Monnaies locales complémentaires : quel impact pour les collectivités territoriales ?

Monnaie locale complémentaire d’Aunis, Le Florain, La ROUE Sud Buëch 05 ou encore La Roue du Pays d’Aix … autant de projets de nouvelles monnaies locales pour 2017, en forte progression notamment depuis la crise dite des « subprimes » en 2008.

En effet, les monnaies locales complémentaires, qui se définissent comme une unité de compte, complémentaire à la monnaie officielle, créées par des acteurs non bancaires issus de la société civile, ont pour objectif de développer le commerce local et s’inscrivent dans un objectif d’économie sociale et solidaire.

En ce sens, la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire a créé les articles L. 311-5 et L. 311-6 du Code monétaire et financier qui précisent les personnes autorisées à émettre des monnaies locales complémentaires de la monnaie nationale et prévoient leur soumission au livre V du même Code lorsque leur activité relève du domaine des services de paiement.

Les émetteurs de ces monnaies locales peuvent être des personnes morales de droit privé constituées sous forme de coopératives, de mutuelles ou d’unions relevant du Code de la mutualité ou de sociétés d’assurance mutuelles relevant du Code des assurances, de fondations ou d’associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou, le cas échéant, par le Code civil local applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Elles peuvent également être des sociétés commerciales selon certaines conditions prévues aux I et II-2° de l’article 1er de la loi du 31 juillet 2014 précitée ainsi qu’au décret n° 2015-858 du 13 juillet 2015 relatif aux statuts des sociétés commerciales ayant la qualité d’entreprises de l’économie sociale et solidaire.

Selon le type de monnaie locale émis, un agrément ou une exemption d’agrément de l’Autorité de contrôle prudentiel et de régulation (ACPR) peut être requis.

Les monnaies locales peuvent ainsi être émises sur support papier, sous la forme scripturale ou sous forme électronique.

S’agissant des collectivités territoriales, la question de l’encaissement de ces monnaies locales complémentaires en règlement des recettes publiques s’est posée récemment.

La Direction générale des finances publiques y a apporté une réponse dans une fiche communiquée au mois de septembre 2016 en l’absence de cadre juridique précis relatif à l’encaissement de ces monnaies.

Il y est précisé que les régisseurs peuvent encaisser des monnaies locales en règlement de prestations délivrées par les collectivités locales lorsque celles-ci ont décidé d’accepter de recevoir une partie de leurs recettes non fiscales dans une telle monnaie.

Il est important de noter qu’une obligation particulière de conseil incombe aux comptables publics s’agissant de l’encaissement de ces monnaies locales compte tenu de la diversité des modes d’émission de ces monnaies et des différentes dispositions du Code monétaire et Financier les régissant. Chaque projet d’encaissement de créances publiques au moyen de ces instruments de paiement doit faire l’objet d’une expertise individuelle.

Il est également rappelé par la Direction générale des finances publiques que les organismes publics sont libres d’accepter les monnaies locales complémentaires comme mode de règlement des prestations qu’ils délivrent en vertu du principe de libre administration des collectivités territoriales.

Cependant, toute décision d’acceptation ou de refus de cet instrument de paiement devra être motivée au regard, notamment, des frais y afférents et des risques d’insolvabilité ou de disparition de l’émetteur.

Dès lors qu’un organisme public accepte ce mode de paiement, l’adhésion au système de gestion de l’émetteur est nécessaire pour le remboursement de ces monnaies locales par l’organisme public.

Une convention doit donc être signée entre l’émetteur de la monnaie locale et la collectivité publique pour prévoir un remboursement en euros des unités de monnaies locales et la rémunération attachée à ces opérations de change.

S’agissant de la commission de l’émetteur, celle-ci ne peut être prélevée sur les montants reversés à la collectivité, conformément au principe de non contraction des recettes et des dépenses publiques.

La collectivité devra donc émettre un mandat de paiement préalable pour cette commission.

Enfin, la Direction générale des finances publiques souligne qu’en l’état du droit, les monnaies locales complémentaires ne peuvent être utilisées pour payer les dépenses publiques et les collectivités ne sont pas autorisées à acheter de la monnaie locale en vue de régler de faibles dépenses ou de la distribuer à leurs administrés.

Ainsi, l’impact de ces monnaies locales complémentaires sur l’économie des collectivités restant limité à l’heure actuelle, d’avantage d’interventions du législateur pour soutenir leur intégration au système monétaire existant sont nécessaires afin de répondre à cette volonté de développement durable local.

 

Possibilité de poursuivre cumulativement les délits de complicité d’escroquerie et de recel d’escroquerie

Une société de formation et sa gérante étaient poursuivies et condamnées du chef d’escroquerie pour avoir produit des dossiers d’indemnisation comportant de fausses attestations de formation auprès du fonds d’assurance de la formation dans l’industrie hôtelière (FAFIH), et conduit ce dernier à verser des indemnités de formation.

La société regroupant les hôtels et sa présidente étaient, pour leur part, poursuivies, d’une part, du chef de complicité de cette escroquerie au préjudice du FAFIH, pour avoir donné instruction aux directeurs des hôtels de remplir de fausses attestations de formation et, d’autre part, du chef de recel, pour avoir fait bénéficier la société d’un soutien juridique et administratif frauduleusement financé par le FAFIH.

La Cour d’appel de Paris, par un arrêt du 7 octobre 2015, condamnait ladite société et sa présidente de ces deux chefs.

Un pourvoi en cassation était formé par la société regroupant les hôtels et sa présidente estimant qu’elles ne pouvaient s’être rendues coupables de recel d’une escroquerie à laquelle elles avaient elles-mêmes participé en qualité de complice.

La Chambre criminelle rejetait toutefois le pourvoi considérant que « les prévenues ne sauraient faire grief à l’arrêt de les avoir déclarées coupables, cumulativement, de ces deux délits, ceux-ci ne procédant pas de manière indissociable d’une action unique caractérisée par une seule intention coupable ».

Précisons que la Cour de cassation estime, de manière constante, qu’un agent ne peut être cumulativement poursuivi en qualité d’auteur d’une infraction d’origine et d’une infraction de conséquence, telle que le recel.

A titre d’exemple, la Chambre criminelle a récemment rappelé « que le délit de recel de prise illégale d’intérêts ne peut être reproché à la personne qui aurait commis l’infraction principale, celle-ci fût-elle prescrite » (Crim. 12 nov. 2015, n° 14-83.073, Bull. crim. n° 253).

Cet arrêt ne semble toutefois pas procéder à un revirement de jurisprudence, la Chambre criminelle se prononçant sur un terrain factuel, en insistant sur l’existence de deux actions matériellement et intentionnellement distinctes (participation à la création de fausses attestations de formation d’une part, bénéfice d’un « soutien juridique et administratif » d’autre part).

Elle réaffirme ainsi sa volonté d’utiliser un critère tiré de l’unicité d’action et d’intention pour régler, au regard des faits de chaque espèce, ce type de concours.

Champ d’application de la garantie décennale

Selon la lettre de l’article 1792-7 du Code civil, échappent à la garantie décennale, les éléments d’équipement « dont la fonction exclusive est de permettre l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage ».

Une interprétation littérale de ce texte inciterait à exclure de la qualification d’ouvrage un grand nombre d’équipements, ce qui évincerait le jeu de la garantie décennale permettant d’établir une responsabilité sans faute des constructeurs, au profit de la responsabilité contractuelle de droit commun, plus difficile à démontrer car nécessitant la preuve d’une faute.

Pourtant, la Cour de cassation semble développer une jurisprudence de plus en plus souple depuis quelques années, comme le démontre l’affaire du canal de Nyer.

En l’espèce, dans le cadre d’un important chantier traversant une vallée protégée des Pyrénées-Orientales, le maître d’ouvrage devait mettre en place un moyen d’acheminer l’eau du canal de Nyer vers la centrale hydro-électrique qu’il exploitait.

Une conduite composée de tuyaux métalliques traversant la vallée sur plusieurs kilomètres a donc été installée.

La corrosion ayant attaqué ladite conduite d’eau, le maître d’ouvrage avait sollicité la réparation des désordres.

Les Juges du fond avaient considéré que « la conduite métallique fermée acheminant l’eau du canal de Nyer à la centrale hydro-électrique exploitée par la SHCN est un équipement qui a pour fonction exclusive de permettre la production d’électricité par cet ouvrage à titre professionnel » pour écarter l’application de la garantie décennale.

Or, la Cour de cassation juge, au contraire, que « la construction, sur plusieurs kilomètres, d’une conduite métallique fermée d’adduction d’eau à une centrale électrique constitue un ouvrage ».

La Haute juridiction civile avait déjà, récemment étendu la qualification d’ouvrage dans des décisions précédentes. Par exemple, à propos d’un variateur considéré comme participant au fonctionnement de l’ouvrage car faisant partie d’une installation destinée à l’évacuation des gaz, des fumées et des poussières de la fonderie attachée au gros œuvre (Civ. 3ème, 7 mai 2014, n° 12-23933).

La Commission européenne approuve les aides octroyées par la France en faveur d’exploitants de services de transport en commun par autobus en Ile-de-France

En 1994, la région Ile-de-France a mis en place un système de subventions publiques à destination des exploitants des services de transport en commun par autocar sur son territoire. Ces aides étaient versées aux collectivités publiques concernées, lesquelles, si le service n’était pas exploité en régie, les reversaient aux sociétés exploitantes dans l’hypothèse où elles réalisaient elles-mêmes les investissements subventionnés.

