Nouvelle circulaire sur l’application des règles en matière d’aide d’Etat

Par une circulaire datée du 5 février 2019 et mise en ligne le 11 février 2019, le Premier ministre rappelle aux préfets et ministres, le cadre de la réglementation européenne sur l’octroi des aides d’Etat.

Se substituant à la précédente circulaire du 26 avril 2017, l’objectif de cette nouvelle circulaire se traduit par une volonté de préserver la sécurité juridique, et la conformité des dispositifs existants avec la réglementation européenne pour la période 2014-2022.

A ce titre, le Premier ministre souligne la nécessité d’harmoniser les pratiques au sein des services ministériels et ceux des collectivités territoriales ainsi que de renforcer l’expertise de ces services afin d’assurer une conjonction entre l’efficacité de la dépense publique et la sécurité des financements publics aux projets.

Pour atteindre ces objectifs, plusieurs moyens sont préconisés tels que :

  • La sensibilisation des agents publics dans le cadre de leur formation initiale.
  • La désignation de référents « aide d’Etat » au sein de chaque organisme ou direction susceptible de connaitre des dossiers d’aide d’Etat, lesquels devront se rapprocher également du Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) et du Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET) pour rejoindre les réseaux et groupes de travail ad hoc.
  • La consultation des six fiches thématiques (notion, principe, règles procédurales de déclaration, contrôle juridictionnel…) annexées à la circulaire, lesquelles seront régulièrement actualisées au gré des évolutions réglementaires. Ces fiches constituent une sorte de guide permettant aux services intéressés de vérifier si les financements envisagés constituent des aides d’Etat, ou encore si les projets d’aides relèvent des règlements de minimis, des règlements d’exemption par catégories d’aides ou encore de la décision d’exemption concernant les services d’intérêt économique général (SIEG).

Par ailleurs, la circulaire encourage les services intéressés à utiliser prioritairement les possibilités d’exemption de notification prévues par les règlements d’exemption afin d’être épargné de la lourde procédure administrative de notification à la Commission européenne, laquelle peut durer en moyenne entre six et dix-huit mois, notamment dans l’hypothèse d’ouverture d’une procédure formelle d’examen.  

En cas d’impossibilité, les services instructeurs sont invités à recourir à la procédure de « pré-notification » permettant ainsi d’échanger en amont avec la Commission européenne et de limiter les risques éventuels d’incompatibilité de la mesure d’aide projetée.

Enfin, la circulaire souligne le fait que les collectivités publiques doivent également prendre en compte les règles nationales régissant les interventions économiques telles que prévues notamment dans le Code général des collectivités territoriales (CGCT) ou encore par les textes relatifs au droit de la commande publique.

Une association foncière urbaine libre (AFUL), créée pour mener une opération de défiscalisation, peut être valablement constituée par des propriétaires qui ne contribueront pas au financement des travaux  

La Cour de cassation devait se prononcer le 17 janvier 2019, à l’occasion d’une action en responsabilité à l’encontre d’un notaire dans le cadre d’une opération de défiscalisation, sur le point de savoir si une association foncière urbaine libre peut être constituée par des propriétaires qui ne contribueront pas au financement des travaux.

En l’espèce, une société a acquis deux immeubles, qu’elle a entrepris de vendre par lots après division et placement sous le régime de la copropriété.  Afin de pouvoir bénéficier du dispositif de défiscalisation « Malraux », elle a constitué pour chaque immeuble une AFUL.

Une telle AFUL peut régulièrement être constituée entre la société à l’initiative de l’opération, qui à l’époque était encore propriétaire de logements ultérieurement cédés, et le propriétaire d’un local à usage commercial dispensé, au regard de la destination de son lot, à l’obligation de contribuer aux travaux du fait des conditions de défiscalisation.

Les requérants ont reproché à la Cour d’appel d’avoir écarté la responsabilité du notaire alors que l’AFUL n’avait pu être constituée régulièrement puisque l’acquéreur du local commercial participait aux assemblées générales de l’AFUL alors même qu’il était dispensé de l’obligation de contribuer aux travaux.

 A titre de rappel, les AFUL ne constituent qu’une déclinaison particulière des associations syndicales de propriétaires.  Elles sont régies par les dispositions de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 et constituées entre les propriétaires intéressés pour l’exécution des travaux et opérations énumérés à l’article L. 322-2 du Code de l’urbanisme (opérations urbaines de restructuration, d’aménagement ou de restauration légalement énumérées).

Pour un ensemble immobilier nouvellement créée, une association foncière urbaine libre peut ainsi prendre naissance à partir de la première vente de lot pour être valablement formée entre le lotisseur et le premier acquéreur.

La Cour de cassation rejette le pourvoi et confirme l’exact application, par la Cour d’appel, de l’ordonnance du 1er juillet 2004 et de l’article L. 322-1 du code de l’urbanisme en retenant la qualité de propriétaire intéressé par l’exécution des travaux, laquelle n’implique pas leur paiement.

En conséquence, une telle qualité peut donc être reconnue à des personnes qui n’ont pas vocation à participer au financement des travaux.

En conséquence, une association libre, créée pour mener une opération de défiscalisation, peut être valablement constituée par des propriétaires qui ne contribueront pas au financement des travaux.

La qualité de propriétaire intéressé par l’exécution des travaux n’implique pas leur paiement. 

La loi ELAN renforce – un peu – la lutte contre l’occupation illicite de domiciles et de locaux à usage d’habitation

Une réforme des règles applicables en matière d’occupation illicite de la propriété d’autrui était attendue par les propriétaires. Ces derniers regrettaient parfois d’avoir à souffrir d’importants délais procéduraux pour recouvrer la jouissance de leurs biens, notamment une fois que la décision d’expulsion avait été prononcée par le juge.

En effet, lorsque que le propriétaire avait réussi à obtenir d’un juge une décision constatant l’occupation sans droit ni titre de son bien et ordonnant l’expulsion des lieux, la mise en œuvre de cette expulsion demeurait subordonnée au respect de délais légaux prévus par les articles L. 412-1 et L. 412-6 du Code des procédures civiles d’exécution.

Seule une décision spéciale relevant de l’appréciation souveraine du juge pouvait écarter le bénéfice de ces délais en cas de voies de fait.

Dès lors, aucune action ne pouvait être entreprise à l’encontre des occupants avant l’expiration d’un délai de deux mois qui suivait la signification du commandement de quitter les lieux (L. 412-1) ni pendant la période dite de la trêve hivernale (L. 412-6), et ce y compris lorsque les occupants s’étaient introduits sans aucun titre dans les lieux (squat).

Le législateur a donc entendu aménager ces délais en dissociant désormais les occupations illicites qui résultent de la déchéance d’un titre (résiliation du bail d’habitation par exemple) des occupations illicites entreprises sans aucun titre (squat).

Dorénavant, s’agissant des délais de l’article L. 412-1 du Code des procédures civiles d’exécution et si l’expulsion porte sur un lieu habité, le délai de deux mois entre le commandement de quitter les lieux et la mise en œuvre de l’expulsion ne s’appliquera pas lorsque le juge aura constaté que les personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrée dans les locaux par voies de fait – c’est-à-dire sans aucun titre valable.

S’agissant ensuite des délais de l’article L. 412-6 du Code susvisé, le bénéfice du sursis à exécution pendant la période hivernale ne sera plus de droit et sera désormais fonction de la qualité du lieu occupé, à savoir s’il s’agit d’un domicile ou d’un autre lieu.

Le sursis à exécution en période hivernale ne s’appliquera pas lorsque la mesure d’expulsion aura été prononcée en raison d’une introduction sans droit ni titre dans un lieu qui constitue le domicile (personnel ou professionnel) et que cette introduction résultera de voies de fait.

En revanche, concernant l’occupation illicite de tout autre lieu, le juge conservera la faculté de conserver, supprimer ou réduire le bénéfice du sursis à exécution.

 

En conclusion, la loi ELAN permet aux propriétaires d’accélérer la mise en œuvre des mesures d’expulsion en supprimant, dans toutes les hypothèses, le bénéfice du délai de deux mois prévus par l’article L. 412-1 du Code des procédures civiles d’exécution lorsque l’introduction des occupants s’est effectuée par voies de fait.

S’agissant plus spécifiquement de la période hivernale, la loi ELAN accélère également la mise en œuvre des mesures d’expulsion dans les hypothèses où les lieux occupés constituent le domicile personnel ou professionnel d’autrui.

Les autres types d’occupation demeurent quant à elles soumises à l’appréciation souveraine du juge qui peut décider de maintenir, réduire ou supprimer le bénéfice du sursis à exécution au regard des circonstances de chaque litige.

Enfin, il convient de souligner que l’introduction de ces nouvelles dispositions ne privent pas les occupants de leur droit de bénéficier de délais de grâce. Ces derniers peuvent en effet toujours être sollicités par-devant le juge de l’exécution une fois la décision d’expulsion prononcée.

Ressources humaines : les mesures à retenir de la loi « Avenir »

Si la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 dite loi « Avenir » est largement consacrée à la réforme de la formation professionnelle et de l’alternance, d’autres domaines sont impactés. Voici une présentation des mesures à retenir.

Une refonte en profondeur de la formation professionnelle et de l’alternance 

L’objectif de la loi « Avenir » concernant la formation professionnelle et l’alternance est double. Il est à la fois de renforcer et d’accompagner les individus dans le choix de leur formation mais aussi de réformer l’organisation institutionnelle. De nombreuses nouvelles dispositions sont entrées en vigueur au 1er janvier 2019.

