 215 un principe général d’interdiction de toute nouvelle autorisation d’exploitation commerciale portant sur un projet qui engendrerait une artificialisation des sols.

Cette interdiction (1) comporte toutefois certaines dérogations (2) assujetties à une procédure pour le moins floue (3).

La loi élargit la faculté d’auto-saisine prévue à l’article L. 752-4 du Code de commerce (4).

La loi renforce également les obligations en matière de performances énergétiques et environnementales des bâtiments commerciaux. (5)

La loi ne soumet finalement pas les entrepôts consacrés au commerce électronique à autorisation d’exploitation commerciale. (6)

 

1. Un principe général d’interdiction de toute nouvelle autorisation d’exploitation commerciale générant une artificialisation du sol

La loi fixe un principe général d’interdiction de toute nouvelle autorisation d’exploitation commerciale portant sur un projet (création ou extension) qui entraînerait une artificialisation des sols au sens du 9ème alinéa de l’article L. 101-2-1 du Code de l’urbanisme, c’est – à- dire qui « engendrerait une altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage. » [6]

A contrario, tout projet d’aménagement commercial qui ne génère pas d’artificialisation est autorisée.

La loi précise qu’est considérée comme « artificialisée », « une surface dont les sols sont soit imperméabilisés en raison du bâti ou d’un revêtement, soit stabilisés et compactés, soit constitués de matériaux composites ». [7]

Est considéré en revanche comme « Non artificialisée » : « une surface soit naturelle, nue ou couverte d’eau, soit végétalisée, constituant un habitat naturel ou utilisée à usage de cultures ».[8]

Plusieurs décrets doivent intervenir afin d’établir une nomenclature des sols artificialisés et précisant les modalités d’application du présent article ainsi que les projets considérés comme engendrant une artificialisation des sols du V de l’article L. 752-6 du code de commerce.

 

2. Une dérogation possible

Répondant à certains critères :

La loi prévoit néanmoins une procédure dérogatoire si le pétitionnaire démontre, à l’appui de l’analyse d’impact mentionnée au III de l’article L. 752-6 du Code de commerce que son projet obligatoirement :

  • s’insère en continuité avec les espaces urbanisés dans un secteur au type d’urbanisation adéquat,
  • répond aux besoins du territoire,
  • et qu’il obéit à l’un des 4 critères suivants :
    • l’insertion du projet dans le secteur d’intervention d’une opération de revitalisation de territoire (ORT) ou dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) ;
    • l’insertion du projet dans une opération d’aménagement au sein d’un espace déjà urbanisé, afin de favoriser notamment la mixité fonctionnelle du secteur concerné ;
    • la compensation par la transformation d’un sol artificialisé en sol non artificialisé, au sens de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 101-2-1 du Code de l’urbanisme ;
    • l’insertion au sein d’un secteur d’implantation périphérique ou d’une centralité urbaine identifiés dans le document d’orientation et d’objectifs (DOO) du schéma de cohérence territoriale (SCOT) entré en vigueur avant la publication de la présente loi (soit avant le 24 août 2021) ou au sein d’une zone d’activité commerciale délimitée dans le règlement du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) entré en vigueur avant la publication de la même loi.

Le projet est donc soumis à 3 conditions cumulatives nécessaires :

  • une insertion en continuité de l’urbanisation
  • dans un secteur au type d’urbanisation adéquate
  • et répondant aux besoins du territoire

Auxquelles s’ajoutent l’un des quatre critères alternatifs précités :

  • l’insertion du projet dans le secteur d’intervention d’une ORT ou dans un quartier prioritaire (QPV) ;
  • l’insertion du projet dans une opération d’aménagement au sein d’un espace déjà urbanisé ;
  • la compensation par la transformation d’un sol artificialisé en sol non artificialisé ;
  • l’insertion au sein d’un secteur d’implantation périphérique ou d’une centralité urbaine identifiés dans le DOO du SCOT entré en vigueur avant la publication de la présente loi, soit avant le 24 août 2021 ou au sein d’une zone d’activité commerciale délimitée dans le règlement du PLUi entré en vigueur avant la publication de la présente loi, soit avant le 24 août 2021.

Parmi ces critères, d’ores et déjà le terme « type d’urbanisation adéquate » interroge. Qu’a entendu prendre en compte le législateur ? Le centre-ville, une zone d’activités économique, industrielle ou artisanales ? La réalité physique des lieux et/ou la possibilité juridique d’implanter tel projet dans tel secteur au regard des règles d’urbanisme applicables ?

