Retour sur une nouvelle actualité ZAN : l’adoption de la loi n° 2023-630 du 20 juillet 2023

Il y a un peu plus de deux ans, l’Assemblée Nationale adoptait la loi dite « Climat et résilience » n° 2021-1104 du 22 août 2021. Cette loi, inspirée par des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, a été votée avec d’ambitieux (et nécessaires) objectifs de réduction de l’artificialisation des sols, la France ne faisant pas figure de bon élève sur ce point jusqu’à présent.

Très synthétiquement, la loi instaure un objectif de réduction de moitié du rythme de l’artificialisation des sols sur la période 2021 / 2031 (par rapport à la consommation mesurée entre 2011 et 2020), et un objectif zéro artificialisation nette d’ici 2050. Le texte a nommé les régions en qualité de chef de file, elles doivent ainsi, par le biais de leur document de planification (SRADDET, SAR, SDRIF, PADDUC), territorialiser cet objectif de – 50 % d’ici 2031, en répartissant et en adaptant l’effort de réduction entre les différentes zones de son périmètre régional.

Si cette loi était nécessaire pour préserver les espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF), il a vite été constaté qu’elle nécessitait des ajustements, des évolutions tendant à rendre la mise en œuvre de ces objectifs plus opérationnelle et plus équitable notamment.  Cette loi et ce dispositif ZAN a notamment constitué une source d’inquiétude pour les maires, qui ont, par le biais de l’Association des maires de France (AMF), formulé 20 propositions pour la mise en œuvre du ZAN[1].

 

1/ Les problématiques pratiques de mise en œuvre de la loi Climat Résilience

Les problématiques identifiées sont de plusieurs ordres, et sont principalement les suivantes :

  • D’une part, les délais de transposition des objectifs ZAN dans les documents régionaux, puis dans les documents locaux étaient trop brefs.

La première étape de la transposition est l’étape régionale, principalement à travers le SRADDET, ou encore le SAR, le SDRIF, le PADDUC, qui doivent répartir l’effort sur le territoire. Le délai limite de transposition était, avant la loi du 20 juillet dernier, le mois de février 2024.

Or, pour diverses raisons, ces délais sont apparus quasiment impossibles à tenir, et ce notamment au regard de l’absence de définition de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers.

  • D’autre part, il était également mis en avant, notamment par les sénateurs, une absence de territorialisation des objectifs ZAN en fonction des circonstances locales.

En effet, à cet égard, les sénateurs, mais également les élus locaux déploraient en l’état des textes un lien trop contraint entre le document régional et les SCOT / PLU. Il était regretté que les décrets confèrent au SRADDET une portée trop contraignante, limitant la possibilité d’adapter localement les objectifs régionaux, empêchant une répartition équitable de l’effort.

  • En outre, il était reproché au texte de ne fixer des objectifs ZAN qu’aux collectivités et non à l’Etat alors que certains des projets les plus consommateurs d’espaces sont décidés et/ou conduits par l’Etat.

  • C’est aussi une représentation jugée insuffisante des territoires ruraux et une répartition inégale de l’effort qui était reprochée à la loi et ses décrets.

La « conférence des SCOT » était jugée utile, mais caractérisée par un échelon communal encore trop peu représenté aux étapes stratégiques de la concrétisation des objectifs ZAN.

 

2/ Les évolutions adoptées par la loi du 20 juillet 2023

Dans ces conditions, une proposition de loi d’initiative sénatoriale a été déposée à l’issue des travaux de la mission conjointe de contrôle sur l’application des objectifs de ZAN a été déposée puis examinée par la commission spéciale chargée de son examen, qui a validé les grandes orientations du texte et ses principaux dispositifs.

Après un passage en commission mixte paritaire, et divers ajustements entre la proposition de loi sénatoriale et le texte final, la loi a donc été adoptée le 20 juillet 2023. Elle est composée de 4 chapitres et 9 articles.

Favoriser le dialogue territorial et renforcer la gouvernance décentralisée :

  • Prolongation des délais pour intégrer l’objectif de zéro artificialisation nette des sols au sein des différents documents d’urbanisme (de six à neuf mois selon le cas) (article 1).

Les documents régionaux qui devaient être adaptés au plus tard en février 2024, pourront l’être jusqu’en novembre 2024. Ce délai de 9 mois supplémentaire a fait débat car dans la proposition de loi sénatoriale, il était prévu un allongement des délais d’un an (et l’Assemblée nationale proposait pour sa part une prolongation de seulement 6 mois).

Pour les PLU et SCOT le délai butoir est décalé de 6 mois, soit février 2027 pour les SCOT et février 2028 pour les PLU.

  • Abandon de la conférence des schémas de cohérence territoriale pour la transformer en conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols dite « conférence ZAN » afin que la représentation des territoires soit plus équilibrée Elle est consultée notamment sur tout sujet lié à la mise en œuvre des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols, et dans le cadre de la qualification des projets d’envergure régionale, nationale ou européenne. La composition et le nombre des membres de cette Conférence sont déterminés par une délibération du conseil régional. Cette commission comprend obligatoirement au moins un représentant de chaque département du périmètre régional, siégeant à titre consultatif. En outre, elle comprend notamment des représentants des diverses collectivités locales ainsi que des représentants de l’Etat. (Article 2).

Accompagner les projets structurants de demain :

  • Les grands projets d’envergure nationale et européenne (lignes à grande vitesse, projets industriels d’intérêt majeur, prisons, etc.) ne sont pas décomptés des objectifs des collectivités territoriales mais d’un forfait chiffré de répartition de la consommation des projets d’envergure nationaux ou européens entre l’Etat et les régions. Plus précisément, la loi fixe un forfait chiffré de consommation : 500 hectares pour l’ensemble du pays, dont 10 000 hectares sont mutualisés entre les régions couvertes par un SRADDET, au prorata de leur enveloppe d’artificialisation définie au titre de la période 2021-2031. La loi précise enfin qu’en cas de dépassement du forfait précité, le surcroît de consommation ne peut être imputé sur l’enveloppe des collectivités territoriales ou de leurs groupements.
  • Création d’une commission régionale de conciliation sur l’artificialisation des sols, qui pourra être réunie, notamment à la demande d’un EPCI ou encore d’une commune compétente en matière de documents d’urbanisme, dans le cadre de l’évolution d’un document d’urbanisme visant à y intégrer les objectifs de réduction de l’artificialisation des sols. Elle comprend notamment, à parts égales, des représentants de l’Etat et de la région concernée, en vue de palier d’éventuels désaccords quant à la liste des grands projets (article 3).

Mieux prendre en compte les spécificités des territoires :

  • La fameuse et débattue garantie rurale, sanctuarisant une surface minimale de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers d’un hectare pour toute commune couverte par un plan local d’urbanisme, ou par un document en tenant lieu prescrit, arrêté ou approuvé avant le 22 août 2026. Cette surface propre à chaque commune pourra être mutualisée à l’échelle intercommunale. Les communes déléguées (du fait de la création d’une commune nouvelle dont l’arrêté de création aurait été pris à partir du 1er janvier 2011) pourront recevoir une majoration de 0,5 hectare chacune, tout en plafonnant cette majoration à 2 hectares (article 4).
  • S’agissant des communes littorales, pour la fixation des objectifs chiffrés de lutte contre l’artificialisation des sols dans les documents de planification régionale et d’urbanisme, il est tenu compte des enjeux d’adaptation et de recomposition spatiale de ces territoires. Ainsi, les surfaces artificialisées situées dans une zone exposée au recul du trait de côte délimitée en application du Code de l’urbanisme, peuvent être considérées comme désartificialisées, dès lors que ces surfaces ont vocation à être renaturées dans le cadre d’un projet de recomposition spatiale du territoire littoral (article 5).

Faciliter la transition vers l’absence de toute artificialisation nette des sols grâce à des nouveaux outils :

  • L’autorité compétente pourra délimiter au sein de son PLU, ou tout autre document en tenant lieu, des secteurs prioritaires à mobiliser en raison de ce qu’ils présentent un potentiel foncier majeur pour favoriser l’atteinte des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols, à l’intérieur desquels elle pourra instituer le droit de préemption urbain (cette préemption avait été annulée en première lecture par l’Assemblée nationale). Ces secteurs prioritaires peuvent couvrir en particulier, selon la loi, des terrains contribuant à la préservation ou à la restauration de la nature en ville ; des zones présentant un fort potentiel en matière de renaturation ; ou encore, des terrains susceptibles de contribuer au renouvellement urbain, à l’optimisation de la densité des espaces urbanisés ou à la réhabilitation des friches.
  • Possibilité de surseoir à statuer sur une demande d’autorisation d’urbanisme pour l’autorité compétente en matière de délivrance des autorisations dès lors que le projet objet de la demande d’urbanisme entrainera une consommation d’ENAF qui pourrait compromettre l’atteinte des objectifs de réduction de cette consommation susceptibles d’être fixés par le document d’urbanisme en cours d’élaboration ou de modification, durant la première tranche de dix années (article 6). En revanche, il est précisé qu’un tel sursis à statuer est écarté dès lors qu’il sera justifié que la consommation d’ENAF résultant de la réalisation du projet est compensée par la renaturation d’une surface au moins équivalente à l’emprise du projet.
  • La renaturation d’espaces urbanisés ou construits en espaces naturels, agricoles et forestiers, est comptabilisée en déduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (article 7).

 

3 / Prochaine étape : l’adoption des décrets

Immédiatement après l’adoption de la loi en date du 20 juillet 2023, deux projets de décret ont été mis à la consultation du public entre le 25 juillet et le 15 août 2023.

Il est à noter que ces décrets sont fébrilement attendus, dans la mesure où plusieurs dispositions d’origine de la proposition de la sénatoriale ont été supprimées par les parlementaires et doivent être reprises et / ou adaptées selon des modalités différentes dans le cadre de décret (il a été considéré que ces mesures ressortaient de la sphère réglementaire et non législative).

Ont ainsi été renvoyés à la sphère règlementaire :

  • L’article 2 qui prévoit que les dispositions relatives à la lutte contre l’artificialisation des sols contenues dans le SRADDET et le SAR s’appliquent aux documents d’urbanisme dans un rapport de prise en compte et non de compatibilité, et qui en outre impose aux régions de justifier de la manière dont il a été tenu compte des propositions faites par les conférences de SCOT en matière de territorialisation des objectifs de réduction d’artificialisation des sols ;
  • L’article 5 qui détaille le régime de prise en compte spécifique, au titre de l’artificialisation qu’ils engendrent, pour les projets d’ampleur régionale et qui apporte des précisions sur la prise en compte des projets d’intérêt intercommunal lors de la définition des objectifs de réduction de l’artificialisation dans le PLU ;
  • L’article 6 de la proposition de loi sénatoriale prévoyant une meilleure prise en compte des efforts déjà réalisés par le passé par les collectivités pour réduire leur rythme d’artificialisation ;
  • L’article 8 définissant une « part réservée au développement rural» au sein des enveloppes fixées par les documents régionaux, les Scot et les PLUi ;
  • L’article 11 qui prévoit la mise à dispositions des données d’artificialisation et de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers.

