Planification 2020/2021 : un soutien renforcé au déploiement des bornes de recharge pour véhicules électriques

Inscrit dans la continuité du plan de soutien au secteur automobile de mai 2020, le plan de relance 2020 prévoit notamment d’accélérer le déploiement des bornes de recharge pour véhicules électriques afin que soient installés 100 000 points de charge accessibles au public d’ici la fin de l’année 2021.

Une forte progression des ventes de véhicules électriques a été constatée ces derniers mois et la poursuite de cette transition dépend inévitablement du développement à grande échelle de bornes de recharge sur l’ensemble du territoire.

S’il est vrai que cet enjeu concerne indéniablement l’ensemble des acteurs publics et privés associés au développement précité, il n’en demeure pas moins qu’il intéresse particulièrement l’Etat et les collectivités territoriales, lesquels semblent proposer pour l’heure un parc de 30 000 bornes de recharge publiques qui demeure insatisfaisant aux yeux des usagers. Il ressort d’une enquête Avere France-IPSOS de février 2021 que ces derniers considèrent majoritairement que le nombre de ces bornes, leur état, leur localisation ainsi que leur disponibilité ne sont pas à la hauteur des attentes. 

S’agissant des bornes de recharge en résidentiel collectif, il importe de préciser que depuis l’instauration d’un droit « à la prise » en 2011, permettant à chaque utilisateur de véhicule électrique de faire valoir son droit à l’installation d’une borne de charge individuelle sur sa place de parking, plusieurs mesures réglementaires destinées à faciliter ces installations se sont succédé. Pour autant, les frais à engager par l’utilisateur d’un véhicule électrique ou par sa copropriété demeurent particulièrement élevés et sont susceptibles de constituer un frein au déploiement de bornes de recharge au sein desdits logements collectifs.

Pour consulter plus en détail :          

https://www.observatoire-recharge-afirev.fr/wp-content/uploads/2021/02/ObservatoireAFIREV_1ereEdition_RapportComplet.pdf

 

Le « Plan de soutien à l’automobile » de mai 2020

Bien que le plan « France relance » ait permis l’impulsion de nombreux projets ayant trait à l’installation de bornes de recharge de véhicules électriques, on rappellera pourtant que l’essentiel des objectifs qu’il a mis en lumière ont été initiés dans le cadre d’un précédent plan, de soutien à la filière automobile, le « Plan de soutien à l’automobile » lancé le 26 mai 2020.

Par la voie de ce plan, le gouvernement, tout d’abord, a entendu prolonger jusqu’en 2023 le programme « ADVENIR » crée en 2016 et visant, par le biais du mécanisme des certificats d’économie d’énergie (CEE), à compléter les initiatives publiques de soutien à l’électromobilité au travers du développement des infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE).

Une enveloppe de 100 millions d’euros a été dédiée au programme précité en vue du déploiement de 45 000 points de recharge sur l’ensemble du territoire.

S’agissant, plus particulièrement, de la couverture en bornes de recharge des grands axes nationaux, un appel à manifestation d’intérêt a été lancé à l’été 2020 dans le but d’assurer un maillage d’environ 150 kilomètres d’inter-distance sur les grands axes nationaux du territoire dans le prolongement du réseau de recharge rapide CorriDoor.

Pour consulter la fiche détaillée sur plan de soutien à l’automobile :   

https://www.economie.gouv.fr/plan-soutien-filiere-automobile#

 

Le plan « Objectif 100 000 bornes »

On évoquera ensuite le programme « Objectif 100 000 bornes » présenté le 12 octobre par les ministres de la transition écologique et des transports, adopté dans la continuité des ambitions  du plan de soutien à l’automobile et dans le souci d’un maillage territorial renforcé, et en collaboration avec principalement les collectivités territoriales, les acteurs de la grande distribution et les sociétés d’autoroutes tous signataires de la charte « Objectif 100 000 bornes » Ce plan emporte une série de mesures dont on rappellera les principales : 

  • renforcement du programme ADVENIR précité pour prendre en charge jusqu’à 60 % du coût des bornes ouvertes au public,
  • mise en place d’aides au « rétrofit » des bornes déjà installées,
  • enveloppe complémentaire de 100 millions d’euros pour l’installation de bornes de charge rapide sur les autoroutes et le réseau routier national,
  • et, enfin, mise en place d’un bonus de 1.000 € pour l’achat de véhicules électriques d’occasion.

Pour consulter plus en détail :          

https://www.ecologie.gouv.fr/objectif-100-000-bornes-tous-mobilises-accelerer-virage-du-vehicule-electrique

 

Le renforcement de certaines dispositions par le plan « France Relance » 2020

Pour rappel, le plan « France Relance » présenté par le gouvernement le 3 septembre 2020 engage la phase de relance économique décidée par le gouvernement afin de faire face aux conséquences de la crise sanitaire de la COVID-19, avec 100 milliards d’euros d’investissements mobilisés. Ce plan intègre notamment certaines mesures du plan de soutien au secteur automobile.

il est important de rappeler que, dès le 7 septembre 2020, ont été lancés plusieurs appels à projets destinés à définir et sélectionner les opérations de rénovation énergétique des bâtiments de l’État, de l’enseignement supérieur, de la recherche et de la vie étudiante. À ce sujet, sur les 4214 projets – pour un montant total de 2,7 milliards d’euros – qui ont été sélectionnés en considération des deux principaux critères de sélection liés à la capacité à mettre en œuvre rapidement un projet et à générer des économies d’énergie, 594 projets concernent l’installation et la rénovation de bornes de recharge pour véhicules électriques sur des zones du territoire plus ou moins denses en termes de population.

L’objectif de déploiement de 70 000 bornes supplémentaires prévu par le gouvernement, par ces différents soutiens des pouvoirs publics, pourrait vraisemblablement être atteint.

*

Au total, si des mesures incitatives fortes sont désormais proposées aux acteurs de l’électromobilité, d’autres relatives notamment aux modalités d’occupation de la voirie ou des espaces commerciaux, aux conditions de raccordement aux réseaux publics d’électricité ou encore à la sécurisation des financements publics mériteraient d’être rapidement renforcées.

Par Thomas Rouveyran

Précisions sur le pouvoir d’appréciation des collectivités en matière de raccordement des propriétés au réseau public d’eau potable

Conclusions du rapporteur public M. Laurent Cytermann

 

Par une décision n° 431494 du 26 janvier 2021, classée A, le Conseil d’Etat a précisé la portée du schéma de distribution d’eau potable ainsi que la marge d’appréciation des collectivités lorsqu’elles doivent se prononcer sur une demande de réalisation de travaux de raccordement d’une propriété au réseau public d’eau potable, selon que cette propriété est ou non située au sein d’une zone de desserte identifiée par ce schéma.

Dans cette affaire, les requérants, deux personnes privées, ont demandé au maire de la commune de Portes-en-Valdaine que celui-ci réalise des travaux de raccordement de leur propriété au réseau public d’eau potable, celle-ci étant située à l’extérieur du village. Le maire avait refusé de faire droit à leur demande.

Le Conseil d’Etat a tout d’abord rappelé que, en application de l’article L. 2224-7-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), les communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents doivent arrêter un schéma de distribution d’eau potable identifiant les zones desservies par ce réseau. L’étendue de la marge d’appréciation des collectivités quant à la réalisation de travaux de raccordement dépendra selon que la propriété est située au sein de l’une de ces zones (1°) ou non (2°).

 

1°) Au sein de ces zones, le Conseil d’Etat énonce que les communes et EPCI « sont tenus, tant qu’ils n’en ont pas modifié les délimitations, de faire droit aux demandes de réalisation de travaux de raccordement, dans un délai raisonnable », le caractère raisonnable de ce délai devant être apprécié au regard du coût, de la difficulté et des modalités envisageables de financement des travaux, dès lors que la propriété en cause a fait l’objet d’une autorisation (permis de construire, d’aménager, de démolir, déclaration préalable) ou d’un agrément d’urbanisme (article L. 510-1 du Code de l’urbanisme).

Comme l’exposait le rapporteur public dans ses conclusions sur cette décision, « le raccordement est donc en principe obligatoire dans la zone de desserte. Ceci n’implique pas qu’il doive toujours être immédiat. Là encore, comme pour l’assainissement, la commune doit disposer d’un « délai raisonnable » pour les réaliser ». Le rapporteur public considère en outre que le point de départ du délai raisonnable est l’adoption du schéma de distribution d’eau potable et non la demande de raccordement au réseau ; dès l’adoption du schéma, la collectivité devrait en effet s’engager « dans une démarche active de planification et ne doit pas attendre que des demandes  lui parviennent pour la mettre en œuvre ».

 

2°) Le Conseil d’Etat précise également que, dans l’hypothèse où la propriété ne serait pas située au sein d’une zone de desserte identifiée par le schéma de distribution d’eau potable, « la collectivité apprécie la suite à donner aux demandes d’exécution de travaux de raccordement, dans le respect du principe d’égalité devant le service public, en fonction, notamment, de leur coût, de l’intérêt public et des conditions d’accès à d’autres sources d’alimentation en eau potable ». Une marge d’appréciation plus importante est alors laissée à la collectivité, dont la décision sera soumise à un contrôle restreint du juge.

