Etat des lieux des principaux derniers textes d’application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte susceptibles d’intéresser les acteurs publics

D’abord, l’arrêté du 10 avril 2017 précise les critères selon lesquels une construction réalisée sous maîtrise d’ouvrage de l’Etat, d’un de ses établissements publics ou d’une collectivité territoriale peut être considérée comme étant à haute performance environnementale ou à énergie positive. Ce faisant, il complète le décret n°2016-1821 du 21 décembre 2016 relatif aux constructions à énergie positive et à haute performance environnementale sous maîtrise d’ouvrage de l’État, de ses établissements publics ou des collectivités territoriales (voir notre brève à ce sujet).

S’agissant des critères des bâtiments à haute performance environnementale, l’arrêté détermine le seuil des émissions de gaz à effet de serre que la construction d’un tel bâtiment ne doit pas dépasser, fixe la quantité minimale de déchets devant être valorisés pour la construction du bâtiment à 50% de la masse totale des déchets générés, exige que les produits et matériaux de construction, revêtements de mur ou de sol, peintures et vernis soient étiquetés A+ au sens de l’arrêté du 19 avril 2011, et définit également le taux minimal de matériaux biosourcés devant être compris dans la construction.

S’agissant des critères des bâtiments à énergie positive, l’arrêté du 10 avril 2017 précise que le bilan énergétique visé à l’article 2 du décret précité du 21 décembre 2016, dit « Bilan BEPOS », doit être inférieur ou égal au bilan énergétique maximal, dit « Bilan BEPOS max », lequel correspond « aux niveaux de performance « Energie 3 » ou « Energie 4 », définis par les ministères chargés de la construction et de l’énergie dans le document « Référentiel “Energie-Carbone” pour les bâtiments neufs » et publié sur leur site internet ».

Ensuite, deux programmations pluriannuelles de l’énergie (« PPE ») ont été adoptées, à savoir la PPE de la Réunion par décret n° 2017-530  du 12 avril 2017, et la PPE de la Guadeloupe par décret n° 2017-570 du 19 avril 2017, après que la PPE de la Guyane l’ait été par décret du 30 mars 2017. Toutes deux couvrent une première période de trois ans (2016-2018) et une seconde période de cinq ans (2019-2023). Les PPE de Mayotte et de la Martinique devraient être les prochaines PPE publiées.

Enfin, un bilan de l’application de la loi n°2015-992 relative à la transition énergétique pour la croissante verte a été présenté par la Ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer au Conseil des Ministres du 19 avril 2017. Selon ce bilan, la totalité des ordonnances prévues  dans cette loi ont été prises en Conseil des Ministres, et 95 % des décrets (sur les 162 à prendre) ont été publiés. Il ressort en outre de ce bilan qu’en pratique, depuis l’entrée en vigueur de cette loi, la puissance éolienne et solaire installée a augmenté de 25 %, les projets de chaleur renouvelable et de récupération aidés par le Fonds chaleur ont augmenté de près de 30 %, et 554 territoires à énergie positive existaient au mois d’avril 2017.

Publication de l’arrêté relatif aux études de dangers des digues

Un arrêté du 7 avril 2017, publié au Journal officiel du 19 avril suivant, précise les nouvelles règles applicables à la réalisation de l’étude de dangers des digues organisées en systèmes d’endiguement et des autres ouvrages conçus ou aménagés en vue de prévenir les inondations et les submersions.

Actuellement, c’est l’arrêté du 12 juin 2008 définissant le plan de l’étude de dangers des barrages et des digues et en précisant le contenu qui est applicable.

Or le « décret digues » du 12 mai 2015 (décret n° 2015-526 du 12 mai 2015 relatif aux règles applicables aux ouvrages construits ou aménagés en vue de prévenir les inondations et aux règles de sûreté des ouvrages hydrauliques) a modifié la règlementation des digues, qui seront progressivement réorganisées en système d’endiguement dans le cadre de la nomenclature de la loi sur l’eau (rubrique 3.2.6.0).

(Sur le décret digues, voir la brève parue dans la LAJEE du mois de juin 2015 )

Un système d’endiguement « comprend une ou plusieurs digues ainsi que tout ouvrage nécessaire à son efficacité et à son bon fonctionnement, notamment : – des ouvrages, autres que des barrages, qui, eu égard à leur localisation et à leurs caractéristiques, complètent la prévention ; – des dispositifs de régulation des écoulements hydrauliques tels que vannes et stations de pompage » (article R. 562-13 du Code de l’environnement).

L’approche est ainsi désormais globale et l’étude ne porte plus sur un ouvrage pris individuellement mais sur une zone à protéger (article R. 214-116 III du Code de l’environnement). Il a alors fallu adapter les règles applicables.

Le nouvel arrêté s’applique, dans ce cadre, aux études de dangers des digues organisées en systèmes d’endiguement, ainsi que des aménagements hydrauliques, constitués notamment, en application de l’article R. 562-18 du Code de l’environnement, de « l’ensemble des ouvrages qui permettent de stocker provisoirement des écoulements provenant d’un bassin, sous-bassin ou groupement de sous-bassins hydrographiques » (article 1er de l’arrêté).

