Sur l’absence de recours contre les décisions prises par l’administrateur provisoire ayant reçu les pouvoirs normalement dévolus à l’assemblée générale des copropriétaires

Principe : un immeuble en copropriété peut être confronté à d’importantes difficultés financières ou de gestion. La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ainsi que son décret d’application du 17 mars 1967 prévoient certains palliatifs permettant la gestion de ces copropriétés. Les mesures s’organisent par gradation en fonction notamment des difficultés rencontrées et de l’état de dégradation de la copropriété.

A titre d’exemple, l’article 29-1 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que le président du tribunal judiciaire peut désigner un administrateur provisoire du syndicat des copropriétaires, lorsque l’équilibre financier du syndicat est gravement compromis ou que la copropriété est dans l’impossibilité de pourvoir à la conservation de l’immeuble.

Le président du tribunal judiciaire charge l’administrateur provisoire de prendre les mesures nécessaires au rétablissement du fonctionnement normal de la copropriété et lui confie, à ce titre, les pouvoirs du syndic de copropriété. Le juge peut aller plus loin en confiant à l’administrateur provisoire, les pouvoirs de l’assemblée générale des copropriétaires et du conseil syndical, à l’exception de certains pouvoirs qui ne peuvent lui être dévolus.

Or, les décisions prises par l’assemblée générale des copropriétaires peuvent faire l’objet d’un recours par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans les conditions de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

Dans ces conditions, se pose la question de savoir si les décisions prises par l’administrateur provisoire, exerçant les pouvoirs de l’assemblée générale peuvent être contestées par les copropriétaires dans les mêmes conditions.

A cette interrogation, la Cour de cassation a d’ores et déjà eu l’occasion de répondre par la négative et rappelle ce principe dans un arrêt en date du 13 avril 2022.

 

Clarification : suivant une ordonnance prise au visa de l’article 29-1 de la loi du 10 juillet 1965, un administrateur provisoire a été désigné et sa mission renouvelée. Le syndicat des copropriétaires, représenté par cet administrateur, a assigné un copropriétaire en paiement d’un arriéré de charges.

La Cour d’appel l’a condamné au paiement de cet arriéré de charges et le copropriétaire a formé un pourvoi en cassation, considérant que l’approbation des comptes et la fixation du budget confié à l’administrateur provisoire ne dispense pas le syndicat des copropriétaires de son obligation de prouver qu’il est débiteur des charges qui lui sont imputées et ne le prive pas de son droit de contester les charges réclamées.

Le copropriétaire débiteur prétendait, en l’espèce, être propriétaire d’un bâtiment dans son intégralité, qui n’était donc plus composé de parties communes, de sorte qu’aucune dépense ne pouvait être imputée à ce bâtiment, contrairement à ce qui avait été retenu par l’administrateur provisoire dans le budget décidé.

Ainsi, pour contester l’arriéré de charges de copropriété, le copropriétaire débiteur entendait remettre en cause le budget tel que décidé par l’administrateur provisoire, qui s’était vu confier les pouvoirs de l’assemblée générale.

La Cour de cassation rejette le pourvoi formé et rejoint la Cour d’appel ayant retenu que les copropriétaires ne peuvent remettre en cause les décisions prises par l’administrateur provisoire qui a reçu les pouvoirs normalement dévolus à l’assemblée générale des copropriétaires, à l’exception de ceux que la loi interdit au juge de lui confier.

Le copropriétaire débiteur qui s’est vu condamner au paiement de charges de copropriété impayées ne peut donc valablement contester les décisions de l’administrateur provisoire ayant approuvé les comptes et les budgets prévisionnels.

Ces décisions qui sont, en principe, prises par l’assemblée générale des copropriétaires, sont, dès lors définitives et exécutoires de plein droit, dès lors qu’elles ont été prises par l’administrateur provisoire, chargé de prendre les mesures nécessaires au rétablissement du fonctionnement normal de la copropriété.

Toutefois, la mission de l’administrateur n’en est pas pour autant incontestable.

En effet, la Cour de cassation rappelle que tout copropriétaire a la possibilité d’en référer au président du Tribunal judiciaire, afin de mettre fin ou mission la mission confiée à l’administrateur provisoire.

La confidentialité de la médiation réaffirmée avec force par la Cour de cassation

La Cour de cassation dans un arrêt en date du 9 juin 2022 (Cass. Civ, 2ème, n° 19-21.798) vient de réaffirmer avec force la confidentialité de tous les échanges pendant une médiation notamment des pièces produites et échangées entre les médiés, leurs conseils et le médiateur ou la médiatrice.

Dans cette affaire, il est reproché au juge de s’être fondé sur des pièces couvertes par la confidentialité car échangées lors d’une médiation et produites en justice. La Cour de cassation rappelle que le juge pouvait même au besoin soulever d’office ce principe de confidentialité en rejetant ces pièces.

Cette obligation de confidentialité ne peut être levée qu’avec l’accord express des parties ou dans deux cas exceptionnels :

  • en présence de raisons impérieuses d’ordre public ou de motifs liés à la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant ou à l’intégrité physique ou psychologique de la personne ;
  • lorsque la révélation de l’existence ou la divulgation du contenu de l’accord issu de la médiation est nécessaire pour sa mise en œuvre ou son exécution.

Ce principe de confidentialité de la médiation s’applique autant dans le cadre d’une instance judiciaire qu’une instance arbitrale.

Conséquences de l’ouverture d’une procédure collective sur une procédure d’exécution

Selon l’article L. 622-21 alinéa 2 du Code de commerce, l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire « arrête ou interdit toute procédure d’exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n’ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d’ouverture ».

En l’espèce, un jugement fait droit à la demande d’une banque, qui sollicite l’autorisation judiciaire d’effectuer une saisie sur les rémunérations d’un emprunteur, après que la déchéance du terme de prêts a été prononcée.

Postérieurement à ce jugement, l’emprunteur est placé en redressement judiciaire.

Dans un arrêt en date du 17 octobre 2019, la Cour d’appel de Versailles autorise la saisie des rémunérations, malgré le jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

La Cour de cassation, dans son arrêt du 20 avril 2022, au visa de l’article L. 622-21 du Code de commerce, casse l’arrêt de la Cour d’appel, qui aurait dû « constater l’arrêt de la procédure de saisie des rémunérations à compter du jugement d’ouverture du redressement judiciaire ».

Qui peut assister aux assemblées générales ?

Les assemblées générales de sociétés sont normalement tenues par ses associés. Il s’agit d’un droit, et toute clause contraire est réputée non écrite. De même la présence du Commissaire aux comptes lors des AGO est expressément prévue par le Code de commerce.

Dans certains cas précis, des tiers peuvent être présents à ces assemblées, souvent à la demande d’une partie des associés.

  • Les représentants de la masse des obligataires

Les représentants de la masse des obligataires peuvent également assister aux assemblées générales, sans voix délibérative cependant.

Ils n’ont qu’un rôle d’observateurs mais peuvent prendre la parole lorsque l’intérêt des obligataires et susceptible d’être mis en péril, qu’il s’agisse d’une société anonyme, ou encore d’une SARL lorsque celle-ci a émis des obligations.

  • Le ou les représentant du Comité Social et Economique (CSE) d’une société anonyme d’au moins 50 salariés

Deux membres du CSE désignés par celui-ci, l’un représentant des cadres techniciens et agents de maitrise, et l’autre des employés et ouvriers, peuvent assister à toutes les assemblées générales (AGO, AGE et assemblées spéciales).

Dans les sociétés anonymes dont le Conseil d’administration ou de surveillance comprend un administrateur ou un membre du conseil de surveillance élu par les salariés, seul un membre titulaire du CSE a faculté d’assister aux assemblées générales.

Ces représentants ne participent pas aux débats sauf lorsque les résolutions requièrent l’unanimité. Dans les sociétés anonymes dont le Conseil d’administration ou de surveillance comprend un administrateur ou un membre du conseil de surveillance élu par les salariés, seul un membre titulaire du CSE a faculté d’assister aux assemblées générales.

  • L’huissier (commissaire de justice), l’avocat, un expert

Leur présence ne peut être imposée que s’il a été commis par une décision de justice. Dans le cas contraire, il pourra être refusé par le bureau ou l’assemblée générale.

La présentation de la demande de désignation d’un huissier ou d’un commissaire de justice s’effectue auprès du président du tribunal du lieu où cette assemblée doit être réunie.

En pratique, les tribunaux font droit à la demande lorsque sont invoqués des motifs sérieux touchant au bon fonctionnement de la société (grave mésentente entre associés etc.)

  • Un mandataire ad ’hoc

Ce dernier peut avoir pour mission de voter lors d’une assemblée générale.

Il est désigné en cas d’abus de droit de vote d’un ou plusieurs actionnaires minoritaires qui mettent en péril la société.