Dans le cas d’espèce de la décision du 26 janvier 2021, le Conseil d’Etat considère que la Cour administrative d’appel n’ayant pas recherché si la propriété des requérants était située dans une zone de desserte identifiée par le schéma de distribution de l’eau potable, celle-ci a entaché sa décision d’une erreur de droit.

Si le rapporteur public évoque la circonstance que le sens de cette décision du Conseil d’Etat pourrait avoir un effet dissuasif sur l’identification de zones de desserte au sein des schémas de distribution d’eau potable, il considère néanmoins qu’« il est probable que la question concerne surtout, comme en l’espèce, des habitations anciennement non raccordées ».

Affaire du siècle : condamnation de l’Etat pour inaction face aux changements climatiques

Par une décision aussi attendue que médiatisée, le Tribunal administratif de Paris s’est prononcé le 3 février 2021 sur les requêtes introduites par quatre associations – OXFAM France, Notre affaire à tous, la Fondation pour la nature et l’homme et Greenpeace France – visant à engager la responsabilité de l’Etat pour inaction face au changement climatique.

Les associations requérantes demandaient à la juridiction de condamner l’Etat à leur verser un euro symbolique en réparation du préjudice écologique causé par son inaction (1°) et de leur préjudice moral (2°), ainsi que d’enjoindre à l’Etat de mettre un terme ou de pallier les effets de ses manquements à ses obligations en matière de lutte contre le changement climatique et de prendre les mesures nécessaires à cet égard (3°).

Le juge administratif a partiellement fait droit aux demandes des requérantes en reconnaissant que la carence fautive de l’Etat dans la mise en œuvre de sa politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre a aggravé le préjudice écologique engendré par le changement climatique, sans toutefois reconnaître l’ensemble des manquements invoqués par les requérantes.

 

1°) Afin de reconnaître l’existence d’un préjudice écologique, le juge se fonde notamment sur les derniers rapports spéciaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et recense les effets connus du changement climatique en France et dans le monde (augmentation des phénomènes climatiques extrêmes, acidification des océans, expansion des insectes vecteurs d’agents infectieux, …).

Le Tribunal administratif reconnaît alors la carence fautive de l’Etat français en matière de lutte contre le changement climatique, celui-ci n’ayant pas respecté les objectifs qu’il s’était lui-même fixé dans le cadre du premier budget carbone en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, lesquelles ont directement aggravées le préjudice écologique constaté.

Les requérantes invoquaient également des manquements de l’Etat en matière d’amélioration de l’efficacité énergétique et d’augmentation de la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie. Après avoir relevé que l’action de l’Etat a été insuffisante dans ses matières, dès lors qu’il n’a pas atteint les objectifs qu’il s’était fixé, le juge considère néanmoins « que la politique en ce domaine n’est elle-même qu’une des politiques sectorielles mobilisables, ne peut être regardé comme ayant contribué directement à l’aggravation du préjudice écologique dont les associations requérantes demandent réparation ».

Le juge considère également que les requérantes n’établissent pas que les objectifs adoptés par l’Etat français, ni par les autres Etats de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, pour limiter le réchauffement à 1,5° C seraient, « par leur insuffisance, directement à l’origine du préjudice écologique invoqué ». Le Tribunal adopte le même raisonnement pour les mesures d’évaluation, de suivi et d’adaptation au changement climatique, en énonçant que leur prétendue insuffisance n’est pas la source directe du préjudice invoqué.

 

2°) En outre, au regard de leur objet statutaire, le préjudice moral des quatre associations est également reconnu par le juge, qui condamne l’Etat à leur verser à chacune un euro symbolique à cet égard.

 

3°) Concernant toutefois les demandes d’injonction des requérantes, le Tribunal considère qu’il ne peut, à ce stade, « déterminer avec précision les mesures qui doivent être ordonnées à l’État » et ordonne à cet égard un supplément d’instruction d’une durée de deux mois. Les injonctions ne pourront néanmoins tendre qu’à la réparation, ou à la non-aggravation, du préjudice écologique causé par l’État « qu’autant que le non-respect du premier budget carbone a contribué à l’aggravation des émissions de gaz à effet de serre ».

Pesticides : extension des interdictions d’usage

Alors que le Conseil d’Etat est venu mettre un terme au contentieux relatif au arrêtés anti-pesticides pris par les Maires de plusieurs communes en refusant de reconnaître la compétence des édiles en la matière, la police spéciale des produits phytosanitaires étant alors considérée comme une police exclusive de l’Etat, le Gouvernement a édicté le 15 janvier 2021 un nouvel arrêté visant à étendre les interdictions d’utilisation de ces mêmes pesticides dans plusieurs lieux.

Cet arrêté vient modifier l’arrêté du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants visés à l’article L. 253-1 du Code rural et de la pêche maritime en y ajoutant des dispositions particulières d’interdiction d’utilisation dans les propriétés privées, les lieux fréquentés par le public et les lieux à usage collectif.

Ainsi, à compter de l’entrée en vigueur de cet arrêté le 1er juillet 2022, soit un an et demi après sa publication, l’utilisation des produits phytopharmaceutiques (hors produits de biocontrôle, produits qualifiés à faible risque et produits autorisés dans le cadre de l’agriculture biologique) sera interdite (à l’exception des terrains à vocation agricole) dans les propriétés privées à usage d’habitation, y compris les espaces extérieurs, les hôtels et établissements assimilés, les cimetières, les jardins familiaux, les parcs d’attraction, les zones accessibles au public dans les zones destinées au commerce et activités de services, les voies d’accès privées, les espaces verts et les zones de repos sur les lieux de travail (sauf exceptions), les zones à usage collectif des établissements d’enseignement, les établissements de santé, y compris leurs espaces verts, les maisons d’assistants maternels, les équipements sportifs, les aérodromes.

Toutefois, cette interdiction connaît des exceptions et ne s’appliquera pas aux traitements et mesures nécessaires à la destruction et à la prévention de la propagation de certains organismes nuisibles dont la liste est réglementée, aux traitements par les produits phytopharmaceutiques qui s’avèrent nécessaires pour lutter contre un danger sanitaire grave menaçant la pérennité du patrimoine historique ou biologique et ne pouvant être maîtrisé par un autre moyen et enfin à certains équipements sportifs listés par les ministres chargés des sports et de l’environnement pour lesquels aucune solution technique alternative ne permet d’obtenir la qualité requise dans le cadre des compétitions officielles, à l’instar des terrains de football.

S’agissant des équipements sportifs, il convient par ailleurs de relever que les interdictions concernant les terrains de grands jeux, les pistes d’hippodrome, les terrains de tennis sur gazon et les golfs n’entreront en vigueur qu’à compter du 1er janvier 2025.

La CRE approuve sous certaines réserves les méthodes de calcul du coût prévisionnel des ouvrages à réaliser par Enedis et RTE dans le cadre des schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables (S3REnR)

Délibération de la CRE du 21 janvier 2021 portant approbation des méthodes de calcul du coût prévisionnel des ouvrages à réaliser par RTE dans le cadre des schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables

 

Les schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables, institués par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 (dite « Grenelle II ») afin de faciliter et d’organiser le développement des énergies renouvelables en mutualisant une partie des coûts de raccordement entre producteurs d’une même région, sont élaborés par le gestionnaire du réseau public de transport en accord avec les gestionnaires des réseaux publics de distribution concernés et après avis des autorités organisatrices de la distribution d’électricité concernées[1].

 

Dans ce contexte, lesdits schémas :

  • définissent les ouvrages à créer ou à renforcer sur le réseau pour atteindre les objectifs fixés par le préfet de région en matière d’énergies renouvelables, en tenant compte des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie, du schéma régional climat, de l’air et de l’énergie et du dynamisme local de développement des EnR ;
  • mutualisent une partie des coûts des ouvrages à créer.
  • évaluent le coût prévisionnel de ces ouvrages de réseaux à créer ou renforcer.

Ainsi, les S3REnR établissent des méthodes de calcul du coût prévisionnel décrivant le processus permettant de déterminer la nature et le coût des ouvrages à créer ou à renforcer en application du S3REnR ainsi que les modalités de fixation de la quote-part[2].

A ce titre et, en application du 3ème alinéa de l’article L. 321-7 du Code de l’énergie, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) approuve les méthodes de calcul du coût prévisionnel (MCCP) des ouvrages à réaliser par le gestionnaire du réseau public de transport (RTE) ainsi que par les gestionnaires des réseaux publics de distribution (Enedis).

C’est dans ce cadre que, par deux délibérations publiées sur le site de la CRE le 21 janvier dernier, ici commentées, cette dernière a approuvé, sous quelques réserves, les propositions d’Enedis et de RTE.

 
S’agissant d’Enedis:

La CRE approuve la proposition présentée par Enedis le 31 juillet 2020 sous réserve que le gestionnaire modifie le traitement des sites hybrides associant stockage et installation de production renouvelable.