Il identifie d’abord les différentes hypothèses dans lesquelles une étude de dangers est requise, régularisation d’ouvrages existants, avec ou sans travaux, modification d’ouvrages notamment, et indique quel état du système d’endiguement ou de l’aménagement hydraulique doit alors être pris en compte (configuration actuelle ou configuration résultant des travaux envisagés).

S’agissant des études de dangers des systèmes d’endiguement, l’arrêté précise également que « lorsque le risque d’inondation d’une zone résulte de l’existence de plusieurs cours d’eau ou lorsque la zone est exposée à la fois au risque d’inondation fluviale et au risque de submersion marine, l’étude de dangers du système d’endiguement précise la finalité de ce système et rappelle ceux de ces aléas (débordement d’un cours d’eau ou submersion marine) qui ne sont pas pris en compte à raison de la conception dudit système d’endiguement » (article 10 de l’arrêté).

De sorte que l’étude de dangers ne porte pas sur l’ensemble des aléas pouvant se réaliser sur la zone protégée, mais seulement sur ceux que le système mis en place tend à prévenir.

L’arrêté, ainsi que ses annexes, fixent ensuite le plan et le contenu des études de dangers des systèmes d’endiguement, d’une part (annexe 1), et des d’aménagements hydrauliques de stockage provisoire, d’autre part (annexe 2).

Dans le premier cas, le dossier de l’étude de dangers comporte trois parties, à savoir un résumé non technique, à destination du grand public, un « document A », qui présente le niveau de protection, la zone protégée et le système d’endiguement associé, mais aussi l’organisation de la surveillance et de l’entretien du système, et un « document B », qui détaille les analyses techniques et scientifiques qui permettent d’établir les performances du système d’endiguement.

Le dossier de l’étude de dangers des aménagements hydrauliques de stockage provisoire n’est pas organisé selon le même plan. Selon les termes du préambule de l’annexe 2, la circonstance que la protection de la zone protégée ne comporte aucune digue permet de simplifier la présentation et la réalisation de l’étude. Celle-ci comprend, outre un résumé non technique, quatre parties (que l’on retrouve également au sein des documents A et B des études de dangers des systèmes d’endiguement), à savoir l’indication des renseignements administratifs se rapportant à l’ouvrage, la présentation de l’objet de l’étude, la description précise de la zone protégée, de l’aménagement hydraulique et de ses fonctions de protection contre les inondations, ainsi qu’une cartographie.

Les études de dangers sont réalisées par des bureaux d’étude agréés (article R. 214-116 du Code de l’environnement), à la demande des collectivités compétentes en matière de GEMAPI, gestionnaires des systèmes d’endiguement et des aménagements hydrauliques concernés.

Les dispositions de l’arrêté du 7 avril 2017 entrent en vigueur le 1er juillet 2017. Celles de l’arrêté du 12 juin 2008 qui ne leur sont pas contraires demeurent applicables (article 18 de l’arrêté).

La prise en compte du risque de préjudice écologique pour caractériser l’urgence à suspendre un refus d’enregistrement d’une installation de stockage de déchets inertes

Dans une décision en date du 31 mars 2017, le Conseil d’Etat s’est notamment fondé sur le risque de préjudice écologique pour caractériser une situation d’urgence au sens de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative, et suspendre un arrêté préfectoral rejetant une demande d’enregistrement d’une installation de stockage de déchets inertes.

La Haute juridiction a plus précisément pris en compte un ensemble de critères pour prononcer la suspension de l’arrêté préfectoral en cause, à savoir les impacts financiers pour la société requérante, les conséquences en termes d’emploi, ainsi que « l’intérêt public lié à l’insuffisance, dans la région concernée, des sites de stockage de déchets inertes » et, pour finir, le « préjudice écologique susceptible d’être causé par report de [la] clientèle vers des sites plus éloignés ».

Outre que la prise en compte, par le Juge administratif, de l’impact financier d’une décision administrative sur une entreprise est relativement rare, le Conseil d’Etat a, dans cette décision, fait une application remarquable du préjudice écologique, dans la mesure où il l’applique pour se prononcer en faveur de l’exploitant d’un site de stockage de déchets inertes. Il démontre ainsi que préservation de l’environnement et activité économique ne doivent pas nécessairement être opposées.

Ce faisant, le Conseil d’Etat fait preuve de pragmatisme en considérant que la fermeture du centre de stockage, se traduirait, au regard du déficit d’installations similaires dans la région concernée, par de nouveaux flux de poids lourds transportant les déchets dans des centres plus éloignés, ce qui serait une source d’émissions de CO2 et altérerait la qualité de l’air.

