Décision du Cordis relative à une demande de modification des conditions de raccordement d’une installation de consommation au réseau public de distribution d’électricité

R et Mme R (ci-après, les « requérants ») ont adressé à la société Enedis, par une lettre du 4 août 2015, une demande de modification du raccordement de leurs installations pour passer d’un raccordement de type C3 à un raccordement de type C5.

Le 19 août 2015, la société Enedis a communiqué aux requérants une proposition de raccordement en se fondant sur la version 4 du barème pour la facturation des raccordements au réseau public de distribution d’électricité concédé à ERDF.

Les requérants ayant jugé la proposition de la société Enedis excessive. ils ont donc saisi le comité de règlement des différends et des sanctions (ci-après, le « Cordis ») d’une demande tendant notamment à ce qu’il constate que la société Enedis avait rompu l’égalité devant les charges publiques par le caractère excessif du montant des travaux de raccordement envisagés. Les requérants ont également conclu à la condamnation de la société Enedis au titre des préjudices qu’ils estimaient avoir suivi. Enfin, les requérants demandaient au Cordis d’ordonner à la société Enedis la modification des propositions techniques et financières relatives à leur demande de raccordement.

Avant de se prononcer au fond, le Cordis rappelle les dispositions de l’article L. 134-19 du Code de l’énergie. Il juge ainsi qu’il ne suffit pas qu’un différend oppose un gestionnaire de réseau à un utilisateur pour que le comité soit compétent pour le trancher. Le Cordis poursuit en jugeant qu’une demande de constat d’une méconnaissance de l’obligation d’égalité devant les charges publiques a pour objet de mettre en œuvre la responsabilité sans faute de la personne publique, notamment du fait des lois ou du fait de décisions administratives régulières, en vue d’obtenir réparation d’un préjudice et qu’il ne lui appartient pas, au titre des dispositions précitées du Code de l’énergie, fondant la compétence du Cordis, de statuer sur les demandes tendant à la réparation d’un préjudice.

Le Cordis rejette donc pour incompétence les demandes des requérants tendant à la condamnation de la société Enedis au titre d’une rupture d’égalité devant les charges publiques. Il se reconnaît néanmoins compétent pour apprécier la demande tendant à ce qu’il soit ordonnée à la société Enedis la modification des propositions techniques et financières relatives à la demande de raccordement des requérants.

Le Cordis commence alors par rappeler qu’au titre de l’article L. 342-8 du Code de l’énergie, « lorsque le gestionnaire du réseau public de distribution est le maître d’ouvrage des travaux, les principes généraux de calcul de la contribution qui lui est due sont arrêtés par l’autorité administrative sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie. Ils peuvent prendre la forme de barèmes. Les barèmes de raccordement, établis par chaque gestionnaire de réseau de plus de 100 000 clients, sont soumis à l’approbation de la Commission de régulation de l’énergie ».

Il rappelle ensuite qu’au titre de l’arrêté du 28 août 2007 fixant les principes de calcul de la contribution mentionnée aux articles 4 et 18 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité, chaque gestionnaire de réseau public de distribution établit un barème de raccordement qui entre en vigueur trois mois après son approbation par la Commission de régulation de l’énergie.

En l’espèce, le Cordis relève que la société Enedis avait appliqué la version 4 du barème de raccordement fut ce à la demande des requérants du 4 août 2015. Or, il relève que ce barème avait été approuvé par la Commission de régulation de l’énergie le 8 juillet 2015 et n’entrait en vigueur qu’à compter du 8 octobre 2015. Il en conclut que c’est donc la version 3 de ce barème qui aurait dû être appliquée à la demande de raccordement des requérants.

En conséquence, le Cordis fait droit à la demande des requérants sur ce point et ordonne à la société Enedis de communiquer une proposition technique et financière, en application de l’article 14 de son barème de raccordement, version 3, pour la modification du raccordement de leurs installations.

Les nouveaux tarifs réglementés de vente d’électricité applicables au 1er août 2018

Publiés au Journal Officiel de la République française du 31 juillet 2018, le Ministre de la transition écologique et solidaire et le Ministre de l’économie et des finances ont pris conjointement trois décisions par lesquelles ils fixent les tarifs réglementés de vente de l’électricité (ci-après les « TRVE ») : 

–       La décision du 27 juillet 2018 relative aux tarifs règlementés de vente de l’électricité applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale ;

–       La décision du 27 juillet 2018 relative aux tarifs réglementés de vente de l’électricité applicables aux consommateurs résidentiels en France métropolitaine continentale ;

–       La décision du 27 juillet 2018 relative aux tarifs réglementés de vente de l’électricité Jaunes et Verts applicables aux consommateurs en France métropolitaine continentale.

Ces trois décisions tarifaires font suite à la décision du Conseil d’Etat  du 18 mai 2018, Société Engie et Association nationale des opérateurs détaillants en énergie, (n°413688 et 414656) – portant sur l’annulation partielle des TRVE jusqu’alors applicables – et à la proposition de la Commission de régulation de l’énergie du 12 juillet 2018 conformément à l’article L. 337-4 du Code de l’énergie (cf. notre Focus du 7 juin 2018 sur le sujet).

Par la décision du Conseil d’Etat du 18 mai 2018 précitée, les TRVE jusqu’alors applicables ont été annulés au motif que la décision dans laquelle ils étaient fixés « est applicable à tous les consommateurs finals, domestiques ou non domestiques, pour leurs sites souscrivant une puissance inférieure ou égale à 36 kilovoltampères » (cf. CE, 18 mai 2018, Société Engie et Association nationale des opérateurs détaillants en énergie, n° 413688 et 414656).

Les décisions tarifaires commentées se déclinent désormais en trois catégories de consommateurs finals : (i) les consommateurs domestiques, (ii) les consommateurs non-domestiques, ces derniers étant visés à l’article L. 337-7 du Code de l’énergie, et (iii) les consommateurs bénéficiant encore des tarifs réglementés « Jaunes » ou « Verts » visés à l’article L. 337-9 du Code de l’énergie.

Surtout, la décision portant sur les TRVE applicables aux non résidentiels précise que les options tarifaires proposées sont en voie d’extinction « pour les sites non résidentiels appartenant à une grande entreprise », et cela en application de la décision du Conseil d’Etat précitée.

C’est également le cas pour les sites non résidentiels appartenant à une grande entreprise s’agissant des deux options tarifaires applicables aux tarifs réglementés de vente dits « Verts », en voie d’extinction par application de la décision du Conseil d’Etat précitée.

Et, aux termes des articles 2 respectifs des décisions portant sur les TRVE applicable aux non résidentiels et aux tarifs « Jaunes » et « Vert » : « on entend par grande entreprise toute entreprise répondant aux critères d’une grande entreprise au sens du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2018 relatif aux décrets permettant de déterminer la catégorie d’appartenance d’une entreprise pour les besoins de l’analyse statistique et économique ».

Enfin, ces trois décisions tarifaires sont entrées en vigueur depuis le 1er août 2018.

Publication d’une instruction ministérielle portant sur la loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes.

Moins d’un mois après la publication de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes, l’instruction ministérielle relative à l’application de ce texte est parue le 28 août dernier.

Elle revient sur l’instauration – conditionnée et temporaire – du report du transfert des compétences « eau » et « assainissement » des communes vers les communautés de communes : alors que l’article 64 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 devait rendre celles-ci obligatoires à compter du 1er janvier 2020, les communes membres d’une communauté de communes peuvent obtenir un report de ce transfert obligatoire au 1er janvier 2026.

Cette faculté est toutefois strictement conditionnée, nous rappelle l’instruction, puisqu’elle « est exclusivement réservée aux communes membres de communautés de communes n’exerçant, à la date de publication de la loi, ni à titre optionnel, ni à titre facultatif, la compétence en cause, y compris partiellement, à l’exception notable du service public d’assainissement collectif ». Autrement dit, une communauté de communes exerçant une compétence facultative limitée par exemple à la production d’eau potable (et non à la distribution aux usagers), deviendra immanquablement compétente pour l’ensemble de la compétence « eau » au 1er janvier 2020. En revanche, si la communauté en cause est dotée d’une compétence « eau » mais pas de compétence « assainissement », seul le report de la compétence « eau » est exclu.

Dans le cas où la communauté de communes en cause ne disposait pas de compétence en « eau » ou en « assainissement », l’Instruction rappelle que le report n’est pas automatique : il faut que les communes délibèrent selon un mécanisme de « minorité de blocage », à l’image de ce qui existe déjà pour le plan local d’urbanisme. Concrètement, avant le 1er juillet 2019, au moins 25 % des communes membres de la communauté de communes, représentant au moins 20 % de la population, devront avoir délibéré en ce sens.

Elle précise enfin, ce qui ressort d’ailleurs expressément du texte que, même en cas de mise en œuvre du report, le transfert de la compétence aux communautés de communes reste possible avant le 1er janvier 2026 : outre la faculté que les communes conservent de transférer la compétence selon la procédure de droit commun, il suffit que le conseil communautaire délibère en ce sens et que les communes n’aient pas délibéré en réunissant les conditions de la minorité de blocage expliquée précédemment, dans le délai de trois mois « qui suit » la délibération communautaire, sans préciser le point de départ de ce délai : transmission au contrôle de légalité, notification aux maires des communes membres ?

L’Instruction revient par ailleurs sur les autres apports de la loi : une clarification – attendue – des « eaux pluviales », vis-à-vis de la compétence « assainissement », avec une reformulation du libellé de la compétence « assainissement » :

–       Pour les communautés urbaines et les métropoles, ce service public administratif est expressément rattaché à la compétence « assainissement », la compétence devenant « assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l’article L. 2224-8, gestion des eaux pluviales urbaines au sens de l’article L. 2226-1 » ;

–       Pour les communautés d’agglomération et les communautés de communes, la compétence est désormais définie comme « assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l’article L. 2224-8 [du CGCT] », article qui ne prévoit pas la gestion des eaux pluviales. L’Instruction en tire les conclusions et précise ainsi que, pour les communautés d’agglomération, l’eau pluviale, ou plus exactement la compétence « eaux pluviales urbaines », devient une compétence facultative, jusqu’au 1er janvier 2020 toutefois : à cette date en effet, elle deviendra une compétence obligatoire à part entière. Pour les communautés de communes en revanche, aucune compétence obligatoire de ce type n’étant prévue, elle pourra demeurer du ressort communal.