Elle demande à Enedis pour le prochain projet de méthodes de calcul du coût prévisionnel des ouvrages à réaliser dans le cadre des S3REnR, et au plus tard d’ici 18 mois à compter de la présente délibération, :

  • d’intégrer la possibilité de dimensionner les ouvrages de création en tenant compte du foisonnement des filières de production ;
  • le cas échéant, d’intégrer les dispositions relatives au traitement des installations de stockage et des sites hybrides issues de la concertation engagée avec RTE.
S’agissant de RTE:

La CRE approuve la proposition présentée par RTE le 24 novembre 2020 sous réserve :

  • d’utiliser les taux de démarrage diminués de 5 % par rapport aux valeurs présentées dans le projet de MCCP, pour tenir compte de la surévaluation du coût de l’énergie non évacuée (ENE) induite par les écarts entre certaines hypothèses de valorisation de cette dernière pour les schémas dont la publication est postérieure au 1er avril 2021 ;
  • de modifier son paragraphe 6.1 du projet d’article 2.6 de sa documentation de référence afin de tenir compte du critère de « parallélisme géographique» et non de celui de « parallélisme électrique » s’agissant des ouvrages intégrant le périmètre de mutualisation.

La Commission demande au gestionnaire de transport, pour le prochain projet de méthodes de calcul du coût prévisionnel des ouvrages à réaliser dans le cadre des 3REnR :

  • d’intégrer, le cas échéant, les dispositions relatives au traitement des sites hybrides issues de la concertation engagée avec Enedis ;
  • pour le calcul des taux de démarrage :
  • de mettre en cohérence les hypothèses de valorisation de l’énergie non évacuée ;
  • de proposer une méthodologie de calcul des taux de démarrage tenant compte du foisonnement entre les filières de production éolienne et photovoltaïque ;
  • d’effectuer une mise à jour régulière des coûts d’investissement retenus pour le calcul des taux de démarrage, sur la base des montants constatés ;
  • d’utiliser des courbes de charges par poste et non par parc de production.
  • de lui communiquer les volumes d’énergie non évacuée prévisionnels et les gains associés au dimensionnement optimal pour chacun des S3REnR à venir.

Après notification aux gestionnaires susvisés, ces délibérations seront transmises à la Ministre de la Transition écologique et aux Préfets de Région compétents pour fixer la capacité globale de raccordement du schéma ainsi que pour approuver la quote-part unitaire susvisée.

[1] Les procédures d’élaboration et de mise en œuvre de ces schémas ont d’ailleurs été récemment simplifiées (https://www.seban-associes.avocat.fr/entree-en-vigueur-des-mesures-de-simplification-de-la-procedure-delaboration-et-de-revision-des-schemas-regionaux-de-raccordement-au-reseau-des-energies-renouvelables-s3renr/ ) et précisées (http://www.seban-associes.avocat.fr/adaptation-des%E2%80%AFdispositions-reglementaires-du-code-de-lenergie-relatives-aux-procedures-delaboration-et-de-revision-des-schemas-regionaux-de-raccordement-au-reseau-des-energies-renouvelabl/) comme nous le commentions lors de nos lettres d’actualités juridiques précédentes.

[2] Indicateur exprimé en K€/MW servant de base de calcul de la contribution dont devront s’acquitter les producteurs qui souhaitent se raccorder au réseau.

Installation d’un Conseil national de l’hydrogène

Pour mémoire, le 9 septembre 2020, la Ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, et le Ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire, présentaient la stratégie nationale du gouvernement pour le développement de l’hydrogène décarbonné en France[1].

Cette stratégie nationale, représentant un investissement de 7 milliards d’euros, poursuit trois priorités :

  • décarbonner l’industrie en faisant émerger une filière française de l’électrolyse [2];
  • développer une mobilité lourde à l’hydrogène décarboné ;
  • soutenir la recherche, l’innovation et le développement de compétences afin de favoriser les usages de demain.

C’est dans le prolongement de ces annonces et afin d’assurer la mise en œuvre effective de cette stratégie que, le 11 janvier dernier, plusieurs membres du gouvernement ont annoncé l’installation d’un Conseil national de l’hydrogène.

Plus précisément, ledit conseil aura pour rôle de :

  • structurer les échanges entre l’Etat et les parties prenantes de la mise en œuvre de la stratégie, en particulier les filières industrielles ;
  • de mesurer le bon déroulement des actions prévues pour identifier, le cas échéant, les éventuels freins ;
  • favoriser l’émergence de projets collectifs visant à la structuration d’une chaîne de valeur complète sur notre territoire ou dans le cadre de coopérations européennes.

Le Conseil national de l’hydrogène sera composé d’industriels du milieu.

Enfin, le Ministère de la Transition écologique indique sur son site que la première réunion de ce conseil se tiendra au mois de janvier prochain.

[1] La présentation de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné en France est disponible sur ce lien : https://www.economie.gouv.fr/presentation-strategie-nationale-developpement-hydrogenedecarbonefrance#:~:text=La%20France%20se%20fixe%20ainsi,fossiles%20pour%20d%C3%A9carboner%20cet%20hydrog%C3%A8ne.

[2] Procédé électrolytique qui décompose l’eau en dioxygène et dihydrogène gazeux grâce à un courant électrique.

 

 

 

Un nouveau tarif d’utilisation des réseaux publics de distribution d’électricité (TURPE) pour la période 2021-2024

Délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 21 janvier 2021 portant décision sur le tarif d’utilisation des réseaux publics de transport d’électricité (TURPE 6 HTB)

 

La CRE vient d’adopter les tarifs d’utilisation des réseaux publics de distribution et de transport qui s’appliqueront à compter du 1er août 2021, dans le prolongement du projet de décision qui avait été publié en décembre dernier et commenté dans notre LAJEE.

Pour ce qui concerne le TURPE 6 HTA-BT, la CRE a souhaité limiter la hausse des charges demandée par Enedis tout en lui permettant d’’être acteur de la transition énergétique.

Le TURPE 6 HTA-BT répond ainsi aux enjeux prioritaires suivants pour le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité, en particulier :

  • Le raccordement la production d’électricité renouvelable (EnR) : qui devrait connaitre une augmentation massive selon la CRE sur la prochaine période tarifaire ainsi que ainsi que par le développement de la mobilité électrique et de l’autoconsommation qui modifieront profondément les flux sur les réseaux de distribution d’électricité dans les années à venir.
  • La maitrise des investissements : La CRE insiste dans sa délibération sur le fait que « Les investissements nécessaires devront être faits en maitrisant leurs coûts » et qu’elle « est très attentive à ce qu’Enedis ait les moyens de répondre à ces nouveaux besoins. L’enjeu pour Enedis sera de réaliser les investissements nécessaires tout en optimisant le coût global de fonctionnement de son réseau ».
  • Le maintien de la qualité d’alimentation : la CRE souligne que la qualité d’alimentation sur le réseau de distribution s’est améliorée régulièrement ces dernières années. Pour la période de 4 ans à venir, l’enjeu principal consistera tout d’abord à fiabiliser la mesure du temps de coupure en y intégrant les données apportées par les compteurs Linky.
  • Sur la qualité du service rendu par Enedis, la CRE estime qu’elle doit être renforcée sur les points d’attentes prioritaires des acteurs, comme les délais de raccordement.

En effet, la CRE relève que les des délais de raccordement se sont dégradés ces dernières années et ce sujet doit faire l’objet d’un effort massif de rattrapage.

  • Enfin, le dernier enjeu mis en avant par la CRE pour le gestionnaire du réseau public de distribution sera de mobiliser les sources de flexibilité nouvelles (stockage, effacement, agrégation de flexibilités décentralisées, mobilité électrique) « pour limiter au strict nécessaire les renforcements de réseau ».

La délibération introduit par ailleurs certains mécanismes de régulation incitatifs nouveaux dont celui permettant de pénaliser Enedis en cas de non-respect des délais et de la complétude des données publiées, s’agissant des données de consommation (index et courbes de charge), sur le marché de masse comme sur le marché d’affaires, qui ont été identifiées comme des données prioritaires

Elle décrit également l’impact tarifaire de l’intégration des colonnes montantes en concession à la suite de l ’article 176 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) qui prévoit l’intégration dans le réseau public de distribution de l’ensemble des colonnes montantes électriques en exploitation à l’issue d’un délai de 2 ans à compter du 24 novembre 2018. Le TURPE 6 intègre ainsi une rémunération d’Enedis au titre de ces actifs ainsi que des dotations aux amortissements.

Enfin, un point est à noter pour les autorités organisatrices de la distribution publique d’électricité. Les redevances de concession que leur verse le gestionnaire de réseau sont retirées du compte de régularisation des charges et des produits (CRCP) alors que celui-ci l’intégrait au titre du TURPE 5 HTA-BT.

Plus exactement, le CRCP n’intègrera plus que les modifications des redevances issues des contrats de concession signés selon le nouveau modèle de concession arrêté entre la FNCCR, France Urbaine, EDF et Enedis en décembre 2017. Une incitation de plus d’Enedis à la négociation de nouveaux contrats (alors que l’intérêt de la renégociation devrait d’abord demeurer de l’appréciation des autorités organisatrices en fonction de leurs attentes locales propres) et une inquiétude possible des autorités concédantes dont les redevances ont jusqu’alors souvent été discutées par leur concessionnaire.

Publication des nouveaux tarifs de cession de l’électricité par EDF aux ELD

Délibération n° 2021-09 de la CRE du 14 janvier 2021 portant proposition des tarifs de cession de l’électricité aux entreprises locales de distribution

 

Dans le prolongement de la délibération n°2021-09 de la CRE également adoptée le 14 janvier 2021 et des décisions ministérielles ci-dessus commentées en date du 28 janvier 2021 relatives à l’évolution des Tarifs Réglementés de Vente d’Electricité (ci-après, TRVE), les tarifs de cession de l’électricité par EDF aux Entreprises Locales de Distribution (ci-après, ELD) évoluent également à compter du 1er février 2021.