A compter de l’année 2008, c’est le syndicat des transports d’Ile-de-France (STIF) qui a poursuivi la mise en œuvre de ce dispositif. C’est cette même année que la Commission européenne a ouvert une enquête approfondie à la suite d’une plainte d’un concurrent.

Au plan national, rappelons que le Tribunal administratif avait annulé le refus du Conseil régional d’abroger les délibérations ayant institué ce dispositif puis enjoint à la Région de procéder à une telle abrogation et soumettre un nouveau projet de subventions au Conseil régional. Les Juges avaient considéré que l’instauration de ce dispositif était intervenu irrégulièrement dès lors qu’il n’avait pas été notifié préalablement à la Commission européenne.

Cette solution avait été confirmée par la Cour administrative d’appel de Paris. En cassation, le Conseil d’Etat avait rejeté le pourvoi de la Région. Il avait considéré qu’en retenant que ce dispositif  « facultatif et incitatif » ne mettait aucune obligation de service public à la charge des exploitants, et, qu’ainsi, les subventions litigieuses ne constituaient donc pas des compensations d’obligations de service public  (COSP), la Cour n’avait entaché son arrêt d’aucune erreur de qualification juridique des faits.

Aux termes de son enquête approfondie – et du communiqué de presse du publié le 2 février dernier (la version publique de la décision n’est pas encore disponible) – la Commission européenne affirme pour sa part que ces subventions sont « conformes aux règles relatives aux aides d’Etat de l’Union européenne ».

Plus précisément, elle ajoute que les aides à l’investissement ont contribué « à l’amélioration de la qualité du transport collectif en Ile-de-France sans fausser indûment la concurrence dans le marché intérieur » et que les subventions liées au service public ne constituaient en réalité que des compensations d’obligations de service public.

Rappelons qu’au sein de l’Union européenne, les aides d’Etat sont en principe incompatibles avec le marché intérieur (article 107§1 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne).

Or, selon la célèbre jurisprudence Altmark (CJCE, 24 juillet 2003, Altmark Trans, C-280/00), il n’existe pas d’aide d’Etat au sens du droit de l’Union, dès lors que :

  • l’entreprise est chargée d’obligations de service public (OSP) définies ;
  • les paramètres de compensation des OSP sont établis de façon préalable et transparente ;
  • il n’existe pas surcompensation des OSP, compte tenu d’un bénéfice raisonnable dégagé par le bénéficiaire ;
  • l’entreprise a été choisie à l’issue d’une « procédure de marché public» c’est-à-dire d’une procédure publicité et de mise en concurrence encadrée, ou, à défaut, en fonction d’une analyse des coûts supportés par une entreprise moyenne et bien gérée.

Si ces quatre conditions sont remplies, les sommes versées ne constituent pas une aide d’Etat au sens du droit de l’Union européenne, puisqu’elles ne procurent en réalité aucun avantage à son bénéficiaire mais compensent simplement le coût des OSP qu’il supporte.

C’est bien à cette conclusion qu’est parvenue la Commission européenne, approuvant les subventions octroyées par la Région Ile-de-France, puis par le STIF, aux exploitants des services de transports en Ile-de-France.

 


 

La divulgation des œuvres et des bases de données : apports de la loi pour une République Numérique

Parmi les nombreux apports de la Loi pour une République Numérique du 7 octobre 2016, figurent des modifications du Code de la Propriété Intellectuelle (CPI).

Plus particulièrement, les articles 38 et 39 de la loi précitée modifient l’article L. 122-5 du CPI, relatif à la divulgation des œuvres de l’esprit, et L. 342-3, relatif à la mise à disposition des bases des données.

En ce qui concerne la divulgation d’une œuvre de l’esprit, l’article L. 122-5 du CPI prévoit désormais que l’auteur d’une telle œuvre ne peut interdire :

  • les copies ou reproductions numériques réalisées à partir d’une source licite pour les besoins de la recherche publique, à l’exclusion de toute finalité commerciale ;
  • les reproductions et représentations d’œuvres architecturales et de sculptures placées sur la voie publique pour des raisons non commerciales.

En ce qui concerne les bases de données, l’article L. 342-3 du CPI prévoit que le titulaire des droits sur cette base, qui l’a mise à la disposition du public, ne peut en interdire les copies ou reproductions numériques réalisées par une personne qui y a licitement accès pour des finalités de recherche, à l’exclusion de toute finalité commerciale.

Le régime juridique des tribunes réservées, dans les supports d’information générale des communes, à l’expression des élus n’appartenant à la majorité municipale, au nom de ce qui constitue aujourd’hui une liberté fondamentale recèle, décidément, encore bien des mystères

On croyait avoir peu à peu dégagé, grâce à la jurisprudence administrative, tout ce qu’il y avait à connaître de cet espace d’expression : il devait être ouvert dans tous les supports de communication de la commune, quels qu’ils soient : magazines, publication dès lors que ce dernier diffusaient, même ponctuellement, une information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal.

On avait fini par mieux saisir les conditions d’une cohabitation possible de l’espace réservé à l’expression des élus d’opposition avec des tribunes d’élus de la majorité.

On savait qu’il n’était pas possible au maire en tant que directeur de publication d’exercer la moindre censure sur le contenu des articles, même s’ils n’avaient aucun rapport avec l’intérêt local ou étalaient une franche propagande électorale.

L’arrêt du Conseil d’État n° 387144 du 20 mai 2016 avait cependant précisé que le maire avait encore le pouvoir et même le devoir d’intervenir dans les cas où leur publication pourrait manifestement avoir des conséquences pénales.

On croyait avoir compris que le site internet municipal ne pouvait échapper à l’article L. 2121-27-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) dès lors qu’il contenait des informations générales sur la collectivité.

Mais voici qu’un arrêt de la Cour administrative de Nancy en date du 30 juin 2016 a considéré que la simple mise en ligne du bulletin municipal suffisait à satisfaire aux exigences de l’article L. 2121-27-1.

La multiplication des supports d’information n’entraînerait donc pas la multiplication des tribunes de l’opposition ? La solution donnée par la Cour dans cette affaire où les requérants exigeaient des tribunes d’opposition dans le site internet de Jarville-la-Malgrange, pourrait le laisser croire tant elle apparait fondée sur une considération élémentaire : pour elle, les communes ont un large pouvoir d’appréciation pour organiser l’espace d’expression des élus et la seule mise en ligne du bulletin municipal dans lequel figurait la tribune de l’opposition était suffisante.

En l’espèce, ce raisonnement pouvait sans doute paraître moins choquant dans la mesure où le contenu du site était particulièrement neutre et où la tribune d’opposition était aisément accessible.

Mais en raisonnant de façon si générale, sans paraître tenir compte des conditions concrètes  du cas examiné, la Cour a peut-être ouvert la voie à une remise en cause partielle des exigences légales dont la loi Démocratie n° 2002-276 du 27 février 2002 était porteuse.

A une période où il n’existe pas tant de sites internet municipaux offrant des tribunes libres d’opposition, cette décision pourrait ne pas contribuer à changer cette situation.

La seule mise en ligne du magazine sur le site entraîne, comme souvent, une illisibilité quasi complète des tribunes libres. Le Conseil d’Etat aura sans doute à faire connaître sa position à ce propos.

 

 

Parution de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes (AAI) et autorités publiques indépendantes (API) déclarée conforme à la Constitution (Décision du Conseil Constitutionnel n° 2017-746 du 19 janvier 2017)

La loi organique relative aux AAI et API est parue au Journal Officiel le 21 janvier 2017, après avoir été soumise au contrôle du Conseil Constitutionnel (tel que cela est obligatoirement le cas pour ce type de textes) et déclarée conforme à la Constitution.

Cette loi met en œuvre un certain nombre des propositions formulées par la Commission d’enquête sénatoriale sur les AAI dans son rapport « Un Etat dans l’Etat : canaliser la prolifération des autorités administratives indépendantes pour mieux les contrôler » (Rapport remis au Président du Sénat le 28 octobre 2015).

Elle réserve au législateur la compétence de création des AAI et API, de même que celle de fixation des règles relatives à la composition, aux attributions, et aux principes fondamentaux relatifs à l’organisation et au fonctionnement de celles-ci.

Par ailleurs, elle institue un certain nombre d’incompatibilités liées à la fonction de membre d’une AAI ou d’une API.

Ainsi, en Nouvelle-Calédonie et dans les collectivités d’outre-mer (Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna et Polynésie française), les fonctions de Président de certains organes sont incompatibles avec celles de membre d’une AAI ou d’une API.

De même, lorsque la loi prévoit qu’un magistrat de l’ordre judiciaire en activité est membre d’une telle autorité, aucun autre magistrat judiciaire en activité ne peut y être nommé, sauf en qualité de président de celle-ci. Les membres du Conseil supérieur de la magistrature et du Conseil économique et social ne peuvent êtres membres d’une AAI ou d’une API, sauf, pour les seconds, s’ils y sont nommés en cette qualité.

Ces incompatibilités s’appliquent tant pour le passé que pour l’avenir. Dès lors, les membres des AAI et API se trouvant actuellement dans une telle situation disposent d’un délai de trente et un jours suivant la promulgation de la loi pour opter entre l’une ou l’autre de leurs fonctions, délai à l’issue duquel, à défaut, ils sont déclarés démissionnaires par le Président de l’autorité. Lorsque l’incompatibilité touche ce dernier, il est déclaré démissionnaire par un tiers au moins des membres du collège de l’autorité.

