Environnement, eau et déchet
le 09/11/2023
Tadjdine BAKARI-BAROINI
Emmanuelle BARON
Julie CAZOU

Loi industrie verte : focus sur les dispositions visant à accélérer les implantations industrielles et la réhabilitation des friches

Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte

La loi industrie verte a été conçue afin de répondre à plusieurs objectifs. Elle ambitionne notamment de lutter contre la désindustrialisation de la France, au regard du constat de la perte de 2,5 millions d’emplois industriels en France ces cinquante dernières années.

Toutefois, un autre constat justifie l’ambition affichée de décarbonisation de l’industrie, puisque ce secteur représente actuellement 18 % des émissions de gaz à effet de serre nationales.

L’ambition affichée de ce texte est donc de faire de la France le leader des technologies vertes en Europe, afin de concurrencer les Etats-Unis et la Chine. L’investissement dans le développement de cette industrie doit permettre un gain environnemental, par la décarbonisation effective de l’industrie, ainsi qu’un gain économique, à travers notamment la réindustrialisation du pays et la création d’emplois.

La loi industrie verte a été publiée au Journal officiel du 24 octobre 2023 et comporte 40 articles articulés en trois titres. Seul le premier titre, relatif aux mesures destinées à faciliter et à accélérer les implantations industrielles et à réhabiliter les friches sera ici présenté, mais il est précisé que le titre II du projet de loi porte sur les enjeux environnementaux de la commande publique et le titre III porte sur le financement de l’industrie verte.

Ce titre Ier comporte donc des mesures principalement foncières, urbanistiques et environnementales en vue de faciliter et accélérer l’implantation des sites industriels. Ce focus sera l’occasion de revenir sur les principales dispositions de ce titre I de la loi industrie verte.

1. La planification industrielle

Les premiers articles de la loi industrie verte prévoient diverses dispositions visant à encadrer et mieux organiser la planification industrielle sur le territoire national et régional.

a. La stratégie nationale pour une industrie verte pour la période 2023-2030

Tout d’abord, afin de planifier la transition écologique et la décarbonisation de l’industrie à l’échelle nationale, l’article 2 de la loi prévoit que l’Etat doit élaborer une « stratégie nationale pour une industrie verte pour la période 2023-2030 ».

L’article 2 énumère le contenu et la fonction de cette stratégie nationale :

  • Elle détermine les filières stratégiques qui doivent être implantées ou développées prioritairement sur le territoire national ;
  • Elle favorise la recherche et l’expérimentation de nouveaux produits et procédés contribuant à la transition écologique ;
  • Elle recense les besoins nationaux en matériaux et en produits.
  • Elle précise les besoins en matière de formation professionnelle au regard des filières industrielles stratégiques ainsi déterminées ;
  • Elle évalue les besoins énergétiques nécessaires au développement industriel, en particulier ceux liés aux conséquences de l’électrification des usages.
  • Elle tient compte des objectifs et des trajectoires nationaux en matière de réduction de l’artificialisation des sols et de décarbonation ;
  • Elle définit les engagements attendus de l’ensemble des acteurs concernés, notamment en termes de réduction des incidences environnementales.

b. Une planification du foncier industriel à l’échelle régionale

L’article 1 modifie l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales afin d’inciter une planification du foncier industriel à l’échelle régionale.

Cet article prévoit que les SRADDET et autres documents de planification régionale (SDRIF, SAR, PADDUC, etc.) fixent des objectifs de moyen et long terme sur le territoire de la région. Cet article énumère les sujets sur lesquelles portent ces objectifs. Ceux-ci notamment doivent intervenir en matière d’équilibre et d’égalité des territoires, d’habitat, de gestion économe de l’espace, de lutte contre l’artificialisation des sols, etc.

L’article 1 de la loi industrie verte ajoute à cette liste des objectifs fixés par le SRADDET, des objectifs en matière « de développement logistique et industriel, notamment en matière de localisation préférentielle ».  Ces nouveaux objectifs sont fixés pour la première fois dans le SRADDET au plus tard lors de la procédure de modification prévue au VI de l’article 83 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, engagée pour rendre ce schéma compatible avec les objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables établis par le décret prévu à l’article L. 141-5-1 du Code de l’énergie.