Les projets de décrets qui ont été mis à la consultation du public jusqu’au 15 août dernier sont au nombre de deux :

  • Le premier est relatif à la mise en œuvre de la territorialisation des objectifs de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols[2] modifie le décret n° 2022-762 du 29 avril 2022 afin, de compléter les modalités d’application pour l’intégration et la déclinaison des objectifs ZAN afin de mieux assurer la territorialisation des objectifs de sobriété foncière et l’équilibre entre le niveau d’intervention de la région et du bloc communal via les documents d’urbanisme ;
  • Le second décret est relatif à la composition et aux modalités de fonctionnement de la commission régionale de conciliation sur l’artificialisation des sols[3].

Il en sera fait l’analyse au moment de leur adoption.

 

[1] https://www.amf.asso.fr/m/document/fichier.php?FTP=0fd677464a99e2d8dfe18a4e6b3373e8.pdf&id=41516

[2] https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-42304-projet-decret-sraddet.pdf

[3] https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-42304-projet-decret-commission-conciliation-zan.pdf

Autoconsommation collective étendue dans les zones périurbaines : la CRE se prononce favorablement sur une nouvelle possibilité de dérogation au critère de proximité géographique

Le 26 juillet dernier, la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE) a rendu un avis favorable sur le projet d’arrêté portant dérogation au critère de proximité géographique dans le cadre d’opération l’autoconsommation collective étendue.

Pour mémoire, aux termes de l’article L. 315-2 du Code de l’énergie, une opération d’autoconsommation collective est qualifiée d’étendue lorsque « la fourniture d’électricité est effectuée entre un ou plusieurs producteurs et un ou plusieurs consommateurs finals liés entre eux au sein d’une personne morale dont les points de soutirage et d’injection sont situés sur le réseau basse tension et respectent les critères, notamment de proximité géographique, fixés par arrêté du ministre chargé de l’énergie, après avis de la Commission de régulation de l’énergie».

Un arrêté daté du 21 novembre 2019 est venu fixer le critère de proximité géographique, qui correspond à la distance maximale entre deux participants à l’opération, à 2 kilomètres. La puissance cumulée des installations de production doit être inférieure à 3 MW sur le territoire métropolitain et à 0,5 MW dans les zones non interconnectées.

Une dérogation à ce critère géographique a été consacrée par l’arrêt du 14 octobre 2020. Depuis cette date, la personne morale organisatrice d’un projet d’autoconsommation collective étendue peut demander au ministre de l’Énergie l’autorisation de mener l’opération selon un critère géographique de 20 kilomètres au maximum entre les deux participants les plus éloignés. L’article 1er bis de l’arrêté du 21 novembre 2019, modifié par l’arrêté du 14 octobre 2020, précise que le Ministre chargé de l’énergie accorde cette dérogation au regard de l’isolement du lieu du projet, du caractère dispersé de son habitat et de sa faible densité de population.

C’est dans ce contexte que la CRE a été saisie pour avis sur un projet d’arrêt pris en application de l’article L. 315-2 du Code de l’énergie afin d’étendre la possibilité de déroger au critère de proximité géographique applicable aux opérations d’autoconsommation collective étendue lorsque tous les participants à l’opération sont exclusivement situés sur une ou plusieurs communes rurales ou périurbaines du territoire métropolitain continentale. Dans cette hypothèse, le Ministre de l’Énergie pourrait autoriser des projets au sein desquels la distance séparant les deux participants les plus éloignées est de 10 km au maximum.

On soulignera qu’un amendement au projet de loi relatif à l’industrie verte, qui doit prochainement faire l’objet d’une commission mixte paritaire, a été présenté en ce sens devant le Sénat mais a été jugé irrecevable car qualifié de cavalier législatif.

La CRE a ainsi rendu un avis favorable à ce projet de décret considérant qu’en permettant d’élargir de façon dérogatoire le périmètre des opérations d’autoconsommation collectives étendues dans les situations susvisées il allait contribuer au développement de tels projets et à leur rentabilité dans les zones périurbaines et à densité intermédiaires.

Sur l’application de cette dérogation, elle recommande cependant que celle-ci soit cohérente avec les densités de population des zones éligibles.

Actualités intéressantes relatives à l’ARENH

CRE, Délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 20 juillet 2023 portant correction de la délibération du 29 juin 2023 portant décision sur le calcul du complément de prix ARENH sur l’année 2022

CRE, Délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 20 juillet 2023 portant avis sur le projet d’arrêté relatif au calcul des droits à l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique, et portant décision sur les modalités de calcul des tarifs réglementés de vente d’électricité

Arrêté du 27 juillet 2023 portant modification de l’arrêté du 17 mai 2011 relatif au calcul des droits à l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique

Conseil d’État, 25 août 2023, n° 477334

Plusieurs actualités intéressantes s’agissant du mécanisme d’Accès Régulé à l’Electricité Nucléaire Historique (ci-après, ARENH) sont à signaler.

  • Calcul du complément de prix ARENH sur l’année 2022

D’abord, la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE) est venue préciser, dans la délibération n° 2023-176 publiée le 29 juin 2023 et corrigée par la délibération n° 2023-207 du 20 juillet 2023, le calcul du complément de prix ARENH sur l’année 2022.

Le Régulateur indique notamment que lors du guichet de novembre 2021, certains fournisseurs ont demandé un volume supérieur à leurs droits réels en ARENH calculés sur la base de la consommation constatée de leurs clients. Cela concerne, après redistribution théorique, 58 fournisseurs sur la centaine ayant formulés une demande d’ARENH pour 2022. Ces fournisseurs sont ainsi redevables d’un complément de prix 1 (ci-après, CPI 1).

Ces compléments de prix seront redistribués aux fournisseurs impactés par les demandes excédentaires d’autres fournisseurs à due proportion de leur perte et dans la limite des montants effectivement recouvrés, en application des articles R. 336-35-1 du Code de l’énergie.

La CRE précise que les consommateurs résidentiels et les petits professionnels ne seront pas affectés par les compléments de prix dès lors que leur prix de l’électricité a été gelé en 2022 par mesures gouvernementales.

En outre, elle précise que 11 fournisseurs sont redevables d’un complément de prix 2 (ci-après, CP 2) à reverser à EDF dans la limite des montants effectivement recouvrés et en déduction de la compensation des charges imputables aux missions de service public assignées à EDF et évaluées par la CRE dans sa délibération publiée mi-juillet 2023. Le CP2 correspond à une pénalité financière attribuée à un fournisseur qui a formulée une surestimation excessive de son besoin en ARENH.

On peut également souligner que le 25 août 2023, le Juge des référés du Conseil d’Etat a rejeté la demande de suspension, formulée par le fournisseur E-Pango, de l’exécution de la notification du complément de prix 1 de l’ARENH mis à sa charge pour 2022 ainsi que des deux délibérations de la CRE susvisée.

Le Conseil d’Etat a considéré que contrairement à ce qu’affirmait le fournisseur, le calcul du complément de prix 1 avait bien pris en compte la période d’interruption par la société de ses livraisons d’électricités aux consommateurs finals.

  • Calcul des droits à l’accès à l’ARENH

Le 27 juillet 2023, le Ministre de la Transition Ecologique a publié un arrêté portant modification de l’arrêt du 17 mai 2011 relatif au calcul des droits à l’accès régulé à l’électricité nucléaire histoire, après l’avoir soumis à l’avis de la CRE qui s’est prononcée favorablement dans une délibération n° 2023-208 du 20 juillet 2023.

L’arrêté prévoit notamment une baisse du coefficient de bouclage utilisé dans le calcul des droits ARENH. Ce coefficient permet d’ajuster les volumes d’ARENH théorique à la part de la production nucléaire dans la consommation française, telle que le précise la CRE dans sa délibération susvisée qui a jugé cet abaissement pertinent et bienvenu au regard de la baisse du taux d’écrêtement de l’ARENH qui en découlera.

Toutefois, comme la Commission le précise, cette modification entraînera une augmentation du Tarif d’Utilisation Du Réseau Public d’Electricité (ci-après, TURPE) dans la mesure où elle entraînera une hausse du prix des pertes électriques pour les gestionnaires de réseau qui sera répercutée sur les factures des consommateurs.

Au sein de sa délibération, la CRE fixe également les modalités de prise en compte dans le calcul des Tarifs Réglementés de Vente d’Electricité (ci-après, TRVE) de la baisse du coefficient de bouclage.

Enfin, dans son avis, la CRE recommande qu’une décision soit prise dans de brefs délais sur l’évolution ou non des autres paramètres de l’ARENH et particulièrement le volume maximal annuel et le prix.

Loi APER : publication d’un décret relatif aux autorisations requises afin de déroger à la loi Littoral

Pour rappel, et ainsi que nous l’évoquions dans un précédent focus avant la publication de la loi n° 2023-175 en date du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (ci-après, loi APER), il est désormais possible, en vertu des articles 27, 37 et 66 de la loi APER, de déroger au principe d’inconstructibilité dans certains secteurs soumis aux dispositions de la loi n°86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (ci-après, loi Littoral).

Plus précisément :

  • L’article 27 de la loi APER permet de déroger à l’article L. 121-5-2 du Code de l’urbanisme afin que soit autorisée la construction de postes électriques dans les espaces identifiés comme remarquables ou caractéristiques et dans les milieux identifiés comme nécessaires au maintien des équilibres biologiques sur certains sites au sens de l’article L. 121-23 du Code de l’urbanisme ;
  • L’article L. 121-12-1 I. du Code de l’urbanisme, modifié par l’article 37 de la loi APER, permet, par dérogation à l’article L. 121-8 de ce même Code, que des ouvrages nécessaires à la production d’énergie solaire photovoltaïque ou thermique puissent être autorisés sur des friches ou des bassins industriels de saumure saturée qui ne sont pas en continuité avec les agglomérations et villages existants ;
  • L’article L. 121-5-2 du Code de l’urbanisme, créé par l’article 66 de la loi APER, permet à titre exceptionnel l’implantation d’ouvrages du réseau public de transport nécessaires au développement de l’éolien en mer et à la décarbonation des industries dans les zones exposées au recul du trait de côte et dans les bandes littorales de cent mètres.

La loi APER a soumis le bénéfice de ces dérogations à l’obtention d’une autorisation délivrée par les ministres chargés de l’urbanisme et de l’énergie ou par l’autorité administrative compétente de l’Etat.

Le décret n° 2023-517 publié le 28 juin 2023 et fixant certaines modalités d’application des articles 27, 37 et 66 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables est ainsi venu préciser les modalités de délivrance de ces autorisations.

D’abord, au regard de leur objet particulier, le décret déroge au principe selon lequel le silence gardé par l’administration sur une demande d’autorisation vaut acceptation.

Ensuite, s’agissant des autorisations prévues à l’article L. 121-12-1 du Code de l’urbanisme et par l’article 27 de la loi APER, il est précisé qu’une décision implicite de rejet naît à l’expiration d’un délai de quatre mois, même si, s’agissant de la seconde autorisation, ce délai pourrait être modifié par décret en Conseil d’Etat. Cette durée se justifie notamment par la complexité de la procédure d’instruction des demandes d’autorisations.

Enfin, le décret désigne le ministre chargé de l’urbanisme comme l’autorité administrative de l’Etat compétente pour délivrer l’autorisation prévue à l’article L. 121-12-1 du Code de l’urbanisme susvisée.

Déchets : rejet du recours sur la traçabilité des terres excavées

Par un arrêt en date du 28 juillet 2023, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur la légalité du décret n° 2021-321 du 25 mars 2021 relatif à la traçabilité des déchets, des terres excavées et des sédiments au regard des exigences liées à la protection du secret des affaires et au principe de clarté et d’intelligibilité de la norme.

