Fonctions publiques : la rupture conventionnelle à l’essai

Mécanisme de cessation des fonctions jusqu’ici réservé au secteur privé, la rupture conventionnelle est désormais ouverte au secteur public.

En effet, l’article 72 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique en prévoit l’expérimentation sur cinq ans à compter du 1er janvier 2020.

Le 31 décembre 2019, sont parus les deux décrets d’application de cet article : le n° 2019-1593 relatif à la procédure et le n° 2019-1596 du 31 décembre 2019 relatif à l’indemnité spécifique de rupture

Entrés en vigueur dès le 1er janvier, ces décrets permettent à présent la mise en œuvre de la rupture conventionnelle dans le délai posé et leur contenu, combiné à celui de la loi, répond à quatre questions essentielles : pour qui, comment, à quel montant et avec ou sans versement des indemnités chômage ?

 

I – Quels agents peuvent bénéficier d’une rupture conventionnelle ?

Tous les fonctionnaires, dans les trois versants de la fonction publique (territoriale, de l’Etat et hospitalière) sont éligibles à la rupture conventionnelle, à l’exception :

  • des fonctionnaires stagiaires ;
  • des fonctionnaires ayant atteint l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite et justifiant d’une durée d’assurance suffisant à un taux plein ;
  • des fonctionnaires détachés en qualité d’agent contractuel.

Enfin, les agents contractuels, mais uniquement ceux recrutés en contrat à durée indéterminée et y compris les praticiens en contrat à durée indéterminée relevant de l’article L. 6152-1 du Code de santé publique, peuvent bénéficier de ce dispositif. Pour les agents territoriaux par exemple, les modalités d’application de la rupture conventionnelle sont fixées au décret n° 88-145 du 15 février 1988 qui contient un nouveau chapitre dédié.

 

II – Selon quelle procédure mettre en œuvre la rupture ?

Celle-ci est fixée par le décret n° 2019-1593, qui prévoit principalement la signature d’une convention entre les deux parties.

La procédure de rupture conventionnelle peut être engagée à l’initiative du fonctionnaire ou de l’administration, étant précisé que le demandeur informe l’autre partie par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise en main propre contre signature.

Dans les conditions prévues au décret (assistance d’un représentant syndical et exposé des motifs de la demande ainsi que du montant envisagé d’indemnité), un entretien relatif à cette demande se tient à une date fixée au moins dix jours francs et au plus tard un mois après la réception de la lettre de demande de rupture conventionnelle. Il peut être organisé, le cas échéant, d’autres entretiens.

La signature de la convention a lieu au moins quinze jours francs après le dernier entretien et la rupture intervient au plus tôt un jour après la fin du délai de rétractation de quinze jours (qui commence lui-même à courir un jour franc après la date de la signature de la convention de rupture conventionnelle).

 

III – Comment est encadrée la négociation du montant de l’indemnité ?

Comme dans le secteur privé, un montant plancher en deçà duquel la rupture ne peut pas intervenir est prévu. En revanche, contrairement au dit secteur – et très simplement parce qu’il s’agit de deniers publics – le pouvoir règlementaire a également instauré au cas présent un plafond d’indemnité.

La marge de négociation entre l’administration est l’agent est donc strictement encadrée, et il y a fort à parier que les Chambres régionales des comptes (CRC) ne manqueront pas, ces prochains mois, d’examiner systématiquement les accords intervenus pour, le cas échéant, souligner les dépassements de plafonds. L’Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS) le fait déjà s’agissant des départs des Directeurs généraux des Offices publics de l’habitat qui, agents publics en contrat à durée indéterminée, bénéficient depuis 2017 d’un dispositif propre (cf. article R. 421-20-7 du Code de la construction de l’habitation).

Les planchers sont les suivants :

Années d’ancienneté

Minimum

Jusqu’à 10 ans

¼ de mois de rémunération brute par année

10 à 15 ans

2/5ème de mois de rémunération brute par année

15 à 20 ans

½ mois de rémunération brute par année

20 à 24 ans

3/5ème de mois de rémunération brute par année

 

S’agissant du plafond, le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle ne peut pas non plus être supérieur à 1/12e de la rémunération brute annuelle par année d’ancienneté, dans la limite de vingt-quatre ans d’ancienneté, laquelle prend en compte les services accomplis dans les trois fonctions publiques.

Ce sont donc tout au plus deux années de rémunération brute qui pourront être versées à un agent qui aurait, alors, au moins vingt-quatre ans d’ancienneté.

 

IV – Le fonctionnaire peut-il bénéficier des indemnités d’aide au retour à l’emploi ?

Le IV de l’article 72 de la loi du 6 août 2019 précitée prévoit bien que les agents publics bénéficiant d’une rupture conventionnelle sont éligibles au revenu de remplacement de l’article L. 5424-1 du Code du travail.

Le fait est que la plupart des employeurs publics sont en auto-assurance et que, de ce fait, ils supportent eux-mêmes le versement des indemnités chômage à leurs anciens agents (Voir, sur ce point : Fiche thématique Employeurs publics, Novembre 2019, Unédic).

En conclusion, du fait de l’auto-assurance, le coût de la rupture conventionnelle, bien que plafonné sur l’indemnité, n’est pas négligeable pour l’employeur public, puisque s’ajoute au coût de l’indemnité de rupture celui des indemnités d’aide au retour à l’emploi. Ceci pourrait amener l’administration à utiliser le dispositif avec la même parcimonie que l’indemnité de départ volontaire créée précédemment sans grand succès. 

Par ailleurs, le plafond d’indemnité posé pourrait, selon le profil des agents, ne pas apparaître spécialement attractif, quand bien même le dispositif a le mérite de permettre de sortir en bonne intelligence de situations professionnelles délicates et, par-là, de pallier un vrai besoin pour les agents comme les employeurs publics.

C’est donc bien une expérimentation concrète du dispositif qui permettra d’en faire le bilan et, peut-être, de transformer l’essai.

Par Marjorie Abbal

 

Seban & Associés nomme Philippe Guellier Avocat associé

Philippe Guellier avocat chez Seban & AssociésNous sommes très heureux de commencer l’année 2020 en vous annonçant la nomination de Philippe Guellier au rang d’associé.

Avocat depuis 2006, diplômé de l’Institut de Droit Public des Affaires, titulaire d’un DESS Administration publique et d’un DEA Finances publiques, Philippe Guellier a développé une expertise incontournable dans les secteurs du droit public des affaires et des communications électroniques.

Aujourd’hui âgé de 41 ans, Philippe Guellier a commencé sa carrière comme juriste « marchés publics » dans un établissement public du ministère de la Culture avant de rejoindre Seban & Associés en 2006.Au sein des équipes de Seban & Associés, il a débuté son activité à Paris dans le secteur des contrats publics puis a rejoint Lyon en 2011 lors de la fondation de nos premiers bureaux.

En sa nouvelle qualité d’associé, Philippe Guellier impulsera le développement de Seban & Associés Rhône-Alpes et offrira, avec les équipes lyonnaise et grenobloise, une expertise pointue et de proximité pour les acteurs publics.

En savoir plus sur Seban & Associés Rhône-Alpes

Responsabilité sans faute du maître d’ouvrage à l’égard des tiers des dommages causés à ceux-ci par l’existence ou le fonctionnement d’un ouvrage public

Dans un arrêt en date du 3 décembre 2019, dans le prolongement d’une jurisprudence constante (voir notamment CAA de Marseille, 10 octobre 2017, n° 14MA05114 ; CAA de Douai, 20 juillet 2017, n° 16DA00199, n° 16DA00220), la 2e chambre de la Cour administrative d’appel de Bordeaux a rappelé que « même en l’absence de faute, le maître d’ouvrage est responsable à l’égard des tiers des dommages causés à ceux-ci par l’existence ou le fonctionnement d’un ouvrage public, qui présentent un caractère anormal et spécial. Il ne peut dégager sa responsabilité que s’il établit que ces dommages sont imputables à un cas de force majeure ou à une faute de la victime ».

En l’espèce, un câble sous-tension exploité par le gestionnaire du réseau de distribution publique d’électricité, Enedis, décroché d’un poteau, était à l’origine de l’électrocution de quatre vaches et trois veaux d’un troupeau d’environ 150 animaux que M. C avait mené dans un pré surplombé par une ligne électrique.

En première instance, la demande d’indemnisation de son préjudice introduite par la SAS Mobil Park, dont M. C. était le président, avait été jugée irrecevable au motif qu’elle ne justifiait pas être l’entité juridique exploitant l’élevage bovin.

Produisant pour la première fois en appel divers documents attestant de sa qualité d’exploitante de l’élevage et de propriétaire des bêtes électrocutées, la SAS Mobil Park voit ainsi sa requête jugée recevable par la Cour administrative d’appel de Bordeaux, laquelle annule par ce motif le jugement du Tribunal administratif de Poitiers.

Puis, jugeant l’affaire au fond, la Cour administrative d’appel de Bordeaux évoque en premier lieu la qualité de tiers, par rapport à la ligne électrique surplombant le terrain de son exploitation, de la SAS Mobil Park.

Ensuite, la Cour administrative d’appel de Bordeaux écarte l’argument d’Enedis selon lequel la force des vents soufflant à plus de 130 km/h la veille des faits en Charente-Maritime présenterait un caractère exceptionnel et de nature à caractériser un cas de force majeure, alors même que la vétusté de la ligne électrique avait fait l’objet d’un signalement. La Cour note par ailleurs que M. C. n’a commis aucune imprudence fautive susceptible d’atténuer la responsabilité d’Enedis dès lors qu’il n’était pas raisonnablement prévisible que le câble sous tension se trouve à terre à la suite des forts vents de la veille.

En revanche, la Cour administrative d’appel de Bordeaux estime manifestement surévaluée la demande d’indemnisation de 33 120 euros introduite par la SAS Mobil Park, le calcul à l’appui de cette demande ayant retenu une même valeur estimative des animaux morts sans prendre en compte leurs âges respectifs. La Cour évalue à 9 222 euros le préjudice de la SAS Mobil Park en se fondant sur une expertise amiable.

En conséquence, la Cour administrative d’appel de Bordeaux condamne Enedis à verser une indemnité de 9 222 euros à la SAS Mobil Park, augmentée des intérêts au taux légal.

Fonds de prévention des risques naturels majeurs au financement de certaines mesures de prévention

Le décret n° 2019-1301 du 5 décembre 2019 modifiant l’article R. 561-15 du Code de l’environnement relatif à la contribution du fonds de prévention des risques naturels majeurs au financement de certaines mesures de prévention, publié le 7 décembre au Journal Officiel, introduit des modifications à ses modalités de contribution.  

Il introduit une hausse du taux de contribution de ce fonds aux études et travaux de prévention des inondations réalisés sur des biens à usage d’habitation ou à usage mixte. Ce taux passe ainsi de 40 à 80%.