Il a en de même s’agissant de la réponse aux besoins du territoire ? S’agit-il des besoins démographiques, économiques, de la nécessité de renforcer l’attractivité du territoire, de moderniser les équipements commerciaux ?

Réservée à certains projets seulement :

Certains projets seulement pourront bénéficier de cette dérogation.

Il s’agit des projets ayant pour objet :

  • la création d’un magasin de commerce de détail ou d’un ensemble commercial d’une surface de vente inférieure à 10 000 m² ;
  • l’extension d’un magasin de commerce de détail ou d’un ensemble commercial d’une surface de vente inférieure à 10 000 m² après réalisation du projet ;
  • L’extension de la surface de vente d’un magasin de commerce de détail ou d’un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil des 10 000 m² ou devant le dépasser par la réalisation du projet, dans la limite d’une seule extension par magasin ou ensemble commercial et sous réserve que l’extension de la surface de vente soit inférieure à 1 000 m².

 

3. Et selon une procédure encore floue

L’article 215 de la loi précise que pour les projets d’une surface de vente supérieure à 3 000 m² et inférieure à 10 000 m², la dérogation n’est accordée qu’après avis conforme du représentant de l’Etat.

La loi ne renseigne toutefois pas sur l’articulation de la procédure entre l’obtention de la dérogation, le dépôt de la demande et la séance de la CDAC devant statuer sur le projet. La dérogation doit-elle être obtenue antérieurement à l’instar de la dérogation prévue à l’article L. 142-5 du Code de l’urbanisme en l’absence de SCOT applicable ? le préfet se prononce-t-il lors de la séance de la CDAC ? …

Un décret viendra préciser les modalités du présent article.

 

4. Elargissement de la faculté d’auto-saisine pour l’ensemble des communes (L. 752-4)

La loi complète la faculté d’auto-saisine en élargissant à toute les communes (et non plus aux seules communes de moins de 20.000 habitants) la faculté pour l’assemblée délibérante de soumettre à l’avis de la CDAC un projet d’une surface de vente comprise entre 300 et 1 000 m² dès lors qu’il engendre une artificialisation du sol (L. 752-4)[9]

 

5. Le renforcement de la performance énergétique et environnementale des bâtiments commerciaux (toitures, parc de stationnement)

  • La loi impose que tout projet de construction d’un bâtiment commercial créant plus de 500 m² d’emprise au sol, de projet d’extension de la même surface ou de rénovation lourde de bâtiments ou parties de bâtiment intègre :
  • soit un procédé de production d’énergies renouvelables;
  • soit un système de végétalisation, garantissant un haut degré d’efficacité thermique et d’isolation et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité (article L. 171-4 du CCH) ;
  • et, sur les aires de stationnement associées lorsqu’elles sont prévues par le projet, des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation et préservant les fonctions écologiques des sols.[10]

Ces obligations seront réalisées en toiture du bâtiment ou sur les ombrières surplombant les aires de stationnement, sur une surface au moins égale à 30 % de la toiture du bâtiment construit ou rénové de manière lourde et des ombrières créées.

Ces dispositions entrent en vigueur le 1er juillet 2023.

Seules des contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales ou des conditions économiquement inacceptables permettront d’être exonéré de cette obligation (un décret précisera les conditions d’exonération).

La loi prévoit en outre que les parcs de stationnement de plus de 500 m² associés aux bâtiments ou parties de bâtiments concernés par l’article L. 171-4 précité ou les nouveaux parcs de stationnement extérieurs ouverts au public de plus de 500 m² doivent intégrer sur au moins la moitié de leur surface des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation.

Ils doivent également intégrer des dispositifs végétalisés ou des ombrières concourant à l’ombrage desdits parcs sur au moins la moitié de leur surface, dès lors que l’un ou l’autre de ces dispositifs n’est pas incompatible avec la nature du projet ou du secteur d’implantation et ne porte pas atteinte à la préservation du patrimoine architectural ou paysager.

Si lesdits parcs comportent des ombrières, celles-ci intègrent un procédé de production d’énergies renouvelables sur la totalité de leur surface.

Seules des contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales ou des conditions économiquement inacceptables permettront de s’affranchir de cette obligation (un décret précisera les conditions d’exonération).