Enfin, la liste des emplois pour lesquels « en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation » la nomination par le Président de la République ne peut intervenir qu’après un avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée est étendue. Pour mémoire, il peut être fait obstacle à une telle nomination lorsque les votes négatifs au sein de chaque commission représentent au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions.

Sont ajoutées à cette liste les fonctions de Président de l’Autorité de régulation des jeux en ligne, de la Commission du secret de la défense nationale, de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, du Haut Conseil du commissariat aux comptes et du Collège du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur.

Référé précontractuel : la nécessité de saisir le Juge dans un délai raisonnable

TA La Réunion, 19 octobre 2016, Société Réunionnaise de Bureautique, n° 1601022

Par une ordonnance en date du 19 octobre 2016, le Juge des référés du Tribunal administratif de La Réunion a fait application à un référé précontractuel de la récente jurisprudence du Conseil d’Etat selon laquelle, en application du principe de sécurité juridique, le destinataire d’une décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d’un délai raisonnable, et ce quand bien même il n’aurait aucunement été informé des voies et délais de recours (CE,13 juillet 2016, M. A., n° 387763). Et le Juge des référés du Tribunal administratif de La Réunion a considéré qu’en matière de référé précontractuel ce délai raisonnable de saisine du Juge ne saurait en règle générale excéder trois mois à compter de la date à laquelle le concurrent évincé a eu « pleinement connaissance de la décision d’éviction ».

Il a jugé en conséquence que le requérant qui avait attendu que le marché soit en voie d’achèvement pour saisir le tribunal, alors qu’il avait été évincé plus de trois mois avant, au stade des candidatures, devait se voir imputer « outre un comportement inapproprié au regard du principe de sécurité juridique, une méconnaissance caractérisée du délai raisonnable qui lui était applicable en l’absence de circonstances particulières ».

La requête a ainsi été jugée tardive, alors même que le Juge des référés avait été saisi avant la conclusion du contrat.

Cette solution, quelque peu surprenante au regard de la lettre de l’article L. 551-1 du Code de justice administrative, est particulièrement bienvenue s’agissant des procédures de passation « au long cours » (concessions, marchés « complexes »,…), qui pouvaient sinon être anéanties quelques jours avant la signature du contrat par un candidat évincé des mois plus tôt.

 

Requalification d’une DSP en marché public en l’absence de risque d’exploitation

TA Poitiers, 8 décembre 2016, SAS Voyages Goujeau, n° 1602479

Par une ordonnance en date du 8 décembre 2016, le Juge des référés précontractuels du Tribunal administratif de Poitiers, saisi pour la seconde fois du contrat de transport public de voyageurs du Département de Charente-Maritime, a – de nouveau – jugé qu’en l’absence de transfert du risque d’exploitation le contrat ne constituait pas une délégation de service public, mais un marché public.

Le Juge des référés s’est, de façon surprenante, prononcé au regard de la rédaction de l’article L. 1411-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) applicable avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, mais la solution retenue est quant à elle sans surprise : dans la mesure où les mécanismes de rémunération prévus contractuellement permettent au délégataire de couvrir 99,70 % de ses charges d’exploitation, « le délégataire ne peut être considéré comme supportant une part significative du risque » et le contrat « doit être regardé comme un marché public dont les règles de passation étaient  soumises aux règles relatives aux marchés publics et non […] comme une délégation de service public ». Le Juge des référés a en conséquence annulé la procédure de passation du contrat, au motif d’une méconnaissance des dispositions de l’ordonnance du 23 juillet 2015 relatives à l’allotissement.

L’action de groupe devant le Juge administratif

L’introduction de l’action de groupe en droit français a longtemps fait l’objet d’un débat politique mouvementé.

Même si la nécessité de sa création a été admise par la grande majorité des acteurs de la vie publique et promise en 2005, par le Président de la République Jacques Chirac lors de la cérémonie des vœux « aux forces vives de la Nation », ce n’est finalement que 9 ans plus tard, soit le 26 septembre 2014, qu’était publié au Journal Officiel le décret n° 2014-1081 du 24 septembre 2014 relatif à l’action de groupe mais uniquement en matière de consommation.

La possibilité d’ouvrir aux administrés ou aux usagers de services publics d’engager une action de groupe à l’encontre d’une collectivité remonte pourtant au 24 juin 2008, date à laquelle le Vice-Président du Conseil d’Etat de l’époque, missionnait un  groupe de travail afin « d’examiner dans quelle mesure et à quelles conditions, l’instauration d’une action collective pourrait offrir une alternative efficace au traitement des contentieux dits de série et si, au-delà de cet objectif, elle est susceptible d’offrir aux justiciables placés dans la même situation qui entendent contester la légalité de décisions similaires ou faire valoir des droits identiques une voie adéquate et pertinente ».

Aux termes de ce rapport (1), l’action de groupe était définie comme étant « la procédure par laquelle une personne ayant seule la qualité de requérant exerce, au nom d’un groupe ayant les mêmes intérêts, une action en reconnaissance de droits individuels en faveur des membres du groupe ».

 « L’idée première est d’offrir un cadre procédural alternatif aux contentieux dits de série, qui assure tout à la fois une sécurité juridique accrue (mieux appréhender une question de principe sans risquer d’éluder des situations distinctes) et une économie matérielle (éviter la gestion concrète d’une multiplicité de requêtes identiques appelant une même réponse) ».

C’est ainsi que huit années plus tard, l’action de groupe en droit administratif a été  incorporée dans la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, non encore applicable, qui a créé une procédure commune et un socle commun aux différentes actions de groupe.

I. Les modalités d’application de la Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle

A/ Les conditions légales de l’action de groupe

1/ Les textes

L’action de groupe en droit administratif est régie par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle. Pour autant, aucun décret d’application n’a à ce jour été publié.

2/ La codification de l’action de groupe

L’article L. 77-10-3 du Code de justice administrative dispose que :

« Lorsque plusieurs personnes, placées dans une situation similaire, subissent un dommage causé par une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public, ayant pour cause commune un manquement de même nature à ses obligations légales ou contractuelles, une action de groupe peut être exercée en justice au vu des cas individuels présentés par le demandeur.

Cette action peut être exercée en vue soit de la cessation du manquement mentionné au premier alinéa, soit de l’engagement de la responsabilité de la personne ayant causé le dommage afin d’obtenir la réparation des préjudices subis, soit de ces deux fins ».

Plus généralement, le régime juridique de l’action de groupe est prévu aux articles L. 77-10-1 à L. 77-10-25 du Code de justice administrative.

B/ Les conditions d’exercice de l’action

1/ Une pluralité de personnes

L’article L. 77-10-3 du Code de justice administrative mentionne « plusieurs personnes ».

Le législateur ne fixe aucun seuil de victimes. Dès lors, et à défaut de décret et de circulaire, il est possible de déduire de cette formulation que, comme pour l’application de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation dite « Loi Hamon », à compter de deux personnes lésées l’action de groupe est possible.

Le champ de ces victimes n’est pas arrêté. Aucune qualité particulière n’est donc attendue, contrairement à la Loi Hamon où la qualité de consommateur est une condition essentielle. Par ailleurs, cette notion de personne englobe aussi bien les personnes physiques que morales.

2/ Une situation similaire

Les personnes ayant subi un dommage doivent être placées dans une situation similaire (article L. 77-10-3 du Code de justice administrative).

Cette condition implique une similitude dans la situation de droit liant ces personnes à la personne morale de droit public susceptible d’être assignée. Cette condition devra s’apprécier au regard du manquement reproché.

3/ Des personnes ayant subi un dommage

La rédaction retenue par la Loi Hamon dans le cadre de l’action de groupe en matière de consommation, exclut la réparation des préjudices (patrimoniaux ou extrapatrimoniaux) résultant de dommages corporels, moraux, ou encore environnementaux, mais aussi la réparation des préjudices moraux résultant d’un dommage matériel.

En revanche, la loi de modernisation de la justice du XXIème siècle ne contient pas de telles précisions. Dès lors, et à défaut de décret, il pourrait être soutenu que les préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux peuvent être réparés dans le cadre de cette action

4/ Un préjudice ayant pour cause commune un manquement de même nature à des obligations légales ou contractuelles

Au sens du droit de la responsabilité civile, les préjudices réparables doivent résulter d’un  même manquement, d’une ou plusieurs personnes, en d’autres termes d’un même fait générateur.

Dans le cadre de cette action, le fait générateur du dommage n’est pas clairement identifié par la formulation « manquement de même nature » aux « obligations légales ou contractuelles ».

Ainsi, une grande diversité de comportement fautif peut justifier l’exercice d’une action de groupe, tels que la carence ou l’inertie de l’administration, l’adoption de décisions illégales, les retards pour prendre une décision ou en assurer l’exécution.

II. Les différents domaines d’application de la loi

L’article L. 77-10-1 du Code de justice administrative prévoit que l’action pourra concerner les domaines suivants :

1/ L’action de groupe « discriminations» qui se subdivise elle-même en :

  • Une action de groupe généraliste en matière de discriminations désormais régie par les dispositions modifiées de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Dans cette hypothèse, plusieurs candidats à un emploi, à un stage ou à une période de formation ou plusieurs agents publics estimant avoir fait l’objet d’une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur un même motif et imputable à un même employeur public, pourront agir contre cet employeur.