On rappellera que les tarifs de cession permettent aux ELD de s’approvisionner auprès d’EDF en électricité pour la fourniture de leurs clients aux tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE) et, pour celles desservant moins de 100 000 clients, pour la fourniture de leurs pertes réseau. Le législateur a ainsi institué au profit des ELD ce mécanisme préférentiel dérogatoire des « tarifs de cession » applicable exclusivement lorsque celles-ci achètent l’électricité en vue de la revendre aux TRVE mais aussi pour l’approvisionnement des pertes d’électricité sur leurs réseaux.

Ce tarif détermine la marge brute des ELD et donc indirectement leur marge nette sur cette activité. En conséquence, les évolutions des tarifs de cession sont, en principe, corrélées avec celles des TRVE de manière à garantir, a minima, un maintien de la marge des ELD (voir en ce sens, différentes réponses ministérielles répondant aux interrogations de parlementaires concernant les hausses des tarifs de cession : Rép. Min. à QE n° 07679, JO Sénat 24 octobre 2013, p. 3091 ; Rép. Min. à QE n° 19725 JO Sénat 9 février 2012).

C’est la CRE qui est chargée de formuler, à destination du Ministre en charge de l’énergie et du Ministre de l’économie, une proposition de tarifs respectant les principes posés par l’article L. 337-11 du Code de l’énergie aux termes duquel « les tarifs de cession d’électricité aux entreprises locales de distribution sont définis en fonction de catégories fondées sur les caractéristiques intrinsèques des fournitures, en fonction des coûts liés à ces fournitures ». L’article R. 337-26 du Code de l’énergie précise également les modalités de calcul des composantes des tarifs de cession.

Les tarifs de cession devant être calculés selon la même méthodologie que les TRVE, ils sont basés sur la méthode dite de l’« empilement des coûts » comportant les strates suivantes :

  • le coût d’approvisionnement de la part relevant de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) ;
  • le coût d’approvisionnement du complément au marché en énergie et en garanties de capacité en tenant compte à l’instar de la construction des TRVE de l’écrêtement de l’ARENH;
  • le coût de la couverture des risques liés à l’approvisionnement par EDF des ELD aux tarifs de cession ;
  • le coût de gestion par EDF des contrats aux tarifs de cession des ELD.

La CRE a ainsi formulé une proposition par délibération du 14 janvier 2021, entérinée par les Ministres respectivement en charge de l’énergie et de l’économie par décision du 28 janvier 2021.

Aux termes de la délibération et de la décision, le tarif de cession de l’électricité aux ELD fait l’objet d’une hausse moyenne de 2, 27 €/MWh, soit une hausse de 3,96 % HT.

La CRE souligne néanmoins dans sa délibération que cette évolution de tarif de cession augmenterait la marge brute (définie comme la différence entre le niveau moyen des tarifs réglementés de vente (hors taxes et hors part acheminement TURPE) et le niveau moyen des tarifs de cession) des ELD de 0,26 €/MWh par rapport à l’exercice précédent.

Hausse des tarifs réglementés de vente d’électricité à compter du 1er février 2021

Décision du 28 janvier 2021 relative aux tarifs réglementés de vente de l’électricité applicables dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental

Décision du 28 janvier 2021 relative aux tarifs réglementés de vente de l’électricité Jaunes et Verts applicables aux consommateurs en France métropolitaine continentale

Décision du 28 janvier 2021 relative aux tarifs réglementés de vente de l’électricité applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale

Délibération n° 2021-08 de la CRE du 14 janvier 2021 portant proposition des tarifs réglementés de vente d’électricité

 

 

Les nouveaux Tarifs Réglementés de Vente d’Electricité (ci-après, TRVE) applicables à compter du 1er février 2021 viennent d’être publiés et ils font l’objet d’une évolution à la hausse.

On rappellera que les TRVE sont les tarifs de vente d’électricité que la société EDF et les entreprises locales de distribution (ci-après, ELD) sont les seules à pouvoir proposer compte tenu des droits exclusifs dont elles bénéficient légalement sur leurs périmètres respectifs. Ces tarifs sont proposés par la Commission de la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE) aux Ministres de l’énergie et de l’économie qui les fixent ensuite par une décision commune.

En l’espèce, par une délibération du 14 janvier 2021, la CRE avait formulé une proposition d’évolution des TRVE à la hausse. Et par quatre décisions du 28 janvier 2021, les Ministres en charge de l’énergie et de l’économie ont arrêté :

  • les TRVE applicables aux consommateurs résidentiels en France métropolitaine continentale,
  • les TRVE applicables dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental, 
  • les TRVE « jaunes » et « verts » applicables aux consommateurs en France métropolitaine continentale, 
  • les TRVE applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale.

 

Les nouveaux barèmes de prix résultant de ces quatre décisions sont conformes aux préconisations formulées par la CRE.

Ainsi qu’il le soulignait dans le préambule de sa délibération, le régulateur (et par extension les Ministres dès lors que les décisions sont conformes aux préconisations formulées) « a pris en compte, dans sa délibération, la situation de crise sanitaire de notre pays et les difficultés économiques que traversent un certain nombre de nos concitoyens et de nos entreprises. Ainsi, la CRE a souhaité, dans la limite des marges de manœuvre permises par le cadre législatif et réglementaire, atténuer l’impact des évolutions tarifaires sur les consommateurs ».

Concrètement, en zone métropolitaine continentale, l’évolution du niveau moyen des TRVE est de +2,17 % HT (soit 2,71€/MWh ou 1,74 % TTC).

 

Cette augmentation est distincte pour les tarifs résidentiels et professionnels et se décompose de la manière suivante :

  • + 1,93 % HT soit + 2,42 €/MWh ou + 1,61 % TTC, pour les tarifs bleus résidentiels ;
  • + 3,23 % HT soit + 4,02 €/MWh ou + 2,61 % TTC, pour les tarifs bleus professionnels.

 

Ainsi que la CRE l’explique dans sa délibération, cette hausse est la conséquence :

  • de l’augmentation du coût de l’approvisionnement en énergie et en garanties de capacité hors effet de l’écrêtement de l’ARENH (+ 0,7 % TTC, dont – 0,8 % TTC en énergie et + 1,5 % TTC au titre de la capacité) ;
  • de l’augmentation du coût du complément d’approvisionnement en énergie et en capacité consécutif à l’écrêtement de l’ARENH (+ 0,6 % TTC) ;
  • de l’évolution des coûts de commercialisation d’EDF due aux effets de la crise sanitaire liée à la Covid-19 qui se décompose en :
    • o- 0, 2 % TTC pour les clients résidentiels,
    • o+ 0,9 % TTC pour les clients non résidentiels;
  • du rattrapage de l’écart entre coûts et tarifs au titre des exercices 2019 et 2020 qui est dû principalement aux effets de la crise sanitaire liée à la Covid-19 et à la hausse des impayés (+0,5 % TTC).

La CRE soulignait en effet que depuis plusieurs années, les facteurs principaux de hausse des TRVE et plus généralement du prix de l’électricité en France sont, selon elle, les Certificats d’Economie d’Energie (CEE), le mécanisme de capacité et le dispositif d’écrêtement de l’ARENH.

 

En zone non interconnectée (ci-après, ZNI), les augmentations sont les suivantes :

  • pour les clients dont la puissance souscrite est inférieure ou égale à 36 kVA et raccordés en basse tension, les barèmes des tarifs réglementés bleus résidentiels et non résidentiels de la métropole continentale s’appliqueraient ;
  • pour les consommateurs raccordés en BT dont la puissance souscrite est supérieure à 36 kVA (tarifs « bleus + » et jaunes), la hausse s’élèverait à + 2,2 % HT ;
  • pour les consommateurs raccordés en HTA (tarifs verts), la hausse s’élèverait à + 2,5 % HT.

 

Des augmentations donc importantes dans le contexte de crise sanitaire qui, à lire la CRE, auraient dû être plus élevées encore. Une explication qui risque d’interroger les consommateurs.

Plusieurs propositions de loi intéressant le secteur énergétique

Proposition de loi visant à renforcer le rôle des élus locaux dans l’implantation d’éoliennes terrestres

Proposition de loi pour un développement harmonieux de l’éolien

 

On signalera trois propositions de loi récemment déposées par des parlementaires sur des thématiques intéressant le droit de l’énergie.

Tout d’abord, une proposition de loi visant à encadrer le démarchage commercial pour la fourniture de gaz et d’électricité a été déposée le 14 décembre 2020 par plusieurs députés.

Cette proposition de texte fait écho aux alertes du Médiateur National de l’Energie (voir notamment notre commentaire dans la Lettre d’Actualités Juridiques Energie Environnement de juin 2017) ainsi que des associations représentatives des consommateurs sur ce sujet délicat.

En pratique, le texte propose notamment l’instauration :

  • D’une interdiction de commencer l’exécution d’un nouveau contrat de fourniture d’électricité ou de gaz avant l’expiration du délai de rétractation du consommateur (en dehors des hypothèses de déménagement), sous peine de nullité absolue du contrat conclu ;
  • de sanctions administratives, sous la forme d’un retrait de l’autorisation de fourniture d’énergie, pour les fournisseurs qui méconnaîtraient les règles relatives au démarchage à domicile.