Inaptitude : pas d’obligation de consultation du CSE en cas de dispense de reclassement résultant des mentions du médecin du travail sur l’avis d’inaptitude

Par un arrêt du 8 juin 2022 (pourvoi n° 20-22.500), la Chambre sociale de la Cour de cassation est venue apaiser les inquiétudes des employeurs confirmant que la consultation du CSE n’est pas nécessaire en cas de dispense de reclassement résultant des mentions du médecin du travail sur l’avis d’inaptitude. [1]

  • Contexte de l’arrêt 

La loi n° 2016-1088 en date du 8 août 2016 (dite Loi Travail) a mis en place un dispositif, par la suite consolidé par les ordonnances Macron, dispensant l’employeur d’une recherche de reclassement du salarié déclaré inapte, lorsque l’avis d’inaptitude indiquait que :

  • Tout maintien dans l’emploi serait gravement préjudiciable à la santé du salarié ;
  • Ou que l’état de santé du salarié ferait obstacle à tout reclassement dans « un emploi » (en cas d’inaptitude d’origine non professionnelle (art. L. 1226-2-1 du Code du travail)) ou dans « l’emploi » (en cas d’inaptitude d’origine professionnelle (art. L. 1226-12 du Code du travail)).

Cependant, en matière d’inaptitude professionnelle comme non professionnelle, le Code du Travail dispose que l’employeur est tenu de proposer au salarié une offre de reclassement appropriée :

  • en tenant compte des conclusions et indications du médecin du travail sur les capacités du salarié ;
  • et après avis du CSE.

La recherche de reclassement en matière d’inaptitude étant d’ordre public[2] et le contenu de la lettre de licenciement en matière d’inaptitude étant particulièrement normé, les praticiens craignaient que le licenciement puisse être invalidé, voire qu’un délit d’entrave soit caractérisé, du fait de l’absence de consultation du CSE dans l’hypothèse même où l’employeur était dispensé de reclasser le salarié par le médecin du travail.

Un arrêt rendu le 30 septembre en 2020 (pourvoi n° 19-11.974)[3] semait, par ailleurs, le trouble sur la position de la Cour de cassation à cet égard.

Cet arrêt, qui portait sur un cas d’inaptitude non professionnelle, énonçait, en effet :

Vu les articles L. 1226-2 et L. 1226-2-1, alinéas 2 et 3, du Code du travail, en leur rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

« […] Aux termes du second de ces textes, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi. L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail.

Il résulte de ces textes que la méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident non professionnel ou une maladie, dont celle imposant à l’employeur de consulter les délégués du personnel, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ».

La formulation générale du chapeau précédant « l’attendu » de principe (ou plutôt désormais « l’alinéa » de principe) a, en effet, pu laisser penser que la recherche de reclassement et la consultation du CSE étaient obligatoires, même dans les cas de dispense résultant des mentions du médecin du travail.

A la suite de cet arrêt de la Cour de cassation, certaines cours d’appel retenaient une obligation de consultation du CSE en pareil cas[4], tandis que d’autres, comme la Cour d’appel de Paris ou d’Orléans retenaient que cette consultation était inutile (CA Paris, 2 décembre 2020, RG n° 14/11428 ; CA Orléans, 13 avril 2021, n° 18/03127).

Ni la position des Cours d’appel favorables à l’absence de consultation du CSE, ni même le Guide de la Direction Général du travail (certes relatifs à la rupture et au transfert du contrat de travail des salariés protégés) énonçant qu’en cas de dispense de reclassement par le médecin du travail : « L’employeur est dispensé de l’obligation de consulter le CSE sur les recherches de reclassement »[5], n’ont suffi à écarter tout risque pour l’employeur.

Il a fallu attendre l’arrêt du 8 juin 2022 (pourvoi n° 20-22.500), ici commenté, pour que la chambre sociale Cour de cassation mettre fin à ces inquiétudes.

  • La confirmation de la Cour de cassation par l’arrêt du 8 juin 2022

Au cas particulier, le 6 novembre 2017, une salariée a été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail la suite d’un accident du travail,

L’avis d’inaptitude mentionnait : « L’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

Le 30 novembre 2017, la salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

L’employeur n’ayant pas consulté les délégués du personnel sur le reclassement, les juridictions étaient saisies et l’affaire était portée devant la Cour d’appel de Chambéry, qui condamnait l’employeur à indemniser la salariée.

La Cour d’appel de Chambéry retenait, alors, que la consultation du CSE relative au reclassement s’imposait, même lorsque l’employeur était dispensé d’une telle recherche par le médecin du travail.

L’employeur s’est alors pourvu en cassation.

  • Les arguments de l’employeur

Aux termes de son deuxième moyen de cassation, l’employeur invoquait, en substance, que la Cour d’appel de Chambéry aurait violé les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail (dans leur rédaction issue de la loi travail), cette dernière considérant qu’il devait consulter les représentants du personnel sur un reclassement dont il était dispensé par le médecin du travail.

  • La réponse de la Cour de cassation

La réponse de la Cour de cassation est limpide.

Au visa des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail, dans leur dans leur rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, elle statue à la violation de la loi par la cour d’appel et indique, dans le chapeau précédant l’alinéa de principe, que :

« Lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, l’employeur, qui n’est pas tenu de rechercher un reclassement, n’a pas l’obligation de consulter les délégués du personnel ».

Ce faisant, la Cour de cassation a clairement précisé qu’en matière d’inaptitude professionnelle, l’employeur qui est dispensé de reclassement par le médecin du travail est, également, dispensé de consultation des représentants du personnel à cet égard.

  • Sur la portée de l’arrêt

Bien que cet arrêt concerne les délégués du personnel, il est, à notre sens, pleinement transposable à la question de la consultation du CSE.

Il convient, toutefois, de préciser qu’il ne porte que sur la dispense de reclassement par le médecin du travail et non sur l’impossibilité de reclassement alléguée par l’employeur.

Dans le cas où l’impossibilité de reclassement est seulement alléguée par l’employeur et ne résulte pas des mentions du médecin du travail, il y a lieu de consulter le CSE sur la recherche.

Cet arrêt est relatif à une dispense de reclassement pour inaptitude d’origine professionnelle. Reste à savoir si la Cour de cassation adoptera la même position pour le reclassement en matière pour inaptitude d’origine non professionnelle.

Dans l’esprit du législateur, il apparait que l’objectif de la loi travail est d’harmoniser les obligations de l’employeur relatives à l’inaptitude quel que soit son origine. Dès lors, cette solution devrait être étendue aux situations d’inaptitude d’origine non professionnelle. [6]

 

[1] Décision – Pourvoi n° 20-22.500 | Cour de cassation

[2] En ce sens, notamment : Cass. Soc., 8-6-2005 n° 03-44.913 FS-PB ; Cass. Soc., 25-2-1997 n° 93-40.185 P ; Cass. Soc., 9-7-2008, n° 07-41.318 FS-PB…

[3] Cass. Soc., 30-09- 2020, n° 19-11.974

[4] CA Bourges, 19 novembre 2021, n° 21/00153, B. c/Sté Fiducial Sécurité Prévention

[5] Fiche 9, paragraphe 2.1, Guide relatif aux décisions administratives en matière de rupture ou de transfert du contrat de travail du salarié protégé, DGT, 2019

[6] Etude d’impact, loi Travail, p. 340

La servitude par destination du père de famille vaut titre dès lors qu’il existe, lors de la division des fonds des signes apparents de la servitude, et que l’acte de division ne contient aucune stipulation contraire à son maintien

Principe : L’article 637 du Code civil définit la servitude comme « une charge imposée sur un héritage pour l’usage et l’utilité d’un héritage appartenant à un autre propriétaire ».

L’article 705 du même Code prévoit que : « toute servitude est éteinte lorsque le fonds à qui elle est due, et celui qui la doit, sont réunis dans la même main ».

Ainsi, la qualification de servitude suppose la présence d’au moins deux fonds, appartenant à des propriétaires différents.

La servitude sera matérialisée par une charge imposée au fonds servant. Le propriétaire ne pourra accorder des droits que sur son propre fonds, sans empiéter sur la propriété d’un tiers.

S’agissant de la servitude par destination du père de famille, méconnue en pratique, l’article 692 du Code civil dispose qu’elle « vaut titre à l’égard des servitudes continues et apparentes ».

L’article 693 du même Code indique quant à lui qu’il n’y a « destination du père de famille que lorsqu’il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire, et que c’est par lui que les choses ont été mises dans l’état duquel résulte la servitude ».

Ces deux dispositions sont à compléter avec l’article 694 du Code civil, qui reprend l’exigence d’un caractère apparent, sans pour autant exiger de caractère continu : « si le propriétaire de deux héritages entre lesquels il existe un signe apparent de servitude, dispose de l’un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d’exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné ».

Au regard des articles précités, il existe ainsi une distinction entre l’article 692, prévoyant la servitude par destination du père de famille continue, et l’article 693, qui admet qu’une telle servitude puisse être discontinue.

La jurisprudence a récemment rappelé ce principe.

 Clarification : Aux termes de l’arrêt rendu le 23 mars 2022 par la 3ème Chambre Civile de la Cour de cassation, des propriétaires d’une parcelle bâtie ont assigné les propriétaires de la parcelle voisine pour la remise en état d’une canalisation d’évacuation des eaux usées qui étaient, selon eux, obstrués.