Cette action a pour spécificité d’être ouverte aux organisations syndicales de fonctionnaires représentatives au sens du III de l’article 8 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

  • Une action de groupe plus spécifiquement dédiée aux discriminations imputables à un employeur public ou privé introduite au chapitre XI du Code de justice administrative (CJA).

2/ Les actions de groupe en matière environnementale (article L. 142-3-1 du Code de l’environnement) :

L’action est notamment réservée aux dommages relatifs à la protection de la nature et de l’environnement, à l’amélioration du cadre de vie, à la protection de l’eau, de l’air, des sols, des sites et paysages, à l’urbanisme, à la pêche maritime ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances, la sûreté nucléaire et la radioprotection.

Elle est ouverte aux associations agréées au titre de la protection de l’environnement, ainsi qu’aux associations agréées dans des conditions définies par décret en Conseil d’État, dont l’objet statutaire comporte la défense des victimes de dommages corporels ou la défense des intérêts économiques de leurs membres.

3/ Les actions de groupe portant sur la protection des données à caractère personnel (article 43 ter de la L. n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés) :

Cette action permet notamment aux usagers de services publics de faire cesser une atteinte relative aux données personnelles devant le Juge administratif, lorsque le responsable du traitement est une autorité administrative.

4/ Les actions de groupe en matière de santé (article L. 1143-1 et suivants du Code de la santé publique) :

La Loi applique le socle procédural des articles L. 77-10-1 et suivants du CJA à l’action déjà existante en matière de santé.

Devant le Juge administratif, elle permet à toute association agréée d’usagers du système de santé d’agir en justice afin d’obtenir la réparation des préjudices résultant de dommages corporels subis par des usagers placés dans une situation similaire ou identique et ayant pour cause commune un manquement d’un producteur ou d’un fournisseur d’un produit de santé ou d’un prestataire utilisant l’un de ces produits à leurs obligations légales ou contractuelles, dans le cadre des établissements publics de santé.

III. La procédure

Le dispositif applicable aux juridictions administratives reprend l’intégralité du mécanisme de l’action de groupe prévu pour le Juge judiciaire, à la différence que l’action est dirigée à l’encontre d’une personne morale de droit public ou chargée de la gestion d’un service public.

A/ Qui peut engager l’action?

L’article L. 77-10-4 du Code de justice administrative prévoit que « seules les associations agréées et les associations régulièrement déclarées depuis cinq ans au moins et dont l’objet statutaire comporte la défense d’intérêts auxquels il a été porté atteinte » peuvent exercer l’action de groupe.

Il y a là une différence majeure avec l’action de groupe de la Loi Hamon.

En effet, l’article L. 623-1 du Code de la consommation, tel qu’issu de la Loi Hamon, prévoit que seules peuvent agir les associations de défense des consommateurs représentatives au niveau national et agréées en application de l’article L. 811-1 du Code de la consommation. Cet article prévoit d’ailleurs que les conditions d’agrément et de retrait sont fixées par décret.

La loi de modernisation de la justice au XXIème siècle ne comporte aucune précision quant à un décret d’application. Les conditions sont donc moins strictes même si peu d’associations sont titulaires de cet agrément et que la durée de cinq ans est relativement longue notamment dans le cadre d’évènement soudain et imprévisible.

B/ Contre qui ?

Cette action de groupe permet de poursuivre des personnes morales de droit public et des organismes de droit privé chargé de la gestion d’un service public (article L. 77-10-3 du Code de justice administrative).

C/ Devant quelle juridiction ?

Contrairement à l’action de groupe exercée devant le Juge judiciaire précisant qu’elle relève du tribunal de grande instance (article L. 211-9-2 du Code de l’organisation judiciaire), la Loi de modernisation de la justice au XXIème siècle ne précise pas pour l’action de groupe devant le Juge administratif les règles de compétence applicable au sein de la juridiction administrative.

Il peut donc en être déduit que les actions de groupe suivront le circuit juridictionnel habituel et les règles de compétence matérielle et territoriale applicables aux actions en responsabilité.

D/ Comment se déroule la procédure?

Comme pour la Loi Hamon, l’action de groupe devant le Juge administratif se décompose en trois étapes :

1/ L’introduction de l’instance

  • la décision administrative préalable

La loi de modernisation de la justice au XXIème siècle ne le rappelle pas. Toutefois, la règle de la décision administrative préalable s’applique pleinement dans le silence de la loi à l’action de groupe devant le Juge administratif ce qui oblige le demandeur à lier préalablement le contentieux.

  • la mise en demeure

L’article L. 77-10-5 du Code de justice administrative conditionne l’engagement de l’action à une mise en demeure préalable adressée à l’auteur du dommage par la personne ayant qualité pour agir, afin que celui-ci fasse cesser le manquement ou procède à la réparation des préjudices subis.

Ce même article prévoit qu’un délai de quatre mois est laissé à la personne mise en demeure. Au terme de ce délai une action de groupe peut être engagée. Si une action de groupe est introduite avant l’expiration de ce délai, elle est déclarée irrecevable.

Ces dispositions ont pour but d’encourager un règlement pacifié et extra-juridictionnel de la situation litigieuse.

2/ Cessation du manquement ou jugement sur la responsabilité

  • la cessation de manquement

L’article L. 77-10-6 du Code de justice administrative précise que l’action de groupe peut tendre à la cessation d’un manquement. Le Juge administratif peut prendre toutes les mesures utiles à cette fin et notamment une astreinte.

  • le jugement-cadre en reconnaissance de responsabilité

 L’article L. 77-10-7 du Code de justice administrative prévoit que le Juge statue sur la responsabilité du défendeur. Le Juge définit le groupe de personnes à l’égard desquelles la responsabilité du défendeur est engagée ce qui suppose la définition de critères précis permettant le rattachement audit groupe et également les préjudices susceptibles d’être réparés.

Il doit par ailleurs procéder aux mesures de publicité adéquates d’après l’article L. 77-10-8 du Code de justice administrative afin de permettre l’information des victimes mais aussi la constitution du groupe grâce à l’adhésion expresse et a posteriori des victimes potentielles.

3/ L’indemnisation

Le mode d’indemnisation des préjudices peut suivre deux voies distinctes :

  • la procédure collective de liquidation prévue à l’article L. 77-10-9 du Code de justice administrative 

 Ce système consiste dans l’attribution d’une somme globale censée couvrir l’indemnisation de toutes les victimes.

Une habilitation est délivrée par le Juge, sur la base de laquelle le demandeur peut négocier directement avec le défendeur l’indemnisation des préjudices subis par les personnes constituant le groupe à partir d’éléments généraux de cadrage préalablement définis dans la décision de justice.

Les victimes potentielles peuvent rallier le groupe en se signalant auprès de l’association demanderesse (article L. 77-10-13 du Code de justice administrative).

Le Juge ayant préalablement statué sur la responsabilité est obligatoirement saisi aux fins d’homologation de l’accord préalablement entériné par les parties et accepté par les membres du groupe (article L.77-10-14 du Code de justice administrative).

  • la procédure individuelle de réparation

L’article L. 77-10-10 du Code de justice administrative prévoit que les personnes souhaitant adhérer au groupe peuvent alors formuler, soit auprès de la personne dont la responsabilité aurait été préalablement reconnue par le Juge, soit auprès du demandeur à l’action recevant mandat aux fins d’indemnisation une demande de réparation.

Sur cette base, la personne déclarée responsable procède à l’indemnisation individuelle des préjudices (article L. 77-10-11 du Code de justice administrative).

D’après l’article L. 77-10-12 du Code de justice administrative, faute d’obtenir satisfaction, les victimes peuvent saisir le Juge ayant préalablement statué sur la responsabilité, afin d’obtenir la réparation de leur préjudice dans les conditions et limites fixées par le premier jugement.

***

L’introduction d’une telle action répond au besoin impérieux de doter l’appareil juridique français d’un outil efficace afin de protéger les droits des usagers des services publics et des fonctionnaires ; lesquels étaient jusqu’alors, sur le plan collectif, dépourvus de tous moyens d’actions à l’effet d’engager la responsabilité d’une personne morale de droit public.

La Loi de modernisation de  la justice du XXIème siècle vient donc combler le vide qui existait jusqu’alors, en permettant aux usagers ou aux administrés de mutualiser leurs moyens d’actions afin de solliciter l’engagement de la responsabilité des personnes morales de droit public mais surtout la cessation rapide des troubles qui leurs sont occasionnés.

Au-delà des objectifs poursuivis par cette loi, l’on peut d’ores et déjà regretter que le législateur ne soit pas allé plus loin.

Tout d’abord, le recours aux associations agréées ou représentatives sur le plan national est maintenu alors qu’elles ont montré leurs limites dans les précédentes actions de groupe qui ont été introduites en droit français.

L’avocat est une nouvelle fois écarté dudit dispositif ; de même que le Défenseur des droits alors qu’il est censé être l’intermédiaire entre les administrations et les administrés.

Enfin, il est regrettable que le législateur n’ait pas tenu compte de la spécificité du droit administratif pour prévoir des règles procédurales propres à cette action, même si on peut se féliciter qu’il ait été envisagé le règlement amiable préalable de tels litiges.

Si quelques règles ont été ajoutées, la Loi de modernisation de la justice au XXIème siècle repose, s’agissant de la procédure, essentiellement sur les règles prévues par  la Loi Hamon.

Dans l’attente de l’adoption du décret d’application, l’efficacité de cette action reste incertaine.