2. La maitrise foncière

a. Accroissement des compétences des établissements publics fonciers

Sous le chapitre 1er relatif à la planification industrielle, l’article 3 de la loi relative à l’industrie verte renforce les compétences des établissements publics fonciers de l’Etat et des établissements publics fonciers locaux.

En effet, la loi relative à l’industrie verte énonce que les établissements publics fonciers mettent en place des stratégies foncières afin de mobiliser du foncier et de favoriser le développement durable, la lutte contre l’étalement urbain et la limitation de l’artificialisation des sols, y compris par des actions ou des opérations de renaturation.

La renaturation d’un sol ou désartificialisation consiste, en vertu de l’article L.101-2-1 du Code de l’urbanisme, en des actions ou des opérations de restauration ou d’amélioration de la fonctionnalité d’un sol ayant pour effet de transformer un sol artificialisé en un sol non artificialisé.

L’article 3 de la loi relative à l’industrie verte ajoute que les établissements publics fonciers peuvent contribuer au développement, au maintien ou à la transformation des activités économiques, notamment pour faciliter les projets d’implantations industrielles.

b. Présomption de raison impérative d’intérêt public majeur permettant d’obtenir une dérogation « espèces protégées » pour les DUP ‘industrielles’

Sous le chapitre 5 visant à faciliter et accélérer l’implantation d’industries vertes, l’article 21 de la loi relative à l’industrie verte complète l’article L.122-1 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique et crée un nouvel article L.122-1-1 dans le même Code.

L’article L.122-1 du Code précité régente le cas des déclarations d’utilité publique relatives aux opérations susceptibles d’affecter l’environnement et soumises à ce titre à enquête publique environnementale. Celles-ci sont soumises à l’obligation d’effectuer une déclaration de projet et l’acte déclarant l’utilité publique de l’opération doit être accompagné d’un document exposant les motifs et considérations justifiant ladite utilité publique.

Avec la loi relative à l’industrie verte, ce document devra comporter, le cas échéant, la justification de sa qualification de projet ou d’opération répondant à une raison impérative d’intérêt public majeur.

Et pour cause, le nouvel article L.122-1-1 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique prévoit que pour les déclarations d’utilité publique (DUP) portant sur :

  • Un projet industriel ;
  • Un projet d’infrastructure directement liée à ce projet industriel ;
  • Un projet de création ou de modification d’ouvrages du réseau public de transport d’électricité ayant pour objet le raccordement dudit projet industriel dont la réalisation nécessite ou est susceptible de nécessiter une dérogation dite « espèces protégées », ladite DUP peut, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’Etat, leur reconnaître le caractère d’opération ou de travaux répondant à une raison impérative d’intérêt public majeur pour la durée de validité initiale de la déclaration d’utilité publique et, le cas échéant, pour la durée de prorogation de cette déclaration, dans la limite de dix ans. Cette reconnaissance ne peut être contestée qu’à l’occasion d’un recours dirigé contre la déclaration d’utilité publique, dont elle est divisible. Elle ne peut être contestée à l’appui d’un recours dirigé contre l’acte accordant la dérogation « espèce protégée ».

Ainsi, par détermination de la loi, la loi relative à l’industrie verte instaure une présomption de « raison impérative d’intérêt public majeur » au profit des projets d’installations de d’installations de production d’énergies renouvelables ou de stockage d’énergie dans le système électrique qui satisfont à certaines conditions.

Cette disposition permet ainsi de freiner les annulations contentieuses de dérogations « espèces protégées » du fait d’une absence de raison impérative d’intérêt public majeur.

c. Elargissement du droit de préemption commercial

Sous le chapitre 5 visant à faciliter et accélérer l’implantation d’industries vertes, l’article 22 de la loi relative à l’industrie verte crée un nouvel article L.214-2-1 au Code de l’urbanisme. Cet article s’insère au corpus juridique du droit de préemption commercial.

Il prévoit que ce dernier peut être instauré par délibération motivée, à l’intérieur du périmètre d’une grande opération d’urbanisme mentionnée à l’article L. 312-3 mise en œuvre dans tout ou partie d’une zone d’activité économique, au sens de l’article L. 318-8-1, dont la transformation, notamment afin d’en favoriser la mixité fonctionnelle, est prévue par cette opération d’aménagement.

