Les installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) : le régime de déclaration des travaux de restauration écologique validé

Par une décision en date du 31 décembre 2024, le Conseil d’Etat s’est à nouveau prononcé sur la saga contentieuse qui a porté sur la nouvelle rubrique 3.3.5.0 de la nomenclature IOTA relative aux travaux de restauration écologique des cours d’eau (cf. notre article sur le sujet).

En effet, pour faire suite à l’annulation par le Conseil d’Etat le 31 octobre 2022 de la rubrique 3.3.5.0 relative aux travaux de restauration de la continuité écologique des cours d’eau au motif qu’elle ne prévoyait qu’un régime de déclaration, le décret n° 2023-907 du 29 septembre 2023 a été adopté pour réintégrer cette rubrique. Ce décret ne prévoyait toutefois toujours qu’un régime de déclaration et avait été à nouveau contesté.

Le Conseil d’Etat valide la légalité de ce décret, en relevant :

–           Tout d’abord, que l’objectif de cette rubrique est de simplifier la procédure pour les « projets favorables à la protection des milieux aquatiques, au renouvellement de la biodiversité et au rétablissement de la continuité écologique dans les bassins hydrographiques » ;

–           Et que sont exclus de cette rubrique les travaux de modification ou de suppression des ouvrages, tels que les barrages ou les digues, susceptibles de présenter des dangers pour la sécurité publique ou d’accroître le risque d’inondation.

Le juge considère également que ce décret ne porte pas atteinte au principe de non-régression et qu’il ne contrevient pas à la gestion équilibrée de l’eau.

Le décret du 29 septembre 2023 est ainsi validé par le juge.

Révision du Paquet « Sécurité maritime » pour des transports sûrs, propres et modernes : adoption de 4 nouvelles directives

UE, Directive 2024/3100 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2024 modifiant la directive 2009/21/CE concernant le respect des obligations des États du pavillon

UE, Directive 2024/3101 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2024 modifiant la directive 2005/35/CE en ce qui concerne la pollution causée par les navires et l’introduction de sanctions administratives en cas d’infractions

UE, Directive 2024/3017 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2024 modifiant la directive 2009/18/CE du Parlement européen et du Conseil établissant les principes fondamentaux régissant les enquêtes sur les accidents dans le secteur des transports maritimes et abrogeant le règlement (UE) n° 1286/2011 de la Commission

 

Le nouveau « Paquet maritime » a été révisé et a pour objectif de parvenir à un juste équilibre entre, la nécessité de garantir un niveau élevé de qualité des transports maritimes et la nécessité de préserver la compétitivité du secteur européen des transports maritimes, tout en maintenant des coûts raisonnables pour les opérateurs et les administrations des États membres.

Les États membres ont jusqu’au 6 juillet 2027 au plus tard pour transposer les dispositions dans leur législation nationale en ce qui concerne les 3 premières directives à l’exception de la directive relative aux enquêtes sur les accidents qui devra être transposée en droit national au plus tard le 27 juin 2027.

1-         Directive relative à la pollution causée par les navires

Cette directive intègre les normes internationales, notamment la convention MARPOL, pour une meilleure protection environnementale et pour sanctionner efficacement les rejets illégaux de substances polluantes. Pour cela, elle élargit son champ d’application à de nouvelles catégories de rejets, telles que :

  • les eaux usées ;
  • les résidus d’épuration des gaz d’échappement ;
  • les substances nuisibles transportées en colis.

Ce cadre juridique renforcé a pour objectif d’assurer des sanctions cohérentes et dissuasives pour protéger le milieu marin de l’Union.

2-         Directive relative au respect des obligations des États du pavillon

La directive clarifie les responsabilités des États du pavillon concernant la conformité des navires avec les conventions internationales. Elle met à jour la législation pour s’aligner sur le Code d’application des instruments de l’OMI (« Code III » de l’OMI) et renforcer les inspections des navires immatriculés.

Par exemple, l’utilisation accrue des solutions numériques est encouragée pour améliorer l’efficacité administrative, notamment pour la délivrance de certificats électroniques et de leurs outils de vérification.

3-         Directive relative au contrôle par l’État du port

Le contrôle par l’État du port est modernisé pour vérifier la conformité des navires étrangers aux normes internationales et européennes en s’alignant sur le protocole d’entente de Paris et les conventions de l’Organisation maritime internationale (OMI).

Ainsi, la directive a pour objectif de mettre en place des inspections harmonisées et efficaces pour garantir la sécurité maritime et la protection de l’environnement.

A titre d’exemple, les grands navires de pêche de plus de 24 mètres bénéficieront d’un régime volontaire de contrôle pour renforcer leur sécurité et celle de leur équipage.

4-         Directive relative aux enquêtes sur les accidents

La directive révisée a pour objectif d’améliorer la sécurité des navires de pêche, incluant dorénavant ceux de moins de 15 mètres, afin de pouvoir mener des enquêtes harmonisées en cas d’accidents graves (entrainant la perte de vies humaines). Elle vient également clarifier les définitions et procédures juridiques pour une gestion rapide et cohérente des enquêtes.

Les organismes d’enquête vont bénéficier de capacités renforcées pour agir avec compétence et indépendance. Aussi, l’indépendance des organismes et la confidentialité de leurs conclusions sont renforcées, réduisant les charges administratives.

La Cour des comptes estime que l’accès aux délégations de service public est limité dans certains secteurs notamment celui du transport de voyageurs

Dans son rapport « Les délégations de gestion de services publics locaux » publié le 19 décembre 2024, la Cour dresse un état des lieux sévère des délégations de service public (« DSP ») en estimant notamment que le nombre d’entreprises susceptibles d’être candidates à des DSP est limité dans certains secteurs notamment celui du transport de voyageurs.

Elle met en exergue plusieurs causes :

  • La structure oligopolistique des marchés dans lesquels interviennent les délégations de service public (transport collectif de voyageurs, eau, assainissement, déchets, parkings) limite le nombre d’entreprises susceptibles de se porter candidates.

Ces secteurs présentent un faible niveau de concurrence, avec souvent une ou deux offres en réponse aux consultations.

Ces inquiétudes sont également partagées par Régions de France en tant qu’autorité organisatrice de la mobilité ferroviaire qui s’inquiète, « de l’absence de concurrence potentielle lors des prochaines procédures de mise en concurrence du secteur, avec un risque fort que le contrat de concession soit attribué à des conditions financières défavorables, réinterrogeant ainsi l’équilibre économique du contrat » ;

  • L’asymétrie des informations communiquées favorise l’entreprise titulaire d’une DSP (délégataire sortant), limite la compétitivité des offres concurrentes.

En effet, la position dominante que l’accès à l’information sensible procure au délégataire peut lui être particulièrement utile pour la reconduction des contrats, privant ses concurrents d’un même niveau d’information que lui ;

  • Les pratiques des collectivités telles que l’absence d’allotissement, une durée de mise en concurrence inadéquate peuvent restreindre la concurrence.

RGPD et transport ferroviaire : prohibition de la collecte de données relatives à la civilité des clients pour l’achat d’un titre de transport

Par un arrêt du 9 janvier 2025, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé que les données relatives à la civilité des clients ne sont pas une donnée nécessaire pour l’achat d’un titre de transport et qu’une telle collecte est contraire au règlement UE 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (ci-après, « RGPD »).

En l’espèce, le différend est survenu en raison d’une contestation par l’association Mousse auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (ci-après, « CNIL ») de la pratique de la société SNCF Connect obligeant systématiquement ses clients à indiquer leur civilité (« Monsieur » ou « Madame ») lors de l’achat de titres de transport en ligne.