Ces dispositions s’appliquent aux demandes d’autorisation de construction ou d’aménagement d’urbanisme déposées à compter du 1er juillet 2023.[11]

 

6. L’absence de soumission des entrepôts à la législation relative à l’urbanisme commercial

La soumission des entrepôts consacrés au commerce électronique au régime de l’autorisation d’exploitation commerciale revient comme un serpent de mer à chaque modification et réforme de l’urbanisme commercial.

De nombreux amendements ont été déposés tant devant l’Assemblée nationale que le Sénat afin de les soumettre.

Les sénateurs examinant ledit projet de loi Climat & Résilience ont voté, le 29 juin 2021, la soumission des entrepôts du e-commerce, ou plus précisément, « des locaux destinés à l’entreposage en vue de la livraison à toute personne physique de biens commandés par voie télématique » d’une surface de plancher supérieure 5 000 m² au régime de l’autorisation d’exploitation commerciale.[12]

La loi adoptée n’assujettira finalement pas la construction de ces entrepôts e-commerce à une autorisation d’exploitation commerciale.

Dans leur saisine du Conseil constitutionnel, les députés requérants reprochaient à l’article 215 adopté de ne pas s’appliquer aux entrepôts des entreprises de commerce en ligne, quand bien même leur implantation ou leur extension engendrerait une artificialisation des sols de sorte que, selon eux, il en résulterait une différence de traitement injustifiée entre ces entreprises et celles qui exercent une activité de commerce physique, en méconnaissance du principe d’égalité devant la loi.

Le Conseil constitutionnel n’est pas de cet avis et précise que :

« 10. Les dispositions contestées se limitent à introduire une nouvelle condition au régime de l’autorisation d’exploitation commerciale. Or, ce régime a pour objet principal d’assurer une répartition des surfaces commerciales favorisant un meilleur aménagement du territoire. Il résulte de l’article L. 752-1 du code de commerce qu’il ne s’applique pas aux entrepôts.

 11. Dès lors, les dispositions contestées ne créent, par elles-mêmes, aucune différence de traitement entre les entreprises de commerce en ligne et celles qui exercent une activité de commerce au détail.

 12. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi doit donc être écarté.

13. Par conséquent, le premier alinéa du paragraphe V de l’article L. 752-6 du Code de commerce, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est conforme à la Constitution ».[13]

***

Ces nouvelles dispositions s’inscrivent dans une succession de réformes intervenues ces dernières années[14] qui ont profondément modifié l’appréhension de la matière.

La loi Climat & Résilience constitue une nouvelle épreuve que l’ensemble des acteurs de l’urbanisme et de l’aménagement commercial devront surmonter en mobilisant tout leur talents et ressources intérieurs.

L’ aménagement commercial ou le pouvoir de la résilience ?

Par Céline Camus
Avocate, Seban Atlantique

 

[1] Décision n° 2021-825 DC du 13 août 2021

[2] Article 191

[3] Article 192

[4] Article 222 de la loi et nouvel article L. 111-26 du code de l’urbanisme

[5] Article 192

[6] Ajout d’un V sous l’article L. 752-6 du code de commerce

[7] Article 192

[8] Article 192

[9] Article 196

[10] Article 101 (création dans le code de la construction et de l’habitation d’un article L. 171-4)

[11] Article 101 (création dans le  code de l’urbanisme d’un article L. 111-19-1)

[12] Article 52 bis AAA

[13] Décision n° 2021-825 DC du 13 août 2021

[14] Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de Modernisation de l’Economie (loi LME) ; loi n° 2014-336 du 24 mars 2014 pour l’Accès au logement et un urbanisme rénové (loi ALUR) ;  loi n° 201-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprise (loi PINEL) ; loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (loi ELAN)

 

Projet de loi 4D et action sociale

Le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale dit « projet de loi 4D », introduit par Madame Jacqueline, Ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités, est actuellement en cours d’examen. Ci-après, il sera fait référence au texte tel qu’il a été adopté par le Sénat le 21 juillet dernier, après une première lecture. Le texte doit désormais être examiné et débattu par l’Assemblée nationale.

Deux mesures relatives à la cohésion sociale peuvent attirer notre attention, l’une relative à une expérimentation de renationalisation du RSA pour les départements le souhaitant, l’autre relative au recours obligatoire pour les départements au traitement automatisé d’appui à l’évaluation de la minorité pour les personnes se déclarant mineurs non accompagnés (MNA).