L’acte décidant de la qualification de grande opération d’urbanisme mentionné à l’article L. 312-4 ou tout acte ultérieur pris dans les mêmes formes peut délimiter les secteurs de la grande opération d’urbanisme dans lesquels ce droit de préemption est instauré, après avis de la commune prévu à l’article L. 312-7.

Par dérogation aux articles L. 214-1 et L. 214-2, dans les secteurs où il est instauré :

1° Sont également soumises au droit de préemption les aliénations à titre onéreux de terrains accueillant ou destinés à accueillir des commerces d’une surface de vente comprise entre 1 000 et 4 000 mètres carrés ;

2° Le délai de rétrocession peut être porté à six ans, et à sept ans en cas de mise en location-gérance du fonds de commerce ou du fonds artisanal.

3. Réforme des procédures d’autorisation environnementale et de consultation du public

Le Chapitre II de la loi opère une réforme de la procédure de consultation du public, et plus largement de l’instruction, des autorisations environnementales.

a. Création d’une nouvelle procédure de consultation du public

L’article 4 de la loi a créé un nouvel article L. 181-10-1 du Code de l’environnement, qui définit une nouvelle procédure hybride de participation du public pour les demandes d’autorisation environnementale entre l’enquête publique et la procédure de participation du public par voie électronique définie à l’article L. 123-19.

Dans l’objectif de raccourcir les délais d’obtention d’une autorisation environnementale, il est désormais prévu que la phase de consultation sera menée concomitamment à la phase d’instruction de la demande d’autorisation environnementale. Ainsi, la consultation du public sera lancée dès que le dossier de demande d’autorisation sera jugé complet et régulier et que le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête sera désigné. Les avis recueillis par l’administration sur la demande d’autorisation seront alors mis à la disposition du public sans délai au fur et à mesure de leur émission.

S’agissant des nouveautés de cette procédure, il peut être mis en avant notamment que :

  • La durée de la consultation est de trois mois, au lieu du minimum de 30 jours actuellement, ou, lorsque l’avis de l’autorité environnementale est requis, d’un mois de plus que le délai imparti à celle-ci pour rendre son avis ;
  • Une réunion publique est organisée, Dans un délai de quinze jours à compter du début de la consultation, avec la participation du pétitionnaire. Une nouvelle réunion publique est organisée en fin de procédure de consultation ;
  • Les réponses apportées par le pétitionnaire au plus tard lors de la réunion de clôture de la consultation sont réputées faire partie du dossier de demande, de même que les éventuelles modifications consécutives du projet, sous réserve qu’elles n’en modifient pas l’économie générale.

Cette procédure sera applicable aux demandes d’autorisation environnementale déposées à compter d’une date fixée par décret, et au plus tard le 24 octobre 2024.

La loi a également eu deux apports en matière de contentieux sur les autorisations environnementales :

  • Elle a tout d’abord créé article L. 123-1 B du Code de l’environnement, selon lequel le juge administratif des référés devra faire droit à toute demande de suspension d’une décision prise sans que la participation du public requise ait eu lieu. Les dispositions similaires qui étaient prévues à l’article L. 123-16 sont supprimées ;
  • L’introduction, lors du passage du texte devant l’assemblée nationale, d’une sanction des recours « abusifs ». Ainsi, l’article L. 181-17 du Code de l’environnement prévoit désormais que lorsqu’un recours contre une autorisation environnementale traduit un comportement abusif et cause un préjudice au bénéficiaire de l’autorisation, le bénéficiaire peut demander au juge administratif de condamner le requérant à lui verser des dommages et intérêts.

b. Mutualisation des procédures en phase amont

L’article 5 de la loi industrie verte a créé un nouvel article L. 121-8-2 du Code de l’environnement, visant à permettra la mutualisation des procédures de débat public ou de concertation préalable.

Cette procédure de mutualisation concerne l’hypothèse où plusieurs projets d’aménagement ou d’équipement susceptibles de relever de l’obligation de saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP) sont envisagés sur un même territoire délimité et homogène au cours des huit ans à venir. Cela permettra ainsi, sauf décision motivée contraire de la CNDP, de dispenser de débat public propre ou de concertation préalable propre les projets sur ce territoire, notamment ceux envisagés ultérieurement sur le même territoire et cohérents avec sa vocation, si leur mise en œuvre débute au cours des huit années suivant la fin de ce débat global ou de cette concertation globale.

