Précisions sur le New Deal entre le gouvernement et les opérateurs en matière de téléphonie mobile et d’aménagement numérique

Tableau de bord de l’ARCEP 

Au titre du New Deal Mobile annoncé par le Gouvernement et les opérateurs mobiles en janvier 2018, et après la publication du tableau de bord par l’ARCEP, la Mission France Mobile publie un « protocole de coopération », réalisé par l’Etat, en partenariat avec les quatre principaux opérateurs mobiles, les associations de collectivités (ADF, AMF, AMRF, ANEM, AVICCA, RDF, FNCCR) et la fédération française des télécoms.

Le New Deal Mobile n’ayant pas donné lieu à la conclusion d’une convention, ce « protocole de coopération » se donne pour objet de « formaliser un cadre général de partenariat entre les collectivités, les opérateurs et leurs représentants ». Outre le rappel des engagements des opérateurs et des modalités d’identification des sites prioritaires, le « protocole de coopération » expose le rôle de collectivités et précise les modalités financières de mise à disposition des terrains ou points hauts par les collectivités aux opérateurs. On notera en particulier que :

« La mise à disposition du terrain ou du point haut ne peut être ni gratuite, ni à l’euro symbolique.

Les modalités d’occupation adoptées lors des anciens programmes de couverture des zones blanches ne s’appliquent pas au dispositif de couverture ciblée.

S’agissant de la fixation du montant du loyer ou de la redevance il n’y a pas eu de consensus au niveau national permettant d’indiquer une fourchette de prix pour la fixation de leur montant.

Ce montant doit être conforme aux règles issues du droit de la concurrence au risque d’être qualifié d’aide d’État (ce montant ne peut être établi à un montant trop bas) et du code général de la propriété des personnes publiques.

Il sera calculé, au cas le cas, selon les modalités habituellement pratiquées par les opérateurs dans les zones concernées (rurales, périurbaines…).

En ce qui concerne la cession d’une parcelle, seules celles appartenant au domaine privé communal peuvent faire l’objet d’une transaction, les biens appartenant au domaine public étant inaliénables et incessibles. La vente doit se faire à une valeur au moins égale à la valeur vénale et, selon les cas, après l’avis des  services  de  la Direction de l’immobilier de l’État,  ex-France Domaine, l’acheteur prenant, par ailleurs, en charge les frais  liés à l’acquisition du terrain (bornage, frais liés à la mise à jour du cadastre, etc.) ».

Publication du décret du 26 juillet 2019 relatif aux conventions d’utilité sociale des organismes HLM et des SEM agréées logement social

Il convient au préalable de rappeler que la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion (dite Loi Molle) a remplacé l’ancien système de conventionnement global du patrimoine des bailleurs sociaux par le conventionnement d’utilité sociale.

La convention d’utilité sociale (ci-après dénommée « CUS »), d’une durée de six ans renouvelable, est conclue entre l’État et chaque organisme HLM (à l’exception des sociétés de vente et des sociétés de coordination) et SEM agréée en matière de logement social.

Définie aux articles L. 445-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation (ci-après dénommé « CCH »), la CUS est établie sur la base du plan stratégique de patrimoine élaboré par l’organisme tel que défini à l’article L. 411-9 du CCH et en tenant compte des programmes locaux de l’habitat.

Depuis la loi ELAN, la CUS d’un organisme appartenant à un groupe doit être établie sur la base du cadre stratégique patrimonial et du cadre stratégique d’utilité sociale mentionnés à l’article L. 423-1-1 du CCH.

Le contenu et la structure de la CUS sont déterminés aux articles L. 445-1 et R. 445-2 du CCH. Pour rappel, la CUS comporte :

  • l’état de l’occupation sociale de leurs immeubles ou ensembles immobiliers ;
  • l’état du service rendu aux locataires dans les immeubles ou les ensembles immobiliers ;
  • l’énoncé de la politique patrimoniale et d’investissement de l’organisme ;
  • les engagements pris par l’organisme sur la qualité du service rendu aux locataires ;
  • les engagements pris par l’organisme pour le développement de partenariats avec les services intégrés d’accueil et d’orientation ainsi qu’avec les associations et les organismes agréés ;
  • le cas échéant, l’énoncé de la politique menée par l’organisme en faveur de l’hébergement ;
  • le cas échéant, l’énoncé de la politique d’accession de l’organisme ;
  • les engagements pris par l’organisme en matière de gestion sociale ;
  • les modalités de la concertation locative avec les locataires ;
  • les engagements pris par l’organisme en faveur d’une concertation avec les locataires.

 

Le décret n° 2019-801 du 26 juillet 2019 relatif aux conventions d’utilité sociale des organismes d’habitations à loyer modéré et des sociétés d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux ne modifie ni l’architecture générale, ni la finalité des CUS. Il tient compte des apports de la loi ELAN du 23 novembre 2018 et apporte ainsi trois modifications majeures à savoir :

Premièrement, le décret complète l’article R. 445-2 du CCH, qui précise le contenu de la CUS en intégrant les apports de la loi ELAN :

  • la CUS peut être établie, le cas échéant, sur la base « du cadre stratégique patrimonial et du cadre stratégique d’utilité sociale» du groupe d’organismes de logement social à laquelle appartient l’organisme ;
  • le « Cahier des charges de gestion sociale et nouvelle politique des loyers » – composante de la CUS – est remplacé par les « Engagements en matière de gestion sociale et nouvelle politique des loyers ».

 

Le texte ajoute le plan de mise en vente aux informations sur la politique patrimoniale et d’investissement de l’organisme, déjà prévues dans le cadre actuel de la CUS.

Deuxièmement, le décret modifie ou complète les indicateurs composant les engagements chiffrés figurant dans la CUS.

Il convient de noter que le décret supprime les indicateurs portant sur la vacance (G1), les mises en services (PP-1bis et PP-LF-1bis) et l’accession sociale (PS-ACC-2).

Enfin, le décret prévoit les conditions dans lesquelles le Préfet peut octroyer un délai d’un an renouvelable une fois pour satisfaire à l’obligation de transmission d’un projet de CUS à un organisme engagé dans un projet de rapprochement.

Dans ce cas, l’organisme demandeur est tenu de transmettre une délibération de son conseil d’administration ou de son conseil de surveillance, présentant la démarche de rapprochement. Le Préfet peut demander à l’organisme de lui fournir tout autre document lui permettant d’apprécier le rapprochement.

Le décret précise qu’un projet de rapprochement peut prendre la forme soit :

  • d’un regroupement au sein d’un groupe d’organismes de logement social ;
  • d’une opération de fusion avec un ou des organismes HLM ou SEM agréées logement social ;
  • de tout autre projet de réorganisation que le Préfet estime susceptible de présenter un impact significatif sur l’organisme.

Immobilier : bidonville et squat : la Cour de cassation refuse de mettre en balance le droit de propriété avec le droit à la protection du domicile des occupants de terrains ou de squats

La Cour de cassation était saisie d’un pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d’appel de Montpellier du 19 octobre 2017 qui avait ordonné l’expulsion des familles occupant un terrain en friche dont les propriétaires invoquaient un projet de hangar à bateau.

La Cour d’appel avait notamment refusé de prendre en compte les actions menées par une association, mandatée par la préfecture de l’Hérault, en soutien des habitants du bidonville sur trois axes : la scolarisation des enfants, l’intégration socio-professionnelle des parents et la médiation santé des familles.

La question posée par ce pourvoi en cassation était celle de l’étendue de la mission et des pouvoirs du juge des référés saisi d’une demande d’expulsion des occupants d’un terrain ou d’un squat, sachant que le droit au respect du domicile – et donc à sa protection – que l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme reconnaît à ces occupants s’oppose au « droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue » que l’article 544 du Code civil attribue aux propriétaires.

La Cour juge que « l’expulsion étant la seule mesure de nature à permettre au propriétaire de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien occupé illicitement, l’ingérence qui en résulte dans le droit au respect du domicile de l’occupant, protégé́ par l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ne saurait être disproportionnée eu égard à la gravité de l’atteinte portée au droit de propriété́ ».

Annulation par le Tribunal administratif d’Amiens d’un arrêté anti-naturiste pris par le maire de Quend

Par un jugement en date du 16 juillet 2019, le Tribunal administratif d’Amiens a annulé l’arrêté n° 58/2018 du maire de Quend interdisant la pratique du naturisme  sur l’ensemble du territoire de la commune. Le recours contentieux a été initié par trois associations de naturistes : la Fédération Française de Naturisme, l’Association pour la Promotion du Naturisme en Liberté et Les Hauts de Frances Naturistes.

A ce sujet, la commune de Quend contestait l’intérêt à agir de la Fédération Française de naturisme (FFN). Le juge administratif rappelle la jurisprudence du Conseil d’Etat relative à l’intérêt à agir des associations nationales dans le domaine des libertés publiques (Conseil d’Etat, SSR, 4 novembre 2015, n° 375178, Ligue française pour la défense des droits de l’homme et du citoyen). Selon cette jurisprudence, une association ayant un ressort national, justifie d’un intérêt à agir lorsque la décision soulève, « notamment dans le domaine des libertés publiques, des questions qui par leur nature et leur objet, excèdent les seules circonstances locales ». En l’espèce, le juge estime que la mesure de police a une portée excédant son objet local et que la FFN est recevable à exercer ce recours.