Ce décret a en effet instauré un registre chronologique des terres excavées et sédiments et a mis en place une base de données électronique centralisée. En outre, il prévoit un enrichissement des données devant figurer dans les registres des déchets des producteurs, détenteurs, transporteurs et négociants de déchets, impose aux courtiers de déchets la tenue d’un registre chronologique et crée un registre national des déchets dématérialisé. Il organise également la dématérialisation des bordereaux de suivi de déchets dangereux et de déchets contaminés aux polluants organiques persistants, par la mise en place d’une base de données électronique centralisée.

Ce décret a été contesté par la Fédération professionnelle des entreprises de recyclage, aux motifs selon elle qu’il porterait atteinte à la protection du secret des affaires et méconnaitrait le principe de clarté et intelligibilité de la norme dans la mesure où il renvoie à des arrêtés le soin d’indiquer quelle sera l’autorité gestionnaire des dispositifs mis en place.

Le Conseil d’Etat a rejeté la requête dès lors que :

  • le décret attaqué n’a pas pour objet de préciser les conditions d’accès des tiers aux informations transmises et enregistrées ;
  • les dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés énoncent que les traitements de données à caractère personnel mis en œuvre pour le compte de l’Etat qui intéressent notamment la sécurité publique sont autorisés par arrêtés des ministres compétents, qui précisent notamment le service gestionnaire compétent auprès duquel s’exerce le droit d’accès ainsi que les destinataires habilités à recevoir communication des données.

ICPE : le propriétaire du terrain participant à l’exploitation peut-il être considéré comme l’exploitant de fait ?

Qui, de la société entreposant des déchets inertes ou du propriétaire du terrain tirant bénéfice de cette activité, doit faire l’objet des procédures de sanction applicables pour exploitation sans titre sur le fondement de la règlementation ICPE ?

Le Conseil d’Etat a tranché cette question dans un arrêt en date du 30 juin 2023. En effet, la société RE.VALY contestait devant le juge l’arrêté préfectoral pris sur le fondement de l’article L. 171-7 du Code de l’environnement l’ayant mise en demeure de suspendre immédiatement ses activités de stockage de déchets inertes et d’affouillements de sol sur une parcelle, activités qu’elle exerçait en effet sans l’enregistrement requis au titre de la rubrique 2760, et de régulariser sa situation administrative au regard de la législation sur les ICPE.

L’article L. 171-7 du Code de l’environnement indique bien que lorsqu’une installation est exploitée sans l’autorisation requise, « l’autorité administrative compétente met l’intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu’elle détermine ». Or la société considérait que la mise en demeure aurait dû être dirigée contre le propriétaire de la parcelle, dès lors que celui-ci était « intéressé » à l’installation de stockage de déchets. En effet, elle avait signé avec le propriétaire une convention pour exercer ses activités, celui-ci disposait d’une autorisation de remblais et il assurait la mise en forme des remblais.

Le Conseil d’Etat considère toutefois que « la circonstance que le propriétaire de la parcelle, M. A…, avec qui elle avait signé un contrat pour le stockage et le traitement des déchets inertes en cause, était titulaire d’une autorisation de procéder à des travaux de remblaiement, délivrée en application des articles L. 442-1 et suivants du Code de l’urbanisme dans leur version alors applicable, et bénéficierait à ce titre de l’activité exercée par la société sur sa parcelle » n’a pas d’incidence sur l’identification de la personne devant être mise en demeure. En effet, la société RE.VALY demeure l’exploitant sans titre et le fait qu’un tiers ait pu être chargé des opérations matérielles d’exécution ne permet pas de la dégager de sa responsabilité.

QPC : vers la reconnaissance d’un droit des générations futures de vivre dans un environnement sain et de principes de solidarité et fraternité entre les générations ?

Le Conseil constitutionnel pourrait-il reconnaitre l’existence d’un droit des générations futures de vivre dans un environnement sain et de principes de solidarité et fraternité entre les générations ? Il en aura à tout le moins l’opportunité lors de l’examen de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) lui ayant été transmise le 2 août 2023 par le Conseil d’Etat.

Plusieurs associations et particuliers ont en effet formé un recours contre le décret déclarant d’utilité publique le centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs de haute activité et de moyenne activité à vie longue Cigéo et mettant en compatibilité les plans locaux d’urbanisme afférents.

Au soutien de leur requête, les requérants ont invoqué que ce décret méconnaitrait plusieurs principes, qui n’ont à ce stade pas encore été consacrés par des décisions du Conseil constitutionnel :

  • Le droit des générations futures de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, qui découlerait de l’article 1er de la Charte de l’environnement consacrant le droit de vivre dans un tel environnement et le 7ème alinéa de son Préambule, qui évoque la nécessité de ne pas compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins ;
  • Le principe de solidarité intergénérationnelle, qui serait garanti par les articles 2 (devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement), 3 (principe de prévention) et 4 (contribution à la réparation des dommages) de la Charte de l’environnement éclairés par son Préambule ;
  • Le principe de fraternité transgénérationnelle, qui serait garanti par le Préambule et les articles 2 (définissant la devise de la République comme « Liberté, Égalité, Fraternité ») et 72-3 de la Constitution (énonçant que « la République reconnaît, au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité »).

Les requérants ont ainsi demandé la transmission d’une QPC. Afin que le Conseil d’Etat renvoie la QPC au Conseil constitutionnel, il est nécessaire que trois conditions cumulatives soient remplies : la disposition contestée doit être applicable au litige ou à la procédure, elle ne doit pas avoir déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et la question doit être nouvelle ou présenter un caractère sérieux.

Les dispositions du décret contesté sont applicables au litige et n’ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution. Le débat portait donc sur le caractère nouveau, qui peut être reconnu si la question soulevée va potentiellement donner lieu à la découverte d’un nouveau principe constitutionnel, ou sérieux de la QPC.

Et le Conseil d’Etat, estimant que la question est nouvelle, renvoie la QPC au Conseil constitutionnel, qui dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer sur celle-ci.

Installations classées : précisions sur les prescriptions applicables aux installations fonctionnant au bénéfice des droits acquis

Le décret n° 2023-722 en date du 3 août 2023 a été adopté en vue de s’assurer que les installations fonctionnant aux bénéfices des droits acquis respectent la directive 2010/75/UE du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution).

Ce décret fait suite à la mise en demeure du 15 juillet 2022 de la Commission européenne, qui avait demandé à la France d’aligner sa législation nationale sur la directive relative aux émissions industrielles. Sur le fondement de cette directive, toutes les installations qu’elle vise doivent en effet fonctionner dans le cadre d’une autorisation et respecter les conditions qui y sont fixées. Or la Commission indiquait dans sa mise en demeure que « la législation française, en vertu du « droit d’antériorité », exempte, sous certaines conditions, certaines installations de l’exigence de disposer d’une autorisation ». Un délai de deux mois, dépassé donc, avait été accordé pour remédier à ce manquement.

Le décret modifie ainsi les articles R. 513-2 et R. 515-58 du Code de l’environnement afin de prendre en compte cette mise en demeure. Le préfet pourra notamment prescrire des modifications importantes touchant le gros-œuvre de l’installation ou des changements considérables dans son mode d’exploitation si ceux-ci sont nécessaires pour satisfaire aux exigences de la directive.

Cette modification règlementaire serait toutefois d’un caractère essentiellement formel, dès lors que, selon ce qui avait été indiqué par l’Etat lors de la consultation du public sur cet arrêté, « dans les faits, les installations IED disposent bien d’une autorisation, mais le Code de l’environnement ne le précise pas explicitement. Aussi et afin de répondre à cette mise en demeure et de mieux se conformer à la directive IED, la France s’est engagée auprès de la Commission européenne à modifier les articles R. 513-2 et R. 515-58 du Code de l’environnement ». Il avait ainsi été indiqué lors d’une réunion du conseil supérieur de la prévention des risques technologiques du 16 décembre 2022 sur le projet de décret que seules deux installations sur le territoire auraient été concernées. Un nombre plus important d’installations serait toutefois susceptible d’être concerné pour les ajustements sur le gros œuvre et les modes d’exploitation.

Eau : 53 propositions pour une gestion durable de l’eau

La mission d’information sur la gestion durable de l’eau a été constituée le 8 février 2023 au Sénat pour identifier les failles de la politique de l’eau et proposer des solutions. Le 11 juillet dernier, elle a rendu son rapport et a formulé 53 propositions pour faire face à l’urgence de la situation.

Les 53 propositions se découpent en sept titres chacun eux-mêmes divisés en plusieurs thématiques :

  • le renforcement de la gouvernance de l’eau, qui implique un certain nombre de mesures visant à consolider le rôle des commissions locales de l’eau (CLE) en les faisant notamment participer de manière plus prégnante à la planification (mise en place de SAGE simplifié, participation à l’élaboration des SCOT ou des SRADDET…) ;
  • l’amélioration des connaissances sur l’eau qui vise tant la connaissance de la qualité de l’eau que celle de la consommation qui en est faite par le renforcement de contrôles et le développement des outils adéquats ;
  • le développement des eaux usées traitées en délivrant des autorisations pérennes et en faisant participer l’ARS de même que les agences de l’eau en confortant leurs ressources financières consacrées à cofinancer les études et travaux de mise en œuvre de projets de réutilisation ;
  • l’exploitation des synergies entre eau et énergie notamment pas la rehausse des retenues existantes et la promotion des stations de transfert d’énergie par pompage ainsi que la pose de panneaux photovoltaïque sur les plans d’eau existants ;
  • sortir de l’impasse en matière de retenues à usages agricoles en favorisant notamment le portage public des projets par des collectivités ou des syndicats mixtes et dans une optique de multi-usages (soutien d’étiage, approvisionnement en eau potable, irrigation agricole, loisirs) et en conditionnant les retenues à des contrats d’engagements réciproques, portant notamment sur des changements de pratiques pour aller vers davantage de sobriété afin de préserver la ressource en eau sur les plans quantitatif et qualitatif, et mettre en place un suivi fin du fonctionnement des retenues et de leurs effets une fois bâties à travers une évaluation externe régulière ;
  • la garantie d’une haute performance des services d’eau potable et d’assainissement par la mise en place, d’une part, en matière d’eau potable, d’un schéma départemental d’interconnexion qui identifie les fragilités d’approvisionnement, de contraintes pour les maîtres d’ouvrage a connaître leur patrimoine ou encore d’une redevance dissuasive pour les réseaux les plus fuyards ; d’autre part, en matière d’assainissement, les mesures consistent notamment à encourager les aménagements favorisant l’infiltration d’eau de pluie et à regrouper les petites unités d’assainissement ;
  • la réforme du financement de l’eau en permettant notamment aux EPCI de s’adosser aux EPTB existants pour déléguer l’exercice de la GEMAPI et les ressources afférentes ou encore en fléchant une ressource nouvelle destinée à financer spécifiquement les actions des agences de l’eau en faveur de la biodiversité ou même en relançant la réflexion sur les modalités d’une solidarité financière interbassins. Sont également envisagées la mise en place de récompenses des services d’eau et d’assainissement performants ainsi que la mise en place d’une tarification progressive de l’eau ou encore le renforcement de l’application du principe du pollueur-payeur en augmentant les tarifs pour les rejets industriels et en instaurant une redevance pour les polluants aujourd’hui exonérés.