Précisions sur l’interdiction de certains produits en plastique

Le décret n° 2019-1451 du 24 décembre 2019 relatif à l’interdiction de certains produits en plastique à usage unique a été publié au journal officiel le 27 décembre 2019. Il permet de définir le champ d’application des obligations découlant du III de l’article L. 541-10-5 du Code de l’environnement, selon lequel il est mis fin à la mise à disposition de divers produits en plastique (à savoir les gobelets, verres et assiettes jetables de cuisine pour la table, pailles, couverts, piques à steak, couvercles à verre jetables, plateaux-repas, pots à glace, saladiers, boîtes et bâtonnets mélangeurs pour boissons en matière plastique, sauf ceux compostables en compostage domestique et constitués, pour tout ou partie, de matières biosourcées) et à la vente de coton-tige en plastique au 1er janvier 2020.

Ce décret introduit, à l’article D. 543-294 du Code de l’environnement les définitions des notions relatives à l’interdiction des produits en plastiques ; par ainsi, un « Produit en plastique à usage unique » est défini comme un « produit fabriqué entièrement ou partiellement à partir de plastique et qui n’est pas conçu, créé ou mis sur le marché pour accomplir, pendant sa durée de vie, plusieurs trajets ou rotations en étant retourné à un producteur pour être rempli à nouveau, ou qui n’est pas conçu, créé ou mis sur le marché pour être réutilisé pour un usage identique à celui pour lequel il a été conçu ». Le décret précise également que la teneur biosourcée minimale des gobelets, verres et assiettes jetables de cuisine pour la table en matière plastique doit être de 50 % à partir du 1er janvier 2020 et de 60 % à partir du 1er janvier 2025 pour que ces produits ne soient pas concernés par l’interdiction de mise à disposition.

Application dans le temps du décret. Les produits visés par l’interdiction de mise à disposition au 1er janvier 2020 sont ceux en plastique à usage unique, à l’exception des emballages. Les emballages seront également inclus dans le champ d’application du III de l’article L. 541-10-5 à compter du 3 juillet 2021.

S’agissant de l’interdiction de mise à disposition des couverts en plastiques, une exception est prévue pour ceux utilisés dans les établissements pénitentiaires, les établissements de santé et dans le transport aérien, ferroviaire et maritime. Ils devront néanmoins être interdits au 3 juillet 2021.

Le décret indique que ces dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2020. Toutefois, les pailles, couverts, piques à steak, couvercles à verre jetables, plateaux-repas, pots à glace, saladiers, boîtes et bâtonnets mélangeurs pour boissons, qui auront été achetés ou importés avant cette date, pourront être mis à disposition le temps de l’écoulement des stocks et durant un délai n’excédant pas six mois à compter du 1er janvier 2020.

Actualités relatives à la réglementation des pesticides

Arrêté du 27 décembre 2019 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques et modifiant l’arrêté du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants visés à l’article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime

loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020

Mesures de protection des personnes lors de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques.

Le 29 décembre 2019, le décret n° 2019-1500 du 27 décembre 2019 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques à proximité des zones d’habitation et l’arrêté du 27 décembre 2019 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques et modifiant l’arrêté du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants visés à l’article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime ont été publiés au Journal Officiel.

L’arrêté fixe notamment des distances de sécurité au voisinage des zones d’habitation et des zones accueillant des groupes de personnes vulnérables pour la réalisation des épandages de pesticides. A titre d’exemple, en l’absence de distance de sécurité spécifique fixée par l’autorisation de mise sur le marché du produit concerné, une distance de sécurité minimale de 20 mètres qui ne peut être réduite est requise pour les traitements des parties aériennes des plantes. En outre, les produits phytopharmaceutiques ne peuvent être utilisés lorsque l’intensité des précipitations est supérieure à 8 mm par heure, au moment du traitement. L’arrêté modifie également les délais de rentrée après traitement et identifie les normes auxquelles les équipements de protection individuelle mentionnés dans les autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques doivent se conformer.

En outre, conformément à la décision du Conseil d’Etat n° 415431 du 26 juin 2019, Association Eau et rivières de Bretagne, les zones non traitées ne peuvent plus recevoir aucune application directe de produits phytopharmaceutiques, alors qu’auparavant les techniques d’application directes étaient limitées aux techniques de  . De même, l’interdiction d’utilisation de produits phytopharmaceutiques lorsque le vent a un degré d’intensité inférieur ou égal à 3 sur l’échelle de Beaufort est généralisée et n’est plus limitée aux utilisations par pulvérisation ou poudrage.

Le décret  quant à lui fixe les modalités d’élaboration, de concertation et de validation ainsi que le contenu des chartes d’engagement départementales mentionnées au III du L. 253-8 du Code de l’environnement, lequel indique que « l’utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité des zones attenantes aux bâtiments habités et aux parties non bâties à usage d’agrément contiguës à ces bâtiments est subordonnée à des mesures de protection des personnes habitant ces lieux. […] Les utilisateurs formalisent ces mesures dans une charte d’engagements à l’échelle départementale, après concertation avec les personnes, ou leurs représentants, habitant à proximité des zones susceptibles d’être traitées avec un produit phytopharmaceutique […] ». Aux termes de ce décret, le préfet exercera un contrôle sur ces chartes d’engagements départementales, notamment afin de vérifier le caractère adapté des mesures prévues.

 

Interdiction de substances phytopharmaceutiques.

Par décret n° 2019-1519 du 30 décembre 2019, publié le 31 décembre au Journal Officiel, l’utilisation du sulfoxaflor et de la flupyradifurone, deux substances phytopharmaceutiques au mode d’action identique à celui des néonicotinoïdes, a été interdite. Précisons que, le 29 novembre 2019, le Tribunal administratif de Nice avait par jugement n° 1704687 annulé des autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques composés de sulfoflaxor en vertu du principe de précaution.

Le 6 décembre 2019, à l’échelon européen, le Comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et de l’alimentation animale (Scopaff) a voté le non-renouvellement des autorisations de mise sur le marché du chlorpyrifos et du chlorpyrifos-méthyl, deux insecticides ayant des effets néfastes sur la santé humaine. La Commission européenne a entériné cette décision par l’adoption, le 10 janvier 2020, des règlements d’exécution (UE) n° 2020/18 et (UE) n° 2020/17, publiés au JOUE le 13 janvier 2020. Les Etats-membres ont jusqu’au 16 février 2020 pour retirer toutes les autorisations accordées aux produits contenant ces substances actives, un délai de trois mois pour l’écoulement des stocks pouvant être accordé (jusqu’au 16 avril 2020).

 

Création d’un fonds d’indemnisation des victimes de pesticides.

La loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, publiée au Journal Officiel du 27 décembre 2019, introduit un nouveau titre au Code de la sécurité sociale portant sur l’indemnisation des victimes de pesticides (article 70 de la loi). La loi instaure la création d’un fonds d’indemnisation des victimes de pesticides à l’article L. 723-13-3 de ce code, au sein de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole. Ainsi, les personnes qui remplissent les conditions fixées par la loi pourront obtenir une indemnisation en réparation des maladies causées par des pesticides : il s’agit des assurés relevant des régimes d’assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles du régime général ou du régime des salariés des professions agricoles et des non-salariés des professions agricoles ainsi que les assurés relevant du régime d’assurance accidents du code local des assurances sociales en vigueur dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle. Les anciens exploitants, leurs conjoints et certains membres de leur famille pourront sous condition également obtenir une indemnisation, tout comme les enfants atteints d’une pathologie résultant directement de leur exposition prénatale du fait de l’exposition professionnelle de l’un ou l’autre de leurs parents à des pesticides.

Ce fonds sera financé par : le produit de la taxe prévue à l’article L. 253-8-2 du Code rural et de la pêche maritime ; une contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale ; une contribution du régime d’assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des non-salariés des professions agricoles ; une contribution du régime d’assurance accidents du code local des assurances sociales en vigueur dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle ; les sommes perçues en application de l’article L. 491-6 du code de la sécurité sociale (lorsque le fonds est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes et organismes tenus à un titre quelconque d’en assurer la réparation) ; les produits divers, dons et legs dont le fonds peut bénéficier (article L. 723-13-3 du Code de la sécurité sociale).

 

Modification des règles du mécanisme de capacité

Arrêté du 5 décembre 2019 modifiant les règles du mécanisme de capacité et pris en application de l’article R. 335-2 du code de l’énergie

Les règles susmentionnées dans leur nouvelle version sont consultables sur le site internet de la direction générale de l’énergie et du climat à l’adresse suivante : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/securite-dapprovisionnement-en-electricite

 

 

L’article L. 335-1 du Code de l’énergie instaure l’obligation pour les Fournisseurs, ainsi que pour les Consommateurs finals et les Acheteurs de Pertes qui, pour tout ou partie de leur consommation, ne s’approvisionnent pas auprès d’un Fournisseur, de contribuer à la sécurité d’approvisionnement en électricité. Ce sont les Acteurs Obligés.

Les articles R. 335-1 et suivants du Code de l’énergie précisent les conditions d’application de cette obligation concernant les Acteurs Obligés.

L’article R. 335-1 34°, tel que modifié par le décret n° 2018-997 du 15 novembre 2018 relatif au mécanisme de capacité dans le secteur de l’électricité du code de l’énergie, dispose que les « « règles du mécanisme de capacité français » comprennent :

a) Les dispositions déterminant les années de livraison et les périodes de pointe PP1 et PP2 ;

b) Des dispositions relatives à l’obligation de capacité, notamment au mode de calcul de la puissance de référence et à la détermination de l’obligation des fournisseurs, à la puissance unitaire de la garantie de capacité et au recouvrement des garanties de capacité ;

c) Des dispositions relatives à la certification de capacité, notamment les méthodes de certification et les conditions du contrôle des capacités certifiées, les modalités d’adaptation prévue par l’article L. 321-16 pour la certification des capacités dont la participation à la sécurité d’approvisionnement est réduite, le rééquilibrage des exploitants de capacités, des gestionnaires d’interconnexion dérogatoire, et du gestionnaire du réseau de transport français ;

d) Des dispositions relatives aux règlements financiers relatifs aux rééquilibrages des acteurs obligés, ainsi qu’aux règlements financiers des responsables de périmètre de certification. »

 

Ces règles fournissent ainsi des précisions quant aux conditions techniques, financières et juridiques de participation au mécanisme de capacité.

En application de l’article R. 335-2 du Code de l’énergie, les règles du mécanisme de capacité « sont approuvées par le ministre chargé de l’énergie, sur proposition du gestionnaire de réseau de transport français, après avis de la Commission de régulation de l’énergie ».

La commission de régulation de l’énergie (CRE) a été saisie pour avis par RTE, le 29 octobre 2019, d’une proposition de modification des règles du mécanisme de capacité, en application dudit article R. 335-2 du Code de l’énergie.

Les propositions de RTE portaient principalement sur les six objectifs suivants : 1) amélioration de la flexibilité de la certification des capacités, 2) traitement des problématiques de transmission des données des gestionnaires de réseau de distribution d’électricité (GRD), 3) modification des modalités de test de la disponibilité des capacités, 4) clarification des modalités appliquées aux capacités disponibles sur les services système, 5) ouverture anticipée des années de livraison 2021 et 2022 et 6) adaptation du mécanisme aux évolutions réglementaires.

C’est au vu de cet avis de la CRE que les règles du mécanisme de capacité ont été approuvées par l’Arrêté du 5 décembre 2019 modifiant les règles du mécanisme de capacité et pris en application de l’article R. 335-2 du code de l’énergie.

