Energie
le 11/01/2024

Solarisation et végétalisation des toitures : publication des textes d’application de l’article L. 171-4 du Code de la construction et de l’habitation

Arrêté du 19 décembre 2023 portant application de l'article L. 171-4 du code de la construction et de l'habitation et fixant les caractéristiques minimales que doivent respecter les systèmes de végétalisation installés en toiture

Arrêté du 19 décembre 2023 portant application de l’article L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation, fixant la proportion de la toiture du bâtiment couverte par un système de végétalisation ou de production d’énergies renouvelables, et précisant les conditions économiquement acceptables liées à l’installation de ces systèmes

Les textes d’application de l’article L. 171-4 du Code de la construction et de l’habitation ont été publiés aux journaux officiels des 20 et 29 décembre 2023. Déjà commentés lorsqu’ils étaient à l’état de projets dans notre lettre d’actualité juridique de juin (voir notre article ici), un décret et deux arrêtés viennent préciser le cadre réglementaire applicable à l’obligation de solariser ou de végétaliser les toitures des bâtiments.

Pour rappel, l’obligation de solariser ou de végétaliser les toitures a été introduite par l’article 47 de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat. Elle a par suite été précisée et étendue par l’article 101 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Cette obligation est désormais codifiée à l’article L. 171-4 du Code de la construction et de l’habitation (ci-après CCH). Les trois textes ici commentés viennent préciser le champ d’application de l’obligation et les cas d’exonérations (les deux arrêtés étant fortement similaires aux projets présentés en juin, nous renvoyons pour le commentaire de ceux-ci à notre précédente brève).

En premier lieu, concernant le champ d’application de l’obligation, plusieurs cas doivent être distingués. De première part, l’obligation de solariser ou de végétaliser les toitures s’applique aux constructions de bâtiments de plus de 500 mètres carrés d’emprise au sol. L’article L. 171-4 précité liste les bâtiments concernés par destination. Ainsi, seront soumis à l’obligation les « constructions de bâtiments ou parties de bâtiment à usage commercial, industriel ou artisanal, aux constructions de bâtiments à usage d’entrepôt, aux constructions de hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale et aux constructions de parcs de stationnement couverts accessibles au public, lorsqu’elles créent plus de 500 mètres carrés d’emprise au sol ».

Aux termes de l’article 41 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, les bâtiments administratifs, les hôpitaux, les équipements sportifs, récréatifs ou de loisir et les bâtiments ou parties de bâtiments scolaires et universitaire seront également concernés par l’obligation à compter du 1er janvier 2025.

Le décret n°2023-1208 du 18 décembre 2023 présentement commenté apporte des précisions sur les bâtiments concernés par l’obligation. En codifiant le nouvel article R. 171-32 dans le Code de la construction et de l’habitation, le décret précise que la notion de bâtiment doit être entendue au sens de l’article L. 111-1 du CCH, soit comme « un bien immeuble couvert et destiné à accueillir une occupation, une activité ou tout autre usage humain ». L’article précité indique par ailleurs que l’obligation ne s’applique que si plus de la moitié du bâtiment est affectée à l’une des destinations visées par l’article L. 171-4 précité.

De deuxième part, l’obligation de solariser ou de végétaliser s’applique également aux parcs de stationnement, tout en étant adaptée à ces surfaces particulières. En effet, L’article L. 171-4 du CCH dispose : « les aires de stationnement associées aux bâtiments ou parties de bâtiments mentionnés au II du présent article, lorsqu’elles sont prévues par le projet, doivent également intégrer des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation et préservant les fonctions écologiques des sols. ». En outre, cette obligation résulte également de l’article L. 111-19-1 du Code de l’urbanisme, qui doit être lu en combinaison avec l’article L. 171-4 précité.

On retiendra que les parcs de stationnement de plus de 500 mètres carrés doivent notamment prévoir des dispositifs de végétalisation favorisant la perméabilité des sols ainsi que des dispositifs d’ombrage, doté de dispositifs de production d’énergie renouvelable lorsqu’ils sont matérialisés par des ombrières.

Le décret vient préciser les catégories de parcs de stationnement concernées par l’obligation. Ainsi, aux termes du nouvel article R. 111-25-1, les parcs de stationnement concernés « sont ceux qui ne sont pas intégrés à un bâtiment ». De plus, le décret détaille la superficie devant être prise en compte pour le calcul de la surface du parc de stationnement concernant les dispositifs de gestion des eaux pluviales (article R. 111-25-3) et les dispositifs d’ombrage (article R. 111-25-7).