4. Economie circulaire

Le Chapitre III de la loi industrie verte vise à favoriser le développement de l’économie circulaire.

Pour cela, la loi exclut qu’un produit puisse être qualifié de déchets dans différentes situations :

  • L’article L. 541-4-3 du Code de l’environnement prévoit désormais, en son paragraphe I ter, que n’a pas le statut de déchet la substance ou l’objet élaboré dans une installation de production qui utilise pour tout ou partie des déchets comme matière première. Différentes conditions doivent toutefois être remplies. Ainsi, il faut que cette substance ou cet objet soit similaire à la substance ou à l’objet qui aurait été produit sans avoir recours à des déchets et que l’exploitant de l’installation de production respecte les conditions de la sortie du statut de déchet. Il est également prévu que l’exploitant doive transmettre à l’autorité administrative compétente les éléments de justification nécessaires.
  • L’article L. 541-5 dispose également à présent qu’une substance ou un objet produit au sein d’une plateforme industrielle définie à l’article L. 515-48 et dont la production n’était pas le but premier du processus ne prend pas le statut de déchet lorsque certaines conditions sont remplies. Il est alors nécessaire que l’utilisation de la substance ou de l’objet au sein de cette même plateforme industrielle soit certaine, qu’il n’ait pas d’incidence globale nocive pour l’environnement ou la santé humaine et que les justificatifs requis aient été transmis à l’autorité administrative.

En outre, de nouvelles hypothèses d’amendes administratives sont introduites au sein d’un nouvel article L. 541-42-3 du Code de l’environnement, pour les transferts, exportation et importation irrégulières de déchets. Les sanctions pénales applicables en matière de gestion des déchets sont également alourdies.

5. Réhabilitation des friches pour un usage industriel

Le chapitre IV vise la réhabilitation des friches pour un usage industriel.

On peut indiquer notamment à cet égard que l’article L. 556-1 du Code de l’environnement est modifié pour rendre obligatoire la délivrance d’attestations au sein des demandes de permis de construire ou d’aménager déposées à partir du 1er juillet 2024 pour tous les projets situés sur des terrains ayant accueilli des ICPE en l’absence d’éléments montrant que l’installation a été régulièrement réhabilitée.

Par ailleurs, la loi prévoit en son article 10 que le Gouvernement doit remettre au Parlement, avant le 24 avril 2024, un rapport sur les moyens nécessaires à la requalification des friches de plus de dix ans en faveur de la réindustrialisation et des enjeux de lutte contre l’artificialisation.

Les dispositions portent également sur la cessation d’activités des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), les pouvoirs de sanction du préfet, les sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation, et la prise en compte des friches par le SCOT.

a. Modifications en matière de cessation d’activités

Dans ce but, l’article 8 modifie le régime de la cessation d’activités des ICPE afin de faciliter cette procédure.

La loi industrie verte modifie ainsi les articles L. 512-6-1 et L. 512-7-6 du Code de l’environnement sur :

  • La détermination de l’usage futur du site en cas de défaut d’accord sur l’usage lorsqu’une ICPE soumise à autorisation ou enregistrement est mise à l’arrêt définitif. Désormais, faute d’accord sur ce point, l’usage retenu pour déterminer l’état dans lequel devra être mis le site est un usage comparable à celui des installations autorisées. Cette disposition vise à éviter la prescription par le Préfet d’une remise en état « maximaliste » du site ;
  • La possibilité, jusqu’au 1er janvier 2026, de faire attester l’adéquation des mesures proposées pour la réhabilitation du site ainsi que la mise en œuvre de ces mesures, pour certaines cessations d’activités notifiées avant le 1er juin 2022.

Par ailleurs, la procédure du tiers intéressé définie à l’article L. 512-21 du Code de l’environnement est modifiée pour permettre au tiers de :

  • Se substituer à l’exploitant dès la notification de la cessation d’activités de l’ICPE voire, par anticipation, en cas de future cessation d’activité ;
  • Réaliser, outre la réhabilitation, tout ou partie des mesures de mise en sécurité de l’installation.