Parmi les mesures phares, le compte personnel de formation (CPF) est revisité, le législateur ayant pour objectif de faire du CPF le seul outil de mobilisation à l’initiative du salarié. Les droits inscrits sur le CPF seront comptabilisés en euros et non plus en heures de droit à formation, les personnes susceptibles d’étoffer le CPF seront plus nombreuses ce qui permettra en principe aux salariés de décider de leur avenir professionnel et d’acquérir des compétences quel que soit leur situation de départ. Concernant les modalités d’utilisation du CPF, elles sont considérablement simplifiées pour le salarié. Ce dernier n’a plus à demander l’accord préalable de l’employeur sur le contenu et le calendrier de la formation mais doit simplement lui demander une autorisation d’absence. Le droit de refus de l’employeur est maintenu mais doit être notifié dans un délai de 30 jours calendaires à compter de la réception de la demande, son absence de réponse valant acceptation.

Par ailleurs, le congé individuel de formation (CIF) disparaît au profit du CPF de transition professionnelle prévoyant un accompagnement du salarié dans sa reconversion professionnelle. Les entreprises pourront seulement reporter la demande de leurs salariés de manière motivée mais non la refuser comme cela était auparavant le cas. 

Aussi, les entreprises doivent veiller à remplacer le plan de formation par le plan de développement des compétences qui devient le seul outil « formation » à l’initiative de l’employeur.

Enfin, les entreprises devront être très attentives à leur obligation d’information en matière de formation lors des entretiens professionnels, celle-ci étant renforcée.

Autre sujet largement modifié : l’alternance que ce soit par le biais du contrat de professionnalisation dont la durée maximale est portée à 36 mois (à la place de 24 mois) ou par le biais du contrat d’apprentissage (l’âge maximal pour en bénéficier est porté à 29 ans révolus). De nouvelles règles permettent une rupture du contrat d’apprentissage plus aisée que ce soit du côté du salarié ou de l’employeur.

De surcroît, la loi simplifie le système institutionnel en confiant la gouvernance de la formation à un seul organisme : France compétences, et en mettant en place un collecteur unique : l’URSSAF.

Enfin, une contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance est mise en place : la contribution à la formation professionnelle est peu modifiée mais la taxe d’apprentissage est réaménagée selon deux fractions au lieu de trois.

Ouverture d’un nouveau cas de recours au CDD

A titre expérimental, il sera possible, entre le 1er janvier et le 31 décembre 2019, de conclure un seul contrat à durée déterminée ou un seul contrat de travail temporaire, pour remplacer plusieurs salariés. Ce CDD pourra être mis en place dans les secteurs déterminés par un décret à paraître. Attention, une condition tout de même : ce contrat ne devra pas avoir pour objet ou pour effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

De nouvelles mesures ont été adoptées afin d’inciter les entreprises à ouvrir des emplois aux personnes en situation de handicap 

La loi renforce l’obligation d’emploi des personnes en situation de handicap en modifiant l’appréciation de son périmètre (entreprise et plus établissement) et en renforçant les obligations d’emploi direct des employeurs soumis à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés. Le télétravail est facilité lorsque la demande émane d’un travailleur handicapé ou d’un proche aidant. Enfin, un référent handicap devra être obligatoirement désigné dans les entreprises d’au moins 250 salariés. Concrètement, ce référent aura pour mission d’orienter, d’informer et d’accompagner les personnes en situation de handicap, s’agissant notamment de leurs droits et des interlocuteurs privilégiés et sera sans doute un membre du service des ressources humaines.

Chômage 

La loi étend quelque peu le principe de l’indemnisation chômage. Pour les travailleurs indépendants, une allocation forfaitaire est créée (800 € par mois pendant 6 mois) dans l’hypothèse où l’entreprise est en liquidation ou redressement judiciaire. De leur côté, les salariés démissionnaires deviennent éligibles à l’indemnisation chômage s’ils poursuivent un projet de reconversion professionnelle nécessitant le suivi d’une formation ou d’un projet de création ou de reprise d’entreprise. Le projet devra néanmoins présenter un caractère réel et sérieux attesté par une commission paritaire interprofessionnelle régionale et le salarié démissionnaire devra avoir demandé, préalablement à sa démission, un conseil en évolution professionnelle afin d’établir ce projet. La loi prévoit également des mesures concernant la gestion et le financement de l’indemnisation chômage et des mesures d’accompagnement et de contrôle des demandeurs d’emploi. Les organismes en auto assurance pouvaient être amenés à financer la reconversion professionnelle de leurs salariés démissionnaires. 

Lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes 

A compter du 1er janvier 2019, les obligations de l’employeur, en matière de lutte contre le harcèlement et les agissements sexistes, sont renforcées.

Dans les entreprises employant au moins 250 salariés, un référent chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes doit être désigné. Cette mesure permettra à l’avenir aux salariés victimes de tels agissements d’identifier facilement leur interlocuteur et de pouvoir dénoncer les faits. Si la loi ne précise ni la personne qui peut être nommée « référent » ni la manière dont il est désigné, on peut supposer qu’il pourra être le responsable des ressources humaines, un membre de ce service ou encore un salarié chargé de la prévention des risques psychosociaux dans l’entreprise.

Par ailleurs, la loi prévoit que chaque comité social et économique (CSE) devra désigner parmi ses membres un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. Cette désignation se fera sous la forme d’une résolution adoptée à la majorité des membres présents pour une durée qui prend fin avec celle du mandat des membres élus du comité. Ce référent bénéficiera d’une formation en matière de santé, sécurité et conditions de travail comme tous les membres du CSE. Il faut relever néanmoins que la loi ne prévoit pas d’obligation de désigner un tel référent parmi les membres des délégués du personnel, des comités d’entreprise ou des CHSCT encore en place qui doivent être remplacés par un CSE avant la fin de l’année 2019 même si en pratique ces institutions représentatives du personnel ont déjà un rôle en la matière.

Enfin, l’obligation d’information des salariés par l’employeur est renforcée. Les entreprises doivent informer les salariés, en application de la loi Avenir, des voies de recours civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel et fournir les coordonnées des autorités et des services compétents (décret du 8 janvier 2019).

Cette information doit être délivrée aux salariés, aux personnes en formation ou en stage et aux candidats à l’embauche, à une formation ou à un stage, dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux où se fait l’embauche. L’information peut se faire par tous moyens (affichage mural, site internet/intranet, courriel ou remise d’un document papier), l’essentiel étant de garantie une information effective pour tous.

L’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes 

La loi prévoit des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans l’entreprise afin de rendre l’arsenal juridique existant plus effectif et d’atteindre une égalité réelle (cf. notre LAJ NOVEMBRE 2018). L’égalité salariale devient une obligation de résultat et les entreprises de plus de 50 salariés doivent, à cet effet, publier chaque année des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les hommes et les femmes. Les indicateurs sont au nombre quatre ou de cinq selon la taille de l’entreprise. A ces indicateurs sont attachés des résultats exprimés en pourcentage et traduits selon un système de points. Quel que soit la taille de l’entreprise, un minimum de 75 points devra être atteint pour ne pas être considérée comme défaillante.

Les entreprises doivent mettre à disposition du CSE les indicateurs et le niveau de résultat via la base de données économique et sociale (art. D 1142-5 du Code du travail). Concrètement, une nouvelle rubrique peut être créée dans la BDES ou les indicateurs peuvent intégrer la rubrique « égalité professionnelle » déjà existante. Attention, l’entrée en vigueur de cette nouvelle contrainte légale varie selon la taille de l’entreprise entre le 1er mars 2019 et le 1er mars 2020.

Désormais, si les résultats sont inférieurs à 75 points, l’entreprise aura 3 ans pour se mettre en conformité au risque d’une pénalité financière qui ne pourra excéder 1 % de la masse salariale. Aussi, l’employeur devra veiller à ce que la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle, qui doit en principe être organisée tous les 4 ans minimum, porte sur les mesures de correction et le cas échéant sur la programmation de mesures financières de rattrapage salarial. Si, au terme de la négociation, aucun accord n’est intervenu, un plan pour l’égalité professionnelle pourra être mis en œuvre par l’employeur, sous réserve d’avoir préalablement consulté et recueilli l’avis du comité social et économique.

Détachement 

La loi modifie la définition du travailleur détaché, assoupli certaines règles relatives au détachement (zones transfrontalières, obligations de déclarations) mais renforce les sanctions pour renforcer la lutte contre la fraude.

Par Clara Bellest.

Prochain « mouvement tarifaire » de la CRE : la facture des abonnés aux tarifs réglementés de vente d’électricité va encore augmenter en 2019

La Commission de Régulation de l’Energie (ci-après la « CRE ») a publié le 30 janvier dernier un document de préparation relatif à la future délibération portant proposition de Tarifs Réglementés de Vente d’Electricité (ci-après les « TRVE ») en vue d’une audition qui s’est tenue le 31 janvier 2019.

Cette audition a précédé la future proposition de tarification des prix réglementés de l’électricité de la CRE, prévue pour le 7 février prochain (jour de la publication de la présente lettre d’actualités), qui sera adressée aux ministres de l’énergie et de l’économie en vertu de l’article L. 337-4 du Code de l’énergie.

Pour rappel, les TRVE peuvent bénéficier aux abonnés résidentiels et professionnels souscrivant à une puissance électrique inférieure ou égale à 36 kilovoltampères, soit à destination des foyers résidentiels français et des petites entreprises.

Pour en fixer le montant, la CRE fait application d’une méthode de tarification « par empilement en niveau et en structure » des TRVE depuis 2016. L’objectif de la méthode est d’atteindre la « contestabilité » des TRVE par des offres de marché des concurrents d’EDF à un niveau inférieur ou égal au TRVE (voir CE, juge des référés, 7 janvier 2015, ANODE, n° 386076).