De troisième part, l’obligation de solariser ou de végétaliser les toitures s’applique également aux cas d’extension et de rénovation lourde. Si l’article L. 171-4 du CCH précise que l’obligation ne concerne que les extensions et rénovations lourdes ayant une emprise au sol de plus de 500 mètres carrés (ou 1000 mètres carrés pour les bâtiments à usage de bureau), il ne donnait pas de définition de la notion de rénovation lourde.

L’article R. 171-33 du CCH, codifié par le décret commenté, donne désormais une définition aux travaux de rénovation lourde, qui sont « ceux qui ont pour objet ou qui rendent nécessaire le renforcement ou le remplacement d’éléments structuraux concourant à la stabilité ou à la solidité du bâtiment ».

En outre, aux termes de l’article L. 171-4 du CCH, les rénovations lourdes de parcs de stationnement peuvent également être concernées par l’obligation de solariser ou de végétaliser. Le nouvel article R. 111-25-2 du Code de l’urbanisme, codifié par le décret, définit ces rénovations lourdes comme « le remplacement total du revêtement de surface au sol sur une superficie représentant au moins la moitié de la superficie du parc de stationnement ».

En deuxième lieu, le décret détaille les cas d’exonérations de l’obligation de solariser ou de végétaliser et fixe la procédure applicable. Le IV. de l’article L. 171-4 du CCH prévoit que l’autorité compétente en matière d’autorisation d’urbanisme peut prévoir que tout ou partie des obligations ne s’appliquent pas :

« 1° Aux constructions et extensions ou rénovations lourdes de bâtiments ou de parties de bâtiment qui, en raison de contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales, ne permettent pas l’installation des procédés et dispositifs mentionnés au I, notamment si l’installation est de nature à aggraver un risque ou présente une difficulté technique insurmontable ;

2° Aux constructions et extensions ou rénovations lourdes de bâtiments ou parties de bâtiment pour lesquels les travaux permettant de satisfaire cette obligation ne peuvent être réalisés dans des conditions économiquement acceptables ».

Le décret détaille tour à tour les cas d’exonération envisageables pour les travaux de construction, d’extension ou de rénovation lourde ; il en va ainsi des exonérations liées à des :

  • Contraintes patrimoniales : article R. 171-34 du CCH ;
  • Coûts disproportionnés : article R. 171-36 du CCH (le calcul de la disproportion des coûts est prévu par l’arrêté du 19 décembre 2023 portant application de l’article L. 171-4 du Code de la construction et de l’habitation, fixant la proportion de la toiture du bâtiment couverte par un système de végétalisation ou de production d’énergies renouvelables, et précisant les conditions économiquement acceptables liées à l’installation de ces systèmes) ;
  • Coûts de production d’énergie renouvelable excessifs : article R. 171-37 du CCH ;
  • Contraintes techniques : articles R. 171-38 à R. 171-40 du CCH ;
  • Contraintes architecturales : articles R. 171-38 et R. 171-41 du CCH ;
  • Contraintes de sécurité : article R. 171-42 du CCH.

Les exonérations relatives aux parcs de stationnement sont prévues par les nouveaux articles R. 111-25-4 à R. 111-25-6 et R. 111-25-9 à R. 111-28-15 du Code de l’urbanisme. L’exonération pourra donc être accordée par l’autorité compétente en matière d’autorisation d’urbanisme. Le pétitionnaire devra joindre à sa demande d’autorisation une attestation comprenant un résumé non technique, les éléments qu’il estime nécessaire de produire et les éléments de justification propres à chaque cas d’exonération, prévus par les articles précités.

En troisième et dernier lieu, on précisera que les dispositions du décret et des deux arrêtés sont entrées en vigueur au 1er janvier 2024 (article 4 du décret, article 4 de l’arrêté relatif aux caractéristiques minimales que doivent respecter les systèmes de végétalisation installés en toiture et article 6 de l’arrêté précisant les conditions économiquement acceptables liées à l’installation de ces systèmes).

Enfin, aux termes de l’article 1er de l’arrêté du 19 décembre 2023 portant application de l’article L. 171-4 du Code de la construction et de l’habitation, fixant la proportion de la toiture du bâtiment couverte par un système de végétalisation ou de production d’énergies renouvelables, et précisant les conditions économiquement acceptables liées à l’installation de ces systèmes, l’obligation de solariser ou de végétaliser s’appliquera progressivement sur une surface de plus en plus grande selon le calendrier suivant fixé à l’article 1er de l’arrêté du 19 décembre 2023 précité :

« Les obligations résultant du premier alinéa du I de l’article L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation sont réalisées sur une surface au moins égale à 30 % de la surface de toiture du bâtiment construit ou rénové à compter du 1er janvier 2024, à 40 % à compter du 1er juillet 2026, et à 50 % à compter du 1er juillet 2027 ».