Publication par la CNIL d’un guide de sensibilisation au RGPD à destination des collectivités

La CNIL a publié le 18 septembre 2019 un guide afin de sensibiliser les collectivités au RGPD : https://www.cnil.fr/sites/default/files/atoms/files/cnil-guide-collectivite-territoriale.pdf

Ce guide s’adresse principalement aux communes de petite ou de moyenne taille, ainsi qu’à leurs groupements intercommunaux qui ne disposent pas nécessairement en interne des ressources dédiées. A ce titre, la CNIL précise que ce guide sera envoyé à toutes les mairies de Métropole et d’Outre-Mer.

La CNIL rappelle que le respect des règles de protection des données est un facteur de transparence et de confiance à l’égard à la fois des administrés, mais aussi des agents.

Dans ce guide, la CNIL donne des clés de compréhension sur les grands principes du RPGD. Ce guide propose un plan d’action afin d’accompagner les collectivités dans leur mise en conformité et recense les bons réflexes à acquérir dans le cadre de la mise en place d’un traitement de données personnelles.

En outre, ce guide comporte plusieurs fiches pratiques sur la communication des documents administratifs, sur la mise en place de dispositifs vidéo et enfin sur la conciliation entre les durées de conservation et les archives.

Par ailleurs, la CNIL a publié plusieurs fiches techniques dans un espace dédié aux collectivités (https://www.cnil.fr/fr/collectivites-territoriales) qui seront régulièrement alimentés dans les prochains mois.

Dans le cadre de cette publication, la CNIL informe également qu’elle proposera un cours en ligne gratuit sur le RGPD et les collectivités en complément de son MOOC sur le RGPD.

La portée opérationnelle de ce guide très théorique parait néanmoins nettement insuffisante pour constituer une aide véritablement utile aux collectivités territoriales, notamment de petite taille.

Réseaux sociaux et tribunes libres en période préélectorale

Depuis le 1er septembre 2019, les limites légales encadrant la communication institutionnelle en période préélectorale s’appliquent. A cet égard, la vigilance est de mise sur toutes les publications émanant de la publicité. Il en va différemment des tribunes libres qui constituent l’espace d’expression réservé à l’opposition dans le bulletin d’information générale conformément à l’article L. 2121-27-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), qui sera modifié au 1er mars 2020.

En effet, la jurisprudence constante considère que le directeur de la publication ne saurait contrôler le contenu des tribunes libres sauf s’ils sont de nature à engager sa responsabilité pénale car il présente un caractère manifestement diffamatoire, injurieux ou encore outrageant.

Cette garantie doit être assurée même en période préélectorale. Or le Tribunal administratif de Cergy-Pointoise a allongé la liste des supports qui doivent comprendre une tribune libre en retenant que la page Facebook d’une commune n’échappe pas à l’article L. 2121-27-1 du CGCT. Il précise d’ailleurs que les caractéristiques techniques du réseau social ne rendent pas impossibles la création d’un espace dédié à l’expression de ces élus. Il en va en revanche différemment de twitter dont les caractéristiques techniques font obstacle à la création d’une tribune libre (TA Cergy-Pontoise, 13 décembre 2018, n° 161384).

Projet de décret portant rehaussement du seuil de déclenchement des obligations de publicité et de mise en concurrence de 25.000 euros à 40.000 euros

Le Gouvernement a annoncé qu’un décret, dont l’application est envisagée dès 2020, devrait intervenir pour relever à 40.000 euros le seuil de déclenchement des obligations de publicité et de mise en concurrence applicables aux marchés publics.

Pour mémoire, l’article L. 2122-1 du Code de la commande publique prévoit la possibilité pour les acheteurs de passer un marché « sans publicité ni mise en concurrence préalables dans les cas fixés par décret en Conseil d’Etat lorsque en raison notamment de l’existence d’une première procédure infructueuse, d’une urgence particulière, de son objet ou de sa valeur estimée, le respect d’une telle procédure est inutile, impossible ou manifestement contraire aux intérêts de l’acheteur ».

Ainsi, précisant les dispositions précitées, l’article R. 2122-8 du Code de la commande publique dispose que « l’acheteur peut passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables pour répondre à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 25 000 euros hors taxes ou pour les lots dont le montant est inférieur à 25 000 euros hors taxes et qui remplissent la condition prévue au b du 2° de l’article R. 2123-1 ».

C’est donc ce seuil de 25.000 euros qui devrait être relevé à 40.000 euros. Cette évolution répond au double objectif annoncé par le Gouvernement de faciliter l’accès des TPE-PME à la commande publique et de faciliter la passation des marchés des « petites » collectivités territoriales.

En revanche, si les acheteurs disposeront donc d’une plus grande liberté pour leurs marchés d’une valeur estimée à 40.000 euros, ces derniers devront continuer à appliquer les conditions posées par l’alinéa 2 de l’article R. 2122-1 du Code de la commande publique, à savoir celles de veiller « à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin ».

Par ailleurs, si le seuil de 25.000 euros est également celui à partir duquel les acheteurs doivent, en vertu de l’article R. 2196-1 du Code de la commande publique, offrir sur leur profil d’acheteur « un accès libre, direct et complet aux données essentielles des marchés », ce seuil ne devrait pas être impacté par le projet de décret envisagé par le Gouvernement.

Opération de refonte des cahiers des clauses administratives générales pour 2020

Le Gouvernement, après avoir mené une consultation auprès notamment des acheteurs publics, a annoncé le 16 septembre 2019 avoir lancé les travaux de réforme des cahiers des clauses administratives générales (ci-après, « CCAG ») applicables aux marchés publics en vue d’une publication de nouveaux CCAG d’ici le printemps 2020.

L’annonce a été faite par la secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’économie et des finances (MINEFI), Madame Agnès Pannier-Runacher, devant plus d’une centaine d’acteurs de la commande publique au cours de laquelle ont été rappelés les principaux objectifs poursuivis par la réforme, ceux d’améliorer les conditions d’exécution financière des contrats, de promouvoir le développement durable dans les marchés publics notamment par l’insertion de clauses relatives à l’insertion de travailleurs en difficulté ou encore de clauses relatives à la gestion des déchets et de poursuivre la démarche de rééquilibrage des relations contractuelles notamment en privilégiant le dialogue entre les parties et en veillant au respect du principe du contradictoire avant toute décision prise à l’encontre du cocontractant.