D’une part, le texte prévoit, à titre expérimental, la recentralisation du revenu de solidarité active (RSA) (article 35 du projet). Pour rappel, la gestion des aides individuelles de solidarité, dont le RSA, a été transférée aux départements. Le projet de loi 4D prévoit que l’Etat reprendra, dans le ressort des départements qui en feront la demande au plus tard trois mois avant le 1er janvier de l’année de mise en œuvre :

  • L’instruction administrative et la décision d’attribution du RSA et du revenu de solidarité et les éventuels réclamations et recours contentieux relatifs à ces prestations ;
  • Le contrôle administratif et le recouvrement des indus portant sur le versement de ces prestations ;
  • Le financement de ces prestations.

Cette recentralisation serait donc partielle puisque l’orientation et l’accompagnement des bénéficiaires (prévus à l’article L. 262-29 du Code de l’action sociale et des familles) continueraient de relever de la compétence des départements.

Cette expérimentation, encadrée par une convention entre le représentant de l’Etat dans le département et le président du conseil départemental, est prévue pour une durée limitée à cinq ans. Le Président du conseil départemental remettra annuellement au Préfet un rapport de suivi de sa mise en œuvre.

Concernant les modalités financières de l’expérimentation, le projet de loi 4D prévoit qu’elles doivent être déterminées en loi de finances. Etant précisé que ce sujet risque de ne pas être simple. En effet, déjà en 2016, les tentatives du gouvernement visant à réformer l’aide individuelle de solidarité avait échoué au vu du désaccord notamment portant sur l’année de référence devant servir de base au calcul de la somme à reverser à l’État dans le cadre de cette recentralisation.

Cette expérimentation de renationalisation du RSA est réclamée par certains départements, au vu du montant du reste à charge pesant lourdement sur leurs finances du fait notamment du nombre important d’allocataires.

La renationalisation du RSA doit démarrer dès le 1er janvier 2022 dans plusieurs départements, dont notamment la Seine-Saint-Denis. D’autres départements y voient au contraire une solution qui menace leurs compétences.

A noter que la Seine-Saint-Denis ne serait pas la première à connaître une recentralisation du RSA, l’expérimentation ayant déjà démarré en janvier 2019 pour trois départements ultramarins : la Guyane, Mayotte et la Réunion.

D’autre part, l’article 39 du projet de loi vise à rendre obligatoire la saisine du Préfet par les Présidents des conseils départementaux aux fins de demander une assistance à l’identification et à l’évaluation de la minorité des personnes se présentant comme MNA) et d’alimenter le fichier de renseignement du traitement automatisé de l’appui à l’évaluation de la minorité (AEM) tenu par l’Etat avec les données notamment biométriques des jeunes évalués. Cet article, qui modifie le Code de l’action sociale et des familles (CASF), conditionne ainsi le versement de la contribution forfaitaire de l’État à la satisfaction de cette nouvelle obligation.

Sur ces nouvelles dispositions relatives à l’évaluation des MNA, il est à noter qu’elles sont également prévues à l’article 15 du projet de loi relatif à la protection des enfants introduit par Monsieur Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du Ministre des solidarités et de la santé chargé de l’enfance et des familles, tel qu’il a été transmis au Sénat le 9 juillet dernier, après une première lecture par l’Assemblée nationale (insérant un nouvel article L. 221-2-4 au sein du CASF alors que le projet de loi 4 D les prévoient dans un nouvel article L. 221-2-3).

Au sujet de cette nouvelle obligation qui s’impose aux départements en matière d’évaluation des MNA, cf. https://www.seban-associes.avocat.fr/projet-de-loi-relatif-a-la-protection-des-enfants-le-gouvernement-souhaite-obliger-les-departements-a-contribuer-au-fichier-daide-a-levaluation-de-la-minorite-des-personnes-se-decl/.

Précisions sur le versement de la PFR aux personnels de direction

La PFR telle qu’elle est prévue par le décret n° 2012-749 du 9 mai 2012 relatif à la prime de fonctions et de résultats des corps ou emplois fonctionnels des personnels de direction et des directeurs des soins de la fonction publique hospitalière comprend deux parts :

  • Une part tenant compte des responsabilités, du niveau d’expertise et des sujétions spéciales liées aux fonctions exercées ;
  • Une part tenant compte des résultats de la procédure d’évaluation individuelle prévue par la réglementation en vigueur et de la manière de servir.