Les requérants invoquaient l’existence d’une servitude par destination du père de famille entre les deux parcelles voisines, issue de la division d’un seul fonds par acte du 30 septembre 1997.

La Cour d’Appel de Caen rejetait les demandes formulées par les requérants, au motif que l’acte du 30 septembre 1997 ne mentionnait pas l’existence d’une servitude d’écoulement des eaux usées, et qu’il est ainsi constant qu’une telle servitude a un aspect discontinu, « de sorte qu’elle ne peut s’acquérir par destination du père de famille, quand bien même elle présenterait un signe apparent matérialisé par un regard ».

La Cour de cassation est venue censurer l’arrêt rendue, considérant que la destination du père de famille vaut titre à l’égard des servitudes dès lors qu’il existe, lors de la division du fonds, des signes apparents de la servitude et que l’acte de division ne contient aucune stipulation contraire à son maintien.

Par cet arrêt, la haute juridiction confirme la jurisprudence antérieure selon laquelle une servitude discontinue et apparente peut être établie par ce mécanisme, conformément à l’article 694 du Code civil.

Cette décision opère par ailleurs une distinction claire entre les articles 692 et 694 du Code civil, selon que la servitude se trouve continue ou discontinue.

Renouvellement du CSE : êtes-vous prêts ?

Les élections professionnelles des représentants du personnel se déroulent dans les entreprises au terme de chaque mandat traditionnellement d’une durée de quatre ans.

A ce titre, un grand nombre d’employeurs disposant d’un effectif composé de salariés et de fonctionnaires, s’apprêtent à la rentrée 2022 à renouveler leur comité économique et social (CSE) pour leurs salariés de droit privé. En effet, ces élections professionnelles sont calées avec celle de la fonction publique de l’Etat qui se déroulent du 1er décembre au 8 décembre 2022[1].

C’est à l’employeur de prendre l’initiative d’organiser les élections de son CSE, qu’il s’agisse de sa mise en place lorsque l’effectif de plus de 10 salariés est atteint, ou de son renouvèlement. À défaut, l’employeur encourt le délit d’entrave[2].

Dès lors, ce renouvellement doit s’anticiper pour une mise en œuvre à compter de la mi-septembre voir en amont si la mise en place d’un vote électronique est souhaitée.

Nous proposons un tour d’horizon des grandes étapes préalables nécessaires au renouvellement des CSE.

Etape 1 : Déterminer le périmètre des élections

Il s’agit généralement du même périmètre que la dernière élection professionnelle.

Dans le cadre d’un changement lié par exemple à une fusion ou une intégration dans une Unité Economique et Social depuis les dernières élections du personnel, le périmètre du CSE a pu évoluer et il appartient à l’employeur de le consolider dans la perspective des prochaines élections.

L’article L. 2313-2 du Code du travail indique que le nombre et le périmètre des établissements distincts pour la mise en place des CSE est déterminé par un accord d’entreprise. L’article L. 2313-4 du même Code précise que « en l’absence d’accord, l’employeur fixe le nombre et le périmètre des établissements distincts, compte tenu de l’autonomie de gestion du responsable de l’établissement, notamment en matière de gestion du personnel ».

La Cour de cassation a précisé que l’articulation de ces deux articles imposée une négociation préalable d’un accord collectif si des délégués syndicaux sont présent dans l’entreprise pour déterminer le périmètre de la mise en place des institutions représentatives du personnel :

« Il résulte de ces dispositions que ce n’est que lorsque, à l’issue d’une tentative loyale de négociation, un accord collectif n’a pu être conclu que l’employeur peut fixer par décision unilatérale le nombre et le périmètre des établissements distincts ».[3]

En l’absence d’accord conclu ou en l’absence de délégué syndical, l’employeur doit rechercher un accord avec le CSE qui sera adopté à la majorité de ses membres titulaires, pour déterminer le nombre et le périmètre des établissements distincts[4].

Ce n’est qu’en l’absence d’un accord conclu avec organisations syndicales ou le CSE, que l’employeur peut déterminer le nombre et le périmètre des établissements distincts (C. trav. art. L. 2313-3).

L’employeur devra porter sa décision à la connaissance des syndicats représentatifs dans l’entreprise et de chaque syndicat y ayant constitué une section syndicale par tout moyen permettant de conférer date certaine à cette information.  De la même manière si les négociations avec le CSE n’ont pas abouti, l’employeur devra réunir le comité afin de l’informer de sa décision[5].

Etape 2 : Engager une négociation pour la mise en place du vote électronique

Le recours au vote électronique s’est intensifié depuis la crise sanitaire. Si sa mise en place est plus couteuse du fait du recours systématique à un prestataire de vote électronique (entre 3.000 et 5.000 € environ), le recours au vote électronique décharge les équipe des Ressources humaines de la préparation pratique des élections professionnelles (recherche d’isoloirs, commandes des enveloppes et des bulletins etc.), souvent chronophage.

Le vote électronique peut être mis en place soit par un accord collectif ou par une décision unilatérale de l’employeur[6].

Néanmoins, l’employeur doit obligatoirement tenter de négocier loyalement un accord collectif avec les délégués syndicaux avant d’instaurer le vote électronique par décision unilatérale. En l’absence de délégués syndicaux, l’employeur n’est pas tenu d’ouvrir une négociation selon les modalités dérogatoires (élus ou salariés, mandatés ou non) avant d’adopter une décision unilatérale[7].

L’employeur peut organiser lui-même les modalités de recours au vote électronique ou faire appel à un prestataire, sur la base d’un cahier des charges qui doit respecter les nombreuses dispositions règlementaires[8] avec notamment la mise en place :

  • d’un vote anonyme et chiffré par le système création d’un identifiant et d’un code transmis en dehors de la messagerie professionnelle ou simple courrier postal sans précautions suffisantes pour garantir la confidentialité des votes et des données transmises[9] ;
  • d’une édition de 3 clés de chiffrement connues seulement du président du bureau de vote et de deux de ses assesseurs, et dont 2 au moins doivent être activées pour le dépouillement du vote ;
  • d’un dispositif de secours pouvant prendre le relais en cas de panne du système principal.

Compte tenu la complexité et des exigences légales, le recours à un prestaire de vote est plus que recommandé.

Le protocole d’accord préélectoral doit mentionner l’existence de l’accord collectif ou de la décision ainsi unilatérale de l’employeur que le nom du prestataire de vote choisi si est déjà arrêté. De plus, une description détaillée du fonctionnement du système de vote retenu fourni par le prestataire de vote et du déroulement des opérations électorales doit également être annexée au protocole[10].

A défaut de protocole d’accord préélectoral, les modalités de mise en œuvre du vote électronique peuvent être déterminées unilatéralement par l’employeur ou, à défaut, par le tribunal judiciaire[11].

 

Etape 3 : Définir un calendrier des élections professionnelles

Lorsqu’il organise les élections, l’employeur doit veiller à ce qu’elles se déroulent selon les différents délais imposés notamment par la loi[12].

Le calendrier à suivre lors d’un renouvellement de l’instance calé sur les élections de la fonction publique de l’Etat en cas de présence de fonctionnaires dans les effectifs pourrait être le suivant :

  1. Au plus tôt : Négociation du périmètre des élections des institutions représentatives du personnel et engagement éventuel d’une négociation pour la mise en place du vote électronique jusqu’à l’étape 3 ;
  2. 9 septembre 2022, J-90 avant le premier tour: information du personnel sur l’organisation des élections ;
  3. 7 octobre 2022, J-60 avant le premier tour: invitation des syndicats intéressés à négocier le protocole préélectoral et à établir leurs listes de candidats ;
  4. 26 octobre 2022, J+15 après réception de l’invitation par les syndicats: 1ère réunion de négociation du protocole d’accord préélectoral entre l’employeur et les syndicats ;
  5. Mercredi 30 novembre, au moins J-4 avant les élections: publication des listes électorales par l’employeur ;
  6. Jeudi 8 décembre 2022, Jour J : déroulement du premier tour de scrutin ;
  7. Jeudi 22 décembre 2022, J+15 depuis le premier tour (expiration des mandats): déroulement d’un second tour de scrutin sauf si le CSE a été mis en place à l’issue du 1er Dans ce cas, l’employeur transmet les procès-verbaux notamment à l’inspection du travail dans les 15 jours ;
  8. J+15 après les élections: transmissions des procès-verbaux ou des procès-verbaux de carences notamment à l’inspection du travail.

***

Les avocats du département droit social du cabinet SEBAN & ASSOCIES sont à votre disposition pour vous accompagner dans le renouvellement de vos institutions représentatives du personnel.

 

Benoît ROSEIRO et Alix MERCERON

 

[1] Arrêté du 9 mars 2022 fixant la date des prochaines élections professionnelles dans la fonction publique https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045327633

[2] Cass. Crim., 6 novembre 2007 n° 06-86.027 F-PF

[3] Cass. Soc., 17 avr. 2019, n° 18-22.948

[4] C. trav. art. L. 2313-3)

[5] C. trav. art. R. 2313-1.