Apport utile de l’Instruction, elle revient sur les critères permettant d’identifier le caractère « urbain » des « eaux pluviales urbaines » :

–       Pour les EPCI dotés d’un plan local d’urbanisme ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu, la compétence de l’EPCI en la matière doit être exercée dans les zones urbanisées et à urbaniser, ainsi que dans les zones constructibles délimitées par une carte communale ;

–       En l’absence de tels documents, dans les territoires couverts dès lors simplement par le Règlement national d’urbanisme (RNU), la détermination des parties urbanisées relève de l’appréciation de l’autorité locale, l’Instruction rappelant que « la partie urbanisée ne se limite pas nécessairement au centre bourg », et ajoutant que « la partie urbanisée d’une commune étant celle qui regroupe un nombre suffisant d’habitations desservies par des voies d’accès».

Toujours à propos des « eaux pluviales », l’Instruction rappelle qu’étant un service public administratif, elle doit être financée par le budget de l’EPCI et non par des redevances à l’usager (alors que l’assainissement est un service public industriel et commercial, financé par les redevances). L’Instruction indique ainsi que « par conséquent, l’assemblée délibérante de la collectivité ou de l’EPCI compétent en matière d’assainissement devra fixer forfaitairement la proportion des charges de fonctionnement et d’investissement qui fera l’objet d’une participation du budget général versé au budget annexe du service public d’assainissement », en renvoyant ses modalités exactes d’application à la circulaire du 12 décembre 1978 relative aux modalités d’application du décret n°67-945 du 24 octobre 1967 concernant l’institution, le recouvrement et l’affectation des redevances dues par les usagers des réseaux d’assainissement et des stations d’épuration.

Enfin, l’Instruction revient sur l’assouplissement des dispositions relatives au mécanisme spécifique de représentation-substitution des communes par les communautés de communes et les communautés d’agglomération au sein des syndicats de communes ou des syndicats mixtes spécifiques à l’exercice des compétences « eau » et « assainissement » : désormais, la représentation-substitution s’applique dès lors lorsque le syndicat intervient sur le territoire de deux EPCI à fiscalité propre (trois étaient auparavant requis).

 

Erosion côtière et expropriation de l’immeuble le Signal à Soulac : nouvelle décision juridictionnelle

L’immeuble « Le Signal » à Soulac, implanté en zone rouge inconstructible du plan de prévention des risques d’avancée dunaire et de recul du trait de côte adopté par le Préfet de Gironde en 2004, compte tenu du risque d’effondrement, fait l’objet de nombreux contentieux depuis plusieurs années. La décision la plus récente du Conseil d’Etat, en date du 16 août dernier, concerne la procédure d’expropriation environnementale prévue à l’article L. 561-1 du Code de l’environnement, procédure que l’Etat a refusé de mettre en œuvre en l’espèce, le requérant, représentant des occupants de l’immeuble, contestant cette décision.

Pour mémoire, le juge constitutionnel a considéré dans sa décision n° 2018-698 QPC du 6 avril 2018 que les mots  » lorsqu’un risque prévisible de mouvements de terrain, ou d’affaissements de terrain dus à une cavité souterraine ou à une marnière, d’avalanches, de crues torrentielles ou à montée rapide ou de submersion marine menace gravement des vies humaines  » figurant au premier alinéa de cet article L. 561-1, sont conformes à la Constitution.

Dans son arrêt ici commenté du 16 août, et à la suite de cette décision du Conseil constitutionnel, le Conseil d’Etat a rejeté le recours formé contre la décision implicite refusant de mettre en œuvre la procédure d’expropriation en cause.

Il infirme d’abord la décision de la Cour administrative d’appel, en indiquant que l’érosion côtière ne relève pas des risques de submersion marine.

Puis, examinant l’érosion sous l’angle des risques prévisibles de mouvements de terrain, la Haute juridiction relève que la condition relative à la menace grave sur des vies humaines n’était pas remplie, au regard de « la bonne connaissance scientifique du phénomène naturel en cause, dont l’évolution régulière a pu être observée depuis près d’un demi-siècle » et qui a permis « l’édiction de mesures telles que la mise en place d’un dispositif de surveillance, d’alerte, d’évacuation temporaire des résidents de l’immeuble et d’un périmètre de sécurité, propres à assurer la sécurité des personnes en amont de la réalisation de ces risques ».

Les habitants de l’immeuble n’ont donc pas obtenu gain de cause.

Loi pour un Etat au service d’une société de confiance : dispositions en matière d’énergies renouvelables

La loi n° 2018-727 du 10 août 2018 « pour un Etat au service d’une société de confiance » a été publiée au Journal officiel du 11 août 2018.

Cette loi, dont l’objectif est de transformer l’action publique par l’introduction de davantage de confiance réciproque et de simplicité dans les relations entre l’administration et les administrés, contient notament :
– à son article 58 des dispositions relatives au droit applicable aux parcs éoliens en mer.  Elles modifient le Code de l’environnement et le Code de l’énergie ;
– à son article 67 une disposition intéressant la géothermie.

S’agissant de l’éolien en mer, la réforme porte sur une simplification des procédures permettant la réalisation et l’exploitation des éoliennes en mer, sur l’instauration d’une nouvelle sanction pécuniaire dans le code de l’énergie, et enfin sur la renégociation des tarifs d’achat résultant des appels d’offres antérieurs au 1er janvier 2015.

–  Simplification des procédures permettant la réalisation et l’exploitation des éoliennes en mer 
Le I de l’article 58 de la loi prévoit d’une part la saisine de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) par le Ministre chargé de l’Energie qui souhaite lancer une procédure de mise en concurrence pour la construction et l’exploitation d’installations de production d’énergie renouvelable en mer et de leurs ouvrages de raccordement aux réseaux publics d’électricité. Cette saisine doit intervenir préalablement au lancement de la procédure. 
La CNDP détermine alors les modalités de participation du public au processus de décision du lancement de la procédure de mise en concurrence. Ce dernier est notamment consulté sur le choix de la localisation de la ou des zones potentielles d’implantation des installations envisagées.
La loi précise qu’un tel débat ne peut plus avoir lieu après désignation du lauréat.
Le I de l’article 58 de la loi modifie d’autre part les procédures et le régime des autorisations suite au lancement de l’appel d’offre.
Ainsi, l’Etat pourra réaliser lui-même tout ou partie de l’étude d’impact, et la mettre ensuite à disposition du maitre d’ouvrage.
En outre, les autorisations nécessaires pour la réalisation et l’exploitation du parc (autorisation unique relative aux espaces maritimes relevant de la souveraineté ou de la juridiction de la République française, concession d’utilisation du domaine public maritime, autorisation environnementale, autorisation d’exploiter) fixeront des variables dans les limites desquelles les projets pourront évoluer après l’obtention des autorisations.
C’est une traduction du principe de « permis enveloppe », qui permet de procéder à des modifications du projet sans avoir à solliciter et obtenir de nouvelles décisions administratives.

–  Instauration d’une nouvelle sanction pécuniaire

Le Code de l’énergie prévoyait déjà une sanction pécuniaire dans le cas d’un manquement postérieur à la mise en service de l’installation.
Le II de l’article 58 de la loi instaure un régime de sanctions pour tout manquement survenant au cours de la procédure de mise en concurrence ou au terme de cette procédure, c’est à dire avant la mise en service de l’installation.
La mesure vise en particulier à répondre aux situations de difficultés de mises en service des projets éoliens en mer.

–  Renégociation des tarifs d’achat résultant des appels d’offre antérieurs au 1er janvier 2015 et pour lesquels les contrats n’ont pas été conclus à la date de la loi

Enfin, les III à VI de l’article 58 de la loi concernent les possibilités de renégociation des tarifs d’achat pour les appels d’offres antérieurs au 1er janvier 2015 suite aux évolutions technologiques dans ce domaine.
Désormais, le Ministre chargé de l’Energie peut demander au candidat retenu « d’améliorer son offre, notamment en diminuant le montant du tarif d’achat ».
En cas d’accord du candidat, l’acceptation de l’offre améliorée emporte le cas échéant mise à jour du cahier des charges.
En cas de désaccord, la décision désignant le candidat peut être abrogée par décret. Cette abrogation entraîne l’abrogation de l’autorisation d’exploiter et la résiliation de la convention de concession d’utilisation du domaine public maritime. Le candidat remet ses études à l’Etat et est indemnisé de l’ensemble de ses frais. Le ministre lance une nouvelle une nouvelle procédure de mise en concurrence dans les six mois suivant l’abrogation.

S’agissant de la géothermie, la loi habilite le gouvernement à prendre par ordonnances, « toute mesure relevant du domaine de la loi en vue de réformer les dispositions du code minier relatives à l’octroi et à la prolongation des titres permettant l’exploration et l’exploitation de l’énergie géothermique ». Ces réformes doivent viser à établir :
–       un régime simplifié adapté aux projets en situation géologique connue et ne nécessitant qu’une phase d’exploration limitée ; 
–       un régime plus complet pour les autres projets.
L’article 67 précise que la distinction entre les deux catégories de projet ne peut être fondé sur la température du gîte.
Ces ordonnances doivent être adoptées dans les 12 prochains mois et faire l’objet d’un projet de loi de ratification dans les trois mois qui suivent leur publication.

Renouvellement des parcs éoliens ou « repowering » : les modalités d’appréciation de la nécessité de délivrer une nouvelle autorisation

L’article L. 181-14 du Code de l’environnement prévoit que toute « modification substantielle » d’une installation qui relève de l’autorisation environnementale est soumise à une nouvelle autorisation, et que toute « modification notable » intervenant dans les mêmes circonstances est portée à la connaissance de l’autorité administrative compétente pour délivrer l’autorisation environnementale.

