Revalorisation du chèque Énergie au titre de l’année 2021

Calendrier d’envoi des chèques énergie exceptionnels 2021 selon les départements

 

Le décret n° 2021-1541 du 29 novembre 2021, publié au Journal officiel du 1er décembre 2021, revalorise le montant du chèque énergie au titre de l’année 2021, compte tenu du contexte de forte hausse du prix des énergies, et fixe ses modalités d’utilisation.

Pour mémoire, le chèque énergie, introduit par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissante verte, est un dispositif d’aide permettant à des foyers modestes de payer leurs factures d’énergie ou des travaux de rénovation dans leur logement.

Compte tenu de la hausse importante des prix de l’énergie, le Gouvernement avait annoncé à la presse, en septembre 2021, une revalorisation du chèque énergie qui bénéficiait, à cette date, à plus de 5,8 millions de ménages.

Le décret du 29 novembre 2021 commenté met en œuvre ces déclarations gouvernementales en prévoyant, à son article 1er, que la valeur faciale du chèque énergie est augmentée de 100 euros.

En pratique, cette revalorisation donnera lieu à l’émission d’un chèque énergie complémentaire dans les conditions prévues à l’article R. 124-2 du Code de l’énergie.

Ce dernier article prévoit, par ailleurs, que « le chèque émis au titre d’une année civile comporte une échéance au 31 mars de l’année civile suivante. Pour le chèque qui fait l’objet d’une réémission ou d’une émission tardive, la date de validité est fixée au 31 mars de l’année suivant sa date d’émission ».

Par dérogation à ces dispositions, l’échéance de validité du chèque énergie complémentaire émis au titre du présent décret est fixée au 31 mars 2023. Et, pour le chèque qui fera l’objet d’une réémission ou d’une émission tardive, la date de validité est fixée au 31 mars 2023  ou au 31 mars de l’année suivant sa date d’émission, si cette date est postérieure à la précédente.

Le ministère de la Transition écologique a publié le calendrier d’envoi du chèque énergie complémentaire, département par département. Cette aide sera envoyée entre le 13 décembre et le 22 décembre 2021.

Désignation, à titre transitoire, des fournisseurs de secours en électricité

Arrêté du 5 novembre 2021 portant nomination à titre transitoire d’un fournisseur de secours en électricité sur les zones de dessertes des entreprises locales de distribution

Délibération de la Commission de régulation de l’énergie n° 2021-315 du 14 octobre 2021 portant proposition de cahiers des charges des appels à candidatures portant sur la désignation de fournisseurs de secours

 

Les arrêtés des 3 et 5 novembre 2021, publiés respectivement au Journal officiel du 10 et 11 novembre 2021, désignent, à titre transitoire, les fournisseurs de secours en électricité sur les zones de desserte d’Enedis et des entreprises locales de distribution (ci-après « ELD »).

Pour mémoire, la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie-climat a introduit le dispositif de fourniture de secours en électricité et en gaz naturel. Un fournisseur de secours est celui qui se substitue au fournisseur défaillant dans ses relations avec ses clients d’une part, et avec les gestionnaires de réseaux d’autre part, permettant ainsi d’assurer la continuité du service de fourniture d’électricité ou de gaz naturel. 

En matière d’électricité, les articles R. 333-25 et suivants du Code de l’énergie prévoient que la fourniture de secours est effective à compter de la date de retrait ou de suspension de l’autorisation du fournisseur défaillant. Le fournisseur de secours est nommé pour une durée de cinq ans et assure la fourniture des clients de tout fournisseur dont l’autorisation a été retirée ou suspendue pendant cette période.

En principe, conformément à la procédure d’appel à candidature fixée aux articles R. 333-17 et suivants du Code de l’énergie, le Ministre en charge de l’énergie lance la procédure sur la base d’un cahier des charges proposé par la Commission de régulation de l’énergie (CRE.) Cette dernière examine ensuite les candidatures reçues et adresse notamment au Ministre chargé de l’énergie, pour chaque zone de desserte concernée par l’appel à candidatures, la liste des candidatures qu’elle propose de retenir. Le Ministre désigne ensuite, par arrêté, un fournisseur de secours par zone de desserte et par segment de clientèle.

Dans une délibération publiée le 20 octobre 2021, ici commentée, la CRE propose, sur le fondement des dispositions précitées, un cahier des charges pour les appels à candidature permettant de désigner un fournisseur de secours. Toutefois, par cette même décision, la CRE décide, compte tenu de la crise énergétique actuelle « susceptible de fragiliser la situation financière de certains fournisseurs », de désigner des fournisseurs de secours à titre transitoire jusqu’à ce que l’appel à candidature ait été mené à bien.

C’est ainsi que les arrêtés du 3 et du 5 novembre 2021 également commentés entérinent ladite décision de la Commission de régulation de l’énergie.

S’agissant de la zone de desserte d’Enedis, l’arrêté du 3 novembre 2021 désigne la société Électricité de France (EDF) comme fournisseur de secours en électricité à titre transitoire, et ce, pour toutes les catégories de clients.

S’agissant des zones de dessertes des ELD, l’arrêté du 5 novembre 2021 prévoit que sont désignés fournisseurs de secours en électricité à titre transitoire :

  • EDF pour la zone de desserte de RTE et pour toutes les catégories de clients ;
  • Les ELD sur leur zone de desserte respective et pour toutes les catégories de clients, et pour les clients non résidentiels pour lesquels ces ELD le lui demandent, EDF.

Les articles 1ers desdits arrêtés justifient cette nomination à titre transitoire par la forte hausse des prix de l’électricité sur les marchés de gros ainsi que le placement en redressement judiciaire – depuis le 21 octobre 2021 – d’un premier fournisseur alternatif en raison de cette hausse, la société Hydroption.

Deux prochains arrêtés désigneront, après l’appel à candidatures, les fournisseurs de secours définitifs.

Bac à sable règlementaire : allongement du délai de dépôt des candidatures

Le dispositif du « bac à sable règlementaire » permet à la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après « CRE ») ou, dans le cadre des échanges transfrontaliers d’électricité, à l’autorité administrative compétente, d’accorder des dérogations aux conditions d’accès et à l’utilisation des réseaux et installations pour déployer à titre expérimental des technologies ou des services innovants en faveur de la transition énergétique et des réseaux et infrastructures intelligents[1].

Ainsi qu’exposé dans une de nos précédentes LAJEE[2], par une délibération du 22 juillet 2021, la CRE a décidé d’ouvrir un second guichet de candidature à ce dispositif.

Le 29 novembre dernier, la CRE a décidé d’allonger le délai de dépôt de candidatures, initialement prévu au 31 décembre 2021, jusqu’au 14 janvier 2022, afin de permettre aux candidats « d’identifier clairement les freins réglementaires qu’ils rencontrent, de soumettre des dossiers complets et d’échanger avec la CRE en amont de la date limite de dépôt et de modification des dossiers ».

 

[1] Article 61 de la loi Energie Climat.

[2] Disponible ici : https://www.seban-associes.avocat.fr/dispositif-du-bac-a-sable-reglementaire-bilan-du-premier-guichet-de-ce-dispositif-et-ouverture-du-second-guichet/?idlajee=105912.

Fourniture d’électricité : la commission de régulation de l’énergie fixe la méthode de répartition des volumes d’ARENH en cas de dépassement du plafond prévu par la loi

CRE – Les demandes d’ARENH pour 2022

 

Pour mémoire, tel qu’indiqué dans une de nos précédentes LAJEE[1], les fournisseurs d’électricité peuvent acheter à l’avance et à prix fixe une certaine quantité d’électricité nucléaire produite par EDF, dans le cadre du mécanisme de l’Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique (ci-après « ARENH »). 

En vertu de la loi sur la Nouvelle Organisation du Marché de l’Electricité (dite « Loi NOME »)[2] et de l’article L. 336-2 du Code de l’énergie, EDF peut céder à ces fournisseurs jusqu’à 100 TWh/an de l’électricité produire à partir de son parc nucléaire historique.

La Commission de régulation de l’énergie (ci-après « CRE ») a défini, aux termes de la délibération du 8 octobre 2021 ici commentée, les règles de répartition des volumes applicables en cas de dépassement du plafond d’ARENH pour le guichet de novembre 2021.

Elle a annoncé dans sa délibération qu’au vu de la crise exceptionnelle que traverse le marché de l’électricité, des contrôles renforcés seront menés pour le guichet de novembre 2021 et que des règles exceptionnelles de prise en compte des volumes d’ARENH demandés par les fournisseurs seraient appliquées.

D’abord, la CRE considère qu’en cas de dépassement du plafond, les livraisons correspondant aux demandes d’ARENH effectuées lors du guichet antérieur ne seront pas écrêtées. Pour justifier cette décision, la CRE explique que les volumes attribués passés correspondent à des engagements déjà pris par les fournisseurs et donc que leurs modifications en cours de livraison pourraient aller à l’encontre du principe de sécurité juridique.

Ainsi, en cas de dépassement, seules les nouvelles demandes d’ARENH pourront être écrêtées, sur la base du plafond ARENH duquel seront déduits les volumes attribués lors du guichet précédent et restant à céder sur la période de livraison considérée.

Cependant, la CRE précise qu’aucun volume d’ARENH n’a été attribué à des fournisseurs lors du guichet de mai 2021. Cette règle ne trouve donc pas à s’appliquer pour le guichet de novembre 2021.

En définitive, l’apport le plus important de cette délibération vise les demandes de fournisseurs d’électricité qui sont des filiales contrôlées par EDF.

Si les demandes d’ARENH formulées par ces sociétés dépassent le plafond, ces sociétés seront écrêtées intégralement pour les seuls volumes conduisant à un dépassement du plafond d’ARENH. Par ailleurs, les éventuels contrats conclus entre ces filiales et la société mère devront répliquer les conditions d’approvisionnement à l’ARENH, y compris le taux d’écrêtement des fournisseurs alternatifs. Ces contrats seront transmis à la CRE.

Le renforcement des contrôles et la mise en œuvre de règles exceptionnelles sont d’autant plus importants que la CRE indiquait, le 1er décembre dernier, avoir reçu un total de demandes de 160,36 TWh d’électricités formulées par 81 fournisseurs pour l’année 2022, soit 60,36 TWh au-dessus du plafond légal.

La CRE va notifier à chaque fournisseur son allocation d’ARENH et procéder aux contrôles renforcés de l’utilisation qui sera faite des volumes attribués.

Toutefois, elle déplore que malgré les circonstances exceptionnelles, le plafond de l’ARENH n’ait pas été relevé. En effet, le 22 septembre dernier le Gouvernement a refusé d’augmenter le plafond de l’ARENH à 150 TWh, ce qui est désormais possible depuis la loi énergie-climat[3].

 

 

[1] Disponible ici : https://www.seban-associes.avocat.fr/fourniture-delectricite-acces-regule-a-lelectricite-nucleaire-historique-arenh-et-crise-sanitaire/.

[2] Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 sur la Nouvelle Organisation du Marché de l’Electricité.

[3] Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat.

Dans la lignée de RTE, l’ADEME dévoile ses quatre scenarios pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050

Après deux ans de travaux, l’Agence de la transition écologique (ci-après, « ADEME ») a publié le 30 novembre dernier le rapport « Transition(s) 2050. Choisir maintenant. Agir pour le climat » qui présente ses scénarios de prospective pour conduire la France vers la neutralité carbone.

L’ADEME s’inscrit ainsi dans la lignée de RTE, gestionnaire du réseau de transport d’électricité, qui a publié le 25 octobre 2021 les résultats de son rapport sur les futurs énergétiques en présentant plusieurs scénarios afin d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 (voir notre brève sur ce rapport de RTE dans notre précédente LAJEE[1]).

D’un point de vue temporel, la publication de ces scénarios par l’ADEME arrive dans le contexte de la consultation publique sur la future Stratégie Française Energie-Climat (SFEC) et des débats de l’élection présidentielle de 2022, tel qu’elle l’indique.

Les différents scénarios présentés aboutissent tous à la neutralité carbone mais présentent de manière contrastée des options économiques, techniques et sociétales différentes pour atteindre cet objectif.