Partant, cette tarification « empile », en vertu de l’article L. 337-6 du Code de l’énergie, les coûts de la société EDF, relatifs à l’approvisionnement en énergie et en capacité, à l’acheminement de l’électricité, ainsi que ses coûts de commercialisation et la rémunération normale de l’activité de fourniture (cf. article R. 337-19 Code de l’énergie).

Dans le document commenté, la CRE envisage, pour le prochain « mouvement tarifaire », une augmentation importante des TRVE résidentiel et non résidentiel, à hauteur de de 7,7 % HT soit 5,9 % TTC. Début 2018, la CRE avait également proposé une augmentation des TRVE pour l’année 2018, mais d’une ampleur bien moindre (notre Brève du 8 février 2018).

La CRE explique cette nouvelle hausse par l’influence déterminante sur les prix de l’électricité de l’augmentation des prix de l’énergie sur les marchés de gros et des prix moyens des garanties de capacité, constatée à l’échelle européenne, elle-même due à une hausse conjoncturelle des prix des matières premières au niveau mondial depuis janvier 2018.

En outre, la CRE souligne que la hausse des prix de l’électricité sur les marchés de gros est également à l’origine du dépassement du plafond de l’Accès Régulé à l’Energie Nucléaire Historique (ci-après l’« ARENH ») pour l’année 2019, objet de la réforme du dispositif de l’ARENH analysée par l’Autorité de la concurrence le mois dernier (voir notre brève de la présente lettre à ce sujet).

Malgré tout, la CRE se veut rassurante en soulignant, dans le document commenté, que « le prix de l’électricité en France pour les consommateurs résidentiels demeure compétitif malgré les hausses envisagées », en particulier du fait « des conditions économiques de production d’un parc nucléaire partiellement amorti ».

Cette hausse des TRVE pourrait être applicable dès le 1er mars 2019.

Mais, outre la question de son niveau, c’est surtout le débat sur le maintien des TRVE qui  se poursuit avec l’approbation récente en commission du Parlement européen de la proposition de directive sur le marché intérieur de l’électricité du Paquet « Une énergie propre pour tous les Européens » (cf. communiqué de presse de la CRE du 23 janvier 2019 et nos Brèves du 4 octobre 2016 et du 10 janvier 2019).

Et les parlementaires français discutent déjà de la question à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (dit « PACTE »), actuellement en 1ère lecture au Sénat, afin de mettre en conformité les TRV d’électricité et de gaz avec le droit européen à la suite de la décision du Conseil d’Etat du 18 mai 2018 (voir notre Focus du 7 juin 2018 à ce sujet).

Position de l’Autorité de la concurrence sur les propositions du Gouvernement pour aménager le dispositif de l’ARENH

Par un avis du 21 janvier dernier, l’Autorité de la concurrence a émis un avis partagé sur le futur dispositif de Accès Régulé à l’Energie Nucléaire Historique (ci-après l’« ARENH ») proposé par le Gouvernement par la voie d’un projet de décret en Conseil d’Etat.

Ce projet de décret a déjà fait l’objet d’une délibération de la Commission de régulation de l’énergie (ci-après la « CRE ») du 25 octobre 2018 portant avis sur le projet de décret en Conseil d’État pris en application de l’article L. 336-10 du Code de l’énergie relatif à l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique (voir notre brève du 8 novembre 2018 sur le sujet).

C’est donc au tour de l’Autorité de la concurrence d’être saisie de la question par le Gouvernement, question cruciale puisque les demandes d’ARENH des fournisseurs alternatifs (hors filiales EDF) pour l’année 2019 ont dépassé, pour la première fois, le plafond législatif de l’ARENH fixé à 100 TWh.

L’objet du projet de décret est donc d’adapter le dispositif de l’ARENH à cette situation inédite par deux séries de mesures : (i) la suppression du guichet intermédiaire à mi-année et le séquencement des demandes par trois guichets par an, et (ii) une nouvelle méthode tarifaire pour prendre en compte le dépassement du plafond de l’ARENH, réduisant de facto le caractère « asymétrique » de l’ARENH (selon les mots de l’Autorité) entre EDF et les fournisseurs alternatifs.

Dans son avis commenté, l’Autorité de la concurrence émet un avis favorable à la modification de la structure des guichets de l’ARENH à la double condition que la CRE poursuive sa surveillance étroite du fonctionnement des guichets, et que le Gouvernement étudie une solution alternative, que lui propose l’Autorité.

En revanche, elle émet un avis défavorable sur la réduction du caractère « asymétrique » de l’ARENH susvisé. Selon l’Autorité, le projet de décret aura pour conséquence de faire supporter la charge financière du dépassement du plafond de l’ARENH sur les consommateurs au travers des tarifs réglementés de vente d’électricité, et ce en application de l’article R. 337-19 du Code de l’énergie[1].

En cela, l’avis de l’Autorité de la concurrence rejoint déjà la future proposition de tarifs réglementés de vente de la CRE prévue pour le 7 février 2019 (voir notre brève de la présente lettre à ce sujet).

Pour conclure, l’Autorité de la concurrence propose au Gouvernement de renoncer à traiter le dépassement du plafond de l’ARENH par décret et d’en profiter pour envisager une réforme plus globale du dispositif de l’ARENH par l’adoption d’une loi.

 

[1] L’article R. 337-9 du Code de l’énergie prévoit que le niveau des tarifs réglementés de vente d’électricité est déterminé, en outre, par « le coût de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (…) déterminé (…), compte tenu, le cas échéant, de l’atteinte du volume global maximal d’électricité nucléaire historique (…) ».

Publication du projet de Programmation Pluriannuelle de l’Energie pour les périodes 2019-2023 et 2024-2028

Le 25 janvier 2019, le Ministre en charge de l’Energie a publié le projet de Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour les périodes 2019-2023 et 2024-2028.

Pour mémoire, la PPE est l’outil de pilotage de la politique énergétique créé par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte  (loi TECV). Elle fixe les priorités d’action des pouvoirs publics dans le domaine de l’énergie afin d’atteindre les objectifs de politique énergétique définis par la loi.

Le projet de PPE rendu public le 25 janvier dernier a pour objet d’actualiser la programmation prévue pour la période 2019-2023 qui avait déjà fait l’objet d’un débat public et d’une consultation au cours de l’année 2016 et, de formuler des propositions pour la période suivante correspondant aux années 2024 à 2028.

Un débat public sur la révision de la PPE avait été organisé de mars à juin 2018 et avait abouti à une décision du ministre de la transition écologique et solidaire du 30 novembre 2018 ayant pour objet de retranscrire les observations du public recueillis par la Commission nationale du débat public (voir notre Lettre d’actualités juridiques énergie et environnement du mois de janvier 2019).

Conformément à ce que prévoyait cette décision du 30 novembre 2018, le public est désormais invité à réagir sur le projet de PPE élaboré par le Ministre, à la fois en ce qui concerne l’actualisation de la période 2019-2023 et la nouvelle période 2024-2028.

Parmi les objectifs chiffrés figurant dans cette PPE, on peut notamment relever les données suivantes :

  • Consommation finale d’énergie : Baisse de 7% en 2023 et de 14% en 2028 par rapport à 2012 ;
  • Consommation primaire des énergies fossiles : baisse de 20% de la consommation primaire d’énergies fossiles en 2023 et de 35 % en 2028 par rapport à 2012 ;
  • Émissions de gaz à effet de serre issues de la combustion d’énergie : 277 MtCO2 en 2023 227 MtCO2 en 2028, Soit une réduction de 14 % en 2023 et de 30 % en 2028 par rapport à 2016 (322 MtCO2) ;
  • Consommation de chaleur renouvelable : consommation de 196 TWh en 2023 Entre 218 et 247 TWh en 2028 Soit une augmentation de 25 % en 2023 et entre 40 et 60 % en 2028 de la consommation de chaleur renouvelable de 2016 (155 TWh) ;
  • Production de gaz renouvelables : production de biogaz injecté à hauteur de 14 à 22 TWh en 2028 sous l’hypothèse d’une forte baisse des coûts (35 à 55 fois la production de 2017) ;
  • Capacités de production d’électricité renouvelables installées : 74 GW en 2023, soit + 50 % par rapport à 2017, et 102 à 113 GW en 2028, soit un doublement par rapport à 2017 ;
  • Capacités de production d’électricité nucléaire : 4 à 6 réacteurs nucléaires fermés d’ici 2028 dont ceux de Fessenheim et 14 réacteurs nucléaires d’ici 2035, date d’atteinte d’une part de 50% d’électricité nucléaire dans le mix électrique ;
  • Croissance économique : hausse de 1,3 point de PIB en 2023 par rapport au scénario tendanciel, et de 1,9 point en 2028 ;
  • Emplois Création d’environ 246 000 emplois en 2023 par rapport au scénario tendanciel et de 413 000 emplois en 2028 ;
  • Revenu disponible brut des ménages : hausse du pouvoir d’achat des ménages de 1,1 point en 2023, par rapport au scénario tendanciel et de 2,2 points en 2028.

Parmi les actions identifiées pour atteindre ces différents objectifs, le projet de PPE décrit notamment les actions transversales qui seront mises en œuvre pour réduire les consommations finales d’énergie notamment dans l’industrie, les actions liées aux consommations énergétiques des bâtiments, les mesures destinées à réduire les consommations d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre dans le transport, les mesures transversales pour développer la chaleur renouvelable ou encore les mesures pour développer les biocarburants.

Ce projet de PPE va désormais donner lieu à des avis des instances suivantes :

  • l’Autorité environnementale sur l’Évaluation Environnementale Stratégique ;
  • le Conseil national de la transition écologique ;
  • le Conseil supérieur de l’énergie ;
  • le Comité d’experts pour la transition énergétique ;
  • le Comité de gestion de la CSPE ;
  • le Comité du système de distribution publique d’électricité.