Cette réforme était attendue tant il apparaît nécessaire d’harmoniser et de mettre à jour les CCAG au regard des évolutions du droit des marchés publics issues des dispositions de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 et de son décret d’application du 25 mars 2016 désormais codifiées dans le Code de la commande publique, de la jurisprudence mais aussi de la réforme du droit de la protection des données personnelles.

Il est ainsi prévu que des groupes de travail se réunissent afin de procéder à une réécriture des cinq CCAG (travaux ; fournitures courantes et services ; prestations intellectuelles ; marchés industriels ; techniques de l’information et de la communication).

Précisément, la direction des affaires juridiques du MINEFI a précisé que les travaux des groupes de travail seront organisés en deux phases avec une première phase qui « sera consacrée à l’étude des thèmes transversaux relatifs à l’architecture des CCAG, la propriété intellectuelle, l’exécution technique et financière, la dématérialisation et la protection des données, le développement durable et la prévention et le règlement des litiges » et une seconde qui « sera dédiée à l’examen des questions spécifiques à chacun des cinq CCAG ». Autre évolution, notable, les groupes de travail devront également créer un sixième CCAG relatif aux prestations de maîtrise d’œuvre.

Illustration du délit de faux commis dans un document délivré par une administration publique : le cas des fausses procurations de vote

Dans cette affaire, une enquête ouverte à la suite du signalement d’un Maire permettait de découvrir l’existence de fausses procurations établies par un Officier de police judiciaire pour des personnes ne disposant plus de toutes leurs facultés mentales.

Les actes d’investigation révélaient en effet que les formulaires de procuration avaient été préremplis, au nom d’électeurs dans l’incapacité de se déplacer, par la nièce de l’Officier de police mis en cause – au demeurant suppléante d’un candidat aux élections – puis remis à ce dernier qui les signait et y apposait son cachet, sans toutefois se rendre au domicile des mandants, comme l’impose la procédure.

Les deux individus étaient condamnés par le Tribunal correctionnel du chef de faux dans un document administratif et complicité.

La Cour d’appel de Basse-Terre, par un arrêt en date du 22 août 2017, confirmait la condamnation de ce second chef, seul objet de l’appel, et condamnait la prévenue à une peine de six mois d’emprisonnement avec sursis, ainsi qu’à une peine d’amende de 10.000 euros, outre une peine complémentaire de privation de tous ses droits civiques, civils et politiques pour une durée de trois ans.

Aux termes d’un arrêt du 24 octobre 2018, la Chambre criminelle rejetait le pourvoi formé par la prévenue, au motif que « les procurations de vote, qui sont établies dans le cadre de l’organisation administrative des élections, par des autorités publiques habilitées, en présence du mandant, afin que puisse être authentifiée la volonté de ce dernier, et ont pour effet d’autoriser le mandataire à voter au nom du mandant, constituent des documents délivrés par une administration publique au sens de l’article 441-2 du Code pénal ».

Si la caractérisation de l’acte de complicité ne posait pas de difficulté dans le cas d’espèce, cet arrêt revient sur la notion de document délivré par une administration publique et rappelle ainsi que les procurations de vote établies avec le concours d’autorités publiques habilitées dans le cadre de l’organisation administrative d’élections publiques répondent à cette définition.

La Cour de cassation n’a pas manqué de vérifier les deux conditions cumulatives du délit de faux spécifique aux documents administratifs : d’une part, la procuration de vote doit être regardée comme émanant d’une administration publique dès lors qu’elle a été vérifiée et visée par l’autorité habilitée ; d’autre part, sa falsification tombe au surplus sous le coup de l’article 441-2 du Code pénal en ce qu’elle confère au mandataire une autorisation, celle de voter pour le compte du mandat.

Précisons donc que, tant qu’elle n’a pas été cachetée par l’autorité publique habilitée, la procuration rédigée par le mandat reste un simple formulaire dont la falsification échappe aux prévisions de l’article 441-2 du Code pénal.

La mention relative au nombre maximal de lots contenue dans le cahier des charges de lotissement est une règle d’urbanisme au sens de l’article L. 442-9 du Code de l’urbanisme

Cette décision donne suite à une question posée au Conseil d’Etat par le Tribunal administratif de Nantes avant de statuer sur une demande d’annulation d’une décision de non opposition à déclaration préalable, comme cela est rendu possible par l’article L. 113-1 du code de justice administrative.

L’interrogation du Tribunal tenait au fait de déterminer « si la mention relative au nombre maximal de lots contenue dans un cahier des charges approuvé d’un lotissement constitue une règle d’urbanisme susceptible d’être frappée de caducité en application de l’article L. 442-9 du code de l’urbanisme ».

En effet, pour rappel, l’article L. 442-9 du Code de l’urbanisme a, depuis l’entrée en vigueur de la loi Alur du 24 mars 2014 (n°2014-366), prévu un mécanisme de caducité des règles d’urbanisme contenues dans les documents du lotissement passé un délai de dix ans à compter de l’autorisation de lotir, dans les communes couvertes par un plan local d’urbanisme.

Pour répondre à l’interrogation du Tribunal de Nantes, le Conseil d’Etat juge, dans la première partie de son raisonnement, que la règle de la caducité décennale organisée par l’article L. 442-9 du Code de l’urbanisme ne s’applique qu’aux « seules clauses des cahiers des charges, approuvés ou non, qui contiennent des règles d’urbanisme ».

Il est donc important de pouvoir qualifier l’ensemble des règles contenues dans le cahier des charges, pour savoir si l’article L. 442-9 leur est opposable. Ce point a notamment un incidence sur les règles à prendre en compte par les services compétents lors de l’instruction des différentes autorisations d’urbanisme.

En l’espèce, il s’agissait donc de déterminer si les mentions relatives au nombre maximum des lots contenue dans le cahier des charges devait, ou non, être qualifiées de règles d’urbanisme.

Pour répondre à cette interrogation, le Conseil d’Etat a dressé une forme de faisceau d’indice, tenant à l’objet et aux effets de cette règle, mais également au fait que cela fait partie des éléments soumis à autorisation lors de la création d’un lotissement, pour juger que ce type de disposition constitue bien une règle d’urbanisme.

Dans ces conditions, compte tenu de l’opposabilité de la caducité décennale, le Conseil d’Etat en conclut logiquement qu’une « telle limitation cesse de s’appliquer, au terme de dix années à compter de la délivrance de l’autorisation de lotir, lorsque le lotissement est couvert par un plan local d’urbanisme ou un document d’urbanisme en tenant lieu, et l’autorité chargée de délivrer les autorisations d’urbanisme ne peut l’opposer à la personne qui sollicite un permis d’aménager, un permis de construire ou qui dépose une déclaration préalable ».