 

On signalera ensuite deux propositions de loi portant plus spécifiquement sur la question de l’électricité d’origine éolienne.

 

La première proposition a été déposée le 27 novembre 2020 par plusieurs sénateurs, et vise à renforcer le rôle des élus locaux dans l’implantation d’éoliennes terrestres.

Composée d’un article unique, la proposition tend à ajouter un nouvel article L. 181-28-2 au sein du Code de l’environnement, lequel prévoirait l’obligation pour un porteur de projet d’éolien terrestre de soumettre son projet à la commune d’implantation préalablement au dépôt de sa demande d’autorisation environnementale. Le conseil municipal disposerait alors d’un délai (assez court) de quinze jours pour accepter ou refuser le projet, ou pour décider de le soumettre à un référendum local. L’éventuel refus opposé par la commune bloquerait le projet puisque le porteur de projet ne pourrait plus procéder au dépôt de sa demande d’autorisation environnementale.

Cette proposition tend ainsi à faire de l’échelon communal un échelon incontournable des projets d’éolien terrestre.

 

La seconde proposition de loi intéressant également le domaine éolien, dénommée « proposition de loi pour un développement harmonieux de l’éolien », a été déposée le 5 janvier 2021 par plusieurs députés.

Ce texte propose d’apporter plusieurs modifications au sein du Code de l’énergie et de l’environnement dans le but de « d’améliorer la planification territoriale du développement éolien et [d’encourager la participation des citoyens, associations, collectivités et entreprises locales, conformément à la volonté de la convention citoyenne pour le climat » (cf. exposé des motifs).

Parmi ces modifications on retiendra notamment :

  • L’édiction d’un arrêté conjoint des ministres chargés de l’énergie et des collectivités locales, pris après avis de la Commission de Régulation de l’Energie, dans un délai de six mois à compter de la publication ou de la révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie, fixant les objectifs de production d’électricité par l’énergie mécanique du vent assignés à chaque région en tenant compte des critères suivants : potentiel éolien au regard de la cartographie des vents, du potentiel maritime et des possibilités de raccordement aux réseaux électriques, de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés et de la capacité contributive de chaque région au regard des capacités de production existantes.
  • L’élaboration par le Président de Région et le Préfet de Région d’un schéma régional de développement de l’éolien qui traduisant territorialement les objectifs assignés à la région en matière de production d’électricité par l’énergie mécanique du vent par l’arrêté mentionné ci-dessus. Ce schéma serait annexé aux schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) et serait opposable aux schémas de cohérence territoriale, aux plans locaux d’urbanisme et, à défaut, aux cartes communales ou documents en tenant lieu.
  • La création de dispositifs fiscaux incitatifs pour les porteurs de projets, en particulier lorsqu’il s’agit de communautés d’énergie renouvelable, reposant notamment sur un dégrèvement sur l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (IFER).

 

L’examen de cette proposition de loi par la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée Nationale débutera le 9 février prochain. Le calendrier des deux autres propositions de loi ci-dessus évoquées n’est pas, pour l’heure, communiqué.

Fusion de sociétés anonymes : transfert de la responsabilité pénale à la société absorbante

Note explicative de l’arrêt de la chambre criminelle

 

Par un arrêt attendu du 25 novembre 2020, la formation plénière de la chambre criminelle de la Cour de cassation a opéré un important revirement de sa jurisprudence concernant l’impact d’une opération de fusion sur la responsabilité pénale des entités participantes. Jusqu’à présent, la disparition de la personnalité morale de l’entité absorbée consécutivement à la fusion éteignait sa responsabilité pénale au titre de faits qu’elle aurait commis antérieurement à l’opération ; la Cour de cassation juge désormais le contraire, sous certaines conditions.

 

Les faits

Au cas d’espèce, un incendie s’était déclaré dans les entrepôts d’une société de stockage d’archives, et une information judiciaire avait été ouverte du chef du délit de destruction involontaire de biens appartenant à autrui par l’effet d’un incendie provoqué par manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi.

C’est dans ce contexte d’une instruction en cours qu’intervenait une opération de fusion-absorption, la société propriétaire des entrepôts et sa société mère étant absorbées par une autre société.

Les poursuites s’orientant finalement vers une potentielle mise en cause de la responsabilité pénale de la société absorbée, propriétaire des entrepôts, celle-ci était convoquée devant le Tribunal correctionnel ; la société absorbante était pour sa part citée devant cette Juridiction par les parties civiles, après être intervenue volontairement à l’instruction.

La défense opposait à ces poursuites la circonstance tirée de l’opération de fusion réalisée, et de la disparition subséquente de sa personnalité juridique, considérant que sa responsabilité pénale ne pouvait désormais être recherchée de ce chef.

Un supplément d’information était alors ordonné par le Tribunal – puis confirmé par la Cour d’appel – afin principalement de déterminer si cette opération de fusion-absorption n’avait pas été entachée de fraude et n’était pas destinée à faire échec à la responsabilité pénale des sociétés fusionnées. La société fusionnante formait un pourvoi en cassation à l’encontre de cette décision, arguant du fait que le principe de personnalité de la responsabilité pénale – article 121-1 du Code pénal – interdisait qu’une personne soit jugée responsable d’une infraction commise par une autre, qui plus est disparue.

 

Histoire d’un revirement jurisprudentiel annoncé par le droit européen

Classiquement, la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation interdisait de retenir la responsabilité pénale de la société absorbante au titre de faits commis par la société absorbée antérieurement à l’opération de fusion, en raison du principe précité de personnalité de la responsabilité pénale (Cass. Crim., 20 juin 2000, n° 99-86.742, publié ; Cass. Crim., 14 octobre 2003, n° 02-86.376, publié).

Une décision de 2015 de la Cour de justice de l’union européenne (CJUE) avait déjà fragilisé cette position en se fondant sur une directive européenne de 1978 pour juger « qu’une fusion par absorption entraîne la transmission à la société absorbante de l’obligation de payer une amende infligée après cette fusion pour des infractions au code du travail commises par la société absorbée avant la fusion » (CJUE, 5 mars 2015, C-343/13)[1].

La Cour de cassation s’était toutefois jusqu’à présent refusée à suivre cette voie, maintenant sa jurisprudence sur ce point. Un an après la décision de la CJUE, la chambre criminelle de la Cour de cassation avait ainsi explicitement refusé de retenir la responsabilité pénale de la société absorbante en affirmant que l’article 121-1 du Code pénal ne pouvait être interprété qu’en ce sens que la fusion entraînait la dissolution de la personne morale et donc l’extinction de l’action publique en application de l’article 6 du code de procédure pénale (Cass. Crim., 25 octobre 2016, n° 16-80.366, publié).

Rappelons que l’article 6 du code de procédure pénale prévoit l’extinction de l’action publique en raison de la mort du prévenu ; c’est donc en se fondant sur une vision anthropomorphique des personnes morales, assimilant la société absorbée à une personne physique décédée, que la Cour de cassation faisait le choix de maintenir sa jurisprudence.

En 2019, c’est cette fois la Cour européenne des droits de l’homme qui, dans une affaire opposant la société Carrefour à l’Etat français, jugeait que « la société absorbée n’est pas véritablement autrui à l’égard de la société absorbante » en raison de la continuité de l’activité économique de la société absorbée par la société absorbante (CEDH, 24 octobre 2019, Carrefour France c. France, n° 37858/14).  

Bien que cette décision concerne une atteinte à la concurrence – sujette à une amende civile – la chambre criminelle considère dans son arrêt du 25 novembre 2020 qu’elle lui permet désormais d’interpréter l’article 121-1 du Code pénal comme autorisant que la société absorbante soit condamnée pénalement pour des faits commis par la société absorbée antérieurement à l’opération de fusion absorption.

Par cet arrêt du 25 novembre 2020, la Cour de cassation fait ainsi évoluer sa jurisprudence en faisant sien le raisonnement de la CJUE de 2015 en y relevant notamment soulignant que :

  • La directive européenne de 1978 prévoit que la fusion « consiste en un transfert de l’ensemble du patrimoine de la société absorbée à la société absorbante par suite d’une dissolution sans liquidation » ;

  • L’interprétation adoptée par la Cour permet de remplir l’objectif posé par la directive de 1978 tenant à la protection des tiers dont ceux qui, à la date de la fusion, ne sont pas encore qualifiés de créanciers mais qui pourront l’être postérieurement, parmi lesquels l’Etat lui-même ;
  • Retenir la responsabilité pénale de la société absorbante écarte le risque qu’une opération de fusion puisse être considérée comme un moyen d’échapper aux conséquences des infractions commises et participe donc de l’efficacité des peines ;

  • Les sociétés absorbantes ont des moyens de se prémunir des conséquences économiques et patrimoniales de poursuites au titre d’infractions commises avant l’opération de fusion par les sociétés absorbées, notamment en saisissant l’autorité administrative ou judiciaire pour obtenir des garanties, en ajoutant une clause dans l’accord de fusion ou encore en faisant effectuer un audit détaillé avant de réaliser l’opération.