Et, lorsque ces consultations seront réalisées, le public sera invité à réagir sur le projet, éclairé notamment de l’avis de l’Autorité environnementale.

Certificat de projet : l’absence d’intérêt à agir des associations de défense de l’environnement et des voisins du projet (implantation d’éoliennes)

Le 27 décembre 2018, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté pour défaut d’intérêt à agir, le recours contre deux arrêtés préfectoraux délivrant à la Société Abowind deux certificats de projet relatifs à la construction d’un parc éolien, formé par une association de défense de l’environnement ainsi que par des riverains situés à proximité de la zone sur laquelle devait être implantée les éoliennes.

A cet égard, on rappellera que les certificats de projets peuvent être délivrés, à titre expérimental dans certaines régions, pour des projets nécessitant la délivrance par celui-ci d’au moins une autorisation régie par le code de l’environnement, le code forestier ou le code de l’urbanisme (article 1er de l’ordonnance du n° 2014-356 du 20 mars 2014). En substance, ces certificats permettent de donner les informations nécessaires au porteur sur le régime, les procédures, les décisions qui s’appliquent au projet en cause. Le certificat de projet comporte également, pour chacune des étapes des procédures relevant de la compétence du préfet de département, un engagement sur un délai maximal d’instruction, sous réserve de prorogations ou d’interruptions de délai.

Au regard du contenu de ce certificat, le juge a alors considéré que  « la qualité des informations mentionnées par le certificat au titre du I de l’article 2 précité ne peut affecter que le porteur du projet, de même que les engagements sur les délais maximaux d’instruction pris au titre du II du même article, et la circonstance que les dispositions législatives et réglementaires régissant les procédures et décisions administratives nécessaires à la mise en œuvre du projet à la date de notification du certificat restent en principe applicables à ce projet dès lors que la demande est adressée à l’administration dans le délai mentionné à l’article 3 précité ». Pour ces raisons, le juge a estimé que les requérants ne justifiaient d’aucun intérêt à agir contre les arrêtés préfectoraux délivrés au profit de la Société Abowind.

Economie circulaire – Le projet de loi reporté ?

Un projet de loi sur l’économie circulaire est en cours de rédaction par le gouvernement. Sans avoir pris connaissance du texte, on relèvera que, selon les services de l’Etat, ce projet de loi viserait à renforcer les obligations en matière de tri à la source « en imposant la production de certificats par [les] entreprises et en encourageant la valorisation vertueuse des biodéchets » (Communiqué de presse du Ministère de la Transition écologique et solidaire, 31 janvier 2019), dans le cadre d’une grande stratégie pour l’économie circulaire initiée en avril 2018. La consultation publique qui a eu lieu à partir de décembre 2017 avait déjà permis de proposer 50 mesures regroupées dans la Feuille de route Economie Circulaire (FREC) du 23 avril 2018, afin de passer d’un modèle économique linéaire « fabriquer, consommer, jeter » à un modèle circulaire qui intègrera l’ensemble du cycle de vie des produits de leur écoconception à leur consommation en passant par leur gestion (Feuille de route économie circulaire (FREC), Ministère de la Transition écologique et solidaire, avril 2018).

D’après les informations recueillies par la lettre d’information Déchets Info, le projet comporterait six articles dont certains prévoiraient d’autoriser le gouvernement à recourir à des ordonnances pour légiférer sur un certain nombre de sujets tels que « la consigne de tri, la valorisation énergétique, le tri mécano-biologique (TMB), les biodéchets, la gouvernance des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP), les sanctions des éco-organismes, etc. » (Le projet de loi « économie circulaire » du Gouvernement, Déchets infos, 23 janvier 2019).

La secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, Brune Poirson, justifie ce choix par une volonté de contourner l’influence des lobbies sur les débats parlementaires (Projet de loi sur l’économie circulaire : des ordonnances pour contrecarrer les lobbies ?, Banque des territoires, 24 janvier 2019). Le Sénat a immédiatement fait part de son mécontentement dans un communiqué de presse du 24 janvier 2019 et deux sénateurs, Hervé Maurey et Didier Mandelli ont adressé un courrier à la secrétaire afin de lui signifier leur opposition totale au recours aux ordonnances (Sénat, Communiqué de presse du 24 janvier 2019).

La secrétaire d’Etat à l’Ecologie a finalement annoncé le 5 février dernier que la question des déchets et de l’économie circulaire serait intégrée au « grand débat national » (Twitter de Brune Poirson). Le projet de loi sur l’économie circulaire devrait donc être retardé.

Loi de finances pour 2019 : les mesures à portée environnementale

La loi de finances (LFI) pour 2019 (loi n° 2018-1317) a été adoptée le 28 décembre 2018 et publiée le 30 décembre suivant. Elle comporte plusieurs dispositions à portée environnementale parmi lesquelles on distinguera en particulier celles relatives à la qualité de l’air (I), celles concernant la collecte et le traitement des déchets (II), celles portant sur la biodiversité (III), ainsi que des mesures en matière d’écologie et de biodiversité (IV). Sans développer l’ensemble des mesures adoptées, il convient de présenter celles qui nous paraissent les plus impactantes pour les collectivités publiques.

I/ Les mesures fiscales relatives à la qualité de l’air

Un certain nombre de dispositions vise à réduire la pollution atmosphérique.  

1/ En premier lieu, dans le but de réduire l’impact du transport routier, la loi adopte des mesures visant à développer le covoiturage ainsi que les aides à certains salariés pour le paiement de leur carburant et la recharge de leurs véhicules électriques.

En effet, en application de l’article L. 3261-2 du Code du travail, les frais de transport des salariés qui utilisent leur véhicule personnel pour se rendre au travail peuvent être en partie pris en charge par l’employeur. De telles aides sont également versées par les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Or l’article 81 du Code général des impôts (CGI), qui liste les dépenses non fiscalisées, modifié par l’article 3 de la LFI, prévoit désormais qu’en l’absence de prise en charge des frais précités par l’employeur, les aides versées par les collectivités sont défiscalisées. Plus précisément, cette défiscalisation concerne, d’une part, des aides prenant en charge une partie des frais de carburant ou d’alimentation de véhicules électriques engagés par les salariés situés à une distance d’au moins 30 kilomètres de leur lieu de travail. D’autre part, sont également défiscalisées les aides visant à couvrir une partie des frais d’un conducteur en covoiturage quelle que soit la distance, mais dans la limite de 240 € par an.

2/ En deuxième lieu, mesure très médiatisée et contestée, le gel de la hausse de la taxe carbone au sein de la taxe intérieure de consommation (TICPE) est finalement avancé au 1er janvier 2019 au lieu du 1er janvier 2020 (article 64 LFI modifiant l’article 265 du Code des douanes).

3/ En troisième lieu, une nouvelle taxe sur les hydrofluorocarbones est créée. Cette taxe, définie par le nouvel article 302 bis F du CGI concerne plus précisément les substances, ou des mélanges contenant l’une de ces substances, énumérées dans la section 1 de l’annexe I du règlement (UE) n° 517/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux gaz à effet de serre fluorés. Elle sera applicable à compter du 1er janvier 2021 et sera due par les personnes qui réalisent la première livraison des substances selon un tarif fixé par tonne équivalent CO2.

II/ Les mesures fiscales relatives à la collecte et au traitement des déchets

Plusieurs mesures de la LFI pour 2019 s’inscrivent dans la perspective d’une meilleure gestion de la collecte et du traitement des déchets.

1/ D’abord, plusieurs dispositions légales relatives à la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) sont modifiées afin de favoriser l’instauration par les collectivités territoriales de la tarification incitative de TEOM, dénommée TEOMi.

En effet, sur ce point, on rappellera que les collectivités territoriales et leurs groupements qui assurent, conformément à l’article L. 2224-13 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), la collecte et le traitement des déchets ménagers, peuvent instituer la taxe d’enlèvement des ordures ménagères prévue à l’article 1520 du CGI. Cette taxe doit couvrir une partie de leurs dépenses liées à ce service public. La collectivité peut, par ailleurs, ajouter à cette TEOM une part incitative qui est alors « assise sur la quantité et éventuellement la nature des déchets produits, exprimée en volume, en poids et en nombre d’enlèvements » (article 1522 bis du CGI).

Pour encourager l’application de cette part incitative, l’article 23 de la LFI modifie l’article 1636 B undecies du CGI qui prévoit désormais que pour la première année d’application de TEOMi, le produit de celle-ci peut excéder celui de la TEOM appliquée l’année précédente, dans une limite de 10%. De plus, les dépenses directement liées à la définition et aux évaluations du programme local de prévention de déchets ménagers sont désormais expressément incluses dans le champ des dépenses financées par la TEOM (article 1520 du CGI tel que modifié par l’article 23 de la LFI). La baisse temporaire à 2% (au lieu de 3,6%) des frais de gestion perçus par l’Etat pour le recouvrement de la TEOMi devrait, enfin, également permettre aux collectivités d’absorber l’éventuel surcoût engendré par la mise en place du dispositif (article 1641 I A h du CGI tel que modifié par l’article 23 I 3° de la LFI), ainsi que l’indique le Ministère de la Transition écologique et solidaire (Dossier de presse, Projet de loi de finances 2019, Présentation du budget du MTES, sept. 2018).

2/ En deuxième lieu, la composante « déchet » de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) est renforcée. En effet, l’article 24 de la LFI modifie le régime de la TGAP « déchets » afin de favoriser le recyclage de ces derniers par les collectivités territoriales.

