Droit du travail et de la sécurité sociale
le 23/06/2022
Alix MERCERON
Benoît ROSEIRO

Renouvellement du CSE : êtes-vous prêts ?

Les élections professionnelles des représentants du personnel se déroulent dans les entreprises au terme de chaque mandat traditionnellement d’une durée de quatre ans.

A ce titre, un grand nombre d’employeurs disposant d’un effectif composé de salariés et de fonctionnaires, s’apprêtent à la rentrée 2022 à renouveler leur comité économique et social (CSE) pour leurs salariés de droit privé. En effet, ces élections professionnelles sont calées avec celle de la fonction publique de l’Etat qui se déroulent du 1er décembre au 8 décembre 2022[1].

C’est à l’employeur de prendre l’initiative d’organiser les élections de son CSE, qu’il s’agisse de sa mise en place lorsque l’effectif de plus de 10 salariés est atteint, ou de son renouvèlement. À défaut, l’employeur encourt le délit d’entrave[2].

Dès lors, ce renouvellement doit s’anticiper pour une mise en œuvre à compter de la mi-septembre voir en amont si la mise en place d’un vote électronique est souhaitée.

Nous proposons un tour d’horizon des grandes étapes préalables nécessaires au renouvellement des CSE.

Etape 1 : Déterminer le périmètre des élections

Il s’agit généralement du même périmètre que la dernière élection professionnelle.

Dans le cadre d’un changement lié par exemple à une fusion ou une intégration dans une Unité Economique et Social depuis les dernières élections du personnel, le périmètre du CSE a pu évoluer et il appartient à l’employeur de le consolider dans la perspective des prochaines élections.

L’article L. 2313-2 du Code du travail indique que le nombre et le périmètre des établissements distincts pour la mise en place des CSE est déterminé par un accord d’entreprise. L’article L. 2313-4 du même Code précise que « en l’absence d’accord, l’employeur fixe le nombre et le périmètre des établissements distincts, compte tenu de l’autonomie de gestion du responsable de l’établissement, notamment en matière de gestion du personnel ».

La Cour de cassation a précisé que l’articulation de ces deux articles imposée une négociation préalable d’un accord collectif si des délégués syndicaux sont présent dans l’entreprise pour déterminer le périmètre de la mise en place des institutions représentatives du personnel :

« Il résulte de ces dispositions que ce n’est que lorsque, à l’issue d’une tentative loyale de négociation, un accord collectif n’a pu être conclu que l’employeur peut fixer par décision unilatérale le nombre et le périmètre des établissements distincts ».[3]

En l’absence d’accord conclu ou en l’absence de délégué syndical, l’employeur doit rechercher un accord avec le CSE qui sera adopté à la majorité de ses membres titulaires, pour déterminer le nombre et le périmètre des établissements distincts[4].

Ce n’est qu’en l’absence d’un accord conclu avec organisations syndicales ou le CSE, que l’employeur peut déterminer le nombre et le périmètre des établissements distincts (C. trav. art. L. 2313-3).

L’employeur devra porter sa décision à la connaissance des syndicats représentatifs dans l’entreprise et de chaque syndicat y ayant constitué une section syndicale par tout moyen permettant de conférer date certaine à cette information.  De la même manière si les négociations avec le CSE n’ont pas abouti, l’employeur devra réunir le comité afin de l’informer de sa décision[5].

Etape 2 : Engager une négociation pour la mise en place du vote électronique

Le recours au vote électronique s’est intensifié depuis la crise sanitaire. Si sa mise en place est plus couteuse du fait du recours systématique à un prestataire de vote électronique (entre 3.000 et 5.000 € environ), le recours au vote électronique décharge les équipe des Ressources humaines de la préparation pratique des élections professionnelles (recherche d’isoloirs, commandes des enveloppes et des bulletins etc.), souvent chronophage.

Le vote électronique peut être mis en place soit par un accord collectif ou par une décision unilatérale de l’employeur[6].

Néanmoins, l’employeur doit obligatoirement tenter de négocier loyalement un accord collectif avec les délégués syndicaux avant d’instaurer le vote électronique par décision unilatérale. En l’absence de délégués syndicaux, l’employeur n’est pas tenu d’ouvrir une négociation selon les modalités dérogatoires (élus ou salariés, mandatés ou non) avant d’adopter une décision unilatérale[7].