L’appui financier à la redéfinition de la stratégie territoriale dans le champ de l’aide à domicile des départements et les métropoles et à la restructuration des services d’aide à domicile

INSTRUCTION N° DGCS/3A/CNSA/2017/103 du 21 mars 2017 relative aux modalités de répartition de la dotation prévue au X de l’article 34 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 destinée à la restructuration des services d’aide et d’accompagnement à domicile

Arrêté du 17 mars 2017 précisant les modalités de détermination de la hauteur et du volume des barrages et ouvrages assimilés aux fins du classement de ces ouvrages en application de l’article R. 214-112 du code de l’environnement

La loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017 a prévu dans son article 34-X la mise en place d’un fonds exceptionnel d’appui aux bonnes pratiques et d’aide à la restructuration des services d’aide à domicile (SAAD), afin de les accompagner ainsi que les conseils départementaux dans une démarche d’amélioration des pratiques et de soutien de la restructuration du secteur.

La loi prévoit en effet que la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) finance, dans la limite de 50 millions d’euros, un fonds d’appui à la définition de la stratégie territoriale dans le champ de l’aide à domicile, de soutien aux bonnes pratiques et d’aide à la restructuration des services d’aide et d’accompagnement à domicile intervenant auprès des mineurs et des majeurs de moins de vingt-et-un an, les personnes âgées et les personnes handicapées dans des conditions définies par arrêté conjoint des ministres chargés des affaires sociales et du budget. L’arrêté du 23 décembre 2016 relatif au financement du fond d’appui à la définition de la stratégie territoriale dans le champ de l’aide à domicile, de soutien aux bonnes pratiques et d’aide à la restructuration des SAAD, modifié par un arrêté du 3 mars 2017, a doté le fonds de 50 millions d’euros et a précisé les conditions d’éligibilité à ce fonds structuré en deux part complémentaires à savoir, d’une part, l’appui à la définition d’une stratégie territoriale par les conseils départementaux et les métropoles dans le champs de l’aide à domicile et le soutien aux bonnes pratiques entre les conseils départementaux et les SAAD pouvant consister en l’appui à des opérations de restructuration et, d’autre part, le soutien à la restructuration des SAAD du ressort des départements et des métropoles n’ayant pas déposé de demande d’aide ou n’ayant pas été retenu à ce titre. Les fonds correspondant à cette part sont délégués aux agences régionales de santé (ARS). L’arrêté du 23 décembre 2016 modifié permet de lancer les opérations de répartition de cette aide à la restructuration des services sans attendre l’issue de l’examen des demandes des conseils départementaux et des métropoles. Une instruction du Ministère des affaires sociales et de la santé et de la CNSA du 21 mars 2017 est venue préciser les règles de répartition des crédits de la dotation destinée à la restructuration des SAAD et de délégation de la première tranche de crédit à l’ARS de six millions d’euros. Cette aide se répartie à hauteur de cinq millions d’euros pour les SAAD situés dans le ressort d’un conseil départemental ou d’une métropole n’ayant pas déposé de demande d’aide avant le 20 janvier 2017 (liste de départements en annexe de la circulaire). Un second volet, versé au plus tard le 1er octobre 2017 par la CNSA à hauteur d’un million d’euros, auxquels s’ajoutera le montant des crédits restant, le cas échéant, après la signature des conventions entre la CNSA et les conseils départementaux, à répartir entre les SAAD pour lesquels les départements dont ils relèvent n’ont pas souhaité ou pu bénéficier du fonds. Chaque agence régionale de santé devra assurer la publicité de ce nouveau volet de restructuration du fonds. Les SAAD demandeurs d’une aide au titre du premier volet doivent déposer leur demande auprès de l’ARS le 29 juin 2017 au plus tard et les demandeurs au titre du deuxième volet devront déposer leur demande au plus tard le 29 novembre 2017.

Les modalités d’instruction des demandes et de versement de l’aide s’effectuent conformément à la circulaire interministérielle du 26 février 2013 relative aux modalités d’attribution de l’aide complémentaire exceptionnelle à la restructuration des services d’aide à domicile, les départements étant étroitement associés à l’instruction. 

Délégation de pouvoirs et désignation d’un représentant permanent au sein des sas

La Cour d’appel de Caen[1] vient de rendre un arrêt en date du 23 février 2017 qui confirme que le président, personne morale d’une société par action simplifiée (SAS), peut déléguer ses pouvoirs et désigner un représentant permanent.

Cette solution jurisprudentielle confirme une solution attendue par la pratique car ce représentant permanent n’était pas prévu par la loi.

Du point de vue de la personne morale présidente qui désigne son représentant permanent, cela s’analyse en une délégation de pouvoirs.

Le représentant permanent peut enfin être investi de pouvoirs larges, comprenant la relation avec les représentants du comité d’entreprise de la SAS (art. L. 2323-66 du Code du travail).

Lorsque la délégation devient générale, comme c’est le cas pour un représentant permanent, la question se pose différemment. Il est à noter que certains pouvoirs peuvent être conservés par le représentant légal de la personne morale à savoir les pouvoirs sociétaires que sont l’initiative des décisions collectives ou l’arrêté des comptes.

Certaines limites aux pouvoirs du représentant permanent sont également posées notamment en ce qui concerne les actes de disposition (art. 1155 nouveau du Code civil).