A cette fin, la loi prévoit une hausse générale des tarifs de la taxe plus importante que ce qui était jusqu’alors prévu par l’article 266 nonies du Code des douanes, à partir de 2021 et jusqu’en 2025 dans le but « d’assurer que le coût du recyclage soit inférieur à celui des autres modalités de traitement des déchets » (Rapport n°1302 fait au nom de la Commission des finances, Tome II, Assemblée Nationale, 11 octobre 2018. A compter du 1er janvier 2026, « les tarifs seront relevés, chaque année, dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année » (article 266 nonies 1 bis du Code des douanes).

Les collectivités d’outre-mer se voient, quant à elles, appliquer des tarifs différents de ceux en vigueur en métropole (article 266 nonies 1 A i alinéa 1 du Code des douanes). Elles bénéficient également d’une nouvelle exonération pour « les réceptions des déchets utilisés pour produire de l’électricité distribuée par le réseau dans ces territoires lorsqu’elles sont réalisées dans les conditions prévues au IV de l’article 266 sexies » (article 266 nonies 1 A i alinéa 2 du Code des douanes).

Enfin, le régime des exonérations et exemptions est modifié. La taxe est ainsi de nouveau applicable à la réception de matériaux ou de déchets inertes, ainsi qu’aux quantités de déchets de produits hydrocarbures prévus à l’article 265 3° alinéa 2 du Code des douanes (article 24 LFI abrogeant le III de l’article 266 sexies du Code des douanes).

Plusieurs catégories de réception de déchets bénéficient par ailleurs d’une nouvelle exonération. Ainsi, on peut citer, à titre d’exemple, l’application d’exonérations :

  • « Aux réceptions de déchets qui ne se décomposent pas, ne brûlent pas et ne produisent aucune autre réaction physique ou chimique, ne sont pas biodégradables et ne détériorent pas d’autres matières avec lesquelles ils entrent en contact, d’une manière susceptible d’entraîner une pollution de l’environnement ou de nuire à la santé humaine » (article 266 sexies 1 undecies) ;
  • « Aux réceptions de déchet dont la valorisation matière est interdite ou dont l’élimination est prescrite » (article 266 sexies 1 duodecies) ;
  • « Aux réceptions de déchets en provenance d’un dépôt non autorisé de déchets abandonnés dont les producteurs ne peuvent être identifiés et que la collectivité territoriale chargée de la collecte et du traitement des déchets des ménages n’a pas la capacité technique de prendre en charge. L’impossibilité d’identifier les producteurs et l’incapacité technique de prise en charge des déchets sont constatées, dans des conditions précisées par décret, par arrêté préfectoral, pour une durée ne pouvant excéder trois mois, le cas échéant, renouvelable une fois » (article 266 sexies 1 terdecies) ;
  • « Aux installations exclusivement utilisées pour les déchets que l’exploitant produit » (article 266 sexies 1 quaterdecies).

L’arrêté du 31 décembre 2018 pris pour l’application des articles 266 sexies et 266 nonies du Code des douanes, apporte par ailleurs une précision essentielle s’agissant de l’exonération fixée à l’article 266 sexies point II 1 duodecies, puisqu’elle n’est applicable qu’aux déchets listés à l’article 2 dudit arrêté qui remplissent par ailleurs les deux conditions suivantes : 

  • « les déchets sont réceptionnés dans une installation de stockage de déchets autorisée en application du titre Ier du livre V du Code de l’environnement pour ladite réception, ou sont transférés vers une telle installation située dans un autre Etat ;
  • les déchets sont issus d’une collecte séparée ou d’un tri et n’ont pas été intentionnellement mélangés avec d’autres déchets ne relevant pas de la liste de l’article 2 du présent arrêté ».

Enfin, l’exemption en matière de déchets contenant de l’amiante est élargie puisque qu’elle s’applique désormais  « aux réceptions de déchets de matériaux de construction et d’isolation contenant de l’amiante et aux déchets d’équipement de protection individuelle et de moyens de protection collective pollués par des fibres d’amiante » (article 266 sexies 1 ter), alors qu’elle était auparavant restreinte « aux déchets d’amiante liés à des matériaux de construction inertes ayant conservé leur intégrité (amiante-ciment) ».

3/ On notera également qu’à compter du 1er janvier 2021, un taux réduit de TVA de 5,5% sera applicable aux prestations de collecte séparée, de collecte en déchetterie, de tri et de valorisation matière des déchets des ménages et des autres déchets que les collectivités mentionnées à l’article L. 2224-13 du CGCT peuvent collecter et traiter. Les prestations qui ne seront pas mentionnées à l’article 278-0 bis du CGI, relatif aux produits et opération soumis au taux de 5,5% de TVA, tel que modifié par l’article 190 de LFI, resteront quant à elles soumises au taux réduit de 10% (article 279 h du CGI).

4/ Enfin, les communes et intercommunalités peuvent, sur délibération du conseil municipal, instaurer une taxe de balayage. La LFI transforme cette taxe dans un objectif d’amélioration de sa gestion. Ainsi, pour les communes ayant institué à la fois la taxe de balayage et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), ces deux taxes sont fusionnées. Il en est de même pour les dépenses directes et indirectes financées par ces deux taxes (article 191 de la LFI modifiant l’article L. 2333-97 et L. 2313-1 du CGCT).

III/ les mesures relatives aux risques naturels et à l’eau

1/ Il faut relever en premier lieu un changement dans le fonctionnement du Fonds de prévention des risques naturels, dit « Fonds Barnier ». En effet, face à l’accroissement des risques liés au changement climatique, le fonds devrait être particulièrement mobilisé en 2019. Ainsi, dans les zones exposées au risque sismique, le taux maximal d’intervention est augmenté de 50 à 60% pour les études et travaux de prévention du risque sismique relatifs aux établissements d’enseignement scolaire. En cas de travaux de réduction de la vulnérabilité aux inondations, les exploitants et utilisateurs sont désormais éligibles au fonds, en plus des propriétaires qui bénéficiaient déjà de ce soutien (article L. 561-3 I 6° a du Code de l’environnement).

Selon le même article la contribution du fonds aux études et travaux s’élève désormais à 80% des dépenses éligibles réalisées sur des biens à usage d’habitation ou à usage mixte, au lieu de 40% précédemment, et à 50% pour les études de diagnostic de la vulnérabilité des biens.

Enfin, les différents plafonds d’indemnisation sont révisés. En particulier, grâce à un plafond pluriannuel de 75 millions d’euros à partir du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2023, le fonds pourra soutenir davantage le renforcement des digues domaniales avant leur transfert aux collectivités locales dans le cadre de la réforme de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations (Gemapi). Néanmoins, on relèvera que le financement global des actions par le fonds sera limité à 105 millions d’euros par an, au lieu de 125 auparavant.

2/ Parmi les taxes supprimées par la LFI car considérées comme présentant un faible rendement, on relèvera plus particulièrement celles perçues par Voies navigables de France (VNF). Ainsi, jusqu’au 31 décembre 2018, VNF percevait une taxe sur les titulaires d’ouvrages hydrauliques destinés à prélever ou à évacuer des volumes d’eau sur le domaine public fluvial qui lui est confié (article L. 4316-3 du Code des transports). L’article 26 de la LFI supprime cette taxe qui est remplacée par une redevance de prise et de rejet d’eau.

3/ Enfin, l’article 195 de la LFI supprime la redevance pour obstacle sur les cours d’eau à compter du 1er janvier 2020. Elle était « due par toute personne possédant un ouvrage constituant un obstacle continu joignant les deux rives d’un cours d’eau » (article L. 213-10-11 du Code de l’environnement).

IV/ Les mesures pour l’écologique et la biodiversité

1/ On notera d’abord que l’article 234 de la loi de finances modifie l’article L. 213-10-8 du Code de l’environnement relatif à la redevance pour pollutions diffuses, perçue par les agences de l’eau, afin de la rendre plus dissuasive. Cette redevance est due par les personnes qui acquièrent des produits phytopharmaceutiques ou des semences traitées avec des produits phytopharmaceutiques ou encore celles qui commandent une prestation de traitement de semence au moyen de ces produits. Son assiette, modifiée par la LFI, repose sur la masse de substances contenues dans les produits. En application des nouvelles dispositions légales, les substances concernées sont des substances cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques (CMR), toxiques pour certains organes cibles, toxiques pour le milieu aquatique ou dont la substitution est envisagée.

La liste de ces substances devra être actualisée par un arrêté conjoint des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture.

Le taux de redevance est également modifié par la LFI : le taux retenu varie désormais, selon les substances concernées, entre 0,90 et 9€ par kilogramme conformément à l’article L. 213-10-8 du Code de l’environnement.

2/ Il faut finalement relever plusieurs mesures qui œuvrent en faveur de la biodiversité.

D’abord, le financement du programme national visant à la réduction de l’usage des pesticides (plan Ecophyto) dans l’agriculture et à la maîtrise des risques y afférents est pérennisé. En effet, le financement de ce programme par une partie de la redevance pour pollutions diffuses, initialement prévu pour une période transitoire de 2012 à 2018, est confirmé. La partie de la redevance sera ainsi versée à l’Agence française pour la biodiversité (AFB) pour lui permettre de financer ce programme dans la limite d’un plafond de 41 millions d’euros (article L. 213-10-8 C. env. tel que modifié par l’article 233 de la LFI).

De plus, les modalités de contributions des agences de l’eau à l’AFB et à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), instaurée par l’article 135 de la LFI pour 2018 (loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017), sont précisées. Cette contribution sera fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l’écologie et du budget qui « fixe le montant de cette contribution, en précisant les parts allouées à l’Agence française pour la biodiversité et à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, et la répartit entre les agences de l’eau, au prorata de leur part respective dans le produit total prévisionnel pour l’année concernée des redevances mentionnées à l’article L. 213-10 du Code de l’environnement ». 