Cette association estimait que cette obligation était contraire au RGPD, notamment, au regard du principe de minimisation des données. En effet, l’association soutenait que la mention de la civilité, qui correspond à une identité de genre, ne semble pas nécessaire pour l’achat d’un titre de transport ferroviaire. L’association a donc saisi la CNIL mais cette dernière a décidé de rejeter cette réclamation, considérant que cette pratique ne constituait pas un manquement au RGPD. Saisi d’un recours contre cette décision, le Conseil d’État a posé une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne pour savoir si la collecte des données de civilité des clients, limitée aux mentions « Monsieur » et « Madame », peut se voir qualifiée de licite et conforme, notamment, au principe de minimisation des données, lorsque cette collecte vise à permettre une communication commerciale personnalisée à l’égard de ces clients, conformément aux usages couramment admis en la matière.

Dans son arrêt du 9 janvier 2025, La Cour rappelle que, conformément au principe de minimisation des données, qui constitue une expression du principe de proportionnalité, les données collectées doivent être adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées.

En outre, la Cour rappelle qu’au titre de son article 6, le RGPD prévoit une liste exhaustive et limitative des cas dans lesquels un traitement de données à caractère personnel peut être considéré comme étant licite. Ainsi au titre de l’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, sous b) et f) sont respectivement considérés comme licites, le traitement de données à caractère personnel nécessaire à l’exécution d’un contrat auquel la personne concernée est partie ou aux fins des intérêts légitimes poursuivis par le responsable de ce traitement ou par un tiers.

S’agissant de la première de ces deux justifications, la Cour souligne que, pour qu’un traitement de données puisse être considéré comme nécessaire à l’exécution d’un contrat, ce traitement doit être objectivement indispensable afin de permettre l’exécution correcte de ce contrat. Or, au cas particulier, la Cour juge qu’une « telle communication ne doit pas nécessairement être personnalisée en fonction de l’identité de genre du client concerné ». En effet, « la personnalisation de contenus n’apparaît pas nécessaire pour offrir des services à un client lorsque ces services peuvent, le cas échéant, lui être fournis sous la forme d’une alternative équivalente n’impliquant pas une telle personnalisation, de sorte que cette dernière n’est pas objectivement indispensable à une finalité faisant partie intégrante desdits services qu’une personnalisation de la communication commerciale fondée sur une identité de genre présumée en fonction de la civilité du client ne paraît pas objectivement indispensable afin de permettre l’exécution correcte d’un contrat de transport ferroviaire. »

S’agissant de la seconde condition, la Cour indique qu’aux termes de sa jurisprudence constante, trois conditions cumulatives doivent être réunies pour que les traitements de données à caractère personnel qu’elle vise soient licites à savoir

  • la poursuite d’un intérêt légitime par le responsable du traitement ou par un tiers ;
  • la nécessité du traitement des données à caractère personnel pour la réalisation de l’intérêt légitime poursuivi ;
  • la condition que les intérêts ou les libertés et les droits fondamentaux de la personne concernée par la protection des données ne prévalent pas sur l’intérêt légitime du responsable du traitement ou d’un tiers.

Bien qu’il appartienne à la juridiction de renvoi – soit en l’espèce au Conseil d’État – d’apprécier si ces conditions sont remplies, la Cour a toutefois donné des indications à cette dernière dans le cadre de son arrêt.

Or, elle estime que ces conditions ne sont pas réunies au cas particulier. D’une part, elle considère « qu’il semble qu’une personnalisation de la communication commerciale puisse se limiter au traitement des noms et prénoms des clients » et que « leur civilité et/ou leur identité de genre étant une information qui ne paraît pas strictement nécessaire dans ce contexte, notamment à la lumière du principe de minimisation des données ». D’autre part, la Cour relève que « le client d’une entreprise de transport n’est pas censé s’attendre à ce que cette entreprise traite des données relatives à sa civilité ou à son identité de genre dans le contexte de l’achat d’un titre de transport ». Et, elle invite la juridiction de renvoi à rechercher si au regard de l’ensemble des circonstances pertinentes, les libertés et droits fondamentaux desdits clients sont susceptibles de prévaloir sur l’intérêt commercial, notamment en raison d’un risque de discrimination fondée sur l’identité de genre.

Précision des conditions dans lesquelles les lignes locales à faible trafic utilisées pour le fret peuvent également être utilisées par des services de transport de voyageurs

Parution du décret définissant les conditions dans lesquelles les lignes locales à faible trafic d’une longueur ne dépassant pas 100 kilomètres qui sont utilisées pour le trafic de transport de marchandises (ci-après « fret ») peuvent également être utilisées pour des services de transport de voyageurs.

En vue de développer les lignes locales à faible trafic, l’article L. 2122-2 du Code des transports exclut du champ d’application des principes d’indépendance du gestionnaire d’infrastructure certaines petites lignes de fret qui sont utilisées, dans une certaine mesure, pour des services de transport de voyageurs.

Le présent décret précise les conditions dans lesquelles cette dérogation, conçue pour les petites lignes dédiées au fret, continue de s’appliquer lorsque la ligne est aussi mise à disposition de services de transport de voyageurs.

D’abord, les lignes ferroviaires sont considérées comme dédiées au trafic de fret « lorsqu’au moins la moitié des capacités d’infrastructure est utilisée effectivement, au cours de l’horaire de service, pour des services de transport de marchandises ».

Ensuite, les circulations de fret bénéficient d’une priorité sur les services de transport de voyageurs car comme indiqué, « les capacités d’infrastructure […] qui ne sont pas sollicitées de manière effective pour les services de transport de marchandises, peuvent être affectées à des services de transport de voyageurs ».

Compétence de l’Autorité de Régulation des Transports (ART) pour connaitre des différends relatifs à la tarification de l’accès au réseau ferroviaire

Par une décision en date du 21 novembre 2024 l’Autorité de Régulation des Transports (ci-après « ART ») abroge la décision par laquelle elle s’était déclarée incompétente pour connaitre des différends relatifs à la tarification de l’accès au réseau ferroviaire prévue dans le Document de Référence du Réseau (ci-après « DRR »).

Pour rappel, le réseau ferroviaire correspond à une « infrastructure essentielle » c’est-à-dire une installation indispensable à l’exploitation du service public de transport ferroviaire de voyageurs par les entreprises ferroviaires.

Autrement dit, le seul moyen pour ces entreprises d’exploiter leurs services de transport de voyageurs est d’accéder aux lignes.

Pour cette raison, en application de l’article 10 de la Directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 « établissant un espace ferroviaire unique européen » transposé à l’article L. 2122-9 du Code des transports, les entreprises ferroviaires se voient accorder un droit d’accès à l’ensemble du réseau ferroviaire donnant lieu à la perception de redevances d’infrastructures.

Les modalités d’accès à l’infrastructure et notamment les principes et les montants des redevances sont précisés par un Document de Référence du Réseau (ci-après « DRR »), établit chaque année par le gestionnaire d’infrastructure (c’est-à-dire SNCF Réseau) en application de l’article L. 2122-5 du Code des transports.

C’est à propos du niveau des redevances liées à l’utilisation du réseau prévue par le DRR qu’un différend est né entre une Région et SNCF Réseau et que l’ART s’est déclarée incompétente par une première décision en date du 21 décembre 2023[1].