Enfin, il faut que les tiers aient connaissance de cette organisation particulière, et la meilleure solution réside en l’inscription sur l’extrait K-bis de la société, avec la désignation de la personne morale présidente, du nom de son représentant permanent.

C’est la solution apportée et consacrée par l’arrêt de la Cour d’appel  Caen.

 

Publication de l’ordonnance sur les propriétés publiques

On sait que la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (dite loi Sapin II) a autorisé le gouvernement à prendre par ordonnance diverses mesures qui portent sur le droit de la propriété publique. Soucieux d’aller vite, le gouvernement s’est mis à la tâche sans attendre : l’ordonnance n° 2017-562 du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques vient tout juste d’être publiée au Journal officiel. Elle renferme d’importantes mesures – parfois très attendues par les collectivités territoriales – et apporte des clarifications bienvenues. Certaines demeurent techniques mais de grande portée pratique (déclassement et cession de dépendances pourtant encore affectées à l’utilité publique,…), tandis que d’autres modifient grandement les usages du passé et suscitent bien des sujets nouveaux de réflexion : la mise en concurrence des autorisations domaniales en est naturellement l’illustration la plus notable.  Un sujet complet sera consacré à cette ordonnance dans la prochaine Lettre d’Actualité Juridique. Une conférence spécifiquement attachée à ce sujet est par ailleurs organisée au cabinet le jeudi 11 mai prochain.  

Nouveaux critères de décence (énergétique) du logement

Le décret n°2017-312 du 9 mars 2017 pris en application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 vient de modifier les caractéristiques de décence du logement fixées par le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 pour y intégrer l’étanchéité à l’air et l’aération.

S’agissant de l’étanchéité à l’air, le logement loué devra être protégé contre les infiltrations d’air parasites (ie chargées de poussières et de pollution). Les portes et fenêtres du logement ainsi que ses murs et parois donnant sur l’extérieur ou sur des locaux non chauffés devront présenter une étanchéité à l’air suffisante. Les ouvertures des pièces donnant sur des locaux annexes non chauffés devront être munies de portes ou de fenêtres. Les cheminées devront être munies de trappes.

Ce nouveau critère qui sera applicable à compter du 1er janvier 2018 ne concernera toutefois pas les départements d’outre-mer.

S’agissant de l’aération, à compter du 1er juillet 2018, le logement devra permettre qu’elle soit suffisante. Les dispositifs d’ouverture et les éventuels dispositifs de ventilation des logements devront être en bon état et permettre un renouvellement de l’air ainsi qu’une évacuation de l’humidité adaptés aux besoins d’une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements.

La performance énergétique a donc été pleinement intégrée aux caractéristiques du logement décent qui concerne également les logements sociaux.

Réforme du contentieux des décisions d’admission à l’aide sociale des départements

La loi de modernisation de la justice du XXIème siècle a apporté d’importantes modifications du contentieux de l’admission à l’aide sociale. Pour mémoire, l’article L. 134-1 du Code de l’action sociale et des familles prévoit que les décisions du président du conseil départemental et du représentant de l’Etat dans le département d’admission à l’aide sociale sont susceptibles de recours devant les commissions départementales d’aide sociale (CDAS), la Commission centrale d’aide sociale étant la juridiction d’appel des CDAS. Or, la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle supprime les CDAS (ainsi que le Tribunal des affaires sociales et le Tribunal du contentieux de l’incapacité) au profit de la création d’un pôle social de tribunaux de grande instance spécialement désignés. En application des futurs articles L. 142-3 du Code de la sécurité sociale et L. 134-3 du Code de l’action sociale et des familles qui entreront en vigueur, au plus tard le 1er janvier 2019 (dans l’attente de la publication d’un décret d’application de l’article 12 de la loi), les Tribunaux de grande instance spécialement désignés à cet effet connaîtront du contentieux de l’allocation différentielle aux adultes handicapés, de la prestation de compensation accordée aux personnes handicapées (PCH), des recours en récupération et les recours exercés à l’encontre des obligés alimentaires des bénéficiaires d’une prestation d’aide sociale. Le contentieux portant sur les autres prestations légales d’aide sociale relèvera des Tribunaux administratifs (RSA et APA). Les recours introduits à l’encontre des décisions prises par le Président du Conseil départemental et le Préfet en matière de prestations légales d’aide sociale doivent être précédées d’un recours administratif préalable obligatoire exercé devant la commission de recours amiable (visée à l’article L. 262-47du CASF) en ce qui concerne la prestation de revenu de solidarité active (RSA) et devant la commission de l’allocation personnalisée d’autonomie du département en ce qui concerne la prestation d’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Le futur article L. 134-2 du CASF maintient la possibilité pour le demandeur de l’aide, ses débiteurs d’aliments, l’établissement ou le service fournissant les prestations, le Président du Conseil départemental, le Préfet du département, les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole intéressés ou par tout habitant ou contribuable de la commune ou du département ayant un intérêt à la réformation de la décision. L’article précise en revanche la possibilité pour le requérant d’être assisté ou représenté par le délégué d’une association régulièrement constituée depuis cinq ans au moins qui œuvre dans les domaines des droits économiques et sociaux des usagers ainsi que dans ceux de la lutte contre l’exclusion et la pauvreté. Un décret devant intervenir au quatrième trimestre de l’année 2017 devrait préciser tant la date d’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions que leurs modalités d’application.