Sur la légalité de l’arrêter, l’article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales impose au maire de prendre des mesures de police administrative générale afin d’assurer la préservation de l’ordre public. Ces atteintes à l’ordre public peuvent être constituées par « tout acte de nature à compromettre la tranquillité publique ». Le juge administratif confirme qu’une « mesure de police n’est légale que si elle est nécessaire au regard de la situation de fait existant à la date à laquelle elle est prise ». De même, une mesure de police administrative est illégale si elle impose « une interdiction générale, absolue et permanente sur l’ensemble du territoire de la commune ». Le juge administratif exerce alors un contrôle de proportionnalité de la mesure de police.

En l’espèce, le juge estime que bien que le maire invoque l’existence de contestations de la part de personnes auprès de l’office du tourisme et de quelques courriels, ces circonstances « n’établissent pas […] l’existence de trouble de nature à porter atteinte au bon ordre ou à la tranquillité publique sur l’ensemble du territoire de la commune ». Les circonstances locales ne permettant pas de justifier l’interdiction générale et permanente de la pratique du naturisme sur la commune, le Tribunal administratif d’Amiens annule l’arrêté du maire de Quend.  

En revanche ce jugement ne remet pas en cause la possibilité pour un maire, sur le fondement de ses pouvoirs de police administrative, d’encadrer la pratique du naturisme sur sa commune. Ainsi, le maire peut limiter la pratique à certaines plages de la commune et l’interdire en dehors de ces zones réservées. C’est le cas par exemple pour la commune de la Teste de Buch, de Ploemeur, de Ramatuelle ou encore de la Tremblade Ronce-les-Bains.

 

Accueil du juge et mise en demeure préalable de notifier le décompte général

Cette décision, intervenant sous l’empire des anciennes dispositions du CCAG Travaux de 2009, vient rappeler que l’absence de notification, dans les délais prévus, du décompte général par le maître d’ouvrage ne vaut pas acceptation tacite du projet de décompte final.

Plus précisément, dans le cadre de l’exécution d’un marché de travaux, une commune avait émis un titre de recettes afin de recouvrer des pénalités de retard.

Le titulaire du marché contestait le jugement rendu en première instance le condamnant à payer une indemnité représentant une partie des pénalités réclamées.

D’une lecture combinée des articles 13.3.2, 13.4.2 et 50.1.1 du CCAG travaux, alors en vigueur, la Cour considère que :

«en l’absence de notification du décompte général signé par le maître d’ouvrage au titulaire du marché, ce qui est le cas en l’espèce, ce dernier, en cas de différend, ne peut saisir le juge du contrat sans avoir préalablement mis en demeure le maître d’ouvrage de procéder à cette notification».

Dès lors que ce n’était pas le cas en l’espèce, c’est à bon droit que le tribunal a jugé sa demande de condamnation au versement d’une indemnité au titre du solde du marché comme irrecevable.

Il appartient donc au maître d’ouvrage de vérifier l’existence ou non de cette mise en demeure afin de pouvoir contester, le cas échéant la saisine du tribunal par le titulaire du marché.

Enfin, il est intéressant de rappeler que le CCAG Travaux, dans sa version issue de l’arrêté du 3 mars 2014, a institué un mécanisme d’acceptation tacite du projet de décompte final dont les modalités de mise en œuvre ont été précisées par la jurisprudence (CE, 25 juin 2018, n°417738).

Requalification d’une autorisation d’occupation du domaine public en contrat de la commande publique et qualification de l’espace situé au-dessus de la Seine

Par un avis en date du 22 janvier 2019, le Conseil d’État a apporté de précieux éclairages sur plusieurs sujets essentiels concernant le droit de la domanialité publique et des montages qui les entourent. Le Conseil d’État était en effet invité par le gouvernement à répondre à une série de questions qui entouraient un appel à projets international lancé par la ville de Paris. L’appel à projets avait pour objet de désigner un opérateur en charge, dans le cadre d’un titre d’occupation temporaire du domaine public, de réaliser trois passerelles sur la Seine, dans différents arrondissements de Paris, et d’assurer ensuite l’animation touristique des passerelles et des quais attenants (activités récréatives, de loisirs, de restauration…). Et dans la mesure où les passerelles et autres équipements seraient situés sur des dépendances qui appartiennent à plusieurs personnes publiques, ou dont la gestion relève de plusieurs personnes publiques, l’appel à projets a été lancé en partenariat avec l’État, Voie navigable de France et le Port autonome de Paris dont les dépendances étaient ainsi concernées d’une façon ou d’une autre.

 

I La qualification d’une autorisation d’occupation temporaire du domaine public en contrat de la commande publique.

Les propositions que les candidats étaient invités à remettre devaient naturellement respecter un « cahier des charges », et un cahier des charges qui comportait de nombreuses prescriptions ; si bien que le titre d’occupation temporaire du domaine public qui devait être attribué au lauréat – et les prescriptions que le titre renfermerait fatalement – pouvaient apparaître comme un outil qui satisfait (surtout) une commande de la ville de Paris et/ou de ses partenaires, et non pas (seulement) comme un simple acte de valorisation domaniale

I.1. – Dans cet avis, le Conseil d’État a de nouveau exposé, mais en la précisant quelque peu, la méthode qu’il faut suivre pour apprécier dans quelle mesure une convention d’occupation temporaire du domaine public peut être analysée comme un contrat de la commande publique, à savoir un marché ou une concession, et ce au regard des textes applicables au cas d’espèce (ordonnance du 23 juillet 2015 et ordonnance du 29 janvier 2016). Le Conseil d’État indique qu’il faut apprécier si le contrat est conclu à titre onéreux et s’il a pour objet de satisfaire un besoin par un pouvoir adjudicateur : « en l’espèce, la question se pose de savoir si le contrat qu’il est envisagé de conclure à l’issue de l’appel à projets répond à un besoin des personnes publiques associées et, dans l’affirmative, s’il existe une contrepartie onéreuse aux prestations demandées ». L’affirmation ne suscite évidemment pas de commentaires, à une réserve près peut-être. Sans entrer dans le détail du sujet, pour qu’une convention d’occupation temporaire du domaine public soit un contrat de la commande publique, il faut plus précisément qu’elle ait principalement pour objet de satisfaire un besoin des personnes publiques concernées : les conventions d’occupation du domaine public qui n’ont qu’accessoirement/accidentellement pour objet de répondre à un besoin du propriétaire public sont des contrats mixtes qui en principe échappent au droit de la commande publique parce que leur objet principal, indissociable de l’accessoire, demeure la mise à disposition d’une propriété publique (articles L. 1312-1 et L. 1312-2 du Code de la commande publique).

 

Sur le terrain du caractère onéreux, le Conseil d’État constate, en considération de « la seule mention du modèle économique », que « l’opération a un caractère onéreux et que le lauréat de l’appel à projets recevrait, dans ce montage, une contrepartie, qu’il s’agisse d’un prix ou du droit d’exploiter l’ouvrage réalisé ». L’affirmation est ici sans grande surprise : les mises à disposition domaniales renfermeront toujours, par définition, un droit d’exploiter l’ouvrage et donc, a minima, un caractère onéreux au sens du droit des concessions. Mais le Conseil d’État n’exclut pas ici que le montage puisse être un marché : de son point de vue, il n’est pas possible à ce stade de se prononcer sur la nature exacte du contrat (marché ou concession), même si le cahier des charges et le règlement de la manifestation d’intérêt « semblent pencher vers la qualification de concession en raison de l’exploitation des activités commerciales et de loisirs qui paraît associée à la construction des passerelles ».

 

L’enjeu est donc ailleurs : il s’agit de savoir si ce droit d’exploiter les ouvrages est une « contrepartie » donnée au titulaire de l’autorisation domaniale, en considération de ce qu’il va satisfaire un besoin de la personne publique et réaliser en conséquence une « prestation ». Et, sur ce sujet, le Conseil d’État apporte plusieurs précisions. Il rappelle d’abord que des contrats domaniaux « qui portent non pas sur une prestation de services déterminée […] mais sur l’autorisation d’exercer une activité économique dans une zone domaniale […] ne relèvent pas de la catégorie des concessions », comme la Cour de justice de l’Union européenne a eu l’occasion de le dire à l’occasion d’un arrêt qui a sinon autrement suscité l’émotion (CJUE, 14 juillet 2016, Promoimpresa, C-458/14). Il indique ensuite qu’une prestation (la satisfaction d’un besoin public) ne « relève de la commande publique que si elle comporte un intérêt économique direct pour le pouvoir adjudicateur », reprenant par la même une formule sollicitée par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 25 mars 2010, C-451/08, Helmut Müller). Mais, et c’est bien dommage, le Conseil d’État n’apporte toutefois pas, ou très peu de précisions sur la portée qu’il convient de donner à cette formule. En l’espèce, et sans surprise, il juge que le contrat entend satisfaire un « besoin public » : dans la mesure où la réalisation des passerelles avait pour objectif de faciliter les déplacements au sein de la capitale et le franchissement de la Seine, il est clair que le montage répondait à un besoin de la Cité.