Refonte de la directive efficacité énergétique et parution d’un règlement relatif aux infrastructures pour carburants alternatifs : le verdissement du droit européen se poursuit

Règlement du Parlement et du conseil sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs et abrogeant la directive 2014/94/UE

L’adoption du paquet européen Fit for 55 se poursuit avec la publication durant l’été de deux textes significatifs relatifs à l’efficacité énergétique et aux infrastructures de carburant alternatif.

Pour rappel, le paquet « Ajustement à l’objectif 55 » est un ensemble de propositions visant à réviser et à actualiser le droit européen pour atteindre l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 55 % en 2030 que l’union européenne s’est fixée. Nous avions déjà eu l’occasion de commenter les textes relevant de ces propositions (notre article de juillet 2022 est consultable ici).

Si la majorité des quinze textes ayant vocation à être modifiés sont encore en cours de révision, certains ont déjà été adoptés par les organes de l’Union européenne. Ainsi, nous avons relevé pendant notre veille estivale deux textes qu’il convient de signaler :

  • La directive relative à l’efficacité énergétique ;
  • Le règlement sur le déploiement d’infrastructures pour carburants alternatifs

Sur la directive relative à l’efficacité énergétique

Le projet de réforme de la directive sur l’efficacité énergétique a été formellement adopté par le Parlement européen et le Conseil. Le nouveau texte devrait être publié prochainement au Journal officiel de l’Union européenne.

En premier lieu, face au constat que l’objectif d’amélioration de l’efficacité énergétique n’est pas atteignable selon les modalités actuelles, la directive fixe un objectif collectif de réduction de la consommation (article 4).

Cet objectif, contraignant, de réduction de la consommation d’énergie est fixé à 11,7 % en 2030 par rapport aux prévisions de consommation d’énergie pour 2030 établies en 2020. Les Etats membres devront ainsi fixer des contributions et trajectoires nationales indicatives pour atteindre l’objectif dans leurs plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat. La Commission assurera le suivi de l’atteinte de l’objectif.

En deuxième lieu, la directive prévoit un rehaussement des économies d’énergie devant être réalisées par les états membres du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2030 sur la base de la moyenne des trois dernières années précédant le 1er janvier 2019.

En d’autres termes, la directive organise une augmentation progressive des objectifs annuels d’économie d’énergie. L’objectif était jusqu’alors de 0.8 % par an, il augmentera désormais progressivement comme suit :

  • 8 du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2023
  • 3 du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2025
  • 5 du 1er janvier 2026 au 31 décembre 2027
  • 9 du 1er janvier 2028 au 31 décembre 2030

En troisième lieu, la directive consacre un chapitre spécifique à l’information et la sensibilisation des consommateurs. Là où un seul article abordait ce sujet, quatre y sont désormais consacrés (articles 21 à 24). L’article 24 vise plus spécifiquement les personnes en situation de précarité énergétique en imposant aux Etats membres de prendre : « les mesures appropriées pour autonomiser et protéger les personnes touchées par la précarité énergétique, les clients vulnérables, les ménages à faibles revenus et, le cas échéant, les personnes vivant dans des logements sociaux ».

Sur le règlement relatif au déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs

Le règlement sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs et abrogeant la directive 2014/94/UE a été adopté par le Conseil européen le 25 juillet 2023 en des termes identiques au texte adopté par le Parlement européen. Sa publication au Journal officiel de l’Union européenne devrait prochainement intervenir.

La refonte de la législation européenne relative au développement des infrastructures pour carburants alternatifs résulte du constat que le développement de ces infrastructures s’effectue de manière inégale entre les Etats membres. Face à ce constat, l’Union européenne a donc substitué à la directive 2014/94/UE un règlement introduisant des « objectifs nationaux contraignants menant au déploiement de suffisamment d’infrastructures pour carburants alternatifs dans l’Union » (article 1er du règlement).

L’essentiel du règlement est une refonte de la directive 2014/94/UE ainsi que des règlements délégués pris pour son application. Néanmoins, les objectifs chiffrés, qui étaient alors fixés par les Etats eux-mêmes sont désormais fixés par le règlement. On relèvera parmi ces objectifs :

  • Le déploiement de stations de recharge rapide d’au moins 150 kW pour voitures et camionnettes devront être installées tous les 60 km le long des principaux corridors de transport de l’UE, formant le « réseau transeuropéen de transport (RTE-T) », de stations de recharge pour véhicules utilitaires lourds d’une puissance minimale de 350 kW devront être déployées tous les 60 km le long du réseau central du RTE-T et tous les 100 km sur le réseau global plus vaste du RTE-T à partir de 2025 – article 3 ;
  • Le déploiement de stations de ravitaillement en hydrogène pour voitures et camions devra être réalisée à partir de 2030 dans tous les nœuds urbains et tous les 200 km le long du réseau central RTE-T– article 6 ;
  • La facilitation des paiements par les utilisateurs de véhicules électriques ou fonctionnant à l’hydrogène aux points de recharge ou de ravitaillement au moyen de cartes de paiement ou de dispositifs sans contact et sans avoir besoin d’un abonnement, en toute transparence au niveau des prix – article 5 et 7 ;
  • La fourniture par les exploitants de points de recharge ou de ravitaillement aux consommateurs, par voie électronique, des informations complètes sur la disponibilité, le temps d’attente ou les prix dans les différentes stations – article 5.

Veille hydroélectricité : arrêt remarqué de la Cour de cassation et arrêté relatif à la valorisation des recettes des concessions hydroélectriques

Cass. Civ., 3ème, 15 juin 2023, n° 21-22.816

Quelle est la nature juridique d’un bail emphytéotique organisant l’occupation d’un barrage hydroélectrique conclu entre une commune et un opérateur privé ? Par un arrêt remarqué en date du 15 juin 2023, la Cour de cassation a confirmé la position de la Cour d’appel d’Orléans en considérant que le bail emphytéotique en cause était un bail emphytéotique administratif.

Une centrale hydroélectrique a fait l’objet d’un bail emphytéotique entre une commune et une société. Cette société a été mise en demeure par le préfet de département de réaliser des travaux afin de respecter les dispositions du Code de l’environnement relatives aux débits minimaux des cours d’eau. Cette mise en demeure a été suivie d’un refus d’accorder une autorisation d’exploiter la centrale.

La société a alors assigné la commune en condamnation à réaliser les travaux de mise en conformité et en indemnisation devant la juridiction judiciaire. Mais la commune a opposé une exception d’incompétence au profit de la juridiction administrative. C’est de cette question de compétence qu’a été saisie la Cour de cassation.

Aux termes de l’article L. 1311-2 du Code général des collectivités territoriales : « un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l’objet d’un bail emphytéotique prévu à l’article L. 451-1 du Code rural et de la pêche maritime en vue de la réalisation d’une opération d’intérêt général relevant de sa compétence ».

L’article L. 1311-2 du CGCT a ouvert la faculté aux collectivité territoriale de conclure des baux emphytéotiques, prenant alors la qualification de bail emphytéotique administratif. La conclusion de ce type de contrat par les collectivités territoriales est, aux termes de l’article précité, conditionnée à la réunion de deux conditions : que l’opération à réaliser soit une opération d’intérêt général et que l’opération relève de la compétence de la collectivité.

La Cour de cassation a fait application de cet article pour déterminer si le contrat en cause était un bail emphytéotique administratif. Elle a répondu par l’affirmative en considérant que la mise à disposition, par l’effet d’un bail emphytéotique, d’une centrale hydroélectrique, en vue de la production et de la vente d’électricité à un fournisseur d’énergie, constitue une opération d’intérêt général au motif que l’opération :

  • favorise la diversification des sources d’énergie et participe au développement des énergies renouvelables ;
  • participe au développement des énergies renouvelables.

Le bail emphytéotique organisant la mise à disposition d’une centrale hydroélectrique par une commune à une société est donc un bail emphytéotique administratif. Sa contestation relève des juridictions de l’ordre administratif.

Arrêté du 3 août 2023 modifiant l’arrêté du 27 novembre 2015 relatif à la valorisation des recettes des concessions hydroélectriques mentionnées à l’article L. 523-2 du Code de l’énergie

Pour rappel, l’article L. 523-2 du Code de l’énergie met à la charge des concessionnaires de concession hydroélectrique une redevance proportionnelle aux recettes de la concession au profit de l’Etat[1].

Le calcul de cette redevance est organisé par l’article L. 523-2 précité, par les articles R. 523-1 et suivants du Code de l’énergie ainsi que par l’arrêté commenté. Le calcul repose sur plusieurs facteurs et notamment sur :

  • Les recettes de la concession résultant de la vente d’électricité, établies par la valorisation de la production aux prix constatés sur le marché ;
  • Le résultat normatif défini comme le total des recettes de la concession, diminuées de l’ensemble des charges et amortissements correspondant à l’exploitation de la concession.

L’arrêté en du 3 août 2023 ici commenté apporte des précisions sur ces facteurs en modifiant l’arrêté du 27 novembre 2015 relatif à la valorisation des recettes des concessions hydroélectriques mentionnées à l’article L. 523-2 du Code de l’énergie.

En premier lieu, l’arrêté commenté insère un nouvel article 1er dans l’arrêté du 27 novembre 2015 définissant les prix constatés sur le marché utilisés pour le calcul de la redevance proportionnelle. Ainsi, ces prix constatés sur le marché sont définis comme « les prix résultant des ventes d’électricité issues de l’exploitation de la concession ».

Le nouvel article 1er impose la production d’une attestation de conformité par un expert-comptable pour certifier les prix annoncés. Dans le cas où une attestation ne pourrait être produite, le calcul des prix sur le marché utilisés pour la valorisation de la production sont : « égaux aux moyennes pour la zone France des cotations à terme des années N-1 et N-2 par rapport à l’année sur laquelle est calculée la redevance et des prix spots horaires pour livraison le lendemain, constatés sur la bourse de l’électricité EPEX Spot SE de l’année sur laquelle est calculée la redevance » et pondérés en fonction du type de production utilisé selon un tableau inséré dans l’arrêté du 27 novembre 2015.

En deuxième lieu, aux termes de l’article R. 523-5 précité : « l’assiette de la redevance mentionnée à l’article L. 523-3 est le résultat normatif de la concession diminué de l’impôt sur les sociétés calculé sur ce résultat. Le résultat normatif est défini comme le total des recettes de la concession déterminées conformément au premier alinéa de l’article L. 523-2, diminuées de l’ensemble des charges et amortissements correspondant à l’exploitation de la concession ».

L’article 5 de l’arrêté commenté apporte des précisions sur les charges et amortissements mentionnées à l’article R. 523-5 du Code de l’énergie en fixant une liste d’éléments. Sont ainsi compris dans les charges et amortissements :

  • les achats et les charges d’entretien et de maintenance ;
  • les impôts, redevances, taxes et versements assimilés ;
  • les charges de personnels ;
  • les autres charges d’exploitation dont les coûts d’accès aux réseaux et les charges de structure et frais de siège ;
  • les dotations aux amortissements ;
  • la participation des salariés.