Plusieurs paramètres sont étudiés au sein de ces scénarios, dont la demande en énergies, la production d’énergies et la composition du bouquet énergétique.

Plus précisément, l’ADEME présente quatre scénarios qui sont inspirés de ceux présentés par le GIEC dans son rapport spécial sur les conséquences d’un réchauffement planétaire de 1,5°C rendu en 2018[2] :

  • Scénario 1 : Génération frugale, qui implique de grands changements dans les modes de vie et comportements et dans lequel le respect de la nature et la sobriété sont mis en avant, les constructions nouvelles sont limitées en faveur des travaux de rénovation rapide, la demande énergétique est en baisse et la consommation de biomasse double ;
  • Scénario 2 : Coopérations territoriales, scénario qui s’inscrit dans l’idée d’une gouvernance partagée et de coopérations entre secteurs publics et privés en poursuivant un objectif de sobriété et d’efficacité avec notamment un recours à l’hydrogène décarboné produit exclusivement par électrolyse ;
  • Scénario 3 : Technologies vertes, scénario dans lequel le développement technologique, plutôt que les changements de comportements, permet de répondre aux défis environnementaux. Ce scénario prévoit également une décarbonation du mix énergétique qui passe par la biomasse et par une consommation massive d’hydrogène pour tous les usages satisfaite en partie par le bais d’importations ;
  • Scénario 4 : Pari réparateur, qui est le scénario dans lequel la consommation d’énergie baisse le moins. Des changements des comportements et des modes de vie ne sont pas envisagés, ce qui implique une forte demande énergétique. Pour y faire face, ce scénario prévoit un recours à la biomasse, en particulier forestière, aux énergies renouvelables, aux biogaz et aux biocarburants. Et, comme cela ne pourra suffire, ce scénario prévoit un recours massif aux importations de gaz décarboné ou renouvelable. Cependant le développement de l’hydrogène reste limité car il est concurrencé par d’autres technologiques de captable et stockage de CO2.

Les quatre scénarios prévoient une part de plus de 70 % d’énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie en 2050.

Aussi tous les scénarios de l’ADEME envisagent une baisse de la consommation finale d’énergie en 2050 par rapport à 2015, allant jusqu’à 55 % pour le scénario 1, et la quasi-disparition des énergies fossiles.

De ce travail prospectif, l’ADEME tire sept enseignements, parmi lesquels l’urgence à agir au vu de l’ampleur des transformations sociales et techniques à mettre en œuvre, la nécessaire réduction de la demande d’énergie dans l’ensemble des scénarios pour atteindre la neutralité carbone et l’indispensable transformation de l’industrie afin de décarboner sa production.

 

[1] Disponible ici : https://www.seban-associes.avocat.fr/rte-rend-son-rapport-futurs-energetiques-2050-et-dresse-une-etude-contrastee-de-plusieurs-scenarios-de-mix-de-production-pour-atteindre-la-neutralite-carbone-a-lhorizon-2050/?idlajee=106709.

[2] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), rapport spécial du GIEC sur les conséquences d’un réchauffement planétaire de 1,5°C, 8 octobre 2018.

Installation et maintenance des IRVE : publication de deux arrêtés en date du 27 octobre 2021

Arrêté du 27 octobre 2021 relatif aux engagements de qualité de services relatifs aux infrastructures de recharge pour véhicules électriques ouvertes au public

 

Au Journal Officiel du 4 novembre 2021, deux arrêtés du 27 octobre 2021 relatifs aux opérations d’installation et de maintenance des installations de recharges de véhicules électriques (IRVE) ont été publiés et entreront en vigueur le 1er juillet 2022 :

  1. Arrêté du 27 octobre 2021 relatif aux qualifications pour les études de conception, l’installation et la maintenance des infrastructures de recharge pour véhicules électriques

Pour mémoire, l’article 22 du décret du 12 janvier 2017[1] prévoit que l’installation et la maintenance des IRVE doit être réalisée par des professionnels titulaires d’une qualification en ce sens délivrée par un organisme de qualification accrédité et précise que les modalités d’accréditation ainsi que les exigences pour obtenir lesdites qualifications sont fixées par voie d’arrêté ministériel.

C’est donc dans ce cadre qu’intervient l’arrêté ici commenté, lequel prévoit :

D’une part, en ses annexes I, II et III (auxquels renvoient les articles 1, 2 et 3), les critères relatifs à la qualification des prestataires réalisant les opérations d’installation et de maintenance d’IRVE ou les études de conception préalable à leur installation : ces critères s’appliquent aux moyens humains et techniques mis en œuvre ainsi qu’aux références de prestations produites par les prestataires et s’ajoutent à ceux de la norme NF X 50-091, laquelle établit les exigences générales applicables aux organismes de qualification des fournisseurs.

– D’autre part, en son article 4, que ces qualifications sont délivrées par un organisme de qualification accrédité par le COFRAC[2] sur la base de formations s’appuyant sur des référentiels communs appropriés publiés par cet organisme notamment sur le site de l’Avere-France.[3]

  1. Arrêté du 27 octobre 2021 relatif aux engagements de qualité de services relatifs aux infrastructures de recharge pour véhicules électriques ouvertes au public

Le décret du 12 janvier 2017 précité prévoit également, en son article 24-2, que les aménageurs d’un réseau d’IRVE, les opérateurs de mobilité fournissant des services d’accès à des réseaux d’IRVE ainsi que les plateformes d’interopérabilité fournissant des services pour l’itinérance d’accès aux réseaux d’IRVE doivent rendre publics leur engagements de qualité de service pour chacune de ces unités d’exploitation et rendre compte périodiquement des résultats des niveaux réalisés de qualité de service.

Et à ce titre, ce même article prévoit que les dispositions relatives à la définition de la qualité des services et aux modalités de publication sont précisées par arrêté ministériel.

C’est l’objet de ce second arrêté du 27 octobre 2021 prévoyant notamment que :

Concernant la définition de qualité des services, les engagements de qualité des aménageurs d’IRVE ouvertes au public, opérateurs de mobilité, gestionnaires d’une plateforme d’interopérabilité doivent porter, au minimum sur :

  • La conception et le fonctionnement des systèmes ;
  • La délivrance des services et données ;
  • Les prix et facturation des services ;
  • L’assistance aux utilisateurs.

Concernant les modalités de publication, les engagements de qualité de service sont publiés par tout moyen approprié accessible sur une base ouverte et leur mise à jour doit faire l’objet d’une nouvelle publication.

En outre, un compte rendu d’évaluation des engagements doit être publié au minimum une fois par an et contenir certains indicateurs, fixés à l’article 3 de l’arrêté.

Ces obligations sont réputées satisfaites si la publication est effectuée par l’intermédiaire d’une structure représentative au niveau national ayant formulé des préconisations en matière de qualité des services relative aux IRVE auxquelles adhérent les opérateurs.

 

 

[1] Décret n° 2017-26 du 12 janvier 2017 relatif aux infrastructures de recharge pour véhicules électriques et portant diverses mesures de transposition de la directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs

[2] Comité Français d’Accréditation

[3] Association nationale pour la mobilité électrique – site internet : https://www.avere-france.org/

Réduction de l’empreinte environnementale du numérique : de nouvelles obligations et possibilités pour les acteurs publics locaux

La question de l’empreinte environnementale du numérique occupe, depuis quelques années, une place de plus en plus importante dans le débat public.

En effet, les impacts du numérique sur l’environnement sont conséquents : un rapport d’une mission d’information sénatoriale publié le 24 juin 2020 indiquait ainsi que le numérique « serait à l’origine de 3,7 % des émissions totales de gaz à effet de serre (GES) dans le monde en 2018 et de 4,2 % de la consommation mondiale d’énergie primaire. 44 % de cette empreinte serait due à la fabrication des terminaux, des centres informatiques et des réseaux et 56 % à leur utilisation ». En France, le numérique aurait représenté 2 % des émissions de GES en 2019, émissions susceptibles d’augmenter de 60% d’ici 2040 et de représenter à cette date 7% des émissions de GES de la France en raison du recours accru au numérique.

Et ces impacts sont essentiellement de deux ordres. Les équipements (téléphones, tablettes, ordinateurs…) sont très consommateurs de matières première et en particulier de ressources minérales rares, dont les modalités d’extraction et de recyclage soulèvent de surcroît des interrogations quant à leur incidence néfaste sur l’environnement. Mais au-delà, bien loin du mythe du « nuage » dans lequel les mails, informations et autres photographies seraient conservés, la conservation de ces données se fait dans de grands centres de données, nécessitant électricité, climatisation et eau.

Pourtant, comme le relevait le rapport du 24 juin 2020 précité « Secteur économique majeur, le numérique est pourtant largement ignoré en tant que tel des politiques publiques visant à atteindre les objectifs climatiques fixés par l’Accord de Paris : il n’existe pas de stratégie transversale publique visant à en atténuer les impacts environnementaux »[1]. L’impact environnemental du numérique a ainsi été qualifié d’« angle mort de nos politiques publiques » par les auteurs de la loi ici présentée[2].

Face à ces constats, la loi n° 2021-1485 du 15 novembre 2021 visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France, dite loi REEN, a été adoptée dans le but d’« orienter le comportement de tous les acteurs du numérique, qu’il s’agisse des consommateurs, des professionnels du secteur ou encore des acteurs publics, afin de garantir le développement en France d’un numérique sobre, responsable et écologiquement vertueux » (exposé des motifs de la loi).

Cette loi contient des dispositions relatives à l’obsolescence programmée des logiciels, à la formation à l’impact environnemental du numérique ou encore à l’information des consommateurs. Et, intéressant plus particulièrement les personnes publiques et les acteurs publics locaux, certains de ses articles visent à renforcer les outils stratégiques à l’échelle des territoires (I), concernent les achats publics et les modalités de gestion des équipements informatiques (II) et étendent les obligations d’information du maire (III).

 

I. Renforcement des outils de planification territoriale

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a rajouté à la proposition de loi un cinquième chapitre intitulé « Promouvoir une stratégie numérique responsable dans les territoires », intéressant particulièrement les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP).

1°) L’article 34 de la loi REEN prévoit ainsi l’intégration, au sein des plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), lesquels doivent être élaborés par la métropole de Lyon et certains EPCI-FP, de la problématique de la réduction de l’empreinte environnementale du numérique.

L’article L. 229-26 du Code de l’environnement prévoit en effet désormais que le programme d’actions à réaliser du PCAET devra définir celles de ces actions permettant de valoriser le potentiel de récupération de chaleur à partir des centres de données, d’une part, et de réduire l’empreinte environnementale du numérique, d’autre part.

Les PCAET qui devront intégrer ces éléments sont ceux dont l’élaboration ou la révision est décidée depuis le 16 novembre 2021.

2°) L’article 35 de la loi REEN impose quant à lui aux communes de plus de 50 000 habitants et aux EPCI-FP regroupant plus de 50 000 habitants de définir une stratégie numérique responsable. Le Sénat avait également proposé qu’une telle stratégie soit adoptée par les départements, les régions et la collectivité de Corse, mais l’Assemblée nationale a retenu un champ d’application plus restreint.

Cette stratégie, qui devra être établie au plus tard le 1er janvier 2025 et dont le contenu et les modalités d’élaboration seront précisés par décret, devra définir les objectifs de réduction de l’empreinte environnementale du numérique ainsi que les mesures qui seront adoptées pour atteindre ces objectifs. Afin de préparer cette stratégie, les communes et EPCI-FP devront élaborer avant le 1er janvier 2023 un programme de travail préalable « qui comporte notamment un état des lieux recensant les acteurs concernés et rappelant, le cas échéant, les mesures menées pour réduire l’empreinte environnementale du numérique ».

Cette stratégie devra ensuite faire l’objet d’un bilan annuel dans le cadre du rapport défini à l’article L. 2311-1-1 du CGCT relatif à la situation en matière de développement durable et présenté aux élus préalablement aux débats sur le projet de budget.

Quelques incertitudes existent quant à la rédaction de ce texte, et plus particulièrement sur l’articulation entre la stratégie des EPCI-FP d’une part et celle de leurs communes membres d’autre part, qui n’est pas précisée par le texte de la loi REEN. Des précisions par décret pourraient être utiles en ce sens. En outre, si l’article 35 de la loi REEN impose, on l’a vu, aux communes et EPCI-FP de plus de 50 000 habitants d’élaborer un programme de travail préalable avant le 1er janvier 2023, il est également indiqué que ce texte entre en vigueur le 1er janvier 2025, créant une incohérence quant à l’applicabilité dans le temps de cette obligation.