Les éoliennes terrestres sont des installations classées pour la protection de l’environnement. Elles sont soumises à autorisation lorsqu’au moins un aérogénérateur a un mât d’une hauteur supérieure ou égale à 50 mètres ou lorsque le parc comprend uniquement des aérogénérateurs dont le mât a une hauteur inférieure à 50 m et au moins un aérogénérateur dont le mât a une hauteur maximale supérieure ou égale à 12 m et pour une puissance totale installée supérieure ou égale à 20 MW.

De sorte que l’article L. 181-14 du Code de l’environnement peut avoir vocation à s’appliquer à leur égard, et notamment dans le cadre du renouvellement des parcs éoliens.

En effet, le principe du renouvellement des parcs éoliens, également appelé « repowering », est de remplacer partiellement ou totalement un parc éolien afin de profiter des évolutions technologiques et d’augmenter le rendement du parc.

Par une circulaire en date du 11 juillet 2018 relative à l’appréciation des projets de renouvellement des parcs éoliens terrestres, le Ministre de la transition écologique et solidaire a précisé les éléments d’appréciation du caractère substantiel de la modification d’un projet dans le cadre particulier du repowering.

La circulaire distingue cinq configurations possibles de renouvellement :

  1. Remplacement des éoliennes par un autre modèle de dimensions identiques, au même emplacement ;
  2. Remplacement, au même emplacement, par des éoliennes de même hauteur hors tout (mât, nacelle et pâle à la verticale), mais avec des pales plus longues ;
  3. Remplacement, au même emplacement, par des éoliennes plus hautes ;
  4. Remplacement et déplacement des éoliennes ;
  5. Ajout de mâts.

Dans le cas I, l’instruction précise que la modification est notable mais non substantielle, alors que, dans le cas V, la modification doit automatiquement être considérée comme substantielle. Pour les cas intermédiaires, l’appréciation du caractère substantiel relève du préfet.

Cette appréciation est effectuée au regard de la nature et de l’ampleur des impacts liés à ces modifications. Afin de mettre le préfet en mesure de prendre sa décision, l’exploitant doit fournir un « dossier de porter-à-connaissance » dont le contenu est déterminé par la circulaire, à savoir :

–  Une analyse proportionnée aux enjeux permettant d’évaluer les impacts de la modification envisagées sur les points suivants notamment : les nuisances sonores, les perturbations sur les radars et la navigation aérienne (civile et militaire), le paysage, le patrimoine, la biodiversité ;

–  Une présentation de la conformité du projet au RNU, au PLU, au document en tenant lieu ou à la carte communale.

Il est également précisé que les avis des collectivités locales concernées par le projet, bien que non obligatoires, pourront constituer des « éléments utiles d’appréciation vis-à-vis de l’impact de la modification ».

La circulaire comprend un logigramme en annexe qui synthétise les différentes étapes du raisonnement à tenir et les conclusions possibles.

 

Responsabilité du gestionnaire du réseau de distribution d’électricité en cas de dommages causés aux parties communes d’un immeuble à l’occasion de travaux de rénovation de colonnes montantes électriques

Dans une recommandation en date du 23 juillet 2018, publiée le 21 août dernier, le Médiateur National de l’Energie a rappelé les obligations qui pèsent sur le concessionnaire de la distribution publique d’électricité à l’égard des parties communes d’un immeuble lorsqu’il réalise des travaux de rénovation de la colonne montante électrique de l’immeuble.

Le Médiateur National de l’Energie était saisi par une copropriété dont les parties communes avaient été endommagées par le concessionnaire de la distribution publique d’électricité à l’occasion de travaux de rénovation, menés par ce-dernier, sur la colonne montante électrique de l’immeuble.

Le concessionnaire ayant refusé de réparer les dommages causés, la copropriété a saisi le Médiateur National de l’Energie.

Dans sa recommandation, celui-ci souligne que lorsque le concessionnaire procède à la rénovation d’une colonne montante ; « il ne doit en résulter aucun préjudice pour la copropriété : les lieux doivent être remis dans un état aussi proche que possible de leur état antérieur aux travaux et le respect d’une norme ne peut être invoqué pour justifier une atteinte à ce principe au prétexte que les ouvrages existants doivent être déviés ou refaits selon d’autres technique ».

Après avoir constaté, photographies à l’appui, que les murs de la cage d’escalier avaient été laissés dans un état dégradé par apport à leur état antérieur, le Médiateur recommande au gestionnaire du réseau de distribution d’électricité de « se rapprocher de la copropriété pour déterminer avec ses représentants les finitions à réaliser à ses frais ainsi que leurs modalités d’exécution ». Il rappelle également le principe général selon lequel « chaque fois qu’il est procédé à la rénovation, au remplacement ou au renforcement d’une colonne montante en concession, [il ne doit] résulte(r) de ces travaux aucune atteinte à l’état antérieur des lieux notamment lorsqu’ils impliquent un nouveau tracé ou le recours à d’autres technique ».

Ces conclusions sont à rapprocher d’une précédente recommandation en date du 29 juin 2017 (n° D2017-04232, commentée dans notre Lettre d’actualité juridique Energie et Environnement de février 2018), dans le cadre de laquelle le Médiateur National de l’Energie avait déjà formulé à l’égard du gestionnaire du réseau de distribution, la recommandation suivante « à chaque fois que la rénovation d’une colonne montante en concession sera décidée, de prendre à sa charge la totalité des travaux rendus indispensables, qu’ils portent sur la partie électrique ou le génie civil ». Dans cette affaire, le concessionnaire avait refusé de prendre à sa charge les travaux générés autour du renouvellement de la colonne, tels que dépose de coffrages, percements de planchers, pose de fourreaux, menuiserie et travaux de finition (enduits et peinture), estimant que ces frais incombaient à la copropriété. Le Médiateur National de l’Energie avait donné raison à la copropriété et invité le concessionnaire à prendre ces coûts en charge.

Précisions du juge administratif sur la redevance R2 prévue par les contrats de concession relatifs à la distribution publique d’électricité

Par deux jugements rendus le 23 mai 2018, le Tribunal administratif de Nantes a apporté des précisions sur les termes T, B et E intervenant dans le calcul de la redevance d’investissement dite « R2 » prévue par les contrats de concession relatifs à la distribution publique d’électricité.

On rappellera, en effet, que les contrats de concession relatifs à la distribution publique d’électricité comportent une redevance R2 versée par le concessionnaire à l’autorité concédante en contrepartie des travaux réalisés sur le réseau de distribution publique d’électricité, et dans l’intérêt dudit réseau, sous maîtrise d’ouvrage publique (par l’autorité délégante ou ses collectivités adhérentes).

Cette redevance R2 est calculée par l’application d’une formule mathématique constituée de plusieurs termes et figure à l’annexe 1 du cahier des charges dans les contrats de concession établis sur la base du modèle négocié en 1992 par EDF et la Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et des Régies.

Dans le cadre du premier litige soumis au Tribunal administratif de Nantes, c’est la question du terme T qui était en cause. Ce terme est contractuellement défini comme le « produit net des taxes municipales sur l’électricité sur le territoire de la concession, ayant fait l’objet de titres de recettes de l’autorité concédante l’année pénultième ; T ne peut toutefois être inférieur au produit net des taxes municipales sur l’électricité sur le territoire des communes rurales de la concession ». Le terme T vient en déduction de la formule de calcul, puisqu’il est soustrait aux autres termes.

On rappellera également que la taxe visée par le terme T est, actuellement, la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (ci-après, TCCFE) mentionnée à l’article L. 2333-2 du Code Général des Collectivités Territoriales (ci-après, CGCT). Conformément à ce que prévoit l’article L. 5212-24 du CGCT, dans les communes et Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (ci-après, EPCI) de moins de 2000 habitants ainsi que dans les communes de plus de 2000 habitants ayant délibéré en ce sens, cette taxe est perçue par le Syndicat exerçant la compétence d’Autorité Organisatrice de la Distribution d’Electricité (ci-après, AODE). En revanche, dans les commune de plus de 2000 habitants, sauf délibération contraire, la taxe est perçue et conservée par la commune, et ce, même si elle a transféré sa compétence d’AODE à un Syndicat et ne l’exerce donc plus. Dans l’hypothèse où c’est le Syndicat qui perçoit la taxe, il dispose de la possibilité d’en reverser une fraction à ses communes et EPCI membres. On précisera enfin que des dispositions similaires sont prévues par le CGCT au profit des Métropoles, des communautés urbaines, des communautés d’agglomération et des communautés de communes lorsque ce sont elles qui exercent la compétence d’AODE, et non un Syndicat.

Dans cette affaire, étaient en cause trois contrats de concession conclus par trois communes ayant, ensuite, transféré leur compétence d’AODE ainsi que les contrats afférant à Nantes Métropole. Cependant, ces trois communes, de plus de 2000 habitants, avaient, malgré le transfert de leur compétence d’AODE à Nantes Métropole, décidé de continuer à percevoir elle-même et de conserver la TCCFE correspondant à leur territoire.

Ne percevant aucun montant de TCCFE au titre de ces trois communes, Nantes Métropole avait décidé, au titre de la redevance R2 des années 2014 et 2015, de ne déduire de la redevance R2 aucune somme au titre du terme T. La société Enedis a contesté ce raisonnement et introduit des recours en annulation contre ces deux titres exécutoire auprès du Tribunal administratif de Nantes.

Dans son jugement du 23 mai 2018, le Tribunal administratif censure ce raisonnement en considérant que « le montant de la redevance R2 doit être calculé en déduisant du montant des investissements réalisés par l’autorité concédante le produit des taxes communales sur la consommation finale d’électricité recouvrées respectivement sur le territoire des communes de Nantes, Rezé et Indre, alors même que ces communes ont émis les titres de recette en vue du recouvrement de ces taxes et qu’elles en conservent le produit ».

Ce faisant, le Tribunal s’en tient à une lecture stricte et littérale du cahier des charges qui ne prend pas en compte la situation de l’AODE qui ne perçoit pas la TCCFE. Nantes Métropole est donc ici doublement lésée puisque non seulement elle ne perçoit pas la TCCFE qui est conservée par les communes, mais elle doit de surcroit déduire le montant – qu’elle ne perçoit pourtant pas – du montant de la redevance R2 que lui verse le concessionnaire. Pourtant, ce n’était sans doute pas l’esprit de la formule de calcul de cette redevance.