 

[1] L’article L. 523-2 du Code de l’énergie dispose : « Pour toute nouvelle concession hydroélectrique, y compris lors d’un renouvellement, il est institué, à la charge du concessionnaire, au profit de l’Etat, une redevance proportionnelle aux recettes de la concession. Les recettes résultant de la vente d’électricité sont établies par la valorisation de la production aux prix constatés sur le marché, diminuée, le cas échéant, des achats d’électricité liés aux pompages. Les autres recettes sont déterminées selon des modalités définies par arrêté du ministre chargé de l’énergie ».

Actualisation des dispositions réglementaires encadrant le soutien public à la production de biogaz

Décret n° 2023-810 du 21 août 2023 relatif aux sanctions applicables aux installations de production de biogaz

Deux décrets sont venus modifier les dispositions de la partie réglementaire du Code de l’énergie relatives aux soutiens publics à la production de biogaz.

Le premier étend la liste des technologies éligibles aux soutiens publics et assouplit les règles de suspension du délai de prise d’effet du contrat. Le second définit la procédure de sanction pouvant être mise en œuvre par le préfet à l’encontre d’un producteur bénéficiant d’un dispositif de soutien en cas de manquement, fraude ou non-conformité.

Sur le décret n° 2023-809 du 21 août 2023 portant diverses dispositions relatives à la vente de biogaz injecté dans le réseau de gaz naturel

Aux termes de l’article 1 du décret n° 2023-810 du 21 août 2023, l’article R. 446-12-2 du Code de l’énergie a été modifié. Cet article précise la liste des installations de production de biogaz éligibles aux soutiens publics tels que l’obligation d’achat ou le complément de rémunération.

Seules les installations de production de biométhane en installation de stockage de déchets non dangereux à partir de déchets ménagers et assimilés ou par « méthanisation en digesteur » étaient concernées par l’ancienne version de l’article précité. Sont désormais éligibles aux soutiens publics, outre les installations de stockage de déchets en digesteur, les installations de production de biogaz à partir de méthanation, de méthanisation, de gazéification ou de pyrolyse de produits ou déchets non dangereux.

L’article 1er modifie également les dispositions relatives au délai de réponse des candidats aux appels d’offres et à la période de suspension de la prise d’effet du contrat en cas de recours. Ainsi, dans une logique d’accélération, le délai dont dispose les candidats aux appels d’offre du ministre en charge de l’énergie pour répondre auxdits appel d’offres est réduit de six mois à 35 jours. Par ailleurs, le délai pendant lequel la prise d’effet du contrat peut être suspendue en cas de recours est allongé.

Sur le décret n° 2023-810 du 21 août 2023 relatif aux sanctions applicables aux installations de production de biogaz

Le décret n° 2023-810 en date du 21 août 2023 est pris en application de l’article L. 446-56 du Code de l’énergie.

Cet article, codifié par la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de de simplification de l’action publique locale, organise le pouvoir de sanction de l’autorité administrative à l’encontre des producteurs de biométhane bénéficiant d’un dispositif de soutien en cas de manquement.

Le décret n° 2023-810 met la partie réglementaire du Code de l’énergie en cohérence avec l’article L. 446-56 en modifiant certains articles (R. 121-31-2 et R. 446-46-3) et en en insérant de nouveaux.

En premier lieu, aux termes du nouvel article R. 456-16-6-1, une procédure de sanction spécifique pour les fraudes commises par les bénéficiaires des dispositifs de soutien est mise en place.

Le nouvel article R. 456-16-6-1 prévoit de confier la procédure au préfet de région. En cas de fraude constatée, le préfet de région peut engager la procédure de sanction en accordant un délai d’un mois minimum au producteur mis en cause pour présenter ses observations. A l’issue de ce délai, le nouvel article R. 456-16-6-1 prévoit que le préfet peut soit abandonner la procédure, soit la poursuivre en enjoignant le cocontractant de résilier le contrat relatif au dispositif de soutien.

En second lieu, le nouvel article R. 456-16-6-2 du Code de l’énergie détaille les modalités du remboursement des aides perçues par l’exploitant en cas de résiliation du contrat d’achat prononcée par le préfet.

Ce remboursement est prévu par l’article L. 446-56 précité, ses modalités d’application sont désormais connues. Aux termes du nouvel article R. 456-16-6-2, le remboursement porte sur les sommes actualisées perçues au titre du contrat de soutien, dans la limite des surcoûts résultant de l’obligation d’achat de biogaz mentionnés aux 3° ou 4° de l’article L. 121-36 du Code de l’énergie.

En outre, seules les sommes versées à compter de l’entrée en vigueur du décret commenté, soit à compter du 24 août 2023, seront exigibles et le montant du remboursement devra être apprécie « en fonction de la gravité de la fraude, du manquement ou de la non-conformité et de la situation du producteur ».

Comités de projet institués par la loi APER : mise en consultation du projet de décret

Parmi les textes d’application de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (ci-après, APER) qui sont attendus prochainement, le Gouvernement a mis en consultation un projet de décret sur les comités de projet pris en application de l’article L.211-9 du Code de l’énergie tel qu’issu de la loi APER.

Pour mémoire, l’article L. 211-9 du Code de l’énergie consacre l’obligation pour les porteurs de projets d’énergie renouvelable dont la demande d’autorisation est déposée à compter du 10 septembre 2023 et situés en dehors des zones d’accélération pour l’implantation d’installations terrestres de production d’énergies renouvelables de constituer à leurs frais de tels comités de projets.

Aux termes de ce même article, le comité de projet inclut « les différentes parties prenantes concernées par le projet, notamment les communes et les établissements publics de coopération intercommunale dont elles sont membres, ainsi que les représentants des communes limitrophes ».

Les modalités d’application du présent article, et notamment le seuil de puissance à partir duquel les projets emportent application de cette obligation, restent encore à fixer par décret en Conseil d’Etat. C’est l’objet du projet de décret soumis à consultation.

Le projet de décret prévoit donc les seuils à partir desquels les installations sont concernées par l’obligation de créer un comité de projet (nouvel article R. 212-2 du Code de l’énergie).

Sont notamment visées les installations terrestres de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent, regroupant un ou plusieurs aérogénérateurs, soumises à autorisation au titre de la réglementation des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE), les installations solaires photovoltaïques et thermiques d’une puissance supérieure à 3.5 MWc ou encore les installations de méthanisation soumises à autorisation au titre de certaines rubriques de la nomenclature des ICPE.

La composition du comité de projet proposée est la suivante :

  • un représentant ou plusieurs représentants de la ou des commune(s) d’implantation du projet d’énergie renouvelable ;
  • un représentant de chaque établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre sur lequel est implanté le projet d’énergie renouvelable ;
  • lorsque l’installation relève de l’article L. 511-1 du Code de l’environnement (ICPE), d’un représentant des communes dont une partie du territoire est située à une distance, prise à partir du périmètre de l’installation, inférieure au rayon d’affichage fixé dans la nomenclature, annexée à l’article R. 511-9 du Code de l’environnement, des installations classées pour la rubrique dont l’installation relève ;
  • lorsque l’installation ne relève pas de l’article L. 511-1 du Code de l’environnement (ICPE), d’un représentant de chaque commune limitrophe de la ou des commune(s) d’installation du projet
  • d’un représentant pour chaque porteur de projet.

 A la demande des collectivités membres du comité de projet et du porteur de projet, peuvent également être invités à participer au comité de projet le référent préfectoral à l’instruction des projets d’énergies renouvelables et des projets industriels nécessaires à la transition énergétique nommé en application de l’article L. 181-28-10 du Code de l’environnement , un représentant des gestionnaires de réseaux publics de distribution concernés, un représentant des gestionnaires de réseaux publics de transport d’énergie concernés.

Le projet de décret précise en outre que le comité de projet est réuni au moins à deux reprises en amont du dépôt du dossier du projet. :

  • une première réunion est réalisée avant tout engagement du porteur de projet dans des procédures administratives. Le projet de décret liste en outre les documents devant être soumis au comité de projet lors de cette première réunion.
  • si le porteur de projet souhaite poursuivre son projet, une deuxième réunion pour répondre aux recommandations et points de vigilance formulés par le comité de projet à l’occasion ou après la première réunion.

Le projet de décret fixe des délais minimum de convocation ainsi que des règles relatives aux membres dont la présence est obligatoire pour que le comité se réunisse valablement.

La consultation sur le projet de décret est ouverte jusqu’au 17 septembre prochain.

Actualité estivale autour des TRVE

Les Tarifs Réglementés de Vente d’Electricité (ci-après, TRVE) ont donné lieu à différents actes et décisions au cours de l’été.

D’abord, quatre arrêtés du 28 juillet 2023 ont fixé les TRVE applicables à compter du 1er août 2023 respectivement aux consommateurs résidentiels et non résidentiels en France Métropolitaine, aux tarifs jaunes et verts applicables aux consommateurs en France Métropolitaine, et dans les zones non interconnectées du réseau métropolitain continental.

Dans les quatre arrêtés, il est précisé que les Ministres ne suivent pas les propositions formulées par la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE) lesquelles auraient pour conséquence que les nouveaux tarifs excèdent de plus de 15 % ceux applicables au 31 décembre 2022. La hausse résultant des quatre arrêtés du 27 juillet 2023 se situe autour de 10 %.

Comme la CRE le souligne sur son site internet, au 1er août 2023, en application des dispositifs de gel des tarifs décidés par le Gouvernement dans le contexte de hausse massive des prix de l’énergie les TRVE théoriques que la CRE continue de calculer conformément à ses obligations légales et réglementaires se situent désormais 74,5 % TTC au-dessus des tarifs gelés actuellement en vigueur au terme des arrêtés susmentionnés.

Ensuite, en conséquence des quatre arrêtés précités, un arrêté du 28 juillet 2023 fixe le tarif de cession applicable aux Entreprises Locales de Distribution (ci-après, ELD) à compter du 1er août 2023. Les tarifs de cession permettent en effet aux ELD de s’approvisionner en électricité pour la fourniture de leurs clients aux TRVE et, pour celles desservant moins de 100 000 clients, pour la fourniture de leurs pertes réseau. Ces tarifs sont donc intimement liés au niveau des TRVE.

Enfin, par une décision en date du 26 juillet 2023 (CE, 26 juillet 2023, Sté EkWateur, n° 462612), le Conseil d’Etat a censuré les TRVE applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale en vertu de l’arrêté du 28 janvier 2022 des Ministres de l’Economie et de l’Energie dont la société EkWateur demandait l’annulation, mais neutralisé l’effet rétroactif qui s’attache normalement aux annulations contentieuses.

Le Conseil d’Etat fait droit à cette demande, d’une part, en retenant l’incompétence du pouvoir réglementaire, le législateur n’ayant habilité les Ministres chargés de l’économie et de l’énergie à fixer des tarifs de vente de l’électricité inférieurs à ceux proposés par la CRE que pour ce qui concerne les tarifs réglementés dits « bleus » applicables aux consommateurs résidentiels, et non pas pour les consommateurs non résidentiels et d’autre part ; en considérant qu’en  fixant lesdits tarifs à un niveau significativement inférieur à celui résultant de la proposition tarifaire de la CRE, « ne permettant pas d’assurer une concurrence tarifaire effective sur le marché de la fourniture d’électricité, l’arrêté en litige ne respecte pas, […] les conditions prévues à l’article 5 de la directive du 5 juin 2019 et mentionnées au point 9 auxquelles est subordonnée toute intervention publique dans la fixation des prix pour la fourniture d’électricité ».