Les principales dispositions de la loi d’orientation des mobilités intéressant le secteur de l’énergie

Publiée au Journal Officiel du 26 décembre 2019 après la validation de certaines de ses dispositions par le Conseil constitutionnel (décision n°2019-794 DC du 20 décembre 2019), la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités contient plusieurs dispositions intéressant le secteur de l’énergie, et plus particulièrement, les infrastructures de recharge pour véhicules électriques et hybrides rechargeables (IRVE).

Tout d’abord, l’article 16 de la loi d’orientation des mobilités crée les nouveaux « plans de mobilité », à élaborer par les autorités compétentes en matière d’organisation de la mobilité, dont l’objectif vise notamment à « contribuer à la diminution des émissions de gaz à effet de serre liées au secteur des transports, selon une trajectoire cohérente avec les engagements de la France en matière de lutte contre le changement climatique, à la lutte contre la pollution de l’air et la pollution sonore ainsi qu’à la préservation de la biodiversité ».

A cela, le point 9 du premier paragraphe de l’article 16 précité prévoit que les futurs plans de mobilité devront être compatibles avec le plan climat-air-énergie territorial (PCAET) lorsque ce dernier recouvre un périmètre égal ou supérieur au ressort territorial de l’autorité organisatrice de la mobilité, et lorsque ce n’est pas le cas, les plans de mobilité devront uniquement prendre en compte le ou les PCAET concernés (voir l’article L. 1214-7 du Code des transports dans sa version modifiée par la loi commentée). Ces dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2021.

Ensuite, le deuxième chapitre de la loi d’orientation des mobilités, intitulé « Développement des infrastructures pour le déploiement de véhicules plus propres », contient un article 64 modifiant plusieurs dispositions du Code de l’énergie, dont certaines concernant le raccordement aux réseaux publics de distribution d’électricité des IRVE et la facturation du coût de ce raccordement.

Pour rappel, les coûts de raccordement aux réseaux publics de distribution d’électricité des IRVE sont pris en charge, à hauteur de 40 %, par le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité (TURPE) en vertu de l’article L. 341-2 du Code de l’énergie et d’un arrêté du ministre chargé de l’énergie en date du 30 novembre 2017 modifié, le reste étant à la charge du demandeur au raccordement.

L’article 64-III de la loi précitée déroge temporairement à cette répartition du coût de raccordement des IRVE ouvertes au public[1] en prévoyant que le taux de prise de charge par le TURPE pourra être augmenté, de manière temporaire, jusqu’à 75 % du montant du coût du raccordement pour toutes demandes de raccordement adressées au maître d’ouvrage concerné (le gestionnaire du réseau ou l’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité si cette dernière a la maitrise d’ouvrage) entre le 26 décembre 2019 (date de publication de la loi) et le 31 décembre 2021 (soit environ trois ans).

Ce taux dérogatoire devra être fixé par un arrêté du ministre en charge de l’énergie, pris après avis de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE), dans cette limite de 75% et « en fonction des caractéristiques de l’infrastructure de recharge, notamment de son niveau de puissance, et du niveau de couverture par les infrastructures de recharge existantes » (cf. art. 64-III de la loi commentée).

Enfin, ce plafond légal et dérogatoire de 75% est également accordé aux demandes de raccordement concernant les IRVE ouvertes au public figurant au sein des nouveaux schémas directeurs de développement des infrastructures de recharge prévus aux articles L. 334-7 et L. 334-8 du Code de l’énergie (cf. art. 68 de la loi commentée).

En revanche, pour les IRVE concernées, la dérogation ne s’appliquera qu’aux demandes de raccordement adressées, par le demandeur au maître d’ouvrage concerné, entre le 26 décembre 2019 (date de publication de la loi) et le 31 décembre 2025 (soit une dérogation d’un délai plus long que la précédente, d’environ quatre ans).

Le taux de prise en charge effectif devra être fixé par un arrêté du ministre en charge de l’énergie, pris après avis de la CRE suivant les mêmes conditions que celui prévu à l’article 64-III de la loi commentée.

Ces arrêtés ministériels (précédés des avis de la CRE) devraient donc être prochainement publiés au Journal Officiel.

Pour aller plus loin sur la loi d’orientation des mobilités, nous vous recommandons la lecture du Focus de notre Lettre d’Actualités Juridiques de décembre 2019 sur le projet de loi dans sa version définitivement adoptée par l’Assemblée nationale.

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[1] Sont également visés par cette dérogation les ateliers de charge des véhicules électriques ou hybrides rechargeables affectés à des services de transport public routier de personnes.

Les modalités d’application de la loi Energie Climat sur la fin progressive des tarifs réglementés de vente de gaz naturel au 1er janvier 2021

Concomitamment aux arrêtés pris pour accompagner la fin partielle des tarifs réglementés de vente d’électricité, un arrêté a été publié au Journal Officiel du 17 décembre 2019 sur les modalités relatives à la fin progressive des tarifs réglementés de vente de gaz naturel (TRV Gaz) en application de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat – toujours sur ce point, voir notre Focus du mois dernier.

Pour rappel, l’article 63 de la loi du 8 novembre 2019 précité met un terme aux TRV Gaz, à partir du 1er décembre 2020, pour les consommateurs finals non domestiques ayant une consommation annuelle de référence inférieure à 30 MWh et, à partir du 1er juillet 2023, pour les consommateurs finals domestiques ayant une consommation annuelle de référence inférieure à 30 MWh, les propriétaires uniques d’un immeuble à usage principal d’habitation consommant moins de 150 MWh par an et les syndicats des copropriétaires d’un tel immeuble.

En application de l’article 63-VII de la loi du 8 novembre 2019 précitée, l’arrêté commenté précise les modalités d’information des clients sur leur perte d’éligibilité aux TRVG par les fournisseurs proposant de tels tarifs. En particulier, l’arrêté précisent les informations à indiquer par les fournisseurs concernés à leurs clients sur les factures, lors d’échanges téléphoniques avec ses derniers ou encore sur leurs sites internet respectifs et espaces dédiés à leur clientèle.

Toujours en application de la loi du 8 novembre 2019 précitée (art. 63-IX), la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a pris les deux délibérations suivantes :

Dans sa première délibération du 21 novembre 2019, la CRE a émis un avis favorable au projet d’arrêté des ministres chargés de l’énergie et de la consommation portant sur les modalités de mise à disposition des données des clients aux TRV Gaz par les fournisseurs historiques.

Plus précisément, le projet (dont la copie n’est pas communiquée par la CRE) préciserait les modalités de transmission des données des fournisseurs historiques aux fournisseurs alternatifs, les modalités de sécurisation des flux de données entre lesdits fournisseurs ainsi que celles relatives à la conservation des données par les fournisseurs et au recueil du consentement et de l’absence d’opposition à la transmission des données des clients. A cet égard, l’arrêté contiendrait aussi, en annexe, des courriers-types pour le recueil du consentement et l’absence d’opposition.

L’avis favorable de la CRE est néanmoins soumis à trois réserves portant (comme c’était déjà le cas pour les tarifs réglementés de vente d’électricité) sur la traçabilité du recueil du consentement et de l’absence d’opposition des clients pour la transmission de leurs données, sur la fréquence d’actualisation des données mises à disposition des fournisseurs alternatifs et sur la création par les fournisseurs proposant des TRV Gaz d’une adresse générique pour les demandes d’accès aux données des fournisseurs alternatifs.

A ce jour, le projet d’arrêté n’a pas été publié au Journal Officiel et devra, au préalable, être soumis à l’avis de la Commission Nationale de l’Informatique et Libertés (CNIL – cf. art. 63-IX de la loi de la loi du 8 novembre 2019 précitée).

La deuxième délibération de la CRE du 21 novembre 2019 soumet aux ministres chargés de l’énergie et de la consommation un projet d’arrêté qui fixe la liste des données que les fournisseurs proposant des TRVG devront mettre à disposition des fournisseurs de gaz naturel. Ce projet devra faire l’objet d’un avis préalable de la CNIL avant que les ministres concernés ne prennent une décision définitive à son égard (cf. art. 63-IX de la loi de la loi du 8 novembre 2019 précitée).

Reste donc à suivre la publication prochaine de l’avis de la CNIL et des textes des ministres.

Publication au Journal Officiel des arrêtés pris en application de la loi Energie Climat sur la fin partielle des tarifs réglementés de vente d’électricité au 1er janvier 2021

Arrêté du 12 décembre 2019 relatif à l’information des consommateurs aux tarifs réglementés de vente d’électricité par leur fournisseur dans le cadre de la suppression de leur contrat à ces tarifs

Arrêté du 26 décembre 2019 fixant la liste des données que doivent mettre à disposition les fournisseurs proposant des contrats aux tarifs réglementés de vente d’électricité aux fournisseurs d’électricité qui en font la demande

Trois arrêtés publiés au Journal Officiel du 13 décembre 2019 mettent en œuvre les dispositions de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat portant sur la disparition partielle des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE) – voir à ce sujet notre Focus du mois dernier.

Pour rappel, l’article 64 de la loi du 8 novembre 2019 précité prévoit que les consommateurs non domestiques qui emploient plus de dix personnes ou dont le chiffre d’affaires, les recettes ou le bilan annuel excède deux millions d’euros, ne pourront plus bénéficier des TRVE au 31 décembre 2020. Ce même article prévoit également des mesures d’accompagnement des consommateurs et des fournisseurs qui devaient être précisés par voie règlementaire.

Ainsi, le premier arrêté commenté précise les modalités d’identification des clients qui ne seront plus éligibles aux TRVE, ainsi que celles visant à mettre à disposition des fournisseurs « alternatifs » (proposant des offres de marché, par opposition aux contrats aux TRVE) leurs données de consommation, de tarification et de contact à caractère personnel.

En particulier, l’arrêté vient préciser la notion de « recettes » et les règles de calcul du nombre d’employés permettant d’identifier les clients qui resteront éligibles aux TRVE au 1er janvier 2021 ou ceux qui ne le seront plus. L’arrêté contient également trois annexes, utiles à la fois aux clients et aux fournisseurs, parmi lesquelles : un modèle d’attestation de l’éligibilité aux TRVE pour les clients, le modèle de courrier d’information à transmettre par les fournisseurs de contrats aux TRVE, et trois modèles de coupons de réponse à retourner par le client.

Cet arrêté a été précédé de l’avis favorable de la Commission régulation de l’énergie (CRE) pris par délibération n°2019-253 du 21 novembre 2019 (en application de l’article 64-IV de la loi du 8 novembre 2019 précitée). Dans cette délibération, la CRE a émis trois réserves sur le projet d’arrêté[1], toutes prises en compte par le ministre (art. 5 et 7 de l’arrêté commenté).

Le deuxième arrêté commenté a été pris conjointement par le ministre de l’économie et le ministre de l’énergie et porte sur les mesures d’information des clients sur leur perte d’éligibilité aux TRVE par les fournisseurs proposant de tels tarifs en application de l’article 64-III de la loi du 8 novembre 2019 précitée[2].