Dans le second jugement rendu le 23 mai 2018, ce sont les termes E et B de la redevance de concession qui étaient en cause.

Le terme E est défini par le contrat de concession comme « le montant total hors TVA en francs des travaux d’investissement sur les installations d’éclairage public, mandaté par les collectivités exerçant la maîtrise d’ouvrage de ces travaux l’année pénultième. / Ce montant est déterminé par un état dressé par l’autorité concédante explicitant la situation, la nature et le montant des travaux réalisés. (…) ». En application de la formule de calcul prévue contractuellement, seul 30% due montant total est intégré dans la redevance R2.

La société Enedis contestait tout d’abord la prise en compte dans le calcul du montant total du terme E de dépenses d’investissement relatives aux dispositifs de télécommande et de programmation du réseau d’éclairage public « au seul motif qu’elles seraient par nature dissociables du réseau de distribution électrique concédé ». Toutefois, le Tribunal rejette cette argumentation en soulignant que « les parties ont entendu intégrer une part des dépenses d’investissement effectuées par le concédant et se rapportant au réseau d’éclairage public dans le formule de calcul de la redevance R2 en raison de l’existence d’ouvrages d’éclairage public indissociables des ouvrages de distribution électrique, lesquels peuvent partager un même support ou un fil conducteur commun » et que « les parties ont contractuellement admis que le forfait de 30 % du total des dépenses d’investissement effectuées sur le réseau d’éclairage public est réputé ne concerner que des ouvrages indissociables du réseau de distribution électrique ». Autrement dit, une autorité concédante n’a pas à démontrer que des travaux réalisés sur le réseau d’éclairage public seraient indissociables du réseau de distribution électrique pour pouvoir les intégrer dans le terme E.

Le Tribunal rejette également l’argumentaire de la société Enedis qui soutenait que les coûts afférant à la pose de fourreaux nécessaires au fonctionnement du réseau d’éclairage public devaient être exclus du terme E. Le Tribunal considère que « compte tenu de la localisation précise de ces fourreaux et de leur proximité avec les ouvrages d’éclairage public, la société Enedis ne peut être regardée comme contestant sérieusement que ces fourreaux sont effectivement destinés au réseau d’éclairage public ».

Le Tribunal rejette encore l’argument de la société Enedis qui souhaitait que soient déduites du montant du terme E les coûts correspondant aux protections mécaniques des candélabres, le juge considérant que ces protections sont « des équipements accessoires de ces ouvrages destinés à réduire le risque de leur endommagement, et ainsi, à en prolonger la durée d’utilisation ».

En revanche, le Tribunal fait droit à la demande de la société Enedis en tant qu’elle porte sur la déduction du terme E des frais de maîtrise d’œuvre, de contrôle technique, de coordination sécurité et protection de la santé, dont la finalité n’aurait pas été justifiée par l’autorité concédante.

S’agissant des demandes présentées par la société Enedis sur le terme B, on rappellera que le terme B correspond au « montant total hors TVA en francs, mandaté au cours de l’année pénultième par les collectivités exerçant la maîtrise d’ouvrage, des travaux sur le réseau concédé financés en dehors des programmes aidés par le FACE ou de tout programme de péréquation répondant à la définition susvisée ».

En l’espèce, le juge fait droit à la demande présentée par la société Enedis en déduisant du montant du terme B certaines sommes dont Nantes Métropole n’aurait pas contesté qu’elles ne correspondaient pas « à des travaux dont elle a assuré la maîtrise d’ouvrage en qualité d’autorité concédante ». Ces travaux auraient, a priori, été réalisés sous la maîtrise d’ouvrage du concessionnaire. Le Tribunal décide donc de défalquer ces sommes du montant du terme B.

Dispositions intéressant le droit de l’énergie au sein de la loi pour un Etat au service d’une société de confiance

La loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance, dont la mesure phare consiste dans l’instauration d’un « droit à l’erreur » et dont l’ambition plus globale consiste à simplifier et alléger différents pans du droit, comporte notamment un volet intéressant le droit de l’énergie.

D’abord, de nombreuses dispositions sont introduites au sein du Code de l’énergie et du Code de l’environnement pour modifier et préciser tant les procédures de mise en concurrence préalable à la construction et à l’exploitation d’ouvrages éoliens en mer que les procédures de raccordement aux réseaux publics d’électricité desdites installations (art. 58 de la loi).

Ensuite, l’article 59 1° de la loi pour un Etat au service d’une société de confiance modifie l’article L. 323-11 du Code de l’énergie relatif au contrôle de la réalisation des travaux de construction des réseaux de transport et de distribution. En effet, celui-ci prévoit désormais que l’approbation des travaux par l’autorité administrative est requise uniquement pour la construction de lignes électriques aériennes dont la tension est supérieure à 50 kilovolts, mais n’est plus requise désormais pour « les ouvrages privés qui empruntent le domaine public », comme c’était le cas auparavant.

Par ailleurs, le même article 59 2° de la loi modifie l’article L. 342-2 du Code de l’énergie, qui portait auparavant sur le raccordement au réseau des producteurs d’énergie. Ainsi, l’article L. 342-2 du Code de l’énergie dispose désormais que : « Le producteur, ou le consommateur, peut faire exécuter, à ses frais et sous sa responsabilité, les travaux de raccordement sur les ouvrages dédiés à son installation par des entreprises agréées par le maître d’ouvrage mentionné à l’article L. 342-7 ou à l’article L. 342-8 et selon les dispositions d’un cahier des charges établi par ce maître d’ouvrage sur la base de modèles publiés par ce dernier ».  La disposition a donc ainsi vocation à permettre au maître d’ouvrage des travaux (à savoir le gestionnaire du réseau de transport et le gestionnaire du réseau de distribution) de déléguer la réalisation des travaux de raccordement des ouvrages dédiés à une installation déterminée, à l’exclusion donc des ouvrages dédiés à plusieurs utilisateurs ou producteurs.

Le nouvel article L. 342-2 du Code de l’énergie précise également que « La mise en service de l’ouvrage est conditionnée à sa réception par le maître d’ouvrage ». Ces ouvrages n’intègreront donc le réseau public qu’après avoir été contrôlés par le maître de l’ouvrage. Le même article renvoie à un décret pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie, pour les modalités d’application de cet article. 

L’article 61 de la loi commentée concerne quant à lui les schémas de raccordement. On rappellera que ces schémas, institués par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, définissent les ouvrages à créer ou à renforcer pour atteindre les objectifs fixés par les schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie en matière d’énergies renouvelables.

Ces schémas régionaux, actuellement, prévus par l’article L. 321-7 du Code de l’énergie, sont élaborés par le gestionnaire du réseau public de transport, en accord avec les gestionnaires des réseaux publics de distribution et après avis des autorités organisatrices de la distribution concernés dans leur domaine de compétence. Une fois élaboré, le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables (ci-après le S3REnR) est soumis à l’approbation du préfet de région dans un délai de six mois suivant l’établissement du schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie ou du schéma régional en tenant lieu.

Les dispositions réglementaires relatives à l’élaboration, à la modification et à la mise en œuvre des S3REnR ont fait l’objet de modifications successives ainsi que, pour certaines d’entre elles, d’une annulation par le Conseil d’Etat (voir notre brève dans la Lettre d’actualité Energie et Environnement du mois de juillet 2018).

L’article 61 I de la loi autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans les douze mois suivant la promulgation de la loi, soit jusqu’au 10 août 2019, des mesures « visant à simplifier la procédure d’élaboration et de révision des schémas régionaux de raccordement au réseau des installations de production d’électricité usant d’énergies renouvelables prévue à l’article L. 321-7 du code de l’énergie, afin d’accélérer l’entrée en vigueur de ces schémas, et mettre en cohérence les autres dispositions du même code ».

Le législateur entend ainsi, une nouvelle fois, retoucher au régime juridique des S3REnR, dans le but d’en faciliter l’édiction et la mise en œuvre.

Enfin, l’article 61 II de la loi modifie l’article L. 522-1 du Code de l’expropriation prévoit une procédure d’expropriation spéciale susceptible d’être mise en œuvre, en extrême urgence, par décret rendu après avis conforme du Conseil d’Etat, notamment lorsque l’exécution de certains types de travaux – limitativement énumérés – risque d’être retardée  par des difficultés tenant à la prise de possession d’un ou de plusieurs terrains non bâtis. L’article 61 II modifie ainsi la disposition précitée en ajoutant les travaux de construction « d’ouvrages des réseaux publics d’électricité » à la liste des travaux susceptibles de donner lieu à l’engagement de cette procédure d’expropriation exceptionnelle. L’analyse des travaux débats parlementaires révèle qu’étaient notamment visés par le législateur les difficultés d’implantation d’éoliennes terrestres.

Modification de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et de certaines dispositions du Code de l’environnement

Le décret n° 2018-704 du 3 août 2018 modifie la nomenclature des ICPE, il a notamment vocation à transposer la directive 2015/2193 du 25 novembre 2015 relative à la limitation des émissions de certains polluants dans l’atmosphère en provenance des installations de combustion moyennes.

Pour ce faire, le décret, à grands traits :

modifie la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement et notamment la rubrique 2910 relative à la combustion.
A ce titre, il modifie l’intitulé de certaines rubriques 2910 relatives à la « combustion », ainsi que les seuils d’autorisation et de déclaration. Désormais, les combustions visées à la rubrique 2910 dont la puissance thermique nominale est supérieure ou égale à 1MW, mais inférieur 20 MW sont soumises à la déclaration et au contrôle périodique.