Hakim ZIANE
Avocat à la cour

(1) Rapport du 12 janvier 2009 sur l’introduction d’une action collective en droit administratif

Plans climat-air-énergie territorial (PCAET) : le rôle des services de l’Etat précisé

Les plans climat-air-énergie territorial prévus à l’article L. 229-26 du Code de l’environnement  sont les outils opérationnels de coordination de la transition énergétique sur le territoire. Ils doivent être élaborés au niveau intercommunal et puis révisés tous les 6 ans.

Après que leur contenu ait été précisé par un décret n° 2016-849 du 28 juin 2016 relatif au plan climat-air-énergie territorial , une note a été diffusée le 16 janvier dernier par le ministère de l’Environnement afin de demander aux préfets de région d’informer les « obligés » de la nécessité d’établir leur plan climat-air-énergie territorial (PCAET).

La note détaille ainsi les rôles des préfets, des services déconcentrés du ministère de l’environnement de l’énergie et de la mer et de l’ADEME dans l’élaboration et la mise en œuvre de ces plans pour les collectivités en charge de l‘élaboration des PCAET.

Pour mémoire, les délais fixés aux établissements publics à coopération intercommunale sont les suivants :

  • les EPCI de plus 50 000 habitants existants au 1er janvier 2015 et la Métropole de Lyon doivent élaborer leur PCAET avant le 31 décembre 2016 ;
  • les EPCI de plus 20 000 habitants existants au 1er janvier 2017 doivent élaborer leur PCAET avant le 31 décembre 2018.

Ces différents EPCI ont la responsabilité de l’animation territoriale et de la coordination de la transition énergétique sur leur territoire. Le PCAET peut être élaboré par le porteur du schéma de cohérence territoriale (SCoT) si tous les EPCI du territoire du SCoT lui transfèrent la compétence.

La note diffusée vient, par ailleurs, confirmer qu’aucun délai n’est fixé pour l’élaboration des PCAET, sur le territoire de la Métropole du Grand Paris, par les établissements publics territoriaux et la ville de Paris.  Elle indique par ailleurs que ces PCAET devront être compatibles avec le PCAET de la métropole du Grand Paris.

Dans ce contexte, la note détaille le rôle des services de l’Etat qui devra se concentrer sur  l’information des EPCI sur leurs obligations et les outils à leur disposition, qu’ils soient méthodologiques ou financiers et  le « dire » de l’État, terme qui englobe les interventions à mettre en œuvre par les services de l’Etat : communication préalable des informations utiles, avis sur le projet de PCAET, suivi des travaux dans le cadre, autant que possible, d’un réseau d’échange État-collectivités.

Enfin, la note entend rappeler l’ambition des PCAET, qui ne doivent pas se concevoir comme une juxtaposition de plans d’action climat / air / énergie mais bien comme le support d’une dynamique, en prévoyant des ambitions atteignables et en permettant en particulier de prévenir ou réduire les émissions de polluants atmosphériques.

Publication des prochains tarifs des réseaux de distribution d’électricité (TURPE 5) en faveur de la transition énergétique et des consommateurs

Délibération du 17 novembre 2016 portant décision sur les tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité dans les domaines de tension HTA et BT

Délibération du 17 novembre 2016 portant décision sur les tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité dans le domaine de tension HTB

Délibération du 19 janvier 2017 portant décision sur la demande de la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, d’une nouvelle délibération sur les tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité dans les domaines de tension HTA et BT

Les délibérations de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) portant sur les tarifs d’utilisation des réseaux de distribution d’électricité (TURPE) ont été publiées au Journal Officiel du 28 janvier 2017. 

Très attendues, ces délibérations qui concernent l’évolution des tarifs s’appliqueront à partir du 1er août 2017 aux utilisateurs raccordés aux réseaux de distribution en haute tension (HTB) et en basse tension (HTA/BT) pour une durée de 4 ans (période tarifaire d’août 2017 à août 2021).

Ces tarifs ont pour but de garantir à l’ensemble des consommateurs et des producteurs d’électricité un accès transparent et non discriminatoire aux réseaux publics, afin de permettre une concurrence non faussée entre les fournisseurs d’électricité. 

Leur calcul doit ensuite aboutir à ce que les recettes des gestionnaires de ces réseaux (la société Enedis, ex- ERDF et la société EDF) couvrent les charges engagées pour l’exploitation, le développement et l’entretien des réseaux. Le coût de l’utilisation du réseau est ensuite facturé au fournisseur par le gestionnaire de réseau auquel est raccordé le consommateur.

Disposant d’une compétence exclusive en la matière, la CRE a initié au début de l’année 2015  l’élaboration longue et complexe de ces tarifs (importants travaux préparatoires et consultations diverses des parties prenantes).

A l’issue de ce processus d’élaboration, la CRE a adopté, le 17 novembre 2016, deux délibérations portant évolution du tarif d’acheminement pour la distribution publique d’électricité, dite TURPE 5 HTA/BT (pour le réseau de distribution) et TURPE 5 HTB (pour le réseau de transport).

Ces deux délibérations devaient répondre à deux enjeux majeurs. D’une part, celui d’accompagner l’évolution du système électrique en ciblant les évolutions des nouveaux usages des réseaux (autoproduction, stockage, flexibilité de la demande,  développement des énergies renouvelables, véhicules électriques…) ainsi que l’émergence des réseaux intelligents (smart grids) et de l’autoconsommation. D’autre part, celui d’inciter les utilisateurs de réseaux à adapter leur comportement pour minimiser les coûts d’investissement et d’exploitation.

Enfin, l’objectif était aussi, et en particulier pour le TURPE 5 HTA/BT, de donner  aux gestionnaires de réseaux de distribution tous les moyens nécessaires pour répondre aux enjeux de la transition énergétique.

Après avoir consulté le Conseil supérieur de l’énergie (CSE) qui regroupe des représentants des consommateurs, des collectivités, des parlementaires, des producteurs et des distributeurs d’énergie, et qui avait rendu un avis  défavorable,  la CRE a transmis le 18 novembre 2016 ses deux projets de délibération, conformément à l’article L. 341-3 du Code de l’énergie, à la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, ainsi qu’au ministre de l’économie et des finances.

Toutefois, de manière assez inédite mais dans le strict cadre procédural fixé par les textes, la ministre Ségolène Royal, par une décision du 12 janvier 2017 publiée le 17 janvier,  a demandé à la CRE, de prendre une nouvelle délibération, au motif notamment que le projet de tarif ne prenait pas suffisamment en compte les enjeux liés à la transition énergétique exprimés dans ses orientations de politique énergétique.

C’est donc par une nouvelle délibération du 18 janvier 2017 que la CRE a été contrainte de répondre à la Ministre afin de justifier l’évolution des tarifs qu’elle avait décidée.

Profitant de cette rare occasion qui lui était donnée, la CRE n’a pas hésité à rappeler sa compétence exclusive en matière de fixation des tarifs et a confirmé que le nouveau tarif du réseau de distribution (celui concernant le réseau de transport n’étant pas visé par la Ministre) prenait bien en compte les enjeux de la transition énergétique et préservait le pouvoir d’achat des consommateurs :

«  Estimant avoir pris en compte les orientations de politique énergétique qui lui ont été communiquées par la ministre, elle [la CRE] décide qu’il n’y a pas lieu de modifier sa décision du 17 novembre 2016. Une évolution plus marquée du tarif, liée à la maîtrise de la pointe de consommation ou à la rémunération du capital d’Enedis, conduirait à une hausse de plus de 3 % de la facture des particuliers. Le tarif fixé par la CRE, qui a également pour mission de veiller au bon fonctionnement du marché au bénéfice des consommateurs, limite cette hausse à 2 % ».

En réplique, la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer a fait savoir par un communiqué de presse du 21 janvier 2017 être «  étonnée qu’un refus ait pu être formulé en 48 heures, alors que la CRE dispose du temps pour examiner la nouvelle donne de la loi de transition énergétique (autoconsommation, stockage, économies, raccordement des énergies renouvelables), le nouveau système tarifaire ne devant entrer en vigueur qu’à l’été 2017 ».  Et, en conséquence, a indiqué qu’elle entendait examiner «  les suites à donner à la délibération de la CRE pour que les tarifs puissent mieux prendre en compte ces évolutions dès 2017, et notamment les conditions d’une nouvelle délibération ».

Ces délibérations tarifaires ont finalement été publiées au Journal officiel le 28 janvier 2017 pour une entrée en vigueur au 1er aout prochain. Ce faisant, la CRE rappelle le pouvoir indépendant dont elle dispose, en l’état des textes actuels, en matière de fixation des tarifs.

Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre existant au regroupant plus de 20 000 habitants ont jusqu’au 31 décembre 2018 pour adopter un plan climat-air-énergie territorial

L’article L. 229-26 du Code de l’environnement, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, prévoit que « les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre existant au 1er janvier 2017 et regroupant plus de 20.000 habitants adoptent un plan climat-air-énergie territorial au plus tard le 31 décembre 2018 ».

Cette obligation ne concernait, jusque-là, que les EPCI à fiscalité propre regroupant plus de 50.000 habitants.

La loi du 17 août 2015 a donc élargi le champ des collectivités locales concernées qui ont deux ans pour élaborer leur plan à compter du 1er janvier 2017.