L’employeur peut organiser lui-même les modalités de recours au vote électronique ou faire appel à un prestataire, sur la base d’un cahier des charges qui doit respecter les nombreuses dispositions règlementaires[8] avec notamment la mise en place :

  • d’un vote anonyme et chiffré par le système création d’un identifiant et d’un code transmis en dehors de la messagerie professionnelle ou simple courrier postal sans précautions suffisantes pour garantir la confidentialité des votes et des données transmises[9] ;
  • d’une édition de 3 clés de chiffrement connues seulement du président du bureau de vote et de deux de ses assesseurs, et dont 2 au moins doivent être activées pour le dépouillement du vote ;
  • d’un dispositif de secours pouvant prendre le relais en cas de panne du système principal.

Compte tenu la complexité et des exigences légales, le recours à un prestaire de vote est plus que recommandé.

Le protocole d’accord préélectoral doit mentionner l’existence de l’accord collectif ou de la décision ainsi unilatérale de l’employeur que le nom du prestataire de vote choisi si est déjà arrêté. De plus, une description détaillée du fonctionnement du système de vote retenu fourni par le prestataire de vote et du déroulement des opérations électorales doit également être annexée au protocole[10].

A défaut de protocole d’accord préélectoral, les modalités de mise en œuvre du vote électronique peuvent être déterminées unilatéralement par l’employeur ou, à défaut, par le tribunal judiciaire[11].

 

Etape 3 : Définir un calendrier des élections professionnelles

Lorsqu’il organise les élections, l’employeur doit veiller à ce qu’elles se déroulent selon les différents délais imposés notamment par la loi[12].

Le calendrier à suivre lors d’un renouvellement de l’instance calé sur les élections de la fonction publique de l’Etat en cas de présence de fonctionnaires dans les effectifs pourrait être le suivant :

  1. Au plus tôt : Négociation du périmètre des élections des institutions représentatives du personnel et engagement éventuel d’une négociation pour la mise en place du vote électronique jusqu’à l’étape 3 ;
  2. 9 septembre 2022, J-90 avant le premier tour: information du personnel sur l’organisation des élections ;
  3. 7 octobre 2022, J-60 avant le premier tour: invitation des syndicats intéressés à négocier le protocole préélectoral et à établir leurs listes de candidats ;
  4. 26 octobre 2022, J+15 après réception de l’invitation par les syndicats: 1ère réunion de négociation du protocole d’accord préélectoral entre l’employeur et les syndicats ;
  5. Mercredi 30 novembre, au moins J-4 avant les élections: publication des listes électorales par l’employeur ;
  6. Jeudi 8 décembre 2022, Jour J : déroulement du premier tour de scrutin ;
  7. Jeudi 22 décembre 2022, J+15 depuis le premier tour (expiration des mandats): déroulement d’un second tour de scrutin sauf si le CSE a été mis en place à l’issue du 1er Dans ce cas, l’employeur transmet les procès-verbaux notamment à l’inspection du travail dans les 15 jours ;
  8. J+15 après les élections: transmissions des procès-verbaux ou des procès-verbaux de carences notamment à l’inspection du travail.

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Les avocats du département droit social du cabinet SEBAN & ASSOCIES sont à votre disposition pour vous accompagner dans le renouvellement de vos institutions représentatives du personnel.

 

Benoît ROSEIRO et Alix MERCERON

 

[1] Arrêté du 9 mars 2022 fixant la date des prochaines élections professionnelles dans la fonction publique https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045327633

[2] Cass. Crim., 6 novembre 2007 n° 06-86.027 F-PF

[3] Cass. Soc., 17 avr. 2019, n° 18-22.948

[4] C. trav. art. L. 2313-3)

[5] C. trav. art. R. 2313-1.

[6] Article L. 2314-26 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000035651044

[7] Cass. Soc., 13 janvier 2021, n° 19-23.533 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000043045952

[8] Articles R. 2314-5 à R. 2314-18 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006072050/LEGISCTA000036415504/#LEGISCTA000036415504

[9] Cass. Soc., 20-9-2017 n° 16-60.272 FS-D

[10] Article R. 2314-13 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000036481841

[11] Cass. Soc., 4 juin 2014, n° 13-18.914 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000029057354/

[12] Articles L. 2314-4 à L. 2314-10 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006195695/