Encore, le préfet pourra imposer un délai contraignant pour la réhabilitation (article L. 512-22) et mettre en demeure l’exploitant de procéder à la mise à l’arrêt définitif en cas d’absence d’exploitation pendant trois années consécutives (L. 512-19), sur une partie d’installation seulement.

b. Renforcement des pouvoirs de sanction du préfet

Les pouvoirs de sanctions du préfet sont renforcés en cas de méconnaissance des règlementations définies par le Code de l’environnement, notamment en matière d’ICPE.

Il doit notamment être souligné que, pour les installations fonctionnant sans les autorisations requises et sur le fondement de l’article L. 171-7 du Code de l’environnement :

  • Une nouvelle amende administrative au plus égale à 45.000 € peut être ordonnée par le même acte que celui de mise en demeure ou par un acte distinct ;
  • Une nouvelle amende administrative au plus égale à 45.000 € peut être ordonnée pour garantir la complète exécution des mesures de suspension ou conservatoires prises sur le fondement de l’article L. 171-7. En outre, le montant maximal de l’astreinte journalière est augmenté de 1.500 à 4.500 euros ;
  • Il est possible d’obliger l’exploitant à s’acquitter entre les mains d’un comptable public du paiement d’une somme correspondant au montant des travaux à réaliser, lequel consigne de cette somme entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations et ces sommes étant utilisées pour régler les dépenses afférentes à l’exécution d’office. Cette référence à la Caisse des dépôts et consignations est également introduite à l’article L. 171-8 du Code de l’environnement.

Concernant les sanctions adoptées sur le fondement de l’article L. 171-8, en cas de méconnaissance des prescriptions applicables, le montant maximal de l’amende encourue a été augmenté de 15.000 à 45.000 euros et le montant maximal de l’astreinte journalière de 1.500 à 4.500 euros.

Des mesures sont également prévues pour faciliter le recouvrement des sommes dont est redevable l’exploitant en cas de liquidation judiciaire.

c. Sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation (SNCRR)

Deux nouvelles sections, intitulées « Sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation » et « Compensation des atteintes à la biodiversité », sont créées au sein du Code de l’environnement.

Les SNCRR sont des sites, préalablement agréé par l’autorité administrative compétente et incluant les sites naturels de compensation agréés avant la loi industrie verte, sur lesquels des opérations de restauration ou de développement d’éléments de biodiversité peuvent être mises en place par des personnes publiques ou privées. Les gains écologiques de ces opérations sont identifiés par des unités de compensation, de restauration ou de renaturation qui peuvent être vendues à toute autre personne publique ou privée, l’Etat devant mettre en place une plateforme en ligne de référencement de ces unités.

La nouveauté par rapport aux anciens sites naturels de compensation est que l’acquisition de ces unités peut permettre aux personnes soumises à une obligation de compensation des atteintes à la biodiversité d’y satisfaire de manière anticipée et que ces sites peuvent également donner lieu à l’attribution de crédits carbone au titre du label « bas-carbone ».

Enfin, dans le cadre de la compensation, le critère géographique est abandonné au profit de celui de « proximité fonctionnelle ».

d. Prise en compte des friches par les SCOT

Toujours afin de viser une réhabilitation des friches pour un usage industriel, l’article 13 de la loi industrie verte modifie les article L. 141-3 et L. 141-6 du Code de l’urbanisme, pour organiser une meilleure prise en compte des friches dans le SCOT.

Plus précisément, l’article L. 141-3 porte sur la partie projet d’aménagement stratégique du SCOT. Cette partie définit les objectifs de développement et d’aménagement du territoire et cet article prévoit désormais que ces objectifs doivent tenir de l’existence de friches lorsqu’elles favorisent une gestion économe de l’espace, limitant l’artificialisation des sols.

L’article L. 141-6 quant à lui concerne le document d’orientation et d’objectif du SCOT. Ce DOO comprend un document d’aménagement artisanal, commercial et logistique déterminant les conditions d’implantation des équipements commerciaux qui, en raison de leur importance, sont susceptibles d’avoir un impact significatif sur l’aménagement du territoire, le commerce de centre-ville et le développement durable. La nouvelle version de l’article L. 141-6 prévoit désormais que pour déterminer les conditions d’implantation des constructions commerciales et logistiques, il convient de privilégier l’utilisation prioritaire des friches.