On rappellera que le plan climat-air-énergie territorial définit notamment :

  • les objectifs stratégiques et opérationnels de la collectivité publique afin d’atténuer le changement climatique, de le combattre efficacement et de s’y adapter, en cohérence avec les engagements internationaux de la France ;
  • le programme d’actions à réaliser afin notamment d’améliorer l’efficacité énergétique, de développer de manière coordonnée des réseaux de distribution d’électricité, de gaz et de chaleur, d’augmenter la production d’énergie renouvelable, de valoriser le potentiel en énergie de récupération, de développer le stockage et d’optimiser la distribution d’énergie, de développer les territoires à énergie positive, de limiter les émissions de gaz à effet de serre et d’anticiper les impacts du changement climatique.

Il doit par ailleurs être compatible avec le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie défini à l’article L. 222-1 du Code de l’environnement et prendre en compte, le cas échéant, le schéma de cohérence territoriale.

Enfin, lorsque tout ou partie du territoire qui fait l’objet du plan climat-air-énergie territorial est inclus dans un plan de protection de l’atmosphère défini à l’article L. 222-4 du même Code, le plan climat-air-énergie est compatible avec les objectifs fixés par le plan de protection de l’atmosphère.

 

Le Juge judiciaire est incompétent pour connaître d’une demande tendant à obtenir l’enlèvement d’éoliennes

La Cour de cassation a, dans un arrêt du 25 janvier 2017, jugé que le Juge judiciaire est compétent pour se prononcer sur les dommages et intérêts à allouer aux tiers lésés par le voisinage d’une éolienne, ainsi que sur les mesures propres à faire cesser le préjudice que cette installation pourrait causer dans l’avenir, « à condition que ces mesures ne contrarient pas les prescriptions édictées par l’administration en vertu des pouvoirs de police spéciale qu’elle détient » en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) sur le fondement des articles L. 511-1 et suivants du Code de l’environnement.

En limitant sa compétence en matière d’allocation de dommages et intérêts aux prescriptions administratives, la Cour de cassation en a ainsi conclu que le Juge judiciaire était incompétent pour connaître de la demande tendant à obtenir l’enlèvement d’éoliennes, au motif que leur implantation et leur fonctionnement seraient à l’origine d’un préjudice visuel et esthétique et de nuisances sonores.

Elle a en effet estimé qu’il ne lui revenait pas de « substituer sa propre appréciation à celle que l’autorité administrative a porté sur les dangers ou inconvénients que peuvent présenter ces installations, soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature, de l’environnement et des paysages, soit pour l’utilisation rationnelle de l’énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique », en référence aux dispositions de l’article L. 511-1 du Code de l’environnement relatif au champ d’application des dispositions relatives à la police des ICPE.

L’obligation de reprise des déchets issus de matériaux, produits et équipements de construction est conforme aux droits et libertés garantis par la Constitution

Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 17 janvier 2017, a déclaré conforme aux droits et libertés garantis par la Constitution les dispositions de l’article L. 541-10-9 du Code de l’environnement, créé par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique, qui institue une obligation de reprise des déchets issus des matériaux, produits et équipements de construction.

En application de ces dispositions, depuis le 1er janvier 2017, « tout distributeur de matériaux, produits et équipements de construction à destination des professionnels s’organise, en lien avec les pouvoirs publics et les collectivités compétentes, pour reprendre, sur ses sites de distribution ou à proximité de ceux-ci, les déchets issus des mêmes types de matériaux, produits et équipements de construction à destination des professionnels, qu’il vend ».

Ces dispositions ont été précisées par le décret n° 2016-288 du 10 mars 2016 portant diverses dispositions d’adaptation et de simplification dans le domaine de la prévention et de la gestion des déchets, codifié aux articles D. 543-288 et suivants du Code de l’environnement. Celui-ci fixe notamment la surface de l’unité de distribution à partir de laquelle les distributeurs sont concernés par l’obligation de reprise.

Le non-respect de cette obligation est puni de deux ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende (article L. 541-46 du Code de l’environnement).

La Confédération française du commerce de gros et du commerce international, auteure de la question prioritaire de constitutionnalité, soutenait que les dispositions précitées étaient imprécises et étaient, de ce fait, entachées d’incompétence négative dans des conditions de nature à porter atteinte à la liberté d’entreprendre et au principe d’égalité.

Elle considérait également que cette imprécision portait atteinte au principe de légalité des délits et des peines, et que les dispositions contestées portaient directement atteinte à la liberté d’entreprendre, à la liberté contractuelle et au principe d’égalité devant la loi.

Le Conseil constitutionnel a écarté l’ensemble de ces moyens.

Il a considéré, en premier lieu, que les dispositions en cause étaient suffisamment précises et ne méconnaissaient pas la liberté d’entreprendre.

A cet égard, les Sages ont d’abord relevé que l’objectif poursuivi, à savoir limiter le coût de transport des déchets issus du bâtiment et des travaux publics et éviter leur abandon en pleine nature, était d’intérêt général.

Ils ont ensuite indiqué que les débiteurs de l’obligation de reprise, qui concerne les distributeurs s’adressant, à titre principal, aux professionnels du bâtiment et de la construction, c’est-à-dire aux « principaux pourvoyeurs des produits, matériaux et équipements de construction dont sont issus » les déchets concernés, étaient identifiables.

Ils se sont enfin assurés que l’obligation mise en place est suffisamment délimitée au regard de la liberté d’entreprendre.

À ce titre, le Conseil constitutionnel a relevé que « le législateur pouvait, sans méconnaître sa compétence, renvoyer au pouvoir réglementaire la fixation de la surface d’unité de distribution à partir de laquelle les distributeurs sont assujettis à l’obligation ainsi créée ». On rappellera en effet que, en matière d’obligations civiles ou commerciales, la compétence du législateur se limite, conformément à l’article 34 de la Constitution, à la détermination des principes fondamentaux.

Le Conseil constitutionnel a ensuite constaté que les déchets objets de l’obligation devaient répondre à la double condition d’être « issus de matériaux de même type que ceux vendus par le distributeur », et remis par les seuls professionnels, pour en conclure que le législateur avait « suffisamment défini la nature des déchets remis par les professionnels qui font l’objet de l’obligation de reprise ».

Il a encore considéré que le distributeur était libre de décider des modalités, notamment financières, selon lesquelles il accomplira l’obligation de reprise qui lui incombe.

Enfin, le Conseil constitutionnel a répondu à l’argument avancé par l’association requérante selon lequel le législateur n’avait pas fixé de limite en volume à l’obligation de reprise. Il s’est, sur ce point, appuyé sur le fait que « le législateur a fait dépendre l’obligation de reprise de l’activité principale du distributeur ». Il en a déduit que le législateur avait « entendu limiter celle-ci dans une mesure telle qu’il n’en résulte pas une dénaturation de cette activité principale ».

Le Conseil constitutionnel a, en deuxième lieu, écarté le moyen pris de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi entre les distributeurs s’adressant exclusivement à des professionnels du bâtiment et des travaux publics et ceux qui s’adressent à ces mêmes professionnels seulement à titre accessoire.

Sur ce point, il a en effet jugé que les distributeurs visés à l’article L. 541-10-9 du Code de l’environnement étaient les principaux fournisseurs des professionnels et « ne sont pas placés, au regard de l’impact de leur activité dans la production des déchets objets de l’obligation de reprise, dans la même situation que les distributeurs s’adressant aux mêmes professionnels à titre seulement accessoire ».

La différence de traitement est donc justifiée par la différence de situation entre les différentes catégories de distributeurs.

Le Conseil constitutionnel a, en troisième lieu, écarté sans plus de motivation les moyens pris de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines et de la liberté contractuelle.

On relèvera que ces dispositions sont sources d’inquiétudes pour les collectivités territoriales compétentes en matière de déchets.

En effet, le caractère opérationnel de la mesure ainsi prévue est critiqué et les collectivités craignent que, face à l’insuffisance des déchetteries professionnelles, les flux de déchets soient dirigés vers des déchetteries publiques qui ne sont pas adaptées pour accueillir les déchets concernés.

Eco-organismes et collectivités : les engagements à venir pour la période 2018-2022

Le cahier des charges relatif à la filière REP des emballages ménagers, issu de l’arrêté du 29 novembre 2016

L’avis n°16-A-27 rendu par l’Autorité de la concurrence, le 27 décembre 2016, concernant l’ouverture de la filière traitement des emballages ménagers à plusieurs éco-organismes

La responsabilité élargie des producteurs (REP) est une notion qui a vu le jour avec l’adoption du décret n° 92-377 du 1er avril 1992 portant application, pour les déchets résultant de l’abandon des emballages, de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 modifiée, relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux.

Si elle vise les personnes fabriquant, détenant en vue de la vente ou mettant en vente ou à disposition de l’utilisateur des produits générateurs de déchets, et donc plutôt des personnes privées, la REP donne à ces dernières un rôle dans la prévention et la gestion des déchets. Ce qui les conduit notamment à participer à l’activité des collectivités publiques dans le domaine du tri et de la collecte des déchets ménagers.

A la suite de l’adoption de l’arrêté du 29 novembre 2016 relatif à la procédure d’agrément et portant cahier des charges des éco-organismes de la filière des déchets d’emballages ménagers pour la période 2018-2022 et de l’avis n° 16-A-27 rendu par l’Autorité de la concurrence, le 27 décembre 2016, concernant l’ouverture de la filière traitement des emballages ménagers à plusieurs éco-organismes, la présentation des relations à venir entre les éco-organismes et les collectivités semble opportune.

I – La constitution des éco-organismes

En application de l’article L. 541-10 du Code de l’environnement, le principe de la responsabilité élargie du producteur (REP) implique « qu’il peut être fait obligation aux producteurs, importateurs et distributeurs de ces produits ou des éléments et matériaux entrant dans leur fabrication de pourvoir ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent ».