 

Le vrai sujet, mais le Conseil d’État ne le présente pas de cette façon, est de savoir si ce besoin est un besoin précisé par les acheteurs publics concernés. A suivre les textes, il n’est en effet de commande publique que si l’ouvrage répond à des exigences fixées par l’acheteur public, lequel a exercé une « influence déterminante sur sa conception et sa nature ». Et, sur ce terrain, le Conseil d’État écrit que « les ponts figurent en outre sur la liste des activités qui sont des travaux en droit de la commande publique […] pour lesquelles existe une forme de présomption de réponse à un besoin de la personne publique ». Selon lui, « en effet, lorsqu’un pouvoir adjudicateur confie la conception et la réalisation d’un pont à un opérateur économique, il n’est pas nécessaire de vérifier que ce dernier a fixé des exigences et exercé une influence déterminante sur la nature ou la conception de l’ouvrage », ce qu’il n’est possible sinon de déduire qu’après un examen minutieux du projet et du contexte qui l’entoure. La présomption ainsi posée a suscité, sans doute à juste titre, quelques réserves. Pour certains, la liste a en effet pour seul objet de définir ceux des ouvrages qui entrent dans le champ d’application de la commande publique, sans pour autant déterminer s’ils répondent à un besoin de la personne publique : dans la mesure où un très grand nombre d’ouvrages sont inscrits sur cette liste, toute autre interprétation priverait d’effet utile la condition posée par les textes et attachée à l’influence déterminante de l’acheteur public sur la nature et le conception des ouvrages (L. Richer, « L’appel à projets Fluctuat nec mergitur », AJDA, 2019, p. 1433).

 

Mais le débat demeure sans objet sur le cas d’espèce : le Conseil d’État prend soin en effet d’établir qu’« en tout état de cause », la Ville de Paris a exercé une influence déterminante sur la nature ou la conception des passerelles et fixé des exigences précises sur l’animation des équipements dont aura la charge le titulaire de l’autorisation d’occupation temporaire du domaine public. Le Conseil d’État relève ainsi que la Ville a imposé de nombreuses prescriptions tenant au maintien des activités économiques et industrielles déjà en place, et tenant à la mise en œuvre d’une démarche écologique/durable. Et il prend soin à cet égard de distinguer ces exigences propres et spécifiques de celles qui sont attachées aux règles d’urbanisme et de sécurité, lesquelles ne peuvent être en revanche prises en compte pour apprécier l’exercice d’une influence déterminante, et ce en considération de ce qu’elles s’appliquent indépendamment du projet et de la personne qui en est à l’initiative (CJUE, 25 mars 2010, Helmut Müller, C 451/08).

 

Quelque soit le mode d’examen retenu – présomption ou examen approfondi – le Conseil d’État en déduit que les contrats à conclure à l’issue de l’appel à projets répondent effectivement à un besoin (précisé) de la personne publique et qu’ils seront bien en conséquence des contrats de la commande publique dont la nature exacte (marché ou concession) dépendra du modèle et de l’équilibre économique retenu.

 

I.2. – Ce faisant, le Conseil d’État « censure » la procédure de l’appel à projet lancé par la Ville. Après avoir rappelé que la publicité réalisée par la Ville de Paris consistait en une simple mise à disposition des documents sur son site internet et en une communication sur les réseaux sociaux, le Conseil d’État indique que cette publicité ne saurait être regardée comme l’une « des procédures de publicité prévues par les textes qui doivent être observés préalablement à la conclusion d’un contrat de la commande publique ». En conséquence, et en considération de ce que ce vice – le non-respect des procédures prescrites par les règles de la commande publique – n’est pas régularisable, la procédure doit selon lui être annulée et reprise depuis le début : la poursuite de la procédure aurait pour effet la signature d’un contrat entaché d’irrégularité.

 

Le Conseil d’État précise par ailleurs à cette occasion les conséquences de l’annulation de l’appel à projets : d’une part, il rappelle que l’exclusion de l’indemnisation prévue par le cahier des charges de l’appel à projets est sans incidence sur l’application des règles de droit commun de la responsabilité, et donc sur la possibilité pour les candidats d’obtenir réparation de leur préjudice. D’autre part, il indique que, dans l’hypothèse où la Ville souhaiterait lancer une nouvelle procédure, cette fois dans le respect des règles de la commande publique, elle devra veiller au respect de l’égalité de traitement entre les candidats en laissant suffisamment de temps aux nouveaux candidats pour présenter une offre dans le cadre de la nouvelle procédure lancée.

 

II – Au-delà des questions relatives à la requalification des conventions d’occupation du domaine public en contrat de la commande publique, le gouvernement interrogeait également le Conseil d’État sur l’application de certaines des dispositions du Code général de la propriété des personnes publiques, et ce notamment en considération de ce que le projet concernait quatre dépendances gérées chacune par une autorité différente : le domaine public routier de la Ville de Paris (les quais hauts), le domaine public fluvial artificiel du Port autonome de Paris (les quais bas), le domaine public fluvial naturel de l’État géré pour une part par VNF (le chenal de navigation) et géré, pour le reste, par le Port autonome de Paris (bande de 24 mètres du plan d’eau).

 

II.1. – Le gouvernement souhaitait plus précisément savoir s’il pouvait octroyer des droits réels au titulaire de l’autorisation d’occupation du domaine, et ce alors même que l’autorisation allait porter, pour l’essentiel, sur l’espace situé au-dessus de la Seine, laquelle appartient au domaine public fluvial naturel, dont on sait qu’il ne peut donner lieu à l’octroi d’aucun droit réel (article L. 2122-5 du CG3P).

À ce sujet, le Conseil d’État reprend le raisonnement qu’il avait tenu à propos des espaces qui surplombent le domaine maritime naturel (CE, 6 juin 2018, Arditty, req. n° 410651), pour l’appliquer cette fois à un fleuve : l’espace situé au-dessus de la Seine n’appartient pas au domaine public fluvial naturel, et ne suit donc pas le même régime, si bien qu’aucune disposition ne fait obstacle à ce que des droits réels soit accordés pour l’occupation de l’espace situé au-dessus de la Seine. Mais il prend soin de relever que le domaine public fluvial naturel n’est pas ici, d’une manière ou d’une autre, affecté par la réalisation des passerelles, puisqu’elles ne vont que le surplomber : la solution eut sans doute été différente si les passerelles avaient reposé, non pas sur des assises situées sur les quais, mais sur des piliers implantés dans la Seine.

 

II.2. – Le Conseil d’État apporte, enfin, quelques précisions sur l’autorité habilitée à mener la procédure de sélection préalable prévue à l’article L. 2122-1-1 du Code général de la propriété des personnes publiques. Il indique à ce titre, qu’en principe, seul le propriétaire ou le gestionnaire du domaine public est compétent pour organiser une telle procédure. Il précise toutefois que la ville de Paris pourrait être habilitée à lancer cette procédure si elle est mandatée à cet effet par les gestionnaires des dépendances du domaine public sur lesquelles vont porter les autorisations. Il précise que le mandat pourrait découler de la signature de protocoles de partenariat, comme le prévoyait la Ville de Paris dans le cadre de ce projet ; mais il précise qu’il pourrait également résulter de la constitution de groupements de commande ou de groupements d’autorités « concédantes ».

Par Victoria Goachet.

Prestations d’aide sociale départementales : Quelle marge d’appréciation pour les départements dans la définition des conditions d’attribution des prestations ?

Deux arrêts du Conseil d’Etat en date du 29 mai 2019[1] ont permis de revenir sur la marge d’appréciation dont disposent les départements dans la définition des conditions d’attribution et des montants des prestations d’aide sociale dont ils ont la charge dans le règlement départemental.

1 – La compétence du département pour attribuer des aides sociales

Il résulte de l’article L. 111-1 du Code de l’action sociale et des familles (CASF) que « toute personne résidant en France bénéficie, si elle remplit les conditions légales d’attribution, des formes de l’aide sociale ». L’aide sociale est un système de solidarité nationale destiné à toute personne confrontée à des difficultés d’ordre social et matériel, de dépendance ou de handicap.

Ainsi que cela est aujourd’hui inscrit de manière légale au sein des articles L. 121-1 et L. 121-3 du CASF, le département est la collectivité territoriale pivot de l’aide sociale. Chaque département est ainsi chargé de mettre en application l’aide sociale sur son territoire, conformément aux textes législatifs et réglementaires en vigueur.

Il convient toutefois de différencier les prestations d’aide sociale légales – obligatoires – des prestations extra-légales, créées par le département de sa propre initiative.

Au titre des aides sociales légales l’on compte les aides sociales accordées aux personnes en situation de handicap (la prestation de compensation du handicap par exemple), celles attribuées aux personnes âgées (l’allocation personnalisée d’autonomie par exemple) ou encore aux personnes en difficulté (le revenu de solidarité active par exemple).