–  ajuste les contenus des dossiers de demande d’autorisation et d’enregistrement.
En particulier, il complète la liste des pièces à fournir pour la demande d’enregistrement des installations visées à l’article L. 229-5 du Code de l’environnement (installations classées et aux équipements et installations nécessaires à l’exploitation d’une installation nucléaire de base). Désormais, devront être fournis pour cette demande d’enregistrement, notamment :

o  Une description des matières premières, combustibles et auxiliaires susceptibles d’émettre des gaz à effet de serre ;
o Une description des différentes sources d’émissions de gaz à effet de serre de l’installation ;
o
   Une description des mesures prises pour quantifier les émissions de gaz à effet de serre grâce à un plan de surveillance qui réponde aux exigences du règlement pris en application de la directive 2003/87/ CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre. Ce plan peut être actualisé par l’exploitant dans les conditions prévues par ce même règlement sans avoir à modifier son enregistrement ;
o
   Un résumé non technique des informations ci-dessus mentionnées ;
Pour les installations d’une puissance thermique supérieure à 20 MW générant de la chaleur fatale non valorisée à un niveau de température utile ou celles faisant partie d’un réseau de chaleur ou de froid, une analyse coûts-avantages afin d’évaluer l’opportunité de valoriser de la chaleur fatale notamment à travers un réseau de chaleur ou de froid ;  
o
  Pour les installations de combustion de puissance thermique supérieure ou égale à 20MW, une description des mesures prises pour limiter la consommation d’énergie de l’installation. Sont fournis notamment les éléments sur l’optimisation de l’efficacité énergétique, tels que la récupération secondaire de chaleur.

La nouvelle nomenclature de la rubrique 2910 entrera en vigueur à compter du 20 décembre 2019, pour le reste, le décret est déjà entré en vigueur.

 

Le nouveau modèle de cahier des charges pour les concessions de distribution publique d’électricité

En cette rentrée 2018, nombreuses sont les collectivités concédantes, autorités organisatrices de la distribution d’électricité (AODE), qui vont reprendre ou entamer des négociations en vue de renouveler leurs contrats de concession d’électricité, signés pour la grande majorité au cours des années 1990 pour des durées allant de 25 à 30 ans. De nombreux contrats viendront ainsi à échéance au cours des prochains mois.

Ces négociations s’inscriront – pour la quasi-totalité de ces AODE – dans un cadre national reposant sur un « modèle » de contrat de concession adopté conjointement, fin décembre 2017, par la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), France urbaine, Enedis et EDF[1]. Ce modèle national adopté vient clôturer près de deux ans de négociations entre les instances représentatives des autorités concédantes (FNCCR et France Urbaine) et les sociétés concessionnaires Enedis et EDF[2]. Il est assorti d’un accord-cadre conclu entre ces mêmes entités.

Diffusé en début d’année 2018 aux autorités concédantes, quelques-unes d’entre elles (celles dont les contrats étaient venus à expiration) ont d’ores et déjà renouvelé leur contrat en s’appuyant sur ce nouveau modèle, tandis que d’autres vont progressivement analyser ce nouveau modèle pour en comprendre les enjeux et envisager le renouvellement de leur contrat une fois celui-ci arrivé à son terme, voire de façon anticipée ainsi que les y incite l’accord-cadre susvisé.

Ce Focus de rentrée est donc l’occasion de présenter ce nouveau modèle de contrat de concession qui sera, dans les mois à venir, au cœur des négociations entre les autorités concédantes et leurs sociétés concessionnaires Enedis et EDF.

L’adoption d’un nouveau « modèle » de contrat de concession d’électricité

Jusqu’à présent les concessions l’électricité reposaient sur un « modèle » national élaboré en 1992, de manière conjointe entre la FNCCR et EDF (alors Etablissement public). Bien qu’ayant un caractère supplétif[3], ce modèle avait été adopté par la quasi-totalité des autorités concédantes de l’époque au gré du renouvellement de leurs contrats de concession entre 1992 et 1995. 

Ce modèle national avait été actualisé en 2007 afin de l’adapter avec les textes législatifs et réglementaires adoptés depuis 1992[4]. Cela étant, nombre d’AODE n’avaient pas procédé à cette mise à jour.

Ces dernières années ce modèle de 1992 était devenu pour certaines clauses obsolète au vu des nombreuses évolutions que le paysage français de l’énergie a connu ces dernières années (ouverture du marché à la concurrence de la fourniture d’électricité, changement de statut d’EDF, publication de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, tarifs sociaux de l’énergie, chèque énergie…).

C’est dans ce contexte qu’après de longues négociations, la FNCCR, France urbaine, Enedis et EDF ont adopté, le 21 décembre 2017, un nouveau modèle de contrat de concession pour le service public du développement et de l’exploitation du réseau public de distribution d’électricité de la fourniture d’énergie électrique aux tarifs réglementés de vente. Ce nouveau modèle se compose précisément d’un accord-cadre quadripartite, d’un modèle de convention de concession, d’un modèle de cahier des charges et des modèles d’annexes à ce dernier. 

L’accord-cadre quadripartite qui accompagne ce nouveau modèle de contrat encourage une renégociation rapide et coordonnée des contrats en vigueur, soit dès 2018, avec pour objectif, dans la mesure du possible, que les contrats soient renouvelés selon le nouveau modèle en vue d’une entrée en vigueur au plus tard le 1er juillet 2021, et ce indépendamment de l’échéance contractuelle des contrats de concession en cours. Cela requerrait donc des AODE concernées par cette dernière situation de résilier leur contrat de concession et ses actes attachés, en cours d’exécution.

Le rôle déterminant des AODE dans les négociations et dans la définition des enjeux énergétiques des territoires

L’adoption de ce nouveau modèle ouvre ainsi la voie à de nombreuses renégociations de contrats de concession d’électricité qui devront être menées par les AODE.

Dans ce contexte, il est important de rappeler le rôle fondamental des AODE, propriétaires des réseaux de distribution d’électricité, en charge d’organiser ce service public local qui recouvre deux missions distinctes (distribution et fourniture) comme défini à l’article L.121-2 du Code de l’énergie.

L’article L. 2224-31 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) fonde la compétence de ces AODE en précisant qu’en leur qualité d’autorités concédantes, elles négocient et concluent les contrats de concession. Le rôle des AODE dans les négociations est ainsi fondamental d’autant qu’elles ne disposent pas du choix du mode de gestion (en régie ou en concession) de leur service public ni, en l’état du monopole légal dont il dispose, du choix de leur gestionnaire de réseau, ni encore de la tarification de ces activités de service public, fixée nationalement.

Si la porte est étroite, les AODE, qui sont des communes, ou leurs établissements publics de coopération (syndicats intercommunaux ou mixtes – souvent à taille départementale – ou métropoles) ou encore des départements (seuls deux l’exerçant aujourd’hui) devront donc cerner avec attention les enjeux en matière de distribution d’électricité et de fourniture d’électricité sur leurs différents territoires et ne pas renoncer par avance à exercer ce pouvoir de discussion, inhérent à leurs missions d’AODE et à la liberté contractuelle qui est la leur comme pour toute collectivité locale.

Pour la plupart d’entre elles, ces enjeux sont maîtrisés, puisque les AODE sont très souvent investies dans leur mission d’autorité concédante et exercent le contrôle du bon accomplissement des missions de service public de leurs concessionnaires.

Ces AODE sont par ailleurs maître d’ouvrage de certains travaux sur le réseau de distribution dans les zones rurales, tandis que la maîtrise d’ouvrage des investissements sur le réseau est assurée par le concessionnaire, gestionnaire du réseau de distribution, en zone urbaine, les AODE conservant toutefois la maîtrise d’ouvrage des travaux d’enfouissement des réseaux pour des raisons dites esthétiques. Ou encore des spécificités ont pu être négociées par certaines AODE pour porter la maîtrise d’ouvrage de certains travaux.

Au vu de ce contexte, le modèle national constituera sans nul doute un document de référence sur lequel les AODE comme les concessionnaires pourront s’appuyer durant leurs négociations. Pour autant, le renouvellement de chaque contrat devra laisser place à des négociations locales[5] adaptées aux enjeux de chaque territoire.

De surcroît, ce modèle ne saurait être figé puisqu’il devra nécessairement s’adapter aux évolutions législatives et réglementaires encore à venir dans le secteur de la distribution et de la fourniture d’électricité aux tarifs réglementés de vente (on pense par exemple déjà au projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) toujours en discussions au Parlement dont le projet issu du Sénat comporte des dispositions sur le sujet des colonnes montantes[6], aux offres de raccordement intelligentes[7]  ou encore à l’avenir des TRV d’électricité à la suite de l’arrêt du Conseil d’Etat du 18 mai 2018, Société Engie et Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (Anode), n° 413688, 414656 (cf. notre commentaire dans la LAJEE n°40 – Juin 2018).

Une étape préalable indispensable à toute discussion : le bilan de fin du contrat de concession en cours

Si la négociation doit viser à aboutir à la rédaction d’un nouveau contrat de concession partagé entre l’autorité concédante et ses concessionnaires, qui sera la base d’une nouvelle relation contractuelle dans le cadre de laquelle le service concédé s’exécutera sur les prochaines années, elle ne doit pas faire oublier une étape préalable essentielle, celle de l’analyse critique de la concession en cours afin d’en dresser un bilan global au plan technique, juridique et financier.

Ce bilan global (qu’on appelle usuellement le bilan de fin de contrat) est l’étape indispensable pour déterminer le « T0 » du futur contrat. Il doit permettre à l’AODE d’identifier les forces et les faiblesses de son contrat de concession actuel en vue d’entamer de nouvelles négociations avec ses concessionnaires.

Le volet juridique du bilan de fin de contrat de concession devra ainsi comporter une analyse juridique des clauses importantes du contrat de concession (obligations des concessionnaires, fin de contrat) de manière à déterminer quels sont les sujets qui devront plus particulièrement faire l’objet de négociations avec les concessionnaires. Il établira les éventuelles difficultés survenues dans l’exécution de la concession pour les éviter à l’avenir. Il déterminera l’état de la répartition de la maîtrise d’ouvrage, dont la vision diverge parfois entre AODE et gestionnaire du réseau.

Au plan technique, le bilan devra dégager les forces et faiblesses en termes de patrimoine et de qualité du service (qualité de la desserte et des prestations du gestionnaire du réseau de distributeur, contenu de l’offre du fournisseur aux tarifs réglementés de vente…).