Toutefois, le Conseil d’Etat, reprenant ainsi la jurisprudence établie de la Cour de cassation en la matière (voir en ce sens : C.Cass., 21 janv. 2016, n°15-10566 et C.Cass., 14 sept. 2017, n°16-21329), rappelle que la caducité des règles d’urbanisme, et donc leur inopposabilité aux demande d’autorisation de construire, ne remet pas en cause le fait que ces règles continuent à régir le rapport entre les colotis.

Ce constat permet au Conseil d’Etat de préciser que, compte tenu de ce dernier point, la caducité décennale de l’article L. 442-9 ne s’oppose pas à ce que « l’autorité compétente fasse usage des pouvoirs qu’elle tient des articles L. 442-10 et L. 442-11 du même code, ainsi que le prévoit son article L. 442-12 s’agissant des subdivisions de lots, pour modifier un cahier des charges sur ce même point ».

Modernisation et adaptation de l’organisation des communes nouvelles pour une meilleure prise en compte de la diversité des territoires

Cette loi a pour objet de faciliter la création de communes nouvelles en vue de permettre une meilleure prise en compte des diverses réalités du territoire. La loi adapte ainsi certaines dispositions relatives à la gouvernance, au fonctionnement et aux compétences de la commune nouvelle pendant la période transitoire et modifie les règles relatives à l’organisation avec l’intercommunalité. Certaines règles n’entreront toutefois en vigueur qu’au 1er avril 2020.

  1. Amélioration du fonctionnement de l’administration de la commune nouvelle

L’article 1er de la loi modifie les règles de composition du conseil municipal issues de l’article L. 2113-8 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) afin d’éviter une diminution brutale de l’effectif du conseil lors du premier renouvellement du conseil municipal dont l’effectif est progressivement aligné sur le droit commun pendant la période transitoire : l’effectif reste déterminé par référence à celui des communes de la strate démographique immédiatement supérieure, mais il ne peut être inférieur au tiers de l’addition des conseillers municipaux élus lors du précédent renouvellement général des conseils municipaux dans chaque commune regroupée avant la création de la commune nouvelle, arrondi à l’entier supérieur et augmenté d’une unité en cas d’effectif pair. L’augmentation de l’effectif du conseil municipal pendant la seconde étape de la phase transitoire n’entraîne toutefois pas de conséquence sur le nombre de délégués des conseils municipaux pour les élections sénatoriales.

L’article 3 institue à l’article L. 2113-8-1 A du CGCT une dérogation limitée au principe de complétude du conseil municipal pour la première élection du maire et des adjoints suivant la création d’une commune nouvelle, permettant qu’un conseil incomplet puisse procéder à ces élections sauf si le conseil a perdu le tiers de ses membres, auquel cas la règle de droit commun du renouvellement intégral par anticipation est applicable.

L’article 10 vise à réduire les difficultés liées à la création d’autant d’annexes de la mairie qu’il existe de communes déléguées (surcoûts liés au fonctionnement et à l’entretien ; contraintes organisationnelles…) en insérant un nouvel article L. 2113-11-1 du CGCT permettant la suppression d’une partie des annexes de la mairie par délibération du conseil municipal de la commune nouvelle prise après accord du maire délégué et, lorsqu’il existe, du conseil de la commune déléguée. Les actes de l’état civil des habitants de la commune déléguée concernée sont alors établis dans une autre annexe de la mairie ou, à défaut, dans la mairie de la commune nouvelle. Le conseil de la commune déléguée se réunira là où seront établis les actes de l’état civil.

L’article 13 modifie l’article L. 2121-7 du CGCT territoriale qui indique désormais que le conseil municipal d’une commune nouvelle peut se réunir et délibérer à la mairie annexe d’une commune déléguée sous réserve d’en avertir le public par tout moyen de publicité au choix du maire au minimum quinze jours avant la tenue de la réunion, et sous réserve de tenir au moins deux de ses réunions annuelles à la mairie de la commune nouvelle.

  1. Précisions sur le statut du maire et des maires délégués

L’article 7 détermine le rang de classement des maires délégués, adjoints de droit au maire conformément aux dispositions de l’article L. 2113-13 du CGCT, dans l’ordre du tableau du conseil municipal : ceux-ci prennent rang, aux termes de l’article L. 2113-8-2 modifié du CGCT, immédiatement après le maire et sont classés entre eux en fonction de la population de la commune déléguée qu’ils représentent.

L’article 8 modifie l’article L. 2113-12-2 du CGCT pour permettre au maire de la commune nouvelle d’être également maire d’une des communes déléguées, fonctions jusqu’alors incompatibles après le premier renouvellement du conseil municipal de la commune nouvelle. Les indemnités ne sont toutefois pas cumulables.

  1. Assouplissement des règles relatives à l’organisation de la commune nouvelle

L’article 4 institue le dispositif de la « Commune-Communauté », c’est-à-dire d’une commune exerçant elle-même les compétences légalement transférées à un EPCI à fiscalité propre, à l’article L. 2113-9 du CGCT : désormais, une commune nouvelle issue de la fusion de toutes les communes membres d’un ou plusieurs EPCI à fiscalité propre et, le cas échéant, d’une ou plusieurs autres communes, disposera de l’ensemble des prérogatives directement attribuées par la loi à cet établissement, et elle lui sera également substituée au sein des syndicats mixtes. Elle est en outre dispensée de l’obligation de se rattacher à un autre EPCI à fiscalité propre (ce rattachement étant désormais facultatif si la moitié des membres du conseil et l’EPCI de rattachement le décident). Ce dispositif entrera en vigueur le 1er avril 2020 et l’article 14 de la loi prévoit la remise d’un rapport d’information sur les conséquences de la création d’une telle commune par le gouvernement au parlement dans un délai de 4 ans à compter de la promulgation de la loi.

L’article 9 institue une nouvelle période transitoire de trois ans suivant la création d’une commune nouvelle au regard de certaines obligations qui leur incombent en raison de la population qu’elles regroupent : pendant cette période transitoire, les communes nouvelles exposées à des effets de seuils ne sont soumises, aux termes du nouvel article L. 2113-8-3 du CGCT, aux obligations liées à l’ouverture d’un centre médico-social scolaire, à l’aménagement d’un site cinéraire et l’établissement d’un bilan des émissions de gaz à effet de serre, que si une ou plusieurs des communes fusionnées y étaient elles-mêmes soumises et sur le seul territoire desdites communes.