Les départements – comme les communes ou les centres intercommunaux d’action sociale, autres collectivités compétentes en matière d’aide sociale – peuvent aussi mettre en place des aides extralégales, aussi appelées aides facultatives. Elles consistent en des prestations à caractère social, éducatif, préventif qui répondent à des besoins spécifiques (prise en charge de frais de cantine par exemple). Elles sont ponctuelles ou forfaitaires. Leurs conditions d’attribution dépendront de la collectivité et du règlement qu’elle a adopté et sont souvent soumises à conditions de ressources.

A côté des conditions d’attribution fixées par la loi, l’article L. 111-4 du CASF prévoit en effet que pour les aides sociales relevant de la compétence du département, ce sont les dispositions du règlement départemental d’aide sociale qui régissent les conditions d’attributions. Cela vaut autant pour l’aide sociale dite obligatoire que pour les aides sociales facultatives.

En application de l’article L. 121-3 du CASF, le conseil départemental adopte ainsi un règlement départemental d’aide sociale qui va définir les règles selon lesquelles il accordera les prestations d’aide sociale relevant de sa compétence. Dans ce cadre l’article L. 121-4 du CASF précise qu’il peut notamment décider d’assouplir les conditions d’attribution et ainsi définir des exigences et montants plus favorables que ceux prévus par la règlementation pour les prestations d’aides sociales dont il a la charge. Il doit dans ce cas assumer les impacts financiers de ces décisions.

La question se pose alors de savoir ce que permet exactement le règlement départemental d’aide sociale.

2 – La portée limitée du règlement départemental d’aide sociale

Alors même qu’il revient au conseil départemental de fixer les conditions d’attribution des aides sociales départementales dans le cadre de l’édiction de son règlement départemental, il dispose à cet égard d’une marge de manœuvre limitée. En effet, s’il ne respecte pas les instructions qui seront ci-après détaillées, il pourra voir sa décision refusant d’accorder une aide sociale annulée, voire son règlement départemental sanctionné d’illégalité par le juge administratif.

Il convient de différencier trois cas pour lesquels la marge de manœuvre dont bénéficie le département pour l’établissement dans son règlement départemental d’aides sociales varie.

  • Lorsque les conditions d’attribution ou les montants des prestations sont déterminées par les lois et les décrets

Tout d’abord, le règlement départemental ne peut édicter que des conditions plus favorables dans le cas où les conditions d’attributions ou les montants des prestations sont déterminées par les lois et les décrets qui les régissent. Ainsi, un département ne peut refuser une prestation d’aide sociale en invoquant seulement une condition énoncée au règlement départemental. Le conseil départemental ne peut donc délibérer que dans un sens plus favorable, excluant par là-même l’ajout de critères ou de conditions supplémentaires d’accès. De la même manière, il ne peut définir des montants de prestations plus faibles que ceux prévus par la loi ou les décrets.

Cette règle n’est pas nouvelle puisque le Conseil d’Etat avait déjà pu se prononcer en ce sens antérieurement[2].

C’est ainsi que le règlement départemental d’aide sociale ne peut prévoir que l’aide à domicile ou financière prévue aux articles L. 222-2 et 222-3 du CASF dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance soit limitée à un certain montant par ménage et à un nombre maximum de renouvellement au cours d’une certaine période, alors même que ces articles n’entendent pas restreindre la durée de cette aide aux familles concernées[3].

  • Lorsque les conditions d’attributions ou les montants des prestations ne sont pas « précisément fixés»

Dans ce cas, le règlement départemental peut préciser les critères au vu desquels il doit être procédé à l’évaluation de la situation. En revanche, il ne peut pas fixer de condition nouvelle conduisant à écarter par principe du bénéfice des prestations des personnes qui entrent dans le camp des dispositions législatives applicables.

A titre d’illustration, le Conseil d’Etat a considéré qu’un département ne pouvait refuser la conclusion d’un « contrat jeune majeur », aide contractuelle, en se fondant sur une disposition du règlement départemental d’aide sociale qui imposait, pour la signature d’un tel contrat, que le jeune ait bénéficié d’une prise en charge par l’aide sociale à l’enfance au cours de sa minorité pendant un an au moins. Ainsi, même si la durée de la prise en charge antérieure par le service de l’aide sociale à l’enfance est un des critères, d’après la Haute juridiction administrative, sur lesquels le département peut légalement se fonder pour accorder la prise en charge d’un jeune majeur, il n’était pas possible de durcir ce critère en prévoyant une condition relative à une prise en charge antérieure d’un an minimum, et cela sans procéder à l’évaluation de sa situation. En effet, selon les juges, il résulte des termes de l’article L. 222-5 du CASF que le Président du département dispose d’un large pouvoir d’appréciation.

Le Président du conseil départemental ne pouvait légalement refuser cette prise en charge au seul motif et sans procéder à l’évaluation de sa situation qu’il ne remplissait pas la condition fixée par le règlement d’aide sociale du département.

Notons par ailleurs, qu’il n’est pas toujours évident de savoir si les contours d’une prestation sont précisément fixés par la loi et le règlement.

  • Lorsque le département a créé des prestations d’aide sociale

Le département a, in fine, seulement une véritable marge d’appréciation pour les prestations qu’il créées de sa propre initiative, sans qu’aucun texte ni principe textuel ne le prévoit ni ne lui impose.

En effet, en vertu du principe de libre administration des collectivités, le conseil départemental définit librement les critères d’attribution des aides qu’il a décidées de créer. Cependant, il doit les inscrire formellement dans le règlement départemental d’aide sociale, les prestations d’action sociale facultative ne pouvant en effet résulter de simples délibérations prises par la collectivité départementale.

Force est d’ailleurs de constater que contrairement aux dispositifs d’aide sociale obligatoire, l’aide sociale facultative n’occasionne pas de contentieux de masse. Ces litiges relèvent principalement du recours d’excès de pouvoir et le contrôle du juge sur les décisions de refus d’octroi d’aide sociale facultative demeure limité à l’erreur manifeste d’appréciation.

 

Au final, si le règlement départemental d’aide social est un outil de régulation de l’aide sociale, ce dernier reste d’une importance qui ne doit pas être surestimée, consistant surtout en des lignes directrices pour les départements. Il permet aux départements de fixer des critères et priorités dans l’octroi des aides sociales, mais ne doit pas permettre au département d’abandonner l’examen particulier de la situation du demandeur.

 

[1] CE, 29 mai 2019, req. n° 417406 et 417467

[2] CE, 4 novembre 1994, req. n° 100354

[3] CE, 29 mai 2019, req. n° 417406

Par Olivier Metzger et Esther Doulain

 

Pouvoir du juge de la diffamation quant à l’interprétation de l’acte de poursuite

L’arrêt précité de la chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 11 décembre 2018 vient rappeler que les juges du fond ne sont pas tenus d’interpréter le caractère diffamatoire de propos incriminés, telle que cette interprétation est proposée par l’acte initial de poursuite (plainte avec constitution de partie civile ou citation directe).

En l’espèce, la présidente d’un parti politique avait fait citer devant le Tribunal correctionnel la directrice de publication d’un organe de presse pour délit de diffamation publique envers un particulier. Elle soutenait qu’au sein d’un article portant sur une enquête judiciaire relative au financement dudit parti dans le cadre des élections législatives de 2012, des propos diffamatoires avaient été tenus à son encontre, à raison des passages suivants : « pour les seules législatives de 2012, le détournement pourrait dépasser 6.000.000 d’euros », « la justice se demande si la présidente du Front National n’est pas la bénéficiaire d’un système conçu pour détourner de l’argent public ».

La citation précisait que « Ces deux passages imputent clairement à Mme B… d’être personnellement la bénéficiaire d’un détournement d’argent public de 6.000.000 d’euros […] Ce détournement atterrirait dans l’escarcelle personnelle de Mme B… ».

Les juges du premier degré avaient retenu le caractère diffamatoire des propos incriminés.

Un appel de la décision était interjeté. Le jugement était infirmé par la Cour d’appel, en considérant « selon les termes mêmes de la citation, la diffamation dont Mme B… s’estime victime réside non pas dans l’imputation d’avoir pu tirer profit, en tant que présidente du Front National, d’un financement frauduleux de ce parti, mais dans celle d’avoir bénéficié personnellement des fonds détournés ; que les juges considèrent cependant que le système de détournement évoqué dans l’article litigieux concerne le financement dudit parti et non un mode d’enrichissement personnel ; qu’ils en déduisent que la partie civile n’est pas fondée à agir en diffamation en prétendant qu’il lui serait imputé d’avoir bénéficié d’un tel enrichissement ».

La Cour de cassation rappelle un principe déjà posé et faisant l’objet d’une jurisprudence constante, selon lequel « les juges ne sont pas tenus par l’interprétation de la signification diffamatoire des propos incriminés proposée par l’acte initial de poursuite ».

