le 18/03/2021

Constitutionnalité de l’article L.145-14 du Code de commerce

Conseil constitutionnel, 5 mars 2021, Décision n° 2020-887 QPC

La règle :

L’indemnité d’éviction en matière de bail commercial est consacrée par l’article L.145-14 du code de commerce qui prévoit, s’agissant de son évaluation, que :

« Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre ».

La problématique :

Au regard de l’importance des sommes parfois allouées au preneur, la question prioritaire de constitutionnalité suivante a été soumise au Conseil constitutionnel :

« L’article L. 145-14 du code de commerce est-il conforme à la Constitution et au bloc de constitutionnalité, précisément au droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, à la liberté contractuelle garantie par l’article 4 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, à la liberté d’entreprendre protégée par l’article 4 du Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, au principe d’égalité garanti par l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 et les articles 1 et 6 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, et respecte-t-il la compétence réservée à la loi par la Constitution de 1958 ? »

La réponse du Conseil constitutionnel :

Le Conseil constitutionnel a d’une part considéré que l’indemnisation du locataire en cas de non-renouvellement vise un objectif d’intérêt général de poursuite de son activité et ainsi de viabilité des entreprises commerciales et artisanales.

D’autre part, le Conseil a souligné que l’article L.145-14 susvisé ne constituait pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété du bailleur qui ne doit indemniser que la valeur marchande du fonds et uniquement lorsque celui-ci a été exploité dans les 3 années avant l’expiration du bail ; le bailleur conservant en outre la possibilité de vendre son bien ou d’en percevoir un loyer.

Par ailleurs, le versement d’une indemnité d’éviction pour le preneur à bail commercial ne méconnaît pas le principe d’égalité devant la loi, les parties à bail commercial étant dans une situation juridique différentes compte tenu de l’exploitation d’un fonds justifiant que le traitement soit différent de celui des parties d’autres types de location.

Les mots « comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce déterminée selon les usages de la profession » figurant au second alinéa de l’article L. 145-14 du Code de commerce ont donc été jugés conformes à la Constitution.

Apport

La décision du Conseil constitutionnel exclut tout plafonnement de l’indemnité d’éviction.

Emilie Bacqueyrisses