L’article 11 permet, pour le conseil municipal d’une commune nouvelle créée entre le 17 décembre 2010 et le 8 novembre 2016 par la fusion de plusieurs communes dont l’une au moins était issue d’une fusion de communes, la création de communes déléguées reprenant le nom et les limites territoriales de l’ancienne commune chef-lieu et des anciennes communes associées en remplacement, le cas échéant, de la commune déléguée reprenant le nom et les limites territoriales de la commune qui avait été créée par leur fusion.

L’article 12 permet aux conseils municipaux d’adapter leur organisation aux spécificités de leur territoire en inscrivant, à l’article L. 2113-10 modifié du CGCT, la possibilité offerte au conseil municipal de la commune nouvelle d’autoriser la suppression d’une partie seulement des communes déléguées. Cette disposition entrera en vigueur au 1er avril 2020.

  1. Dispositions relatives à la démocratie locale

L’article 2 modernise la conférence municipale qui peut être constituée entre le Maire et les maires délégués de la commune nouvelle pour débattre de toute question de coordination de l’action publique au sein de la commune, et qui sera désormais dénommée conférence des maires et des maires délégués afin de permettre d’en comprendre plus facilement la nature. L’article L. 2113-12-1 du CGCT ainsi modifié permet en outre à l’ensemble des maires délégués de demander la réunion de la conférence pour examiner un ordre du jour déterminé, afin de faciliter la résolution des éventuelles difficultés coordination.

Les articles 5 et 6 instituent un rapport financier présentant les taux d’imposition, la structure et l’évolution des dépenses, de la dette et des effectifs des agents municipaux de l’ensemble des communes potentiellement concernées par la création de la commune nouvelle. Ce rapport financier destiné à améliorer la transparence et l’information de la population et du conseil municipal doit être affiché en mairie et mis en ligne sur le site internet de la commune lorsque ce dernier existe. En application des nouvelles dispositions de l’article L. 2113-2 du CGCT, il est joint à la délibération des conseils municipaux portant création d’une commune nouvelle. Si la demande de création de commune nouvelle n’est pas acceptée par délibérations concordantes des conseils municipaux des communes concernées, les électeurs sont consultés sur l’opportunité de la création de la commune nouvelle et l’article L. 2113-3 modifié du CGCT prévoit désormais l’affichage et le cas échéant la publication sur le site internet des communes concernées du rapport financier au cours du mois précédant ces consultations.

Date de renouvellement des conseils municipaux et communautaires et convocation des électeurs

En application des dispositions de l’article L. 227 du Code électoral, ce décret fixe la date des élections des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon. Celles-ci auront lieu le dimanche 15 mars 2020 pour le premier tour. Le second tour aura lieu, le cas échéant, le dimanche 22 mars 2020.

Les élections auront lieu à partir des listes électorales et des listes électorales complémentaires extraites du répertoire électoral unique. Conformément aux dispositions de l’article L. 17 du Code électoral, les demandes d’inscription sur les listes électorales en vue de participer au scrutin devront être déposées au plus tard le vendredi 7 février 2020, sous réserve des cas d’inscriptions dérogatoires prévues à l’article L. 30 du même Code, possibles jusqu’au 5 mars 2020 ou, le cas échéant, des décisions d’inscription ou de radiation rendues par le juge d’instance en application de l’article L. 20 du Code électoral.

Responsabilité médicale – Qualification juridique des manœuvres obstétricales

Le 19 juin 2019, la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation devait se prononcer sur la qualification des manœuvres obstétricales lors d’un accouchement.

En l’espèce, lors de l’accouchement d’une femme dont l’enfant à naître présentait une dystocie des épaules, le gynécologue obstétricien a effectué des manœuvres obstétricales d’urgence.

Après sa naissance, l’enfant présentait une paralysie du plexus brachial droit.

Une expertise mettait en évidence l’absence de faute du praticien d’une part et l’absence de dysfonctionnement de l’établissement de santé d’autre part.

Tant en son nom personnel qu’en sa qualité de représentant légal de son enfant, la mère a alors assigné l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l’ONIAM) afin d’obtenir réparation.

Aux termes d’un arrêt rendu le 7 juin 2018, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a considéré que la mère, es qualités, était bien fondée à solliciter l’indemnisation des conséquences de l’accident médical non fautif survenu lors de son accouchement, dès lors que son préjudice était imputable, de façon directe et certaine, à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins.

La Cour de cassation a validé le raisonnement des juges du fond et rejeté le pourvoi formé par l’ONIAM, considérant ainsi que, si l’accouchement par voie basse constituait un processus naturel, les manœuvres obstétricales pratiquées par un professionnel de santé lors de cet accouchement caractérisaient bien un acte de soins au sens de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique.

Indemnisation du harcèlement moral : compatibilité avec la prise en charge de l’accident du travail

En l’espèce, un salarié se déclare victime d’un harcèlement permanent de son supérieur hiérarchique le conduisant à commettre une tentative de suicide.Cette tentative est prise en charge au titre d’un accident du travail par la sécurité sociale.

Le salarié initie alors deux procédures :

  • Une procédure en reconnaissance et en indemnisation de la faute inexcusable de l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale
  • Une action en résiliation judiciaire de son contrat de travail et en reconnaissance et indemnisation du harcèlement moral devant le Conseil de prud’homme.

Si la première demande du salarié échoue l’empêchant ainsi d’obtenir une indemnisation complémentaire au titre de son accident du travail, le salarié obtient cependant gain de cause devant la Cour d’appel de Caen au titre de l’indemnisation de son harcèlement moral.

Concernant cette dernière procédure, l’employeur forme un pourvoi en cassation et se prévaut de l’argumentation suivante : l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail relevait de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale, que celui-ci soit ou non la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité. La demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral formulée par le salarié devant les juridictions prud’homales doit alors être déclarée irrecevable, le salarié ayant déjà vu son préjudice réparé par la sécurité sociale au titre de son accident du travail.

Le pourvoi de l’employeur est rejeté par la Cour de cassation.

Pour la Haute juridiction, « la législation sur les accidents du travail et maladies professionnelles ne fait pas obstacle à l’attribution de dommages-intérêts au salarié en réparation du préjudice que lui a causé le harcèlement moral dont il a été victime antérieurement à la prise en charge de son accident du travail par la sécurité sociale ».