Elle rappelle également qu’« il leur appartient de rechercher, en relevant toutes les circonstances intrinsèques ou extrinsèques auxdits propos que comporte l’écrit qui les renferme, si ceux-ci contiennent l’imputation ou l‘allégation d’un autre fait contraire à l’honneur ou la considération de la partie civile que celui suggéré dans la citation, de sorte qu’il leur revenait en l’espèce d’examiner si les propos poursuivis par Mme B… ne renfermaient pas l’insinuation que celle-ci aurait tiré profit, en sa qualité de présidente du Front National, des agissements frauduleux imputés à ce parti politique, voire aurait eu une part de responsabilité dans ces faits ».

Ainsi, si le juge de presse n’est saisi que des propos figurant sur l’acte de poursuite, il reste libre d’apprécier – dans le texte qui lui est soumis pour sanction – si ce texte ne comporte pas d’autre imputation que celle présentée ou suggérée dans l’acte de poursuite.

Possibilité d’exclure un candidat d’une procédure de passation d’un contrat pour des agissements constatés lors d’autres procédures

Par une décision en date du 24 juin dernier, le Conseil d’Etat a précisé les conditions permettant à l’acheteur public d’exclure une candidature sur le fondement de l’article 48 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics (désormais les articles L. 2141-7 à 2141-11 du Code de la commande publique).

Cinq motifs visés à l’article 48-I de l’ordonnance précitée permettent à un acheteur d’exclure un candidat, sans y être obligé, parmi lesquels figurent la tentative d’influence sur le processus décisionnel (2°) et l’existence d’un conflit d’intérêts (5°). Ces exclusions « à l’appréciation de l’acheteur »[1] s’exercent sous la réserve de proposer au préalable au candidat de justifier de « son professionnalisme et sa fiabilité » et de l’absence d’atteinte de sa candidature à l’égalité de traitement des candidats (art. 48-II)[2].

Dans l’affaire commentée, le Département des Bouches-du-Rhône a lancé, à trois reprises (en 2016, 2017 et 2018), une procédure pour la passation d’un marché public de travaux portant sur les archives et la bibliothèque départementales situées à Marseille.

Après la déclaration sans suite de la première procédure liée à une procédure pénale impliquant la société candidate EGBTI, cette dernière a ensuite été exclue des deux autres procédures par le Département sur le fondement du 2° (tentative d’influence) et du 5° (conflits d’intérêts) de l’article 48-I de l’ordonnance précitée.

Saisi par cette société, le juge des référés précontractuels du Tribunal administratif de Marseille a annulé la décision d’exclusion de sa troisième candidature, ainsi que la procédure de passation, par une ordonnance du 28 février 2019 contre laquelle le Département s’est pourvu en cassation.

Par la décision commentée, le Conseil d’Etat a tout d’abord précisé que l’article 45-I-2° de l’ordonnance précitée (tentative d’influence) ne peut être mise en œuvre qu’« au vu d’éléments précis et circonstanciés […] dans le cadre de la procédure de passation en cause ou dans le cadre d’autres procédures récentes de la commande publique » – ces précisions n’étant pas prévues dans le texte de l’ordonnance.

Puis, le Conseil d’Etat a jugé que le Département était fondé à exclure la candidature de la société EGBTI sur le fondement du 2° de l’article 45-I de l’ordonnance précitée (tentative d’influence) mais pas sur le 5° du même article 45-I (conflits d’intérêts).

Si les agissements d’une personne présentée comme le dirigeant de fait de la société lors des procédures de passation antérieures ont été de nature à faire douter de sa probité et que sa fiabilité et son professionnalisme n’ont pas pu être rétablis, le fait que le Département se soit constitué partie civile dans la procédure pénale ouverte contre les mêmes agissements de cette personne, était insuffisant, selon le Conseil d’Etat, pour créer une situation de conflit d’intérêts.

Mais, estimant que la décision du Département aurait été la même en se fondant uniquement sur l’article 48-I-2° de l’ordonnance précitée, le Conseil d’Etat a annulé l’ordonnance du Tribunal administratif de Marseille.

Il convient toutefois de ne pas tirer une interprétation extensive de ces dispositions par le Conseil d’Etat, une candidature doit présenter « un risque suffisamment sérieux »[3] au regard des conditions de mise en concurrence, de transparence et d’égalité des candidats, pour que l’acheteur puisse envisager de l’exclure sur le fondement de l’article 48-I-2° précité.

 

[1] Pour reprendre les termes des titres du Code de la commande publique.

[2] Ces dispositions existent aussi pour les contrats de concession (voir l’article 42 de l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, dont les dispositions sont désormais codifiées aux articles L. 3123-7 à L. 3123-11 du Code de la commande publique).

[3] Selon les termes du rapporteur public, M. Gilles Pellissier, dans ses conclusions sous la décision commentée.

VEFA : adoption du décret du 25 juin 2019 relatif aux travaux réservés par l’acquéreur d’un immeuble vendu en l’état futur d’achèvement

Le décret en date du 25 juin 2019 pris en application de l’article 75 de la loi ELAN n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 a modifié les dispositions de l’article L. 261-15 du Code de la construction et de l’habitation relatives à la vente en l’état futur d’achèvement et permet au vendeur et à l’acquéreur de convenir, au stade du contrat préliminaire, de certains travaux de finition ou d’installation d’équipements sanitaires dont l’acquéreur peut se réserver l’exécution après la livraison du logement.

Ce décret détermine la nature des travaux dont l’acquéreur peut se réserver l’exécution.

Il prévoit, en effet, que les travaux de finition des murs intérieurs, de revêtement ou d’installation de chauffage et sanitaire et, le cas échéant, du mobilier pouvant les accueillir font partie des travaux qui peuvent être pris en charge par l’acquéreur.

En pratique, le décret adapte les mentions obligatoires du contrat préliminaire et la définition de l’achèvement de l’immeuble lorsque l’acquéreur se réserve l’exécution de travaux.

Ainsi, le contrat préliminaire comportera une clause en caractère très apparents stipulant que l’acquéreur accepte la charge, le coût et les responsabilités qui résultent de ces travaux, qu’il réalise après la livraison de l’immeuble.

Il précisera également la décomposition du prix comme suit :

  • Le prix de vente convenu ; 
  • Le coût des travaux dont l’acquéreur se réserve l’exécution, ceux-ci étant décrits et chiffrés par le vendeur ;
  • Le coût total de l’immeuble égal à la somme du prix convenu et du coût des travaux mentionnés aux prix de vente convenu et ceux dont l’acquéreur se réserve l’exécution.

Toutefois, ce texte autorise l’acquéreur à revenir sur sa décision et donc à revenir sur la clause par laquelle il a manifesté sa volonté de se réserver l’exécution de travaux de finition ou d’installation d’équipements, en notifiant sa décision au vendeur par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre recommandée électronique dans le délai stipulé aux termes du contrat préliminaire.

 

Recours « Béziers I » – Les parties à un contrat administratif sont en droit d’en contester la validité pendant toute sa durée d’exécution

Par un arrêt en date du 1er juillet 2019, le Conseil d’État a précisé les conditions du recours dit « Béziers I » – lequel, pour rappel, permet aux parties à un contrat administratif de saisir le juge d’un recours de plein contentieux aux fins de contester la validité du contrat qui les lie (CE, 28 décembre 2009, Commune de Béziers, req. n° 304802) –, en jugeant que les parties peuvent former ce recours pendant toute la durée d’exécution du contrat.

S’agissant du contexte, rappelons que l’Association pour le musée des Iles Saint-Pierre et Miquelon a conclu avec le Conseil général de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, le 31 décembre 1998, une convention prévoyant, sans limitation de durée, d’une part, le transfert à cette collectivité de la propriété de l’ensemble des œuvres d’art et objets constituant sa collection en vue de son affectation à un nouveau musée créé par cette dernière et, d’autre part, les modalités de participation de l’Association à la mission de service public de gestion du musée. Toutefois, plusieurs années après, cette association a contesté la validité de cette convention devant le Tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Or, sa demande a été rejetée par décision du Tribunal précité, en date du 15 juillet 2015, au motif que son action était prescrite par application de la prescription quinquennale prévue par l’article 2224 du code civil. Et, la Cour administrative de Bordeaux ayant rejeté, par un arrêt en date du 29 juin 2017 et pour le même motif, son appel formé à l’encontre de ce jugement, l’Association pour le musée des Iles Saint-Pierre et Miquelon s’est pourvue en cassation contre cet arrêt devant le Conseil d’Etat.

A ce titre, et pour faire échec à ce pourvoi, la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon a soutenu devant le Conseil d’Etat que la convention litigieuse n’avait pas un caractère administratif. Néanmoins, saisi sur renvoi effectué par une décision du Conseil d’Etat statuant au contentieux du 6 juin 2018, le Tribunal des conflits a jugé, par une décision du 10 décembre 2018, que ce contrat avait le caractère d’un contrat administratif et, partant, que son contentieux relevait bien de la compétence de la juridiction administrative.

C’est ainsi que, par sa décision du 1er juillet 2019, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux au motif que l’action de l’association requérante n’était pas prescrite en vertu de l’article 2224 du Code civil.

