Fonction publique
le 16/06/2022

L’obligation de l’employeur public de prévoir un entretien à la suite d’une demande de rupture conventionnelle

Par une ordonnance du 21 avril 2021, le Juge des référés du Tribunal administratif de Paris avait considéré que le Ministre de l’intérieur était tenu d’émettre un avis motivé sur une demande de rupture conventionnelle présentée par un agent et ayant donné lieu préalablement à l’entretien prévu à l’article 2 du décret n° 2019-1593 du 31 décembre 2019 relatif à la procédure de rupture conventionnelle dans la fonction publique.

Cette décision était fondée sur une circulaire du dit Ministre en date du 15 novembre 2020 par laquelle il avait fixé un cadre de mise en œuvre de la procédure prévoyant un tel avis.

On pouvait donc s’interroger sur le point de savoir si, sans cette circulaire, la position du Juge des référés aurait été la même, à savoir d’imposer à l’administration d’instruire et de se positionner sur toute demande de rupture conventionnelle qui, pourtant, reste une décision à la discrétion des parties et non une obligation.

Une décision récente du Tribunal administratif de Paris (n° 2100749/2-2 du 13 juin 2022) laisse à penser que tel est le cas.

Dans cette affaire, une agente de l’AP-HP avait demandé le bénéficie d’une rupture conventionnelle et l’établissement lui avait refusé d’emblée, par une décision du 23 juillet 2020 portée par elle à la censure du Tribunal au motif, d’une part, qu’elle lui faisait grief et, d’autre part – ce constat de recevabilité opéré – que la décision de refus serait entachée d’un vice de procédure dès lors que la demanderesse aurait dû être convoquée à l’entretien prévu par l’article 2 du décret du 31 décembre 2019.

Outre que le refus de faire bénéficier un agent d’une rupture conventionnelle que rien ne l’oblige a conclure in fine est pour le Tribunal une décision susceptible de recours, sans quoi il aurait rejeté la requête pour irrecevabilité, cette décision se positionne favorablement à l’agente, en considérant qu’en suite de la réception d’une demande de rupture conventionnelle l’entretien prévu par le décret du 31 décembre 2019 est obligatoire.

Rejetant l’argument selon lequel la rupture ne peut que résulter de l’accord des parties, le Tribunal indique qu’il résulterait des dispositions du décret que l’autorité administrative ne pourrait « légalement » opposer un refus à la demande régulièrement formée par le fonctionnaire qui envisage une telle rupture sans avoir préalablement organisé l’entretien « dont la tenue présente une garantie ».

Autant on peut comprendre la garantie que représente l’entretien pour l’agent en cas de conclusion d’une convention de rupture à l’initiative de l’administration – l’objet de l’entretien étant en effet selon l’article 4 du décret  d’examiner les motifs de la demande mais aussi la fixation de la date de la cessation définitive des fonctions, le montant envisagé de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle et, dernier point mais non des moindres, les conséquences de la cessation définitive des fonctions – autant on peine à appréhender ce qu’un tel entretien garantit à l’agent  dans le cas où l’administration ne souhaite pas, en tout état de cause, accéder à sa demande.

Dans l’attente d’une confirmation de cette position des juges de première instance quant à l’obligation pour l’administration de mener une procédure préalable à une rupture qu’elle est pourtant encore libre de refuser, la prudence est donc de mise et le conseil à observer est le suivant : « quand demande de rupture conventionnelle sans intérêt pour toi tu recevras, même artificiellement la procédure du décret tu mèneras ».