Enfin, on relèvera qu’est instituée, à compter de 2019, « une dotation budgétaire destinée aux communes dont une part importante du territoire est classée en site Natura 2000 » (article 256 de la LFI). Cette dotation est destinée aux communes de moins de 10 000 habitants dont le territoire est couvert à plus de 75% par un site Natura 2000.

3/ Par ailleurs, un rapport du gouvernement intitulé « Financement de la transition écologique : les instruments économiques, fiscaux et budgétaires au service de l’environnement et du climat » devra être annexé chaque année au projet de la de finance (PLF) (article 206 LFI). Il devra présenter :

  • un état de l’ensemble des financements publics en faveur de l’écologie, de la transition énergétique et de la lutte contre le changement climatique inscrits dans la loi de finances de l’année en cours et dans le PLF ;
  • un état évaluatif des moyens financiers publics et privés mis en œuvre pour financer la transition écologique et énergétique ainsi que leur adéquation avec les volumes financiers nécessaires au respect des engagements européens, de l’accord de Paris et de l’agenda 2030 du développement durable ;
  • un état détaillant la stratégie en matière de fiscalité écologique et énergétique, permettant d’évaluer la part de cette fiscalité dans les prélèvements obligatoires, le produit des recettes perçues, les acteurs économiques concernés, les mesures d’accompagnement mises en œuvre et l’efficacité des dépenses fiscales en faveur de l’environnement.

 

Par Clémence Du Rostu et Victoria Hautcoeur.

Irrégularité d’une décision de rejet d’une offre tenant à « un manque de loyauté » dans la procédure de mise en concurrence et de publicité

Par une ordonnance en date du 21 novembre 2018, le Tribunal administratif de Caen a jugé qu’une offre irrégulière ne pouvait pas être éliminée sans qu’une invitation de régularisation ne soit adressée au candidat, et ce en vertu d’un principe de loyauté de la procédure de passation.

Dans les faits, la communauté de communes des Hauts du Perche a lancé une procédure de passation d’un marché public de services portant sur la création d’un site internet. Par une décision verbale du 23 octobre 2018, la communauté de communes a rejeté l’offre de la société SARL Egami Création au motif de son irrégularité résultant du non-respect de l’article 8 du cahier des charges de la procédure.

La communauté de communes avait exigé des candidats, aux termes de l’article 8 du cahier des charges, que les offres contiennent un acte d’engagement « complété et signé ». A cet effet, elle a ensuite précisé, verbalement, que les candidats devaient utiliser le formulaire « DC3 ».

Estimant que la signature d’une offre n’est pas obligatoire et que le nouveau formulaire « ATTRI1 », remplaçant le « DC3 », ne concerne que l’attributaire du marché, la société SARL Egami Création a contesté l’éviction de son offre par l’introduction d’un référé précontractuel devant le Tribunal administratif de Caen.

Dans l’ordonnance commentée, le Tribunal a tout d’abord rappelé que, conformément aux articles 55 et 59 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, l’irrégularité d’une offre entraîne « en principe » son élimination, et l’invitation à régulariser une telle offre n’est qu’une faculté pour le pouvoir adjudicateur.

Puis, réglant l’affaire au fond, le juge des référés a estimé, de manière surprenante, que la communauté de communes, en s’abstenant d’inviter la société requérante à régulariser son offre, a commis « une irrégularité tenant à un manque de loyauté dans la mise en œuvre de ses obligations de mise en concurrence ».

Sur ce fondement inédit le Tribunal a annulé la décision d’éviction et a enjoint la communauté de communes à reprendre la procédure de passation du marché public au stade de l’examen des offres.

Si, au cas précis, c’est surtout le silence du règlement de consultation sur le formulaire à utiliser qui semble avoir « prêter à confusion du fait de l’édiction et des modalités d’utilisation du nouveau formulaire « ATTRI1 », le respect d’un principe de loyauté entre le pouvoir adjudicateur et les candidats reste à confirmer par les juridictions supérieures.

Nouvelle mise en demeure de l’ARCEP à l’encontre de la société Orange !

Par une décision en date du 18 décembre 2018, publiée que le 16 janvier 2019, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ci-après l’« ARCEP ») a mis en demeure la société Orange d’avoir à faciliter l’accès aux réseaux de cuivre dont elle est propriétaire ou gestionnaire.

Conformément aux articles L. 37-1 et suivants du Code des postes et des communications électroniques, l’ARCEP peut imposer des obligations particulières de qualité de service aux opérateurs dont elle estime qu’ils exercent une influence significative sur un marché, et ce dans l’objectif de développer une concurrence effective et loyale sur le marché des communications électroniques.

Dans ce cadre, l’ARCEP a pris, le 14 décembre 2017, trois décisions par lesquelles la société Orange doit respecter des obligations en matière de qualité de service sur :

  • les « marchés de gros des accès de haute qualité », ce qui concerne tant l’accès dégroupé au réseau en support cuivre que l’accès dégroupé au réseau en support optique[1];
  • les « prestations de gros de fourniture en gros d’accès local en position déterminée »[2]sur les réseaux cuivres dont la société Orange est propriétaire ou gestionnaire (offres de dégroupage de la boucle locale et sous-boucle locale de cuivre) ;
  • la « fourniture en gros d’accès central en position déterminée à destination du marché de masse » sur les réseaux cuivres dont la société Orange est propriétaire ou gestionnaire (offres d’accès haut et très haut débit activées sur DSL)[3].

En application de ces trois décisions, la société Orange est soumise à une obligation générale de faire droit aux demandes d’accès de haute qualité sur les marchés de gros, comme à celles d’accès à la boucle locale de cuivre à la sous-boucle de cuivre, avec une qualité de service permettant d’en garantir l’effectivité. Cette effectivité est contrôlée au travers d’indicateurs portant, par exemple, sur le taux de respect des dates de livraison des services, de délai de réparation en cas de pannes ou de fourniture d’informations, ou encore sur la qualité du service après-vente.

Face à l’inquiétude d’opérateurs alternatifs, l’application de ces trois décisions ont fait l’objet d’une enquête et d’une instruction, ouvertes respectivement en décembre 2017 et en septembre 2018, par la formation du collège de l’ARCEP, spécialisée dans le règlement des différends, de poursuite et d’instruction (RDPI).

Or, les résultats de l’instruction de l’ARCEP ont démontré que la qualité de service délivrée par la société Orange, sur les offres de gros activées et des offres de gros d’accès généraliste à la boucle locale, s’est dégradée à partir de 2017.

Rejetant les explications de la société Orange, cette dégradation de la qualité de service a atteint, selon l’ARCEP, un point tel que les offres d’Orange « ne permettent plus de garantir la capacité des opérateurs tiers à livrer leurs propres offres haut débit sur les marchés aval dans des conditions appropriées » (cf. page 44 de la décision commentée).

En conséquence, l’ARCEP a mis demeure la société Orange de respecter les obligations visées par les trois décisions du 14 décembre 2017, et ce dès le 1er janvier 2019, pour atteindre progressivement les objectifs de qualité auxquels elle est soumise, et selon un calendrier précisé par la décision commentée.

Il appartiendra désormais à la société Orange de justifier du respect des obligations qui lui incombent, et ce dès la fin du mois suivant le premier trimestre 2019.

Et l’ARCEP a également précisé que la décision commentée a été prise sans préjudice d’une autre instruction ouverte à l’encontre de la société Orange sur le respect d’autres aspects des trois décisions du 14 décembre 2017.

Par ailleurs, si le montant d’une sanction pécuniaire pourrait s’établir jusqu’à 5% du chiffre d’affaires de la société Orange en cas de violation répétée d’une même obligation en vertu de l’article L. 36-11-III du Code des postes et des communications électroniques, l’ARCEP n’a pas indiqué à ce jour souhaiter engager une procédure en vue d’une telle sanction.

 

[1] Décision n° 2017-1349 du 14 décembre 2017 portant sur la définition des marchés pertinents de gros des accès de haute qualité.

[2] Décision n° 2017-1347 du 14 décembre 2017 portant sur la définition du marché pertinent de fourniture en gros d’accès local en position déterminée.

[3] Décision n° 2017-1348 du 14 décembre 2017 portant sur la définition du marché pertinent de fourniture en gros d’accès central en position déterminée à destination du marché de masse.

Provocation à commettre un délit suivie d’effet – Conflit de lois entre l’article 23 de la loi de 1881 et l’article 121-7 du Code pénal

Le 15 juillet 2013, à l’appel d’organisations syndicales agricoles, des producteurs de lait se réunissaient devant la Maison des agriculteurs de la Mayenne. Par la suite, ils se rendaient aux abords du siège du groupe Lactalis, pour y exprimer leur mécontentement. Ils plaçaient des pneumatiques devant le portail d’accès du groupe, qu’ils incendiaient alors à la nuit tombée, et les équipements permettant la fermeture du site étaient détériorés.

Le groupe Lactalis assignait la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles de la Mayenne sur le fondement de l’article 1382, devenu 1240 du Code civil, aux fins d’obtenir réparation de son préjudice.

La Cour d’appel d’Angers, par sa décision du 17 janvier 2017, faisait droit à cette demande, sur ce fondement ; elle condamnait ainsi le syndicat en retenant que celui-ci avait donné des consignes aux agriculteurs qui devaient être qualifiées de provocation directe à la commission, d’actes illicites dommageables commis à l’aide des pneus, et qu’il y avait en conséquence un lien direct entre les directives données par le représentant du syndicat au nom de ce dernier et le préjudice subi.

Un pourvoi en cassation était formé par le syndicat, arguant que la provocation reprochée était celle prévue par l’article 23 de la loi du 29 juillet 1881, de sorte que le seul régime juridique de responsabilité applicable n’étant pas la responsabilité civile de droit commun mais le régime de la loi spéciale sur la presse (loi du 29 juillet 1881).