Le refus de paiement des travaux supplémentaires et la nécessité de réaliser les études de sol avant la remise de son offre

Dans le cadre de la construction de six logements pour jeunes, une collectivité territoriale confiait le lot n°1 « Terrassements -Voiries Réseaux Divers (VRD) – Gros œuvre béton  » à la société H. par la conclusion d’un marché à prix global et forfaitaire.

Durant l’exécution des travaux, la société H. informait le maître d’œuvre et le maître d’ouvrage de la nécessité de procéder à des travaux de terrassement et fondations supplémentaires afin d’assurer une bonne assise des fondations. Ces travaux présentant un caractère indispensable à la bonne exécution de l’ouvrage dans les règles de l’art ont été exécutés par le titulaire du lot et ont fait l’objet d’une demande de rémunération supplémentaire de la part de ce dernier pour un montant  de 44 842,20 euros.

A la suite du refus du maître d’ouvrage de verser à la société H. la somme demandée, cette dernière sollicitait la condamnation du maître d’ouvrage à payer les travaux supplémentaires devant le Tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon, lequel faisait droit à la demande du requérant.

Annulant cette décision, la Cour administrative d’appel de Bordeaux, par un arrêt en date du 16 février 2017, a jugé qu’il ressort clairement des stipulations du marché conclu par la société requérante que les sondages étaient au nombre des études d’exécution incombant au titulaire du marché en vue de la réalisation des ouvrages et « qu’il appartenait à l’entrepreneur d’apprécier la nature exacte du sol en réalisant une étude préalable à son offre et de vérifier à ses frais l’homogénéité et la solidité du terrain avec la précision requise d’un professionnel avisé en vue de la réalisation des travaux dans les règles de l’art ».

La Cour administrative d’appel ajoute que « les travaux réalisés par la société H., qui a négligé lors de la détermination de son offre de procéder à une étude de sol indispensable pour apprécier la consistance et le prix de son offre et dont elle avait la charge, ne peuvent pas être regardés comme des travaux supplémentaires ouvrant droit à un paiement ».

La Cour administrative d’appel a souhaité rappeler une nouvelle fois la stricte application des conditions autorisant le paiement de travaux supplémentaires réalisés par l’entrepreneur dans le cadre d’un marché à prix global et forfaitaire.

Publication du décret portant diverses dispositions en matière de commande publique

Attendu depuis plusieurs mois, le décret n° 2017-516 du 10 avril 2017 portant diverses dispositions en matière de commande publique est paru au Journal officiel le 12 avril dernier.

A la suite de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine et de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, le décret a pour objet d’alléger, de manière générale, les procédures de publicité et de mise en concurrence, de définir le champ d’application organique de l’obligation de recourir aux concours d’architectes et de préciser le régime applicable aux marchés publics des offices publics de l’habitat.

 En premier lieu, le décret du 10 avril 2017 a vocation à alléger, de manière générale, les procédures de publicité et de mise en concurrence.

Tout d’abord, le décret procède à la réduction des obligations pesant tant sur les candidats que sur les acheteurs lors de la phase de candidature. Ainsi, le décret substitue à différents documents auparavant exigés, notamment les extraits de cahier judiciaire, des déclarations sur l’honneur et renforce parallèlement la sanction de la production de faux renseignements ou documents.

Ensuite, le décret amoindrit les obligations pesant sur les acheteurs en matière de transparence. Désormais, seuls sont soumis aux obligations de publication des données essentielles les marchés dont la valeur estimée est égale ou supérieure à 25.000 euros. Ces obligations sont également assouplies en ce qui concerne les modifications des marchés.

Enfin, la réalisation d’une évaluation préalable du mode de réalisation du projet sera à nouveau uniquement nécessaire pour les seuls marchés de partenariat et non plus pour tous les marchés publics.

En deuxième lieu, le décret du 10 avril 2017 a pour effet d’inclure l’ensemble des acheteurs soumis à la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée dans le champ d’application organique de l’obligation de recourir aux concours. Sont désormais inclus l’ensemble des organismes HLM, en ce compris les offices publics de l’habitat lesquels, avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et ses décrets d’application, n’étaient pas soumis à cette obligation et considéraient pouvoir continuer à ne pas y être soumis.

En troisième lieu, le décret du 10 avril 2017 précise les procédures de passation applicables aux marchés publics des mêmes offices publics de l’habitat telles que prévues dans le Code de la construction et de l’habitation, notamment en ce qui concerne la composition et le fonctionnement des commissions d’appels d’offres des offices publics de l’habitat.

Le décret du 10 avril 2017 permet ainsi de répondre, en partie, aux besoins de sécurité juridique des différents acteurs de la commande publique.