Cet arrêté prévoit notamment les mentions à indiquer dans les factures des fournisseurs proposant les TRVE, les informations à indiquer lors d’échanges téléphoniques avec le client (à savoir, la disponibilité des offres de marché chez le fournisseur de son choix et l’existence d’un comparateur de prix[3], ainsi que la possibilité d’attester de l’éligibilité aux TRVE), les modalités d’information par voie électronique (site internet du fournisseur et espace personnel du client), ainsi que par voie papier avec un modèle de courrier en annexe.

Enfin, par délibération du 21 novembre 2019 (mise en ligne le 4 décembre dernier), la CRE a proposé aux ministres chargés de l’énergie et de la consommation un projet d’arrêté qui fixe la liste des données que les fournisseurs proposant des TRVE devront mettre à disposition des fournisseurs d’électricité qui en font la demande, et ce en application de l’article 64-IV de la loi du 8 novembre 2019 précitée. L’arrêté pris le 31 décembre 2019 par les ministres et publié au JO du même jour reprend fidèlement la proposition de la CRE.

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[1] Ces réserves ont porté sur la traçabilité des recueils de consentement ou d’absence d’opposition de mise à dispositions des données des clients, sur une adresse générique des fournisseurs aux TRVE pour le traitement des demandes, et fréquence d’actualisation des données.

[2] Qui n’a pas prévu l’avis préalable de la CRE sur ce point.

[3] Prévu par l’article 66 de la loi du 8 novembre 2019, le fonctionnement de ce comparateur sera assuré par le Médiateur national de l’énergie et ses modalités de fonctionnement ont récemment été précisés par un arrêté conjoint des ministres chargés de la consommation et de l’énergie du 12 décembre 2019.

Gîtes géothermiques : précision sur les procédures de publicité et de mise en concurrence des demandes de titres d’exploration et d’exploitation

L’ordonnance n° 2019-784 du 24 juillet 2019 a modifié les dispositions du Code minier relatives à l’octroi et à la prolongation des titres d’exploration et d’exploitation des gîtes géothermiques, notamment afin d’introduire une obligation de mise en concurrence préalable à l’octroi des titres de recherches et des titres d’exploitation. L’ordonnance a également imposé la mise en concurrence des demandes de prolongation des titres d’exploitation, tout en précisant que cette obligation ne s’imposait pas aux demandes de prolongation des titres d’exploration.

Par application de cette ordonnance, le décret n° 2019-1518 du 30 décembre 2019 vient notamment préciser la procédure de mise en concurrence propre aux différents titres, emportant modification des dispositions du décret n° 78-498 du 28 mars 1978 relatif aux titres de recherches et d’exploitation de géothermie.

Ces nouvelles dispositions s’appliquent aux demandes de titres d’exploration ou de titres d’exploitation de gîtes géothermiques déposées auprès de l’autorité administrative à compter du 1er janvier 2020.

Tout d’abord, le décret du 30 décembre 2019 définit les notions économiques et techniques introduites par l’ordonnance du 24 juillet 2019, notamment ce que sont les coûts de recherches et d’exploitation, la notion d’opérateur efficace et de connexion hydraulique, ainsi que la notion de substances connexes. En outre, il décrit les règles selon lesquelles doit être arrêtée la durée d’un titre d’exploitation, au stade de son octroi comme de son renouvellement.

Surtout, ces dispositions précisent les procédures de publicité et de mise en concurrence des demandes de titre, dont le degré de formalisme varie en fonction de la puissance primaire du gîte concerné, la distinction s’opérant entre les gîtes à haute température, d’une puissance primaire supérieure à 20 MW, et les gîtes à basse température, dont la puissance primaire est inférieure à 20 MW.

Ainsi, le décret du 28 mars 1978 tel qu’issu de cette modification réglementaire décrit les pièces devant figurer dans les demandes de titre (cf. article 6.3 pour l’octroi d’un permis exclusif de recherche ; article 7.4 pour l’octroi d’une autorisation de recherches ; article 9.2 pour l’octroi ou la prolongation d’une concession ; article 10.3 pour l’octroi ou la prolongation d’un permis exclusif d’exploitation).

 

Le décret précise également les mesures de publicité à la charge de l’Administration compétente :

  • concernant les demandes d’octroi d’un permis exclusif de recherches et les demandes d’octroi ou de prolongation d’une concession, valables pour les gîtes à haute température : elles doivent être précédées de la publication d’un avis de mise en concurrence, au soin du ministre chargé des mines, d’un avis de mise en concurrence au JORF et au JOUE (cf. respectivement les articles 6.3 et 9.2) ;

  • concernant les demandes d’octroi d’une autorisation de recherches et les demandes d’octroi ou de prolongation d’un permis exclusif d’exploitation, valables pour les gîtes à basse température : elles doivent être précédées de la publication d’un avis de mise en concurrence, au soin du préfet, dans deux journaux régionaux ou locaux dont la diffusion s’étend à toute la zone couverte par la demande de titre (cf. respectivement dont les articles 7.4 et 10.3.

 

Sont également précisés les critères de sélection à l’aune desquels les demandes de titres, dont le contenu est précisé doivent être jugées :

  • concernant les demandes d’octroi d’un permis exclusif de recherches, valable pour les gîtes à haute température : les critères doivent porter sur « les capacités techniques et financières » (cf. précisions à l’article 6.4) ;

  • concernant les demandes d’octroi d’une autorisation de recherches, valable pour les gîtes à basse température : les critères doivent porter sur « la qualité des études préalables réalisées pour la définition du programme de recherches, sur la qualité technique des programmes de travaux présentés et sur l’effort financier minimal tels que définis au III de l’article 7 » (cf. article 7.5) ;

  • concernant les demandes d’octroi ou de prolongation d’une concession, valable pour les gîtes à haute température : la sélection doit être réalisée « sur la base de critères environnementaux, techniques et financiers, en particulier : 1° les moyens mis en œuvre pour atteindre l’efficacité énergétique du projet ; 2° La qualité des études préalables réalisées pour la définition du périmètre de la concession, la qualité des travaux déjà réalisés, le niveau de production envisagé et garantissant un bon usage des gîtes exploités ainsi que la qualité technique et le degré d’innovation des programmes de travaux présentés » (cf. article 9.3) ;

  • concernant les demandes d’octroi ou de prolongation d’un permis exclusif d’exploitation, valable pour les gîtes à basse température : la sélection doit être réalisée « sur la base de critères environnementaux, techniques et financiers, en particulier la bonne exploitation de la ressource du gîte géothermique, la qualité des travaux déjà réalisés, les caractéristiques techniques des futures installations, les moyens mis en œuvre pour atteindre le rendement énergétique du projet et les impacts sur l’environnement du projet en surface » (cf. article 10.4).

 

Par ailleurs, le décret précise le contenu de l’information qui est due aux demandeurs à l’issue de la procédure de mise en concurrence :

  • concernant les demandes d’octroi d’un permis exclusif de recherches et les demandes d’octroi ou de prolongation d’une concession, valables pour les gîtes à haute température : le ministre chargé des mines doit notifier « sans délai » à chaque demandeur ayant répondu à l’appel à la concurrence la décision statuant sur sa demande ; en cas de rejet, la notification doit en préciser les motifs et le nom du ou des demandeurs sélectionnés (cf. respectivement les articles 6.5 et 9.3) ;
  • concernant les demandes d’octroi d’une autorisation de recherches et les demandes d’octroi ou de prolongation d’un permis exclusif d’exploitation, valables pour les gîtes à basse température : le préfet doit notifie à chaque demandeur ayant répondu à l’appel à la concurrence la décision statuant sur sa demande « au plus tard dans les quinze jours qui suivent la réception du dernier rapport d’enquête publique » ; en cas de rejet, la notification doit également en préciser les motifs et le nom du ou des demandeurs sélectionnés.

Nouvelle confirmation de la légalité d’un règlement de voirie imposant un diagnostic d’amiante à la charge du concessionnaire de la distribution de gaz

Dans une décision du 13 décembre 2019, la Cour administrative d’appel de Marseille (ci-après, « la Cour ») a notamment confirmé la possibilité d’imposer aux occupants du domaine public, dans le règlement de voirie, l’obligation de procéder à des diagnostics d’amiante

Dans le litige qui lui était soumis, la société GRDF contestait, notamment, l’article 27 du règlement de voirie du département du Gard qui imposait aux intervenants sur son domaine public routier « de vérifier, à leurs frais, l’absence d’amiante dans les chaussées avant de réaliser des travaux qu’ils ont eux-mêmes décidé pour accomplir leur mission de gestionnaire de réseaux, sous leur propre maîtrise d’ouvrage ».

La société requérante, en l’espèce, GRDF, contestait cette disposition du règlement de voirie estimant qu’elle lui imposait une charge excessive et portait atteinte excessive au droit d’occupation du domaine public, et serait contraire au principe de pollueur-payeur notamment.

La Cour a rejeté les conclusions tendant à l’annulation de l’article 27 du règlement de voirie en cause et en écartant tous les moyens soulevés par GRDF.

Le juge administratif rappelle, tout d’abord, que les autorités compétentes peuvent valablement adopter un règlement de voirie lequel a pour objet de subordonner l’occupation du domaine public par les gestionnaires de réseaux aux conditions indispensables à la protection du domaine public, le tout sans être une charge ni une atteinte excessive au droit d’occupation du domaine public.

La Cour a ensuite écarté le moyen tiré de la méconnaissance du Code du travail, considérant que l’article 27 du règlement de voirie ne fait que rappeler la réglementation en matière de prévention des risques et de sécurité des chantiers et n’a pas pour objet d’imposer aux intervenants des obligations pesant sur le Département en sa qualité d’employeur.

La Cour a également écarté le moyen tiré de la violation du Code de l’environnement et plus précisément du principe de pollueur payeur dans la mesure où l’article 27 du règlement de voirie litigieux se borne à imposer la réalisation d’une étude préalable mais est étranger au régime de traitement et gestion des déchets générés par les travaux et à la détermination du débiteur final du coût de ce traitement. Elle écarte également le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions relatives aux installations classées dans la mesure où aucune installation classée est en cause en l’espèce.

La Cour a encore écarté le moyen tiré du non-respect du principe d’égalité devant les charges publiques dans la mesure où les intervenants sur le domaine public sont placés dans la même situation au regard de l’obligation de réaliser un diagnostic.

Cette solution retenue par la Cour est conforme à la jurisprudence antérieure. En effet, plusieurs Cour administratives d’appel et tribunaux administratifs ont reconnu la légalité de plusieurs règlements de voirie imposant aux sociétés concessionnaires de détecter la présence d’amiante préalablement à la réalisation de travaux, en retenant le même raisonnement que la Cour administrative d’appel de Marseille en l’espèce (voir CAA de Nantes, 16 juin 2017, Société GRDF et société ENEDIS, n° 16NT01065 et 16NT01066, voir notre commentaire dans la lettre d’actualité énergie environnement du mois de juillet 2017 et CAA de BORDEAUX, 28 Mars 2019,société GRDF, n° 17BX00536).

Raccordement aux réseaux publics de distribution d’électricité : de nouvelles règles posées par la CRE

Parmi les compétences de la Commission de Régulation de l’Energie, figure celle de fixer des règles d’élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement aux réseaux publics de distribution d’électricité.