En substance, selon l’ART, les articles L. 1263-2 et L. 2133-5 du Code des transports, en ce qu’ils prévoient la compétence de l’ART pour connaitre des différends relatifs à la mise en œuvre des redevances, excluent toute compétence de l’autorité pour statuer sur une demande de règlement de différends portant sur la fixation des tarifs des redevances figurant dans le DRR.

Il s’avère toutefois qu’entre temps, la Cour de cassation, saisie par la Région à la suite d’une décision d’incompétence de l’ART de connaître des différends relatifs à la tarification prévue dans le DRR 2020, a considéré que : en conférant à l’ART la compétence pour rendre des avis préalables sur la tarification de l’accès au réseau ferroviaire, les dispositions du Code des transport n’ont pas entendu exclure la compétence de l’ART pour régler les différends liés à cette même tarification[2].

Tirant les conséquences de cet arrêt, l’ART se reconnait compétente pour connaître des différends relatifs à la tarification de l’accès au réseau ferroviaire.

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[1] Autorité de Régulation des Transports, Décision n° 2023-065 en date du 21 décembre 2023.

[2] Cour de cassation, 16 octobre 2024, n° 22-23.219.

L’Autorité de la concurrence sanctionne des pratiques anticoncurrentielles entre les compagnies Air Antilles et Air Caraïbes à hauteur de 14.570.000 d’euros.

Par une décision en date du 4 décembre 2024, l’Autorité de la concurrence a sanctionné les compagnies aériennes Air Antilles (société CAIRE), Air Caraïbes ainsi que la société Miles plus, société de conseil spécialisée dans le secteur aérien, pour s’être entendues sur les prix et sur l’offre de transport (créneaux horaires et fréquences). Cette entente concerne des liaisons de la région Caraïbes, à savoir celles reliant Pointe-à-Pitre et Fort-de-France ainsi que celles entre chacune de ces deux aéroports et Saint-Martin, Sainte-Lucie et Saint-Domingue.

Plus précisément, entre les années 2015 et 2019, ces trois sociétés ont mis en œuvre quatre ententes permettant aux deux compagnies aériennes, Air Antilles et Air Caraïbes, d’augmenter significativement leur tarif et de réduire leurs offres tout en préservant leurs parts de marché respectives. Pour ce faire, les sociétés se sont entendues sur les prix et conditions tarifaires de leurs billets et sur la réduction de leurs offres pour pouvoir se répartir les créneaux horaires.

L’Autorité de la concurrence souligne le caractère particulièrement grave de ces ententes compte tenu de la situation de duopole de ces acteurs sur un territoire insulaire avec une clientèle captive soumise, en outre, à un coût de la vie nettement plus élevé que sur le territoire métropolitain.

Dans ces conditions, les compagnies aériennes ont été sanctionnées à hauteur de 13 millions d’euros pour Air Caraïbes et 1,5 million d’euros pour la société mère d’Air Antilles, K’Finance. Quant à la société de conseil, elle est tenue de verser la somme de 70.000 euros.

Le juge administratif rappelle ses compétences en matière de traversée des propriétés privées par les ouvrages électriques

La Cour administrative de Douai a rendu le 19 décembre 2024 un arrêt éclairant sur les règles de compétences juridictionnelles en matière d’occupation des propriétés privées par les ouvrages de transport d’électricité.

Dans cette affaire, la société propriétaire d’une parcelle sur laquelle est implanté un ouvrage de transport d’électricité (à savoir une ligne électrique haute tension) sollicitait en première instance de la part du Tribunal administratif de Rouen :

  • D’ordonner à la société gestionnaire du transport d’électricité (RTE) de procéder aux travaux d’enfouissement de cette ligne haute tension à une profondeur conforme avec la convention de servitude ayant autorisé son implantation (et donc, en d’autres termes, de procéder au déplacement de cet ouvrage qu’elle considère irrégulièrement implanté) ;
  • De condamner la société à lui verser une indemnisation en réparation du préjudice résultant du refus de RTE de déplacer cette ligne haute tension (cette demande lui ayant déjà été formulée par la société propriétaire lors d’échanges précontentieux), préjudice qui trouverait selon la requérante son origine dans la mauvaise application de la convention de servitude susvisée ainsi que sur le fondement des dommages de travaux publics.

Par un jugement du 15 décembre 2022, le tribunal avait alors rejeté l’ensemble de ces demandes indemnitaires et à fin d’injonction en considérant qu’elle relevait toutes de la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.

Pour sa part, la Cour administrative de Douai, tout en confirmant la compétence du juge judiciaire pour statuer sur le respect de la convention de servitude et ses conséquences indemnitaires, examine les autres demandes de la société requérante, qu’elle considère comme relevant bien de sa compétence :

Ainsi, la Cour commence par rejeter la demande de la société tendant à la réparation des préjudices découlant de l’application de la convention de servitude en cause qui est une convention de droit privé comme étant portée devant une juridiction incompétente.

Elle procède ensuite à l’analyse des conclusions tendant au déplacement de la ligne haute tension.

En effet, cette demande, tirée du caractère irrégulier de l’implantation de cet ouvrage public indépendamment de l’engagement de la responsabilité contractuelle du gestionnaire pour mauvaise exécution du contrat de servitude, relève bien des juridictions administratives (voir en ce sens concernant un ouvrage de la distribution d’électricité CE, 14 juin 2019, Société ERDF, n° 414458).

Toutefois, après analyse du caractère irrégulier de l’implantation de l’ouvrage et de sa régularisation comme des inconvénients en résultant pour le propriétaire (selon les conditions jurisprudentielles fixées en la matière et rappelées ici), la Cour rejette sur le fond la demande de déplacement de l’ouvrage en cause.

Elle considère enfin que la demande de réparation présentée par la société requérante sur le fondement de la responsabilité pour dommage de travaux publics de la société RTE doit également être rejetée.

Au total, cet arrêt permet de rappeler aux propriétaires sollicitant le retrait ou le déplacement d’ouvrages électriques irrégulièrement implantés sur leur parcelle que si leurs conclusions tendant à tirer les conséquences de la mauvaise application d’une convention de servitude doivent être portées devant le juge judiciaire, ils sont bien recevables à demander aux juridictions administratives d’enjoindre les gestionnaires à réparer les conséquences de l’atteinte  portée à leur propriété privée.

Une subtilité parfois mal maîtrisée par certaines juridictions de première instance en présence de conventions de servitudes.

La Commission de régulation de l’énergie (CRE) décide d’une nouvelle (et a priori ultime) augmentation du Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Electricité TURPE 6

CRE, Délibération du 6 janvier 2025 portant projet de décision sur l’évolution exceptionnelle du TURPE 6 HTB au 1er février 2025

Cour des comptes, Le financement du coût des réseaux publics d’électricité par les usagers : le Turpe, Rapport d’observations définitives de la Cour des comptes publié le 18 décembre 2024

La Commission de régulation de l’énergie (CRE), à qui il revient de fixer les méthodes utilisées pour établir les tarifs d’utilisation des réseaux publics de transport et de distribution d’électricité[1] (TURPE), prépare depuis plusieurs mois l’arrivée des TURPE 7 pour une entrée en vigueur au 1er août 2025.

Ainsi que nous le commentions dans notre précédente lettre d’actualités, la CRE a ainsi lancé plusieurs consultations publiques afin de consulter les acteurs du marché de l’énergie sur la structure tarifaire de ces nouveaux tarifs.