La chambre criminelle de la Cour de cassation ajoute encore que la vision anthropomorphique de la personne morale, qui avait jusqu’alors présidé à son analyse de l’article 121-1 du Code pénal, doit aujourd’hui « être remise en cause car, d’une part, elle ne tient pas compte de la spécificité de la personne morale, qui peut changer de forme sans pour autant être liquidée, d’autre part, elle est sans rapport avec la réalité économique ».  

La chambre criminelle décide donc in fine que la société absorbante peut être tenue pénalement responsable des infractions commises par la société absorbée avant la fusion. Elle bénéficie, en conséquence, de tous les moyens de défense dont aurait pu se prévaloir la société absorbée.

 

Un revirement jurisprudentiel aux contours limités 

Bien sûr, il est encore difficile de se prononcer sur la portée exacte de cet arrêt ; retenons néanmoins qu’il comporte, dans ses termes mêmes, certaines limites qu’il faut dès à présent souligner.

D’abord, la Cour de cassation précise expressément que les opérations de fusion absorption concernées par son arrêt sont celles qui entrent dans le champ de la directive précitée, c’est-à-dire les opérations conclues entre sociétés par actions (sociétés anonymes et sociétés par actions simplifiées principalement).

Ensuite, la chambre criminelle souligne que « cette interprétation nouvelle, qui constitue un revirement de jurisprudence, ne peut s’appliquer aux fusions antérieures à la présente décision sans porter atteinte au principe de prévisibilité juridique » et décide donc de n’appliquer ce principe général de responsabilité pénale de la société absorbante qu’aux opérations de fusions conclues – et non pas réalisées – postérieurement au 25 novembre 2020.

La chambre criminelle aurait pourtant pu s’appuyer sur les jurisprudences convergentes du Conseil d’Etat (CE, 22 novembre 2000, n° 207697 ; CE, 23 juillet 2014, n° 359902), de la chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. Com., 28 février 2006, n° 05-12.138, publié ; Cass. Com., 21 janvier 2014, n° 12-29.166, publié) et du Conseil constitutionnel (Cons. const., 18 mai 2016, QPC n° 2016-542) pour affirmer que ce revirement de jurisprudence n’était pas imprévisible ; elle se prononce toutefois explicitement dans un sens contraire.

Par ailleurs, la société absorbante ne peut être condamnée qu’à une peine d’amende ou de confiscation[2]  ce qui semble donc impliquer que les peines d’autres natures, notamment celles prévues par l’article 131-39 du Code pénal, ne pourraient être prononcées – dissolution, interdictions d’exercice, placement sous surveillance judiciaire, etc.

Rappelons encore que cette nouvelle solution implique que la société absorbante dont la responsabilité pénale serait mise en cause au titre d’infractions commises par la société absorbée pourra « se prévaloir de tout moyen de défense que celle-ci aurait pu invoquer ».

La Cour de cassation réserve enfin l’hypothèse de la fraude.

 

Conséquences d’une fusion constituant une fraude à la loi

Dans son arrêt, la Cour de cassation souligne que « l’existence d’une fraude à la loi permet au juge de prononcer une sanction pénale à l’encontre de la société absorbante lorsque l’opération de fusion absorption a eu pour objectif de faire échapper la société absorbée à sa responsabilité pénale ».

Elle s’était certes déjà prononcée en ce sens en considérant que les juges correctionnels devaient s’assurer que le changement de forme juridique d’une société n’avait pas pour objet d’échapper à des poursuites pour des infractions en droit du travail (Cass. Crim., 23 avril 1970, n° 68-91.333, publié). Le principe est donc ainsi généralisé au-delà du droit pénal du travail.

La Cour de cassation retient toutefois que sa position sur ce point n’était pas imprévisible, de sorte qu’elle considère que cette solution est applicable aux fusions absorption réalisées avant son arrêt.

 

Il s’agit là, à n’en pas douter, d’une décision importante qui aura vocation à s’appliquer notamment aux fusions absorption des entreprises publiques revêtant la forme de sociétés anonymes ; elle invite tout particulièrement à intégrer la problématique pénale dans les diligences de préacquisition.

Anne-Christine Farçat, Matthieu Hénon, Sonia Kanoun et Marine Segura

[1] Voyez sur ce point notre Lettre d’actualité juridique n° 52 de septembre 2015.

[2] Les peines complémentaires de confiscation sont notamment prévues par l’article 131-21 du Code pénal et peuvent porter « sur tous les biens meubles ou immeubles, quelle qu’en soit la nature, divis ou indivis, ayant servi à commettre l’infraction ou qui étaient destinés à la commettre, et dont le condamné est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition ».

 

Il est possible, lors de la séance d’installation du conseil communautaire, de n’élire que le Président

L’article L. 5211-6 alinéa 3 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que « Lors de la première réunion de l’organe délibérant, immédiatement après l’élection du président, des vice-présidents et des autres membres du bureau, le président donne lecture de la charte de l’élu local prévue à l’article L. 1111-1-1 […] ».

La formulation de cette disposition pose la question de savoir si l’élection du Président du conseil communautaire doit nécessairement être suivie, sous peine d’irrégularité, de celle des vice-présidents, c’est-à-dire lors de la même séance.

Par un arrêt en date du 29 décembre 2020, le Conseil d’État a répondu explicitement à cette question en considérant qu’il ne résultait pas de ces dispositions « que la régularité de l’élection du président serait subordonnée à la condition qu’il soit effectivement procédé, au cours de la même séance, au scrutin portant sur l’élection des vice-présidents et des autres membres du bureau, ces différents scrutins demeurant distincts les uns des autres ».

Cette solution apparaît a priori transposable à l’élection du maire et de ses adjoints, notamment régie par les dispositions de l’article L. 2121-7 alinéa 3 qui disposent, de la même façon que l’article L. 5211-6 du CGCT précité, que « Lors de la première réunion du conseil municipal, immédiatement après l’élection du maire et des adjoints, le maire donne lecture de la charte de l’élu local prévue à l’article L. 1111-1-1. […] ».

L’obligation de reclassement des agents contractuels d’une régie personnalisée s’étend à la Commune !

La question n’est plus aujourd’hui de savoir dans quelles hypothèses un agent contractuel doit être reclassé, mais plutôt dans quelle rares hypothèses ne doit-il pas l’être.

Par sa très récente décision du 14 janvier dernier, la Cour administrative d’appel de Lyon a décidé que la Commune qui prend la décision de dissoudre une régie personnalisée – avec personnalité morale donc – se voit imposer une obligation de reclassement au sein de ses propres effectifs des agents contractuels employés par la régie.

Dans un considérant pour le moins surprenant, et surtout peu explicite, la Cour a ainsi considéré :

« S’il appartient à l’autorité territoriale compétente de la régie d’inviter l’agent contractuel qu’elle entend licencier, à raison de la suppression de son emploi, à présenter une demande écrite de reclassement, en application des dispositions de l’article 39-5 du décret n° 88-145 du 15 février 1988, le maire de la commune, qui est chargé de procéder à la liquidation de la régie, est tenu, quant à lui, de chercher à reclasser, dans un emploi pouvant légalement être occupé par un agent contractuel, l’agent qui n’a pas pu faire l’objet d’un reclassement de la part de la régie. »

En réalité, on obtient l’explication avec le jugement du Tribunal administratif qui était contesté par la Commune, puisqu’il avait également annulé le licenciement de l’agent :

« Qu’il incombe ensuite au maire, en application de l’article R. 2221-17 du code général des collectivités territoriales, de procéder à la liquidation de la  régie municipale dissoute, ce qui inclut, le cas échéant, la reprise de ses contrats de travail en cours, avant reclassement des agents contractuels concernés dans les services de la Commune, au terme de la procédure prévue à l’article 39-5 précité ou, en cas d’échec, le licenciement des agents concernés sur le fondement de l’article 39-3 précité du décret du 15 février 1988 »

En d’autres termes, dès lors que l’article R. 2221-17 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose en son 3ème alinéa que « L’actif et le passif de la régie sont repris dans les comptes de la commune », les contrats de travail faisant, comptablement parlant, partie de l’actif d’une régie, la Commune est tenue de reprendre les contrats de travail de la régie, fût-elle personnalisée.

D’ailleurs, formellement, la Régie elle-même doit dans un premier temps rechercher un reclassement, et dès lors qu’elle y a échoué, la Commune doit elle-même procéder à une recherche identique.

Pour autant, on pourrait s’interroger en l’espèce sur le point de savoir si le contrat de l’agent était bien « en cours » ce qui était la condition pour qu’il soit repris par la Commune et que cette dernière ait donc l’obligation de rechercher un reclassement.

En effet, il ressort des deux décisions que la liquidation de la régie, décidée par délibération du 23 mai 2016, devait intervenir « au plus tard » au 1er décembre 2016.

Or, l’agent contractuel concerné a été licencié par une décision du 21 juillet 2016, à compter du 1er décembre 2016.

Si on suit bien, le contrat de l’agent était donc résilié à compter du 1er décembre 2016, il n’était donc plus « en cours », par définition.

Deux interprétations sont donc possibles : soit la dissolution de la régie est intervenue antérieurement au 1er décembre 2016 et le contrat était donc encore en cours quand le Maire a procédé aux opérations de liquidation, soit le seul fait d’avoir décidé la liquidation, entraînait, par une sorte de mécanisme de connaissance acquise, l’obligation pour la commune de rechercher un reclassement.