Ces règles sont particulièrement importantes en pratique pour les utilisateurs des réseaux, puisqu’elles déterminent la qualité et l’efficacité des procédure de raccordement aux réseaux publics d’électricité mises en œuvre par les gestionnaires des réseaux, et ce d’autant plus dans le contexte actuel où la transition énergétique est un enjeu majeur

Ces règles résultaient jusqu’à présent d’une délibération de la CRE du 25 avril 2013[1], qui avait légèrement été modifiée en 2018 et 2019.

Considérant toutefois qu’il était nécessaire de réexaminer en profondeur les conditions de raccordement aux réseaux public d’électricité afin de s’adapter aux nouveaux besoins des utilisateurs des réseaux, la CRE avant lancé une consultation sur le sujet dans le courant de l’année 2019.

C’est donc dans le prolongement de cette consultation que la CRE a publié une nouvelle délibération portant décision sur les règles d’élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement aux réseaux publics de distribution d’électricité et le suivi de leur mise en œuvre.

Plusieurs sujets importants sont traités dans cette délibération, en particulier celui relatif aux obligations du GRD envers les collectivités en charge de l’urbanisme (CCU) et celui de la transparence des Propositions Techniques et Financières (PTF) :

 

  • le raccordement des nouveaux usages, tels que le stockage, les infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE), les autoconsommateurs, et plus généralement tout utilisateur du réseau pouvant à la fois injecter et soutirer ;
  • les opérations de raccordement intelligentes (ORI) ;
  • les demandes anticipées de raccordement ;
  • les obligations du GRD envers la collectivité en charge de l’urbanisme (CCU) lorsque cette dernière est redevable d’une contribution pour le raccordement d’un utilisateur au titre de l’article L. 342-11 du code de l’énergie ;
  • l’information mise à disposition des utilisateurs ;
  • la gestion de la file d’attente ;
  • la dématérialisation du traitement des demandes de raccordement ;
  • la transparence des PTF ;
  • les délais de transmissions de la proposition technique et financière (PTF) ;
  • la mission d’information des GRD.

 

Le sujet de l’encadrement de la relation entre GRD et CCU (qui supportent une partie de l’extension du réseau nécessaire au raccordement d’un demandeur) faisait l’objet d’une réflexion par la CRE depuis un certain temps dans la mesure où les CCU.

Si, ces réflexions n’ont pas encore abouti à des modifications du Code de l’énergie, du code de l’urbanisme, et/ou du modèle de cahier des charges de concession d’électricité (modification qui ne sont pas du ressort de la CRE), la délibération a le mérite de prescrire aux GRD les modalités d’échanges avec les CCU à intégrer dans leurs procédures de raccordement, en particulier au sujet des coûts des ouvrages d’extension (cf. paragraphe 1.4 de l’annexe 1 de la délibération).

Ainsi, il est notamment prévu que le GRD doit répondre aux éventuelles demandes d’informations complémentaires des CCU concernant la proposition technique et financière émise à l’occasion d’une demande de raccordement. Et la délibération ajoute que « Les réserves éventuellement formulées par la collectivité en charge de l’urbanisme ne doivent pas entraver la bonne tenue et le parfait achèvement des travaux nécessaires au raccordement de l’utilisateur. La mise en service de l’installation de l’utilisateur ne peut pas être soumise à l’accord sans réserve sur le montant de la contribution due par la collectivité en charge de l’urbanisme ou au versement de tout ou partie de cette contribution ».

S’agissant de la transparence des PTF, la délibération énonce le contenu a minima que les propositions techniques et financières des GRD devront présenter, à savoir :

  • la solution de raccordement qui a été retenue ;
  • un niveau de détails suffisants, avec notamment le détail des quantités présentées ;
  • un schéma de raccordement clair et précis, et qui ne doit pas être sujet à interprétation, faisant clairement apparaitre la consistance des ouvrages qui le composent (branchement, extension, renforcement) ;
  • des éléments indicatifs sur le planning de raccordement ;
  • la répartition des coûts entre étude, travaux, fourniture et ingénierie (cf. paragraphe 2.3.1 de l’annexe 1 de la délibération)

 

La délibération ajoute des précisions sur la notion de « devis suffisamment détaillé » :

« Lorsque la proposition technique et financière n’utilise pas de formules de coûts simplifiées issues du barème de raccordement du gestionnaire de réseaux, les coûts sont présentés sur un devis suffisamment détaillé. Les termes « un devis suffisamment détaillé » s’entendent par un devis comportant toutes les indications permettant d’apprécier les propositions de prix et notamment le détail des quantités et prix unitaires de l’opération de raccordement ».

Enfin, la délibération rappelle la nécessité que la solution de raccordement décrite dans la PTF soit présentée de manière claire :

« La description de la solution de raccordement proposée fait clairement apparaître la consistance des ouvrages qui la composent (les ouvrages de branchement, d’extension et de renforcement des réseaux existants, ou, le cas échéant, les ouvrages propres, les ouvrages créés en application d’un schéma régional de raccordement des énergies renouvelables au réseau, et les ouvrages renforcés), en s’appuyant notamment sur les définitions des articles L. 342-1, D. 342-1 et D. 342-2 du Code de l’énergie. Lorsqu’elle est différente de la solution retenue, l’opération de raccordement de référence est, également, présentée par le gestionnaire de réseau public de distribution dans la première proposition technique et financière envoyée au demandeur. Les éléments de coût relatifs à ces deux opérations sont précisés ».

Ces nouvelles règles viennent ainsi renforcer les obligations de transparence à la charge des GRD dans le souci de permettre aux utilisateurs et CCU de comprendre les coûts de raccordement susceptibles d’être mis à leur charge, souvent loin d’être négligeables. On regrette néanmoins que la définition des ouvrages de renforcement du réseau n’ait pas été clarifiée par la CRE en référence aux dispositions de l’article L.342-11 du Code de l’énergie[2] alors que la consistance de ces ouvrages – s’ils font partie de la solution de raccordement – devra désormais être décrite clairement par les GRD. Car pour mémoire, la part renforcement d’un raccordement n’est pas due par le demandeur du raccordement puisqu’elle est comprise dans le Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Electricité (TURPE).

Ces nouvelles règles posées par la CRE devraient être prochainement mises en œuvre, la délibération ayant prescrit aux gestionnaires des réseaux publics de distribution d’engager sans délai l’élaboration ou, le cas échéant, la mise à jour des procédures de traitement des demandes de raccordement. En tout état de cause, la publication et l’entrée en vigueur des nouvelles procédures de traitement des demandes de raccordement doivent intervenir au plus tard six mois après la publication de la délibération, soit au plus tard le 22 juin prochain, la délibération ayant été publiée au Journal Officiel du 22 décembre 2019.

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[1] Délibération de la CRE du 25 avril 2013 portant décision sur les règles d’élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement aux réseaux publics de distribution d’électricité et le suivi de leur mise en œuvre

[2] Article L.342-11 du Code de l’énergie : « La contribution prévue à l’article L. 342-6 pour le raccordement des consommateurs au réseau de distribution est versée, dans des conditions, notamment de délais, fixées par les cahiers des charges des concessions ou les règlements de service des régies ou, à défaut, par décret en Conseil d’Etat, par les redevables mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4° et 5° suivants (…)Toutefois, les coûts de remplacement ou d’adaptation d’ouvrages existants ou de création de canalisations en parallèle à des canalisations existantes afin d’en éviter le remplacement, rendus nécessaires par le raccordement en basse tension des consommateurs finals, ne sont pas pris en compte dans cette part. Ces coûts sont couverts par le tarif d’utilisation des réseaux publics de distribution mentionné à l’article L. 341-2 lorsque ce raccordement est effectué par le gestionnaire du réseau de distribution ; […] ».

 

Concessions : retour à l’autorité concédante des provisions pour travaux de renouvellement inutilisées en fin de contrat

On se souvient que par une décision rendue le 18 octobre 2018 société Electricité de Tahiti (n°420097) particulièrement commentée depuis, le Conseil d’Etat avait apporté d’utiles précisions sur le sort des provisions pour renouvellement constituées dans le cadre d’un contrat de concession (voir notre brève dans la LAJEE n° 44 parue en novembre 2018).

Le Conseil d’Etat s’était penché sur les dispositions de la loi du Pays de la Polynésie française relative aux provisions pour renouvellement des immobilisations dans les délégations de service public.

A cette occasion, la Haute Juridiction avait rappelé les principes applicables aux biens de retour qui concernaient une concession de distribution publique d’électricité, dégagés notamment par l’arrêt d’Assemblée du 21 décembre 2012, commune de Douai, (n°342788). Elle avait en outre et surtout indiqué que les provisions pour renouvellement constituées par un concessionnaire, pour des montants excédant les besoins de renouvellement, ne peuvent être conservées par lui.

Dans le jugement ici commenté, le Tribunal administratif a fait une application directe de ces principes, dans un domaine autre que l’énergie mais dont l’analyse est tout à fait transposable.

Le litige opposait la communauté de communes du Haut Val de Sèvres à son concessionnaire pour l’assainissement collectif, la société SAUR.

A l’issue du contrat de concession, la collectivité avait réclamé à son concessionnaire le solde des provisions pour renouvellement constituées et non utilisées, il s’agissait précisément de « la différence entre les charges de renouvellement des équipements cumulées et prélevées sur les usagers et le montant des travaux réellement réalisés sur la période contractuelle ».

La SAUR avait alors contesté le titre de recettes émis par la collectivité pour récupérer ce solde.

Reprenant les principes du Conseil d’Etat dans l’affaire société Electricité de Tahiti, le Tribunal administratif de Poitiers rappelle que les provisions ne sauraient être conservées par le concessionnaire :

«  […] les sommes requises pour l’exécution des travaux de renouvellement des biens nécessaires au fonctionnement du service public qui ont seulement donné lieu, à la date d’expiration du contrat, à des provisions, font également retour à la personne publique. Il en va de même des sommes qui auraient fait l’objet de provisions en vue de l’exécution des travaux de renouvellement pour des montants excédant ce que ceux-ci exigeaient, l’équilibre économique du contrat ne justifiant pas leur conservation par le concessionnaire ».

Dès lors, le Tribunal a considéré que la collectivité avait pu émettre, en fin de contrat, un titre de recettes pour avoir paiement d’une somme de 563.726 euros correspondant aux provisions constituées par le concessionnaire et finalement inutilisées.

Le jugement est ici intéressant en ce que les juges ont considéré qu’une collectivité peut valablement chiffrer avec ses propres éléments le montant des provisions inutilisées, et ce, dans la mesure où le concessionnaire n’apportait aucun élément comptable de nature à contester les chiffres retenus :

«  alors que la société Saur n’apporte aucun élément comptable de nature à contester les chiffres retenus par l’administration, s’agissant du montant des provisions dotées en vue de l’exécution des travaux de renouvellement des biens nécessaires au fonctionnement du service public de l’assainissement collectif affermé et du montant des travaux réalisés pendant la durée d’exécution du contrat, la communauté de communes du Haut Val de Sèvres a pu, en l’état des pièces communiquées par la société Saur, émettre le titre de perception litigieux ».

Cela étant, le Tribunal a malgré tout été contraint d’annuler le titre exécutoire émis par la collectivité en ce qu’il ne mentionnait pas les nom, prénom et qualité de la personne qui l’avait émis comme l’impose l’article L.1617-5 du Code général des collectivités territoriales.