Enfin, le partage entre l’AODE et les concessionnaires d’un état des lieux financier de l’activité concédée, y compris un état comptable du patrimoine et des origines de son financement, outre le stock des provisions pour renouvellement, en fin de contrat constituent un point central dans les échanges en vue de la conclusion d’un contrat de concession équilibré entre autorité concédante et concessionnaires. Il en va également ainsi du niveau des redevances de concession et autres ressources de l’autorité concédante (« article 8 » du cahier des charges de concession au sens du modèle de 1992) issues du contrat de concession en cours, afin de les confronter aux flux financiers issus du nouveau modèle.

Les enjeux de négociation

Une fois l’analyse de l’existant et de l’état des lieux (forces et faiblesses) de la concession réalisée, l’AODE sera à même de déterminer les axes d’amélioration de la concession qu’elle attend, en cohérence avec les enjeux identifiés sur son territoire.

Naturellement, les évolutions du nouveau modèle national concernent largement ces enjeux. Les sujets de négociation sont de ce fait nombreux. Nous en énumèrerons quelques-uns, sans être exhaustives.

Il en va tout d’abord de la durée du contrat : compte tenu du régime dérogatoire du mode de financement de ces activités de service public d’une part, et de la circonstance que le modèle n’impose pas le retour gratuit des ouvrages concédés en fin de contrat d’autre part, cette durée pourrait être courte. Telle n’est pas la recommandation du nouveau modèle. Chaque AODE devra apprécier l’opportunité d’une durée courte, moyenne ou longue à l’aune des contreparties qui lui seront consenties dans cette négociation et de sa perception de l’évolution possible des enjeux de ces activités de service public dans le temps. Et une durée moyenne ou longue mériterait de porter une attention particulière aux modalités d’évolution de la concession afin de permettre de l’adapter dans le temps (clause de revoyure), de même qu’aux clauses de fin de contrat.

Le périmètre des ouvrages concédés et notamment les modalités d’inventaire des biens (bien de retour, biens de reprise et biens propres), leur valorisation au début, en cours et au terme du contrat et le suivi de leurs origines de financement sont également des sujets majeurs pour que les AODE conservent la maîtrise de cette activité concédée dont les ouvrages sont leur propriété. 

De plus, le modèle introduit des nouvelles dispositions intéressantes concernant les investissements au bénéfice de la concession. Les AODE auront donc à établir un Schéma Directeur des Investissements (SDI) décliné en Programmes Pluriannuels d’Investissements successifs (PPI) et Programmes annuels. Ce SDI constitue ainsi une avancée importante, il est vrai en contrepartie de l’abandon, proposée dans le nouveau modèle, de la constitution pour l’avenir de provisions pour renouvellement des immobilisations et du maintien, entre les mains du concessionnaire, de l’usage du stock des provisions pour renouvellement constituées. A minima, la gouvernance de ces SDI, PPI et Programmes annuels doit être discutée pour y faire une large place à la validation par l’AODE des choix d’investissements et y flécher, pour le sanctuariser, le stock des provisions pour renouvellement qui aura été acté pour demeurer acquis aux usagers qui les ont financées, ou encore pour en garantir le suivi de la bonne exécution et la capacité à sanctionner sa non-exécution.

Le sujet des données est un autre sujet de négociation fondamental, à l’heure de la transition et de la planification énergétiques et du développement des projets de production d’énergies renouvelables dans les territoires, sous maîtrise d’ouvrage publique (directe ou indirecte) comme privée. Sur ce point, le nouveau modèle comprend des dispositions relatives aux données qui doivent être mises à disposition par les concessionnaires à l’autorité concédante et utiles à l’exercice de leurs compétences qui renvoient à des accords à parfaire. Un travail ad hoc doit être mené par les AODE en fonction de leurs ambitions territoriales.

Un autre sujet important concerne évidemment la répartition de la maîtrise d’ouvrage des travaux à réaliser sur le réseau (développement, raccordement, enfouissement) selon les zones concernées et en tenant compte notamment de la réforme récente du dispositif d’aides à l’électrification rurale, ainsi que des évolutions à venir en matière d’usages (développement des énergies renouvelables, déploiement des bornes de recharge des véhicules électriques, etc.). Ce sujet est traité dans le modèle de cahier des charges (article 5), dans son Annexe 1 mais également dans l’accord-cadre national qui comporte de nouvelles propositions de répartition entre autorité concédante et concessionnaire. L’AODE devra ainsi apprécier si elle préfère le statu quo (maintien de son actuelle répartition de la maitrise d’ouvrage) ou une nouvelle répartition issue des propositions du nouveau modèle. Ce choix devrait pourtant pouvoir être librement discuté tant il porte sur l’exercice même du pouvoir d’autorité concédante et organisatrice de la distribution d’électricité.

Enfin, si la majorité des sujets de négociation concernent la mission de distribution d’électricité, l’AODE ne devra pas oublier de mener des négociations avec le concessionnaire en charge de la fourniture d’électricité aux tarifs réglementés de vente, mission qui fait partie intégrante du service public local de l’électricité tel que défini à l’article L.121-2 du Code de l’énergie. De ce point de vue, il pourrait être examinée l’opportunité d’élargir le contenu de l’offre de ce service public local en termes de prestations incluses et de niveau de qualité, afin que ce ne soit pas une offre à minima et donc en extinction, mais une offre dynamique visant à la maîtrise des factures (pilotage des usages, traitement de la précarité énergétique).

En définitive, ce nouveau modèle national de contrat de concession d’électricité doit d’abord offrir aux AODE l’opportunité de dresser un bilan éclairé de la concession en cours avant de décider des orientations souhaitées dans le nouveau contrat de concession, sans se précipiter.

Marie-Hélène PACHEN-LEFEVRE, Associée et Aurélie CROS, Avocate

 

[1] Cf. Communiqué de presse du 26 février 2018 par Territoire d’Energie (FNCCR): https://www.territoire-energie.com/article/electricite-nouveau-contrat-de-concession/ , Cf. communiqué de presse d’Enedis du 3 janvier 2018 https://www.enedis.fr/actualites/un-nouveau-modele-de-contrat-de-concession Cf. communiqué de presse de France Urbaine http://franceurbaine.org/cadre-concession-distribution-publique-fourniture-electricite-aux-tarifs-reglementes-vente-un-accord

[2] Cf. Article Les Echos paru le 21 juin 2016 : « Enedis et élus tentent de s’accorder sur leurs prochains contrats de concession »

[3] Cf. Instruction du 27 juillet 1993 relative à la révision des concessions de distribution publique d’énergie électrique. Projet de modèle de cahier des charges et de documents contractuels pour la concession à Electricité de France des distributions publiques d’énergie électrique 

[4] Ce document modèle dans sa version du 1er juillet 2007 est intitulé « Modèle de cahier des charges de concession pour le service public du développement et de l’exploitation du réseau de distribution d’électricité et de la fourniture d’énergie électrique aux tarifs réglementés ». Il a été mis à jour à la suite de la signature d’un Accord-cadre relatif à la mise à jour juridique du modèle de contrat de concession conclu par la FNCRR et EDF le 5 juillet 2007.  Cet accord-cadre incitait par ailleurs à la départementalisation des autorités concédantes : « Les parties ont, simultanément, retenu une évolution conventionnelle du modèle de 1992 du contrat de concession portant sur la départementalisation des autorités concédantes »

[5] Cf. l’Etude plus approfondie de Pierre Sablière : « Un nouveau modèle de cahier des charges pour la concession des distributions publiques d’électricité dans les trente ans à venir », Lexis Nexis – Energie – Environnement – Infrastructures n°7 – juillet 2018, étude 12

[6] Cf. Article 55 bis AA relatif aux colonnes montantes électriques du projet de loi (Texte n° 145, 2017-2018 modifié par le Sénat le 25 juillet 2018

[7] Délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 8 février 2018 portant proposition d’arrêté sur les principes généraux de calcul de la contribution versée au maître d’ouvrage des travaux de raccordement au réseau public de transport d’électricité

Les journalistes pigistes travaillant à temps partiel ont droit à la prestation partagée d’accueil d’un enfant (PreParE / CLCA)

Dans un jugement du 11 juillet 2018, le tribunal des affaires de la sécurité sociale de Lyon a tranché de manière très claire la question de savoir si les journalistes rémunérés à la pige peuvent bénéficier de la prestation partagée d’accueil du jeune enfant (PreParE ayant remplacé le CLCA) lorsqu’ils réduisent leur temps de travail, et ce alors même qu’ils ne disposent pas d’une attestation de leur employeur.

Pour rappel, les journalistes rémunérés à la pige ne peuvent généralement pas produire une telle attestation du fait qu’ils travaillent en général pour plusieurs employeurs. Faute d’attestation, les CAF refusent régulièrement le bénéfice de la PreParE à ces journalistes, en s’appuyant sur le fait que le Code de la sécurité sociale comporte, dans sa partie règlementaire, des dispositions relatives aux modalités de calcul du temps de travail pour certaines catégories professionnelles particulières, mais pas pour les pigistes.

D’une part, le tribunal des affaires de la sécurité sociale de Lyon affirme que « l’adaptation par voie réglementaire prévue pour certaines catégories ne prive pas les autres travailleurs à temps partiel du bénéfice de la prestation, les dispositions de l’article L.531-4-I-2° [du Code de la sécurité sociale] étant d’application générale aux salariés exerçant une profession à temps partiel ».

D’autre part, le tribunal considère que les bulletins de salaire et l’attestation sur l’honneur produits en l’espèce par la demanderesse démontrent l’activité à temps partiel à 80% et comportent les mêmes indications qu’une attestation d’employeur exigée par la CAF.

Il annule donc le refus du bénéfice de la PreParE.

Un Département peut-il imposer au bénéficiaire du Revenu de Solidarité Active des actions de bénévolat ?

Le Département du Haut-Rhin a approuvé une délibération instaurant le principe du versement revenu de solidarité active (RSA) en contrepartie de la réalisation d’actions de bénévolat, auprès d’une association ou d’une collectivité, à raison d’une moyenne de sept heures par semaine.