Par ailleurs, les syndicats mixtes compétents en matière de services de communications électroniques sur le fondement de l’article L 1425-1 du Code général des collectivités territoriales, et pour la constitution des schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique, sur le fondement de l’article L 1425-2 du même Code, pourraient constituer une structure d’accompagnement pertinente des collectivités pour la définition de cette stratégie.

II. Achats et biens des collectivités et de leurs groupements

1°) L’article 15 de la loi introduit tout d’abord de nouvelles obligations en matière d’achat public, en complétant l’article 55 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi AGEC.

Lors de l’achat public de produits numériques, il est ainsi désormais prévu que les services de l’Etat ainsi que les collectivités territoriales et leurs groupements devront :

  • Lorsque ces produits disposent d’un indice de réparabilité, sur le fondement de l’article L. 541-9-2 du Code de l’environnement, le « pendre en compte » à compter du 1er janvier 2023 ;
  • Lorsque ces produits disposent d’un indice de durabilité, sur le fondement de l’article L. 541-9-2 du Code de l’environnement, le « prendre en compte » à compter du 1er janvier 2026.

L’indice de réparabilité vise à informer le consommateur sur la capacité à réparer le produit concerné, tandis que l’indice de durabilité complète l’indice de réparabilité en incluant notamment de nouveaux critères tels que la fiabilité et la robustesse du produit.

Ces indices doivent seulement être « pris en compte » par les acteurs publics, sans plus d’information sur les modalités de cette prise en compte ni sur des caractéristiques minimales auxquelles devraient répondre ces produits, cette disposition n’imposant notamment pas d’obligation de seuils[3]. Cependant, on pourrait considérer que la prise en compte de ces indices doit faire partie des éléments d’appréciation des offres dans les procédures d’attribution des contrats publics.

2°) Les articles 16 et 17 de la loi REEN visent quant à eux à favoriser le réemploi, la réutilisation ou le recyclage des équipements informatiques des services de l’Etat, des collectivités territoriales et leurs groupements.

L’article 16 dispose ainsi que, lorsque ces personnes publiques se séparent d’équipements informatiques fonctionnels, ceux-ci doivent être « orientés » vers le réemploi et la réutilisation selon des proportions, un calendrier et des modalités qui seront déterminés par un décret. Lorsque ces biens ont plus de dix ans, ils seront orientés vers le recyclage.

Par ailleurs, la liste des bénéficiaires des cessions à titre gratuit du matériel informatique des services de l’Etat ou de l’un de ses établissements publics, des collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics, liste figurant à l’article L. 3212-2 du Code général de la propriété des personnes publiques, est étendue aux organismes de réutilisation et de réemploi agréés « entreprise solidaire d’utilité sociale » (ESUS). Cette extension devrait toutefois, selon les sénateurs, concerner un nombre limité d’acteurs dès lors que les organismes agréés ESUS se recoupent avec la catégorie des entreprises de l’économie sociale et solidaire qui bénéficient déjà de ce dispositif de cession à titre gratuit.

 

III. Renforcement de l’information des élus

La loi REEN renforce en outre l’information du maire lors du déploiement des infrastructures des réseaux de communications électroniques, et en particulier de points hauts, sur son territoire.

1°) Il importe à cet égard d’indiquer que, en application de l’article L. 34-9-1 du Code des postes et des communications électroniques (CPCE), toute personne souhaitant exploiter certaines installations radioélectriques ou points d’accès sans fil à portée limitée doit transmettre au maire ou au président de « l’intercommunalité » (les entités publiques regroupées sous ce terme n’étant pas précisé par le texte) un dossier d’information avant de déposer sa demande d’autorisation d’urbanisme pour cette infrastructure.

L’article 30 de la loi REEN précise que, dans les zones rurales et à faible densité d’habitation et de population définies par un décret pris après avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP), le maire peut demander à l’exploitant de faire figurer dans ce dossier d’information la justification du choix de ne pas recourir à une solution de partage de site ou de pylône.

Il est en effet possible pour les opérateurs de communications électroniques de mettre en commun les équipements constituant leurs réseaux mobiles, l’article D. 98-6-1 du CPCE énonçant à cet égard que « l‘opérateur fait en sorte, dans la mesure du possible, de partager les sites radioélectriques avec les autres utilisateurs de ces sites ». En effet, la mutualisation des infrastructures peut être bénéfique, les sénateurs ayant ainsi souligné qu’elle « constitue un enjeu de réduction de la fracture numérique sur le territoire, d’acceptabilité sociale des infrastructures de télécommunication et de limitation de leur impact environnemental »[4].

Ainsi, face au constat de la Cour des comptes que les opérateurs étaient « diversement enclins à mutualiser leurs infrastructures »[5], l’Assemblée nationale a adopté l’article 30 de la loi REEN afin d’inciter à davantage de mutualisation via le renforcement de l’information du maire.

Cette justification au sein du dossier d’information ne serait toutefois à apporter qu’à la demande du maire, l’initiative du président de l’« intercommunalité » n’étant à cet égard pas mentionnée par la loi REEN.

2°) En outre, l’article 33 de la loi REEN insère, au sein du CPCE, un nouvel article L. 34-9-1-1 visant également à renforcer l’information des élus locaux, en imposant à tout acquéreur ou preneur d’un contrat de bail ou de réservation d’un terrain qu’il destine à l’édification de toute construction supportant des antennes d’émission ou de réception de signaux radioélectriques utilisées pour les communications électroniques d’en informer par écrit le maire de la commune où se situe ce terrain ou le président de l’EPCI. Dans le cadre de cette information, l’acquéreur ou le preneur doit en outre transmettre « un document attestant d’un mandat de l’opérateur de téléphonie mobile ayant vocation à exploiter ces installations ».

A défaut d’information, les travaux d’aménagement et d’édification des constructions supportant ces antennes ne peuvent être réalisés.

Tel que cela ressort des travaux parlementaires, cette obligation d’information a été établie dans le but de « rationaliser la consommation de foncier et d’éviter la spéculation sur des terrains d’assiette potentiels et la construction d’infrastructures laissées ensuite vacantes faute d’utilisateurs identifiés préalablement au lancement des projets »[6].

En somme, si cette loi pose des bases intéressantes pour la définition des politiques publiques sur l’impact environnemental du numérique, sa faible ambition a été critiquée par le Sénat, qui reproche à l’Assemblée nationale d’avoir opéré des reculs sur plusieurs dispositions. A titre d’illustration, les sénateurs ont indiqué qu’ils « regrettent toutefois que les régions, départements et la collectivité de Corse aient été exclus du champ d’application du dispositif »[7] de l’article 35 de la loi REEN sur la stratégie numérique responsable.

Le rapport de la commission du Sénat adopté lors de la 2nde lecture indiquait ainsi que « le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale ne répond pas à tous les enjeux soulevés par le Sénat : certaines dispositions pourtant structurantes ont vu leur portée fortement réduite, lorsqu’elles n’ont pas été tout simplement supprimées […]. Si les rapporteurs regrettent indéniablement ces évolutions, elles ne doivent pas occulter les avancées profondes et nombreuses permises par la proposition de loi. Cette réforme est la première pierre à l’édifice de la régulation environnementale du numérique dans notre pays »[8].

La seconde pierre de cet édifice pourrait en outre suivre rapidement, une proposition de loi visant à renforcer la régulation environnementale du numérique par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse ayant été déposée devant le Sénat en septembre 2021 et adoptée en première lecture par la Chambre haute le 2 novembre 2021. Ce texte, pour lequel le Gouvernement a engagé une procédure accélérée, devrait être discuté devant l’Assemblée nationale en séance publique le 13 décembre 2021.

 

Solenne DAUCE, Marion TERRAUX et Julie CAZOU 

 

 

[1] Rapport d’information fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable par la mission d’information sur l’empreinte environnementale du numérique (1) pour une transition numérique écologique, 24 juin 2020.

[2] Exposé des motifs de la proposition de loi.

[3] Si le Sénat avait proposé, en première lecture, qu’un certain seuil pour ces indices soit défini par décret, cette condition a été supprimée par l’Assemblée nationale.

[4] Rapport n° 68 (2021-2022) de MM. Guillaume CHEVROLLIER et Jean-Michel HOULLEGATTE, déposé le 20 octobre 2021.

[5] Cour des comptes, Réduire la fracture numérique mobile : le pari du « New Deal » 4G, 28 septembre 2021.

[6] Rapport n° 68 (2021-2022) de MM. Guillaume CHEVROLLIER et Jean-Michel HOULLEGATTE, déposé le 20 octobre 2021.

[7] Rapport n° 68 (2021-2022) de MM. Guillaume CHEVROLLIER et Jean-Michel HOULLEGATTE, déposé le 20 octobre 2021.

[8] Rapport n° 68 (2021-2022) de MM. Guillaume CHEVROLLIER et Jean-Michel HOULLEGATTE, déposé le 20 octobre 2021.

Paris – Collaborateur avec 2/3 ans d’expérience (H/F) – Droit immobilier

Seban & Associés est une société d’avocats de plus de 95 avocats, avec une approche pluridisciplinaire qui lui permet de répondre aux préoccupations de ses clients, acteurs publics et de l’économie sociale et solidaire, relevant à la fois du droit public, du droit privé et/ou du droit pénal.

Pour assurer son développement, Seban & Associés recrute un(e) avocat(e) en droit de l’immobilier (H/F) !

 

Profil & missions : 

SEBAN & ASSOCIES a développé un département de Droit immobilier important. Dans ce cadre, le Cabinet accompagne, tant en conseil qu’en contentieux, ses clients dans leurs acquisitions ainsi que dans la gestion de leurs patrimoines.

SEBAN & ASSOCIES recherche un avocat disposant de solides connaissances en droit des obligations et en responsabilité civile avec une expérience de 2 à 3 ans. 

Rejoindre Seban & Associés sera pour vous l’occasion :

  • De construire votre expertise en bénéficiant, pour le traitement de chaque dossier, d’échanges avec les associés, directeurs et avocats seniors du Cabinet, tous spécialistes de leur secteur ;
  • D’appréhender le métier d’avocat dans toutes ses dimensions : conseil, précontentieux et contentieux mais aussi stratégie ;
  • De travailler en transversalité avec l’ensemble des secteurs du Cabinet ;
  • De participer à la rédaction d’articles à paraître dans des revues juridiques, de brèves destinées aux Lettres d’actualités juridiques du Cabinet et à l’organisation et l’animation de formations dispensées par le Cabinet.

 

Merci d’adresser votre CV à cabinet@seban-avocat.fr ou via le formulaire de candidature ci-dessous.

 

[si-contact-form form=’13’]

Obligation vaccinale – Bilan contentieux des référés engagés devant le juge administratif

Deux mois après l’entrée en vigueur de l’obligation vaccinale pour les soignants, étudiants en santé, et tous professionnels et prestataires de service énumérés à l’article 12 de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, il est déjà permis de faire un bilan de l’activité contentieuse engagée.

Pour mémoire, à compter du 15 septembre 2021, les personnes concernées qui ne présentaient pas à leur employeur un schéma vaccinal complet ou un certificat de rétablissement ou une contre-indication à la vaccination, ou un test négatif en cas de schéma vaccinal incomplet ne pouvaient plus exercer. À compter du 15 octobre 2021, la dérogation liée au schéma vaccinal incomplet tombait. Aussi les professionnels non vaccinés et non engagés dans un processus vaccinal ont été suspendus à compter du 15 septembre 2021.

Des centaines de référés…

D’après les informations recueillies, des centaines de requêtes en référé ont été déposées devant les TA, dont un tiers de référés-liberté (art. L. 521-2 du Code de justice administrative) et deux tiers de référés-suspension (art. L. 521-1 du Code de justice administrative). La première procédure est réputée plus exigeante que la seconde, car elle nécessite une atteinte « grave et manifestement illégale » à une liberté fondamentale et une urgence qui justifie l’intervention du juge à très brève échéance. La seconde exige également d’établir une urgence et un « doute sérieux » sur la légalité de la décision attaquée.