Compétence du juge judiciaire pour connaître d’un litige relatif à une convention de concession d’une centrale hydroélectrique requalifiée en contrat de droit privé

Dans un arrêt du 30 décembre 2019, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a qualifié un contrat conclu entre une commune et une société portant sur la construction, la gestion, et l’exploitation d’une centrale de production d’énergie hydroélectrique de contrat de droit privé, et renvoyé les parties devant le juge judiciaire pour connaître d’un litige ayant trait à l’exécution de ladite convention.

Plus précisément, les faits étaient les suivants : la commune d’Aulus-les-Bains, alors titulaire d’une autorisation préfectorale de disposer de l’énergie des rivières de l’Ars et du Garrett, avait conclu avec la société IGIC en 1989 une convention ayant pour objet de confier à cette dernière pour une durée de 29 ans, reconductible pour une durée de 15 ans, et moyennant le versement d’une redevance annuelle à la commune par la société, la mission de construire, gérer et exploiter une centrale de production d’énergie hydroélectrique. L’énergie produite devant être vendue à EDF.

Puis, par un arrêté du 27 août 2002, le Préfet avait transféré à la société IGIC l’autorisation de disposer de l’énergie des deux rivières initialement accordée à la commune. Estimant la convention de 1989 désormais privée d’objet, les parties avaient conclu une convention au mois de septembre 2002 annulant et remplaçant la convention initiale. Cette nouvelle convention prévoyait un nouveau mode de calcul de la redevance annuelle versée à la commune et avait pour unique objet la mise à disposition de terrains et chemins communaux au bénéfice de la société.

A la suite de différends concernant les redevances dues par la société IGIC à la commune, cette dernière a émis plusieurs titres de recettes, contestés devant le Tribunal administratif de Toulouse dans le cadre de deux instances. Ses demandes n’ayant été que partiellement accueillies par la juridiction, la société IGIC a interjeté appel des deux jugements devant la Cour administratif de Bordeaux.

De manière relativement surprenante, la société IGIC soutenait dans son argumentaire devant la Cour que le litige avait trait à l’exécution d’un contrat de droit privé et ne relevait pas de la compétence de la juridiction administrative. Dans sa décision du 30 décembre 2019, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a accueilli ce moyen et jugé effectivement que les deux contrats successivement conclus entre la commune et la société IGIC ne constituaient pas des contrats administratifs mais des contrats de droit privé relevant du juge judiciaire.

Pour ce faire, la Cour administrative d’appel de Bordeaux commence par relever que dès lors que la puissance de l’installation hydraulique est inférieure à 4500 kilowatts, ladite installation ne relevait pas du régime de la concession mais de celui de l’autorisation conformément à l’article 1er de la loi du 16 octobre 1919 relative à l’utilisation de l’énergie hydraulique, en vigueur à la date de conclusion de la convention de 1989. Ceci étant, ainsi qu’il ressort des énonciations de l’arrêt, c’est bien une autorisation et non une concession qui a été accordée par le Préfet à la commune, puis transférée à la société.

Ensuite, examinant l’objet de chacune des deux conventions successivement conclues en 1989 et 2002 entre la commune et la société IGIC, la Cour administrative d’appel de Bordeaux estime que :

  • la production d’électricité en vue de sa cession à EDF n’est pas une activité relevant de l’intérêt public communal,
  • la société IGIC ne s’est vu confier aucune obligation de service public,
  • le pouvoir de contrôle conféré par la convention à la commune est limité à la transmission d’un bilan d’exploitation de l’exercice et à un droit de visite des installations.

Dès lors, après avoir relevé l’absence de clause exorbitante du droit commun dans les deux conventions (autre critère permettant d’identifier un contrat administratif conformément à la jurisprudence traditionnelle CE, 31 juillet 1912, société des granits porphyroïdes des Vosges, n° 30701), la Cour en conclut que les deux conventions ne constituent pas des délégations de service public.

Ensuite, la Cour écarte l’application du critère de la participation à une opération de travaux public en considérant que la commune n’a pas joué le rôle de maître d’ouvrage de l’opération, et n’en deviendra propriétaire qu’à son terme. Néanmoins, un contrat est administratif car portant sur des travaux publics lorsque (i) le travail est exécuté pour le compte d’une personne publique et (ii) dans un but d’intérêt général (par exemple CE, 3 décembre 2015, sté Fosmax, n° 388806). Or, dans la mesure où la Cour relève que la commune a vocation à devenir propriétaire de l’ouvrage au terme du contrat, on peut considérer que le premier critère est rempli et que c’est en considérant qu’il n’existait pas de but d’intérêt général que la Cour a pu considérer que les critères du travail public n’étaient pas remplis.

Enfin, la Cour considère que les deux contrats conclus par la commune d’Alus-les-Bain ne peuvent être qualifiés de contrats administratifs par détermination de la loi. Elle rappelle en effet que l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession et le Code de la commande publique qualifient de contrat administratif, notamment, les concessions de travaux. Toutefois, la Cour relève que même si la convention en cause pouvait être qualifiée de concession de travaux (ce que la Cour n’examine pas), en tout état de cause la qualification légale découlant de l’ordonnance du 29 janvier 2016 et du Code de la commande publique ne s’applique qu’aux seuls contrats dont la procédure de passation a été engagée à compter du 1er avril 2019 (1er avril 2016 pour l’ordonnance). La Cour écarte donc ce fondement

Enfin, la Cour écarte encore la compétence du juge administratif en rappelant que si les conventions successivement conclues par les parties emportent mise à disposition de terrains communaux, lesdits terrains relèvent du domaine privé communal.

La Cour en conclut que la convention du 16 décembre 1989 tout comme celle du 5 septembre 2002 sont des conventions de droit privé, dont les contentieux relatifs à l’exécution doivent être portés devant le juge judiciaire.

Application par le CORDIS de la prescription quinquennale de l’article 2224 du Code civil à un différend relatif aux conditions d’accès au réseau public de distribution d’électricité

Par une décision du 4 décembre 2019 statuant sur les différends qui opposaient les sociétés Energies Nouvelles Investissements et JLT Invest à la société SRD, le Comité de Règlement des Différends et des Sanctions (ci-après, « CORDIS ») de la Commission de régulation de l’énergie a fait application de la règle de la prescription quinquennale posée par l’article 2224 du Code civil à un différend opposant deux usagers à un gestionnaire du réseau de distribution (ci-après, « GRD ») public d’électricité au sujet des conditions d’accès audit réseau.

Le CORDIS était saisi de deux différends similaires opposant la société SRD, gestionnaire de réseau public de distribution d’électricité (entreprise locale de distribution sur le territoire de la Vienne), d’une part, à des filiales de la société Energies Nouvelles Investissements et, d’autre part, à des filiales de la société JLT Invest au sujet de plusieurs conventions de raccordement et d’accès au réseau public de distribution d’électricité conclues pour leurs installations de production photovoltaïque durant les années 2010 à 2015.

Les conditions générales de ces conventions prévoient notamment que la composante annuelle de comptage est calculée par une méthode de comptage dite « à courbe de mesure ». Or, par des lettres du 15 janvier 2018, les sociétés Energies Nouvelles Investissements et JLT Invest ont mis la société SRD en demeure de soumettre à leurs filiales des avenants à leurs conventions de raccordement afin de leur permettre de choisir entre une méthode de comptage à courbe de mesure et une méthode de comptage dite « à index », et de procéder au remboursement des frais trop perçus en raison de la mise en œuvre de la méthode de comptage à courbe de mesure, estimant les stipulations des conditions générales contraires à la décision du 24 mai 2013 des Ministres de l’énergie et de l’économie relative aux tarifs d’utilisation d’un réseau public d’électricité dans le domaine de tension HTA ou BT pour la période du 1er août 2009 au 31 juillet 2013 (Journal Officiel, 26 mai 2013, p.8704).

Les deux sociétés ont ensuite saisi le CORDIS de demandes identiques tendant, notamment, à ce que ce dernier ordonne à la société SRD de leur transmettre sous astreinte des avenants aux contrats de raccordement, d’accès au réseau et d’exploitation conclus par leurs filiales pour leurs installations de production photovoltaïque et faisant état d’un comptage à index, et qu’il constate que la société SRD est redevable à l’égard de chacune des deux sociétés de sommes correspondant au trop-perçu des redevances recouvrées par la société SRD sur les périodes en cause.

Dans la décision commune aux deux sociétés rendue le 4 décembre 2019 et ici commentée, le CORDIS commence par confirmer sa compétence pour statuer sur ces différends opposant des utilisateurs d’un réseau public de distribution d’électricité au gestionnaire de ce réseau, en ce qu’ils sont relatifs aux conditions de l’accès à ce réseau et procèdent d’un désaccord sur la conclusion et l’exécution de contrats destinés à assurer cet accès.

Au fond, le CORDIS fait droit au moyen soulevé par la société SRD et rejette, comme étant frappées de la prescription quinquennale prévue par l’article 2224 du Code civil, les demandes des filiales des sociétés Energies Nouvelles Investissements et JLT Invest.

Pour ce faire, le comité commence par estimer que les règles générales de prescriptions des actions personnelles ou mobilières posées par l’article 2224 du Code civil sont « applicables à une action qui, comme en l’espèce, tend à contester la validité de certaines stipulations contractuelles, peuvent être utilement invoquées devant le comité statuant en matière de règlement de différends ».

Puis, le CORDIS relève que la publication au Journal officiel, le 26 mai 2013, des règles tarifaires posées par la décision du 24 mai 2013 relative aux tarifs d’utilisation d’un réseau public d’électricité dans le domaine de tension HTA ou BT pour la période du 1er août 2009 au 31 juillet invoquées par les sociétés demanderesses à l’appui de leurs prétentions a commencé à faire courir le délai de prescription de 5 ans posé par l’article 2224 du Code civil.

Le CORDIS estime en outre, se référant à la jurisprudence de la Cour de cassation, que les lettres de mise en demeure adressées par les sociétés demanderesses en janvier 2018 n’ont pas eu pour effet d’interrompre le cours de ce délai de prescription.

Le CORDIS en déduit donc que les demandes de règlement de différends présentées par les sociétés et enregistrées le 24 septembre 2018 sont prescrites, et doivent donc être rejetées.

Cette décision du CORDIS invite ainsi les usagers à faire preuve de vigilance et de réactivité en cas d’évolution des règles applicables aux contrats d’accès au réseau postérieurement à la conclusion desdits contrats.

Projet de décision de la CRE sur le tarif d’utilisation des réseaux de distribution de gaz naturel de GRDF (« ATRD6 ») applicable à compter du 1er juillet 2020

Conformément à la compétence qui lui est dévolue par l’article L. 134-2 4° du Code de l’énergie, la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE) a, par une délibération n° 2019-271 du 19 décembre 2019, adopté un projet de décision sur le tarif péréqué d’utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel de GRDF qui sera applicable à compter du 1er juillet 2020, dit tarif « ATRD6 ».