Pour autant, en dépit de cette censure, l’annulation prononcée n’est pas assortie de l’effet rétroactif compte tenu des répercutions financières qu’une telle annulation aurait emporté sur les clients non résidentiels pour la période comprise entre l’entrée en vigueur de l’arrêté et la décision du Conseil d’Etat et compte tenu de l’incertitude s’attachant aux conséquences d’une telle annulation concernant les restitutions financières devant intervenir entre EDF et les fournisseurs alternatifs.

Faisant en effet application de son pouvoir de modulation des effets de ses annulations contentieuses, le Conseil d’Etat estime « qu’eu égard, d’une part, à l’importante charge financière qu’engendrerait l’annulation rétroactive prononcée par la présente décision, sur les consommateurs non résidentiels de France métropolitaine soumis aux tarifs réglementés ou qui étaient titulaires d’un contrat de fourniture dont le prix était déterminé par référence à ces mêmes tarifs, et d’autre part, aux incertitudes sur les conséquences en chaîne que provoquerait cette annulation, notamment au regard des éventuelles restitutions financières dues par  » Electricité de France  » et les fournisseurs alternatifs pour l’année 2023  qu’il y a lieu de prévoir, à titre exceptionnel, que les effets produits par l’arrêté attaqué sont, sous réserve des actions contentieuses déjà engagées à la date de la présente décision, regardés comme définitifs ».

Les effets de cette annulation sont donc neutralisés.

Contrats d’achat direct d’électricité : précisions du Ministère et enquête de la Commission de Régulation de l’Énergie

La notion de contrat d’achat direct d’électricité entre un producteur et un consommateur (également usuellement dénommé « PPA » pour « Power Purchase Agreement ») a été récemment introduite en droit interne par la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (ci-après, APER).

Si cette nouvelle catégorie de contrats est désormais consacrée par le Code de l’énergie (art. L. 333-1 et L. 331-5), un texte réglementaire d’application, annoncé pour septembre 2023, est encore attendu afin de préciser en particulier « le contenu du dossier de demande d’autorisation et […] les obligations en matière d’information des consommateurs d’électricité » pesant sur les producteurs (art. L. 333-1 III du Code de l’énergie).

En effet, aux termes de l’article L. 333-1 I du Code de l’énergie issu de la loi APER les producteurs concluant ce type de contrats doivent être titulaires d’une autorisation ministérielle, similaire à celle dont bénéficient les fournisseurs, sauf à « désigner un producteur ou un fournisseur tiers, déjà titulaire d’une telle autorisation, afin qu’il assume, par délégation, à l’égard des consommateurs finals, les obligations incombant aux fournisseurs d’électricité ».

Dans l’attente du texte réglementaire, le Ministère de la Transition Ecologique vient de publier sur son site internet une notice explicative et un modèle de convention de délégation auprès d’un titulaire de l’autorisation.

Le Ministère explique que « cette notice vise à aider les pétitionnaires à préparer leur dossier de demande d’autorisation en tant que producteurs d’électricité concluant un contrat de vente directe d’électricité à des consommateurs finals ou à des gestionnaires de réseaux pour leurs perte ». Ladite notice prend la forme d’un tableau listant les rubriques constitutives du dossier de demande d’autorisation et les pièces attendues au titre de chacune desdites rubriques.

S’agissant de la délégation, le Ministère précise qu’elle « peut notamment se matérialiser par la conclusion d’un contrat de délégation parfaite entre le producteur [vendeur] et le fournisseur d’électricité de l’acheteur ou entre le producteur (vendeur) et une société le contrôlant, si celle-ci est titulaire d’une autorisation ».  Le Ministère ajoute que « ce contrat prévoit la prise en charge par le délégué de toutes les obligations qui incombent aux titulaires d’une autorisation d’achat pour revente » et qu’il « mentionne l’arrêté d’autorisation du délégué ».

Il est également précisé par le Ministère que le contrat de délégation doit être joint au contrat de vente directe d’électricité conclu entre le producteur (vendeur) et le consommateur d’électricité (acheteur), obligation non prévue par le Code de l’énergie en l’état.

Un modèle de convention de délégation parfaite entre l’acheteur d’électricité, le producteur non titulaire de l’autorisation ministérielle et le fournisseur qui en dispose est proposé par le Ministère.

Toujours au titre de l’élaboration progressive du cadre juridique applicable aux contrats d’achat direct d’électricité, la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE) a initié une enquête en mettant en ligne des questionnaires destinés aux producteurs, consommateurs et fournisseurs signataires de ce type de contrat afin de rassembler des informations sur ces contrats. Ces questionnaires concernent les contrats d’une durée minimale de dix ans portant sur des actifs de production d’électricité renouvelable situés en France métropolitaine continentale.

Les producteurs, consommateurs et fournisseurs ont jusqu’au 16 octobre prochain pour faire parvenir leurs réponses à la CRE.

Les objectifs affichés par le régulateur consistent notamment à « concourir au bon fonctionnement des PPA […] grâce à une meilleure compréhension des modalités contractuelles » ; « aider au bon dimensionnement des dispositifs de soutien, sur lesquels la CRE dispose d’une compétence d’avis » ou encore « améliorer le suivi par la CRE du développement des installations de production d’électricité renouvelable en France quel que soit leur mode de valorisation, ainsi que de l’évolution du coût des installations de production d’électricité renouvelable ».

Raccordement aux réseaux d’électricité : une recodification éclairante qui laisse subsister des zones d’ombres

La loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables avait habilité le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de modifier les dispositions législatives du Code de l’énergie relatives au raccordement aux réseaux d’électricité.

Aux termes de l’article 26 de la loi précitée, le gouvernement a été habilité pour :

  • supprimer les incohérences rédactionnelles ;
  • améliorer la lisibilité des dispositions relatives à l’accès et au raccordement aux réseaux publics d’électricité ;
  • clarifier les modalités de prise en charge des coûts de raccordement au réseau par les redevables de la contribution au titre du raccordement ou par le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité, sans modifier la répartition actuelle de ces prises en charge ni aggraver leur niveau ;
  • adapter, pour les zones non interconnectées à la France métropolitaine continentale, les procédures d’élaboration et d’évolution des schémas de raccordement au réseau des énergies renouvelables ;
  • modifier, le cas échéant, pour les zones non interconnectées à la France métropolitaine continentale, la définition du périmètre de mutualisation ;
  • prévoir les conditions dans lesquelles les conventions de raccordement peuvent permettre une évolution de la puissance de raccordement par rapport à la puissance effectivement mise à disposition par le gestionnaire des réseaux publics d’électricité.

Ainsi, par une ordonnance n° 2023-816 en date du 23 août 2023, le Gouvernement a mis en œuvre son habilitation et procédé à une refonte de plusieurs parties du Code de l’énergie.

Après avoir abordé successivement les modifications apportées aux dispositions relatives aux raccordements (I.), aux ZNI (II.) et à la modification des conventions de raccordement (III.), le présent focus présentera les limites juridiques liées à l’application de l’ordonnance qui mériteraient d’être clarifiées à l’occasion d’un nouveau texte (IV.).

 

I. Sur la recodification du chapitre relatif au raccordement

Le Gouvernement était habilité pour clarifier les modalités de prise en charge des coûts de raccordement aux réseaux. Pour ce faire, il a procédé à une refonte du chapitre 2 du titre IV de la partie III du Code de l’énergie, chapitre relatif au raccordement aux réseaux.

Si les dispositions étaient organisées de manière anarchique entre le chapitre précité et d’autres dispositions du Code de l’énergie, force est de constater que le Gouvernement est parvenu à mettre de l’ordre en réorganisant le chapitre 2, qui obéit désormais à un plan détaillé abordant successivement : les ouvrages de raccordement (Section 1), l’exécution des travaux et la maitrise d’ouvrage (Section 2), les délais de raccordement et l’indemnisation des retards des dysfonctionnements (Section 3), le financement (Section 4) et les règles générales applicables aux conventions de raccordement (Section 5).

Quelques modifications au sein de ce chapitre revisité méritent d’être étudiées.

En premier lieu, le Gouvernement a consacré un paragraphe aux schémas régionaux de raccordement aux réseaux des énergies renouvelables (ci-après S3RENR). Ainsi, les dispositions relatives à ces schémas ne sont plus présentées dans la partie du Code relative aux missions du gestionnaire du réseau de transport mais dans une partie dédiée.

Pour rappel, ce schéma est chargé de :

  • définir les ouvrages à créer ou renforcer ;
  • assurer la pertinence technique et économique des investissements à réaliser par les gestionnaires de réseau ;
  • définir un périmètre de mutualisation des postes du réseau public ;
  • évaluer le coût prévisionnel de l’établissement des capacités d’accueil nouvelles nécessaires.

En outre, le S3RENR fixe une quote-part unitaire dont doivent s’acquitter les exploitants des nouvelles installations de production d’énergie renouvelable raccordées au réseau. L’objet de cette quote-part est de mutualiser les coûts d’adaptation et de modification du réseau public.

Les modifications apportées par l’ordonnance sont résiduelles, le Gouvernement ayant en effet largement reproduit les dispositions préexistantes. Par ailleurs, les dispositions nouvelles, qui ont vocation à avoir force législative après ratification de l’ordonnance, s’efforcent de ne pas contrevenir aux dispositions réglementaires en vigueur.

Enfin, ainsi que le laissait entrevoir l’étude d’impact de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023, la partie réglementaire du Code de l’énergie aura également vocation à être modifiée. Des précisions sont ainsi attendues notamment s’agissant de périodicité de la mise à jour du schéma et de son délai d’élaboration.

En deuxième lieu, le Gouvernement a procédé à une clarification des dispositions relatives au financement du coût des raccordements (nouveaux articles L. 342-11 à L. 342-21). Si la répartition n’est pas bouleversée, les nouvelles dispositions font œuvre de clarté.

Le coût du raccordement au réseau public de distribution est ainsi réparti comme suit, s’agissant de la part extension du raccordement, la part branchement du raccordement restant inchangée :

  • Une partie du coût de l’extension est couverte par le TURPE (nouvel article L. 342-11) ; cette partie est en principe de 40 % du coût mais par exception elle peut être de :
    • 60 % lorsque le raccordement concerne une installation de production d’électricité d’origine renouvelable raccordée au réseau public de distribution et ayant une puissance inférieure à 500 kW ;
    • 100 % lorsque le raccordement consiste en un renforcement du réseau de distribution et est un raccordement en basse tension de consommateurs finals effectué par le gestionnaire du réseau de distribution;
    • 80 % lorsque les travaux de renforcement sont rendus nécessaires par les évolutions des besoins de consommateurs raccordés en basse tension pour des puissances inférieures ou égales à 36 kilovoltampères et qu’ils concourent à l’atteinte des objectifs de la politique énergétique.

Il y a là d’utiles précisions sur la prise en charge de la part renforcement du raccordement, quoique la dernière précision ci-dessus nous semble prêter à interprétation.

  • L’autre partie du coût fait l’objet d’une contribution due par le demandeur du raccordement, dans les conditions déterminées au nouvel article L. 342-21, reprenant in extenso les dispositions de l’ancien article L. 342-11 mais ajoutant un nouveau membre de phrase aux termes duquel « le demandeur d’un raccordement aux réseaux publics de distribution d’électricité est le redevable de la contribution», confirmant de fait la suppression de la part de la contribution due par les collectivités en charge de l’urbanisme (ci-après, CCU).