Autrement dit, les dommages-intérêts qui réparent le préjudice que lui a causé le harcèlement moral peuvent alors se cumuler avec la réparation attribuée au titre de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle, la Cour de cassation distinguant :

  • le préjudice subi du fait du harcèlement moral durant la période antérieure à la reconnaissance de l’accident du travail, dont la réparation relève du juge prud’homal ;
  • le préjudice postérieur, pris en charge au titre de la législation de la sécurité sociale, qui relève de la compétence du Tass.

La victime d’un accident du travail pris en charge par la sécurité sociale peut donc effet obtenir l’attribution de dommages et intérêts en réparation du préjudice que lui a causé le harcèlement moral dont il a été victime avant cette prise en charge. Les agissements de harcèlement moral étant distincts des conséquences de la tentative de suicide reconnue comme accident du travail, le salarié était fondé à réclamer devant la juridiction prud’homale l’indemnisation du harcèlement moral subi au cours de la relation contractuelle.

Par cet arrêt, la Cour de cassation transpose aux accidents du travail la solution déjà retenue en 2006 au titre des maladies professionnelles (Cass. soc. 15-11-2006 no 05-41.489 FS-PB).

Le non-respect d’une licence de logiciel relève-t-il d’une responsabilité délictuelle du fait de la contrefaçon ou d’une responsabilité contractuelle ?

CA Paris, pôle 5, ch. 1, 16 octobre 2018, n° 17/02679

Il est habituellement admis en droit français que la violation d’un contrat de licence de logiciel par le licencié constitue une atteinte aux droits de propriété intellectuelle du titulaire des droits dont la sanction et la réparation doivent être recherchées dans le cadre d’une action en contrefaçon, qui relève de la responsabilité délictuelle.

Toutefois, depuis quelques années, un mouvement jurisprudentiel tend à écarter l’action en contrefaçon dès lors que la violation constatée est le fruit du non-respect d’un cadre de licence, considérant dans ce cas que cette inexécution relève au contraire de la responsabilité contractuelle.

Cette évolution a été récemment confirmée dans une affaire jugée le 21 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Paris (3ème chambre, 3ème section). Cette affaire trouve son origine dans un appel d’offres lancé à la fin de l’année 2005 par l’Agence pour le gouvernement de l’Administration Electronique (ADAE) (agence par la suite rattachée à la Direction Générale de la Modernisation de l’Etat – la DGME) en vue de la conception et de la réalisation du portail « Mon Service Public ». La société Orange ayant obtenu la réalisation de l’un des lots relatif à la fourniture d’une solution informatique de gestion d’identité et des moyens d’interface, à destination des fournisseurs de service, a fourni à la DGME une solution logicielle comprenant une plateforme IDMP interfacée avec une bibliothèque logicielle « Lasso » éditée par la société Entr’ouvert sous licence libre GNU GPL (Version 2).

La société Entr’ouvert, considérant que la mise à disposition de sa bibliothèque logicielle par Orange à la DGME violait les termes de la licence GNU GPL (Version 2), a assigné la société Orange en contrefaçon de ses droits d’auteur sur ce logiciel.

Le Tribunal a, pour sa part, relevé que la licence libre à laquelle la société demanderesse avait décidé de soumettre sa bibliothèque logicielle pour encadrer son périmètre d’utilisation était une autorisation accordée par cette dernière à tout utilisateur d’exécuter, de diffuser et de modifier cette bibliothèque logicielle, à charge pour les utilisateurs (et en l’occurrence Orange) de respecter les conditions d’usages prévues dans la licence.

Le Tribunal, relevant que cette licence libre était un contrat d’adhésion, « dont les clauses ne peuvent être discutées et négociées par celui qui s’oblige, mais qui comporte néanmoins […] des obligations réciproque à charge de chacune des parties« , a considéré que la relation entre la société Entr’ouvert et la société Orange pour l’utilisation de la licence afférente à cette bibliothèque logicielle était donc de nature contractuelle et non délictuelle.

Il en a déduit que ces demandes auraient dû, au titre du principe de non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle, être fondées sur la responsabilité contractuelle de la société Orange et non sur la contrefaçon.

Cette décision s’inscrit dans la lignée de l’affaire Oracle dans laquelle les juges de la Cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 10 mai 2016 (pôle 5, ch., n° 14/25055), ont considéré que le litige portant sur le périmètre des licences consenties, et plus particulièrement sur la question de l’inclusion ou non d’un logiciel dans ce périmètre, relevait du terrain contractuel, rendant ainsi l’action en contrefaçon irrecevable.

Cet arbitrage opéré par les juges civils est sujet à débats. A tel point que dans une autre affaire récente, la Cour d’appel de Paris (pôle 5, ch., n° 17/02679) a, par un arrêt rendu le 16 octobre 2018, décidé de poser une question préjudicielle à la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) sur le point de savoir si le fait pour un licencié de logiciel de ne pas respecter les termes d’un contrat de licence constitue une contrefaçon au sens de la directive 2004/48 du 29 avril 2004 ou, au contraire, obéit à un régime juridique distinct, comme le régime de responsabilité contractuelle de droit commun.

La CJUE ne s’est pas prononcée à ce jour. Toutefois, les conclusions de l’avocat général, M. Manuel Campos Sanchez-Bordana, qui ont été présentées le 12 septembre dernier, apportent plusieurs éléments de réponses qui méritent d’être relevés.

Celui-ci a notamment observé que la directive 2004/48 du 29 avril 2004 (dont les articles ont servi de fondement pour la rédaction des articles L. 122-6 et suivants du Code de la propriété intellectuelle relatifs aux logiciels) permet au titulaire des droits sur un logiciel d’interdire « contractuellement » certains actes autorisés par la directive. Il en déduit que, dans ce cas, le fondement juridique du droit du titulaire est le contrat et non pas la loi. Notamment, l’article 5 de la directive autorise l’acquéreur légitime d’un logiciel à en modifier le code source lorsque cet acte était nécessaire à l’utilisation du logiciel d’une manière conforme à sa destination, « sauf dispositions contractuelles spécifiques ».

L’avocat général a ajouté qu’il appartient au législateur national de déterminer les modalités procédurales nécessaires à la protection des droits du titulaire lorsqu’une violation implique simultanément une violation de ses droits de propriété intellectuelle et un manquement contractuel.