Le texte ne précise pas le sort de la prime en cas de maladie et une circulaire DGOS/DGCS n° 2012-241 du 19 juin 2012 relative à la mise en œuvre de la prime de fonctions et de résultats pour les personnels des corps de direction de la fonction publique hospitalière n’apportait aucune précision sur l’incidence de l’absence pour maladie dans la détermination de la PFR, si ce n’est qu’elle précisait que la part résultat, qui ne se verse pas mensuellement mais annuellement, pouvait être impactée par plus de trente jours de maladie.

Une nouvelle instruction du Centre national de gestion vient cependant de préciser ce que l’absence de texte garantissant le maintien de la PFR en maladie permettait de considérer : la part fonctions suit le traitement (et donc un passage à demi-traitement entraîne un abattement de cette part dans la même proportion) et la part résultat dépend de la procédure d’évaluation.

On ajoutera que si le maintien de la part résultat peut être envisagé il a été jugé cependant par la Cour administrative d’appel de Paris qu’un abattement proportionnel à la durée de l’absence peut aussi être appliqué (10 mars 2020, Monsieur C, req n° 18PA02949), ce que l’instruction ne précise pas à ce jour.

Le règlement d’un PLU peut, sous conditions, avoir pour effet d’interdire la plupart des constructions en zone U

Dans son PLU, la commune des Avenières a institué des zones Ud correspondant « aux villages, hameaux et groupements bâtis existants, situés en dehors de l’enveloppe urbaine du centre ».

Dans ces zones, les possibilités de construire sont très limitées dans la mesure où l’article Ud 1 a interdit les nouvelles constructions à usage de logements, les constructions et installations à vocation industrielle, les entrepôts non liés à une activité existante, les nouvelles exploitations agricoles, les terrains de camping ainsi que certains terrassements, tandis que l’article Ud 2, qui n’interdit pas les autres destinations de constructions, a admis à des conditions particulières les établissements artisanaux, l’extension limitée des constructions existantes, les piscines et les annexes, les constructions nouvelles après lotissement et les bâtiments d’activités existants.

Saisie de la régularité d’une telle limitation de construire (après rejet de la requête en première instance), la Cour administrative d’appel de Lyon a, par un arrêt du 19 novembre 2019, censuré les articles Ud 1 et Ud 2 au motif qu’un plan local d’urbanisme ne peut légalement fixer de règle générale ayant pour effet d’interdire la plupart des constructions nouvelles sur des terrains classés en zone U sans que cette inconstructibilité ne soit justifiée par un motif prévu par la loi.

Dans le cadre de son contrôle de cassation et en se fondant notamment sur les dispositions de l’article L. 151-9 du Code de l’urbanisme, le Conseil d’Etat annule l’arrêt ainsi rendu au motif que :

« En statuant ainsi, alors qu’il appartient à l’autorité locale de définir les partis d’urbanisme que traduit le plan local d’urbanisme dans le respect des dispositions du code de l’urbanisme, sans rechercher si les prescriptions retenues en l’espèce par le règlement des zones Ud situées en dehors de  » l’enveloppe urbaine du centre  » pouvaient être légalement adoptées compte tenu du parti d’urbanisme visant à  » recentrer l’urbanisation « , tel que défini notamment par les orientations générales et par les objectifs du projet d’aménagement et de développement durables, la cour a commis une erreur de droit ».

Autrement dit, le seul fait que le règlement applicable en zone urbaine interdise la plupart des constructions ne permet pas de le considérer comme illégal. Il convient, en effet, d’apprécier la légalité du règlement ainsi retenu au regard du parti d’urbanisme tel que défini notamment par le projet d’aménagement et de développement durables.

Promesse de vente et signature d’une convention d’occupation précaire dans l’attente de la vente définitive

Dans le cadre d’une vente immobilière, le transfert de la propriété et de la jouissance du bien ne s’opère que lors de la signature de l’acte authentique définitif de vente.

En pratique, il peut arriver que l’acquéreur, qui signe une promesse de vente sur un bien, souhaite entrer dans les lieux de manière anticipée avant la vente définitive et sollicite la signature d’une convention d’occupation précaire.

Dans cette hypothèse, il peut survenir une difficulté tenant au sort de la convention d’occupation précaire en cas de non-réalisation de la vente définitive et notamment au risque de requalification de cette convention en bail d’habitation, soumis aux dispositions protectrices de la loi du 6 juillet 1989.

Dans cet arrêt, le vendeur a consenti à l’acquéreur une promesse de vente portant sur un appartement ; le même jour, les parties ont conclu, suivant acte authentique, une convention d’occupation précaire portant sur l’appartement et autorisant l’acquéreur à l’occuper en attente de la signature de l’acte authentique de vente et de l’obtention du prêt immobilier, conditionnant la vente.