La Cour de cassation n’a pas fait pas droit au moyen soulevé par le syndicat et a rejeté son pourvoi, considérant que la provocation effective dont il a fait part relève d’un acte de complicité au sens de l’article 121-7 du Code pénal et par suite du régime de l’article 1240 du Code civil.

Rappelons qu’aux termes de l’article 23 de la loi sur la presse « seront punis comme complices d’une action qualifiée de crime ou délit ceux qui […], par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics […] auront directement provoqué l’auteur ou les auteurs à commettre ladite action, si la provocation a été suivie d’effet ».

Ce texte incrimine la provocation directe suivie d’effets à commettre des crimes (ou leurs tentatives) et des délits ; il constitue le support d’une infraction autonome (soumise au régime de presse) qui est apparentée à la complicité du Code pénal (article 121-7 – régime pénal de droit commun).

Des actes matériels peuvent donc relever, en conflit, de la qualification de l’article 23 de la loi de 1881 et de celle de l’article 121-7 du Code pénal ; le comportement du représentant du syndicat pouvait ainsi relever d’un acte de provocation au sens de l’article 23 comme d’un acte de complicité par instigation au sens de l’article 121-7 du Code pénal.

Ce conflit de qualifications peut ou doit, en premier lieu, se régler par le critère de publicité, lequel est expressément requis par l’article 23 précité.

Dans l’arrêt précité, la Cour de cassation a sans doute constaté l’inapplication de l’article 23 à défaut de publicité, car l’auteur des propos et les manifestants étaient liés par une communauté d’intérêts ; dès lors, l’article 121-7 du Code pénal devait trouver application.

Responsabilité décennale et désordres sur équipement dissociable de l’ouvrage

Si la responsabilité décennale des constructeurs peut être recherchée pour des désordres survenus sur des éléments d’équipement dissociables de l’ouvrage, à la condition de le rendre, dans son ensemble, impropre à sa destination, le Conseil d’Etat a ici retenu une absence d’impropriété à destination pour des désordres affectant les modalités de fonctionnement d’un système de chauffage.

Si les premiers juges avaient retenu l’impropriété de l’ouvrage dans son ensemble à savoir la salle polyvalente, la Cour d’appel avait quant à elle jugé que les désordres affectant la chaudière n’empêchaient pas l’usage de la salle elle-même et avait donc écarté l’application de la garantie décennale.

Le Conseil d’Etat rappelle quant à lui, conformément à sa jurisprudence, que « la circonstance que les désordres affectant un élément d’équipement fassent obstacle au fonctionnement normal de cet élément n’est pas de nature à engager la responsabilité décennale du constructeur si ces désordres ne rendent pas l’ouvrage lui-même impropre à sa destination ».

Le pourvoi de la commune est donc rejeté, la juridiction considérant « qu’en jugeant que les dysfonctionnements mentionnés ci-dessus compromettaient seulement le fonctionnement du système de chauffage tel qu’il avait été prévu par les stipulations contractuelles mais n’affectaient pas le chauffage de la nouvelle salle communale dans des conditions qui devraient conduire à les regarder comme rendant l’ouvrage impropre à sa destination, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ».

Ainsi, pour les éléments d’équipement dissociables de l’ouvrage, seuls des désordres rendant l’ouvrage entier impropre à sa destination sont susceptibles d’engager la responsabilité décennale des constructeurs, et cela n’est pas le cas lorsque, même si le fonctionnement de l’élément d’équipement est rendu plus compliqué, l’ouvrage dans sa globalité demeure utilisable dans des conditions normales.

Conséquences de la notification du décompte général

Le Conseil d’Etat rappelle une nouvelle fois les conséquences de la notification, par le maître de l’ouvrage, du décompte général au titulaire. Cette notification entraine la fin des relations contractuelles entre ces deux parties et empêche le maître d’ouvrage de rechercher, postérieurement à cette signature, la responsabilité contractuelle du titulaire.

La Haute juridiction rappelle en effet « qu’il appartient au maître de l’ouvrage, lorsqu’il lui apparaît que la responsabilité de l’un des participants à l’opération de construction est susceptible d’être engagée à raison de fautes commises dans l’exécution du contrat conclu avec celui-ci, soit de surseoir à l’établissement du décompte jusqu’à ce que sa créance puisse y être intégrée, soit d’assortir le décompte de réserves ; qu’à défaut, si le maître d’ouvrage notifie le décompte général du marché, le caractère définitif de ce décompte fait obstacle à ce qu’il puisse obtenir l’indemnisation de son préjudice éventuel sur le fondement de la responsabilité contractuelle du constructeur, y compris lorsque ce préjudice résulte de désordres apparus postérieurement à l’établissement du décompte ; qu’il lui est alors loisible, si les conditions en sont réunies, de rechercher la responsabilité du constructeur au titre de la garantie décennale et de la garantie de parfait achèvement lorsque celle-ci est prévue au contrat ». 

Il est donc possible pour le maître d’ouvrage d’émettre des réserves ou de retarder la notification du décompte à la condition sans toutefois que cette suspension n’ait en réalité pour objet de retarder le paiement du solde du marché. En outre, et comme le rappelle le Conseil d’Etat seule la responsabilité contractuelle n’est plus mobilisable après la notification du décompte. En revanche, demeurent les garanties légales des constructeurs à savoir les garanties biennales et décennales issues des articles 1792 et suivant du Code civil (CE 19 novembre 2018 Conseil d’État n° 408203). Il appartient donc au maître de l’ouvrage d’analyser avant la signature du décompte quelles en sont les conséquences notamment lorsque les travaux ne sont pas pleinement satisfaisants.

La pratique du prix cible ne constitue pas un manquement aux obligations de transparence et d’égalité de traitement des candidats

Dans un jugement du 26 octobre 2018, le Tribunal administratif de Nice confirme que la pratique du « prix cible » ne constitue pas un manquement aux obligations de transparence et d’égalité de traitement des candidats.

La pratique du prix cible consiste pour les acheteurs publics à définir préalablement un prix cible de la fourniture ou du service compte tenu du cahier des charges et à partir d’une étude du marché afin d’utiliser ce prix cible comme étalon des offres financières des candidats.

En l’espèce, le groupement hospitalier de territoire des Alpes-Maritimes (ci-après, le « Groupement hospitalier ») avait engagé un appel d’offres pour la passation d’un marché de prestations de transports non médicalisés de patients par ambulance, véhicule sanitaire léger et/ou taxi, alloti en quatorze lots géographiques pour chacun desquels la société Ambulances AMS avait déposé une offre.

Afin d’évaluer les propositions financières des candidats, le Groupement hospitalier s’était référé à un « tarif conventionné à partir duquel les soumissionnaires étaient invités à proposer une remise pour la durée du marché ». La société Ambulances AMS ayant vu son offre rejetée a introduit un référé précontractuel, sur le fondement de l’article L. 551-1 du Code de justice administrative, devant le juge des référés du Tribunal administratif de Nice.

La société Ambulances AMS soutenait que cette pratique du prix cible constituait une atteinte au principe de libre concurrence. Sans examiner si cette allégation était fondée, le juge des référés écarte le moyen au motif que la société requérante « ne démontre pas que cette atteinte constitue un manquement aux obligations de transparence et d’égalité de traitement des candidats, de sorte qu’elle ne peut se prévaloir que celle-ci aurait été susceptible de l’avoir lésée ».

Il ressort de ce jugement que la pratique du prix cible ne constitue pas un manquement aux obligations de transparence et d’égalité de traitement des candidats et que, du strict point de vue du droit de la commande publique, cette pratique apparaît licite.

Accélération de la mise en œuvre de la convergence tarifaire des forfaits soins pour la tarification des EHPAD

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 a réduit de sept ans à cinq ans le rythme de convergence tarifaire des forfaits soins des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

Ainsi c’est d’ici 2021 et non plus 2023 que tous les établissements bénéficieront de la totalité du forfait global de soins cible par financements supplémentaires ou seront ramenés au niveau de celui-ci.

Rappelons que la loi n° 2015-1776 d’adaptation de la société au vieillissement du 28 décembre 2015 a modifié les modalités de fixation des tarifs soins et dépendance des EHPAD à partir d’une équation tarifaire. L’article 58 de cette loi prévoyait une convergence linéaire des EHPAD vers le forfait global de soins issu de cette équation tarifaire sur une période transitoire de sept ans s’étalant de 2017 à 2023. La convergence permet de réduire l’écart, par paliers, entre les produits de la tarification reconductibles N-1, c’est-à-dire en 2016, et le résultat de l’équation tarifaire qui est la cible à atteindre. Au terme de cette période, tous les établissements devraient bénéficier de la totalité du forfait, sous réserve des éventuelles modulations liées à l’activité.

Le rythme de convergence prévu initialement vers le forfait cible devait être une réduction d’1/7ème en 2017, d’1/6ème en 2018, d’1/5ème en 2019, d’un quart en 2020, d’un tiers en 2021, de moitié en 2022 et une résorption totale en 2023.

Mais ce rythme a été accéléré de deux ans par l’article 64 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, ce qui risque d’être contraignant pour les EHPAD qui ne se voient pas attribuer de financements supplémentaires mais qui, au contraire, voient leur forfait soins ramenés à celui du forfait cible. Ces derniers devront ainsi en 2019 résorber la différence d’1/3, d’1/2 en 2020 et le reste en 2021. Précisions que cette accélération de la résorption de l’écart concerne uniquement le forfait soins et non le forfait dépendance, pour lequel les règles de résorption de l’écart ne changent pas.

