Projets immobiliers publics privés
le 30/08/2022

Vers une responsabilité accrue du syndicat des copropriétaires en cas d’intoxication au plomb ?

Cass. Civ., 3ème, 6 juillet 2022, n° 20.23.626

Le plomb utilisé dans la composition des peintures jusque dans la première moitié du 20ème siècle peut, lorsqu’il est inhalé ou ingéré, provoquer une intoxication, voire une maladie grave : le saturnisme.

C’est pourquoi la loi impose, le repérage et le confinement de ce matériau (articles L. 1334 et suivants du Code de la santé publique).

Tous les immeubles affectés en tout ou partie à l’habitation et construits avant 1949, doivent faire l’objet d’un constat de risque d’exposition au plomb (CREP).

Lorsqu’un cas d’intoxication est avéré, la jurisprudence semble se montrer particulièrement sévère pour le syndicat de copropriété.

Dans un arrêt en date du 6 juillet 2022 la Cour de cassation a retenu la responsabilité du syndicat des copropriétaires d’un immeuble ainsi que celles des bailleurs de deux appartements, à la suite de l’intoxication d’un enfant et de son père (Cass. Civ., 3ème, 6 juillet 2022, n° 20.23.626)

Dans cette affaire, l’enfant ayant habité successivement dans deux appartements d’un même immeuble a été victime d’une intoxication saturnique.

Des expertises techniques ont révélé la présence de plomb dans les deux appartements occupés par la famille ainsi que dans les parties communes de la copropriété.

Les parents de l’enfant ont engagé la responsabilité de leurs bailleurs et du syndicat des copropriétaires en leur nom propre et en leur qualité de représentant de leur fils mineur.

La Cour d’appel d’Aix en Provence a retenu la responsabilité partagée des bailleurs, à hauteur de 60 % pour le bailleur du premier logement et de 30 % pour le bailleur du second logement, ainsi que celle du syndicat des copropriétaires à hauteur de 10 %.

Les bailleurs ont formé un pourvoi soutenant notamment que le lien de causalité entre la présence de plomb et le préjudice subi par les locataires n’était pas direct et certain.

Cet argument apparaissait encore plus à propos pour le plomb détecté dans les parties communes, dans lesquelles l’enfant ne faisait que passer.

Les bailleurs soutenaient également que les mesures effectuées pour détecter la présence des substances nocives, révélaient des taux inférieurs aux seuils de situation à risque de saturnisme infantile, tels que définis par l’arrêté du 18 août 2011 relatif au risque d’exposition au plomb.

La Cour de cassation a estimé que ce moyen n’était pas fondé.

La seule présence avérée de plomb étant, selon elle suffisante, pour engager la responsabilité des bailleurs et du syndicat des copropriétaires.

La Cour de cassation s’est ainsi prononcée :

« La Cour d’appel, qui a examiné les éléments de faits et de preuve qui lui étaient soumis, sans être tenue d’entrer dans le détail de l’argumentation des parties, a relevé que le médecin expert avait confirmé que le diagnostic de saturnisme de (S), (P) était consécutif à une exposition au plomb dans son environnement de vie. Elle a retenu que la présence de plomb avait été mise en évidence dans le premier logement occupé par la famille et dans les parties communes de l’immeuble par l’expertise technique, et dans le second par l’agence régionale de santé. Elle en a exactement déduit l’existence d’un lien de causalité direct et certain entre la présence de plomb dans les locaux donnés à bail et l’intoxication saturnique de (S) (P), engageant de ce fait la responsabilité des bailleurs successifs et du syndicat des copropriétaires ».

Ainsi la responsabilité du syndicat des copropriétaires de cet immeuble a été retenue alors que l’enfant ne vivait pas bien entendu, dans les parties communes mais bien dans les appartements loués par ses parents.

En conséquence, il apparaît que les syndicats de copropriété doivent se montrer extrêmement vigilants dans la réalisation des diagnostics à réaliser, et des mesures à prendre en cas de présence effective de plomb ou de tout autre substance nocive, au risque de voir leur responsabilité engagée.