[6] Article L. 2314-26 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000035651044

[7] Cass. Soc., 13 janvier 2021, n° 19-23.533 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000043045952

[8] Articles R. 2314-5 à R. 2314-18 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006072050/LEGISCTA000036415504/#LEGISCTA000036415504

[9] Cass. Soc., 20-9-2017 n° 16-60.272 FS-D

[10] Article R. 2314-13 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000036481841

[11] Cass. Soc., 4 juin 2014, n° 13-18.914 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000029057354/

[12] Articles L. 2314-4 à L. 2314-10 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006195695/

Associations et Loi Séparatisme : suspension de la dissolution du Groupe Antifasciste Lyon et Environs

Le Conseil d’Etat a, par une ordonnance du 16 mai 2022, suspendu la dissolution du « Groupe Antifasciste Lyon et Environs ». L’ordonnance précise la portée des dispositions entrées en vigueur dans le cadre de la récente loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, dite « Loi Séparatisme ».

Depuis cette loi, un nouveau motif de dissolution d’association ou de groupement de fait a été intégré au 1° de l’article L. 212-1 du Code de la sécurité intérieure qui liste les motifs justifiant la dissolution d’une association ou d’un groupement de fait. Le gouvernement peut désormais dissoudre une association ou un groupement de fait en cas d’incitation «  […] à des agissements violents à l’encontre des personnes et des biens ».

Sur le fondement de ces nouvelles dispositions, le groupement d’extrême gauche lyonnais a ainsi été dissout le 30 mars dernier par un décret du ministre de l’Intérieur. Des appels à la violence ainsi que des débordements en manifestation lui étaient reprochés.

Le « Groupe Antifasciste Lyon et Environs » et un de ses membres ont demandé aux juges des référés du Conseil d’État de suspendre en urgence cette dissolution, dénonçant une atteinte aux libertés d’association, de réunion, d’expression et d’opinion.

Le Conseil d’Etat a ainsi été amené à préciser le sens des nouvelles dispositions de l’article L. 212-1 du Code de la sécurité intérieure qui, souligne-t-il, « prévoient la dissolution d’associations ou groupements de fait dont les activités troublent gravement l’ordre public. Elles permettent d’imputer aux associations et groupements de fait les agissements commis par leurs membres, en cette qualité, ou les agissements directement liés aux activités de l’association ou du groupement dès lors que leurs dirigeants, bien qu’informés, se sont abstenus de prendre les mesures nécessaires pour les faire cesser, compte tenu des moyens dont ils disposaient » (§ 4 de l’Ordonnance).

Suivant ce raisonnement, il a suspendu la décision du Gouvernement estimant que « les éléments retenus contre le groupement, pris tant isolément que dans leur ensemble, ne justifient pas sa dissolution au regard du code de la sécurité intérieure ». Les juges ont estimé qu’il n’était pas « démontré que les actions violentes » commises lors de manifestations « soient liées aux activités » du groupe. Ils ont par ailleurs observé « que les publications du groupement sur ses réseaux sociaux ne peuvent être regardées à elles seules comme une légitimation du recours à la violence » et en a déduit qu’il ne pouvait être, s’agissant de ce groupement de fait, considéré « que le groupement ait appelé à commettre des actions violentes » (Communiqué du Conseil d’Etat du 16 mai 2022).

Les juges ont notamment analysé la manière dont le groupement d’extrême gauche se présentait sur les réseaux relevant à ce sujet que « si le groupement relaie, parfois avec une complaisance contestable, les violences commises à l’encontre des forces de l’ordre, la revendication par le groupement d’un discours très critique à l’égard de l’institution policière ne saurait caractériser, à elle-seule, une provocation à des agissements violents, au sens du 1° de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure » (§ 6 de l’Ordonnance).

Cette première décision permet de préciser les contours du nouveau motif de dissolution d’une association ou d’un groupement de fait visant les provocations à des violences aux personnes et aux biens, qui avait suscité de nombreuses craintes lors de l’adoption de la Loi Séparatisme du fait de son caractère flou. Il en ressort que les termes de ce motif sont envisagés de manière stricte et non extensive. Ce qui se comprend au vu de la liberté publique mise en jeu, la liberté d’association.

Tiers-lieux : un nouvel enjeu de dynamisation des territoires pour les pouvoirs publics ?

Portés par des collectifs de citoyens désireux de se réapproprier leurs territoires, de plus en plus de projets de tiers-lieux ont vu le jour en France ces dernières années. Mais qu’est-ce qu’un tiers-lieu ?

Le terme vient de l’anglais « third place » [1], désignant un lieu qui n’est ni la maison (le premier-lieu), ni le lieu de travail (le second-lieu). Si le concept embrassait jusqu’ici de multiples définitions au gré de ses formes, souvent hybrides (espace coworking, campus connecté, atelier partagé, fablab, café associatif, friche culturelle, maison de services au public…), le tiers-lieu a tout récemment fait son entrée dans le dictionnaire en étant défini comme un « espace de sociabilité d’initiative citoyenne, où une communauté peut se rencontrer, se réunir, échanger et partager ressources, compétences et savoirs » [2].

1. La création d’un groupement d’intérêt public au soutien des tiers-lieux

Présenté comme l’un des « piliers de la relance » par le Gouvernement, un budget de 130 millions d’euros a été alloué au développement et à la structuration des tiers-lieux en 2021, dont la moitié provient du plan France Relance.

Cette logique de soutien du développement de cet écosystème solidaire et responsable s’est concrétisée par la création du groupement d’intérêt public (GIP) [3] « France Tiers Lieux », auquel participe l’Etat par le biais de 4 ministères.

Un arrêté du 14 avril 2022 portant approbation de la convention constitutive du groupement d’intérêt public dénommé « France Tiers Lieux » [4] a approuvé la convention constitutive du GIP dénommé « France Tiers Lieux ». Ses dispositions entreront en vigueur le 1er septembre 2022.

Ce groupement « a pour objet d’appuyer le développement, la professionnalisation et la pérennisation des tiers-lieux en France« .

Le GIP est constitué par les membres fondateurs suivants :

  • l’Etat, représenté par les ministres chargés de l’aménagement du territoire, du travail, de l’enseignement supérieur et des petites et moyennes entreprises ;
  • l’Agence nationale de la cohésion des territoires (« ANCT ») ;
  • l’association de préfiguration nationale des tiers-lieux (« ANTL »), qui évolue ainsi dans sa gouvernance et ses statuts.

Ce GIP a pour objet d’appuyer le développement, la professionnalisation et la pérennisation des tiers-lieux en France. Pour ce faire, il a notamment pour mission de :

  • Structurer une filière professionnelle des personnels des tiers-lieux : existence juridique, formation, diplômes, etc. ;
  • Animer les réseaux intermédiaires de tiers-lieux constitués à différentes échelles (régionales et départementales notamment) ;
  • Construire une offre en ingénierie pour accompagner l’émergence et la consolidation de tiers-lieux ;
  • Soutenir la mutualisation des ressources pour créer des outils communs aux tiers-lieux ;
  • Analyser l’évolution de l’écosystème des tiers-lieux et contribuer à sa compréhension en rédigeant un rapport annuel d’état des lieux ;
  • Fournir accompagnement, appui et ingénierie pour chacun des membres du GIP, lorsqu’ils conduisent des programmes de soutien aux tiers-lieux.

Le GIP est créé pour une durée de trois ans. L’arrêté prévoit que le directeur du GIP présentera à l’assemblée générale un bilan sur la gouvernance du GIP, entre six et neuf mois après sa création.

Si certaines modalités restent encore à définir (notamment sur les questions de gouvernance), la création de ce GIP offrira un réel cadre institutionnel permettant aux acteurs associatifs, dont notamment l’ANTL, de peser dans les prises de décision des actions de l’Etat.

 

2. Le rôle des pouvoirs publics dans l’accélération du développement des tiers-lieux sur l’ensemble du territoire national

Les acteurs publics se mobilisent de plus en plus dans le développement des tiers-lieux, multipliant les initiatives au service du « faire ensemble ».

A titre d’exemple, le programme interministériel « Nouveaux lieux, nouveaux liens » vise à accélérer le développement des tiers-lieux sur l’ensemble du territoire national. Il a notamment pour objectif de favoriser le maillage le plus fin possible des territoires en tiers-lieux et de donner les moyens aux tiers-lieux de diversifier leurs revenus en développant des services d’intérêt général déclinés en fonction des besoins des territoires.

De même, le dispositif des Manufactures de Proximité a été développé grâce au soutien des pouvoirs publics : ces tiers-lieux productifs sont des ateliers partagés de fabrication destinés en priorité à des professionnels, TPE, PME, artisans.

L’Etat prévoit enfin de développer le service civique dans les tiers-lieux, avec le lancement de 3000 missions. A cet égard, l’ANTL envisage de déposer une demande d’agrément collectif auprès de l’Agence du Service Civique, afin de simplifier les démarches et de mutualiser les efforts pour déployer le volontariat de service civique dans les tiers lieux. Cet agrément collectif sera porté par l’association France Tiers-Lieux et sera mis à disposition de tous les tiers-lieux en capacité d’accueillir des missions.