…le plus souvent rejetés…

Les résultats de l’une ou l’autre de ces procédures seront jugés très décevants par les opposants à l’obligation vaccinale. Il ressort des décisions rendues que l’immense majorité des requêtes est rejetée et près de la moitié par la procédure dite « de tri », prévue à l’article L. 522-3 du Code de justice administrative, et qui permet au Juge des référés de rejeter une requête sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsqu’elle ne présente pas un caractère d’urgence ou lorsqu’il apparaît manifeste que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu’elle est irrecevable ou qu’elle est mal fondée.

…pour défaut d’urgence

Le défaut d’urgence est une raison principale de rejet par le tri (environ 80%), les requérants oubliant de la justifier (CE, Ord., 27 septembre 2021, n° 456308) ou ne faisant le plus souvent référence qu’à la suspension de leur rémunération, laquelle n’est pas considérée – par elle-même – comme suffisante pour qualifier l’urgence. En référé-liberté, le requérant doit même s’attacher à démontrer que l’urgence est telle que l’intervention du juge est nécessaire dans un délai de 48h. Aussi, et si le requérant n’oublie pas d’apporter les éléments de justification et ne se borne pas à dire que sa rémunération est suspendue, le juge va pouvoir estimer que « les justifications relatives à la composition de son foyer et au montant de ses charges mensuelles » établissent l’urgence (TA Grenoble, Or., 26 octobre 2021, n° 2106636 ; CE, Ord., 20 octobre 2021, n° 457073).

Et si cette condition est remplie, le juge s’attache ensuite à comparer cette urgence, à l’intérêt de maintenir la décision litigieuse. Même démarche en référé-suspension. Certains juges ont souligné que les requérants s’étaient mis eux-mêmes en situation d’urgence « en refusant ou négligeant de se soumettre à l’obligation vaccinale » (TA Versailles, 13 octobre 2021, Mme C., n° 2108368) et que, « nul n’étant censé ignoré la loi », se sont placés eux-mêmes « dans l’impossibilité de poursuivre [leur] activité professionnelle » (TA Clermont-Ferrand, 30 septembre 2021, n° 2102028). En outre, l’urgence à suspendre l’exécution d’une décision est, comme en référé liberté, toujours confrontée à l’urgence à la maintenir, laquelle l’emporte ici bien souvent au regard de « l’intérêt public qui s’attache à la protection de la santé publique » (par ex. TA Versailles, 13 octobre 2021, Mme C., n° 2108368).

  1. Les questions en suspens sur les suspensions

La question du congé de maladie

Il ne fait guère de doute que l’arrêt de travail prescrit après la mesure de suspension n’ait guère d’incidence sur la légalité de la mesure de suspension, assortie d’une suspension de traitement. Mais lorsque l’arrêt de travail est antérieur à la décision de suspension, la jurisprudence n’est pas encore stabilisée et diffère (considérablement) d’un Tribunal administratif à un autre.

Pour certains juges, la décision de suspension intervenant alors que l’agent se trouve en congé de maladie est sujette à doute sérieux quant à sa légalité. En effet, « bien que soumis à l’obligation vaccinale », l’agent en arrêt de travail se trouve « dans l’impossibilité d’exercer effectivement son activité » et n’est ainsi pas tenu « de fournir à son employeur les documents » exigés (TA Cergy Pontoise, 4 octobre 2021, Mme B., n° 2111794). Même solution pour le Juge des référés du TA de Grenoble, selon qui la loi du 5 août 2021 ne s’applique pas à l’agent qui n’est pas en mesure d’exercer son activité à la date d’entrée en vigueur des dispositions contestées (TA Grenoble, Or., 26 octobre 2021, n° 2106636). On apprenait par voie de presse que le Juge des référés du TA de Rennes avait statué dans le même sens. Toutes ces décisions, rendues dans le cadre de référé suspension, ont suspendu l’exécution des décisions de suspension jusqu’à ce qu’il soit, selon la formule consacrée, « statué au fond sur sa légalité ». En réalité, elles ne peuvent être suspendues que jusqu’à ce que l’agent soit en état de reprendre le travail (et donc d’être suspendu). 

Plusieurs Juges des référés ont jugé l’exact contraire. Le TA de Besançon, par un raisonnement apparemment tiré de l’adage « la loi spéciale déroge à la loi générale », a estimé que la loi générale (le statut de la fonction publique sur le droit au congé maladie) n’empêchait pas l’application de la loi spéciale (loi du 5 août 2021 sur la suspension des personnels). Ainsi, en l’absence de distinction précisée par la loi spéciale, les agents qui se trouvaient en arrêt de travail au 15 septembre 2021 étaient tout de même soumis à l’obligation vaccinale et l’administration pouvait les suspendre (TA Besançon, 11 octobre 21, n° 2101694). Le Juge des référés du TA de Toulouse s’est quant à lui fondé sur l’objet du congé maladie. Celui-ci a vocation à compenser la perte de la rémunération liée à la maladie et s’inscrit déjà en dérogation de la règle de la rémunération pour service fait. L’objet du congé maladie n’est pas, estime le Juge des référés, d’accorder à l’agent « des droits à rémunération supérieurs à ceux qu’il aurait eue s’il n’en avait pas bénéficié ». Or, un agent qui aurait dû être suspendu sur le fondement de la loi du 5 août 2021 n’aurait pas eu de rémunération. Implacablement, la décision le suspendant sans rémunération ne crée pas de doute sérieux quant à sa légalité (TA Toulouse, 22 octobre 2021, n° 0123451).

La question des agents qui ne sont pas en contact avec des personnes vulnérables

Là encore, la jurisprudence n’est pas tranchée. Le Juge des référés du TA de Lyon a estimé que des agents travaillant en cuisine centrale d’un CHU n’étaient, « compte tenu de la localisation » de ladite cuisine, pas au nombre des personnes concernées par l’obligation vaccinale (TA Lyon, 22 octobre 2021, n° 2107952). Cette solution assez lapidaire est discutable, car les agents des cuisines ne se téléportent pas de chez eux à leur lieu de travail et sont, a priori, en contact avec des collègues eux-mêmes en contact avec les patients.

D’ailleurs et inversement, le Juge des référés du TA de Châlons-en-Champagne a pris soins de rappeler que le législateur avait entendu à la fois protéger les personnes accueillies par les établissements, mais également les gens en contact avec tous les professionnels de santé. Ainsi, « l’obligation de vaccination concerne aussi des personnels qui ne sont pas en contact direct avec les malades dès lors qu’ils entretiennent nécessairement, eu égard à leur lieu de travail, des interactions avec des professionnels de santé en contact avec ces derniers ».  Un aide-soignant en décharge syndicale à 100% et n’entrant pas en contact avec les patients n’en est pas moins soumis à l’obligation vaccinale dès lors qu’il est amené à « fréquenter habituellement d’autres agents » eux-mêmes potentiellement en contact avec les patients (TA Châlons-en-Champagne, 5 octobre 2021, M., n° 2102174) . Le Conseil d’État, en appel d’un référé-liberté, a confirmé cette position de principe à l’endroit d’un agent dans une situation similaire (CE, Ord., 20 octobre 2021, n° 457101).

L’arbitrage du Conseil d’État

Toutes ces décisions ont été prises dans le cadre d’un référé-suspension et l’arbitrage par le Conseil d’État ne pourra venir que de sa saisine en cassation. Si cela a sans doute été fait, aucune décision n’a encore été prise.

Dans le cadre du référé-liberté en revanche, strictement aucune décision n’a donné satisfaction aux requérants. Cette procédure est redoutable et il faut s’en méfier, car dans le contentieux dont il est question dans ces lignes, c’est le tri assuré. Mais l’un de ses nombreux avantages, pour l’observateur, est de faire intervenir le Conseil d’État comme Juge d’appel (et non pas Juge de cassation), plus facilement et plus vite. Et le CE a déjà tranché quelques éléments du contentieux, nous permettant, avec les jurisprudences disponibles des Tribunaux administratifs, de faire une liste des moyens inopérants dans ce contentieux.

  1. Les moyens voués à l’échec dans le contentieux des suspensions

Ce que l’on demande et ce que l’on ne demande pas à un juge des référés

Il est vain de demander au Juge des référés de suspendre l’exécution de la loi. Cela ne relève pas du tout de sa compétence (CE, 25 octobre 2021, n° 456656). De la même façon, la théorie de la loi-écran étant toujours vivante, il n’est pas possible de lui demander de contrôler la constitutionnalité de la loi. En revanche, le dépôt d’une QPC est possible (CE, Ord., 1er septembre 2021, n°455532), mais aucune n’a été renvoyée à ce jour au Conseil Constitutionnel. On peut naturellement contester devant le Juge administratif, et même en référé, la conventionnalité de la loi (par ex. CE, ord., 18 octobre 2021, n° 457216). À noter que la CEDH a accepté d’examiner un recours dirigé contre la loi française (CEDH, 7 octobre 2021, Thevenon c. France, n° 46061/21), mais sa recevabilité demeure pour l’heure très incertaine en raison notamment du possible non-épuisement des voies de recours internes (voir en ce sens, la cinglante décision CEDH, 7 octobre 2021, Zambrano c. France, n° 41994/21).

Il est également inutile d’attaquer la note de service qui se borne à rappeler les obligations de la loi du 5 août 2021 et de son décret d’application, mais ne prescrit pas, par elle-même, les obligations vaccinales.

L’absence d’atteinte grave à une liberté fondamentale

Les décisions de suspension des soignants, toutes fondées sur la loi du 5 août 2021, bénéficient nécessairement et par définition, d’une présomption de légalité. Même si elles constituent – à l’évidence – une ingérence dans l’exercice d’une liberté, elles vont difficilement pouvoir être regardées comme portant une « atteinte grave et manifestement illégale » à des libertés fondamentales. Le Conseil d’État l’a dit clairement : « La décision, fût-elle illégale, suspendant un agent public n’est pas, par son seul objet, de nature à porter atteinte à une liberté fondamentale au sens des dispositions de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative, même lorsqu’elle est assortie de l’interruption du versement de la rémunération » (CE, Ord., 18 octobre 2021, n° 457213).

En l’état des jurisprudences aucune atteinte n’a été relevée à l’encontre des libertés suivantes :

Les moyens inopérants 

  • « C’est une mesure disciplinaire » 

La mesure de suspension n’a aucun caractère disciplinaire et tous les moyens tirés de l’inaccomplissement des formalités procédurales prévues dans le cadre de la procédure disciplinaire, sont inopérants, tout comme la question de la suspension du traitement qui ne respecterait pas l’article 30 du statut général (CE, Ord., 18 octobre 2021, n° 457213). De manière générale, sur cette question, l’employeur est en situation dite de « compétence liée ». Il ne peut que suspendre l’agent lorsque les conditions sont remplies. Certains tribunaux le formulent clairement ainsi (TA Toulouse, 22 octobre 2021, n° 0123451).

  • « Le vaccin est expérimental » 

Les vaccins administrés en France ont fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché conditionnelle de l’Agence européenne du médicament et ne sont pas des médicaments expérimentaux au sens de l’article L. 5121-1-1 du Code de la santé publique (CE, ord., 18 octobre 2021, n° 457216). Le fantasme de la fameuse « phase 3 » des essais cliniques étant toujours très fort à ce titre, il sera renvoyé à la lecture d’une contribution co-écrite avec un médecin de santé publique.

  • « C’est une violation du consentement »

Dans la mesure où aucun traitement médical n’est administré et qu’aucune injection de vaccin n’a lieu sous la contrainte, nous ne sommes pas dans le champ d’application de l’article L. 1111-4 du Code de la santé publique (TA Dijon, 23 septembre 2021, n° 2102429). On pourrait discuter du « choix » véritablement laissé aux intéressés, mais ce n’est pas une question qui a été tranchée en référé et elle ne relève en tout état de cause pas de la question de la « violation du consentement ».