C’est donc sans attendre la décision de la CJUE, et sans même faire référence à la question préjudicielle posée, que le tribunal de grande instance de Paris s’est prononcé le 21 juin dernier. Dans cette affaire, il semble que le juge a considéré qu’il n’y avait pas débat sur le fait que l’éditeur de cet outil poursuivait en réalité la réparation d’un dommage généré par l’inexécution d’obligations résultant de la licence libre et non pas la violation d’une obligation extérieure au contrat de licence.

Finalement, il pourrait être tentant de considérer que la solution devrait résider dans l’articulation suivante : action en inexécution contractuelle dès lors qu’un cadre contractuel lie les parties concernées et action en contrefaçon dès lors que les utilisations reprochées ont été faites à l’encontre de titulaires de droits en l’absence de toutes relations contractuelles. Toutefois cette articulation n’est pas satisfaisante puisqu’il peut y avoir des actes de contrefaçon y compris entre deux personnes liées par un contrat. Dans ce cas, il est nécessaire que l’action en contrefaçon soit recevable et que le titulaire de droit ne puisse pas se voir opposer une limitation de responsabilité contractuelle.

Par Audrey Lefèvre et Sara Ben Abdeladhim
Cabinet LEFEVRE AVOCATS

Absence d’exonération de responsabilité décennale des constructeurs du fait du comportement « passif » du maître d’ouvrage

Cette décision revient sur l’une des causes possibles d’exonération de la responsabilité décennale des constructeurs en venant apprécier l’existence ou non d’un comportement fautif du maître d’ouvrage.

Dans le cadre de l’appel formé par un maître d’ouvrage, les différents constructeurs soutenaient notamment que ce dernier avait commis des fautes de nature à les exonérer de leur responsabilité.

Si la Cour a d’ailleurs reconnu le comportement « passif » du maître d’ouvrage face aux désordres constatés :

« l’expert judiciaire a relevé dans son rapport que l’Université avait fait preuve de « passivité » dans la gestion des désordres pourtant apparus dans les deux jours suivant la mise en service de l’installation, qu’elle est restée très en retrait dans les deux années qui ont suivi cette apparition, alors que les solutions mises en œuvre pour y remédier s’avéraient inefficaces et qu’elle n’a, entre 1997 et 2005, sollicité aucun des acteurs du chantier ni mis en œuvre la moindre recherche de solutions, alors même que durant tout ce temps, la direction des services vétérinaires lui rappelait presque chaque année la nécessité d’agir et de remédier aux désordres. En outre, elle n’a pas remis en cause les conclusions de la société AXA, son assureur dommage-ouvrage et n’a pas modifié les procédures de nettoyage de la cuisine afin de les rendre davantage compatibles avec l’absence d’étanchéité du sol, et n’a fait procéder à aucun constat contradictoire avant de lancer les travaux de réfection ».

Elle a toutefois considéré que :

« Dès lors, d’une part, que les désordres trouvent leur origine dans des erreurs de conception et des malfaçons, d’autre part, que l’Université Paul Sabatier Toulouse III n’est pas intervenue dans la conception des locaux ni dans la réalisation et la direction des travaux, aucune faute de nature à atténuer la responsabilité des constructeurs ne peut être retenue à son encontre ».

Ainsi, le maître d’ouvrage n’avait pas exercé ici un rôle actif dans l’opération de construction, durant les phases de conception et d’exécution, de sorte qu’aucune immixtion fautive ne pouvait lui être reprochée.

En outre, les manquements des différents constructeurs étaient seuls à l’origine des désordres constatés, sans lien avec le comportement, même passif, du maître d’ouvrage.

Pour ce cas d’espèce, la Cour ne retient donc aucune faute du maître d’ouvrage de nature à exonérer les constructeurs de leur responsabilité.

Compétence du juge judiciaire en matière de bail portant sur un bien du domaine privé et sans clause exorbitante du droit commun

Une commune a donné à bail commercial à un preneur un immeuble dépendant du domaine privé dont l’accès lui a été empêché en raison d’un arrêté préfectoral interdisant la circulation à la suite de l’effondrement partiel du chemin rural desservant les locaux loués.

Le preneur a assigné la bailleresse en manquement à son obligation de délivrance de l’article 1719 du Code civil.

La commune a soulevé une exception d’incompétence au profit de la juridiction administrative au motif que son engagement d’entretenir le chemin rural constituait une clause exorbitante du droit commun, de telle sorte que le juge judiciaire ne pouvait être compétent pour connaître du litige.

Le pourvoi est rejeté en ces termes :

« Mais attendu qu’aux termes de l’article 1719 du code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée ; que cette obligation légale lui impose de délivrer un local conforme à la destination contractuelle ; que, dès lors, c’est à bon droit et sans avoir à procéder aux recherches visées par les deux premières branches du moyen, qu’après avoir relevé que l’action engagée par la société tendait à voir sanctionner la violation, par la commune, de son obligation de délivrance, en raison de l’impossibilité d’accéder aux locaux loués, la cour d’appel a retenu que le litige avait pour objet la résolution d’un contrat de bail portant sur un immeuble dépendant du domaine privé et dépourvu de clause exorbitante du droit commun et relevait, par suite, de la compétence de la juridiction judiciaire ; que le moyen n’est pas fondé ».

Par cet arrêt, la Cour de cassation rappelle le principe constant suivant : un bail portant sur un bien du domaine privé et dépourvu de toute clause exorbitante de droit commun relève de la compétence du juge judiciaire.

En outre, dès lors que le manquement du bailleur a trait à son obligation légale de délivrance du droit des baux, nul n’est besoin de rechercher si un engagement du bailleur pouvait être analysé comme exorbitant du droit commun.

Les sous-loyers sont des fruits civils revenant au bailleur

Un bailleur, à l’occasion d’un congé pour reprise donné à ses locataires a, dans le cadre de la procédure en validation de congé, également sollicité le remboursement des sous-loyers perçus par les locataires en exécution de son droit d’accession.

Il convient de préciser que la sous-location, effectuée sur la plateforme Airbnb, n’avait pas été autorisée par le bailleur.

La Cour d’appel, saisie du litige, avait retenu l’argumentation du bailleur et ainsi condamné pécuniairement les locataires (arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 5 juin 2018 commenté dans notre LAJ du mois de juillet 2018).

Les locataires se pourvoient en cassation selon le moyen d’une part que les sous-loyers ne constitueraient pas des fruits civils mais l’équivalent économique du droit de jouissance conféré au preneur, et d’autre part que la sous-location non autorisée serait inopposable au bailleur, de même que ses fruits.