Pour ce faire, le Conseil d’Etat a tout d’abord rappelé le considérant de principe dégagé dans sa décision du 28 décembre 2009 selon lequel « les parties à un contrat administratif peuvent saisir le juge d’un recours de plein contentieux contestant la validité du contrat qui les lie. Il appartient alors au juge, lorsqu’il constate l’existence d’irrégularités, d’en apprécier l’importance et les conséquences, après avoir vérifié que les irrégularités dont se prévalent les parties sont de celles qu’elles peuvent, eu égard à l’exigence de loyauté des relations contractuelles, invoquer devant lui. Il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l’illégalité commise et en tenant compte de l’objectif de stabilité des relations contractuelles, soit de décider que la poursuite de l’exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l’intérêt général, la résiliation du contrat ou, en raison seulement d’une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d’office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d’une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, son annulation ».

Ensuite, et c’est l’apport essentiel de l’arrêt ici commenté, le Conseil d’Etat a jugé que l’action des parties à un contrat administratif en contestation de la validité de celui-ci est ouverte « pendant toute la durée d’exécution de celui-ci »

Ainsi, réglant l’affaire au fond et faisant application de la solution précitée, le Conseil d’Etat a relevé « qu’aucune règle de prescription n’est opposable à l’action en contestation de validité de la convention du 31 décembre 1998 de l’association requérante qui a été exercée pendant la durée d’exécution de ce contrat » de telle sorte que « l’association est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon a rejeté sa demande au motif qu’elle était prescrite par application de la prescription quinquennale prévue par l’article 2224 du Code civil ».

Enfin, le Conseil d’Etat a fait application du considérant de principe précédemment rappelé et a relevé, en premier lieu, que si la convention litigieuse n’avait pas été approuvée par l’autorité administrative après avis du Haut Conseil des musées de France en méconnaissance des dispositions de l’article L. 451-10 du Code du patrimoine, « cette circonstance, qui ne constitue pas, en tout état de cause, un vice d’une particulière gravité de nature à justifier l’annulation du contrat, n’est pas, en l’espèce, invocable à l’appui de son action, compte tenu de la durée pendant laquelle le contrat litigieux a été exécuté, et eu égard à l’exigence de loyauté des relations contractuelles ». En deuxième lieu, le Conseil d’Etat a considéré que « eu égard à l’exigence de loyauté des relations contractuelles, l’association requérante ne saurait invoquer […] la circonstance que [la convention litigieuse] aurait été conclue en méconnaissance des règles de fonctionnement des associations prévues par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association au motif, d’une part, que les membres qui l’ont approuvée ne faisaient pas partie du bureau directeur de l’association et, d’autre part, que le procès-verbal de l’élection du président qui en était signataire n’a pas été transmis au représentant de l’Etat dans la collectivité territoriale ». En troisième lieu, le Conseil d’Etat a jugé que le fait que cette convention n’ait pas été transmise au représentant de l’Etat dans la collectivité territoriale était sans incidence sur sa légalité.

Au final, le Conseil d’Etat a retenu que l’association requérante n’était « pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon a rejeté sa demande en annulation de la convention du 31 décembre 1998 ».

Les limites de la protection du lanceur d’alerte en matière disciplinaire

L’article 6 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique définit le lanceur d’alerte comme « une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice grave pour l’intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance ».

Les agents effectuant un signalement conformément à ces dispositions bénéficient d’une protection particulière. En effet, l’article 6 ter A de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires garantit aux agents qu’aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l’évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l’affectation et la mutation ne peut être prise à leur égard pour avoir « relaté ou témoigné, de bonne foi, aux autorités judiciaires ou administratives de faits constitutifs d’un délit, d’un crime ou susceptibles d’être qualifiés de conflit d’intérêts […] » dont ils auraient eu connaissance dans l’exercice de leurs fonctions.

Ainsi, lors d’un contentieux disciplinaire, il appartient au juge saisi d’un moyen en ce sens d’apprécier si le fonctionnaire bénéfice de cette protection et si par conséquent la sanction disciplinaire prise sur le fondement de la dénonciation de ces faits est entachée d’irrégularité.

Telle était la question sur laquelle a dû statuer la Cour administrative d’appel de Nancy dans son arrêt du 6 juin 2019.

Dans cette affaire, un agent sollicitait le bénéfice des dispositions de l’article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983 dans le cadre d’une procédure disciplinaire diligentée à son encontre pour avoir, par voie de presse, fait part de ses craintes quant à la sécurité des usagers d’un équipement sportif intercommunal. Plus précisément, l’agent avait dénoncé des taux élevés de chloramine dans l’eau de baignade de la piscine (générant selon lui un risque sanitaire), ainsi qu’un sous-effectif de maitres-nageurs sauveteurs (qui aurait généré des risques pour la sécurité des usagers).

La Cour, comme le Tribunal avant elle, a cependant écarté l’application de la protection instituée par la loi du 9 décembre 2016 pour deux motifs.

D’une part, la Cour considère qu’il n’existait pas de danger imminent ou de risque de dommages irréversible justifiant que le signalement soit directement rendu public et ce sans alerter préalablement le supérieur hiérarchique comme cela est prévu en principe par le dispositif de lancement d’alerte.

D’autre part, la Cour considère que les alertes émises par l’agent ont été traitées par l’administration dans un délai raisonnable, bien qu’elle ait pris des mesures plusieurs mois après la dénonciation des dysfonctionnements.

Ainsi, la Cour considère que l’agent ne pouvait se prévaloir de la protection réservée aux lanceurs d’alerte et qu’en dénonçant des faits dont il avait eu connaissance pendant l’exercice de ses missions, il avait méconnu à son devoir de réserve justifiant ainsi l’édiction d’une exclusion temporaire de fonctions de trois mois, dont deux avec sursis.

Maladies imputables au service : quid des situations antérieures au nouvel article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ?

Il ressort du IV de l’article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires qu’ « Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau ».

Peuvent également être reconnues imputables au service d’autres affections non désignées dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du Code de la sécurité sociale, lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu’elle est essentiellement et directement causée par l’exercice des fonctions et qu’elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans des conditions prévues par décret.

Cet article qui rend applicable le tableau des maladies professionnelles est entré en vigueur le 21 janvier 2017.

En l’espèce, Mme V., adjointe administrative, avait sollicité la reconnaissance de l’imputabilité au service d’une tendopathie préalablement à l’entrée en vigueur de cette disposition, laquelle pathologie s’était elle aussi évidemment déclarée antérieurement.

Cependant, par des décisions des 29 mai et 23 juin 2017, la ministre des
Armées avait rejeté cette demande et, par un arrêté du 10 juillet 2017, Mme V. avait été placée en disponibilité d’office à compter du 11 juin 2017, date
à laquelle la ministre a relevé qu’elle avait épuisé ses droits à congés pour maladie ordinaire.

L’arrêt est particulièrement intéressant ici s’agissant de l’appréciation de la légalité des décisions refusant la reconnaissance de l’imputabilité au service de la pathologie de Madame V.

En effet, pour prendre les décisions des 29 mai et 23 juin 2017, la ministre des Armées avait considéré, au vu d’un avis de la commission de réforme du 16 mars 2017 et d’une l’expertise médicale réalisée le 17 octobre 2016 par un médecin rhumatologue et sur le fondement de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 que la pathologie dont Mme V. souffrait ne correspondait pas à l’une des maladies désignées dans le tableau n° 57 A annexé au Code de la sécurité sociale. Or, à la date à laquelle la maladie de Mme V. a été diagnostiquée, aucune disposition ne rendait applicables aux fonctionnaires les tableaux de maladies professionnelles annexés au code de la sécurité sociale.

Jugeant que les dispositions de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 étaient d’application immédiate mais pour autant non rétroactivement applicable à des pathologies déclarées avant son entrée en vigueur, le Tribunal a annulé les décisions querellées, en se fondant sur le fait que le droit applicable à la date de déclaration de la maladie était encore en l’espèce l’article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat :

« Par suite, en rejetant la demande de Mme V. pour ce motif sans apprécier, comme
elle était tenue de le faire en application des dispositions de l’article 34 de la loi du 11 janvier 1984, si cette pathologie était directement liée à l’exercice des fonctions de Mme V., la ministre des Armées a commis une erreur de droit ».

Cette position est confortée par les décrets relatifs au congé pour invalidité temporaire imputable au service, pris pour application de l’article 21 bis précité (cf. notamment l’article 22 du décret n° 2019-122 du 21 février 2019 pour la fonction publique de l’Etat qui prévoit expressément que « Les conditions de forme et de ne sont pas applicables aux fonctionnaires ayant déposé une déclaration d’accident ou de maladie professionnelle avant l’entrée en vigueur du présent décret. »).

En l’absence de dispositif législatif dédié : pas de rupture conventionnelle pour les agents publics

Le projet de loi de modernisation de la fonction publique prévoit l’instauration d’un véritable mécanisme de rupture conventionnelle au bénéfice des fonctionnaires (n’ayant pas atteint l’âge d’ouverture du droit à une retraite à taux plein), mais aussi des contractuels bénéficiant d’un engagement à durée indéterminée, selon des conditions qui seront précisées par décret.