A l’heure où le désintérêt vis-à-vis des institutions politiques est largement commenté, la réappropriation par les citoyens de leurs territoires par le biais de l’action collective annonce une nouvelle forme d’engagement à l’échelon local.

La France compte aujourd’hui environ 2 500 tiers-lieux, et ils devraient être 3 000 à 3 500 fin 2022.

Le phénomène des tiers-lieux ne se résume cependant pas à une multitude d’initiatives locales à soutenir, mais réinterroge en profondeur le rôle des institutions par rapport à la société civile et la manière de construire l’action publique pour accélérer les transitions nécessaires.

Les pouvoirs publics ont donc tout intérêt à se saisir de l’enjeu des tiers-lieux pour accompagner cette dynamique d’initiative citoyenne génératrice d’innovation sociale sur l’ensemble du territoire.

____________

[1] Notion introduite en 1989 par le sociologue américain Ray Oldenburg.

[2] Edition 2023 du Petit Robert.

[3] Un GIP permet à des partenaires publics et privés de mettre en commun des moyens pour la mise en œuvre de missions d’intérêt général.

[4] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045593081

Précisions sur les conséquences statutaires d’une interdiction professionnelle pénale prononcée à l’encontre d’un fonctionnaire

Par une décision rendue en date du  24 mai 2022, la Cour administrative d’appel de Douai a procédé à une synthèse et précisé les conséquences qu’il appartient aux administrations de tirer d’une interdiction professionnelle prononcée par le juge pénal sur le fondement des articles 131-27 et 222-44 du Code pénal.

En l’espèce, un infirmier titulaire avait été condamné pour des faits de violences commis sur un patient de l’établissement de santé qui l’employait. A cette occasion, la juridiction pénale avait prononcé à son encontre la peine complémentaire d’interdiction d’exercer la profession d’infirmier pour une durée de trois ans.

L’établissement de santé avait tout d’abord prononcé sa radiation des cadres sur le fondement de l’article 5 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires alors applicables, qui prévoyait que « nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire si les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l’exercice des fonctions ». La radiation prononcée sur ce fondement avait toutefois été annulée par le tribunal administratif de Lille, sur le fondement de la jurisprudence du Conseil d’Etat qui avait estimé ce type de radiation illégal, et imposait aux employeurs publics dont les agents avaient été condamnés de conduire une procédure disciplinaire pour ces faits, laquelle ne pouvait aboutir à une radiation des cadres que si une révocation ou une mise à la retraite d’office était prononcée (CE, 5 décembre 2016, n° 380763).

L’établissement avait, à la suite de ce jugement, repris une nouvelle décision de radiation à l’encontre du même agent, dont la date d’effet était fixée au même jour que la précédente – et était donc rétroactive – sans procédure disciplinaire, cette fois sur le fondement de l’article 24 de la loi du 13 juillet 1983, qui prévoyait que « la cessation définitive de fonction qui entraîne la radiation des cadres et la perte de qualité de fonctionnaire résulte […] de l’interdiction de justice d’exercice un emploi public ». C’est la décision dont la Cour administrative d’appel de Douai vient de confirmer la légalité.

Elle confirme ainsi l’automaticité des conséquences que l’administration doit tirer d’une telle interdiction prononcée par la juridiction pénale et en précise toute la portée. L’administration se trouve en situation de compétence liée pour prononcer la radiation des cadres. A l’instar de l’ensemble des mesures de radiation des cadres, il s’agit en réalité d’une mesure purement administrative qui tire les conséquences d’une situation de fin d’emploi préexistante (sanction, abandon de poste, licenciement). Pour cette raison, elle peut intervenir rétroactivement, à la date à laquelle l’interdiction pénale prend effet, c’est-à-dire à la date à compter de laquelle le fonctionnaire ne peut plus exercer sa profession. Cet état de droit n’est en outre aucunement impacté par le caractère temporaire de l’interdiction professionnelle : les conséquences qu’il appartient à l’administration d’en tirer sont les mêmes.

La décision n’épuise certes pas totalement le débat en ce qui concerne cette situation. En l’occurrence, l’agent appartenait à un corps et grade dont l’ensemble des fonctions possibles lui étaient interdites, puisque c’est la profession infirmier dans son entièreté qui lui était interdite. Or aucune obligation de reclassement dans un autre corps ne s’impose à l’administration dans ces hypothèses.

Il pourrait en aller différemment pour les fonctionnaires appartenant à un corps qui autoriserait l’exercice de missions plus variées, dont des fonctions dont l’exercice ne lui aurait pas été interdit par l’interdiction pénale. Dans ce cas, l’administration serait-elle tenue de changer l’affectation de son agent, en procédant à une sorte d’aménagement de poste imposé non pas une contrainte physique mais par une interdiction pénale ? Qu’en serait-il en l’absence de tels postes dans la collectivité ? Faudrait-il justifier alors de cette absence, voire prévoir, chose curieuse pour une décision prise en compétence liée, de la motiver sur ce point ? Ces questions restent posées et la prudence sera recommandée dans ces cas. 

Les droits d’administration de pages de réseaux sociaux du service concédé sont des biens de retour

Dans le cadre d’un contrat de concession, les biens, meubles ou immeubles, qui résultent d’investissements du concessionnaire et sont nécessaires au fonctionnement du service public sont des « biens de retour » qui, dans le silence du contrat, sont et demeurent la propriété de la personne publique dès leur réalisation ou leur acquisition et qui doivent donc être restitués à celle-ci à l’issue du contrat. Cette restitution doit être en principe gratuite ou, lorsque le bien en question n’est pas totalement amorti, en contrepartie d’une somme correspondant à sa valeur nette comptable.

Ce régime des biens de retour, précisé par la jurisprudence (CE, 21 décembre 2012, Commune de Douais, req. n° 342788), est désormais codifié aux articles L. 3132-4 et L. 2132-5 du Code de la commande publique.

Toutefois, ni la législation ni la jurisprudence n’avaient clairement précisé, jusqu’ici, si le régime des biens de retour avait vocation à s’appliquer ou non aux biens immatériels que sont les droits d’administration des pages de réseaux sociaux, alors que celles-ci sont désormais des outils déployés quasi-systématiquement par les concessionnaires de service dans le cadre de leur exploitation.

Cette précision vient d’être apportée par la décision du Conseil d’État en date du 16 mai 2022, rendue dans le cadre d’un litige opposant la Commune de Nîmes à son ancien délégataire en charge de l’exploitation touristique et culturelle des arènes de Nîmes, de la Maison carrée et de la tour Magne et portant sur la restitution de biens matériels et immatériels liés à cette exploitation, notamment les communautés et contenus numériques liés aux pages des réseaux sociaux (Facebook, Twitter et Instagram) et le film relatif à la Maison carrée et les décors des Grands Jeux romains.

Confrontée au refus de l’entreprise de lui restituer les biens en question, la Commune de Nîmes a saisi le Juge des référés du Tribunal administratif de Nîmes d’un référé «mesures utiles » par lequel elle lui a demandé d’ordonner à l’entreprise de procéder sans délai à cette restitution, sous astreinte. Toutefois, cette demande a été rejetée par le Juge des référés le 13 décembre 2021, au motif que les stipulations du contrat étaient susceptibles de faire obstacle au retour gratuit des biens nécessaires au service créés au cours de la délégation.

Saisi en cassation par la Commune de Nîmes, le Conseil d’État commence par confirmer qu’il ressort de l’office du Juge des référés que d’ordonner à un concessionnaire de restituer à l’autorité délégante des biens de retour, dès lors que cette restitution remplit les conditions posées par l’article L. 521-3 du Code de justice administrative, à savoir qu’elle est utile, justifiée par l’urgence et ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

En outre, il confirme également la compétence de la juridiction administrative pour connaitre du litige qui, contrairement à ce que soutenait l’ancien délégataire, n’était pas relatif à la propriété littéraire et artistique des biens en question et ne relevait donc pas de la compétence du juge judiciaire

Ensuite, il rappelle que « si les parties au contrat de délégation peuvent décider la dévolution gratuite à la personne publique d’un bien qui ne serait pas nécessaire au fonctionnement du service public, elles ne sauraient en revanche exclure qu’un bien nécessaire au fonctionnement du service public lui fasse retour gratuitement ». Par suite, il considère, en substance, que le Juge des référés a commis une erreur de droit en jugeant que des clauses contractuelles pouvaient faire obstacle à l’application du régime légal des biens de retour à des biens effectivement indispensables au fonctionnement du service.

Après avoir annulé l’ordonnance attaquée, le Conseil d’État se prononce sur le fond. Sur le cas particulier des droits d’administration des pages des réseaux sociaux, il relève que les stipulations du contrat mettaient expressément à la charge du délégataire la communication et la promotion via ces réseaux.

Sur le fondement de cette seule circonstance, il en conclut : « Les droits d’administration des pages des réseaux sociaux relatives aux monuments faisant l’objet du contrat étant nécessaires au fonctionnement du service public tel qu’institué par la commune de Nîmes, ils doivent lui faire retour gratuitement au terme du contrat ». Il précise également que cette transmission n’est pas incompatible en elle-même avec les dispositions du règlement général sur la protection des données (RGPD) et qu’elle doit seulement être conforme à ces dispositions dans les cas où la restitution emporte la communication de données à caractère personnel.