La Cour de cassation rejette le pourvoi en les termes suivants ;

« Attendu que, sauf lorsque la sous-location a été autorisée par le bailleur, les sous-loyers perçus par le preneur constituent des fruits civils qui appartiennent par accession au propriétaire ; qu’ayant relevé que les locataires avaient sous-loué l’appartement pendant plusieurs années sans l’accord du bailleur, la cour d’appel en a déduit, à bon droit, nonobstant l’inopposabilité de la sous-location au bailleur, que les sommes perçues à ce titre devaient lui être remboursées ».

La Cour de cassation confirme le recours à la règle de l’accession de droit commun pour sanctionner la sous-location, conférant ainsi une portée très générale à cet arrêt.

Attention à bien respecter le formalisme de la rupture conventionnelle sous peine de requalification en licenciement sans cause réelle ni sérieuse

Cass. Soc., 3 juillet 2019, n° 18-14.414

Par deux arrêts en date du 3 juillet 2019 (n° 17-14.232 et 18-14.414), la Cour de cassation précise que « seule la remise au salarié d’un exemplaire de la convention signé des deux parties lui permet de demander l’homologation de la convention et d’exercer son droit de rétractation en toute connaissance de cause ».

La Cour rappelle ainsi que la rupture conventionnelle doit répondre aux exigences du Code du travail selon lequel la rupture conventionnelle en application de l’article L.1237-11 « résulte d’une convention signée par les parties au contrat » qui doit être en possession des deux parties, la partie la plus diligente pouvant en application de l’article L.1237-14 du Code du travail l’adresser à l’autorité administrative pour homologation.

Ces deux décisions reprennent la jurisprudence antérieure au terme de laquelle (Cass. Soc., 6 février 2013 n° 11-27.000) « la remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié est nécessaire à la fois pour que chacune des parties puisse demander l’homologation de la convention […] et pour garantir le libre consentement du salarié, en lui permettant d’exercer ensuite son droit de rétractation en connaissance de cause ».

Ces deux arrêts sont lourds de conséquences puisqu’en l’absence de respect du formalisme la rupture conventionnelle est nulle et produit les effets d’un licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

Nouvelle extension de la reconnaissance du préjudice d’anxiété : tous les employeurs peuvent être concernés

Après avoir étendu la reconnaissance du préjudice d’anxiété aux entreprises qui n’étaient pas mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 (Cass. 5 avril 2019 n° 18-17.442), la Cour de cassation étant  désormais la possibilité d’indemniser ce préjudice aux salariés exposés à des toxiques, dans l’espèce du charbon.

La Cour décide ainsi qu’« en application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, le salarié qui justifie d’une exposition à une substance nocive ou toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave et d’un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’une telle exposition, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité ».

Ainsi tout salarié exposé à des produits toxiques pourra, sur le fondement de l’obligation de sécurité, solliciter même s’il n’a pas développé de maladie professionnelle indemnisation de son préjudice d’anxiété à charge pour les employeurs de s’exonérer de leur responsabilité en établissant avoir satisfait à leur obligation de sécurité.

Les employeurs doivent avec attention évaluer les risques professionnels auxquels sont exposés les salariés dans le DUER et avoir une démarche active de prévention des risques, sous peine d’un « contentieux de masse » sur le fondement du préjudice d’anxiété !

Condamnation prud’homale : Précompte des cotisations salariés sur le rappel de salaire

En l’espèce, une salariée a été licenciée par son employeur le 20 novembre 2013. Par jugement du Conseil de prud’hommes en date du 30 mars 2016, ce dernier a par la suite été notamment condamné à payer à la salariée diverses sommes à titre de rappel d’heures supplémentaires et de congés payés afférents, et au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

C’est dans ce contexte que l’employeur a versé à la salariée une somme correspondant aux condamnations prononcées après déduction des cotisations sociales obligatoires. La salariée a alors fait délivrer un commandement et effectuer une saisie-attribution sur un compte bancaire de l’employeur qui a saisi un juge de l’exécution d’une contestation tendant à voir dire que la condamnation s’entendait d’une somme brute.

Pour débouter l’employeur de ses demandes de nullité du commandement de payer et de mainlevée de la saisie-attribution, la Cour d’appel (CA Paris, Pôle 4, 8ème ch., 14 décembre 2017, n° 16/24430) retient que la salariée a formulé une demande de condamnation en net et non en brut, que le conseil de prud’hommes a été saisi d’une telle demande, qu’aucune disposition n’impose à une juridiction de prononcer toutes les condamnations sur la même base, toutes en net ou toutes en brut, et qu’en faisant droit, sans autre précision, à la demande de la salariée, le conseil de prud’hommes, qui n’a pas écarté la prétention de la salariée qui souhaitait obtenir une indemnité nette, a prononcé une condamnation nette.

L’employeur s’est pourvu en cassation.

C’est dans ces conditions que la Haute juridiction a dû se demander si, faute de précision, les condamnations prud’homales doivent être assujetties aux cotisations sociales.

La Cour de cassation répond par la positive et censure la position des juges du fond au visa des articles 461 du Code de procédure civile et 1351 du Code civil. Elle énonce que la décision servant de fondement aux poursuites ne s’était pas prononcée sur l’imputation des cotisations et des contributions sociales, ce dont il résultait que l’employeur devait procéder au précompte des sommes dues par le salarié sur la condamnation prononcée.

Les actes de la Commission nationale du débat public relatifs aux modalités du débat public ou de la concertation préalable ne font pas grief et sont insusceptibles de recours

Par une requête enregistrée au Conseil d’Etat, un collectif de citoyens a demandé l’annulation pour excès de pouvoir de deux décisions du Commission nationale du débat public par lesquelles :

  • D’une part, elle a refusé d’organiser un débat public pour le projet de réaménagement de l’aéroport de Nantes-Atlantique, décidé de l’organisation d’une concertation préalable et désigné un garant du processus de concertation ;
  • D’autre part, elle a constaté la complétude du dossier de concertation et fixé les modalités de la concertation, notamment le calendrier et le périmètre du projet

Par cet arrêt, le Conseil d’Etat rappelle que « si les actes par lesquels la Commission nationale du débat public décide ou refuse d’organiser un débat public ont le caractère de décisions faisant grief, en revanche les actes que la commission peut être appelée à prendre sur les modalités du débat ou de la concertation préalable, notamment le calendrier et les conditions de son déroulement, n’ont pas le caractère d’actes faisant grief ».