Mais d’ici la promulgation de la loi et l’intervention des décrets qui en permettront la mise en œuvre, la rupture conventionnelle n’est pas envisageable et il ne peut être mis fin aux fonctions d’un agent public qu’après une admission à la retraite, une démission, une révocation ou un licenciement selon les cas.

Surtout, l’article L. 1237-1 du Code du travail qui prévoit que « L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie » ne saurait trouver à s’appliquer, quand bien même les parties en auraient convenu.

C’est ce que la Cour administrative d’appel de Lyon a rappelé encore récemment au cas d’un agent ayant sollicité avec succès de son employeur l’application de l’article L. 1237-1 du Code du travail avant que Pôle Emploi, relevant l’impossible application du dispositif, ne lui refuse, à raison alors, le versement des indemnités d’aide au retour à l’emploi. L’arrêt juge ainsi que « les modalités du licenciement ou de la fin du contrat d’un agent non titulaire de la fonction publique hospitalière sont exclusivement régies par les dispositions des articles 40-1 à 52 du décret du 6 février 1991. Ces dispositions présentant un caractère d’ordre public, un établissement public ne saurait s’en écarter en recourant à un mode conventionnel de rupture du contrat de travail. ».

Transposable aux fonctionnaires et dans les deux autres versants de la fonction publique, cet arrêt rendu au cas d’un agent contractuel de la fonction publique hospitalière doit ainsi trouver à s’appliquer jusqu’à l’effectivité des nouvelles règles projetées (qui ne permettront pas en tout état de cause de convenir d’une rupture sur le fondement du dispositif propre au droit du travail).

Le rôle du « prix » dans la requalification d’une cession avec charges en contrat de la commande publique

Par une décision en date du 17 juin dernier, la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé, de manière assez logique, qu’une cession avec charges de construire 75 logements sociaux n’était pas un contrat de la commande publique, en considération de ce qu’elle n’était pas conclue à titre onéreux.

La cession avec charges désigne un contrat par la voie duquel une personne publique cède un bien, mais à charge pour l’acquéreur de réaliser un ouvrage préalablement déterminé. Ce faisant, les cessions avec charges constituent des contrats mixtes, parce qu’elles portent tout à la fois sur un objet qui peut relever de la commande publique (les travaux) et sur un objet qui n’en relève pas (la cession d’une dépendance domaniale). En conséquence, il est un risque que la cession avec charges soit soumise aux règles de la commande publique lorsque son objet principal est la charge (la réalisation des travaux) et non pas la cession, c’est-à-dire lorsque le contexte et les prescriptions témoignent de ce que la vente est un outil au service de la politique de la personne publique, et non pas une simple opération de valorisation.

Et la cession avec charges pourra, dans cette hypothèse, être requalifiée en marché public toutes les fois où l’ouvrage que devra réaliser le futur acquéreur répond « aux exigences fixées par le pouvoir adjudicateur qui exerce une influence déterminante sur sa nature et ou sa conception ». Mais, à suivre les textes qui fixent la définition d’un marché public de travaux, ce n’est toutefois pas suffisant : il faut que la personne publique apporte, en plus, à l’acquéreur une contrepartie onéreuse à cette charge qu’il supporte.

Devraient donc échapper à toute requalification en marché public, les cessions avec charges qui ne sont pas conclues à titre onéreux, soit parce que la personne publique ne verse pas d’argent à l’acquéreur, soit – comme il advient sinon le plus souvent – parce qu’elle ne va non plus abandonner de recettes en cédant le terrain à un prix inférieur au prix du marché.

C’est ce que juge ici précisément la Cour administrative d’appel de Marseille : « le contrat envisagé, qui se limitait à la vente du terrain, ne comportait aucun caractère onéreux pour l’établissement et ne constituait dès lors pas un marché public ».

Ce faisant, la Cour annule le jugement du Tribunal administratif de Toulon qui, de manière surprenante, mais peut être pas de manière isolée[1], avait requalifié la cession avec charges en marché public, et ce sans même vérifier le critère « onéreux ». Le Tribunal semblait ainsi considérer que la seule circonstance que les ouvrages objet de la cession avec charges « répondent aux exigences fixées par la personne publique, et [sont] exécutés dans l’intérêt économique direct de la commune » était de nature à regarder la cession comme un marché public, sans qu’il ne soit nécessaire de rechercher l’existence d’un caractère onéreux.

La décision de la Cour administrative d’appel de Marseille sanctionne ainsi le raisonnement tenu par le tribunal administratif de Toulon, et réaffirme la nécessité d’identifier un caractère onéreux pour requalifier une cession avec charges de marché public.

[1] A. Boullault, « le prix comme critère de qualification des contrats de la commande publique », Contrats publics, n° 199, Juin 2019.

Appréciation de l’existence d’une inégalité de traitement : comparaison possible entre les salariés plaignants et anciens salariés de l’entreprise

Par un arrêt en date du 5 juin 2019, la Cour de cassation s’est prononcée sur la possibilité de comparer la situation de salariés invoquant une inégalité de traitement avec celle de salariés qui ont quitté les effectifs de l’entreprise.

L’application du principe d’égalité de traitement nécessite que les salariés s’estimant victimes d’une rupture d’égalité prouvent qu’ils sont placés dans une situation identique à celle des salariés auxquels ils se comparent.

Dans le cadre de sa construction jurisprudentielle sur cette question, la Cour de cassation a défini un périmètre au sein duquel la situation des salariés peut être comparée qui, de manière constante, est celui de l’entreprise (Cass. Soc., 1er juin 2005, n° 04-42.143 ; Cass. Soc., 16 sept. 2015, n° 13-28.415).

Or, dans cette affaire, des salariés d’une entreprise de propreté ont saisi la juridiction prud’homale de demandes de rappels de primes sur le fondement d’une atteinte au principe d’égalité de traitement. A ce titre, ils soutenaient qu’ils ne bénéficiaient pas de certains éléments de rémunération (primes de panier, de vacances et de trajet) versés aux salariés affectés sur un autre site de nettoyage entre 2010 et 2015 et dont les contrats de travail ont, depuis cette date, été transférés à une autre société.

L’employeur justifiait cette différence de traitement par l’obligation à laquelle il était tenu de maintenir au bénéfice des salariés transférés les droits et avantages qui leur avaient été reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert.

La Cour d’appel a fait droit aux demandes des salariés, au motif que l’employeur ne justifiait d’aucune raison objective et pertinente permettant de légitimer la disparité de rémunération entre les salariés des différents sites.

Toutefois, constatant que les salariés du site auxquels les demandeurs se comparaient avaient, depuis, été repris par une autre société et ne faisaient ainsi plus partie des effectifs de l’entreprise, et considérant que dès lors qu’il n’était pas justifié que l’employeur avait versé ces primes à d’autres salariés que ceux ayant quitté l’entreprise, l’inégalité de traitement pouvait être uniquement invoquée pendant la période d’emploi des salariés comparés, soit entre 2010 et 2015, les juges du fond ont limité à ce titre, le montant des rappels de salaire octroyés aux plaignants.

La Cour de cassation a censuré cette solution en retenant que la circonstance que les salariés, auxquels se comparaient les demandeurs, ne fassent plus partie des effectifs de l’entreprise ne saurait les priver du droit à percevoir un élément de rémunération qui leur est dû en application du principe d’égalité de traitement.

Ainsi, la Haute juridiction précise que la justification selon laquelle les salariés comparés avaient quitté l’entreprise au jour de la demande ne constitue pas une raison objective et pertinente permettant à l’employeur d’opérer valablement une différence de traitement.

Application de la convention APL aux locataires dès sa signature

Lors du rachat par un organisme HLM d’un immeuble qui relevait auparavant du parc privé, se pose la question du régime juridique applicable aux baux d’habitation et plus précisément de l’opposabilité de la convention APL conclue entre l’Etat et le bailleur social.

En l’espèce, une société d’HLM est devenue propriétaire d’un immeuble et a conclu en suivant une convention APL avec l’Etat. En application de cette convention, le nouveau bailleur a sollicité auprès de ses locataires les justificatifs de revenus pour appliquer, le cas échéant, un supplément de loyer de solidarité (SLS) en cas de ressources excédant les plafonds fixés pour l’attribution de logements sociaux.

Une locataire ayant refusé de justifier de ses ressources, le bailleur lui appliqua le SLS maximal – sanction prévue en pareil cas – et l’assigna par la suite en résiliation de bail pour impayés de loyers.

Débouté par le Tribunal d’instance au motif qu’il aurait dû proposer à sa locataire un nouveau bail conforme à la convention APL sur le fondement de l’article L. 353-7 du Code de la construction et de l’habitation, applicable aux bailleurs privés, le bailleur releva appel.