La vente définitive n’est pas intervenue et l’acquéreur s’est maintenu dans les lieux, contraignant le propriétaire à l’assigner aux fins d’expulsion, paiement d’une indemnité d’occupation et dommages et intérêts.

La Cour d’appel a constaté que l’acquéreur était occupant sans droit ni titre et a ordonné son expulsion.

L’acquéreur a formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

La Cour de cassation rejette le pourvoi et retient que la Cour d’appel a constaté que l’intention commune des parties, expressément consignée dans la convention, a été de permettre à l’acquéreur, moyennant une indemnité d’occupation, d’occuper les lieux durant neuf mois, en l’attente de la signature de l’acte authentique de vente et l’obtention du prêt immobilier conditionnant la vente et que :

« 6. Elle a ainsi caractérisé l’existence de circonstances particulières, indépendantes de la seule volonté des parties, permettant de retenir la qualification de convention d’occupation précaire et justifiant le rejet de la demande de requalification du contrat en bail d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989

[…] 10. D’autre part, la cour d’appel a souverainement retenu que le maintien dans les lieux de M. [B] avait empêché M. [V] de disposer de son bien, qu’il souhaitait vendre pour se procurer un capital, et que cette situation lui avait causé un préjudice non entièrement réparé par l’octroi d’une indemnité d’occupation. »

La solution retenue par la Haute juridiction confirme le caractère précaire de la convention d’occupation signée entre un propriétaire et l’acquéreur, bénéficiaire d’une promesse de vente, en l’attente de la signature de l’acte authentique de vente.

La requalification de la convention d’occupation précaire en bail d’habitation est exclue, compte tenu de l’intention commune des parties, consignée dans cette convention et de l’existence de circonstances particulières justifiant la précarité de la convention. 

Il convient ainsi d’être particulièrement attentif aux termes empruntés lors de la rédaction de la convention d’occupation précaire signée en parallèle de la promesse de vente et permettant à l’acquéreur d’occuper le bien de manière anticipée, avant la signature de la vente définitive.

L’adaptation temporaire du régime de dispense de formalités d’urbanisme applicable à certaines constructions

Le décret n° 2021-812 du 24 juin 2021 dispense temporairement de formalités au titre du Code de l’urbanisme les constructions temporaires et démontables à usage de résidence universitaire, de résidence sociale, de centre d’hébergement et de réinsertion sociale et de structure d’hébergement d’urgence, dont la durée d’implantation n’excède pas dix-huit mois.

Habituellement, l’article R. 421-5 du Code de l’urbanisme dispense de toute formalité, au titre de ce Code, les constructions implantées pour une durée n’excédant pas trois mois « en raison de la faible durée de leur maintien en place ou de leur caractère temporaire compte tenu de l’usage auquel elles sont destinées ».

Certaines constructions bénéficient cependant de délais allongés :

  • Un an pour le relogement et l’hébergement d’urgence ;
  • Une année scolaire ou la durée du chantier de travaux en ce qui concerne les classes démontables pour faire face à des capacités d’accueil limitées ;
  • La durée du chantier, en ce qui concerne les constructions temporaires directement nécessaires à la conduite des travaux et les installations liées à la commercialisation d’un bâtiment en cours de construction ;
  • Un an en ce qui concerne les constructions nécessaires au maintien des activités économiques ou des équipements existants, lorsqu’elles sont implantées à moins de trois cents mètres du chantier ;
  • La durée d’une manifestation culturelle, commerciale, touristique ou sportive, dans la limite d’un an, en ce qui concerne les constructions ou installations temporaires directement liées à cette manifestation.

Le décret n° 2021-812 du 24 juin 2021 porte le délai à 18 mois pour toutes les constructions dont l’implantation a débuté à compter du 27 juin 2021, dès lors qu’elles ont un usage exclusif de résidence universitaire, de résidence sociale, de centre d’hébergement et de réinsertion sociale et de structure d’hébergement d’urgence.

Ce régime temporaire à vocation à s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2022.

L’exigence relative au dispositif des conclusions d’appelant étendue à l’appelant incident

Aux termes de cet arrêt, la Cour de cassation rappelle d’abord ce qu’elle avait affirmé dans son arrêt de principe du 17 septembre 2020 (n° 18-23626), à savoir que :

« Il résulte des articles 542 et 954 du Code de procédure civile que lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l’infirmation ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement ».