Il convient enfin de souligner l’apparition d’une nouvelle disposition, codifiée au nouvel article L. 342-14, qui concerne le raccordement des producteurs d’électricité renouvelable. Aux termes de cet article :

« Lorsque des ouvrages, autres que les ouvrages propres, sont nécessaires au raccordement de l’installation et qu’ils ne sont pas prévus par le schéma régional de raccordement en vigueur, le producteur est redevable d’une contribution portant sur ses ouvrages propres et sur l’intégralité des ouvrages créés et renforcés pour ce raccordement, sans qu’aucun des éléments constitutifs de ce raccordement, y compris les renforcements, puisse bénéficier de la prise en charge prévue au 3° de l’article L. 341-2 et à l’article L. 342-11.

La contribution due par le producteur ne peut être inférieure à un seuil défini par un décret, pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie ».

 

II. Sur les dispositions relatives aux ZNI

Aux termes des points 4 et 5 de l’article 26 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023, le Gouvernement devait adapter aux zones non interconnectées au réseau métropolitain continental (ci-après, ZNI) les procédures d’élaboration et d’évolution des schémas de raccordement au réseau des énergies renouvelables ainsi que modifier la définition du périmètre de mutualisation.

Ces sujets ont été traités par l’article 4 de l’ordonnance qui a modifié le chapitre 1 du titre VI de la partie III du Code de l’énergie, relatif aux dispositions applicables aux départements et régions d’outre-mer.

A titre liminaire, il convient de souligner que la Corse, qui faisait l’objet d’une disposition spécifique (le dernier alinéa de l’article L. 322-8), est désormais régie par les mêmes dispositions que les territoires d’outre-mer.

Le chapitre se décompose désormais en trois articles.

En premier lieu, l’article L. 361-1, seul préexistant à l’ordonnance, et relatif aux S3ENR des ZNI, a été partiellement modifié, dans la continuité des modifications apportées aux S3ENR métropolitains.

Ainsi, le schéma de raccordement au réseau des énergies renouvelables des ZNI devra :

  • définir les ouvrages à créer ou renforcer ;
  • assurer la pertinence technique et économique des investissements à réaliser par les gestionnaires de réseau ;
  • définir un périmètre de mutualisation des postes du réseau public ;
  • evaluer le coût prévisionnel de l’établissement des capacités d’accueil nouvelles nécessaires.

Conformément à l’habilitation législative, le Gouvernement a procédé à une légère adaptation des S3RENR aux ZNI. Ainsi, les distinguos entre réseau public de transport et réseau public de distribution sont remplacés par une distinction entre ligne à plus de 50 kV et autres lignes.

De surcroît, le schéma de raccordement au réseau des énergies renouvelables est pensé pour s’intégrer aux documents de planification locaux en matière d’énergie, et notamment à la programmation pluriannuelle de l’énergie prévue par l’article L. 141-5 du Code de l’énergie. Ainsi, aux termes du quatrième alinéa de l’article L. 361-1 : « l’élaboration, la modification ou la révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie peut entraîner la modification ou la révision du schéma ».

En deuxième lieu, l’article L. 361-2 du Code de l’énergie est une nouveauté. S’il prévoit que « le périmètre de mutualisation du schéma peut être étendu, dans des conditions fixées par voie réglementaire, à des ouvrages du réseau public de distribution exploités à une tension supérieure ou égale à 15 kV », cette formulation ne donne pas grande indication sur l’objectif du Gouvernement.

Le rapport au Président de la République est toutefois éclairant. En effet, ce rapport dispose au sujet du nouvel article L. 361-2 : « l‘ordonnance prévoit par ailleurs un élargissement ciblé du périmètre de mutualisation des ouvrages du réseau à certains ouvrages exploités en haute tension de niveau A (HTA), en réponse à des difficultés identifiées sur certains départements et régions d’outre-mer caractérisés par exemple par une double insularité ».

L’article L. 361-2 prévoit donc que le périmètre de mutualisation peut être étendu à des ouvrages du réseau public de distribution exploités à une tension supérieure ou égale à 15 kV.

En troisième et dernier lieu, le nouvel article L. 361-3 est une reprise in extenso des alinéas 3, 4 et 5 de l’article L. 361-1 dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance.

 

III. Sur les dispositions relatives à l’évolution de la puissance de raccordement

Aux termes du point 6 de l’article 26 de la loi n° 2023-175 en date du 10 mars, le Gouvernement était habilité afin de :

« Prévoir les conditions dans lesquelles les conventions de raccordement mentionnées aux articles L. 342-4 et L. 342-9 du même Code peuvent permettre une évolution par rapport à la puissance de raccordement par rapport à la puissance effectivement mise à disposition par le gestionnaire des réseaux publics d’électricité, à des fins de dimensionnement optimal du réseau sur les plans technique et économique ».

Cette possibilité d’évolution de la puissance de raccordement mentionnée dans les conventions de raccordement est prévue par le nouvel article L. 342-24. Cet article dispose :

« Les conventions ou protocoles de raccordement mentionnés aux articles L. 342-22 et L. 342-23 conclus postérieurement au 10 novembre 2023 ou en cours d’exécution à cette date précisent, dans des conditions déterminées par la Commission de régulation de l’énergie, les modalités selon lesquelles la puissance de raccordement peut être modifiée par le gestionnaire de réseau, lorsque la puissance maximale soutirée par l’utilisateur concerné est inférieure à la puissance de raccordement en soutirage prévue par cette convention ou ce protocole, à des fins de dimensionnement optimal du réseau.

La Commission de régulation de l’énergie détermine les modalités d’évolution de la puissance de raccordement et les éventuelles indemnités auxquelles un client peut prétendre, en cas de modification de sa puissance de raccordement.

Un arrêté du ministre chargé de l’énergie, pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie, précise les catégories d’installations soumises aux dispositions du présent article, en fonction de leurs caractéristiques ».

En premier lieu, l’évolution de puissance envisagée se traduit par une possible diminution de puissance de raccordement pour les installations raccordées en soutirage dont la puissance prévue par la convention n’est pas atteinte en pratique.

En deuxième lieu, cette possibilité d’évolution de la puissance de raccordement concernant aussi bien les conventions conclues à partir du 10 novembre 2023 (date d’entrée en vigueur de l’ordonnance) que les conventions en cours d’exécution, le nouvel article L. 342-24 du Code de l’énergie impose donc aux gestionnaires de réseau de transport et de distribution de modifier leurs modèles de convention de raccordement en soutirage ainsi que les conventions en cours d’application.

En troisième et dernier lieu, les modalités selon lesquelles la puissance de raccordement pourra être modifiée par les gestionnaires de réseau seront précisées par la Commission de régulation de l’énergie.

Cette analyse résulte du rapport au président de la République qui indique :

« Dans l’objectif d’accélérer les raccordements tout en veillant à un dimensionnement optimal du réseau sur les plans technique et économique, les conditions dans lesquelles la part de puissance de raccordement non utilisée par l’installation concernée pourra être récupérée par le gestionnaire de réseau sont précisées. Ces dispositions s’appliqueront également aux contrats déjà signés ».

 

IV. Sur les difficultés juridiques relatives à la suppression de la contribution des CCU liées à l’entrée en vigueur de l’ordonnance

La suppression de la contribution due par les CCU était envisagée dès le projet de loi d’accélération des énergies renouvelables présenté par le gouvernement mais sa mise en œuvre renvoyée à l’ordonnance attendue du Gouvernement. Les sénateurs avaient toutefois entendu « inscrire dans le dur » le principe de cette suppression et habiliter le Gouvernement pour les détails. Toutefois, en l’état des textes, une part de la contribution ne sera due par personne pendant deux mois.

D’une part, la suppression de la contribution des CCU entre en vigueur le 10 septembre 2023. D’autre part, le nouvel article L. 342-21 du Code de l’énergie, introduit par l’ordonnance, et prévoyant que le demandeur du raccordement est redevable de la contribution, dans son intégralité (voir supra), entre en vigueur le 10 novembre 2023.

Quid de la période du 10 septembre au 10 novembre ? La part de la contribution due par les CCU ne sera plus, la prise en charge de l’intégralité de la contribution par le demandeur ne sera pas encore.

Et on ne pourrait affirmer que la part des CCU sera transférée au demandeur du raccordement. Car si l’article L. 342-11 a bien été modifié, l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme demeure. Et cet article limite la contribution du demandeur du raccordement « à la fraction de l’extension du réseau située sur le terrain d’assiette de l’opération ». La contribution des CCU concerne l’extension située en dehors du terrain d’assiette, qui ne peut donc, en l’état, être affectée au demandeur du raccordement.

Au-delà de la limite temporelle, l’absence de modification de l’article L. 332-15 pose des difficultés juridiques.

Une ordonnance n’a force de loi que lorsqu’elle est ratifiée, ou qu’un projet de loi de ratification a été déposé dans le délai d’habilitation initialement fixé et que celui-ci est échu (Conseil constitutionnel, 28 mai 2020, n° 2020-843 QPC). Tant que l’un de ces évènements n’est pas intervenu, l’ordonnance conserve un caractère réglementaire.

Or, au cas présent, ainsi qu’il a été vu, le nouvel article L. 341-21 du Code de l’énergie est en contradiction avec l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme. Le premier article met à la charge du demandeur l’intégralité de la contribution quand le second lui impose seulement de prendre en charge une part de cette contribution. Quelle est la norme à appliquer ? Tout dépend de l’intervention ou non de la loi de ratification de l’ordonnance avant la date limite.

Si l’ordonnance est ratifiée ou que la loi de ratification est publiée avant l’échéance de l’habilitation législative, alors les dispositions de l’ordonnance auront force de loi. Il conviendra dès lors de faire application de la loi nouvelle, soit de l’article L. 341-21 du Code de l’énergie, et d’imputer au demandeur du raccordement l’intégralité de la contribution due pour l’extension du réseau de distribution d’électricité.

A cette heure, cette première option n’est pas.

Et si l’ordonnance n’est pas ratifiée ou qu’un projet de loi de ratification n’est pas déposé dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance, soit le 24 novembre, aux termes du dernier alinéa de l’article 26 de la loi du 10 mars 2023 précitée, alors l’ordonnance conservera un caractère réglementaire.

Juridiquement, l’article L. 342-21 du Code de l’énergie aura donc la valeur d’un règlement et ne pourra contrevenir à une norme de valeur législative. Dès lors, il conviendra de faire application de l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme, au détriment de l’article L. 342-21 du Code de l’énergie.

On peut vraisemblablement penser que l’ordonnance ne sera pas ratifiée mais qu’un projet de loi de ratification sera déposé. Dès lors, l’article L. 342-21 du Code de l’énergie n’aura une force législative qu’à partir du 24 novembre 2023. La période pendant laquelle la contribution des CCU sera supprimée mais non remplacée s’étendra alors, dans ce cas de figure, du 10 septembre 2023 au 24 novembre 2023.

De tout cela on retiendra qu’il y a urgence à modifier l’entrée en vigueur de l’ordonnance ici commentée et à déposer le projet de loi de ratification de ladite ordonnance, une affaire on l’espère entre les mains du Gouvernement. Et à profiter d’une prochaine loi pour lever la contradiction entre le Code de l’urbanisme et le Code de l’énergie.

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Mise en danger de la vie d’autrui : l’assemblée plénière définit la notion d’ « obligation particulière de prudence ou de sécurité »

Le délit de mise en danger de la vie d’autrui, prévu par l’article 223-1 du Code pénal, réprime « le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente » par la commission d’une faute définie comme « la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ».