6. Modification du champ de la déclaration de projet emportant mise en compatibilité du SCOT et du PLU

L’article 17 complète l’article L. 300-6 du Code de l’urbanisme afin de compléter les hypothèses du recours à la procédure de mise en compatibilité des PLU et SCOT avec un projet d’intérêt général faisant l’objet d’une déclaration de projet.

Sous l’effet de la loi industrie verte, la procédure de déclaration préalable valant mise en compatibilité du document d’urbanisme pourra être mise en œuvre dans le cas de :

  • L’implantation d’une installation industrielle de fabrication, d’assemblage ou de recyclage des produits ou des équipements, y compris de PME, qui participent aux chaînes de valeur des activités dans les secteurs des technologies favorables au développement durable, définis par décret en Conseil d’Etat, y compris des entrepôts de logistique situés sur le site et nécessaires au fonctionnement de cette installation ;
  • L’implantation d’une installation de recherche et développement ou d’expérimentation de nouveaux produits ou procédés qui participent directement auxdites chaînes de valeurs des activités dans les secteurs des technologies favorables au développement durable.

Par ailleurs, le même article L. 300-6 vise des cas où, lorsque le projet objet de la déclaration préalable doit faire l’objet d’une dérogation à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées prévue par l’article L. 411-2 du Code de l’environnement, alors cette déclaration de projet peut également se prononcer sur l’existence d’une raison impérative d’intérêt public majeur qui justifie ce projet.

Ce paragraphe vise les hypothèses suivantes :

  • L’implantation d’une installation industrielle de fabrication, d’assemblage ou de recyclage des produits ou des équipements qui participent aux chaînes de valeur des activités dans les secteurs des technologies favorables au développement durable (visée désormais au 4° de l’article L. 300-6) ;
  • Les projets d’infrastructures directement liées à cette installation visée au tiré précédent ;
  • Ou aux projets de création ou de modification d’ouvrages du réseau public de transport d’électricité ayant pour objet le raccordement de ladite installation

Ainsi, dans ces hypothèses, la déclaration de projet peut également indiquer que ce projet est justifié par une raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM). Pour rappel, cette RIIPM est l’une des trois conditions cumulatives permettant d’obtenir une dérogation préfectorale à l’interdiction de porter atteinte à une espèce protégée ou à son habitat naturel.

Cette condition de la RIIPM représente souvent une insécurité juridique pour les projets, susceptible de se matérialiser lorsque le projet est d’ores et déjà avancé dans sa conception. Prévoir que cette question peut être tranchée dès les premières étapes du projet, au moment de la déclaration de projet, permet d’évacuer l’insécurité juridique liée à ce sujet.

A cet égard, afin de pouvoir sécuriser entièrement ce sujet efficacement, l’article L. 300-6 prévoit que, lorsque la déclaration de projet se prononce sur la justification du projet au regard d’une RIIPM, alors l’existence d’une telle RIIPM peut être contestée lors d’un recours contre la déclaration de projet, mais pas lors d’un éventuel contentieux à l’encontre de la dérogation à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées qui sera délivrée en application de l’article L. 400-2 du Code de l’environnement.

7. Les projets d’intérêt national majeur (PINM)

L’article 19 de la loi industrie verte prévoit également de nouveaux dispositifs de mise en compatibilité des PLU, SCOT, SRADDET, SDRIF, PADDUC, SAR, etc., visant à accélérer l’implantation des industries vertes.

En ce sens, la loi créé un nouvel article L. 300-6-2 du Code de l’urbanisme, prévoyant la création des « projets d’intérêt national majeur » (PINM). Cet article prévoit que l’Etat peut engager une procédure de déclaration de projet emportant mise en compatibilité des documents d’urbanisme, pour permettre la réalisation de ces PINM.

a. Création de ces PINM

Concrètement, lorsqu’un projet industriel revêt, eu égard à son objet et à son envergure, notamment en termes d’investissement et d’emploi, une importance particulière pour la transition écologique ou la souveraineté nationale, l’Etat peut qualifier par décret ce projet de PINM.

Ces projets représenteraient en réalité assez peu d’occurrence, selon les débats à l’Assemblée nationale, seuls 1 à 3 projets par an seraient susceptible de recevoir cette qualification de PINM.