Par cette décision, le Conseil d’État érige donc en biens de retour les droits d’administration des pages des réseaux sociaux créées par le concessionnaire dans le cadre de son exploitation.

Par la suite, le Conseil d’État considère, en l’espèce, que les conditions d’utilité et d’urgence sont remplies pour ordonner au précédent délégataire de restituer à la Commune sans délai et sous astreinte ces droits d’administration, compte tenu du fait que l’exploitation des pages en cause a été interrompue, alors qu’elles constituent, par leur ancienneté et les communautés d’abonnés qu’elles réunissent, un élément important de la valorisation des monuments, que le nouveau délégataire ne saurait reconstituer rapidement.

Enfin, le Conseil d’État qualifie également de biens de retour le film de la Maison Carrée ainsi que les décors utilisés pour l’organisation des « Grands Jeux romains », en se fondant là encore sur les stipulations contractuelles, et considère qu’il y a lieu également d’ordonner leur restitution sous astreinte. En revanche, il rejette les demandes de restitution de la Commune portant sur « d’autres biens immatériels liés à la délégation », faute de précision permettant d’identifier les biens concernés et de confirmer que les conditions d’urgence et d’utilité sont remplies.

L’obligation de l’employeur public de prévoir un entretien à la suite d’une demande de rupture conventionnelle

Par une ordonnance du 21 avril 2021, le Juge des référés du Tribunal administratif de Paris avait considéré que le Ministre de l’intérieur était tenu d’émettre un avis motivé sur une demande de rupture conventionnelle présentée par un agent et ayant donné lieu préalablement à l’entretien prévu à l’article 2 du décret n° 2019-1593 du 31 décembre 2019 relatif à la procédure de rupture conventionnelle dans la fonction publique.

Cette décision était fondée sur une circulaire du dit Ministre en date du 15 novembre 2020 par laquelle il avait fixé un cadre de mise en œuvre de la procédure prévoyant un tel avis.

On pouvait donc s’interroger sur le point de savoir si, sans cette circulaire, la position du Juge des référés aurait été la même, à savoir d’imposer à l’administration d’instruire et de se positionner sur toute demande de rupture conventionnelle qui, pourtant, reste une décision à la discrétion des parties et non une obligation.

Une décision récente du Tribunal administratif de Paris (n° 2100749/2-2 du 13 juin 2022) laisse à penser que tel est le cas.

Dans cette affaire, une agente de l’AP-HP avait demandé le bénéficie d’une rupture conventionnelle et l’établissement lui avait refusé d’emblée, par une décision du 23 juillet 2020 portée par elle à la censure du Tribunal au motif, d’une part, qu’elle lui faisait grief et, d’autre part – ce constat de recevabilité opéré – que la décision de refus serait entachée d’un vice de procédure dès lors que la demanderesse aurait dû être convoquée à l’entretien prévu par l’article 2 du décret du 31 décembre 2019.

Outre que le refus de faire bénéficier un agent d’une rupture conventionnelle que rien ne l’oblige a conclure in fine est pour le Tribunal une décision susceptible de recours, sans quoi il aurait rejeté la requête pour irrecevabilité, cette décision se positionne favorablement à l’agente, en considérant qu’en suite de la réception d’une demande de rupture conventionnelle l’entretien prévu par le décret du 31 décembre 2019 est obligatoire.

Rejetant l’argument selon lequel la rupture ne peut que résulter de l’accord des parties, le Tribunal indique qu’il résulterait des dispositions du décret que l’autorité administrative ne pourrait « légalement » opposer un refus à la demande régulièrement formée par le fonctionnaire qui envisage une telle rupture sans avoir préalablement organisé l’entretien « dont la tenue présente une garantie ».

Autant on peut comprendre la garantie que représente l’entretien pour l’agent en cas de conclusion d’une convention de rupture à l’initiative de l’administration – l’objet de l’entretien étant en effet selon l’article 4 du décret  d’examiner les motifs de la demande mais aussi la fixation de la date de la cessation définitive des fonctions, le montant envisagé de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle et, dernier point mais non des moindres, les conséquences de la cessation définitive des fonctions – autant on peine à appréhender ce qu’un tel entretien garantit à l’agent  dans le cas où l’administration ne souhaite pas, en tout état de cause, accéder à sa demande.

Dans l’attente d’une confirmation de cette position des juges de première instance quant à l’obligation pour l’administration de mener une procédure préalable à une rupture qu’elle est pourtant encore libre de refuser, la prudence est donc de mise et le conseil à observer est le suivant : « quand demande de rupture conventionnelle sans intérêt pour toi tu recevras, même artificiellement la procédure du décret tu mèneras ».

Le titulaire d’un marché de travaux qui n’établit pas le projet de décompte final demeure toujours fondé à contester le décompte général

Un syndicat intercommunal (ci-après, le « Syndicat ») a conclu un marché de travaux (ci-après, le « Marché ») avec un groupement solidaire d’entreprises (ci-après, le « Groupement »). À la suite de la réception des travaux, faute pour le Groupement d’établir le projet de décompte final conformément aux stipulations du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux en sa version de 2009 (ci-après, le « CCAG »), le Syndicat l’a mis en demeure de produire ce projet.

Le Groupement ayant fait savoir au Syndicat qu’il n’était pas en mesure d’établir ce projet, le Syndicat a, en application de la procédure prévue par le CCAG, établi le décompte général du marché et l’a notifié au Groupement. Le Groupement a, conformément à l’article 50.1 du CCAG, adressé au Syndicat un mémoire en réclamation portant sur une somme totale de 3 161 087,68 euros TTC. Après rejet de sa réclamation, le Groupement a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille qui a partiellement fait droit à sa demande. Toutefois, la cour administrative d’appel de Douai a annulé ce jugement et les membres du Groupement se sont pourvus en cassation contre l’arrêt de la cour.

La question de droit que le Conseil d’État devait trancher était celle de savoir si le titulaire d’un marché de travaux conservait la faculté de contester le décompte général établi par le maître d’ouvrage public sur la base du décompte final établi d’office par le maître d’œuvre en raison de l’absence de production par ce titulaire du projet de décompte final et plus particulièrement sur la faculté du titulaire de contester des demandes non incluses dans le décompte final établi d’office.

Pour répondre à cette question, le Conseil d’État commence par rappeler les modalités d’établissement du décompte général et définitif d’un marché public de travaux telles que définies par les articles 13.3.1 à 13.4.5. du CCAG en soulignant qu’il résulte de ces stipulations que « le titulaire du marché doit dresser un projet de décompte final après l’achèvement des travaux, lequel projet doit être remis au maître d’œuvre dans un délai de quarante-cinq jours à compter de la date de notification de réception des travaux. S’il ne se conforme pas à cette obligation, et après mise en demeure restée sans effet, le décompte final peut être établi d’office par le maître d’œuvre. Il appartient ensuite au maître d’ouvrage d’établir, à partir de ce décompte final et des autres documents financiers du marché, un décompte général et de le notifier au titulaire du marché. Si celui-ci n’a pas renvoyé ce décompte général dans les quarante-cinq jours, en exposant le cas échéant les motifs de son refus, ce décompte général est réputé accepté par lui et devient le décompte général et définitif du marché ».

Il donne ensuite la solution à la problématique qui lui était posée en jugeant que les stipulations précitées ont simplement pour objet d’organiser la procédure d’établissement du décompte général et définitif mais non pas pour effet de déterminer les modalités de contestation du décompte général, dès lors que cette contestation est encadrée par l’article 50.1 du CCAG. Ainsi, « lorsque le titulaire du marché n’a pas produit de projet de décompte final et qu’après mise en demeure demeurée sans suite, ce décompte final a été établi d’office par le maître d’œuvre, les stipulations précédemment citées n’ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de le priver du droit de former, dans le délai de quarante-cinq jours suivant la transmission du décompte général du marché, une réclamation sur ce décompte général, quand bien même elle porterait sur un poste de rémunération ou d’indemnisation qui n’avait pas été mentionné dans le décompte final établi d’office par le maître d’œuvre ».

Il est intéressant de relever que les titulaires des marchés publics de travaux qui n’ont pas établi le projet de décompte final sont tout de même fondés à porter une réclamation sur un poste de rémunération ou d’indemnisation qui n’avait pas été mentionné dans le décompte final établi d’office par le maître d’œuvre et à partir duquel le maître d’ouvrage a arrêté le décompte général. En effet, le Conseil d’État avait jugé que les titulaires des marchés publics de travaux ne sont pas fondés à faire état dans leur mémoire en réclamation de demandes non incluses dans le projet de décompte final qu’ils ont établi (CE, 16 décembre 2015, SAS Ruiz, n° 373509). En offrant cette faculté au titulaire n’ayant pas produit le projet de décompte final, le Conseil d’État a vraisemblablement voulu éviter que le titulaire se trouve dépourvu fasse à l’hypothèse où le maître d’œuvre aurait omis des éléments notables dans le décompte final établi d’office.