Ou une troisième piste peut être envisagée : il ressort des décisions qu’aucune procédure de reclassement n’a été initiée par la régie – assez logiquement dès lors qu’elle disparaissait. Or, lorsque le reclassement n’a pas pu être mis en œuvre avant l’issue du préavis de licenciement, l’agent est placé en congé sans traitement, pour trois mois au maximum, et la date d’effet du licenciement est suspendue (cf. article 39-5 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 et avis CE, 23 décembre 2016, n° 402500), entraînant donc le maintien du contrat au moment de la reprise par la Commune.

Gageons que les conclusions du Rapporteur public seront prochainement publiées, et que nous pourrons enfin comprendre cette décision et sécuriser ainsi les procédures de dissolution de régie.

Régulariser son projet par l’obtention d’une dérogation aux règles d’urbanisme (L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme)

Dans une décision mentionnée aux Tables, le Conseil d’Etat est venu préciser que « la mesure de la régularisation prise au titre de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme peut, le cas échéant, prendre la forme d’une dérogation aux règles d’urbanisme applicables, sur le fondement notamment de l’article L. 152-6 de ce code, à la condition que le pétitionnaire ait formé une demande en ce sens conformément à l’article R. 431-31-2 du même code ».

Dans cette affaire, la commune de la Rochelle a délivré à la société BC Promotion un permis de construire contre lequel la société Lapeyre a formé un recours pour excès de pouvoir.

Par un jugement du 5 juillet 2018, le Tribunal administratif de Poitiers a sursis à statuer, en application de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme, et a accordé un délai de deux mois à la société BC Promotion pour lui permettre d’obtenir une régularisation du vice tiré de la méconnaissance de l’article UC7 du règlement du PLU. 

La Commune a délivré à la société BC Promotion deux permis de construire modificatifs par arrêtés du 22 juin 2018 et du 16 novembre 2018 comportant des dérogations aux règles d’urbanisme applicables sur le fondement de l’article L. 152-6 du Code de l’urbanisme que la société Lapeyre a de nouveau attaqué. 

A cette occasion, le Conseil d’Etat a donc précisé que la mesure de régularisation au titre de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme peut prendre la forme d’une dérogation aux règles d’urbanisme, notamment sur le fondement de l’article L. 152-6 du Code de l’urbanisme et à condition que le pétitionnaire ait formé une demande en ce sens (conformément aux dispositions applicables).

Pour rappel, l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme permet au juge administratif de sursoir à statuer lorsqu’il estime qu’un vice entrainant l’illégalité de l’autorisation d’urbanisme est susceptible d’être régularisé.

Dans le cadre de cette décision, le Conseil d’Etat a également rappelé que le respect de l’objectif de mixité sociale (condition d’obtention de la dérogation) relevait de l’appréciation souveraine des juges du fond.

L’assignation avec prise de date : report de son entrée en vigueur

Publiés au Journal officiel du 23 décembre 2020, le décret n° 2020-1641 du 22 décembre 2020 reportant la date d’entrée en vigueur de l’assignation à date dans les procédures autres que celles de divorce et de séparation de corps judiciaires, d’une part, et l’arrêté du 22 décembre 2020 modifiant l’arrêté du 9 mars 2020 relatif aux modalités de communication de la date de première audience devant le Tribunal judiciaire, d’autre part, viennent préciser les conditions de mise en œuvre de la prise de date à compter du 1er janvier 2021.

En effet, les réformateurs de la procédure civile ont souhaité que toutes les assignations, y compris celles délivrées dans le cadre de la procédure écrite ordinaire, mentionnent désormais la date de l’audience d’orientation.

Toutefois, le décret du 22 décembre 2020 précise que les articles 56, 752, 757 et 758 du Code de procédure civile, dans leur rédaction antérieure au décret n° 2020-1333 du 11 décembre 2019, demeurent applicables à la procédure écrite ordinaire jusqu’au 1er juillet 2021.

En revanche, la procédure à jour fixe n’est pas concernée par ce report même si elle n’est possible que dans les seuls litiges relevant de la procédure écrite ordinaire. En effet, une telle assignation mentionne nécessairement la date d’audience fixée par le président au vu de l’urgence.

L’obligation d’auditionner le mineur ou de justifier son absence de discernement

Par ordonnance de placement provisoire du 23 août 2017, le procureur de la République a confié un mineur à l’aide sociale à l’enfance. Cette mesure a été confirmée par le juge des enfants.

La grand-tante maternelle de l’enfant a saisi le juge des enfants d’une demande tendant à l’exercice d’un droit de visite et d’hébergement.

Le Juge des enfants n’a pas procédé à l’audition du mineur.

Toutefois, la Cour d’appel saisie de l’appel interjeté à l’encontre de la décision du Juge des enfants n’a pas procédé à l’audition de l’enfant.

C’est ainsi que, au visa des articles 1189 aliéna 1er et 1193 alinéa 1er du Code de procédure civile, la Cour de cassation a jugé que :

« Lorsqu’elle est saisie d’une demande tendant à voir fixer pour la première fois les modalités des relations entre l’enfant placé et un tiers, parent ou non, la cour d’appel ne peut se dispenser d’entendre le mineur, dont elle n’a pas constaté l’absence de discernement, que si celui-ci a été précédemment entendu, relativement à cette demande, par le juge des enfants ».

La Cour de cassation rappelle ainsi que, avant de statuer sur une demande de droit de visite et d’hébergement d’un tiers, parent ou non, la juridiction doit entendre l’enfant, à moins qu’elle n’ait constaté son absence de discernement.

QPC : Le droit de propriété du bailleur atteint par l’indemnité d’éviction du preneur ?

Dans le cadre d’un contentieux en fixation de l’indemnité d’éviction introduite par un preneur, le Tribunal judiciaire de Paris a transmis à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) suivante :

« L’article L. 145-14 du code de commerce est-il conforme à la Constitution et au bloc de constitutionnalité, précisément au droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, à la liberté contractuelle garantie par l’article 4 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, à la liberté d’entreprendre protégée par l’article 4 du Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, au principe d’égalité garanti par l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 et les articles 1 et 6 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, et respecte-t-il la compétence réservée à la loi par la Constitution de 1958 ? ».

La Cour de cassation a considéré que la question présentait un caractère sérieux en ce que, « en retenant que l’indemnité d’éviction doit notamment comprendre la valeur vénale du fonds de commerce défini selon les usages de la profession sans prévoir de plafond, de sorte que le montant de l’indemnité d’éviction pourrait dépasser la valeur vénale de l’immeuble, la disposition contestée est susceptible de porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété du bailleur ».

La Cour de cassation a ainsi renvoyé la question au Conseil constitutionnel.

La réponse que pourrait apporter le Conseil constitutionnel pourrait conduire, pour le cas où les sages considèreraient que l’article L. 145-14 du Code de commerce porte une atteinte disproportionnée au droit de propriété du bailleur, au plafonnement de l’indemnité due au preneur lors de son éviction commerciale.

Accords collectifs dans la fonction publique : un chantier en voie d’achèvement

L’idée de donner une force obligatoire aux accords collectifs dans la fonction publique n’est pas nouvelle et a été défendue dans plusieurs rapports (exemple : livre blanc sur le dialogue social de 2002).

Mais, de jurisprudence constante, lorsque de tes accords sont conclus, il sont dépourvus de portée juridique (Voir par exemple CE, 8 février 1999, Assoc. synd. des cadres supérieurs et ingénieurs aux télécommunications, req. n° 186910 et 187811 et CE, 23 févier 2001, Synd. CFDT des personnels assurant un service aviation civile et activités connexes, req. n° 212274), compte-tenu notamment de ce que le principe est que les fonctionnaires sont dans une situation statutaire et règlementaire vis-à-vis de l’administration.

La loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a finalement franchi un pas en autorisant le Gouvernement à prendre sur ordonnance, dans les quinze mois de la publication de la loi, des mesures pour négocier des accords ayant une portée juridique, y compris au niveau local :

« Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances, dans un délai de quinze mois à compter de la publication de la présente loi, toutes dispositions relevant du domaine de la loi afin de favoriser, aux niveaux national et local, la conclusion d’accords négociés dans la fonction publique […]. » (cf. article 15).

Le projet d’ordonnance a donc été examiné le 18 décembre 2020 par le Conseil commun de la fonction publique. et la version finale présentée par le gouvernement a obtenu un avis favorable majoritaire.

La version soumise au Conseil commun de la fonction publique indiquait un champ de la négociation possible sur les dix-sept thèmes suivants :

  • Les conditions et l’organisation du travail, notamment l’hygiène, la sécurité et la santé au travail ;
  • Le temps de travail, le télétravail et la qualité de vie au travail ;
  • Les impacts de la numérisation sur l’organisation du travail et sur les conditions de travail ;
  • Les modalités des déplacements domicile-travail ;
  • L’accompagnement social des mesures de réorganisation des services ;
  • La mise en œuvre des actions en faveur de la lutte contre le changement climatique et la préservation des ressources et l’environnement ;
  • L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;
  • La promotion de l’égalité des chances et la reconnaissance de la diversité ;
  • La prévention des discriminations dans l’accès aux emplois et la gestion des carrières ;
  • L’insertion professionnelle, le maintien dans l’emploi et l’évolution professionnelle des personnes en situation de handicap ;
  • Le déroulement des carrières et la promotion professionnelle ;
  • La formation professionnelle et continue ;
  • L’apprentissage ;
  • L’intéressement collectif ;
  • L’action sociale ;
  • La protection sociale complémentaire ;
  • L’évolution des métiers et la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

 

Il semble que le gouvernement a accepté, à la demande de plusieurs syndicats, de ne pas limiter à dix-sept le nombre de thèmes ouverts à la négociation collective. Il se pourrait donc que la version finale ouvre encore davantage le champ des possibles.