Par deux consultations du 11 octobre 2024 dernier  ici commentées portant respectivement sur le TURPE HTA BT (applicable au réseau de distribution) et sur le TURPE HTB (applicable au réseau de transport), la CRE a notamment interrogé ces derniers sur l’opportunité d’une évolution exceptionnelle des TURPE 6 du 1er février 2025 jusqu’à l’entrée en vigueur du TURPE 7 quelques mois plus tard.

Une proposition qui, selon les contributions prochainement publiées sur le site de la CRE, semble avoir reçu l’assentiment des acteurs consultés.

En effet, par deux délibérations du 6 janvier 2025, la CRE décide de l’augmentation exceptionnelle des TURPE 6 à partir du 1er février 2025 de + 7,70 % pour le TURPE HTA BT et de + 9,61 % TURPE HTB.

Selon la Commission, cette évolution a vocation à permettre l’apurement anticipé du compte de régularisation des charges et des produits (dit « CRCP ») des gestionnaires des réseaux de transport et de distribution face aux charges supportées lors de la crise énergétique. Ce lissage étant justifié par la CRE comme permettant d’éviter une évolution du TURPE 7 lors de son entrée en vigueur en août prochain.

Cette évolution arrive peu de temps après la dernière augmentation du TURPE 6 en novembre 2024 (de +4,81 % pour le TURPE HTA BT et de +4,99 % pour le TURPE HTB) alors décidée par la CRE malgré l’opposition du ministre de l’Economie et ici commentée.

Elle est également à accueillir à l’aune des récentes observations formulées par la Cour des comptes dans son rapport d’observation définitives sur le financement du coût des réseaux publics d’électricité par les usagers publié le 18 décembre dernier.

Cette dernière y constate en effet que le cadre régulatoire offert par les TURPE 5 et 6 ont permis aux gestionnaires RTE et Enedis une sur-rémunération allant au-delà de leurs charges nettes comptables.

Dans ce rapport, la Cour des comptes avait d’ailleurs adressé diverses recommandations à la CRE afin de mettre en cohérence la rémunération des gestionnaires avec le faible niveau de risque qu’ils supportent du fait de leur position monopolistique sur les marchés en cause.

C’est donc une forme de première réponse de la CRE à la Cour des comptes.

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[1] Article L.341-3 du Code de l’énergie

Solarisation des toitures et des parcs de stationnement : précisions sur l’exonération des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et des infrastructures où stationnent des véhicules de transports de marchandises dangereuses

Arrêté du 4 décembre 2024 définissant les conditions d’exemptions des installations classées pour la protection de l’environnement et des infrastructures où stationnent des véhicules de transports de marchandises dangereuses au regard des obligations d’installation d’ombrières et de procédés de production d’énergies renouvelables

Deux arrêtés relatifs à l’exonération de l’obligation de solarisation des toitures et parcs de stationnement des installations classées pour la protection de l’environnement (ci-après, ICPE) ont été publiés au Journal officiel du 14 décembre 2024.

Pour mémoire et en synthèse, les obligations de solarisation des toitures et des parcs de stationnement résultent des textes suivants :

  • article L. 171-4 du Code de la construction et de l’habitation : obligation d’équiper les bâtiments neufs ou faisant l’objet d’extensions ou de rénovations lourdes ;
  • article L. 111-19-1 du Code de l’urbanisme : obligation d’équiper les nouveaux parcs de stationnement ;
  • article 40 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 : obligation d’équiper les parcs de stationnement existants.

Pour le détail des conditions fixées par ces dispositions, nous vous renvoyons à nos précédentes brèves, disponibles ici et .

De nombreux cas d’exonération à l’obligation de solarisation sont ainsi prévus par ces textes. Ces cas d’exonération ont notamment été détaillés par leurs textes d’application.

En premier lieu, s’agissant de l’obligation de solarisation des bâtiments neufs, faisant l’objet d’une extension ou  lourdement rénovés, l’article 171-4 du Code de la construction et de l’habitation  dispose : « Un arrêté du ministre chargé des Installations classées définit également les cas dans lesquels tout ou partie de l’obligation prévue au I est écartée ou soumise à des conditions de mise en œuvre spécifiques pour les installations soumises à autorisation, enregistrement ou déclaration en application du livre V du Code de l’environnement, dès lors que les obligations sont incompatibles avec les caractéristiques de l’installation ».

Ainsi, par arrêté du 5 février 2020, la ministre de la Transition Écologique et Solidaire a précisé ses conditions d’application. L’arrêté du 21 novembre 2024 ici commenté vise à modifier cet arrêté du 5 février 2020 à la suite des évolutions législatives introduites par la loi du 10 mars 2023 précitée.

On retiendra notamment parmi les modifications apportées que :

  • de nouvelles ICPE sont concernées par l’exonération (les ICPE relevant des rubriques 1413,1414,1416,1434,1435 ainsi que 2925 et 3670) ;
  • l’article 3 du 5 février 2020 est modifié et détaille les modalités de calcul de la surface de toiture à prendre en compte pour application de l’article L. 171-5 du Code de la construction et de l’habitation relatif à l’obligation de solarisation des bâtiments existants au 1er juillet 2023, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2028.

En second lieu, aux termes du II. de l’article 40 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023, l’obligation de solarisation des parcs de stationnement n’est pas applicable lorsqu’il existe des contraintes techniques ou de sécurité qui ne permettent pas la réalisation de l’obligation.

Le décret n° 2024-1023 du 13 novembre 2024 portant application de l’article 40 précité détaille ces cas d’exonération et indique que les parcs où stationnent des véhicules transportant des marchandises dangereuses ainsi que les parcs de stationnement constituant une ICPE sont exonérés de l’obligation, dans des conditions fixées par arrêté. C’est l’objet de l’arrêté du 4 décembre 2024 ici commenté.

Ainsi, d’abord, l’article 1er de l’arrêté du 4 décembre 2024 précise les surfaces exclues du calcul de la superficie à prendre en compte pour déterminer la soumission du parc de stationnement à l’obligation de solarisation.

Ensuite, l’article 2 de l’arrêté apporte des précisions sur les parcs où stationnent des véhicules transportant des marchandises dangereuses et les parcs de stationnement constituant une ICPE qui sont exonérés de l’obligation.

Les parcs où stationnent des véhicules transportant des marchandises dangereuses sont les « parcs de stationnement extérieurs constituant des installations classées pour la protection de l’environnement au titre des rubriques 1413, 1414, 1416, 1421, 1434, 1435 et 2925 de la nomenclature annexée à l’article R. 511-9 du Code de l’environnement en raison de l’impossibilité technique de ne pas aggraver un risque technologique ».

Et les parcs de stationnement constituant une ICPE sont ceux « destinés à l’accueil des véhicules porteurs de la signalisation orange prévue au chapitre 5.3 de l’accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par route et mentionnés au 2.3.2 de l’annexe I à l’arrêté du 29 mai 2009 ».

Autoconsommation collective étendue : un nouveau critère de proximité géographique taillée sur mesure pour les communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI)

La Commission de régulation de l’énergie (ci-après, CRE) a pris une délibération sur un projet d’arrêté relatif au critère de proximité géographique de l’autoconsommation collective étendue.

Ce projet d’arrêté prévoit de créer un nouveau périmètre d’autoconsommation collective étendue et de modifier les seuils de puissances aujourd’hui fixés par l’arrêté du 21 novembre 2019 fixant le critère de proximité géographique de l’autoconsommation collective étendue.

Pour rappel, aux termes de l’article L. 315-2 du Code de l’énergie, une opération d’autoconsommation collective peut, d’une part, être menée au sein d’un même bâtiment (on parle alors d’autoconsommation collective simple) ou, d’autre part, relever de l’autoconsommation collective dite étendue, sous réserve de respecter les critères de proximité géographique et de puissance fixés par arrêté.