Estimant que le Département était incompétent pour définir une nouvelle condition d’attribution du RSA, aucune disposition du Code de l’action sociale et des familles (CASF) ne le prévoyant, le Préfet du Haut-Rhin a déféré au Tribunal administratif ladite délibération.

Pour mémoire, les articles L. 262-1 et suivants du CASF décrivent les modalités d’octroi et de financement du RSA. L’article L. 262-35 du CASF prévoit que le bénéficiaire du RSA conclut avec le Département un contrat qui énumère leurs engagements réciproques en matière d’insertion professionnelle et précise les actes positifs et répétés de recherche d’emploi que le bénéficiaire s’engage à accomplir.

Le Tribunal administratif de Strasbourg et la Cour administrative d’appel de Nancy ont annulé cette délibération au motif que le bénéficiaire du RSA ne peut se voir proposer des actions de bénévolat au titre de son insertion (TA de Strasbourg, 5 octobre 2016, n° 1601891 ; CAA de Nancy, 18 avril 2017, n°s 16NC02674, 16NC02675).

Par un arrêt du 15 juin 2018, le Conseil d’Etat a cassé la décision de la Cour administrative d’appel de Nancy. Le Conseil d’Etat considère en effet que le Département peut prévoir des actions de bénévolat, de manière personnalisée, dès lors qu’elles contribuent à une meilleure insertion professionnelle du bénéficiaire et restent compatibles avec la recherche d’emploi.

Au surplus, si le Conseil d’Etat considère que les dispositions de l’article L. 262-35 du CASF n’interdisent pas à un département de prévoir, dans le contrat conclu avec une personne bénéficiaire du RSA, des actions de bénévolat, il pose cependant trois conditions : le contrat est élaboré de façon personnalisée, les actions de bénévolat contribuent à une meilleure insertion du bénéficiaire et restent compatibles avec la recherche d’emploi.

Si le bénéficiaire vient à ne pas respecter ce contrat, le Président du Conseil départemental pourra ainsi décider de suspendre le versement de son RSA.

Il convient de noter que le Conseil d’Etat différencie deux catégories de bénéficiaires : les bénéficiaires disponibles pour occuper un emploi ou créer leur propre activité et ceux, visés à l’article L. 636-36 du CASF, qui rencontrent des difficultés faisant l’obstacle à leur engagement dans une démarche de recherche d’emploi. Ces derniers ne sont pas concernés par la décision et donc par la possibilité de voir le versement de leur allocation conditionné à des heures de bénévolat.

L’affaire a été renvoyée à la Cour administrative d’appel de Nancy qui doit statuer sur la légalité de la délibération déférée, en tenant compte des conditions posées par le Conseil d’Etat.

Collecte des déchets de construction : validation par le Conseil d’Etat du Décret n° 2016-288 du 10 mars 2016 portant diverses dispositions d’adaptation et de simplification dans le domaine de la prévention et de la gestion des déchets

Malgré un avis favorable du rapporteur public à une annulation partielle, le décret du 10 mars 2016 relatif à l’organisation de la collecte des déchets de chantier par les négoces vient d’être validé par le Conseil d’Etat.

Ce décret, pris en application de la loi n° 2015-992 de 17 août 2015 dite sur la transition énergétique, prévoit une obligation pour les distributeurs de matériaux du bâtiment à organiser la reprise des déchets issus des chantiers de construction.

A l’initiative d’un recours pour excès de pouvoir formé contre ce décret, la Fédération du négoce du bois et des matériaux de construction (FNBM) s’estimant lésée par l’obligation visant les seuls distributeurs qui exploitent un commerce de matériaux de construction à destination des professionnels de collecter les déchets de chantier (article L. 541-10-9 du Code de l’environnement).

Le Conseil d’Etat cite et se rallie à la position du Conseil constitutionnel dans une décision n° 2016-605 QPC du 17 janvier 2017 qui avait jugé la rédaction de l’article L. 541-10-9 du Code de l’environnement conforme à la Constitution, dans laquelle il souligne que « le Conseil constitutionnel a relevé qu’il ressortait des travaux préparatoires qu’en adoptant les dispositions contestées, le législateur avait entendu, pour limiter le coût de transport des déchets issus du bâtiment et des travaux publics et éviter leur abandon en pleine nature, favoriser un maillage de points de collecte au plus près des chantiers de construction ; qu’il avait ainsi poursuivi un objectif d’intérêt général et que, à cette fin, il avait fait peser l’obligation de reprise sur les distributeurs s’adressant à titre principal aux professionnels du bâtiment et de la construction, qui sont les principaux pourvoyeurs des produits, matériaux et équipements de construction dont sont issus ces déchets ».

Le recours en excès de pouvoir du syndicat est ainsi rejeté, le cadre juridique de la collecte des déchets de construction étant désormais fixé.

Montant des pénalités justifié par un retard important dans l’exécution des travaux

La Cour administrative d’appel de Paris a jugé que dans le cas d’un retard particulièrement important dans l’exécution d’un marché de travaux, l’application d’une pénalité représentant 14,2% du montant du marché n’est pas manifestement excessive.

Dans cette affaire, le maître d’ouvrage avait appliqué d’importantes pénalités de retard au titulaire d’un marché portant sur un bâtiment industriel. Ce dernier soulevait le caractère manifestement excessif de ces pénalités devant le juge administratif. La Cour administrative d’appel relève que le cahier des prescriptions spéciales qui prévoyait une pénalité plus sévère que le cahier des clauses administratives générales prévalait sur ce dernier document et que le maître d’œuvre avait déjà tenu compte de diverses contraintes de chantier, d’intempéries et de l’immobilisation forcée du personnel du titulaire pour réduire le nombre de jours de pénalités applicables.

Le maître d’ouvrage était donc fondé à appliquer des pénalités bien plus importantes que le montant retenu in fine. La Cour administrative d’appel juge alors que  « dans ces conditions et compte tenu du retard très important pris par le titulaire dans l’exécution des travaux », la pénalité infligée par le maître d’ouvrage n’est pas manifestement excessive.

Des effets de nullité du congé délivré par le bailleur

Un bailleur a délivré un congé avec refus de renouvellement sans offre d’indemnité d’éviction à son preneur à bail commercial.
Ce dernier a alors assigné son bailleur en annulation de congé et paiement d’une indemnité d’éviction, demandes auxquelles les juges du fond ont fait droit.
Le bailleur s’est alors pourvu en cassation, en soutenant que la nullité du congé avait entraîné sa disparition rétroactive, de telle sorte qu’il ne pouvait avoir été mis au bail lequel s’est poursuivi. En outre selon le bailleur, l’indemnité d’éviction n’était due au preneur que s’il a mis fin au bail et restitué les locaux.
La Cour de cassation rejette le pourvoi, en rappelant que le congé délivré sans motif ou pour motifs équivoques par le bailleur produit néanmoins ses effets et met fin au bail commercial, dès lors que le bailleur est en toujours en droit de refuser le renouvellement du bail à la condition de payer une indemnité d’éviction.
La juridiction précise également à cette occasion que la nullité du congé prévue à l’article L145-9 du Code de commerce est relative, ne pouvant être invoquée que par le preneur lequel peut choisir d’y renoncer en sollicitant une indemnité d’éviction ou bien s’en prévaloir afin que le bail se poursuive. Le maintien du preneur dans les lieux est ainsi sans incidence sur les effets du congé.

Publication de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes

Pour mémoire, la loi NOTRe du 7 août 2015 a rendu le transfert des compétences eau et assainissement obligatoire aux communautés de communes et d’agglomération à compter du 1er janvier 2020.
Après de nombreux débats devant les assemblées parlementaires, ce dispositif a finalement été modifié de la manière suivante : la possibilité d’un report du transfert obligatoire de la compétence au 1er janvier 2026 pour les seules communautés de communes est acté dans l’article 1er, qui en précise les conditions :

– d’une part, avant le 1er juillet 2019, au moins 25 % des communes membres de la communauté de communes, représentant au moins 20 % de la population, devront avoir délibéré en ce sens ;

– d’autre part, les communautés de communes dont les membres souhaitent mettre en œuvre cette faculté de report ne doivent pas exercer ces compétences, à titre optionnel ou facultatif, à la date de publication de la loi, étant précisé que chaque compétence doit être appréciée individuellement.

Par ailleurs, l’article L. 1412-1 du Code général des collectivités territoriales est complété par deux alinéas relatifs à la régie unique :

– une régie unique peut être créée pour l’exploitation des eaux usées et de la gestion des eaux pluviales urbaines ;

– en outre, l’exploitation des services publics de l’eau et de l’assainissement des eaux usées ou de la gestion des eaux pluviales urbaines, lorsqu’elle est assurée à l’échelle intercommunale par un même établissement public de coopération intercommunale ou un même syndicat mixte, peut donner lieu à la création d’une régie unique, dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière, sous réserve que les budgets correspondants à chacun de ces services publics demeurent strictement distincts (second alinéa de l’article 2 de la loi, qui est le troisième et dernier alinéa de l’article L. 1412-1 du Code précité).

En outre, l’article 3 de la loi modifie les articles L. 5214-16 et L. 5216-5 du CGCT relatifs respectivement aux compétences des communautés de communes et des communautés d’agglomération afin de décorréler la compétence assainissement de la gestion des eaux pluviales. En effet, la compétence est désormais définie comme « Assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l’article L. 2224-8 [du CGCT] », article qui ne prévoit pas la gestion des eaux pluviales, cette compétence étant intégrée distinctement dans les compétences des communautés d’agglomération. Les communautés urbaines et les métropoles de droit commun voient aussi le libellé de leur compétence modifié (celui des établissements publics territoriaux de la Métropole du grand Paris en revanche ne l’est pas), afin qu’apparaissent expressément les eaux pluviales urbaines : la compétence assainissement devenant « assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l’article L. 2224-8, gestion des eaux pluviales urbaines au sens de l’article L. 2226-1 ». Cet apport législatif paraît non négligeable, puisqu’il permet de trancher le débat sur l’intégration des « eaux pluviales » dans la compétence « assainissement ».