Rattachement possible d’un ouvrage n’appartenant pas à une personne publique au domaine public

Dans cette affaire, le Conseil d’Etat considère que la collectivité propriétaire d’un ouvrage public est responsable des conséquences dommageables causées par un élément de cet ouvrage dont elle n’est pas propriétaire, s’il existe entre les deux un lien physique ou fonctionnel tel que le second doit être regardé comme un accessoire indispensable du premier. Il s’agissait en l’espèce d’un mur séparant une propriété privée d’un chemin rural revêtant le caractère d’un ouvrage public. Une habitante de la Commune qui avait procédé, à ses frais, aux travaux de consolidation de ce mur jugé dangereux, en demandait le remboursement auprès de la Commune. Le Juge fait droit à la demande d’indemnisation en précisant que le mur litigieux, qui n’appartenait pas à la Commune, devait être regardé comme un accessoire indispensable de l’ouvrage public constitué par le chemin rural.

La vente d’une parcelle du domaine privé appartenant à une personne publique échappe aux règles de mise en concurrence… Mais pas à la procédure à laquelle se soumet volontairement le vendeur !

Pour la vente d’une dépendance de son domaine privé, un centre hospitalier avait lancé une consultation à laquelle deux Sociétés avaient répondu avant d’en être évincées. Ces dernières ont alors introduit un recours à l’appui duquel elles soulevaient notamment le moyen tiré de la violation du principe d’égalité de traitement entre les candidats. Le Conseil d’Etat rappelle qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose à une personne morale de droit public autre que l’Etat de faire précéder la vente d’une dépendance de son domaine privé d’une mise en concurrence préalable. Toutefois, lorsqu’une telle personne publique fait le choix, sans y être contrainte, de céder un bien de son domaine privé par la voie d’un appel à projets comportant une mise en concurrence, elle est tenue de respecter le principe d’égalité de traitement entre les candidats au rachat de ce bien. En conséquence, le Conseil d’Etat accueille le moyen soulevé par les requérantes.

Vente parfaite d’un bien privé communal par délibération du conseil municipal

Par une délibération en date du 21 décembre 2006, le conseil municipal de la commune de Saint-Amand-les-Eaux (ci-après, la « Commune ») s’était prononcé favorablement sur l’offre de la SARL Bowling du Hainaut qui souhaitait lui acheter des parcelles pour un prix de 307.755 euros, sans subordonner cet accord à aucune condition. La société n’ayant pas honoré ses engagements financiers, le conseil municipal a pris de nouvelles délibérations, le 30 juin 2011, annulant celle de 2006 et décidant de céder les mêmes parcelles à une nouvelle société. La SARL Bowling du Hainaut avait alors initié un contentieux pour demander l’annulation des délibérations du 30 juin 2011 annulant la délibération du 21 décembre 2006 et procédant à la vente des parcelles à la nouvelle société.

Les recours avaient été rejetés par le Tribunal administratif de Lille et à la suite de la confirmation des jugements par la Cour administrative d’appel de Douai, la SARL Bowling du Hainaut a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt confirmatif de la Cour précitée.

Dans sa décision en date du 15 mars 2017, le Conseil d’Etat commence par rappeler qu’aux termes de l’article 1583 du code civil, dans sa rédaction applicable aux faits de l’espèce : la vente « est parfaite entre les parties, et la propriété acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée, ni le prix payé ».

Il relève ensuite que le conseil municipal s’étant prononcé favorablement à la vente sans subordonner son accord à aucune condition, il avait ainsi marqué son accord sur l’objet de la vente et sur le prix auquel elle devait s’effectuer. Dès lors, le Conseil d’Etat conclut que la délibération du 21 décembre 2006 a eu pour effet, en application des dispositions de l’article 1583 du Code civil précitées, de rendre la vente parfaite et de transférer à la SARL Bowling du Hainaut la propriété de ces parcelles.

En conséquence, la Commune ne pouvait annuler sa délibération du 21 décembre 2006 et procéder à la cession des parcelles à une nouvelle société par sa délibération du 30 juin 2011 dès lors que la vente était parfaite et que les parcelles étaient devenues la propriété de la SARL Bowling du Hainaut dès le 21 décembre 2006. Mais, bien entendu, la Commune n’est alors pas dépourvue de toute action, notamment si l’acquéreur n’a pas versé le prix de cession (action en résolution de la vente par exemple).

Limitation de la sous-traitance, présentation des capacités des candidats et modification des clauses d’un cahier des charges en cours de procédure de passation

Une autorité portuaire lituanienne (ci-après, l’ « Autorité portuaire ») avait publié un appel d’offres pour la passation, selon une procédure ouverte, d’un marché public de travaux sous l’empire de la directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux. Durant la procédure de passation, l’Autorité portuaire avait procédé à une modification d’une clause du cahier des charges à deux reprises pour ajouter de nouvelles exigences relatives aux capacités professionnelles des membres d’un groupement conjoint. La société Borta, candidat à cette procédure d’appel d’offres, avait saisi la juridiction nationale pour obtenir l’annulation de la clause ainsi modifiée.  La juridiction nationale a profité de cette saisine pour poser trois questions à la Cour de justice de l’Union Européenne (ci-après, la « CJUE »).