La Cour d’appel, retenant l’argument de ce dernier, jugea inapplicable en effet l’article L. 353-7 au bailleur social mais considéra, pour confirmer le jugement ayant débouté l’appelant de ses demandes, que de ce dernier aurait dû informer avec suffisamment de précision les anciens locataires des nouvelles dispositions qui leur étaient applicables et ne démontrait avoir mis à disposition de sa locataire une copie de la convention, de telle sorte que cette dernière n’avait pu commencer à s’appliquer.

La Cour de cassation, saisie du pourvoi, casse l’arrêt d’appel pour avoir ajouté à la loi une condition qu’elle ne comportait pas.

En effet, dans cet arrêt de principe rendu au visa des articles L. 353-16 et L. 353-17 du Code de la construction et de l’habitation, la Cour de cassation affirme en ces termes :

« Attendu qu’il résulte du premier de ces textes que la mise à la disposition du locataire d’une copie de la convention conclue entre l’Etat et le bailleur ne constitue pas une condition préalable à son exécution ; qu’en application du second, par dérogation à l’article L. 353-3, les conventions concernant les logements mentionnés à l’article L. 353-14 prennent effet à leur date de signature ».

La Cour de cassation rappelle ainsi que la convention APL est applicable d’office dès sa signature, rassurant au passage les bailleurs pour qui une information préalable et une mise à disposition de la convention pour chaque locataire engendrerait des difficultés pratiques certaines.

La CNIL sanctionne une TPE pour vidéosurveillance excessive

CNIL, Communiqué du 18 juin 2019

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (ci-après « CNIL ») a sanctionné l’entreprise UNIONTRAD COMPANY pour avoir mis en place un parc de caméras plaçant ses salariés sous surveillance constante et a également prononcé une injonction afin que la société prenne des mesures pour tracer les accès à la messagerie professionnelle partagée.

En effet, suite à la plainte de plusieurs salariés, les agents de la CNIL se sont déplacés en février 2018 et ont constaté qu’une caméra filmait six salariés à leur poste sans interruption, qu’aucune information n’avait été délivrée aux salariés et que les postes informatiques n’étaient pas sécurisés par un mot de passe alors que les traducteurs accédaient à une messagerie professionnelle partagée avec un mot de passe unique.

En juillet 2018, la CNIL a mise en demeure cette entreprise de se mettre en conformité au cadre législatif relative du droit des données à caractère personnel. Passé ce délai, elle a décidé de réaliser un second contrôle et d’ouvrir une procédure de sanctions.

En prononçant une amende administrative de 20.000 euros, alors même qu’il s’agissait d’une TPE et que celle-ci présentait un résultat net négatif sur l’année 2017, la CNIL a souhaité rappeler la singularité et les exigences liées à la vidéosurveillance des salariés.

Par ailleurs, cette décision montre la volonté de la CNIL d’obtenir des réponses lorsque celle-ci met en demeure des organismes et c’est finalement le refus de se mettre en conformité qui a entrainé la sanction de l’entreprise.

Censure du droit à communication des données de connexion des bénéficiaires contrôlés dans le cadre de prestations sociales

Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité par le Conseil d’Etat, le Conseil constitutionnel a, par sa décision du 14 juin 2019, partiellement censuré les dispositions de l’article L. 114-20 du Code la sécurité sociale en ce qu’elles permettent aux organismes de sécurité sociale de se faire communiquer les données de connexion d’un bénéficiaire de prestations sociales contrôlé.

Il était question, en l’espèce, d’un indu concernant le revenu de solidarité active et l’aide personnalisée au logement perçu par un individu, où l’organisme opérant le contrôle avait eu transmission d’informations bancaires et des données de connexions. Cet individu soutenait que ces dispositions n’assortissaient pas ce droit à communication de garanties suffisantes pour préserver le droit au respect de la vie privée.

Les Sages, dans leur décision, ont estimé que « compte tenu de leur nature et des traitements dont elles peuvent faire l’objet, les données de connexion fournissent sur les personnes en cause des informations nombreuses et précises, particulièrement attentatoires à leur vie privée. Par ailleurs, elles ne présentent pas de lien direct avec l’évaluation de la situation de l’intéressé au regard du droit à prestation ou de l’obligation de cotisation. Dans ces conditions, le législateur n’a pas entouré la procédure prévue par les dispositions contestées de garanties propres à assurer une conciliation équilibrée entre le droit au respect de la vie privée et la lutte contre la fraude en matière de protection sociale ».

Le Conseil constitutionnel a retenu que, bien qu’il ait été prévu que la personne contrôlée soit informée de la mise en œuvre du droit de communication par l’organisme, et ce afin que celle-ci puisse prendre connaissance des documents communiqués et puisse contester utilement les conclusions qui en ont été tirées, la transmission de l’ensemble des données de connexion est un élément trop attentatoire à la vie privée puisque celui-ci reflète l’ensemble des pratiques de l’individu sans qu’il n‘y ait eu la moindre discrimination entre ce qui pourrait être utile ou non à l’organisme contrôlant.

Au travers de cette décision, le Conseil constitutionnel rappelle que les données de connexion sont des informations particulièrement sensibles, dont il n’est pas possible d’avoir accès, même lorsque l’on est un organisme de sécurité sociale agissant dans ses missions de contrôle.

Le renforcement de la protection des marques des collectivités territoriales face aux cybersquatters

La Cour de cassation a rendu, le 5 juin dernier, un arrêt de principe relatif au transfert obligatoire d’un nom de domaine utilisant l’extension « .fr » notamment lorsque celui-ci reprend le nom d’une collectivité locale. La Cour en a profité pour réaffirmer la primauté d’une marque par rapport à un nom de domaine antérieur.

En l’espèce, la société Dataxy était titulaire depuis 2004 des noms de domaine régulièrement renouvelés depuis, « saoneetloire.fr » et « saone-et-loire.fr », ainsi que du nom de domaine « saône-et-loire.fr » depuis le 22 juin 2012.

Le département de Saône-et-Loire est quant à lui titulaire de la marque semi-figurative n° 3827089 « Saône-et-Loire le département » déposée le 4 avril 2011 et enregistrée le 19 août 2011 pour désigner les services en classe 35, 38, 39 et 41.

Le département de Saône-et-Loire avait alors souhaité acquérir les noms de domaines correspondant à sa marque et avait par conséquent demandé à la société Dataxy de les lui transférer ce que cette dernière avait refusé.

Le département avait donc saisi l’AFNIC afin de voir transférer les noms de domaine litigieux à son profit mais seul le nom de domaine <saône-et-loire.fr>, réservé postérieurement au dépôt de la marque « Saône-et-Loire le département », avait été transféré.

La société Dataxy a alors sollicité l’annulation de cette décision de l’AFNIC devant le Tribunal de grande instance de Nanterre et le département sollicitait à cette occasion le transfert de tous les noms de domaine déposés par la société à son profit et formé une demande reconventionnelle en contrefaçon de sa marque. Le Tribunal avait accueilli les demandes du département et Dataxy avait interjeté appel.

La Cour d’appel de Versailles avait rejeté le 14 mars 2017 la demande d’annulation du transfert du nom de domaine « saône-et-loire.fr », estimant que ce nom de domaine, en reprenant la marque du département « saône-et-loire le département », créait un risque de confusion sur l’origine des services.

Devant la Cour de cassation la société arguait que son activité de géo-référencement constituait une offre de services sur le territoire de Saône-et-Loire et qu’elle justifiait ainsi d’un intérêt légitime lui permettant de conserver le nom de domaine litigieux.

La Cour de cassation rejeta le pourvoi et décida en ces termes que « les règles gouvernant l’attribution des noms de domaine sur internet, qui respectent tant les principes de liberté de communication et de liberté d’entreprendre que les droits de propriété intellectuelle, n’ont ni pour objet ni pour effet de restreindre le droit du titulaire de marque d’interdire l’usage sans son consentement, dans la vie des affaires, d’un signe identique ou similaire à la marque, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux pour lesquels elle est enregistrée, si cet usage porte atteinte à la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir aux consommateurs la provenance des produits ou des services, en raison d’un risque de confusion dans l’esprit du public, sauf les effets de l’intérêt légitime et de la bonne foi quant au renouvellement de l’enregistrement de noms de domaine sur internet ».

Il faut en déduire que, dès lors que le nom de domaine désigne une collectivité territoriale l’offre de service aurait dû être proposée précisément sur le territoire de Saône-et-Loire pour que l’intérêt légitime de la société Dataxy soit reconnue. Or en l’espèce, cette société proposait des annonces immobilières dans toute la France.

Cet arrêt, qui s’inscrit dans le prolongement de l’arrêt « LAGUIOLE » (Cass. Cproom., 4 oct. 2016, n° 14-22245, PB) marque le renforcement de la protection des marques des collectivités territoriales et accentue les conditions nécessaires afin de pouvoir exploiter leur nom puisque non seulement le titulaire d’un tel nom de domaine devra justifier de l’utilisation réelle de ce nom de domaine mais de plus, son intérêt légitime ne pourra être reconnu que si l’offre proposée l’est sur le territoire de la collectivité dont le nom est exploité à titre de nom de domaine.