Enfin, l’article 4 modifie les dispositions relatives au mécanisme spécifique de représentation-substitution des communes au sein des syndicats de communes ou des syndicats mixtes spécifiques à l’exercice des compétences « eau » et « assainissement », qui avait pour conséquence la dissolution des syndicats ne regroupant des communes adhérant qu’à deux EPCI. Désormais, la représentation-substitution devient la règle, y compris lorsque le Syndicat n’intervient sur le territoire que de deux EPCI à fiscalité propre, avec, néanmoins, le maintien d’une possibilité pour une Communauté d’agglomération de solliciter un retrait dérogatoire (article L. 5216-7 du CGCT).

Copropriété : la nullité du mandat de syndic pour défaut d’ouverture d’un compte bancaire doit résulter d’une procédure contradictoire

Le 17 mai 2018, la troisième chambre civile de la Cour de cassation devait se prononcer sur le point de savoir si un copropriétaire pouvait solliciter sur requête la désignation d’un administrateur provisoire (sur le fondement de l’article 47 du décret du 17 mars 1967) au motif que la copropriété serait dépourvue de syndic faute d’ouverture d’un compte bancaire séparé au nom du syndicat.

En l’espèce, un copropriétaire, se prévalant de la nullité du mandat du syndic de copropriété pour défaut d’ouverture d’un compte bancaire séparé, introduit une requête en désignation d’un administrateur provisoire sur le fondement de l’article 47 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi du 10 juillet 1965.

L’article 47 de ce décret prévoit en effet que lorsqu’un syndicat des copropriétaires est « dépourvu de syndic », le président du Tribunal de grande instance, statuant par ordonnance sur requête, désigne un administrateur provisoire chargé d’administrer la copropriété et de convoquer les copropriétaires en assemblée afin de permettre l’élection d’un nouveau syndic.

Pour motiver sa requête, le copropriétaire faisait ainsi valoir que, dans la mesure où le mandat du syndic était nul de plein droit, le syndicat des copropriétaires était dépourvu de syndic au sens de l’article 47 du décret.

La demande du copropriétaire est rejetée en appel,

C’est ainsi que la Cour de cassation considère lorsque la désignation d’un administrateur provisoire est sollicitée sur le fondement de l’article 47 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, motif pris de la nullité de plein droit du mandat du syndic, faute d’ouverture d’un compte bancaire séparé au nom du syndicat à l’expiration du délai de trois mois suivant sa désignation, cette nullité doit avoir été constatée préalablement à l’issue d’une procédure contradictoire ; la Cour d’appel ayant relevé qu’une procédure contradictoire n’avait pas été mise en œuvre, il en résulte que la requête en désignation d’un administrateur provisoire devait être rejetée.

 

Obligation d’obtenir l’autorisation de l’inspecteur du travail en cas de transfert d’un salarié protégé d’une structure privée vers une personne publique

En cas de reprise par une personne publique gestionnaire d’un service public administratif d’une activité exercée jusqu’à présent par une personne privée, l’article L. 1224-3 du Code du travail, prévoit un dispositif spécifique obligeant le repreneur à proposer aux salariés concernés, un contrat de droit public reprenant les clauses substantielles de leur contrat. En cas de refus de cette proposition par des salariés dit « ordinaires », leur contrat prend fin de plein droit selon la jurisprudence désormais constante.

En effet, dans ce cas, il en résulte un licenciement « sui generis », c’est-à-dire que la rupture du contrat de travail survient automatiquement sans qu’il s’agisse d’un licenciement pour motif personnel, ni pour motif économique (Cass., Soc., 30 sept. 2009, n° 08-40.846).

Dans un arrêt du 6 juin 2018, le Conseil d’Etat s’est prononcé pour la première fois sur la question de la procédure applicable dans une telle hypothèse, aux salariés protégés (CE, 6 juin 2018, n° 391860).

Dans cette affaire, l’activité d’une association avait été transférée à une université qui, en application des dispositions de l’article L.1224-3, avait alors proposé un contrat de droit public à une salariée enseignante exerçant un mandat de délégué du personnel.

Estimant que ce contrat apportait des modifications substantielles à son contrat de travail antérieur, l’intéressée a refusé de le signer.

L’université a à ce titre, sollicité l’autorisation de la licencier à l’inspecteur du travail qui a fait droit à cette demande. Toutefois, le Tribunal administratif a annulé cette décision au motif que le licenciement devait selon les juges, intervenir de plein droit conformément à l’article L. 1224-3, et que l’inspecteur du travail n’était donc pas compétent pour connaître d’une telle demande.

La Cour administrative d’appel a annulé le jugement du Tribunal administratif en retenant que la rupture du contrat de travail d’un salarié protégé en vertu de cet article L. 1224-3, relevait bien de la compétence de l’inspecteur du travail.

Le Conseil d’état a approuvé cette solution en soulignant que la rupture du contrat de travail d’un salarié protégé « résultant de son refus d’accepter le contrat qu’une personne publique lui propose en application de l’article L. 1224-3, […] doit être regardée comme intervenant du fait de l’employeur»  et en rappelant qu’en conséquence, au regard de la protection légale dont bénéficient les salariés investis de fonctions représentatives, l’autorisation préalable de licenciement de l’inspecteur du travail est requise.

Ainsi, lorsqu’un salarié protégé refuse son transfert d’une entité du privé vers une structure publique, l’autorité administrative doit être saisie aux fins d’obtenir l’autorisation de procéder au licenciement « sui generis ».

L’obligation  de demander l’autorisation administrative de licenciement dans ce cadre, incombe à la personne publique dans la mesure où comme pour les salariés « ordinaires », c’est elle qui prononce la rupture du contrat suite au refus du salarié.

Dans sa décision, le Conseil d’État apporte en outre, des précisions sur l’étendue du contrôle que doit opérer l’administration. Ainsi, lorsqu’il est saisi d’une demande d’autorisation de rupture du contrat de travail d’un salarié résultant d’une application de L.1224-3 du Code du travail, l’Inspecteur du travail doit vérifier : 

–          d’une part, « que les conditions légales de la rupture du contrat sont remplies, notamment le respect par le nouvel employeur public de son obligation de proposer au salarié une offre reprenant les clauses substantielles de son contrat antérieur sauf si les dispositions régissant l’emploi des agents public ou les conditions générales de leur rémunération y font obstacle »,  étant rappelé qu’une rupture d’égalité manifestement disproportionnée par rapport à la rémunération des agents publics ne doit pas apparaître, les agents non titulaires ne pouvant pas être rémunérés au-delà de ce qui serait versé pour des fonctions et qualification équivalentes ;

–          d’autre part, « que la mesure envisagée n’est pas en rapport avec les fonctions représentatives exercées par l’intéressé ou avec son appartenance syndical », et qu’elle n’est donc pas discriminatoire ;

–          et enfin « qu’aucun motif d’intérêt général ne s’oppose à ce que l’autorisation soit accordée ».

Le Conseil d’Etat rappelle ainsi que le caractère sui generis du licenciement d’un salarié protégé ayant refusé le contrat de droit public qui lui était proposé dans le cadre de la mise en œuvre des dispositions de l’article L.1224-3 du Code du travail, n’exonère pas du respect des protections liées au statut de salarié protégé : l’inspection du travail doit être saisie. Elle vérifiera que l’offre formée par la collectivité reprend les clauses substantielles du contrat antérieur sauf si les dispositions régissant l’emploi des agents public ou les conditions générales de leur rémunération y font obstacle.

 

Quand la Cour de cassation assouplit les modalités de communication du motif économique du licenciement en cas d’acceptation de la CSP

Le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) entraîne, en cas d’adhésion du salarié, la rupture du contrat de travail.

Il s’agit, pour Cour de cassation, d’une modalité du licenciement pour motif économique (Cass., Soc., 17 mars 2015, n° 13-26.941).

Le salarié garde ainsi la possibilité de contester le motif économique de la rupture, bien qu’aucun licenciement pour un tel motif n’ait réellement été prononcé.

Dès lors, les juges du fond dans la droite ligne de la jurisprudence afférente au CRP exigent que l’employeur communique au salarié les motifs économiques de la rupture, et ce au plus tard au moment de son adhésion au CSP.

A défaut d’une telle information, la sanction est particulièrement lourde puisque le licenciement est alors dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass., Soc. 22 septembre 2015, n° 14-16.218).

Dans l’affaire ci commentée l’employeur avait adressé le jour de l’acceptation par le salarié de la CSP, un courrier relatif au motif économique de la rupture, courrier qui était reçu quelques jours plus tard par le salarié.

Le salarié, suivi par les juges du fond avait soutenu qu’il existait une absence d’information sur le motif économique du licenciement, préalablement à la décision du salarié d’accepter la CSP : le licenciement était dès lors dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de préciser que l’énonciation de la cause économique de la rupture par l’employeur devait figurer :

–       soit dans le document écrit d’information sur le CSP obligatoirement remis au salarié concerné par le projet de licenciement ;

–       soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du Code du travail ;

–       soit dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation (Cass., Soc. 22 sept. 2015 n° 14-16.218).

  • – Dans une précédente décision, les juges avaient déjà validé, au regard des obligations précitées, l’information relative au motif économique de la rupture communiquée au salarié dans une lettre lui proposant un poste au titre du reclassement. Cette lettre, qui lui avait été transmise un mois et demi avant la convocation à l’entretien préalable, précisait au salarié que la suppression de son poste était fondée sur une réorganisation de la société liée à des motifs économiques tenant à la fermeture de deux établissements (Cass., Soc. 16 nov. 2016, n° 15-12.293). 

La chambre sociale fait une nouvelle fois preuve de souplesse en considérant qu’un courrier électronique adressé au salarié un mois et demi avant la convocation à l’entretien préalable, comportant le compte-rendu de la réunion avec le délégué du personnel relative au licenciement pour motif économique est suffisant dès lors que ce compte rendu énonce bien les difficultés économiques invoquées ainsi que les postes supprimés.

L’employeur a ainsi satisfait en temps utile à son obligation d’information quant au motif économique de la rupture.