Par le présent arrêt, la Cour de cassation étend officiellement cette exigence à l’appelant incident, rappelant que « que l’appel incident n’est pas différent de l’appel principal par sa nature ou son objet » et indiquant en conséquence que « les conclusions des intimés ne comportant aucune prétention tendant à l’infirmation ou à la réformation du jugement attaqué, ne constituaient pas un appel incident valable, quelle que soit, par ailleurs, la recevabilité en la forme de leurs conclusions d’intimés ».

La Cour de cassation étend ainsi opportunément sa jurisprudence, permettant une uniformisation de l’exigence qu’elle avait édictée dans son arrêt du 17 septembre 2020.

Reste à savoir quelle sera la sanction applicable à l’appelant incident dans l’hypothèse où il ne respecterait pas ce formalisme ; probablement une irrecevabilité de l’appel incident.

Codification de l’obligation de fixer un montant maximum dans un accord-cadre

Par un arrêt très remarqué du 17 juin 2021, la Cour de justice de l’Union Européenne a posé l’obligation de conclure un accord-cadre avec un montant maximum en valeur ou en quantité.

Cette décision a donc remis en cause les dispositions des articles R. 2121-8 et R. 2162-4 du Code de la commande publique qui rendaient facultative la conclusion d’un accord-cadre sans montant maximum.

Pour mémoire, le premier article disposait jusqu’à présent que :

« Pour les accords-cadres et les systèmes d’acquisition dynamiques définis à l’article L. 2125-1, la valeur estimée du besoin est déterminée en prenant en compte la valeur maximale estimée de l’ensemble des marchés à passer ou des bons de commande à émettre pendant la durée totale de l’accord-cadre ou du système d’acquisition dynamique.

Lorsque l’accord-cadre ne fixe pas de maximum, sa valeur estimée est réputée excéder les seuils de procédure formalisée ».

Et le second prévoyait quant à lui que « les accords-cadres peuvent être conclus :

  1.  Soit avec un minimum et un maximum en valeur ou en quantité ;
  2.  Soit avec seulement un maximum en valeur ou en quantité ;
  3.  Soit sans minimum ni maximum ».

Face à cette situation, la DAJ a rapidement annoncé, le 7 juillet 2021, que ces dispositions seraient prochainement modifiées afin de tirer les conséquences de la position du Juge européen.

Chose dite chose faite, le Gouvernement a adopté le décret n° 2021-1111 du 23 août 2021 dont l’article 2 prévoit que :

« I.- Le second alinéa de l’article R. 2121-8 est supprimé.

II.- L’article R. 2162-4 est ainsi modifié : 

1° Le 2° est remplacé par les dispositions suivantes :

« 2° Soit avec seulement un maximum en valeur ou en quantité. » ;

2° Le 3° est abrogé ».

Ainsi, comme cela est indiqué dans le décret, cet article 2 « a pour objet de tirer les conséquences de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 17 juin 2021, Simonsen & Weel A/S, aff. C-23/20, qui impose aux acheteurs d’indiquer dans les avis d’appel à la concurrence relatifs aux accords-cadres la quantité ou la valeur maximale des prestations qui pourront être commandées sur le fondement de l’accord-cadre ».

Toutefois, il est aussi précisé que ces nouvelles dispositions ne s’appliqueront qu’aux accords-cadres pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter du 1er janvier 2022.

Ceci étant, on recommandera vivement aux acheteurs de ne pas attendre cette date pour se conformer à ces nouvelles dispositions.

L’articulation entre les pouvoirs d’injonction du juge et l’obligation de reclassement de la collectivité en cas de suppression d’emploi

Dans une décision du 12 juillet 2021, le Conseil d’Etat précise la portée des pouvoirs d’injonction du juge à l’égard d’une collectivité ayant manqué à son obligation de recherche de reclassement à la suite d’une suppression d’emploi.

En l’espèce, la requérante occupait l’emploi de chargée de mission auprès du directeur des services techniques de la commune de Montmagny. Le conseil municipal de la commune a décidé de supprimer cet emploi à compter du 14 juillet 2014 et a consécutivement maintenue l’agent en surnombre par un arrêté du 8 juillet 2014.

Or, et conformément aux dispositions de l’article 97 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, l’autorité territoriale doit d’abord rechercher les possibilités de reclassement d’un agent en cas de suppression de son emploi, préalablement à son maintien en surnombre pour une durée d’un an en cas d’absence de poste vacant correspondant à son grade dans son cadre d’emplois.