Cette sélection peut être réalisée sur proposition de la région qui signale au ministre en charge de l’industrie, les projets qui lui semblent susceptibles d’être reconnus d’intérêt national majeure, après avoir recueilli l’avis des communes et EPCI d’implantation de ces projets.

b. La mise en compatibilité pour permettre la réalisation de ces PINM

Le nouvel article L. 300-6-2 du Code de l’urbanisme tel qu’issu de la loi industrie verte, prévoit que l’Etat peut engager une procédure de mise en compatibilité des documents d’urbanisme pour permettre la réalisation du projet.

Cette incursion assez importante de l’Etat dans la vie des documents d’urbanisme a créé de vifs débats lors de l’élaboration de la loi. C’est pourquoi, la version finale de la loi prévoit que cette procédure de mise en compatibilité ne peut être « engagée qu’après l’accord du maire de la commune dans laquelle le projet industriel pourrait être implanté, ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale […] concerné lorsqu’un plan local d’urbanisme intercommunal est applicable sur le territoire de celle-ci, et du président de la région correspondante lorsque son document de planification doit être mis en compatibilité ». Sans cet ou ces accord(s) la procédure de mise en compatibilité ne peut donc être engagé.

L’Etat doit en outre être assez complet et clair sur le contenu de la mise en compatibilité puisque l’article L. 300-6-2 prévoit que l’Etat doit transmettre à la collectivité territoriale ou la personne publique compétente pour adopter ce document un dossier qui indique ou rappelle la nécessité de la mise en compatibilité et ses motifs et qui précise les modifications qu’elle estime nécessaires pour y parvenir.

c. L’évaluation environnementale et l’examen conjoint de la mise en compatibilité

Le porteur du projet procède à l’analyse des incidences notables sur l’environnement du projet de mise en compatibilité et transmet le dossier nécessaire à l’évaluation environnementale à l’autorité administrative compétente de l’Etat, qui le transmet ensuite à l’autorité environnementale. En somme, l’autorité environnementale doit procéder à un examen au cas par cas.

L’avis de l’autorité environnementale ou sa décision de ne pas soumettre le projet à une évaluation environnementale est transmis à la collectivité territoriale ou à la personne publique compétente pour adopter le document qui fait l’objet de la procédure de mise en compatibilité.

Doit ensuite être organisé, comme assez classiquement dans la procédure de mise en compatibilité, un examen conjoint entre l’Etat, la personne compétente pour le document mis en compatibilité et d’autres personnes publiques.

Est ensuite organisée une procédure de participation par voie électronique, dont le bilan est présenté par l’Etat devant la personne compétente s’agissant du document mis en compatibilité (par exemple la commune s’il s’agit de mettre en compatibilité le PLU). La personne compétente rend un avis.

d. L’adoption de la mise en compatibilité

La mise en compatibilité pour permettre la réalisation du PINM est adoptée par décret.

e. Incidences sur l’instruction des autorisations d’urbanisme

Quand le détail du PINM es suffisamment connu au moment de l’engagement de la mise en compatibilité, les autorisations d’urbanisme requises pour la réalisation du projet peuvent être sollicitées sans attendre l’adoption de la mise en compatibilité. Cela permet donc d’accélérer la réalisation du PINM en travaillant en temps masqué.

f. La reconnaissance de la raison impérative d’intérêt public majeur par le décret identifiant le PINM

Lorsque le projet est susceptible de porter atteinte à des espèces protégées ou à leur habitat naturel, le Code de l’environnement prévoit qu’il convient de solliciter une dérogation à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées prévue à l’article L. 411-2.

Pour obtenir une telle dérogation, il convient de remplir trois conditions cumulatives, dont la délicate raison impérative d’intérêt public majeur. Plus précisément, la réalisation du projet objet de la dérogation doit être justifiée par une raison impérative d’intérêt public majeur. Cette condition est souvent source d’insécurité juridique, et cette insécurité peut intervenir alors que le projet est très avancé.

Pour contourner cette difficulté, l’article L. 411-2-1 du Code de l’environnement issu de la loi industrie verte prévoit que le décret qualifiant le PINM peut lui reconnaitre le caractère de raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM). Cette qualification de RIIPM ne peut être contestée qu’à l’occasion de la contestation contentieuse de ce décret, et non à l’occasion d’un éventuel recours contre la dérogation faune flore qui sera délivrée postérieurement.