Précisions sur le régime de caducité des autorisations sociales et médico-sociales

La direction générale de la cohésion sociale (DGCS) est venue clarifier les règles de caducité des autorisations délivrées aux établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS).

Elle a en effet publié une instruction le 14 novembre 2018 qui vient faire le point sur les règles en matière de caducité des autorisations sociales et médico-sociales puisqu’elle retrace les évolutions normatives et les simplifications administratives induites par la réforme des règles en la matière (notamment v. les décrets n° 2017-1620 du 28 novembre 2017 et n° 2018-552 du 29 juin 2018 relatifs à la caducité de l’autorisation des établissements sociaux et médico-sociaux mentionnés à l’article L. 313-1 du Code de l’action sociale et des familles). 

L’instruction évoque par exemple le nouveau critère d’ « ouverture au public » pour définir la caducité, introduit par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 précisant qu’il doit  « permettre aux autorités compétentes de remettre en jeu les places autorisées qui n’ont pas été mises en service ou de redéployer ces places vers les territoires déficitaires pour répondre aux besoins prioritaires identifiés dans les schémas de planification ». Jusqu’ici l’autorisation de fonctionnement des ESSMS était caduque dès lors qu’elle n’avait pas reçu un « commencement d’exécution » à l’issue d’un délai de trois ans. Cette notion était considérée comme trop floue et dissuadait ainsi les autorités compétentes de prononcer des déclarations de caducité. Le critère de « l’ouverture au public » de tout ou partie de l’activité de l’établissement ou du service est, d’après l’instruction de la DGCS, un critère plus facile à objectiver.

Outre ces précisions sur la réforme des règles en matière de caducité des autorisations sociales et médico-sociales, le texte permet également d’apporter plusieurs précisions relatives aux modalités pratiques de la mise en œuvre de cette réforme notamment concernant le délai de caducité et les différents cas de sa prorogation, le constat de caducité partielle ou la réduction de capacité.

Concernant le nouveau délai de caducité, il est fixé à quatre ans pour les opérations dites   « lourdes ». Il peut cependant être inférieur lorsque « le projet ne nécessite pas la construction d’un immeuble bâti ou des travaux sur des constructions existantes soumis à permis de construire ». De même, l’acte d’autorisation peut fixer lui-même un délai d’installation pour le projet d’un établissement ou d’un service dans deux hypothèses : « lorsque, dans le cadre d’une procédure d’appel à projet (AAP) le candidat s’est engagé, dans sa réponse, à respecter un délai de mise en œuvre ou, le cas échéant, à se conformer au délai fixé par le cahier des charges de l’AAP ; ou, pour les projets ne relevant pas d’un AAP, lorsque les opérateurs s’engagent dans leur dossier à mettre en œuvre le projet dans un délai fixé conjointement avec la ou les autorités compétentes ».

Le délai de caducité peut être prorogé pour une durée maximale de trois ans dans le cas où l’organisme gestionnaire serait confronté à des aléas indépendants de sa volonté ou pour une durée maximale d’un an si l’ouverture effective de l’ESSMS peut être achevée dans ce délai.

L’instruction détaille également la notion de caducité partielle, automatique en cas de sites d’implantation distincts ou de capacités distinctes pour plusieurs types de prestations ou de modes d’accueil et d’accompagnement. Il existe aussi une forme particulière de caducité partielle qui est celle de la réduction de la capacité initialement accordée et qui permet d’ajuster la capacité de l’établissement à condition que cet ajustement soit jugé pertinent par l’autorité par l’autorité compétente.

La DGCS a mis à disposition des fiches thématiques afin d’aider les agences régionales de santé et les services déconcentrés de l’Etat dans la mise en œuvre de la procédure d’appel à projet et d’autorisation des ESSMS.

Vers une évolution du régime de la protection juridique des majeurs vulnérables

Le régime juridique de la protection juridique des majeurs en vigueur actuellement découle de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs. Si cette législation a été en son temps bienvenue et innovante, les voix s’élèvent aujourd’hui pour une modernisation du système en place.

Madame Nicole BELLOUBET, Garde des sceaux, s’est vue remettre le 25 septembre 2018 un rapport, fruit d’une importante réflexion, portant sur « L’évolution de la protection juridique des personnes : reconnaître, soutenir et protéger les personnes les plus vulnérables » par Madame Anne Caron DEGLISE, avocate générale à la Cour de cassation.

Ce rapport intervient dans un contexte où l’ensemble des acteurs dans ce domaine dénonce des pratiques peu respectueuses de la personne protégée. A ce titre on peut citer le rapport du Défenseur des droits « Protection juridique des majeurs vulnérables », ou encore celui de la Cour des comptes, « La protection juridique des majeurs. Une réforme ambitieuse, une mise en œuvre défaillante ».

L’objectif principal du rapport déposé par Madame DEGLISE vise, en outre, à répondre aux exigences de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées (CIDPH, 12-12-2006) qui préconise en son article 12 de préserver la capacité juridique des personnes vulnérables. Pour ce faire il est nécessaire d’aboutir à une meilleure prise en compte de la volonté du majeur protégé dans le cadre de l’exercice de la mesure, tant sur le plan personnel que patrimonial.

Le rapport remis au Garde des sceaux traduit, par lui-même, l’importance accorder au besoin de modernisation et d’adaptation du régime juridique de protection des personnes vulnérables.

En effet, ce rapport de plus de 500 pages expose pas moins de 104 propositions.

Le rapport est construit en cinq axes en la matière :

– La création d’une politique publique de soutien et de suivi des personnes les plus vulnérables qui s’appuit sur les droits fondamentaux. Il est notamment prévu le passage symbolique de la dénomination de « juge de tutelle » à « juge des libertés civiles et de la protection ». Une politique publique qui sera renforcée par la création d’un délégué interministériel chargé de la structuration d’une politique publique de la protection juridique des majeurs et d’un Conseil national de la protection juridique des majeurs

– La modernisation et l’adaptation de l’entrée en mesure de protection. Ce rapport préconise de revoir les critères d’entrée de la personne vulnérable dans la mesure de protection par l’amélioration de l’évaluation de sa perte d’autonomie. Concrètement il est revendiqué la mise en place d’une évaluation préalable plus individualisé et le renforcement du contenu du rapport médical circonstancié

– Le développement des dispositifs alternatifs de protection prenant en compte les choix de la personne elle-même et la déjudiciarisation (autant que faire se peut) de la protection de la personne vulnérable.

Cette ambition, qui s’inscrit dans la continuité de l’adoption de plus en plus fréquentes de nouvelles règles visant à déjudiciariser nombre de situations, vise à permettre d’anticiper toute mesure de protection par la mise en place d’outils de nature à préserver l’autonomie de la personne vulnérable en protégeant en amont son patrimoine tels que le mandat de protection future, la fiducie gestion ou encore la désignation anticipée du tuteur ou curateur.

– L’amélioration de la réponse judiciaire dont le caractère subsidiaire est par ailleurs réaffirmé en passant par une meilleure individualisation des mesures. Le rapport prévoit notamment l’instauration d’une requête unique et la création de passerelles entre les procédures de mise sous protection judiciaire, d’habilitation familiale et d’accompagnement judiciaire. En outre, et là se trouve la proposition phare du rapport, il est préconisé d’abroger la traditionnelle triptyque des mesures de protection judiciaire (tutelle, curatelle, sauvegarde de justice) au profit de la mise en place d’une mesure unique de protection, dite « mesure de sauvegarde des droits ».

– La sécurisation des contrôles et le renforcement de la professionnalisation des mandataires professionnels. Cela passe notamment par une consolidation des outils de contrôle en revenant notamment sur le contenu et le délai de l’inventaire qui serait porté à six mois pour les biens autres que les meubles meublants, une meilleure coordination des contrôles d’ordre judiciaire et d’ordre administratif et la nécessité d’élaborer un véritable statut du métier de mandataire judiciaire à la protection des majeurs

La loi de finances n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 pour l’année 2019 modifie le régime du mécénat au profit des petites entreprises

Avant la l’adoption de la loi de finance 2019, les entreprises pouvaient bénéficier d’une réduction d’impôt sur les bénéfices égale à 60 % des dons, pris dans la limite de 5 pour mille du chiffre d’affaires de l’entreprise, versés aux œuvres ou organismes d’intérêt général (CGI art. 238 bis).

Or, ce plafond de 5 pour mille s’applique de manière uniforme à toutes les entreprises, sans tenir compte de la taille de ces entreprises.

Le régime s’appliquait uniformément aux grandes comme aux petites entreprises .

Aussi, les petites entreprises atteignaient plus rapidement ce plafond que les autres.

Afin de lever cet obstacle au développement du mécénat, la loi de finances pour 2019 instaure un plafond alternatif de 10.000 €.

Désormais, l’article 148 de la loi n° 2018-1317 crée un plafond alternatif de 10.000 € qui s’applique pour les versements effectués au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2019.

Les entreprises ont désormais le choix entre appliquer le plafond de 10.000 € ou celui de 5 pour mille du chiffre d’affaires lorsque ce dernier montant est plus élevé.

Tous les dons sont concernés, qu’il s’agisse de dons en numéraire ou en nature en faveur, notamment, d’organismes d’intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises.

Également, l’article 149 de de la loi instaure, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, une obligation de déclaration des versements ouvrant droit à la réduction d’impôt.

Désormais, les entreprises qui effectueront, lors d’un exercice, plus de 10.000 € de dons et versements ouvrant droit à la réduction d’impôt devront déclarer à l’administration   fiscale :

  • Le montant et la date de ces dons et versements ;
  • L’identité des bénéficiaires ;
  • Le cas échéant, la valeur des biens et services reçus, directement ou indirectement, en contrepartie.