En conclusion, le premier bilan des procédures engagées en référé montre l’impasse du référé-liberté et les limites du référé-suspension. Ce dernier étant toutefois nécessairement accompagné d’un recours au fond, toutes les solutions en droit ne sont pas tranchées. Ainsi, là où le défaut d’urgence ou l’absence de « doute sérieux » empêchent de donner satisfaction aux requérants, les questions de légalité méritant d’être approfondies seront tranchées dans le cadre du recours en annulation. À suivre…

 

Rédigé par Caroline Lantero, avocate associée de 

Réintégration à l’issue d’une disponibilité : même un poste temporairement vacant doit être considéré

La Cour administrative d’appel de Nantes, saisie d’une absence de réintégration d’un agent à l’issue d’une disponibilité pour convenances personnelles a rappelé l’étendue des obligations de l’administration en la matière, en jugeant que le recrutement d’un agent contractuel en remplacement d’un agent absent nécessitait en réalité que le poste soit proposé en priorité au fonctionnaire en attente de réintégration.

Précisément, l’arrêt rappelle les termes de l’article 62 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, et celle du décret afférent à la disponibilité de ces agents, selon lequel la réintégration est de droit à la première vacance lorsque la disponibilité n’a pas excédé trois ans. Puis il expose que si le droit à réintégration à la première vacance n’oblige évidemment pas l’administration à réintégrer l’intéressé dans le poste même qu’il occupait avant sa mise en disponibilité, il lui impose en revanche d’examiner en priorité cette demande avant de statuer sur la situation des autres agents pouvant prétendre à occuper ce poste.

En l’espèce, Mme C. avait fait savoir à l’EHPAD de la Vallée Gelusseau de Coron, par un courrier du 13 septembre 2016, son souhait d’être réintégrée à compter du 14 novembre 2016. Mais cette réintégration n’était pas intervenue alors qu’en parallèle un contrat à durée déterminée d’un autre agent recruté fin 2015 « pour assurer la continuité du service sur un poste infirmier vacant temporairement », avait été renouvelé le 27 septembre 2016 pour la période du 1er octobre au 31 décembre 2016, puis de nouveau pour la période du 1er janvier au 31 mai 2017.

Faisant application de la priorité précitée et fi du caractère en principe temporaire de la vacance considérée, la Cour a jugé qu’il aurait dû être proposé à la requérante dans le cadre de sa réintégration le poste considéré, sans qu’y fasse obstacle la quotité de travail qui y était rattachée, dont on peut supposer qu’elle était un temps incomplet, mais qu’importe.

En conséquence, l’EHPAD a été enjoint de reconstituer la carrière de l’agent, jusqu’à la date à laquelle elle a finalement été réintégrée en vue d’une mutation dans un autre établissement.

Cet arrêt s’inscrit dans la veine d’arrêts précédents réaffirmant régulièrement les droits à réintégration des agents après une disponibilité (Voir par exemple : CAA de Bordeaux, 11 février 2020, n°18BXOO386 selon lequel l’administration doit tenir compte des postes vacants ultérieurs à la demande de réintégration de l’agent).

Le point sur les règles de TVA applicables aux prestations réalisées par les groupements d’intérêt public

Les groupements d’intérêt public peuvent largement se prévaloir de l’exonération de TVA pour les services rendus à prix coûtant à leurs membres compte tenu des évolutions jurisprudentielles et doctrinales intervenues au cours des dernières années.

Rappelons qu’en application des dispositions de l’article 256 du CGI, sont placées dans le champ d’application de la TVA les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel.

Les opérations effectuées à titre onéreux s’entendent de celles qui comportent la fourniture, par l’acquéreur du bien ou le bénéficiaire du service, d’une contrepartie, quelle qu’en soit la nature (somme d’argent, bien livré ou service rendu, etc.) ou la valeur.

Il en résulte, notamment, que les livraisons de biens et les prestations de services sont imposables à la TVA même si elles sont effectuées « à prix coûtant ». (CJUE, 8 mars 1988, aff. 102/86 Apple and Pear Development Council.)

Cependant, l’article 132-1 f de la directive n° 2006/112 CE du 28 novembre 2016 prévoit la possibilité pour les états membres d’exonérer les services rendus à leurs membres par les groupements autonomes de personnes sous certaines conditions.

Ces dispositions ont été transposées en droit interne à l’article 261 B du CGI aux termes duquel, « les services rendus à leurs adhérents par les groupements constitués par des personnes physiques ou morales exerçant une activité exonérée de la TVA ou pour laquelle elles n’ont pas la qualité d’assujetti, sont exonérés de cette taxe à la condition qu’ils concourent directement et exclusivement à la réalisation de ces opérations exonérées ou exclues du champ d’application de la TVA et que les sommes réclamées aux adhérents correspondent exactement à la part leur incombant dans les dépenses communes ».

La doctrine administrative qui commente ce dispositif d’exonération avait étendu son application aux mises à disposition de personnel ou de biens mobiliers ou immobiliers, facturées à prix coûtant, et effectuées soit au profit de personnes morales de droit public ou d’organismes sans but lucratif, soit en vertu d’une obligation légale ou réglementaire.

La Commission européenne ayant estimé cette tolérance doctrinale non conforme à la directive n° 2006/112/CE relative au système commun de la TVA, et plus particulièrement à ses dispositions relatives aux groupements de moyens figurant au f) du 1 de son article 132.

Par conséquent, ces dispositions ont été rapportées à compter du 1er janvier 2016 et il doit donc à compter de cette date, être fait application des dispositions de droit commun aux prestations réalisées pour des motifs d’intérêt public ou social

Partant, selon l’Administration fiscale, le bénéfice de cette exonération est réservé aux services rendus à leurs adhérents par les groupements constitués de membres exerçant une activité exonérée de la TVA ou pour laquelle ils n’ont pas la qualité d’assujetti. (BOI-TVA-CHAMP-30-10-40)

Toutefois, lorsque des membres du groupement sont redevables de la TVA, l’exonération reste applicable dès lors que le pourcentage des recettes donnant lieu au paiement de la taxe est inférieur, pour chacun des membres pris individuellement, à 20 % de ses recettes totales.

Sur ce point, la doctrine administrative n’est pas conforme à la jurisprudence du la CJUE selon laquelle l’exonération de TVA prévue à l’article 132-1 f est uniquement liée à l’utilisation par ses membres, exclusive ou non, des services rendus par le GIE, pour les besoins de leurs activités exonérées. (CJUE, 4 mai 2017 Commission c/ Luxembourg (aff. 274/15).

Cependant l’Administration fiscale admet, lorsqu’un membre du groupement a constitué plusieurs secteurs d’activité distincts au sens de l’article 209 de l’annexe II au CGI et que ce membre dépasse le seuil de 20 % susmentionné, qu’il puisse néanmoins être partie au groupement au titre du secteur d’activité distinct regroupant les opérations exonérées (BOI-TVA-CHAMP-30-10-40).

Par ailleurs, dans une décision de rescrit du 09 mars 2021 (BOI-RES-TVA-00082), l’Administration fiscale a pu préciser que, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 4 mai 2017, Commission contre Luxembourg, aff. C-247/15, ECLI:EU:C:2017:333 et CJUE, 20 novembre 2019, Infohos, aff. C-400/18, ECLI:EU:C:2019:992) il était possible d’assouplir certaines des conditions rappelées ci-dessus en faveur des groupements de moyens agissant au profit de secteurs d’activités exonérées pour raison d’intérêt général.

A cet égard, si la notion d’intérêt général visée par la doctrine administrative précitée n’a pas été précisée, l’Administration fiscale estime, s’agissant de l’application de la TVA aux activités des personnes morales de droit public (BOI-TVA-CHAMP-10-20-10-10) que les activités d’intérêt général correspondent aux tâches administratives fondamentales et obligatoires que les collectivités publiques exercent en vertu de leurs prérogatives de puissance publique ainsi qu’aux activités qui, bien que ne relevant pas de l’exercice de la souveraineté et n’impliquant pas l’exercice de pouvoirs coercitifs, sont exercées en tant qu’autorité publique par les personnes morales de droit public.

Lorsque le groupement agit au profit de secteurs d’activités exonérées de TVA pour raison d’intérêt général, le bénéfice de l’exonération de la TVA des services rendus par un groupement à ses membres non assujettis ou exonérés n’a pas à être remis en cause lorsque ce groupement comporte des membres soumis à la TVA pour plus de 20 % de leur chiffre d’affaires (groupements dits « mixtes »).

En pareille situation, l’exonération de la TVA ne s’applique qu’aux seules prestations rendues par le groupement au profit de ses membres qui concourent directement et exclusivement à la réalisation de leurs activités non imposables ou exonérées de la taxe.

En revanche, les services effectués au profit des membres pour la réalisation d’opérations soumises à la TVA doivent être imposés à la TVA. Il en ira ainsi notamment lorsque le groupement fournit une prestation à un membre ne réalisant que des opérations soumises à la TVA.

Ce faisant, lorsque le groupement est amené à fournir des prestations à un membre assujetti exerçant tant des activités exonérées ou non imposables que des activités taxées, un suivi précis de l’utilisation des services acquis par le membre est nécessaire.

Par ailleurs, les services rendus à des non-membres restent taxables de plein droit à la TVA.

Rappelons en outre qu’afin de bénéficier de l’exonération de TVA prévue à l’article 261 B du CGI, les sommes réclamées aux adhérents doivent correspondre exactement à la part leur incombant dans les dépenses communes et ne pas présenter un caractère forfaitaire.

 

Laetitia Pignier, Avocate Associée Arbor & Tournoud

Lorsque l’astreinte n’est pas considérée comme du temps de travail effectif

Pour mémoire, le Juge administratif considère qu’une période d’astreinte ne peut pas être assimilée à du temps de travail effectif, dès lors que l’agent peut vaquer librement à ses occupations. De la sorte, il a été jugé par le Conseil d’Etat que l’astreinte effectuée dans un logement mis à disposition par l’employeur à proximité immédiate du lieu de travail n’est pas à comptabiliser comme du temps de travail effectif (CE, 13 octobre 2017, Madame A. c/ Centre hospitalier de Vire, n° 396934).

En mars 2021, la CJUE a déterminé pour sa part les conditions d’assimilation d’une période d’astreinte à du temps de travail : relève de celui-ci  les périodes d’astreinte lorsque les contraintes imposées au travailleur affectent objectivement et très significativement la faculté pour ce dernier de gérer librement, au cours de cette période, le temps pendant lequel ses services professionnels ne sont pas sollicités et de consacrer ce temps à ses propres intérêts (CJUE, 9 mars 2021, n° C-580/19 et C-344/19).

Le 11 novembre dernier, la CJUE, reprenant ce considérant de principe, a précisé la portée de la notion de « temps de travail » pour une période de garde sous régime d’astreinte.

En l’espèce, il s’agissait d’un sapeur-pompier réserviste employé, à temps partiel, par le conseil municipal de Dublin, qui, en vertu d’un système de garde sous régime d’astreinte, était mis à la disposition de la brigade de la caserne par laquelle était formé.

Plus précisément, il était tenu de participer à 75 % des interventions de cette brigade et avait la faculté de s’abstenir pour ce qui est des interventions restantes. Sans être obligé, pendant ses périodes de garde, d’être présent dans un lieu déterminé, lorsqu’il recevait un appel d’urgence, il devait arriver à la caserne dans un délai maximal de dix minutes. La période de garde sous régime d’astreinte était en principe, de 7 jours sur 7 et de 24 heures sur 24 et n’était interrompue que par les périodes de congé et d’indisponibilité notifiées à l’avance.

Cependant, l’intéressé était autorisé à exercer une activité professionnelle, pour autant que cette activité n’excède pas 48 heures hebdomadaires en moyenne.

La Cour a alors apprécié de manière globale l’ensemble des contraintes imposées à l’agent pendant la période de garde.

Dans le cas d’espèce, la Cour a considéré que les contraintes imposées au sapeur-pompier n’étaient pas d’une nature telle qu’elles affectaient objectivement et très significativement la faculté pour ce dernier de gérer librement, au cours de ladite période, le temps pendant lequel ses services professionnels en tant que sapeur-pompier n’étaient pas sollicités.

On comprend que le critère déterminant pour la Cour dans cette affaire était que l’agent était autorisé à exercer pendant ce temps de garde une autre activité professionnelle et disposait ainsi d’une certaine liberté pendant ces périodes de garde.