S’agissant de la première question relative à la sous-traitance, la juridiction nationale a interrogé la CJUE sur la compatibilité d’une clause, reprenant une disposition nationale, imposant à l’attributaire de réaliser les travaux principaux et n’autorisant le recours à la sous-traitance que pour les travaux « accessoires ». La CJUE juge que « les articles 49 et 56 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une disposition d’une réglementation nationale (…) qui prévoit que, en cas de recours à des sous-traitants pour l’exécution d’un marché de travaux, l’adjudicataire est tenu de réaliser lui-même les travaux principaux, définis comme tels par l’entité adjudicatrice ».

S’agissant de la deuxième question, la CJUE était interrogée sur la compatibilité avec le droit européen d’une clause du cahier des charges qui, « en cas de présentation d’une offre conjointe par plusieurs soumissionnaires, requiert que l’apport de chacun d’entre eux pour satisfaire aux exigences applicables en matière de capacités professionnelles corresponde, proportionnellement, à la part des travaux qu’il exécutera réellement s’il se voit attribuer le marché concerné ». Là encore, la CJUE censure une telle clause et rappelle que tout soumissionnaire a le droit de faire valoir, pour un marché déterminé, les capacités d’autres entités, quelle que soit la nature juridique des liens existant entre lui-même et ces entités, pour autant qu’il soit prouvé à l’entité adjudicatrice qu’il disposera effectivement des moyens desdites entités qui sont nécessaires à l’exécution du marché. Cette faculté ne pouvant être écarté que dans des circonstances exceptionnelles appréciées strictement par la jurisprudence (CJUE, 7 avril 2016, Partner Apelski Dariusz, C‑324/14).

S’agissant de la troisième question relative à la modification des clauses d’un cahier des charges en cours de procédure, la CJUE juge que « les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination ainsi que l’obligation de transparence qui découlent notamment des articles 49 et 56 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que l’entité adjudicatrice modifie, après la publication de l’avis de marché, une clause du cahier des charges relative aux conditions et aux modalités de cumul des capacités professionnelles, telle que la clause 4.3 en cause au principal ». Néanmoins, la CJUE encadre très strictement cette faculté d’une modification du cahier des charges en cours de procédure en la soumettant au respect de trois conditions cumulatives. En premier lieu, les modifications effectuées ne doivent pas être à ce point substantielles qu’elles auraient attiré des soumissionnaires potentiels qui, en l’absence de ces modifications, ne seraient pas en mesure de présenter une offre. En deuxième lieu, lesdites modifications doivent faire l’objet d’une publicité adéquate. En troisième lieu, ces modifications doivent intervenir avant la présentation des offres par les soumissionnaires et le délai de présentation de ces offres doit être prolongé lorsque les modifications concernées sont importantes et la durée de cette prolongation doit permettre aux soumissionnaires de modifier leur offre en conséquence.

Le licenciement économique n’est justifié qu’en cas de cessation complète de l’activité de l’employeur

Par un arrêt en date du 23 mars 2017 (n°15-21183), la Cour de cassation est venue rappeler que seule une cessation complète de l’activité de l’employeur peut constituer en elle-même une cause économique de licenciement, quand elle n’est pas due à une faute ou à une légèreté blâmable de ce dernier.

La cessation partielle de l’activité de l’entreprise ne justifie un licenciement économique qu’en cas de difficultés économiques, de mutation technologique ou de réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, peu important que la fermeture d’un établissement de l’entreprise résulte de la décision d’un tiers.

Le procès verbal de l’instance représentative du personnel fait foi jusqu’à preuve contraire

Par un arrêt en date du 8 mars 2017 (n° 15-26.956), la Cour de cassation est venue rappeler que le procès verbal de réunion d’une institution représentative du personnel fait foi, en cas de désaccord, jusqu’à preuve contraire.

Les juges du fond peuvent librement considérer que le témoignage n’est pas suffisant à apporter cette preuve contraire.

Il est donc de la plus extrême importance pour l’employeur de faire acter qu’une personne extérieure à l’institution, telle qu’un Huissier de justice, pourra éventuellement assister à la réunion.

Signature le 6 avril 2017 à l’unanimité des syndicats de la Convention collective des OPH

Dix années après l’ordonnance n° 2007-137 du 1er février 2007 ayant crée les Offices publics de l’Habitat, ces derniers viennent de se doter d’une convention collective nationale, qui après la signature d’un arrêté d’extension, s’appliquera à l’ensemble de la branche professionnelle.

Cette convention collective nationale vient ainsi compléter les dispositions du décret n° 2011-636 du 8 juin 2011 et harmonise les conditions de travail entre salariés et agents publics.

Sous-traitance et interruption du délai de prescription quadriennale

En l’espèce, une entreprise attributaire du marché de reconstruction d’un collège passé par une collectivité locale avait sous-traité un lot.

Après assignation par le sous-traitant de l’entrepreneur principal devant le Tribunal de commerce en 2008, ce dernier a été placé en liquidation judiciaire.