Le tarif actuel d’utilisation des réseaux de distribution de gaz naturel de GRDF, dit tarif « ATRD5 », est entré en vigueur le 1er juillet 2016 pour une durée d’environ quatre ans (Délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 10 mars 2016 portant décision sur le tarif péréqué d’utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel de GRDF).

Ce tarif est applicable sur le périmètre de desserte historique de GRDF, sur lequel il dispose d’un monopole.

Le projet de décision du 19 décembre 2019 fait suite à une série de quatre consultations publiques organisées par la CRE au cours de l’année 2019 afin d’interroger les acteurs du marché.

Ainsi qu’il résulte de la délibération, la CRE a souhaité apporter, par le tarif proposé, des réponses à quatre enjeux, qu’elle qualifie de prioritaires, qui sont les suivants :

  • le maintien d’un niveau de sécurité maximum du réseau de distribution de gaz par la reprise de l’ensemble des charges d’exploitation de GRDF liées à la sécurité et permettre à GRDF de mettre en œuvre sa politique d’investissement ;
  • l’accompagnement de la transition énergétique par l’attribution de manière nouvelle à GRDF de moyens pour l’accueil du biométhane dans les réseaux et pour la recherche et le développement ;
  • la maîtrise du niveau du tarif dans le contexte d’une baisse de la consommation de  gaz ;
  • le début de la phase industrielle du projet « Changement de gaz » qui consiste à convertir la zone gaz B en zone gaz H par l’intégration dans l’ATRD6 des charges prévisionnelles liées à ce projet.

Au global L’évolution moyenne envisagée par la CRE du tarif ATRD6 s’établit à environ – 0,3 %/an.

La délibération est transmise pour avis au Conseil Supérieur de l’énergie et aux Ministres chargés de l’énergie et de l’économie, lesquels Ministres disposent d’un délai de deux mois pour, le cas échéant, solliciter une nouvelle délibération de la CRE.

Autorisation environnementale : la procédure simplifiée par décret

Le décret n° 2019-1352 du 12 décembre 2019 portant diverses dispositions de simplification de la procédure d’autorisation environnementale est paru au Journal Officiel le 14 décembre 2019. Ce décret de simplification présente deux objets principaux, l’un portant sur la dématérialisation de la procédure de demande d’autorisation et l’autre sur la suppression d’un certain nombre de consultations auparavant obligatoires.

Le nouvel article R. 181-12 du Code de l’environnement (C. env.) permet ainsi au demandeur d’une autorisation environnementale de choisir, à compter du 15 décembre 2020, sa procédure de dépôt de dossier. Il pourra dès lors choisir de la déposer en version papier en quatre exemplaires, avec un envoi sous forme électronique, comme le veut la procédure actuelle, ou bien sous la forme dématérialisée d’une téléprocédure. Le Gouvernement a cependant choisi de ne pas rendre cette dématérialisation obligatoire, comme cela était initialement prévu à compter du 1er janvier 2023.

Le décret prévoit toutefois une exception à cette possibilité d’opter pour la procédure dématérialisée. Il est ainsi ajouté un alinéa à l’article R. 181-55 C. env. précisant qu’il ne pourra pas être recouru à une téléprocédure en cas de projet relevant du ministre de la défense ou soumis à des règles de protection du secret de la défense nationale.

Par ailleurs, les procédures de consultation ont été simplifiées. Le décret supprime ainsi quatre articles réglementaires du Code de l’environnement prévoyant la consultation de divers organismes. Désormais, ne seront plus consultés le préfet de région lorsque le projet affecte ou est susceptible d’affecter des éléments du patrimoine archéologique (article R. 181-21 C. env.), l’Institut national de l’origine et de la qualité lorsque le projet est situé dans une commune comportant une aire de production d’un produit d’une appellation d’origine (article R. 181-23 C. env.), le Ministre en charge des hydrocarbures lorsque la demande porte sur un projet relatif à un établissement pétrolier (article R. 181-29 C. env.) et l’Office national des forêts (ONF) lorsque la demande tient lieu d’autorisation de défrichement d’un bois ou d’une forêt relevant du régime forestier (article R. 181-31 C. env.).

Le décret prévoit en outre que l’Agence régionale de santé (ARS) ne sera plus consultée que lorsque le projet est soumis à évaluation environnementale ou lorsque le préfet estime que le projet est susceptible de présenter des dangers et inconvénients pour la santé et la salubrité publiques (article R. 181-18 C. env.), alors que son avis était auparavant requis dès lors que le projet était susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement et la santé humaine au-delà du territoire d’une seule région.

D’autre part, l’avis qui devait auparavant être délivré par le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) revient à présent, à l’issue d’une démarche de déconcentration, aux conseils scientifiques régionaux du patrimoine naturel (CSRPN). Des exceptions sont cependant à noter et le CNPN devra toujours être consulté dans quatre cas (article R. 181-28 C. env.) :

  • Lorsque la demande porte sur une espèce de vertébré protégé figurant sur une liste établie en application de l’article R. 411-8-1 C. env. ;
  • Lorsque la demande porte sur une espèce animale ou végétale figurant sur la liste établie en application de l’article R. 411-13 C. env. ;
  • Lorsque la demande concerne au moins deux régions administratives ;
  • Lorsque le préfet estime que la complexité et l’importance des enjeux du dossier soulèvent une difficulté exceptionnelle.

Enfin, lorsque le projet relève de la nomenclature IOTA, le préfet ne doit désormais plus saisir pour avis que la Commission locale de l’eau lorsque le projet est situé dans le périmètre d’un schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) (article R. 181-22 C. env.). Ainsi, ne doivent plus être saisis pour avis la personne publique gestionnaire du domaine public, le président de l’établissement public territorial de bassin et l’organisme unique de gestion collective des prélèvements d’eau pour l’irrigation, comme cela était demandé par les textes jusqu’à présent.

Le décret contient en outre diverses dispositions permettant d’accélérer la procédure de demande d’autorisation et prévoit notamment que le préfet se doit d’adresser au commissaire enquêteur un dossier complet « avant signature de l’arrêté d’ouverture d’enquête » et non plus dès que le commissaire enquêteur est désigné. Cela autorise ainsi le pétitionnaire à présenter un dossier incomplet et à le compléter alors même que le commissaire enquêteur est déjà désigné, ce qui permet dès lors d’accélérer la procédure (article R. 123-5 C. env.).

Enfin, la consultation du pétitionnaire pendant la phase dite de contradictoire est également accélérée. Ainsi, lorsque le préfet décide de solliciter le conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) ou la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS), lorsqu’il envisage d’assortir l’autorisation de prescriptions ou lorsqu’il prévoit d’opposer un refus à la demande d’autorisation, le pétitionnaire peut désormais présenter ses observations lors de ces réunions. Dans ce cas et si le projet n’est pas modifié, il n’est plus nécessaire d’engager un nouveau contradictoire (article R. 181-40 C. env.).

Loi Energie-Climat : nouveautés relatives à la procédure d’évaluation environnementale et à l’encadrement des émissions de gaz à effet de serre

La loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, dite loi énergie-climat et publiée le 9 novembre 2019 au Journal Officiel, a pour objet la définition et la mise en œuvre de la politique en matière de transition énergétique dans le but de répondre aux exigences de l’Accord de Paris et de l’urgence écologique et climatique. Elle fait donc suite à la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Elle fixe notamment de nouveaux objectifs et politiques en matière énergétique, prévoit la création d’une nouvelle institution – le Haut conseil pour le climat -, ainsi que de nouvelles obligations de reporting environnemental pour les investisseurs (sociétés de gestion de portefeuille, entreprises régies par le code de la mutualité, fonds de retraite professionnelle supplémentaire, etc.) et l’instauration de mesures de lutte contre la fraude aux certificats d’économie d’énergie.

Les modifications apportées par cette loi en matière de tarifs réglementés de vente de gaz et d’électricité et de régulation de l’énergie ont été présentées par la LAJEE n° 56 du mois de décembre 2019.

L’attention sera ici portée plus particulièrement sur, d’une part, les modifications apportées à la procédure d’autorisation environnementale (1) et, d’autre part, la question de l’encadrement et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, avec les dispositifs relatifs à une transition en matière de ressource énergétique et l’établissement du bilan des émissions de gaz à effet de serre (2).

 

  1. Modifications de la procédure d’évaluation environnementale

Plusieurs modifications sont apportées par les articles 31 et suivants de la loi énergie-climat à la procédure d’évaluation environnementale.

Tout d’abord, une distinction est introduite à l’article L. 122-1 du Code de l’environnement entre l’autorité chargée d’examiner au cas par cas les projets qui seront soumis à la procédure d’évaluation et celle devant, précisément, réaliser cette évaluation environnementale. Cette nouvelle autorité chargée de l’examen au cas par cas des projets doit présenter des garanties d’indépendance. Ainsi, aux termes du Vbis de l’article L. 122-1, introduit par la loi énergie-climat : « L’autorité en charge de l’examen au cas par cas et l’autorité environnementale ne doivent pas se trouver dans une position donnant lieu à un conflit d’intérêts. A cet effet, ne peut être désignée comme autorité en charge de l’examen au cas par cas ou comme autorité environnementale une autorité dont les services ou les établissements publics relevant de sa tutelle sont chargés de l’élaboration du projet ou assurent sa maîtrise d’ouvrage […] ».

Pour rappel, aux termes de l’article R. 122-17 du Code de l’environnement, les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) sont soumis à évaluation environnementale après examen au cas par cas. Il est à noter que, si un PPRT n’a pas été soumis à une évaluation environnementale, le moyen tiré de ce que le service de l’Etat qui a décidé de ne pas le soumettre à une telle procédure ne disposait pas d’une autonomie suffisante par rapport à l’autorité compétente de l’Etat pour approuver ce plan ne peut permettre de fonder l’annulation du plan (article 31 de la loi). Ainsi, les arrêtés portant prescription ou approbation des plans de prévention des risques technologiques sont validés, en tant qu’ils sont contestés par ce moyen et sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée.

Cette modification de la procédure intervient dans un contexte contentieux portant sur la question de l’annulation d’un PPRT (cf. Tribunal administratif de Lyon, 10 janvier 2019, n° 1609469). En effet, la décision de soumettre un PPRT à la procédure d’autorisation environnementale était prise par un agent de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), placé sous l’autorité fonctionnelle du préfet de département, auteur de cet instrument. Le tribunal administratif de Lyon a alors considéré que la DREAL ne disposait pas des moyens propres de nature à lui assurer une réelle autonomie à l’égard du préfet de département, viciant la procédure d’adoption du PPRT et menant à son annulation.

Par ailleurs, dans le cadre d’un contentieux contre un plan ou programme soumis à évaluation environnementale au titre de l’article L. 122-4 du Code de l’environnement, la loi introduit également la possibilité pour le juge de surseoir à statuer s’il estime que l’illégalité entachant l’élaboration, la modification ou la révision de cet acte est susceptible d’être régularisée et si aucun autre moyen n’est fondé. Le juge devra préalablement inviter les parties à présenter leurs observations et, s’il décide de surseoir à statuer, fixer un délai pour permettre cette régularisation, délai durant lequel le plan ou programme reste applicable (article 32 de la loi).