La Cour a donc jugé que ces temps de garde sous régime d’astreinte ne pouvaient être assimilés à du temps de travail effectif.

Application de la jurisprudence Béziers I : contrôle par le juge de cassation de la qualification juridique des faits constitutifs d’un vice du consentement de nature à affecter la validité d’un contrat

La décision du 9 novembre 2021 présentement commentée a été l’occasion pour le Conseil d’État d’affirmer le contrôle qu’exerce le Juge de cassation sur la qualification juridique des faits constitutifs d’un vice du consentement de nature à affecter la validité d’un contrat.

En l’espèce, était en cause l’exécution d’une convention intitulé convention de financement et de réalisation du tronçon central Tours-Bordeaux de la ligne ferroviaire à grande vitesse Sud-Europe-Atlantique (ci-après, la « Convention ») conclu entre l’Etat, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, Réseau Ferré de France et plusieurs collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale, dont la communauté d’agglomération « Côte Basque-Adour », devenu la communauté d’agglomération du « Pays Basque », celle du « Grand Montauban » et celle de « Mont-de-Marsan agglomération » (ci-après, les « Communautés d’agglomération »).

Pour rappel, la ligne à grande vitesse Sud Europe-Atlantique, telle que la définit la n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement est constituée de plusieurs tronçons dont l’un, dénommé « tronçon central », relatif à la liaison Tours-Bordeaux, et des tronçons annexes relatifs aux liaisons entre Bordeaux-Espagne, Bordeaux-Toulouse et Poitiers-Limoges.

Par un contrat conclu le 16 juin 2011, et approuvé par décret du 28 juin 2011, Réseau ferré de France, devenu SNCF Réseau, a concédé à la société LISEA le financement, la conception, la construction, la maintenance et l’exploitation du tronçon central entre Tours et Bordeaux.

La Convention avait pour objet d’assurer le financement de la maintenance et l’exploitation de la ligne ferroviaire à grande vitesse Sud Europe Atlantique entre Tours et Bordeaux, et des raccordements au réseau existant dans le cadre réalisé dans le cadre du contrat de concession conclu entre SNCF Réseau et la société LISEA en mettant à la charge des collectivités signataires des montants de participation appelés par tranches.

Cependant, seul le tronçon central a été réalisé durant la période 2012 à 2017 et les liaisons annexes sont toujours en l’état de projet ce qui a amené les Communautés d’agglomération à suspendre leur financement au titre de la Convention. Par trois jugements du 31 mai 2017, le Tribunal administratif les a condamnées à verser les sommes dues à SNCF Réseau en exécution de ladite convention. Les Communautés d’agglomération ont introduit un pourvoi en cassation contre les arrêts du 10 décembre 2019 par lesquels la Cour administrative d’appel de Paris a rejeté leurs appels dirigés contre ces jugements.

Les Communautés d’agglomération ne contestaient pas que la Convention mettait à leur charge des participations financières mais elles soutenaient que l’application de la Convention devait être écartée aux motifs, d’une part, qu’elles n’étaient pas compétentes pour la conclure et, d’autre part, que leur engagement avait été vicié et était dépourvu de cause.

Ce litige s’inscrivait donc dans la jurisprudence dites « Béziers I » (CE Ass., 28 décembre 2009, Commune de Béziers, n° 304802) puisque l’une des parties au contrat demandait au juge d’en écarter l’application, chose qu’il ne peut faire qu’en présence d’une « irrégularité invoquée par une partie ou relevée d’office par lui, tenant au caractère illicite du contrat ou à un vice d’une particulière gravité relative notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement ».

Les Communautés d’agglomération soutenaient tout d’abord qu’elles n’étaient pas compétentes pour conclure la Convention dès lors que la seule circonstance que cette dernière ait des retombées économiques n’en faisait pas une action de développement économique (CE, 4 mai 2012, Fédération de la libre pensée et d’Action sociale du Rhône, n° 336463).

Le Conseil d’État avait précédemment jugé que l’incompétence ne constitue pas un vice d’une particulière gravité de nature à justifier que l’application du contrat soit écartée (CE Sect., 19 avril 2013, CCI d’Angoulême, n° 340093). Cependant, cette jurisprudence était relative à la compétence de l’autorité compétente pour signer le contrat et non la compétence de la personne publique elle-même à conclure une convention dans un domaine donné. Or, dans ses conclusions sous l’arrêt « Béziers I », le Commissaire au gouvernement, Emmanuel Glaser, suggérait qu’il s’agissait là d’un vice d’une particulière gravité justifiant que l’application du contrat soit écartée. Cette solution semble avoir été implicitement retenue par les juridictions du fond et validée par le Conseil d’État puisque la Haute juridiction a contrôlé que les Communautés d’agglomération étaient bien compétentes pour conclure la Convention au lieu de rejeter le moyen au motif que cette irrégularité n’était pas qualifiable d’un vice d’une particulière gravité. Au soutien de cette interprétation, on soulignera que le Conseil d’État n’a pas jugé opportun de préciser, comme le suggérer le Rapporteur public dans ses conclusions sous l’arrêt en cause (P. Ranquet, Ccls sous CE, 9 novembre 2021, Communauté d’agglomération du Pays Basque et a., nos 438388, 438389, 438408 : conclusions disponibles sur le site arianeweb), que les collectivités requérantes ne pouvaient pas, en tout état de cause, utilement invoquer leur propre incompétence.

Appréciant la compétence des Communautés d’agglomération, le Conseil d’État approuve le raisonnement de la Cour administrative d’appel de Paris qui a relevé que « la réalisation du tronçon central Tours-Bordeaux de la LGV SEA aurait pour effet d’améliorer l’accessibilité de leurs territoires, en particulier depuis Paris, et que le projet en cause était ainsi de nature à renforcer l’attractivité des territoires communautaires et, par suite, à favoriser leur développement économique » et qui en a déduit, à bon droit, que les collectivités étaient compétentes pour conclure la Convention sur le fondement de leur compétence en matière d’action de développement économique. En effet, la jurisprudence « Fédération de la libre pensée et d’Action sociale du Rhône » implique seulement que la simple circonstance qu’un projet puisse avoir une retombée économique, aussi minime soit-elle, ne suffit pas à le qualifier d’action de développement économique. En revanche, il ne saurait s’en déduire qu’un projet emportant uniquement des retombées économiques ne peut pas être qualifié d’action de développement économique. Il convient d’apprécier, au cas par cas, l’importance de ces retombées et leur impact sur l’attractivité économique du territoire des personnes publiques parties au projet.

Les Communautés d’agglomération soutenaient également que leur consentement avait été vicié.

Au soutien de ce moyen elles affirmaient, tout d’abord, qu’elles n’avaient accepté de signer la Convention qu’en considération des engagements pris par RFF et l’État, au titre de divers protocoles d’accords mentionnés à l’article 7 de la Convention, de réaliser les tronçons Bordeaux-Espagne, Bordeaux-Toulouse et Poitiers-Limoges. La participation financière n’étant pas subordonnée à la réalisation de ces tronçons était donc, selon elles, dépourvue de cause. Elles soutenaient, ensuite, que le nombre de signataires pressentis avait été moindre que celui envisagé lors de la négociation à la Convention alors que le consentement dépendait du nombre d’adhérents à celle-ci.

Le Conseil d’État confirme ici qu’il procède à un contrôle de la qualification juridique des faits constitutifs d’un vice du consentement de nature à affecter la validité d’un contrat (CE, 10 juillet 2013, Commune de Vias, n° 362304).

Il commence par relever que la Cour administrative d’appel a justement relevé « qu’il résultait des stipulations de la convention de financement et de réalisation du tronçon central Tours-Bordeaux de la LGV SEA […] que cet engagement trouvait sa cause dans la réalisation de ce seul tronçon » et que « ni l’article 7 de la convention, ni le protocole d’accord relatif à la branche Bordeaux-Espagne signé sur son fondement, ne subordonnaient l’engagement des collectivités signataires de participer au financement du tronçon central à la réalisation de cette branche » et qu’elle avait pu sans commettre d’erreur de qualification juridique des faits écarter les moyens tirés de l’absence de cause de la convention.

En d’autres termes, les collectivités requérantes se sont bien engagées en connaissance de cause à financer les travaux au regard de la seule obligation de réaliser le tronçon central Tours-Bordeaux laquelle constituait bien la cause de la Convention.

Enfin, le Conseil d’État constate que laCour a, au terme de son appréciation souveraine exempte de dénaturation des conventions, relevé « d’une part, que la signature de la convention par l’ensemble des signataires pressentis n’avait pas constitué un élément déterminant de leur consentement, d’autre part que ni la convention ni le protocole ne comportaient d’engagement à leur égard de réaliser la branche Bordeaux-Espagne ». Il approuve donc qu’elle ait écarté, au regard des constatations précitées, « l’existence d’un vice du consentement », dès lors que les Communautés d’agglomération « n’avaient été induites en erreur ni sur l’étendue des obligations de leurs cocontractants ni sur l’objet de la convention de financement ».

Exploitation de l’hôtel du Palais à Biarritz : l’appréciation restrictive de la portée de la directive Services par la CAA de Bordeaux

Par une décision rendue en date du 2 novembre dernier, la Cour administrative d’appel de Bordeaux écarte l’application des dispositions de la directive Services à la conclusion d’un bail emphytéotique portant sur l’hôtel du Palais de Biarritz, qui appartient au domaine privé de la Ville.

La ville de Biarritz avait acquis cet hôtel en 1956, et conclu deux baux commerciaux – portant sur les murs de l’hôtel et son fonds de commerce – avec plusieurs opérateurs successifs. Par une délibération du 30 juillet 2018, le conseil municipal a autorisé le Maire de la Ville à conclure cette fois-ci un bail emphytéotique avec le dernier opérateur titulaire de ces baux commerciaux, la société Socomix. C’est à l’occasion d’un recours en annulation introduit contre cette délibération que la Cour administrative d’appel de Bordeaux se prononce.

Les requérants soutenaient tout d’abord que l’hôtel du Palais appartenait au domaine public de la Ville, et ce parce qu’il aurait été affecté au service public local du tourisme en raison « de son impact au sein de la station balnéaire ». La Cour écarte toutefois sans difficulté ce moyen, en relevant que « si l’hôtel est le seul à avoir reçu l’appellation « Palace » au sein de la commune de Biarritz » et que « si cette commune possède la majorité des actions de la société d’économie mixte qui en assure l’exploitation et si cette exploitation revêt un caractère d’intérêt général, ces seules circonstance ne permettent pas de considérer que cet hôtel a été affecté au service public du tourisme dès lors qu’il n’a pas fait l’objet d’un aménagement particulier après son acquisition par la commune en 1956 mais que celle-ci s’est contentée d’en poursuivre l’exploitation dans des conditions similaires à celles d’un exploitant privé sans assortir cette exploitation d’obligations ou d’objectifs particuliers dont elle contrôlerait qu’ils ont été atteints et sans manifester sa volonté d’ériger néanmoins cette exploitation en service public ».

La Cour en déduit logiquement que la conclusion du bail emphytéotique ne devait pas être précédée des mesures de publicité et de sélection préalables applicables aux contrats conclus en vue de l’exploitation économique des dépendances du domaine public, et prévues par l’article L. 2122-1-1 du Code général de la propriété des personnes publiques.

Elle examine toutefois autrement si la conclusion du bail emphytéotique devait être précédée d’une procédure préalable, cette fois au titre des dispositions de la directive n° 2006/123 du 12 décembre 2006 (dite Directive Services).

En effet, s’il est acquis que les dispositions du Code général de la propriété des personnes publiques qui ont été introduites par l’ordonnance du 19 avril 2017 ne sont applicables qu’aux dépendances du domaine public des personnes publiques, il reste que l’exploitation économique des dépendances du domaine privé n’est pas nécessairement exemptée de toute procédure préalable.