C’est cette notion d’obligation particulière de prudence ou de sécurité que la Cour de cassation, réunie en Assemblée plénière, est venue préciser dans un arrêt en date du 20 janvier 2023, s’agissant de la mise en examen de l’ancienne ministre de la Santé du chef du délit de mise en danger de la vie d’autrui, au titre de son action dans le cadre de la pandémie de Covid 19.

Cette décision est importante, par les faits et les parties concernées bien sûr, mais aussi par sa portée en droit qui, au-delà du seul délit de mise en danger, a vocation à s’étendre à l’ensemble des infractions d’atteinte involontaire à l’intégrité physique.

Rappelons en effet que les délits homicides et blessures involontaires, lorsqu’ils sont reprochés à une personne physique ayant indirectement contribué au dommage – i.e. qui n’ont pas causé le décès ou les blessures de manière directe et immédiate – requièrent une faute identique (article 121-3 du Code pénal) qui constitue en outre un cas d’aggravation de l’infraction (article 221-6 al. 2 du Code pénal).

Dans cette affaire, l’un des moyens à l’appui du pourvoi présenté devant la Cour de cassation était tiré du fait qu’aucuns des textes sur lesquels se fondait la mise en examen – allégués de manifestement méconnus – ne prévoyaient d’«obligation particulière de prudence ou de sécurité » au sens littéral de la notion : « les articles L.1110-1 du Code de la santé publique, L.1413-4 et L.3131-1 du même code, L.1141-1 et L.1142-8 du Code de la défense ne caractérisent aucune obligation particulière de prudence ou de sécurité, et se bornent à rappeler de façon générale des principes de protection en matière de santé et de défense, et la participation du ministère de la santé aux objectifs de défense nationale. »

Jusqu’alors, la Cour de cassation distinguait selon que l’obligation méconnue soit de moyen ou de résultat, par analogie au droit civil. Elle considérait que les obligations particulières étaient d’avantage des obligations de moyens, tout en n’exposant aucun critère pénal de distinction.

Il appartenait alors aux juges du fond « de rechercher, au besoin d’office et sans qu’il soit tenu par les mentions ou l’absence de mention de la citation pour mise en danger sur ce point, l’existence d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement dont la violation est susceptible de permettre la caractérisation du délit »[1].

Par cet arrêt en date du 20 janvier 2023 – qui tire sa force de son prononcé en formation solennelle d’Assemblée plénière – la Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour de Justice de la république en considérant que « la commission d’instruction, qui s’est référée à des textes qui ne prévoient pas d’obligation de prudence ou de sécurité objective, immédiatement perceptible et clairement applicable sans faculté d’appréciation personnelle du sujet, a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé, pour les motifs qui suivent. »

La Doctrine proposait de ne retenir dans la notion que les normes édictant « un modèle de conduite circonstancié précisant très exactement la conduite à avoir dans telle ou telle situation »[2].

Sans reprendre littéralement les termes de cette définition doctrinale, la Cour de cassation fixe sa jurisprudence sur une définition proche, celle d’une obligation objective, immédiatement perceptible et clairement applicable sans faculté d’appréciation personnelle du sujet.

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[1] Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 novembre 2019, n° 18-82.718

[2] M. Puech, « De la mise en danger d’autrui », Dalloz, 1994, p 153

Les conséquences de la réforme de la gestion du FCTVA

Le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) est une dotation versée par l’Etat aux collectivités territoriales et à leurs groupements, destinée à assurer une compensation, à un taux forfaitaire, de la charge de TVA que ces dernières supportent sur leurs dépenses réelles d’investissement et qu’elles ne peuvent pas récupérer par la voie fiscale (puisqu’elles ne sont pas considérées comme étant assujetties à la TVA pour les activités ou opérations qu’elles accomplissent en tant qu’autorités publiques).

L’article 251 de la loi de finance initiale pour 2021 a introduit une réforme de la gestion du

FCTVA visant à automatiser l’attribution du FCTVA.

Depuis le 1er janvier 2023 l’intégralité des bénéficiaires du FCTVA est concernée par la réforme.

L’automatisation de la gestion du FCTVA vient remplacer une logique d’éligibilité sous condition de respect de critères juridiques par une logique comptable basée sur une assiette de comptes éligibles préalablement arrêtés.

Le fonctionnement du nouveau dispositif a été précisé par le décret n° 2020-1791 du 30 décembre 2020 relatif à l’automatisation de la gestion du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.

Cette réforme remplace le calcul des versements sur la base des états déclaratifs transmis et contrôlés par les préfectures, par l’identification automatisée des dépenses imputées sur les comptes listés dans l’arrêté en date du 30 décembre 2020 fixant la liste des comptes éligibles à la procédure de traitement automatisé relative à l’attribution du FCTVA.

Le calcul du FCTVA est ainsi désormais réalisé à partir des mandats enregistrés sur cette liste de comptes, sans TVA déductible, par les collectivités et mis en paiement par les comptables publics.

Si l’assiette de dépenses relevant de la liste des comptes éligibles a été définie avec pour objectif de s’approcher le plus possible du périmètre de dépenses éligibles avant automatisation, il n’existe, toutefois, pas de concordance stricte entre le périmètre d’éligibilité juridique des dépenses au FCTVA définie avant la réforme et le champ des dépenses imputables par nature sur les compétences éligibles à compter du 1er janvier 2021. Autrement-dit, l’automatisation de la gestion du FCTVA a conduit à ce que certaines dépenses deviennent inéligibles au FCTVA, ce qui peut être notamment le cas des dépenses engagées pour la réalisation d’équipements publics dans le cadre de concessions d’aménagement.

Or l’inéligibilité de ces dépenses au FCTVA entraine d’importantes conséquences financières pour les collectivités qui sont obligées de mettre en place des solutions alternatives afin de compenser ce manque à gagner.

A noter que malgré des conséquences financières importantes pour certaines collectivités, le Gouvernement ne semble pas enclin à réviser l’assiette des dépenses éligibles au FCTVA (Rép. min. QE orale n° 0335S, publiée le 15 février 2023).

Transfert de la compétence relative à la collecte et au traitement des déchets ménagers et assimilés à une communauté d’agglomération et maintien du pouvoir de police du maire

Une société civile immobilière (SCI) louait des locaux professionnels implantés sur un terrain situé sur le territoire de la commune d’Avignon à d’autres sociétés. Ces terrains se trouvaient à proximité d’une déchetterie, gérée par la Communauté d’agglomération du Grand Avignon, compétente en matière de « Collecte et traitement des déchets des ménages et déchets assimilés » depuis le 1er janvier 2004 et d’une aire d’accueil des gens du voyage. En effet, il importe de rappeler que même dans la situation où la communauté d’agglomération a reçu la compétence en matière de collecte des ordures ménagères, si celle-ci est confrontée à des dépôts sauvages de déchets sur la voie publique en dehors des heures de collecte, il revient au maire de la commune concernée d’apprécier si le ramassage de ces déchets relève de la salubrité publique, conformément aux dispositions de l’article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales. Ainsi au titre de son pouvoir de police et si l’urgence du ramassage des déchets est justifiée, le maire devra prendre en charge leur enlèvement.

Dans notre cas, en raison de la dégradation récurrente des lieux, la SCI avait consenti à réduire le montant de ses loyers à ses preneurs. En mars 2016, le locataire a finalement décidé de résilier son bail. Cette résiliation était justifiée, selon lui, par la présence de dépôts sauvages de déchets qui dégradaient l’environnement des locaux commerciaux, ainsi que par la commission d’actes de vandalisme.

C’est dans ces conditions que la société a recherché la responsabilité du maire en raison des préjudices qu’elle estime avoir subis du fait de la présence de ces déchets intempestifs.

Au regard de ces éléments, le juge a étudié la responsabilité du maire au titre de son pouvoir de police administratif général mais s’est également penché sur les compétences de la Communauté d’agglomération du Grand Avignon.

S’agissant de la compétence de la communauté d’agglomération, la Cour administrative de Marseille précise que les difficultés rencontrées par le requérant relèvent de la compétence exercée en matière de gestion de la collecte des déchets et ne peuvent donc pas être imputées à la commune d’Avignon :

« Il ressort également des pièces du dossier que les difficultés rencontrées par la société requérante pour louer le bien à la société La poste Immo jusqu’au mois de mars 2016, résulte, à titre principal de l’environnement dégradé par les détritus de toute sorte situés aux abords du bien à louer. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la compétence en matière de collecte de déchets a été transférée à la communauté d’agglomération du grand Avignon depuis 2004, et ne relève donc pas de la commune d’Avignon et que les difficultés dont se plaint la requérante relève de la gestion de la collecte des déchets et non, pour l’essentiel, de l’exercice des pouvoirs de police du maire de la commune. Ainsi, les préjudices dont la société requérante demande réparation ne peuvent être directement imputés à la carence fautive du Maire d’Avignon. » (CE, 25 mai 2023, SCI Marquette Famille, n° 454472)

Confirmant la position de la Cour administrative de Marseille, le Conseil d’Etat indique que :

« 5. Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que, pour juger que les préjudices dont la société SCI Marquette Famille demande réparation, nés de la résiliation du bail par la société La Poste Immo et de la difficulté pour la SCI à relouer ces locaux, ne peuvent être directement imputés à la carence fautive du Maire d’Avignon, la cour administrative d’appel a retenu que la compétence en matière de collecte des déchets avait été transférée à la communauté d’agglomération du grand Avignon depuis 2004, en application des dispositions de l’article L. 5216-5 du Code général des collectivités territoriales citées au point 4, et que les nuisances invoquées par la SCI ne relevaient pas, pour l’essentiel, de la carence du Maire d’Avignon dans l’exercice de ses pouvoirs de police générale rappelés au point 2. Ce faisant, la cour administrative d’appel qui n’a pas entendu exclure, après le transfert de compétences de la collecte et de la gestion des déchets à une communauté d’agglomération, le maintien d’une compétence du maire lorsque des déchets ou des encombrants portent atteinte à la sûreté et à la commodité du passage dans les voies publiques, n’a pas commis d’erreur de droit. »

En d’autres termes, la compétence en matière de collecte de déchets a été transférée à la communauté d’agglomération, celle-ci ne peut donc pas relever de la commune. Dès lors, si les difficultés rencontrées par le requérant peuvent être imputées à la gestion de la collecte des déchets par la communauté d’agglomération, elles ne peuvent pas l’être au titre des pouvoirs de police du maire de la commune.

Dès lors, le juge rejette la requête en considérant, d’une part, que la responsabilité du maire de la commune ne peut pas être retenue pour justifier les préjudices subis. En l’espèce, s’il reconnait la carence du maire dans l’exercice des pouvoirs de police, il considère cependant  qu’il n’existait pas de lien de causalité direct entre cette faute et le préjudice dont la SCI Marquette Famille faisait état, consistant en des baisses de loyer consenties à la société GDF Suez, dès lors que « la dégradation des lieux à l’origine de cette baisse résulte, selon les affirmations mêmes de la société, de l’existence de la déchetterie et d’un camp destiné aux gens du voyage » Et, d’autre part, on comprend qu’en l’absence de demande formulée en ce sens de la part du requérant, la carence fautive de la communauté d’agglomération ne peut également pas être recherchée.