La censure de la conservation des données pendant un an par les opérateurs de communication électronique

Habib A. et autre [Conservation des données de connexion pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales].

Le Conseil constitutionnel, saisi de questions prioritaires de constitutionnalité, censure un article permettant la conservation des données pendant un an par les opérateurs de communication électronique.

L’article L.34-1 du Code des postes et des communications électroniques prévoyait en son paragraphe III qu’il était possible notamment pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales de conserver pendant un an certaines catégories de données de connexion en vue de leur mise à disposition à l’autorité judiciaire.

Le Conseil constitutionnel relève que les données collectées portent sur l’identification des utilisateurs, sur la location de leurs équipements, la date, l’horaire et la durée des communications et les données d’identification de leurs destinataires. Ces informations, nombreuses et précises, sont ainsi susceptibles de porter atteinte à la vie privée des utilisateurs, selon lui.

Par ailleurs, toutes les données de connexion sont concernées et la nature et la gravité des infractions susceptibles d’être recherchées ne sont pas prises en compte. En outre, aucun contrôle juridictionnel n’était prévu par les dispositions en cause.

Constatant un déséquilibre entre l’objectif d’ordre public recherché et une atteinte excessive à la vie privée, le Conseil constitutionnel statue dans le sens de l’inconstitutionnalité de la disposition légale. Il est toutefois à noter qu’elles avaient déjà été supprimées par loi n° 2021-998 du 30 juillet 2021 relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement. En outre, dans l’objectif de sauvegarder l’ordre public, le Conseil constitutionnel a décidé de ne pas remettre en cause la validité des mesures prises sur le fondement de cette ancienne législation, ce qui prive sa décision de tout effet utile.

Cette décision s’inscrit en continuité d’arrêts rendus la Cour de justice de l’Union européenne le 6 octobre 2020 (CJUE, 6 octobre 2020, Privacy international, C-623/17 – CJUE, 6 octobre 2020, la Quadrature du Net, French Data network, Ordre des barreaux francophones et germanophone, C-511/18, C-512/18, C-520/18) qui sanctionnaient la conservation généralisée et indifférenciée des données dans le cadre d’une procédure pénale.

En revanche, le Conseil d’Etat avait autorisé la poursuite de conversation généralisée des données dans le cadre de la lutte actuelle pour la sauvegarde de la sécurité nationale (CE, 26 juillet 2018, n° 394922, 394925, 397851).

Ainsi, cette décision du Conseil constitutionnel pourrait entrainer un conflit de jurisprudences concernant la conservation généralisée et indifférenciée des données.

L’action en justice des associations de consommateurs

Une question préjudicielle a récemment été posée à la CJUE afin de savoir si les dispositions du RGPD (Règlement général sur la protection des données) permettaient à une association de consommateurs d’introduire un recours indépendamment de la violation de droits concrets de personnes concernées individuelles et en l’absence d’un mandat d’une personne concernée.

Dans cette affaire, une association de consommateurs avait intenté un recours contre Meta Platforms Ireland (anciennement Facebook). Il était question de jeux gratuits par lesquels l’ex-Facebook récoltait de nombreuses données personnelles de l’utilisateur.

La CJUE répond par l’affirmative en indiquant que les Etats membres peuvent prévoir un mécanisme d’action représentative contre l’auteur présumé d’une atteinte à la protection des données, et ce indépendamment de tout mandat ou de la violation de droits concrets d’une personne concernée.

L’intérêt à agir des associations de consommateur est justifié car elles poursuivent un objectif d’intérêt public consistant à assurer les droits et libertés des personnes concernées en tant que consommateurs. Or la violation des règles tendant à protéger les consommateurs est connexe à la violation des règles en matière de protection des données à caractère personnel de ces consommateurs.

La CJUE rajoute qu’il suffit de faire valoir que le traitement des données est susceptible d’affecter les droits des personnes physiques concernées, qu’elles soient identifiées ou identifiables.

L’action des associations de consommateurs permettra de renforcer les droits des personnes concernées et augmentera leur niveau de protection. D’autant plus qu’un recours exercé par une telle association pourrait s’avérer plus efficace qu’un recours d’une personne physique individuelle.

La remise en cause de l’exercice du droit de préemption sur une parcelle grevée d’un bail à construction

Dans cette affaire, par un arrêté en date du 20 janvier 2020, le Maire de Mandelieu-la-Napoule a décidé d’exercer son droit de préemption urbain sur trois parcelles, au prix fixé par les vendeurs, en vue de la réalisation d’une opération d’aménagement d’un pôle d’excellence de nautisme.

Seulement, ces parcelles étaient grevées de deux baux à construction au profit de différentes sociétés.

A la suite de la décision de préemption, les propriétaires de ces parcelles, et les sociétés titulaires de baux à constructions sur celles-ci, ont demandé au Juge des référés du tribunal administratif de Nice de suspendre l’arrêté du Maire.

Le Juge des référés de Nice a suspendu l’exécution de l’arrêté municipal uniquement en tant qu’il permet le transfert de propriété ou la prise de possession du bien préempté au bénéficie de la collectivité publique titulaire du droit de préemption. La Commune a alors contesté cette ordonnance devant le Conseil d’État.

Le Conseil d’État a d’abord rappelé que les deux contrats de baux à construction avaient été conclu en 1988 pour une durée de 32 ans et stipulaient une promesse de vente au profit des sociétés preneuses, lesquelles devaient manifester leur intention d’acquérir lesdites parcelles au plus tard le 14 mars 2020.

Or, dès 2019, les sociétés parties à ces contrats ont demandé la réalisation de ces promesses de vente. C’est donc dans ce cadre que la Commune a été destinataire d’une déclaration d’intention d’aliéner.

S’agissant ensuite des conditions du référé suspension, le Conseil d’État a rapidement reconnu l’urgence à suspendre, compte tenu des effets de la décision de préemption sur l’acquéreur évincé, et l’absence de démonstration par la Commune de la nécessité de réaliser son projet dans des délais rapides – ce que ne permettrait pas la décision de préemption.

S’agissant de la condition relative au doute sur la légalité de la décision de préemption, le Conseil d’État a considéré que cette seconde condition était également remplie.

Selon le Conseil d’État, par principe, l’existence d’un bail à construction sur une parcelle ne fait pas obstacle à l’exercice du droit de préemption sur celle-ci.

Toutefois, il précise que, lorsque cette préemption est exercée à l’occasion de la levée, par le preneur au bail à construction, de l’option stipulée dans le contrat lui permettant d’accepter la promesse de vente consentie par le bailleur sur les parcelles données à bail, l’autorité préemptrice prend alors la place du propriétaire initial des parcelles, et lui succédera également dans sa qualité de bailleur. Consécutivement, l’autorité préemptrice, en sa qualité de bailleur, devra supporter les obligations attachées à cette qualité car elle devient partie au contrat, et en particulier celle d’exécuter la promesse de vente consentie par le bailleur initial dans le cadre du bail à construction grevant les parcelles en litige.

Dans cette espèce, la Commune étant obligée par le contrat de bail de céder les parcelles en litige aux sociétés preneuses, sa décision de préemption ne pouvait alors plus conduire à la réalisation d’une action ou opération d’aménagement, motif nécessaire à la légalité d’une décision de préemption.

Autrement dit, la justification de la décision de préemption attaquée a été vidée de sa substance par le contenu des contrats de baux à construction, de sorte que la Conseil d’État a considéré qu’il y avait un doute sérieux sur la légalité de la décision de préemption.

C’est ici bien comprendre que si l’autorité préemptrice peut préempter une parcelle grevée d’un bail à construction, il lui appartiendra d’être vigilante aux obligations du bailleur puisqu’en préemptant, elle lui succédera dans cette qualité. Or, selon les obligations réciproques des parties au contrat de bail à construction, le contenu dudit contrat est susceptible de remettre en cause voire de rendre impossible la mise en œuvre de l’objet même de la préemption pour lequel l’autorité préemptrice a voulu exercer son droit.

Recevabilité des mémoires produits au-delà des délais de l’article R. 311-26 du Code de l’expropriation devant la cour d’appel statuant sur renvoi après cassation

Par un arrêt en date du 6 avril 2022, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a rappelé un principe constant concernant la procédure applicable devant la Cour d’appel statuant sur renvoi après cassation.

En effet, si, par application des dispositions de l’article R. 311-26 du Code de l’expropriation, les conclusions d’appelant doivent, à peine de caducité de la déclaration d’appel, être notifiées dans un délai de 3 mois à compter de la déclaration d’appel et, que les conclusions d’intimé doivent être notifiées dans le délai de 3 mois à compter de la notification qui lui est faite de conclure, ces délais ne sont pas applicables devant la cour d’appel statuant sur renvoi après cassation.

Et pour cause, en vertu des dispositions de l’article 631 du Code de procédure civile, devant la juridiction de renvoi, l’instruction est reprise en l’état de la procédure non atteinte par la cassation.

Quid de la recevabilité de l’intervention volontaire du preneur évincé à l’instance indemnitaire du propriétaire exproprié ?