La Cour de justice de l’Union Européenne a ainsi jugé, en application des dispositions de la directive n° 2006/123, que lorsqu’une autorisation d’occupation d’une dépendance domaniale ne constitue pas un contrat de concession de service, elle doit malgré tout, dans certains cas, être précédée de la mise en œuvre d’une procédure de publicité et de mise en concurrence, dès lors que l’autorisation est nécessaire à l’exercice d’une activité économique (CJUE, 14 juillet 2016, Promoimpresa, C-458/14). Plus précisément, l’article 12 de la directive n° 2006/123 prévoit que « lorsque le nombre d’autorisations disponibles pour une activité donnée est limité en raison de la rareté des ressources naturelles ou des capacités techniques utilisables, les États membres appliquent une procédure de sélection entre les candidats potentiels qui prévoit toutes les garanties d’impartialité et de transparence, notamment la publicité adéquate de l’ouverture de la procédure, de son déroulement et de sa clôture ».

Le Conseil d’État a ainsi récemment confirmé, en application de ces dispositions, que les autorisations d’occupation du domaine public en vue d’une exploitation économique accordées avant l’ordonnance du 19 avril 2017 étaient soumises à une procédure préalable (CE, 10 juillet 2020, Société Paris Tennis, n° 434582).

Et de nombreux auteurs s’accordent pour souligner que cette solution s’applique tant aux dépendances du domaine public qu’à celles du domaine privé.

Plusieurs réponses ministérielles récentes sont d’ailleurs venues indiquer que toute mise à disposition d’une dépendance du domaine privé devait, par principe, faire l’objet d’une procédure de sélection préalable, et ce en application du droit et de la jurisprudence européenne (Réponse ministérielle du 29 janvier 2019 publiée au Journal Officiel de l’Assemblée nationale, p.861 en réponse à la question n° 12868 du 2 octobre publiée au Journal Officiel de l’Assemblée nationale, p. 8657 et Réponse ministérielle du 10 septembre 2020, publiée au Journal Officiel du Sénat, p. 4096, en réponse à la question n° 16130 du 21 mai publiée au Journal Officiel du Sénat, p. 2298).

Toutefois, peu de juridictions administratives se sont prononcées à ce jour sur le sujet.

Dans le cas présent, la Cour administrative d’appel de Bordeaux écarte l’application des dispositions de la Directive, au motif que (i) « la conclusion du bail emphytéotique ne constitue pas, en elle-même, une démarche à laquelle serait subordonné l’exercice d’une activité hôtelière par la société Socomix ou même la poursuite de son exploitation de l’hôtel du Palais et n’autorise d’ailleurs pas cette société à exercer une telle activité ou à exploiter cet hôtel » et (ii) que « ce bail ne porte pas sur l’utilisation de ressources naturelles ou de capacités techniques présentant un caractère de rareté au sens des dispositions précitées de la directive n° 2006/123 du 12 décembre 2006 ».

Sur ce sujet sensible, cette décision est intéressante. Tout d’abord, parce qu’il en est encore très peu. Ensuite, parce qu’elle retient une acceptation de la « ressource rare » qui est, sans doute, nettement plus restrictive que ce à quoi beaucoup pouvaient s’attendre. Le palace est en effet un bien emblématique de la ville de Biarritz – par son emplacement, ses caractéristiques architecturales, ses capacités d’accueil – dont la gestion pourrait donc intéresser un grand nombre d’entreprises européennes. La Cour rejoint ainsi l’interprétation restrictive de la Cour administrative d’appel de Lyon, qui a considéré qu’une place publique municipale utilisée pour le stationnement et le marché hebdomadaire « ne constitue pas une ressource naturelle rare » (CAA Lyon, 22 octobre 2020, n° 18LY04739).

Mais c’est surtout, et enfin, sur la notion d’autorisation que la décision se signale, et a de quoi surprendre : elle semble considérer que la mise à disposition d’un bien immobilier ne peut, par elle-même, constituer une « autorisation » au sens de la Directive, et prive, ce faisant, la jurisprudence européenne de l’essentiel de sa portée. 

Clairement, voilà une décision qui renforce un vœu : il faut espérer que le Conseil d’État ait l’occasion prochainement de se prononcer sur l’application des dispositions de la directive n° 2006/126 aux dépendances du domaine privé.

 

Implantation des antennes relais et lieux de mémoire : l’appréciation par le juge administratif de l’atteinte portée au caractère et à l’intérêt des lieux

Par un jugement en date du 3 mars 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a validé la légalité d’un arrêté du 5 février 2020, par lequel le Maire de Bobigny a refusé d’accorder à la société Free Mobile le permis de construire sollicité pour la construction d’un pylône de téléphonie mobile sur un terrain situé au 1 rue du Chemin de Fer. Précisons d’emblée, et il s’agit là de l’élément central de cette affaire, que ce terrain jouxte immédiatement le site de l’ancienne gare de déportation de Bobigny dont l’emprise au sol, le bâtiment de la gare, deux édicules, le pylône d’éclairage, la radio sol-train, le faisceau des voies ferrées et la halle à marchandises sont inscrits sur l’inventaire supplémentaire des monuments historiques.

Le motif ayant justifié le refus de permis de construire était celui de la méconnaissance de l’article UE 11.1 du plan local d’urbanisme, selon lequel « Les constructions, installations nouvelles, aménagements et extensions doivent, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou leur aspect extérieur respecter le caractère et l’intérêt des lieux avoisinants, des sites et des paysages naturels et urbains locaux ».

Le Tribunal administratif de Montreuil a dû se prononcer sur la question de savoir si l’implantation d’un pylône de téléphonie mobile de forme cylindrique, type « cheminée », d’une hauteur de 20 mètres en acier galvanisé et de teinte grise, respectait le caractère et l’intérêt des lieux, marqué par la proximité immédiate de l’ancienne gare de déportation, site témoin de la déportation vers Auschwitz.

Et le tribunal a répondu par l’affirmative, en considérant qu « il est constant que ce site, qui constitue un lieu de mémoire et d’histoire de la déportation, présente un intérêt patrimonial certain et un caractère symbolique indiscutable ».

Pour le tribunal, l’implantation du pylône étant « prévue à proximité immédiate de la limite séparative du site de l’ancienne gare de déportation et notamment à quelques mètres des voies ferrées et de la halle aux marchandises », et étant donné que le pylône sera « aisément visible à partir de plusieurs endroits du site », « ainsi, en raison de la dimension mémorielle du site, le Maire a pu, sans commettre d’erreur d’appréciation et d’erreur de droit, retenir que le projet, compte tenu des partis retenus simultanément quant à sa situation, son architecture, ses dimensions et son aspect extérieur, ne respectait pas le caractère et l’intérêt du site de l’ancienne gare de déportation ».

Cette décision vient confirmer le fait que s’il est constant qu’il ressort des règles d’urbanisme et de la jurisprudence administrative une certaine bienveillance à l’égard des règles d’implantation des antennes relais, cela n’a toutefois pas pour effet de conférer aux opérateurs un blanc-seing leur permettant, au nom de l’intérêt général de la couverture du territoire par les réseaux 3G et 4G, de s’affranchir de toute exigence esthétique, et du respect de l’intégrité de sites historiques et de lieux de mémoires, et leur préservation.

La Cour administrative d’appel de Paris aura à se prononcer sur cette question, la société Free Mobile ayant fait appel de la décision du Tribunal administratif de Montreuil.

La location d’un lot de copropriété privatif indépendamment du droit de jouissance privative des parties communes attaché à ce lot

Les dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis donnent la définition des parties communes et des parties privatives. En application de l’article 3 « Sont communes les parties des bâtiments et des terrains affectées à l’usage ou à l’utilité de tous les copropriétaires ou de plusieurs d’entre eux. »

Certaines parties communes, telles que les jardins, les terrasses ou les cours peuvent faire l’objet d’une jouissance privative et exclusive par un lot de copropriété privatif.

Plus particulièrement, la loi ELAN du 23 novembre 2018 a créé l’article 6-3 de la loi du 10 juillet 1965 donnant ainsi une définition précise des parties communes à jouissance privative : « Les parties communes à jouissance privative sont les parties communes affectées à l’usage ou à l’utilité exclusifs d’un lot. Elles appartiennent indivisément à tous les copropriétaires. Le droit de jouissance privative est nécessairement accessoire au lot de copropriété auquel il est attaché. Il ne peut en aucun cas constituer la partie privative d’un lot. Le règlement de copropriété précise, le cas échéant, les charges que le titulaire de ce droit de jouissance privative supporte ».

La partie commune à jouissance privative demeure ainsi une partie commune appartenant à la collectivité des copropriétaires, mais dont l’usage et l’utilité seront attachés à un seul lot privatif.

Le droit de jouissance privative d’une partie commune est un droit réel et constitue un accessoire au lot de copropriété auquel il est attaché.

Ainsi, s’agissant d’un droit réel attaché à un lot, le droit de jouissance privative ne saurait être cédé ou loué indépendamment de ce lot.

En revanche, le lot privatif reste, quant à lui, autonome et tel est l’objet de cette décision rendue le 23 septembre 2021, par la Cour de cassation.

En l’espèce, un copropriétaire a donné à bail des locaux privatif à usage de pharmacie, dans un immeuble en copropriété. Bien que soit attachée à ce lot privatif, la jouissance exclusive d’une cour, cette partie commune à jouissance privative est exclue de l’assiette du bail.

En cours de bail, un dispositif empêchant l’accès à la cour a été installé. Le locataire a donc assigné son bailleur aux fins de le voir condamner à lui remettre les clés du dispositif et à l’allocation de dommages et intérêts.

La Cour d’appel déboute le locataire de ses demandes, considérant que la jouissance de la cour ne fait pas partie de l’assiette du bail ; raisonnement suivi par la Cour de cassation.

En effet, la Cour de cassation retient que :

« 7. Un copropriétaire peut donner à bail les parties privatives de son lot, indépendamment du droit de jouissance privative sur les parties communes attaché à ce lot.

.8. La cour d’appel a retenu souverainement qu’il ressortait des termes mêmes du contrat de bail que les bailleurs n’avaient pas entendu conférer à leur locataire le droit de jouissance sur la cour de l’immeuble. »

 

Ainsi, rien n’interdit à un copropriétaire de donner à bail le lot privatif dont il est propriétaire, en excluant expressément de l’assiette du bail, le droit de jouissance privative sur les parties communes, pourtant attaché à ce lot.

 

Cela révèle ainsi l’importance d’avoir une définition précise et claire des parties communes à jouissance privative, notamment aux termes du règlement de copropriété, comme cela est désormais imposé par la loi ELAN.

 

Diffamation entre fonctionnaires, qui est compétent : juge judiciaire ou juge administratif ?

Approche d’un conflit normatif moderne entre une loi révolutionnaire du XVIIIe siècle et une loi fondamentale du XIXe siècle

Dans un arrêt du 16 septembre 2021, la Cour d’appel de Paris (formation correctionnelle) s’est estimée matériellement incompétente, au profit des juridictions de l’ordre administratif, pour connaître de l’action civile (demandes de dommages et intérêts) au titre d’une procédure de diffamation non-publique qui opposait des membres de la fonction publique de l’enseignement universitaire (professeurs d’université ou maîtres de conférence).

Le fond du litige renvoyait à un courriel estimé diffamatoire, qui avait été co-signé par plusieurs enseignants d’une université puis diffusé par l’un d’eux à plusieurs membres d’une section du conseil national des universités (CNU). L’objet du courriel était notamment d’imputer à la partie civile des « comportements anéthiques et antidéontologiques ».

Les prévenus avaient été relaxés en première instance ; seule la partie civile poursuivante avait interjeté appel, de sorte que la Cour n’était saisie que des intérêts civils, à savoir les questions touchant à l’existence d’une faute civile de diffamation non publique et à la réparation indemnitaire de la victime le cas échéant – l’absence de culpabilité étant définitive.

L’incompétence de l’Ordre judiciaire était soulevée par la Défense au visa de l’article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor An III (article unique), consacrant le principe de la séparation des autorités judiciaires et administratives.

Et la Cour de se prononcer en faveur de son incompétence matérielle, en rappelant les visas légaux, et y ajoutant la motivation de droit suivante : « La Cour de cassation rappelle régulièrement que les tribunaux répressifs de l’ordre judiciaire sont incompétents pour statuer sur la responsabilité d’une administration ou d’un service public en raison d’un fait dommageable commis par l’un de leurs agents et que, d’autre part, l’agent d’un service public n’est personnellement responsable des conséquences dommageables de l’acte délictueux qu’il a commis que si celui-ci constitue une faute détachable de ses fonctions ».