L’autoconsommation collective étendue peut couvrir différents périmètres : 2 kilomètres ou bien par dérogation 10 kilomètres, voire 20 kilomètres, sur autorisation ministérielle. Les conditions pour pouvoir bénéficier de la dérogation au critère de distance sont prévues par l’arrêté du 21 novembre 2019 fixant le critère de proximité géographique de l’autoconsommation collective étendue (voir notre brève présentant les conditions des dérogations existantes).

La délibération de la CRE ici commentée porte sur un projet d’arrêté ayant pour objet de créer un nouveau périmètre dérogatoire pour l’autoconsommation collective étendue et de modifier les seuils de puissance applicables à ces opérations.

En premier lieu, le projet d’arrêté objet de la délibération de la CRE prévoit de créer une nouvelle dérogation au critère de proximité géographique dédiée aux collectivités locales. Aux termes du projet d’arrêté, la nouvelle dérogation sera applicable à tout projet d’autoconsommation collective étendue respectant les critères suivants :

  • l’un des producteurs ou des consommateurs participants est une commune ou un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ;
  • l’ensemble des producteurs ou des consommateurs participant sont des organismes publics ou privés exerçant une mission de service public ou des sociétés d’économie mixtes locales mentionnées à l’article L. 1522-1 du Code général des collectivités territoriales ;
  • les points de soutirage et d’injection sont situés exclusivement dans le ressort géographique de la commune ou de l’EPCI à fiscalité propre participant au projet ou auquel adhèrent la ou les communes participant au projet ;
  • la puissance cumulée des installations de production est inférieure à 10 MW.

Ainsi, le projet d’arrêté consacre un nouveau périmètre d’autoconsommation collective étendue permettant aux participants à un opération d’être distants de plusieurs dizaines de kilomètres, pourvu qu’ils soient situés sur la même commune ou le même EPCI et que cette collectivité participe également à l’opération.

On s’interrogera toutefois sur la limitation de la dérogation aux EPCI à fiscalité propre plutôt qu’à tout EPCI et syndicat mixte.

En outre, cette dérogation est calibrée spécialement pour les acteurs publics ou parapublics dans la mesure où les participants à l’opération d’autoconsommation, autres que les communes et EPCI à fiscalité propre, ne peuvent être que des organismes publics ou privés exerçant une mission de service public, ou des sociétés d’économie mixtes locales.

La CRE accueille favorablement cette nouvelle dérogation avec certaines réserves. Rappelant les préconisations de ces précédentes délibérations soulignant que les opérations d’autoconsommation collective doivent garder une taille modeste, la CRE recommande :

  • qu’un critère de proximité soit tout de même fixé ;
  • que la puissance maximale soit rabaissée à 8 MW, de sorte que les projets conservent une taille modeste mais que les consommateurs participant puissent bénéficier de production éolienne de taille modérée.

En second lieu, le projet d’arrêté prévoit également une augmentation de 3 MW à 5 MW de la puissance cumulée maximale des installations de production au sein d’une opération d’autoconsommation collective sur le territoire métropolitain continental.

Toutefois, soulignant que « La capacité actuelle de 3 MW permet de garantir que les projets d’autoconsommation collective correspondent à des enjeux locaux », la CRE s’oppose à l’augmentation du seuil de puissance de 3 MW à 5 MW des installations de production.

La ministre en charge de l’Énergie n’est pas liée par la délibération de la CRE, reste que ces recommandations sont très fréquemment suivies. La publication prochaine de l’arrêté modifiant l’arrêté du 21 novembre 2019 fixant le critère de proximité géographique de l’autoconsommation collective étendue permettra de connaitre les conditions exactes d’application du nouveau périmètre dérogatoire de proximité géographique, enjeu local très attendu.

Ajustements des règles de calcul des résultats minimaux à respecter au titre de la Réglementation environnementale 2020 (RE2020)

Après trois années d’application, la réglementation environnementale des nouvelles constructions de bâtiments (« RE2020 ») a fait l’objet d’aménagements pour tenir compte des contraintes opérationnelles formulées par les acteurs de la construction, à l’occasion d’une concertation organisée par le ministère de la Transition Écologique.

Pour rappel, dans la poursuite des trois objectifs de sobriété énergétique, de limitation de l’impact carbone et d’amélioration du confort des bâtiments en cas de forte chaleur, l’article L. 171-1 du Code de la construction et de l’habitation (ci-après « CCH ») est venu fixer des résultats minimaux de performance que la construction et la rénovation de bâtiments doivent atteindre. Ces performances sont mesurées à l’aide d’indicateurs et de méthodes de calcul[1] notamment précisées par l’annexe de l’article R. 172-4 du même code et ont vocation à être renforcées graduellement tous les trois ans.

La première étape triennale du renforcement de ces performances énergétiques et environnementale aurait révélé des « situations particulières jugées trop contraignantes et pour lesquelles des ajustements mineurs des règles de calcul des normes à respecter sont nécessaires pour garantir la soutenabilité des exigences de la RE 2020 »[2]. En d’autres termes, si le bilan de la mise en œuvre de la RE2020 demeure satisfaisant, certaines obligations de résultat ont nécessité quelques assouplissements retranscrits dans le décret n° 2024-1258 du 30 décembre 2024 modifiant les exigences de performance énergétique et environnementale des constructions de bâtiment en France métropolitaine dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2025.

Le décret modifie cinq niveaux d’exigence de performance énergétique et environnementale rappelés par la notice du décret : l’optimisation de la conception énergétique du bâti indépendamment des systèmes énergétiques mis en œuvre ; la limitation de la consommation d’énergie primaire, la limitation de l’impact sur le changement climatique associé à ces consommations ; la limitation de l’impact des composants du bâtiment sur le changement climatique ; la limitation des situations d’inconfort dans le bâtiment en période estivale.

Dans ce cadre, l’article 1er du décret vient modifier les dispositions de l’article R. 172-3 du CCH. Désormais, les constructions de bâtiments d’une surface inférieure à 50 m² et les extensions de bâtiments d’une surface inférieure à 150 m² peuvent faire l’objet d’exigences alternatives de performance en remplacement des résultats minimaux fixés par l’article R. 172-4 du CCH. Ces exigences pourront être fixées par arrêté des ministres en fonction des catégories de bâtiment.

L’article 2 du décret vient quant à lui modifier et assouplir les valeurs maximales ou la méthodologie de calcul des indicateurs prévus par l’annexe à l’article R. 172-4 du CCH – et qui permettent d’apprécier l’atteinte des résultats minimaux – notamment de certains des coefficients de modulation participant à leur calcul.

En outre, l’article 2 du décret introduit un nouveau coefficient Misurf_moy de modulation de la valeur maximum de l’indicateur Icconstruction_max – relatif à l’impact de la construction sur le changement climatique en lien avec les composants du bâtiment – selon la surface moyenne des logements. Il définit ainsi une modulation valable pour les logements collectifs inférieurs à 40m².

En outre, le ministère de la Transition Écologique a indiqué que certains des assouplissements des exigences de performance mis en œuvre par le décret ne concernent que des « typologies spécifiques » ou « atypiques » de constructions nouvelles. Surtout, il a précisé que les modifications du décret n’ont pas vocation à modifier l’ambition ou les grands équilibres de la RE2020.