Par un arrêt en date du 6 avril 2022, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a eu à se prononcer sur la recevabilité de l’intervention volontaire du preneur évincé à l’instance indemnitaire opposant l’expropriant au propriétaire des murs.

En effet, la société GPLH locataire du propriétaire exproprié a formé une intervention volontaire à l’instance indemnitaire opposant l’expropriant à l’exproprié au motif que l’expropriant avait connaissance de son existence et de sa qualité de locataire de l’exproprié avant la saisine du juge de l’expropriation.

Sur le fondement de l’article R. 311-9 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique qui dispose que le juge de l’expropriation ne peut être saisi qu’à défaut d’accord dans le délai d’un mois à compter soit de la notification des offres ou du mémoire de l’expropriant, soit de la mise en demeure de procéder à la notification de ses offres adressée à l’expropriant par tout intéressé, la Cour de cassation considère que puisque l’expropriant s’est abstenu de faire une offre au preneur évincé et que ce dernier n’a pas mis en demeure l’expropriant de lui notifier une offre, l’intervention volontaire du preneur évincé est irrecevable.

Par cette décision, la Cour de cassation confirme que la saisine du juge de l’expropriation est conditionnée à une phase amiable obligatoire, celle d’une offre indemnitaire n’ayant pas abouti dans le délai légal.

Pas de remplacement en cours d’exécution d’un marché public d’un autre opérateur à l’un des membres du groupement d’opérateurs titulaires sans mise en concurrence

Dans cette affaire, le Groupe hospitalier du sud de l’Ile-de-France (ci-après GHSIF) a conclu, en 2019 avec un groupement conjoint composé de cinq sociétés, un marché public d’assurance responsabilité civile et risques annexes, pour une durée de trois ans.

En 2021, l’une des entreprises composant ce groupement a informé le GHSIF de son intention de « résilier le marché d’assurance de responsabilité civile ». Le GHSIF a, alors, conclu avec le mandataire de ce groupement un avenant ayant pour objet de substituer un nouvel opérateur économique à cette société, pour la durée restant à courir du marché.

Considérant que la passation de cet avenant était irrégulière, la société hospitalière d’assurance mutuelle (SHAM), entreprise concurrente, a saisi le juge du référé contractuel, sur le fondement des dispositions de l’article L. 551-13 du Code de justice administrative, d’une demande tendant à l’annulation de cet avenant. A la suite du rejet de sa demande, la SHAM a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de l’ordonnance rendue par le juge des référés du Tribunal administratif de Melun.

Cet arrêt a, tout d’abord, été l’occasion pour le Conseil d’Etat d’apporter des précisions sur les compétences du juge du référé contractuel. Il a, ainsi, décidé, comme en matière de référé précontractuel (voir en ce sens, CE 11 juillet 2008, Ville de Paris, n° 312354), que le juge du référé contractuel n’est compétent pour statuer sur un avenant à un contrat que lorsque la conclusion d’un tel accord était soumise aux règles de publicité et de mise en concurrence. En principe, l’avenant légal qui n’est pas soumis à des obligations de publicité et de mise en concurrence, n’entre pas dans le champ du référé contractuel.

Le Conseil d’Etat s’est, ensuite, prononcé sur la régularité de l’avenant conclu entre le GHSIF et le mandataire du groupement d’entreprises titulaires.

Après avoir rappelé le contenu des articles L. 2194-1 et R. 2194-5 à R. 2194-7 du Code de la commande publique relatives aux modifications du marché autorisées, le Conseil d’Etat a décidé que « la substitution, au cours de l’exécution d’un marché passé avec un groupement d’opérateurs économiques, lequel n’est pas doté de la personnalité juridique, d’un ou de plusieurs des membres de ce groupement par un ou plusieurs autres opérateurs économiques constitue une modification du titulaire du marché qui ne peut valablement avoir lieu sans mise en concurrence que dans les cas prévus par les dispositions de l’article L. 2194-1 du code de la commande publique ».

Il a considéré qu’en jugeant que la substitution de l’un des membres du groupement titulaire du marché effectuée par l’avenant ne constituait pas une modification du titulaire du marché soumise aux dispositions précitées du Code de la commande publique dès lors que cette modification ne concernait qu’un membre du groupement et que son mandataire n’avait pas changé, le juge des référés du Tribunal administratif avait commis une erreur de droit.

Selon le Conseil d’Etat, le remplacement d’un opérateur au sein d’un groupement d’entreprises, dont chacun des membres à la qualité de cocontractant de l’administration, doit être analysé comme un changement de titulaire qui ne peut avoir lieu que dans les cas et conditions prévus à l’article R. 2194-6 du Code de la commande publique (« 1° En application d’une clause de réexamen ou d’une option conformément aux dispositions de l’article R. 2194-1 ; / 2° Dans le cas d’une cession du marché, à la suite d’une opération de restructuration du titulaire initial, à condition que cette cession n’entraîne pas d’autres modifications substantielles et ne soit pas effectuée dans le but de soustraire le marché aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Le nouveau titulaire doit remplir les conditions qui avaient été fixées par l’acheteur pour la participation à la procédure de passation du marché initial. »).

Le Conseil d’Etat a, en conséquence, estimé que la SHAM était fondée à soutenir qu’en procédant au remplacement d’un des membres du groupement titulaire sans mise en concurrence, le GHISF avait manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence. Estimant qu’en l’espèce, une raison impérieuse d’intérêt général, tenant notamment à l’obligation légale faite aux établissements de santé de disposer d’une assurance destinée à les garantir pour leur responsabilité civile, se heurtait à l’annulation des dispositions litigieuses de l’avenant, le Conseil d’Etat a uniquement fait application des dispositions de l’article L. 551-19 du Code de justice administrative et a infligé au GHSIF une pénalité financière de 5 000 euros.

Ce faisant, le Conseil d’Etat analyse désormais les évolutions affectant la situation du titulaire d’un marché public selon les termes, non plus de sa conception traditionnelle de la cession de contrat synthétisée dans son avis du 8 juin 2000, mais du droit européen, tel qu’initié par l’arrêt « Pressetext »[1] du 19 juin 2008 de la Cour de justice des communautés européennes. Cet arrêt avait changé de perspective en ne focalisant plus la problématique sur la notion de cession mais sur celle de substitution du cocontractant, dont le Professeur RICHER avait souligné « la conception plus économique que juridique du changement de cocontractant »[2].

 

Tant le droit européen, au titre du d) du 4. de l’article 72 de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 que le droit national, au titre de l’article L. 2194-1 et du 4° de l’article R. 2194-7 du Code de la commande publique, considèrent que la substitution d’un nouveau contractant à celui auquel le pouvoir adjudicateur a initialement attribué le marché public constitue une modification substantielle dudit marché, laquelle ne peut être avoir lieu sans mise en concurrence que dans les cas limitativement énumérés par les textes.

 

[1] CJCE, 19 juin 2008, Pressetext, Aff. C‑454/06.

[2] L. Richer, l’avis du Conseil d’État du 8 juin 2000 sur la cession de contrat : quinze ans après, AJDA, 2014, p. 1925.

La CNIL met en demeure 22 communes de désigner un délégué à la protection des données

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a rendu une décision dans laquelle elle met en demeure 22 communes de désigner un délégué à la protection des données (DPD).

Pour rappel, l’obligation de désigner un DPD résulte de l’article 37 du Règlement général sur la protection des données (RGPD) et s’impose à toutes les communes quelle que soit leur taille.

Pour rappel, le DPD assume, dans les organismes le rôle de conseil sur tout sujet intéressant la conformité à la réglementation informatique et liberté et constitue l’interlocuteur privilégié de la CNIL.

Le DPD peut être choisi en interne ou en externe de l’organisme et être mutualisé (ce qui est généralement le cas pour les communes avec les structures intercommunales auxquelles elles appartiennent).

La CNIL rappelle, par ailleurs, dans cette mise en demeure, la nécessité pour les communes de se donner les moyens de remplir leurs obligations de sécurité vis-à-vis des données des administrés et de mettre en œuvre une politique de protection efficace. Il s’agit d’un enjeu d’autant plus important que les actualités témoignent de l’augmentation des cyberattaques à l’encontre des organismes publics et partant à l’encontre de nombreuses communes.

Cette décision démontre immanquablement l’augmentation des contrôles de conformité réalisés par la CNIL y compris dans le secteur public.

L’augmentation de ses effectifs, permise par une évolution sensible de son budget, via la dernière loi de finances, n’est probablement pas sans lien avec l’intervention de cette décision (25 ETP complémentaires en 2022).

Il est, encore, notable que la CNIL ait décidé de la publication de cette mise en demeure car elle estime l’inaction des communes défavorable aux administrés, qui doivent donc être informés du manque, voire de l’absence de mesures prises en faveur de la protection de leurs données.

Les communes ont donc 4 mois pour s’exécuter, sinon elles risquent l’intervention d’une sanction, principalement d’une amende.

En tout état de cause, cette décision incite, plus généralement, l’ensemble des communes à vérifier avoir engagé les efforts nécessaires pour leur mise en conformité au RGPD.

 

Elise Humbert et Jeanne Thouverez