La requérante a, en premier lieu, demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l’annulation de la délibération du 3 juillet 2014 portant suppression de son emploi ainsi que de l’arrêté du 15 juillet 2014 et à ce qu’il soit enjoint à la commune de procéder à sa réintégration sur un emploi correspondant à son grade, mais elle a vu sa requête rejetée.

Statuant sur l’appel formé par la requérante, en second lieu, la Cour administrative d’appel de Versailles a annulé le jugement ainsi que l’arrêté du 8 juillet 2014 prévoyant son maintien en surnombre au motif que la commune avait manqué à son obligation de reclassement et, par suite, elle a enjoint à la collectivité de lui proposer une affectation dans un emploi correspondant à son grade dans un délai de 2 mois. La commune de Montmagny s’est donc pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat.

Cette affaire permet au Conseil d’Etat de préciser les pouvoirs d’injonction du Juge lorsque celui-ci prononce l’annulation de la décision par laquelle la collectivité a placé un agent en surnombre en raison de la suppression de son emploi, sans s’être acquittée de son obligation de recherche de reclassement :

« Il lui incombe en principe seulement d’ordonner à l’autorité territoriale, sur le fondement des dispositions de l’article L. 911-2 du code de justice administrative, de rechercher s’il est possible de le reclasser sur un emploi vacant correspondant à son grade dans son cadre d’emplois ou, avec son accord, dans un autre cadre d’emplois. Ce n’est que s’il résulte de l’instruction qu’il existe, à la date à laquelle le juge statue, un emploi sur lequel le fonctionnaire peut être reclassé, compte tenu de son grade et des nécessités de service, que le juge enjoint à l’autorité territoriale, sur le fondement de l’article L. 911-1 du code de justice administrative, de proposer au fonctionnaire cet emploi ».

Si le Conseil d’Etat a considéré qu’il ne résultait pas de l’instruction que la collectivité disposait d’un poste vacant susceptible d’être proposé à l’intéressée, il appartient toutefois à la commune de Montmagny de procéder à cette recherche ou, avec l’accord de la requérante, de lui proposer un emploi correspondant à son grade mais dans un autre cadre d’emplois et ce, alors même que l’intéressée est désormais affectée sur un emploi au sein d’une autre collectivité.

L’effectivité d’une telle décision conduit à s’interroger : en l’espèce, la requérante a quitté depuis longtemps les effectifs de la commune et il paraît improbable qu’elle souhaite y revenir. Il s’agit là d’une fort délicate mise en œuvre du principe de la rétroactivité des décisions d’annulation du juge administratif.

Loi de finances rectificative 2021 : majoration du taux de la réduction d’impôt sur le revenu au titre des dons effectués au profit d’associations cultuelles.

Selon le régime de droit commun, les dons aux œuvres et organismes d’intérêt général comme les associations cultuelles, ouvrent droit, sous certaines conditions, à une réduction d’impôt sur le revenu de 66 % des dons effectués. Ils sont retenus dans la limite de 20 % du revenu imposable.

Sont notamment éligibles à cette mesure, les dons aux associations cultuelles et de bienfaisance ainsi que les établissements publics des cultes reconnus d’Alsace-Moselle.

Toutefois, l’article 18 de la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021 prévoit que ces dons ouvriront droit à une réduction d’impôt majorée de manière temporaire.

En effet, l’objectif est de soutenir les associations cultuelles, dont les revenus ont été impactés par les restrictions d’accès aux lieux de culte durant la pandémie de Covid-19, ayant entrainé une baisse du niveau des dons consentis lors des offices et célébrations.

Par conséquent, les dons effectués entre le 2 juin 2021 et le 31 décembre 2022 ainsi que les abandons exprès de revenus ou produits au profit de ces organismes ouvrent droit à une réduction d’impôt au taux de 75 %.

Le plafond des versements éligibles à ce titre est fixé à 554 € pour les versements réalisés en 2021, tandis que pour ce qui est des versements réalisés en 2022, ce plafond sera revalorisé dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu de l’année 2021.

Par ailleurs, il est prévu que ces versements ne seront pas pris en compte pour la détermination du plafond global de versements éligibles à la réduction d’impôt pour dons aux œuvres et organismes d’intérêt général, fixé à 20 % du revenu imposable.

Les dons effectués jusqu’au 1er juin 2021 inclus restent soumis aux règles de droit commun.