Par conséquent, les conclusions dirigées à l’encontre de la décision par laquelle la Commission nationale du débat public s’est bornée à constater la complétude du dossier de concertation et à fixer les modalités de cette concertation, notamment le calendrier et le périmètre du projet, sont entachées d’une irrecevabilité manifeste insusceptible d’être couverte au cours de l’instance.

Marchés publics : sous-traitants versus fournisseurs ? Pas de droit au paiement direct dans un contrat qui ne présente pas les caractéristiques d’un contrat d’entreprise

Par un arrêt rendu le 30 juillet 2019[1], sans doute d’espèce mais qui alimente tout de même la jurisprudence en la matière, la Cour administrative d’appel de Bordeaux est venue, à nouveau, clarifier la distinction entre le contrat de sous-traitance et le contrat de fourniture.

La sous-traitance est régie par la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 dont les dispositions sont d’ordre public[2].

L’article 1er de cette loi définit la sous-traitance comme :

« […] l’opération par laquelle un entrepreneur confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité, à une autre personne appelée sous-traitant l’exécution de tout ou partie du contrat d’entreprise ou d’une partie du marché public conclu avec le maître de l’ouvrage ».

Et l’article 3 précise, quant à lui, que :

« L’entrepreneur qui entend exécuter un contrat ou un marché en recourant à un ou plusieurs sous-traitants doit, au moment de la conclusion et pendant toute la durée du contrat ou du marché, faire accepter chaque sous-traitant et agréer les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance par le maître de l’ouvrage […] ».

Une fois accepté et ses conditions de paiement agrées par le maître de l’ouvrage, le sous-traitant a ainsi droit au paiement direct par lui pour les prestations dont il assure l’exécution (article 6 de la loi du 31 décembre 1975).

Encore faut-il, pour relever du champ d’application de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, que le contrat conclu présente les caractéristiques d’un contrat d’entreprise…

C’est ce que vient rappeler la Cour administrative d’appel de Bordeaux en affirmant, aux termes de son arrêt du 30 juillet 2019, que la fourniture de pavés, dalles ou encore bordures de granit façonnés conformément aux spécifications du marché, sans aucune participation à l’exécution du marché de travaux en cause, ne présente pas les caractéristiques d’un contrat d’entreprise.

En l’espèce, et c’est la particularité de cet arrêt, l’entreprise qui s’était vu confier un contrat portant sur la « fourniture et le façonnage de dalles, bordures et pavés granit noir de Chine », avait été acceptée par le maître d’ouvrage en qualité de sous-traitante et ses conditions de paiement avaient été agrées.

Pour autant, la Cour a jugé que :

«  […] une entreprise dont le contrat conclu avec l’entrepreneur principal n’a pas les caractéristiques d’un contrat d’entreprise mais d’un simple contrat de fourniture n’a pas droit au paiement direct de ses fournitures par le maître d’ouvrage, nonobstant la circonstance qu’elle a été acceptée par ce dernier en qualité de sous-traitante et que ses conditions de paiement ont été agrées ».

En effet, cette dernière a considéré que « […] pour l’application des dispositions de la loi du 31 décembre 1975, le contrat par lequel le titulaire d’un marché public de travaux commande à une entreprise la fourniture d’éléments de construction ne peut être regardé comme confiant au fournisseur l’exécution en sous-traitance d’une partie des prestations du marché ».

Cet arrêt rappelle donc l’importance, pour le titulaire du marché public, de savoir si son cocontractant doit être déclaré comme un sous-traitant, c’est-à-dire détenteur une obligation de faire, ou s’il n’est, en réalité, qu’un « simple » fournisseur.

 

[1]https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000038867236&fastReqId=1907459813&fastPos=1

[2] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000889241

Dématérialisation des procédures d’urbanisme : les plateformes se préparent !

A partir du 1er janvier 2022, toutes les communes de plus de 3 500 habitants seront tenues de recevoir et d’instruire les demandes de permis de construire par voie dématérialisée.

Pour se préparer à cette réforme d’ampleur, une charte d’engagement a été conclue le 25 avril dernier entre le ministère de la cohésion des territoires, l’ADCF et l’AMF. Elle rappelle les quatre domaines essentiels structurant le passage de l’urbanisme à l’ère du numérique :

  1. la dématérialisation des demandes d’autorisation d’urbanisme et la dématérialisation de leur instruction ;
  2. la mise à disposition des documents d’urbanisme au format numérique au sein du Géoportail de l’urbanisme ;
  3. le développement et l’articulation du Building Information Modeling (BIM) avec les projets et démarches d’urbanisme ;
  4. la transmission dématérialisée des Déclarations d’Intention d’Aliéner (DIA).

Dans ce contexte, le 10 septembre dernier, le Ministère de la Cohésion des territoires a présenté plusieurs dispositifs devant être testés rapidement.

Premièrement, serait instituée une plateforme des autorisations d’urbanisme (dite PLAT’AU). L’objectif serait de relier les différents systèmes d’information des collectivités et des services de l’Etat et ainsi de créer un « hub », permettant à tous les acteurs de l’instruction (collectivités, services déconcentrés de l’Etat, services d’incendie et de secours, unités départementales de l’architecture et du patrimoine) d’accéder aux dossiers en temps réel.

Deuxièmement, serait également développée la plateforme d’assistance aux demandes d’autorisations d’urbanisme (dite AD’AU), déjà existante (https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R52221) et en cours d’expérimentation.

Ce téléservice doit permettre d’accompagner le pétitionnaire dans la constitution de son dossier avant son dépôt pour instruction. A termes, l’objectif serait d’offrir aux administrés la possibilité de remplir entièrement leur dossier en ligne.

Troisièmement, et lorsque les dossiers seront instruits par l’Etat et/ou que la commune ne dispose pas d’un document d’urbanisme, sera créé un espace d’échange entre l’usager, la commune et le service instructeur. Cette plateforme de réception, information et échanges des autorisations d’urbanisme serait intitulée RIE’AU.

Ces objectifs de de développement de plateformes sont ambitieux dès lors qu’ils imposent de standardiser les modalités d’échanges, de simplifier les procédures existantes, de mettre en avant les avantages du numériques (plans 3D, meilleure modélisation, rapidité des échanges, etc.), et surtout de former les acteurs de l’urbanisme et notamment les services instructeurs, etc. A suivre donc…