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[1] A ce sujet, voir notre analyse de la décision du Conseil d’Etat en date du 29 mars 2022, Association La Filière Béton, Fédération française des tuiles et briques et autre, n° 457143

[2]  Conseil national de l’évaluation des normes, délibération n° 24-11-07-03460, à propos du projet de décret modifiant les exigences de performance énergétique et environnementale des constructions de bâtiment en France métropolitaine

Prolongement des conditions d’accès à MaPrimeRénov’ en 2025

Arrêté du 4 décembre 2024 modifiant l’arrêté du 14 janvier 2020 relatif à la prime de transition énergétique

 

Afin de poursuivre et favoriser le recours au dispositif MaPrimeRénov’ pour le financement des travaux de rénovation énergétique des logements, le décret n° 2024-1143 du 4 décembre 2024 est venu prolonger d’un an, jusqu’au 31 décembre 2025, certaines conditions d’éligibilité qui avaient été assouplies par le décret n° 2024-249 du 21 mars 2024.

Sont ainsi prolongés d’un an en vertu des articles 1 et 2 du décret :

  • l’accès au parcours par geste pour les maisons individuelles classées « F » et « G » en France métropolitaine : à compter du 1er janvier 2026, il ne sera donc plus possible de recourir au dispositif MaPrimeRénov’ pour la rénovation énergétique de ces logements ;
  • la dispense de l’obligation de réaliser un geste de chauffage éligible à la prime pour accéder au parcours par geste: ce ne sera donc qu’à partir du 1er janvier 2026 que les propriétaires auront l’obligation de changer d’équipement de chauffage ou de production d’eau chaude pour recourir au dispositif MaPrimeRénov’.

Dans le même but, l’arrêté du 4 décembre 2024 reporte au 1er janvier 2026 l’obligation de fournir un diagnostic de performance énergétique pour toute demande de prime de transition énergétique par geste en France métropolitaine.

A noter toutefois que l’arrêté précité opère une baisse des avances de fonds fournies aux ménages sur le montant prévisionnel des travaux. Sont ainsi diminués :

  • de 70 % à 50 % le niveau maximum des avances délivrées aux ménages aux ressources « très modestes » dans le cadre de la prime de transition énergétique par geste ;
  • le taux d’aide du « Parcours Accompagné » – autrement dit dans le cadre de l’accompagnement par un opérateur agréé au titre de l’article L. 232-3 du Code de l’énergie – des ménages aux ressources supérieures de 30 % à 10 % pour les projets permettant un gain de 2 classes au DPE, de 35 % à 15 % pour les projets permettant un gain de 3 classes, et 35 % à 20 % pour les projets permettant un gain de 4 classes ou plus ;
  • de 30 % en moyenne les forfaits relatifs à l’installation d’équipements fonctionnant au bois ou autres biomasses ;

Pour finir, le texte précise la définition de la dépense éligible au dispositif MaPrimeRénov’, qui correspond au coût des travaux ou prestations de rénovation énergétique et au coût induits par ces derniers.

L’ensemble de ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2025 et s’appliquent aux demandes de primes déposées à compter de cette même date.

Toutefois, en dépit de la prolongation en 2025 du dispositif MaPrimeRénov’ dans les conditions identiques à celles prévues en 2024, relevons que la ministre du Logement a précisé le 9 janvier dernier que tant que le budget 2025 « n’est pas voté, les délais de paiement de MaPrimeRénov’ […] vont être rallongés pour tous les dossiers qui n’ont pas été instruits avant le 1ᵉʳ janvier 2025 ».

Travaux à proximité des réseaux : modifications de plusieurs textes réglementaires

Par un arrêté du 23 décembre 2024 portant modification de plusieurs arrêtés relatifs à l’exécution de travaux à proximité des réseaux plusieurs textes réglementaires afférents à ces travaux ont été amendés, à savoir :

  • L’ arrêté du 22 décembre 2010 fixant les modalités de fonctionnement du guichet unique prévu à l’article L. 554-2 du Code de l’environnement et à l’article L. 50 du code des postes et des communications électroniques
  • L’arrêté du 23 décembre 2010modifié relatif aux obligations des exploitants d’ouvrages et des prestataires d’aide envers le téléservice « reseaux-et-canalisations.gouv.fr »
  • L’arrêté du 19 février 2013 encadrant la certification des prestataires en géoréférencement et en détection des réseaux et mettant à jour des fonctionnalités du téléservice « reseaux-et-canalisations.gouv.fr »

L’arrêté du 23 décembre 2024 a été adopté dans le prolongement du Décret n° 2024-1022 du 13 novembre 2024 portant diverses mesures relatives à la sécurité des réseaux, des canalisations de transport ou de distribution de gaz, d’hydrocarbures ou de produits chimiques et de certains équipements à risques entré en vigueur le 1er janvier 2025.

Le texte met à jour les fonctionnalités du guichet unique relatif à l’exécution de travaux à proximité des réseaux, afin notamment de permettre un accès à certaines informations pour les autorités publiques locales compétentes pour l’établissement et la mise à jour des fonds de plan employés pour la transmission des données de localisation des ouvrages.

L’arrêté intègre également les évolutions afférentes au traitement des ouvrages abandonnés.

Les nouvelles dispositions entrent en vigueur le 1er janvier 2025, à l’exception des dispositions relatives à la réalisation des audits auprès des entités disposant du certificat « prestataire en localisation des réseaux », qui entrent en vigueur le 1er avril 2025.

Précisions de la Commission de Régulation de l’Énergie sur les tarifs réglementés de vente de l’électricité des sites de plus de 36 kVA

La loi n° 2024-330 du 11 avril 2024 visant à protéger le groupe Électricité de France (EDF) d’un démembrement a élargi l’éligibilité des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE) à compter du 1er février 2025 en supprimant le plafond de 36 kVA pour la puissance souscrite des sites.

De ce fait, tous les consommateurs résidentiels, les très petites entreprises (ci-après « TPE ») et les petites collectivités pourront donc souscrire un tarif réglementé auprès du fournisseur historique de leur zone de desserte, sans contrainte de puissance.

La délibération de la Commission de Régulation de l’Energie du 21 novembre 2024, ici commentée, a pour objet d’exposer la synthèse des réponses à la consultation publique conduite entre juillet et septembre 2024 sur les modalités d’établissement des TRVE pour ces sites souscrivant des puissances supérieures à 36 kVA et de communiquer les orientations de la CRE sur la méthode de construction des TRVE pour lesdits sites. Ces orientations concernent les choix des profils pour l’année 2025, des postes horosaisonniers pour les tarifs jaunes et verts, de la référence pour les coûts commerciaux, de lissage de la capacité, de prise en compte du TURPE.

Pour rappel, les TRVE sont construits à partir d’un « empilement » de coûts représentatifs de l’activité de fourniture d’un fournisseur s’approvisionnant sur les marchés de gros.

La CRE précise qu’elle effectuera un premier retour d’expérience de la mise en place des TRVE pour les sites supérieurs à 36 kVA avant le mouvement tarifaire de début 2026.

Dispositif de financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale (Facé) : publication d’un décret modifiant les règles d’attribution et de gestion du dispositif

Le décret n° 2024-1249 du 30 décembre 2024 relatif aux aides pour l’électrification rurale a été publié au Journal officiel du 31 décembre 2024, et vient remplacer le précédent décret relatif à ce sujet (décret n° 2020-1561 du 10 décembre 2020).

Le décret du 30 décembre 2024 affiche l’objectif de faire évoluer les règles d’attribution et de gestion du dispositif de « financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale » (Facé) « en vue de rechercher une plus grande performance du dispositif et notamment une dynamisation de ses aides pour faciliter l’accueil de la transition énergétique sur les réseaux publics de distribution d’électricité ».