En l’état du texte à notre disposition il existe cependant un point essentiel à noter : l’ordonnance va indiquer que les accords ne sauraient déroger aux dispositions législatives et règlementaires.

En effet, l’article 8-7 du projet dispose que les accords conclus peuvent certes comporter des clauses par lesquelles l’autorité compétente édicte directement des mesures réglementaires, mais qui ne peuvent pas porter sur des décisions individuelles et doivent être conformes aux dispositions réglementaires édictées par une autorité administrative hiérarchiquement supérieure à celle ayant conclu l’accord. Il indique aussi que ces clauses ne sont pas soumises à la consultation préalable des organismes consultatifs compétents mais qu’ils ne peuvent déroger à une norme législative ou à un décret en Conseil d’Etat ni porter sur des décisions individuelles.

A ce stade cela signifie qu’on ne saurait octroyer des avantages plus importants que ceux posés par les textes comme étant des maximas et qu’on ne pourrait pas non plus déroger à des garanties, quand bien même les signataires de l’accord en seraient d’accord.

Bref, beaucoup de bruit pour peut-être peu d’effets si ce n’est davantage de dialogue, ce qui n’est évidemment pas négligeable.

Au vu du délai posé par la loi, la parution de l’ordonnance est imminente.

Quelques actualités de début d’année dans le secteur ferroviaire

Parution du décret portant sur le transfert de gestion des lignes de desserte fine du territoire

Décret n° 2020-1820 du 29 décembre 2020 relatif au transfert de gestion de lignes ferroviaires d’intérêt local ou régional à faible trafic et au transfert de missions de gestion de l’infrastructure sur de telles lignes, et portant diverses autres dispositions 

L’article 172 de la loi « LOM » a prévu deux dispositifs de transfert des « petites lignes » aux autorités organisatrices de transport ferroviaires. Il peut s’agir d’un transfert de gestion complet (c’est-à-dire de l’ensemble des missions confiées normalement à SNCF Réseau aux termes de l’article L. 2111-9 du Code des transports) ou partiel, de certaines missions de gestion de l’infrastructure ferroviaire, portant sur sa maintenance ainsi que sur le développement, l’aménagement, la cohérence et la mise en valeur du réseau ferré national.

A sa demande, une AO régionale peut en effet solliciter un tel transfert de gestion (total) ou de missions (partiel) auprès du Ministre chargé des transports, lequel, après avoir recueilli l’avis de SNCF Réseau, de l’Autorité de régulation des transports (voire de SNCF Gares & Connexions lorsqu’elle est concernée s’agissant de la gestion des gares de voyageurs).

Le décret du 29 décembre 2020 vient apporter un certain nombre d’éclairages sur les modalités de ce transfert, s’agissant de la procédure à suivre et des actes à conclure, c’est-à-dire :

  • Une convention de transfert de gestion/de missions conclue entre le gestionnaire historique du réseau ferré national et l’AO précisant notamment la date du transfert et les questions relatives au personnel, et, par ailleurs, qui devra prévoir les compensations financières afférentes au transfert ;
  • Une convention technique d’application réunissant en outre SNCF Gares & Connexions ainsi que le gestionnaire que l’AO aurait désigné pour assurer ces missions, devant définir toutes les mesures nécessaires au bon fonctionnement de la ligne et les sujets d’interface.

Par ailleurs, le projet de décret précise les contours de la consistance des petites lignes, sans que celle-ci ne puisse être déterminée de manière pérenne compte tenu du renvoi au contrat de performance conclu entre l’Etat et SNCF Réseau, dont le contenu est susceptible d’évoluer au cours du temps, s’agissant de la notion de faible trafic pour les lignes dont 90 % au moins des services réguliers ont été organisés par des AO ferroviaires autres que l’Etat au cours des cinq derniers horaires de service. Cela avait fait l’objet de critiques de la part de l’ART, mais n’a finalement pas été revu par le pouvoir règlementaire (Avis n° 2020-069 du 22 octobre 2020).

Enfin, il est à regretter que ce décret n’apporte pas de précisions s’agissant des obligations d’accès au réseau, de sécurité et d’interopérabilité, ce qui risque de placer les AO ferroviaires, et les gestionnaires qu’elles désigneraient éventuellement, dans des situations potentiellement difficiles.

Il appartiendra aux AO régionales de définir le cadre juridique précis applicable à leur situation, notamment au regard des règles du droit européen applicables en la matière.

 

La parution du décret portant sur les transferts de gestion des gares « monotransporteurs » se fait attendre

L’avis de l’ART sur les gares « monotransporteurs »

Prévu par la loi pour un nouveau pacte ferroviaire du 27 juin 2018, l’article L. 2121-17-4 du Code des transports (créé par l’ordonnance n° 2018-1135 du 12 décembre 2018) prévoit qu’une AOT puisse assurer la gestion et l’exploitation des gares de voyageurs relevant de son ressort territorial et principalement utilisées par les services publics de transports ferroviaire de voyageurs, soit elle-même, soit par l’intermédiaire d’un opérateur dans le cadre d’un contrat de service public de transport ferroviaire de voyageurs, pour le compte du gestionnaire des gares, SNCF Gares & Connexions.

Saisie du projet de décret devant expliciter ces dispositions, l’ART a notamment indiqué qu’il devait être fait une application des dispositions législatives strictement aux gares monostranspoteurs, bien que le texte de loi ne s’y limite pas. 

L’Autorité a également pointé un risque de discrimination dans les gares multi-transporteurs, lié au modèle de « transporteur intégrateur » et, par ailleurs, en matière de tarification des prestations régulées. Elle a également pointé un risque d’inefficacité lié à la complexité du système mis en place s’agissant de la répartition des rôles et des responsabilités entre les différents acteurs en présence et de l’organisation de leurs relations (induisant des risques d’opacité et de renchérissement des coûts). En effet, ce modèle induit la mise en place de multiples relations complexes, de nature technique et financière, entre différents acteurs (cf. schéma dans l’avis de l’ART n° 2020-064 du 8 octobre 2020). La parution du décret définitif est attendue prochainement.

 

 

L’Autorité de régulation des transports (ART) valide les redevances 2021 des prestations régulées de maintenance effectuées dans les centres d’entretien

 

L’avis de l’ART sur les redevances 2021 des prestations régulées dans les centres d’entretien 

Par un avis du 26 novembre 2020, l’ART a  émis un avis favorable sur les tarifs des redevances relatives aux prestations régulées fournies par SNCF Voyageurs et Fret SNCF dans leurs installations de service des centres d’entretien pour les horaires de service 2020 et 2021, alors qu’elle avait retoqué à plusieurs reprises cette tarification ces dernières années.

L’ART note un certain nombre d’avancées importantes, notamment s’agissant de la comptabilité analytique mise en place et du suivi, de la conformité et de la justification des tarifs. Elle émet néanmoins encore de nombreuses recommandations, devant constituer des axes d’amélioration pour SNCF Voyageurs et Fret SNCF.

Résiliation du bail en cas de violences de l’enfant des preneurs contre les agents du bailleur

A la suite de violences exercées par l’enfant mineur d’une locataire à bail à usage d’habitation à l’égard d’agents du bailleur, l’enfant est condamné pénalement et la famille est relogée dans le parc locatif du bailleur.

L’enfant de la locataire, devenu majeur, commet de nouvelles violences à l’égard d’agents du bailleur qui agit cette fois en résiliation de bail sur le fondement du manquement du preneur à son obligation de jouissance paisible de l’article 1728 du Code civil.

La Cour d’appel fait droit à la demande du bailleur.

La locataire se pourvoit en cassation et invoque l’absence de lien entre les troubles constatés et un manquement à l’obligation, pour le preneur, d’user paisiblement de la chose louée et de ses accessoires, preuve n’étant pas rapportée que les actes de violence dont il est fait état auraient causé un trouble quelconque dans les lieux donnés à bail ainsi que dans l’immeuble.

La Cour de cassation rejette le pourvoi et retient :

« Les violences commises par le fils de Mme X à l’encontre des employés du bailleur et réitérées après une première condamnation pénale constituaient des manquements à l’obligation d’usage paisible des lieux incombant au preneur et aux personnes vivant sous son toit et que le lieu de commission des violences importait peu dès lors que les victimes étaient des agents du bailleur ».

Cet arrêt illustre une nouvelle fois la possibilité pour les bailleurs de voir prononcer la résiliation du bail des locataires en cas de troubles de jouissance commis par les personnes dont ils doivent répondre, hypothèse récurrente en matière de trafic de stupéfiants commis par les enfants des locataires.

Par ailleurs, la Cour de cassation fait ici une application extensive de l’obligation de jouissance paisible du preneur puisque le manquement constaté au-delà des limites strictes du logement et des parties communes est sanctionné par la résiliation du bail.