Ces producteurs, importateurs et distributeurs peuvent s’acquitter de leur obligation de deux manières :

  • soit par la mise en place de systèmes individuels de collecte et de traitement des déchets issus de leurs produits ;
  • soit collectivement, par le biais d’éco-organismes auxquels ils versent une contribution financière et transfèrent leur obligation.

Les éco-organismes sont agréés par l’Etat pour une durée maximale de six ans renouvelable s’ils établissent qu’ils disposent des capacités techniques et financières pour répondre aux exigences d’un cahier des charges, fixé par arrêté interministériel, et après avis de l’instance représentative des parties prenantes de la filière.

On notera ici à toutes fins utiles qu’un décret est récemment venu modifier les dispositions relatives aux conditions d’agrément des éco-organismes prévue aux articles R. 541-86 et suivants du Code de l’environnement.

II – Le rôle des éco-organismes dans la prévention et la gestion des déchets ménagers auprès des collectivités

Les éco-organismes jouent un rôle important dans la prévention et la gestion des déchets auprès des collectivités dès lors qu’il leur appartient de contribuer financièrement aux opérations de tri et de collecte des déchets ménagers, entreprises par les autorités compétentes.

Ainsi, aux termes du cahier des charges relatif à la filière REP des emballages ménagers, issu de l’arrêté du 29 novembre 2016, il appartient  aux éco-organismes de conclure avec les collectivités un contrat-type visant à mettre en œuvre les principes généraux et les objectifs définis dans ledit contrat pour la période 2018-2022 (un contrat-type transitoire pour 2017 est également prévu).

Les déchets concernés sont donc les emballages ménagers, qui sont définis par l’Autorité de la concurrence, dans son avis du 27 décembre 2016, comme étant « tout emballage d’un produit vendu ou remis gratuitement à un ménage qui est mis sur le marché en vue de la consommation ou de l’utilisation du produit qu’il contient et dont le ménage se défait  ou  a  l’intention  de  se  défaire,  quel  que  soit  le  lieu  d’abandon  (dans  la  poubelle  des  ménages ou hors foyer) ».

Le cahier des charges prévoit alors que l’éco-organisme « met en œuvre les actions nécessaires pour contribuer activement à ce que soit atteint, en 2022, l’objectif national de 75 % de recyclage de l’ensemble des emballages ménagers (dont leurs détenteurs se défont au domicile des ménages comme en dehors des foyers) mis sur le marché en France ». L’éco-organisme doit, par ailleurs, couvrir « les coûts de collecte, tri et traitement supportés par les collectivités territoriales ayant contracté avec l’un quelconque d’entre eux à hauteur de 80 % des coûts nets de référence d’un service de collecte et de tri optimisé ».

Le contrat-type signé entre l’éco-organisme et la collectivité compétente en matière de déchet prévoit les engagements de chacun dans le domaine considéré. En substance, les engagements doivent, à suivre le cahier des charges, être les suivants :

  • s’agissant de l’éco-organisme, il doit : verser des soutiens financiers à la collectivité territoriale contractante ; transmettre aux collectivités territoriales annuellement un récapitulatif justifié des tonnages soutenus et des soutiens versés ; permettre une simplicité des modalités administratives ; assurer le contrôle des déclarations des tonnages.
  • s’agissant de la collectivité, elle s’engage à : assurer une  collecte  séparée  prenant  en  compte l’ensemble  des  déchets d’emballages soumis à la consigne de tri ; mettre  en  place  d’ici  2022,  l’extension des  consignes  de  tri  à l’ensemble des emballages plastiques ; mettre  à  jour  ses  consignes  de  tri  des  emballages  sur  tous  les supports ; déclarer  les  tonnages  recyclés,  au  moins  semestriellement ; accepter  que  les  données  individuelles  qu’elle  transmet  à l’éco-organisme  soient communiquées   à   l’ADEME,   dans   le   respect   du   secret   industriel   et commercial ainsi que les  données  individuelles  relatives  à  la  collecte  et  au  traitement  des déchets d’emballages qu’elle transmet au titulaire soient communiquées aux conseils  régionaux  dans  le  cadre  de  l’élaboration  et  du  suivi  des  plans régionaux de prévention et de gestion des déchets, dans le respect du secret industriel  et    Les  modalités  de  ce  transfert  font  l’objet  d’une convention.

Ce contrat fixe également des objectifs pour chacune des parties :

  • à l’éco-organisme, qui s’engage à verser un soutien de transition entre les barèmes E et F selon les modalités décrites dans le cahier des charges et à apporter à la collectivité les soutiens techniques nécessaires pour l’aider à la mise en œuvre des actions d’amélioration de la collecte et du tri et des différentes étapes mises en place de l’extension des consignes de tri, notamment les outils techniques.
  • à la collectivité, qui s’engage à maintenir ses performances de recyclage pour chaque matériau, chaque année, au moins au niveau de celles de 2016, suivant des critères d’appréciation clairement définis dans le contrat ; rechercher les moyens d’améliorer les performances environnementales et technico-économiques de la collecte et du tri, en veillant à assurer un niveau de qualité de service au public au moins comparable et à un coût maîtrisé pour la collectivité ; fournir, au plus tard avant fin 2019, un échéancier prévisionnel de mise en œuvre des moyens permettant que l’extension des consignes de tri soit opérationnelle avant fin 2022.

On notera également une particularité pour la période 2018-2022 résidant dans l’obligation pour les éco-organismes de proposer à la collectivité, en complément des soutiens financiers qui lui incombent, des mesures d’accompagnement pour le déploiement de nouveaux moyens de collecte et de tri en vue de l’élargissement des consignes de tri ou pour l’optimisation de leur dispositif existant afin de contribuer à l’atteinte des objectifs nationaux fixés tout en optimisant les coûts. Le montant alloué aux mesures d’accompagnement est d’au moins 150 millions d’euros pour l’ensemble  des éco-organismes  au titre  de l’ensemble  de la période d’agrément.

III – Vers une filière opérationnelle favorisant les éco-organismes au détriment des collectivités

Dans son avis du 27 décembre 2016, l’Autorité de la concurrence acte du fait que la période 2018-2022 doit permettre aux éco-organismes de se développer et ainsi faire jouer la concurrence, tout en constatant que leur marge de manœuvre reste limitée pour avoir un réel impact sur le coût de la filière.

Le rapport fait alors apparaître le manque d’efficacité des modalités de collecte et de tri sélectifs par les collectivités qui n’est pas suffisamment corrigé par les participations financières versées par les éco-organismes. Il insiste sur le fait que « les collectivités qui ne sont pas des entreprises, n’ont pas nécessairement des comportements vertueux en termes de coûts de collecte, de tri ou de traitement, comme le montrent les résultats très contrastés relevés en France. Par ailleurs, les collectivités n’entrent pas en concurrence entre elles ».

L’Autorité préconise alors d’adopter des mesures visant à développer la concurrence entre les éco-organismes à qui il conviendrait de confier, dans un souci opérationnel, la collecte sélective, du tri et du traitement des déchets d’emballages ménagers, ainsi que cela existe déjà pour les déchets d’équipements électriques et électroniques.

Face à cette situation, l’Association des Maires de France (AMF) a réagi en publiant un communiqué de presse, le 24 janvier dernier, par lequel elle indiquait ne pouvoir « accepter   que   plus   de   25   ans   d’investissements   pour   des équipements  de  collecte  et  de  tri, réalisés  par  les communes  et  intercommunalités, soient rayés d’un trait de plume en préconisant le passage à une filière opérationnelle, c’est-à-dire dans   laquelle   le   tri  serait   réalisé  directement   par   les  éco-organismes.   En 2015, les collectivités avaient déjà investi plus de 1,5 milliard (hors foncier). Elles vont encore devoir investir  des  sommes  conséquentes, entre  1,2  et  1,8  milliard, pour  accueillir  les  nouveaux emballages en plastique et optimiser leurs équipements. Dans  ce  contexte,  le  passage brutal à  une  filière  opérationnelle rendrait inutiles ces équipements  dans  6  ans ».

Rejetant ainsi le principe d’une filière gérée par les éco-organismes, si ce n’est pour les collectivités qui entreprendraient cette démarche volontairement, l’AMF déplore qu’ « au moment où les pouvoirs publics entendent dynamiser la politique de recyclage en mettant en application la loi sur la transition énergétique pour une croissance verte […] il soit envisagé d’en écarter les collectivités qui en sont les moteurs ».

Pour sa part, l’association AMORCE, qui regroupe de très nombreux acteurs du secteur des déchets (collectivités, associations, entreprises) a vivement réagi à l’adoption de l’arrêté du 29 novembre 2016 en considérant, dans son communiqué du 15 décembre 2016 que « la publication du cahier des charges d’agrément pour la période 2018-2022, issu d’une négociation en catimini à laquelle Amorce n’a pas été associée, représente un vrai recul pour les collectivités. Ce texte sous-évalue en effet délibérément les coûts de gestion d’emballages pour réduire (à tonnage identique) le financement par les éco-organismes de la collecte, du tri et de la valorisation des déchets d’emballages assurés par les collectivités territoriales, et ce depuis 2018 ».