Parmi les principales évolutions issues de ce décret, on peut mentionner les éléments suivants.

Tout d’abord, le décret apporte des modifications aux catégories de travaux pouvant faire l’objet d’une subvention (le terme de catégorie se substitue à celui de « programme »), afin de s’adapter aux évolutions du réseau et centrer les aides sur les énergies renouvelables, ainsi aux termes de l’article 1er :

  • La pose en façade des réseaux n’est plus couverte par le dispositif,
  • L’enfouissement des réseaux est inclus lorsqu’il est fait pour des raisons environnementales et non plus esthétiques comme prévu précédemment.
  • L’enfouissement de réseaux n’est plus couvert par défaut, en revanche, la sécurisation des réseaux à fils nus et les travaux sur lignes à très haute tension le sont.
  • Le renforcement anticipé de départs de réseaux endommagés par les intempéries est quant à lui remplacé par l’amélioration de la résilience des réseaux face aux aléas climatiques.
  • Enfin, le décret prévoit que les opérations de production décentralisée en sites isolés ou en zone non interconnectée ne seront désormais couvertes que si elles utilisent des sources d’électricité renouvelable.

Ensuite, le décret modifie le mécanisme prévoyant la possibilité d’attribuer des aides pour des travaux réalisés sur des territoires en principe non éligibles puisque l’article 2 V du décret prévoit la possibilité d’accorder des aides à des travaux ne répondant pas aux critères d’attributions (nombre d’habitants de la commune ou localisation géographique) dès lors que ces derniers :

  • Font partie d’une opération se déroulant partiellement sur le territoire d’une commune éligible au dispositif Facé ;
  • Sont indispensables à la bonne fin de l’ensemble de l’opération ;
  • Et que le gestionnaire du réseau de distribution d’électricité a été saisi préalablement et ne s’est pas opposé à l’attribution de l’aide.

Les motifs liés à l’isolement, au caractère dispersé de leur habitat ou de leur densité de population qui existaient précédemment ne sont pas maintenus (article 2 2° du décret du 10 décembre 2020 désormais abrogé).

Le décret précise désormais à son article 3 que les aides ne pourront servir à couvrir des dépenses foncières, limite qui ne figurait pas dans le décret antérieur.

Enfin, le décret cherche également à laisser plus de largesse au ministre chargé de l’Énergie dans l’attribution des aides afin que ce dernier puisse inciter les autorités organisatrices du réseau de distribution d’électricité à se diriger vers un mode de gestion se voulant plus efficace et à un meilleur usage de la subvention accordée.

Aussi, le décret prévoit à son article 3 – pour certaines sous-catégories de travaux (renforcement, extension et enfouissement des réseaux ainsi que sécurisation des réseaux à fils nus) – que le ministre chargé de l’Énergie puisse minorer ou majorer la dotation départementale en fonction du degré de réalisation de l’objectif de regroupement de la maîtrise d’ouvrage des réseaux publics de distribution d’électricité au niveau du département.

Dans le même esprit, l’article 6 du décret autorise désormais le ministre à se fonder sur le fait qu’une subvention précédemment accordée ait fait l’objet d’une demande de remboursement pour réduire le montant des dotations accordées dans le futur au même bénéficiaire.

Certificat d’Économie d’֤Énergie : le Conseil d’État précise le pouvoir de sanction du ministre chargé de l’Énergie

CE, 20 décembre 2024, n° 475348

Le Conseil d’État est venu apporter des précisions sur le pouvoir de sanction dont dispose le ministre chargé de l’Énergie en matière de certificat d’économie d’énergie (CEE) dans deux arrêts rendus le 20 décembre 2024.

Tout d’abord, dans un premier contentieux, la société requérante demandait au Conseil d’État d’annuler la décision par laquelle le ministre de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires l’avait notamment sanctionné par l’annulation de certains de ses certificats d’économies d’énergies (ci-après CEE).

A l’appui de cette demande, la société soulevait une question prioritaire de constitutionnalité (ci-après QPC), arguant que le 3° de l’article L. 222-2 du Code de l’énergie, qui donne pouvoir au ministre chargé de l’Énergie pour sanctionner toute personne ayant indument bénéficié de CEE par leur annulation, méconnaîtrait l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 garantissant le principe de l’individualisation des peines.

En effet, la société considérait que les dispositions du Code de l’énergie ne permettaient pas au ministre de moduler le volume des CEE annulés en fonction de la gravité du manquement commis et de la situation de l’individu sanctionné.

Rappelons que la saisine du Conseil constitutionnel via une QPC est soumise à un contrôle préalable du Conseil d’État qui doit vérifier que la disposition législative faisant l’objet de la question est bien applicable au litige et que la question posée présente un caractère nouveau et sérieux.

En l’espèce, par l’arrêt en date du 20 décembre 2024, n° 496114, ici commenté, le Conseil d’État refuse de transmettre cette QPC au Conseil constitutionnel, en considérant que cette dernière n’est pas nouvelle et ne présente pas un caractère sérieux.

En effet, le Conseil d’État rappelle les éléments suivants :

  • Le principe d’individualisation des peines ne s’oppose pas au fait que le législateur fixe les sanctions réprimant certains manquements et n’implique pas que la peine soit exclusivement déterminée sur la base de la personnalité de l’auteur de l’infraction.
  • Les dispositions du Code de l’énergie prévoient un éventail de sanctions suffisamment large pour permettre au ministre chargé de l’Énergie de prononcer une sanction qui soit modulée en fonction de la gravité du manquement et des circonstances de l’espèce.
  • Concernant les dispositions relatives à l’annulation des CEE, elles prévoient une sanction proportionnée au manquement – annulation du même nombre de CEE que ceux qui n’auraient pas dû être délivrés – et permettent donc déjà un traitement individualisé des peines.
  • Quoi qu’il en soit, le juge administratif, dès lors qu’il est saisi d’une décision de sanction prononcée par le ministre chargé de l’Énergie, peut modifier la sanction du ministre dans l’hypothèse où l’application des dispositions du Code de l’énergie amènerait à ce que cette dernière soit disproportionnée au cas individuel de la personne sanctionnée.

La société affirmait également que la sanction d’annulation des CEE constituait une violation du droit de propriété protégé par l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 en tant que ladite sanction porte sur d’autres certificats d’économies d’énergie que ceux concernés par le manquement, alors que ces certificats ont été délivrés au terme d’opérations conformes. Le Conseil d’État réfute également ce raisonnement, en considérant que le droit de propriété n’est pas opposable à une disposition prévoyant une sanction ayant le caractère d’une punition.

La QPC déposée par la société Hellio Solutions ne passe donc pas le filtre du Conseil d’État.

Ensuite, par un arrêt du 20 décembre 2024, n° 475348, le Conseil d’État a fait usage de son pouvoir de modification des sanctions prononcées par le ministre chargé de l’Énergie. Ce n’est toutefois pas sur le fondement d’une disproportion de la sanction que le juge est intervenu, mais en raison d’un manquement au principe du contradictoire survenu au cours de la procédure de sanction (laquelle est soumise au respect dudit principe, cf. article L. 222-5 du Code de l’énergie).

En effet, le ministre chargé de l’Énergie avait modifié les motifs de sa décision de sanction sans laisser l’occasion à la personne sanctionnée du fait de la non-conformité des opérations réalisées, de répondre à ces nouveaux griefs.