Le sous-traitant a alors saisi le Juge des référés du Tribunal administratif qui a condamné le maître d’ouvrage à lui verser une provision de 250.000 euros au titre du paiement direct du lot sous-traité.

En appel, le Juge des référés de la Cour administrative d’appel a annulé cette ordonnance.

Le sous-traitant s’est alors pourvu en cassation.

Après avoir rappelé les termes de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics, et notamment de son article 2 qui dispose que la prescription est interrompue par « […] tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l’auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l’administration qui aura finalement la charge du règlement n’est pas partie à l’instance […] » le Conseil d’Etat relève que le Juge des référés en appel n’a commis aucune erreur de droit en rejetant la demande du sous-traitant comme étant prescrite, dans la mesure où l’interruption du délai de prescription quadriennale par un recours juridictionnel implique nécessairement la mise en cause d’une collectivité publique et que, par conséquent, l’instance engagée par la société sous-traitante devant le Tribunal de commerce contre le seul entrepreneur principal n’interrompait pas le délai de prescription quadriennale à l’égard du maître d’ouvrage, collectivité publique.

Il s’agit de l’application d’une jurisprudence ancienne du Conseil d’Etat qui considère que l’interruption de la prescription quadriennale en cas de recours juridictionnel est nécessairement subordonnée à la mise en cause d’une collectivité publique (CE, 24 juin, 1977, Commune de Férel, n°96584).

Précisions sur la suspension d’un fonctionnaire en congé maladie

Par un arrêt en date du 31 mars 2017, le Conseil d’Etat a précisé les modalités d’exécution d’une mesure de suspension dans l’intérêt du service prononcée à l’encontre d’un agent en congé de maladie.

Il rappelle, en premier lieu, qu’une mesure de suspension peut être régulièrement prononcée à l’encontre d’un agent qui bénéficie d’un congé de maladie.

Mais le Conseil d’Etat précise, d’une part, que la mesure n’entre en vigueur qu’à compter de la date à laquelle le congé de maladie prend fin.  D’autre part, il indique que cette entrée en vigueur décalée s’applique même lorsque la décision ne la prévoit pas explicitement.

Enfin, le Conseil d’Etat indique que cette entrée en vigueur différée n’a pas d’influence sur le décompte de la durée de la mesure de suspension. Dès lors, quel que soit le délai pendant lequel l’entrée en vigueur de ladite mesure est retardée par un congé de maladie, le décompte de la durée de la période de suspension se fait à compter de la signature de la décision qui prononce la mesure de suspension.

La conséquence directe de cette précision est qu’en dehors de l’hypothèse de poursuites pénales prévue à l’article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, la mesure de suspension prendra fin de plein droit dans un délai de quatre mois à compter de la signature de la décision de suspension, et non de son entrée en vigueur.

Outre ce point qui justifie sans doute sa mention aux tables du recueil Lebon, la décision s’insère dans la droite ligne de la jurisprudence antérieure. Le Conseil d’Etat avait en effet déjà jugé qu’un agent ne peut être suspendu qu’à l’issue de son congé de maladie (CE, 29 octobre 1969, Commune de Labeurvière, publié au recueil Lebon) et que le placement en congé de maladie met automatiquement fin à la mesure de suspension (CE, 26 juillet 2011, M. Bruno A., n° 343837). 

Il apparaît pour cette raison que cette jurisprudence est très vraisemblablement applicable à l’ensemble des mesures de suspension conservatoires, alors même que l’arrêt se prononçait en l’espèce à l’égard d’une mesure de suspension prononcée sur le fondement de l’article R. 6152-77 du Code de la santé publique qui prévoit la suspension conservatoire des praticiens hospitaliers, à l’instar de l’article 30 de la loi du 13 juillet 1983.

Précision sur l’indemnisation devant être versée à un agent public irrégulièrement évincé : il faut dorénavant intégrer la perte des droits à indemnisation chômage

Le Conseil d’Etat affine sa jurisprudence sur les conséquences indemnitaires d’une éviction illégale (annulation d’un licenciement, d’une révocation, d’une exclusion temporaire de fonctions…) en précisant par un arrêt rendu le 20 mars 2017 que le préjudice financier de l’agent peut également comprendre la perte des droits à indemnisation chômage.

Pour mémoire, depuis l’arrêt du 6 décembre 2013 Commune d’Ajaccio (n° 365155), l’indemnisation financière de l’agent évincé porte sur « la réparation intégrale du préjudice qu’il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre ».

Si Conseil d’Etat n’avait pas encore eu l’occasion de se prononcer sur un préjudice particulier qui est celui de la réduction des droits à chômage c’est chose faite en l’espèce : le requérant ayant été licencié au 25 janvier 2011 (au lieu de quoi son contrat aurait pris fin le 23 octobre 2012), il a soutenu avec succès que ses droits à chômage ont pris fin prématurément et que le principe de la réparation intégrale impliquait une indemnisation du préjudice ainsi causé.

Naturellement, à l’instar des autres préjudices, ce dernier est soumis à la démonstration de sa réalité. Enfin, le montant de l’indemnité globale doit être réduit de toute rémunération ou allocation chômage perçue pendant cette période.