Délibération de la Commission de Régulation de l’Énergie du 5 janvier 2017 portant approbation de la méthodologie pour la fourniture des données sur la production et la consommation

La délibération du 5 janvier 2017 s’inscrit dans le cadre de l’application des dispositions de l’article 9(6) du règlement (UE) 2015/1222 de la Commission du 24 juillet 2015 établissant une ligne directrice relative à l’allocation de la capacité et à la gestion de la congestion (règlement « Capacity Allocation and Congestion Management », ci-après le « règlement CACM »), dont il résulte que les autorités de régulation des différents Etats membres de l’Union Européenne sont compétentes pour approuver les modalités et conditions ou les méthodologies requises en vue de la mise en place du calcul coordonné de capacité aux échéances journalière et infra journalière, notamment les méthodologies pour la fourniture de données sur la production et la consommation.

Le 13 juin 2016, RTE a adressé à la CRE une proposition de méthodologie pour la fourniture des données sur la production et la consommation élaborée par tous les gestionnaires de réseaux de transports, conformément aux dispositions des articles 9(1) et 16(1) du règlement CACM.

Au cours du mois d’octobre 2016, toutes les autorités de régulation des Etats membres de l’Union Européenne  sont parvenues à un accord concernant cette méthodologie de fourniture des données de production et de consommation.

La délibération de la CRE du 5 janvier 2017 approuve cette méthodologie après en avoir rappelé les caractéristiques principales (point 2.1 de la délibération).

Délibération de la Commission de Régulation de l’Énergie du 19 janvier 2017 portant projet de décision sur le projet d’interconnexion «IFA2 »

Dans une délibération du 19 janvier 2017, la Commission de Régulation de l’Énergie (ci-après CRE) a approuvé le projet d’interconnexion « IFA2 » porté par RTE et défini des règles tarifaires applicables audit projet.

Le projet d’interconnexion « IFA2 » objet de la délibération commentée est un projet d’interconnexion entre la France et l’Angleterre qui vise à augmenter les capacités d’échange du réseau de transport d’électricité entre la France et le Royaume-Uni.

Supposé être mis en service à la fin de l’année 2020, il consiste à créer une liaison d’une capacité de 1.000 MW entre les postes de TOURBE (à proximité de Caen, Calvados, France) et CHILLING (à proximité de Southampton, Hampshire, Royaume-Uni), qui viendrait s’ajouter aux 2.000 MW de capacité d’interconnexion actuellement en service entre la France et le Royaume-Uni (interconnexion « IFA 2000 »).

Le projet est porté par RTE en partenariat avec NG IFA2 Ltd, sous-filiale du gestionnaire de réseau de transport britannique National Grid Electricity Transmission plc. La construction de l’interconnexion IFA2 serait assurée par une société commune détenue à parts égales par RTE et NG IFA2 Ltd. Son exploitation sera assurée par un partenariat entre RTE et NG IFA2 Ltd.

La délibération de la CRE a été précédée par l’organisation d’une consultation publique entre le 1er décembre 2016 et le 3 janvier 2017, à laquelle une dizaine d’acteurs ont répondu : 4 porteurs de projets d’interconnexions entre la France et le Royaume-Uni (RTE, NGIH, FAB Link et Elan Energy), 2 énergéticiens (EDF et Engie), une association (UFE), un consultant et 2 particuliers.

Dans sa délibération du 19 janvier 2017 la CRE relève, au terme d’une analyse précise des bénéfices économiques du projet (cf. points 2.1 à 2.3 de la délibération), que « l’analyse coûts – bénéfices du projet IFA2 fait ressortir que celui-ci apporte un bénéfice net positif à l’échelle du continent européen. Même si le Royaume-Uni retire la majeure partie de ces bénéfices, le projet est voisin de l’équilibre pour l’Europe sans le Royaume-Uni ». Elle approuve en conséquence  le principe dudit projet.

S’agissant du volet financier, on rappellera qu’en application des dispositions des articles L. 341-2 et L. 341-3 du Code de l’énergie, la CRE est compétente pour fixer les méthodes utilisées pour établir les tarifs d’utilisation des réseaux publics de transport et de distribution d’électricité (TURPE). Ces tarifs sont calculés afin de couvrir l’ensemble des coûts supportés par RTE, dans la mesure où ils correspondent à ceux d’un gestionnaire de réseau de transport efficace (art. L .341-2).

A cet égard, la CRE fait droit à la demande de « régulation incitative » sollicité par RTEen faisant néanmoins état des incertitudes générées par le référendum organisé au Royaume Uni et s’étant prononcé en faveur d’une sortie de l’Union Européenne, selon les termes suivants « […] le résultat du référendum britannique du 23 juin 2016 crée de nombreuses incertitudes d’ordres institutionnel et opérationnel, en particulier concernant les futures règles d’utilisation de l’interconnexion. Dans ces conditions, la CRE a proposé, dans la consultation publique, de définir un cadre de régulation incitative applicable au projet IFA2 ayant vocation à mieux répartir les risques liés au projet IFA2, entre RTE et les utilisateurs du réseau public de transport français ».

La CRE retient donc un cadre tarifaire spécifique en vertu duquel « les incitations financières visent d’une part à partager les risques et les bénéfices du projet entre RTE et les utilisateurs, et d’autre part à inciter RTE à minimiser les coûts du projet » et dont le détail figure au point 3 de la délibération.

Le projet de décision contenu dans la délibération de la CRE va désormais être transmis pour avis au Conseil supérieur de l’énergie.

Mise en consultation publique du projet d’arrêté relatif aux constructions à énergie positive

Depuis le 20 janvier 2017, le Ministère a mis en ligne sur son site internet le projet d’arrêté relatif aux constructions à énergie positive et à haute performance environnementale sous maîtrise d’ouvrage de l’Etat, de ses établissements publics et des collectivités territoriales, afin de le soumettre, avant son adoption, à une consultation publique.

Ce projet d’arrêté s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de l’objectif posé par l’article 8 II de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 de Transition Energétique et pour la Croissance Verte (loi TECV) selon lequel « toutes les nouvelles constructions sous maîtrise d’ouvrage de l’Etat, de ses établissements publics ou des collectivités territoriales font preuve d’exemplarité énergétique et environnementale et sont, chaque fois que possible, à énergie positive et à haute performance environnementale ». Cet article 8 II renvoyait également à un décret en Conseil d’Etat le soin de définir « les exigences auxquelles doit satisfaire un bâtiment à énergie positive, d’une part, et un bâtiment à haute performance environnementale, d’autre part ». Ces précisions ont été apportées par le décret n° 2016-1821 du 21 décembre 2016 relatif aux constructions à énergie positive et à haute performance environnementale sous maîtrise d’ouvrage de l’Etat, de ses établissements publics et des collectivités territoriales qui a posé un certain nombre de critères devant être respectés par les bâtiments neufs pour être regardés comme étant « à haute performance environnementale » (article 1er du décret) ainsi que les objectifs et conditions à remplir pour être considéré comme étant « à énergie positive » (article 2 du décret).

Le décret renvoyait lui-même à un arrêté pour préciser les modalités d’application des critères et objectifs posés (article 3 du décret). C’est l’objet du projet d’arrêté soumis à consultation publique lequel précise les conditions techniques de mise en œuvre des critères et notamment les différents seuils dont le décret prévoyait seulement le principe mais sans arrêter de chiffre.

Le public peut déposer des observations par voie électronique sur ce projet de texte jusqu’au 10 février prochain.

Publication par l’Agence internationale de l’énergie d’une étude sur la politique énergétique en France

L’Agence internationale de l’énergie (« AIE »), organisation intergouvernementale autonome rattachée à l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (« OCDE ») et composée de 29 États membres, a publié, au mois de janvier 2017, une étude sur la politique énergétique de la France.

Dans son étude, l’AIE salue la création d’un cadre législatif de la transition énergétique par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui fixe des objectifs contraignants et prévoit des révisions périodiques permettant d’ajuster les politiques pour atteindre ces objectifs. Si le mix énergétique de la France est déjà sobre en carbone, du fait de la place importante de l’énergie nucléaire dans ce mix, cette loi prévoit en outre, notamment, la mise en place de budgets carbone (c’est-à-dire, la fixation, tous les cinq ans, d’un plafond national des émissions de gaz à effet de serre) et l’élaboration d’une « stratégie bas-carbone ».

L’AIE souligne que, bien que la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique ait augmenté, jusqu’à atteindre 16,5 % à ce jour, l’objectif de porter la part de ces énergies à 23 % de la consommation finale brute d’énergie en 2020 semble encore lointain. A cet égard, alors que l’utilisation du solaire photovoltaïque et de la biomasse a considérablement cru, le développement des énergies hydraulique, éolienne et thermique accuse un retard.

L’approche décentralisée dans la mise en œuvre de la transition énergétique, « permettant de passer d’un système énergétique centralisé basé sur l’offre vers un système plus décentralisé basé sur la demande », est perçue positivement par l’AIE.

Par ailleurs, cette dernière salue le développement par la France des mécanismes d’effacement de consommation sur tous les marchés ainsi que des capacités d’interconnexion pour l’électricité et le gaz.

Enfin, l’AIE formule plusieurs recommandations au Gouvernement français, parmi lesquelles :

  • garantir la visibilité à long terme du financement de la transition énergétique ;
  • assurer la sécurité à long terme de l’approvisionnement électrique et maintenir une faible empreinte carbone, tout en atteignant l’objectif de porter la part du nucléaire dans le mix énergétique à 50% et en assurant la gestion d’un parc nucléaire vieillissant ;
  • poursuivre l’élargissement de l’assiette fiscale afin de financer le soutien aux énergies renouvelables.