Il est, en effet, constant que seule la juridiction administrative peut statuer sur la responsabilité pécuniaire d’un agent public (élu ou fonctionnaire) y compris pour une infraction à la loi sur la presse, lorsque ce dernier a agi dans l’exercice de ses fonctions sans commettre une faute personnelle détachable du service (Cass. Crim., 25 septembre 2007, n° 06-88.462 ; Cass. Civ 1ère., 23 février 2011, n° 09-72.059 ; Cass. Crim., 15 mars 2016, n°14-87.237 ; Cass. Civ., 1èrechambre, 23 févr. 2011, n° 09-72.059).

Faisant ainsi application de ces principes, la Cour n’identifiait pas en l’espèce de faute qui aurait été personnelle et détachable, c’est-à-dire une faute qui aurait consommé sa compétence matérielle au titre de l’action civile : « En l’espèce, les prévenus sont tous professeurs d’université ou maîtres de conférences. Les faits qui leur sont reprochés sont intervenus dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions au CNU ainsi que le précise la citation. La partie civile fait également mention de son appartenance au CNU. Les infractions reprochées aux prévenus ne sont donc pas détachables de leurs fonctions. Les propos litigieux n’ont pas été tenus dans un cadre privé qui ne touchait pas du tout à l’exercice de leur travail ainsi que ra retenu le premier juge ».

La portée de cet arrêt se situe donc dans la stricte doctrine de la Cour de cassation.

Toutefois, cette portée ne doit pas être étendue au-delà du seul cas de figure d’une contravention de presse (diffamation ou injure non publique – 1ère classe – 38 euros d’amende) qui oppose un ou des agents publics victimes à un ou des agents publics auteurs.

En effet, en matière de délit de presse (diffamation ou injure publique par exemple), l’article 46 de la loi du 29 juillet 1881 interfère avec les dispositions de l’article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor An III (article unique) : « L’action civile résultant des délits de diffamation prévus et punis par les articles 30 et 31 ne pourra, sauf dans les cas de décès de l’auteur du fait incriminé ou d’amnistie, être poursuivie séparément de l’action publique ». Cet article a donc justement pour effet d’attribuer au Juge judiciaire pénal le contentieux de la réparation indemnitaire des délits de diffamation publique ou d’injure publique commis contre des fonctionnaires ou des personnes chargées d’un mandat public.

Le conflit de normes (article 46 L. 1881 versus article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor An III) ne survient que lorsque la victime et l’auteur d’une diffamation envers un fonctionnaire ou un élu seront tous deux des agents publics (exemple : un maire diffamé par l’un de ses agents).

Dans cette hypothèse, l’article 46 exige à peine d’irrecevabilité que la victime saisisse leJjuge judiciaire pénal pour toutes diffamations de cette nature (sauf exceptions intrinsèques à ce texte), alors que l’article 13 de la loi des 16-24 août et son décret de l’An III ne l’autorisent pas si la diffamation concernée n’est pas détachable des fonctions de son auteur.

Afin de trancher ce conflit normatif, la hiérarchie des normes ne sera d’aucun secours. L’article 13 de la loi du 1790 n’a pas lui-même valeur constitutionnelle, et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires qui en découle ne constitue un principe fondamental reconnu par les lois de la République que pour la matière du contentieux de l’excès de pouvoir (Conseil Constitutionnel 23 janvier 1987 : « Considérant que les dispositions des articles 10 et 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III qui ont posé, dans sa généralité le principe de séparation des autorité administrative et judiciaire n’ont pas en elles-mêmes valeur constitutionnelle : que, néanmoins, conformément à la conception française de la séparation des pouvoirs, figure au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, celui selon lequel, à l’exception des matières réservées par nature à l’autorité judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l’annulation ou la réformation des décisions prises, dans l’exercice des prérogatives de puissance publique, par les autorités exerçant le pouvoir exécutif, leurs agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes publics placés sous leur autorité ou leur contrôle ».

Les deux textes sont donc de valeur égale et il n’est pas plus permis de soutenir que la loi de 1790 serait une loi de complémentarité venant en restriction de principes déjà posés par la loi de 1881, puisqu’elle lui est chronologiquement antérieure…

Au besoin, on rappellera que le Juge pénal conservera toujours sa compétence pour statuer sur l’action publique (culpabilité et peine) ; seules les questions indemnitaires (action civile) seront au cœur des débats sur l’incompétence de l’Ordre judiciaire.

Le retrait d’une demande de pièces complémentaires ne permet pas l’obtention d’une décision implicite de non-opposition à déclaration préalable

Par un arrêt en date du 14 octobre dernier, la Cour administrative d’appel de Marseille a précisé que lorsqu’une décision de demande de pièces complémentaires est formulée dans le mois suivant une déclaration préalable et que cette demande est retirée par l’administration, ce retrait ne rend pas le demandeur titulaire d’une décision implicite de non-opposition du fait de l’écoulement d’un délai d’un mois à compter de la date de dépôt de la déclaration.

 

Dans cette affaire, la commune de Cornillon-Confoux a relevé l’appel du jugement du 21 décembre 2018 du Tribunal administratif de Marseille annulant la décision du 2 juin 2016 par laquelle le Maire s’est opposé à la déclaration préalable déposée par le requérant le 18 février 2016 en vue de régulariser des travaux effectués sur la toiture d’un bâtiment existant.

Rappelons que les dispositions de l’article R. 423-23 du Code de l’urbanisme prévoient que le délai d’instruction de droit commun pour les déclarations préalables est d’un mois. Les dispositions de l’article R. 424-1 du même Code précisent qu’à défaut de notification d’une décision expresse dans le délai d’instruction d’un mois, le silence gardé par l’autorité compétente vaut décision de non-opposition à la déclaration préalable.

Or, aux termes des dispositions de l’article R. 423-38 du Code de l’urbanisme :

« Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l’autorité compétente, dans le délai d’un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l’auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou, dans le cas prévu par l’article R. 423-48, un courrier électronique, indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes ».

En outre, aux termes des dispositions de l’article R. 423-39 du même Code :

« L’envoi prévu à l’article R. 423-38 précise :

  1. Que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ;
  2. Qu’à défaut de production de l’ensemble des pièces manquantes dans ce délai, la demande fera l’objet d’une décision tacite de rejet en cas de demande de permis ou d’une décision tacite d’opposition en cas de déclaration ;
  3. Que le délai d’instruction commencera à courir à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie « .

La Cour administrative d’appel de Marseille a apporté des précisions sur l’application des dispositions combinées des articles susvisés et a jugé, après avoir rappelé « qu’une décision de non-opposition à déclaration préalable naît un mois après le dépôt de celle-ci, en l’absence de notification d’une décision expresse de l’administration ou d’une demande de pièces complémentaires adressée au pétitionnaire dans le délai d’un mois laquelle a pour effet d’interrompre ce délai », que « lorsqu’une décision de demande de pièces complémentaires a été retirée par l’administration, ce retrait ne rend pas le demandeur titulaire d’une décision implicite de non-opposition du fait de l’écoulement d’un délai d’un mois à compter de la date de dépôt de la déclaration préalable ».

Par suite, la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé que la commune de Cornillon-Confoux était fondée à soutenir qu’aucune décision tacite de non-opposition n’était née à la date de ce retrait, étant précisé qu’en l’espèce, la commune avait, au surplus, opposé un refus exprès le jour même de ce retrait.

ZAC et droit de délaissement : une évolution bienvenue

Dans le cadre de la seconde partie de son rapport dédiée à « l’approfondissement du contrat local et autres mesures nationales », et remis le 28 octobre dernier à la ministre déléguée en charge du Logement, la Commission pour la relance durable de la construction de logements a formulé 24 propositions destinées à favoriser la relance durable de la construction.

Et au titre de ces propositions, figure celle d’encadrer le droit de délaissement, institué lors de la création de la ZAC. Pour mémoire, aux termes des dispositions de l’article L. 311-2 du Code de l’urbanisme, « A compter de la publication de l’acte créant une zone d’aménagement concerté, (…) les propriétaires des terrains compris dans cette zone peuvent mettre en demeure la collectivité publique ou l’établissement public qui a pris l’initiative de la création de la zone de procéder à l’acquisition de leur terrain, dans les conditions et délais prévus à l’article L. 230-1 ».

Concrètement, ce droit de délaissement, tel qu’existant à ce jour, constitue un risque économique pour les aménageurs, les invitant à définir un périmètre de ZAC « au plus juste », excluant de fait les programmes de constructions intervenant par exemple en périphérie de la ZAC et bénéficiant ainsi des équipements publics de la ZAC et surtout de son effet d’attractivité.

Dans ce contexte, et comme l’énonce la proposition n° 22 formulée par la commission Rebsamen, l’objectif n’est pas de supprimer le droit de délaissement institué lors de la création de la ZAC mais de l’encadrer afin de « limiter ses conséquences financières pour l’aménageur et la collectivité et d’autoriser ainsi la définition de périmètre plus cohérent au regard de l’impact réel de l’opération. » (extrait rapport p.24.)

Autrement dit, en encadrant le droit de délaissement de la ZAC, l’objectif de la Commission est de favoriser l’équilibre financier de la ZAC, stimulant ainsi la mise en œuvre de cet outil d’aménagement. Une telle évolution serait en effet pertinente dès lors que depuis sa création par la LOF (L. n° 67-1253, 30 déc. 1967, d’orientation foncière, art. 16), la ZAC n’a cessé d’évoluer pour s’adapter.

Dossier de candidature : le Kbis et l’attestation AGEFIPH ne sont plus exigibles

Décret n° 2021-631 du 21 mai 2021 relatif à la suppression de l’exigence de présentation par les entreprises d’un extrait d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers dans leurs démarches administratives

Au cours du premier semestre 2021, deux textes ont apporté des modifications aux dispositions régissant les pièces que les acheteurs soumis au Code de la commande publique peuvent exiger des candidats à l’occasion d’une procédure de mise en concurrence.

La première modification a été apportée par l’arrêté du 17 mars 2021, qui a modifié l’arrêté du 22 mars 2019 fixant la liste des impôts, taxes, contributions ou cotisations sociales donnant lieu à la délivrance de certificats pour l’attribution des contrats de la commande publique.

Par l’effet de cet arrêté, les acheteurs ne peuvent plus, depuis le 1er juillet 2021, exiger des candidats la transmission du certificat délivré par l’Association de gestion du fonds de développement pour l’insertion professionnelle des handicapés (AGEFIPH) attestant la régularité de la situation de l’employeur au regard de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés prévue aux articles L. 5212-2 à L. 5212-5 du Code du travail. Cette modification résulte de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, qui a retiré à l’AGEFIPH la compétence pour délivrer le certificat susmentionné pour la confier à l’URSSAF et à la Mutualité Sociale Agricole (MSA).

La seconde modification fait suite au décret n° 2021-631 du 21 mai 2021, qui supprime l’exigence de présentation par les entreprises d’un extrait d’immatriculation au RCS, à savoir le Kbis. A cet effet, le décret a notamment modifié les dispositions de l’article R. 2143-9 du Code de la commande publique.

Ainsi, les candidats à un marché public n’auront à produire que leur « numéro unique d’identification », délivré par l’INSEE, afin de prouver qu’ils ne se trouvent pas dans l’un des cas d’exclusion mentionné à l’article L. 2141-3 du Code de la commande publique (entreprises soumises à une procédure de liquidation, une mesure de faillite personnelle, une interdiction de gestion ou une procédure de redressement judiciaire et ne bénéficiant pas d’un plan de redressement ou ne justifiant pas avoir été habilitées à poursuivre l’activité pendant la durée prévisible d’exécution du marché).

Cette modification est entrée en vigueur « le premier jour du sixième mois suivant celui de sa publication au Journal officiel de la République française », soit le 1er novembre 2021.

A cet égard, on relèvera que même si seules les dispositions afférentes aux marchés publics ont été modifiées, il y a tout lieu de penser que la suppression de l’exigence de présentation d’un Kbis s’applique également aux procédures de passation des contrats de concession.