La décision de sanction est donc annulée dans cette mesure.

La légalité du Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux du bassin Loire-Bretagne

TA d’Orléans, 16 décembre 2024, n° 2203289

TA d’Orléans, 16 décembre 2024, n° 2300959

TA d’Orléans, 16 décembre 2024, n° 2203432

TA d’Orléans, 16 décembre 2024, n° 2201835

Le Tribunal administratif d’Orléans, dans cinq décisions en date du 16 décembre 2024, s’est prononcé sur la légalité du Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) du bassin Loire-Bretagne pour la période 2022-2027.

D’abord, dans les affaires relatives au Groupement des exploitants de carrières du département de la Loire et autres (affaire n° 2201938) et au Syndicat de valorisation et de promotion des étangs de Poitou-Charentes Vendée (affaire n° 2203289), le tribunal a rappelé l’absence de caractère prescriptif des dispositions du SDAGE, qui doit se borner à fixer des orientations avec lesquelles les autres documents et décisions intervenant dans le domaine de l’eau doivent seulement être compatibles. Il a ainsi annulé certaines dispositions du document ayant une portée réglementaire et impérative, instaurant non pas un simple rapport de compatibilité mais de conformité entre ce schéma d’une part et ces documents et décisions d’autre part.

Le tribunal a, en revanche, rejeté les requêtes de la Fédération françaises des associations de sauvegarde des moulins (affaire n° 2300959) et celle de syndicats d’exploitants agricoles (affaire n° 2203432) dans lesquels étaient en cause la préservation de l’usage de l’eau pour la production hydro-électrique et pour l’irrigation.

Il a, d’une part, considéré que les orientations prises en matière de protection ou de rétablissement de la continuité écologique n’incitaient pas à la destruction des ouvrages hydrauliques et opéraient une conciliation équilibrée entre les divers intérêts protégés, eu égard à la marge d’appréciation des auteurs du SDAGE.

D’autre part, il a jugé que les auteurs du SDAGE avaient déterminé les aménagements et les dispositions nécessaires pour prévenir la détérioration et assurer la protection et l’amélioration de l’état des eaux et milieux aquatiques et a écarté les moyens visant à contester les dispositions édictées en matière de protection des eaux contre les pollutions, notamment agricoles.

Enfin, le tribunal a rejeté le recours du département du Morbihan en considérant que le département ne justifiait pas d’un intérêt à agir contre le SDAGE. Celui-ci ne disposant d’aucune compétence propre en matière de gestion de l’eau ou plus généralement en matière de protection de l’environnement ou d’aménagement du territoire qui serait susceptible d’être directement affectée par les orientations du SDAGE (affaire n° 2201835).

La prise en compte des atteintes à l’environnement lors de la prolongation de concessions minières

CC, 18 février 2022, Décision QPC n° 2021-971

CE, 19 octobre 2023, n° 456736

Dans un arrêt du 26 novembre 2024, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a confirmé la légalité du refus implicite opposé par le ministre de l’Économie, des Finances et de la relance le 25 janvier 2019 aux demandes de la société Compagnie minière Montagne d’Or de prolongation de ses deux concessions minières en Guyane.

Ces concessions, accordées par le Préfet de la Guyane en 1946 et 1948, arrivaient à leur terme le 31 décembre 2018. L’ordonnance n° 2011-91 du 20 janvier 2011 fixait quant à elle les conditions de prolongation des concessions minières.

Cependant, ces dispositions législatives ont été déclarées contraires à la Constitution, et plus particulièrement à la Charte de l’environnement, par une décision en date du 18 février 2022 n° 2021-971 QPC du Conseil constitutionnel en ce qu’elles ne prévoyaient pas que l’administration devait prendre en compte les conséquences environnementales de la prolongation d’une concession minière avant de se prononcer.

En l’espèce, contrairement aux décisions du Tribunal administratif de la Guyane en date du 24 décembre 2020 n° 1900403 et de la cour administrative de Bordeaux du 16 juillet 2021 n° 21BX00294, 21BX00716 et n° 21BX00295, 21BX00715, et suite à la décision de renvoi du Conseil d’Etat en date du 19 octobre 2023 n° 456736, 456738, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté la demande de la société Compagnie minière Montagne d’Or tendant à l’annulation de la décision implicite en date du 21 janvier 2019.

Le Conseil d’Etat, s’appuyant sur la décision du Conseil constitutionnel, avait considéré que le juge ne pouvait faire application d’un régime juridique contraire à la Constitution et que l’impact sur l’environnement des travaux d’exploitation projetés sur le périmètre de la concession devait être pris en compte lors de l’instruction de la demande d’autorisation de prolongation de la concession et non pas que dans le cadre de l’instruction de la demande d’autorisation de travaux.

Ainsi, au regard du nouveau cadre juridique applicable, la cour administrative de Bordeaux a jugé que le risque d’atteintes graves à l’environnement que le projet présentait devait être pris en compte et que la nature extrêmement polluante et l’importance de la dimension industrielle du projet justifiaient le refus opposé par l’administration.

Pollution du littoral et carence du préfet dans la mise en œuvre de ses pouvoirs de police

TA de Marseille, 5ème, 16 décembre 2024, n °2203506

Le Tribunal administratif de Marseille, au sein de deux décisions en date du 16 décembre 2024, s’est prononcé sur la possibilité d’engager la responsabilité de l’Etat en cas de carence fautive dans la mise en œuvre de ses pouvoirs de polices spéciales au titre des installations classées pour la protection de l’environnement et au titre des sites et sols pollués afin de procéder à la dépollution et à la mise en sécurité de sites pollués.

Deux associations, l’association « Fédération d’action régionale pour l’environnement » (Fare Sud) et l’association « Union Calanques Littoral » (UCL), ont saisi le tribunal administratif, d’une part, d’une demande d’injonction au Préfet des Bouches-du-Rhône de procéder ou faire procéder aux opérations de dépollution des sols de l’ancien site industriel de Legré-Mante et, plus largement, sur le littoral Sud de Marseille et, d’autre part, d’une demande de réparation au titre des préjudices écologiques subis par les écosystèmes et du préjudice moral subis par les associations.

Concernant la demande d’indemnisation, le tribunal a tenu pour établis des préjudices écologiques et a considéré que les associations étaient recevables à agir afin de demander la réparation de ces préjudices eu égard aux actions en faveur de la protection de la santé publique, de la nature et de l’environnement mentionnées dans leurs statuts.

Cependant, le tribunal a rejeté les demandes des associations Fare Sud et UCL tendant à la réparation des préjudices écologiques, en l’absence de lien direct et certain entre les carences fautives de l’Etat et ces préjudices.

Le tribunal a cependant condamné l’Etat au versement d’un euro symbolique aux associations pour réparer le préjudice moral né de ses carences fautives dans la mise en œuvre des pouvoirs de police spéciale.

S’agissant par ailleurs de la demande d’injonction, le juge a enjoint au préfet de mettre en œuvre ses pouvoirs de police spéciale pour imposer des prescriptions nécessaires à la dépollution du site de Legré-Mante ainsi que de prendre des mesures pour les faire respecter. Aussi, il a enjoint au préfet d’instituer des servitudes d’utilité publique sur le site, dans un délai de dix mois.

S’agissant du littoral Sud de Marseille, il a enjoint au préfet de prendre toutes les mesures utiles de nature à réparer le préjudice moral et prévenir l’aggravation des dommages en procédant à la dépollution et à la mise en sécurité des sites pollués dans un délai n’excédant pas le 30 juin 2028.