Précisons également que, aux termes de l’article 34 de la loi énergie-climat, les hypothèses dans lesquelles le préfet peut décider que la demande d’enregistrement d’une installation classée sera instruite selon la procédure prévue pour les installations soumises au régime de l’autorisation environnementale sont élargies. En effet, pour prendre cette décision, le préfet ne pouvait auparavant prendre en compte que les critères mentionnés au point 2 de l’annexe III de la directive 2011/92/UE (relatifs à localisation du projet). Désormais, l’ensemble des critères mentionnés à cette annexe pourra être pris en compte, soit ceux relatifs aux caractéristiques des projets et aux impacts potentiels qu’un projet pourrait avoir. Le cas échéant, le projet sera soumis à la procédure d’évaluation environnementale (article L. 512-7-1 du Code de l’environnement).

 

  1. La consolidation de l’encadrement des émissions de gaz à effet de serre

La loi énergie-climat renforce les outils permettant de limiter les émissions de gaz à effet de serre. A cette fin, les objectifs relatifs à la consommation énergétique ont été réhaussés (a) et un nouvel outil a été créé : la loi quinquennale sur la politique énergétique qui permettra d’en déterminer les objectifs (b). Une réduction drastique des activités des centrales thermiques est également imposée (c) et les obligations en matière d’établissement des bilans des émissions de gaz à effet de serre sont renforcées (d).

 

a – Le rehaussement des objectifs de réduction de consommation énergétique

L’article 1er de la loi énergie-climat révise les objectifs de politique énergétique et en introduit de nouveaux.

La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte avait fixé pour objectif la division par 4 des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050 (objectif dit « facteur 4 »). Aux termes de la loi énergie-climat, cet objectif a été réhaussé : il s’agit dorénavant d’atteindre la neutralité carbone, c’est-à-dire un équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre, d’ici 2050 (article 1er de la loi). La division des émissions devra donc être d’un facteur supérieur à 6 entre 1990 et 2050.

D’autres objectifs ont également été rehaussés par la loi énergie climat, tel que l’objectif de réduire la consommation énergétique primaire des énergies fossiles de 40 % en 2030 par rapport à l’année de référence 2012 (cet objectif était de 30% avant l’adoption de la loi énergie-climat). De même, l’objectif de porter la part des énergies renouvelables à 32% de la consommation finale brute d’énergie en en 2030 est passé à 33% au moins.

Si l’objectif de réduire la consommation énergétique finale de 50 % en 2050 par rapport à la référence 2012 n’a pas été modifié par la loi, un nouvel objectif intermédiaire a été fixé : cet objectif est ainsi d’environ 7 % en 2023.

L’objectif de réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % est toutefois reporté, de l’horizon 2025 à 2035.

D’autres objectifs relatifs à la politique énergétique ont été introduits par la loi énergie-climat à l’article L. 100-4 du Code de l’énergie : encourager la production d’énergie hydraulique, notamment la petite hydroélectricité ; favoriser la production d’électricité issue d’installations utilisant l’énergie mécanique du vent implantées en mer, avec pour objectif de porter progressivement le rythme d’attribution des capacités installées de production à l’issue de procédures de mise en concurrence à 1 gigawatt par an d’ici à 2024 ; développer l’hydrogène bas-carbone et renouvelable et ses usages industriel, énergétique et pour la mobilité, avec la perspective d’atteindre environ 20 à 40 % des consommations totales d’hydrogène et d’hydrogène industriel à l’horizon 2030 ; favoriser le pilotage de la production électrique, avec pour objectif l’atteinte de capacités installées d’effacements d’au moins 6,5 gigawatts en 2028.

La politique énergétique devra donc tendre à la réalisation de ces objectifs.

 

b – Loi quinquennale de l’énergie

L’article 2 de la loi énergie-climat introduit un nouvel article L. 100-1 A au Code de l’énergie. Aux termes de cet article, avant le 1er juillet 2023 puis tous les cinq ans, le gouvernement devra adopter une loi quinquennale qui détermine les objectifs et fixe les priorités d’action de la politique énergétique nationale pour répondre à l’urgence écologique et climatique.

Cette loi quinquennale devra ainsi fixer les objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de réduction de la consommation énergétique finale et notamment les objectifs de réduction de la consommation énergétique primaire fossile, de développement des énergies renouvelables, de diversification du mix de production d’électricité, de rénovation énergétique dans le secteur du bâtiment, ainsi qu’en matière d’autonomie énergétique dans les départements d’outremer.

Divers instruments devront être compatibles avec les objectifs fixés par la loi quinquennale (fixés au II de l’article L. 100-1 A). Il s’agit de la programmation pluriannuelle de l’énergie, du plafond national des émissions de gaz à effet de serre, de la stratégie bas-carbone, de l’empreinte carbone de la France et du budget carbone spécifique au transport international, du plan national intégré en matière d’énergie et de climat et de la stratégie à long terme et de la stratégie de rénovation à long terme.

 

c – La fermeture des centrales thermiques au 1er janvier 2022

Afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre, il est prévu par la loi énergie-climat que l’autorité administrative devra fixer par décret un plafond d’émissions applicable, à compter du 1er janvier 2022, aux installations de production d’électricité à partir de combustibles fossiles situées sur le territoire métropolitain continental et émettant plus de 0,55 tonne d’équivalents dioxyde de carbone par mégawattheure (article 12 de la loi énergie-climat).

Un projet de décret a été soumis à consultation du public du 25 novembre 2019 au 16 décembre 2019, lequel prévoit de fixer le plafond d’émissions à 0,7 kilotonne d’équivalent CO2 émis annuellement par mégawatt de puissance installée. En outre, les installations de très petite taille (installations visées à l’article R. 311-2 du Code de l’énergie) ne seront pas concernées par ce plafond. Cette mesure devrait ainsi permettre de limiter fortement le nombre d’heures de fonctionnement des centrales à charbon, qui passera à 700h contre environ 3 000h actuellement.

En raison de cette limitation, quatre centrales à charbon situées sur le territoire métropolitain devraient être contraintes à la fermeture ou à la reconversion d’ici à 2022 : les centrales de Cordemais (Loire-Atlantique), du Havre (Seine-Maritime), de Saint-Avold (Moselle) et de Gardanne (Bouches-du-Rhône).

La loi énergie-climat prévoit néanmoins que le gouvernement sera tenu, dans les six mois suivants l’adoption de la loi, de prendre par ordonnance des mesures d’accompagnement des salariés, des personnels portuaires, notamment les ouvriers dockers, et des salariés de l’ensemble de la chaîne de sous-traitance dont les postes seront supprimés du fait des fermetures des centrales thermiques.

 

d – Etablissement et transmission du bilan d’émissions de gaz à effet de serre

L’article 28 de la loi apporte des modifications à l’article L. 229-25 du Code de l’environnement, relatif au bilan des émissions de gaz à effet de serre (GES).

On rappellera à cet égard que, aux termes de cet article, nombre de personnes publiques doivent établir un tel bilan : « Sont tenus d’établir un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre : […] 3° L’Etat, les régions, les départements, les métropoles, les communautés urbaines, les communautés d’agglomération et les communes ou communautés de communes de plus de 50 000 habitants ainsi que les autres personnes morales de droit public employant plus de deux cent cinquante personnes ». A ce titre, les personnes publiques visées ont pour obligations d’établir ce bilan (qui doit porter sur leur patrimoine et leurs compétences), de le mettre à jour tous les trois ans et de transmettre à l’autorité administrative les informations relatives à sa mise en œuvre selon les modalités définies par l’arrêté du 25 janvier 2016 relatif à la plateforme informatique pour la transmission des bilans d’émission de gaz à effet de serre (tous les bilans établis depuis le 1er janvier 2016 doivent obligatoirement être publiés sur cette plateforme informatique).

Cette disposition prévoit désormais qu’il sera nécessaire de joindre au bilan des émissions de GES un plan de transition présentant les objectifs, moyens et actions envisagés pour réduire les émissions de GES et, le cas échéant, les actions mises en œuvre lors du précédent bilan. Ce plan de transition remplace la synthèse des actions envisagées pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre que doivent aujourd’hui produire les personnes publiques mentionnées au 3° de l’article L. 229-25.

Toutefois, si les collectivités et leurs groupements sont couverts par un plan climat-air-énergie territorial (PCAET) prévu à l’article L. 229-26, ils pourront y intégrer ces deux instruments et seront, le cas échéant, dispensés des obligations découlant de l’article L. 229-25 tenant à sa publication et à sa transmission. Elles devront toutefois indiquer, a minima, le lien internet vers leur PCAET sur la plateforme informatique de transmission des bilans des émissions de GES.

Les manquements à l’établissement ou à la transmission du bilan des émissions de gaz à effet de serre pourront être sanctionnés par le préfet par une amende n’excédant pas 10 000 euros ou 20 000 euros en cas de récidive. Avant l’entrée en vigueur de l’article 28 de la loi énergie-climat, cette amende s’élevait à 1 500 euros. Le préfet doit toutefois préalablement mettre en demeure l’auteur du manquement et lui laisser un délai pour satisfaire à ses obligations (article R. 229-50-1 du Code de l’environnement, lequel n’a pas encore été mis à jour concernant le montant de l’amende).

Cet article 28 de la loi, et donc les modifications qu’il apporte, entreront en vigueur le 9 novembre 2020.

Par Solenne Daucé et Julie Cazou

Homicide par imprudence – Présomption de causalité

Par un arrêt du 7 mai 2019, la chambre criminelle de la Cour de cassation semble faire évoluer sa jurisprudence en matière d’homicide involontaire, quant à la matérialité du lien de causalité requis entre la faute non intentionnelle et le dommage.

Rappelons en substance qu’aux termes des dispositions combinées des articles 121-3 et 221-6 du Code pénal, le délit d’homicide involontaire impose la preuve d’une faute involontaire, dont la matérialité et l’intensité varie selon la personne de son auteur et la nature – directe ou indirecte – du lien de causalité la reliant au dommage. Il en résulte classiquement que le lien de causalité entre la faute et le dommage doit toujours exister, mais que celui-ci peut varier quant à sa nature et impacter l’intensité de la faute requise.

Sans revenir sur ce principe, l’arrêt en propose ici une application a contrario qui semble induire en la matière un mécanisme présomptif – à tout le moins s’agissant des accidents mortels du travail. En effet, constatant que l’arrêt d’appel soumis à sa censure avait retenu l’existence d’une faute de négligence à l’endroit de l’employeur, la Cour de cassation y présume l’existence d’un lien de causalité entre cette faute et le dommage, dès lors que la preuve n’est pas rapportée que celui-ci trouvait sa cause exclusive dans le comportement de la victime.

Bien sûr, si le comportement de la victime avait été la cause exclusive du dommage, celui-ci n’aurait pu trouver une origine concurrente dans la négligence de l’employeur ; ce n’est donc guère ici qu’il faut chercher l’attrait de cette décision mais plutôt dans le fait que, selon la Cour de cassation, dès lors que le fait de la victime n’est pas la cause unique de son dommage, alors la négligence de l’employeur – pourvu qu’elle soit établie comme en l’espèce – est présumée y avoir nécessairement contribué, en tout ou partie, directement ou indirectement.

Nous publierons prochainement une analyse plus détaillée de cette décision et des conditions d’engagement de la responsabilité pénale en matière d’homicide involontaire.