Energie
le 16/05/2024
Thomas ROUVEYRAN
Yann-Gaël NICOLAS

La prise de participation des collectivités territoriales et de leurs groupements au sein de sociétés de production d’énergies renouvelables n’est pas subordonnée à l’exercice de la compétence en matière de production d’énergies renouvelables.

CAA Nantes, 19 avril 2024, Inédit au recueil Lebon, n° 23NT01257

Par une décision en date du 19 avril 2024, la Cour administrative d’appel de Nantes apporte d’utiles précisions quant à la prise de participation des collectivités territoriales et leurs groupements au capital de sociétés dédiées à la production d’énergies renouvelables (CAA Nantes, 23NT01257).

Pour rappel, les communes et leurs groupements sont autorisés à exploiter toute nouvelle installation utilisant des énergies renouvelables – article L. 2224-32 du Code général des collectivités territoriales. Et le même Code les autorise en outre à « participer au capital d’une société anonyme ou d’une société par actions simplifiée dont l’objet social est la production d’énergies renouvelables par des installations situées sur leur territoire » – article L. 2253-1.

Ces deux dispositions bien distinctes, ont toutefois fait l’objet d’une interprétation combinée particulièrement stricte par la doctrine administrative et par certains tribunaux administratifs (TA Rennes, 25 janvier 2024, préfet du Finistère, n° 2300530). Selon ces derniers et conformément aux principes de spécialité et d’exclusivité, les groupements de collectivités territoriales peuvent exercer la compétence prévue à l’article L. 2224-32 uniquement si elle leur a été préalablement transférée par leurs membres. En conséquence, dès lors qu’une commune a transféré cette compétence, elle s’en trouve dessaisie et ne peut plus intervenir en matière de production d’énergies renouvelables, y compris pour prendre des participations au capital d’une société dédiée à la production d’énergies renouvelables comme le prévoit pourtant l’article L. 2253-1.

Au contraire, la Cour administrative d’appel de Nantes juge de manière très claire dans cette affaire qui opposait la préfète de la Mayenne à la commune de Congrier que le Code général des collectivités territoriales n’a pas entendu imposer que seules les collectivités disposant de la compétence en matière de production d’énergies renouvelables puissent participer au capital d’une société anonyme ou d’une société par actions simplifiée dont l’objet social est la production de ces énergies.

De même, elle retient que l’inscription, dans les statuts d’un groupement de collectivités, de la possibilité de prendre des participations au capital d’une société dédiée à la production d’énergies renouvelables, telle que prévue à l’article L. 2253-1, ne saurait être confondue à un transfert de compétence. Il en ressort que la méconnaissance des principes de spécialité et d’exclusivité ne saurait davantage être opposée à la prise de participation conjointe d’une commune et de son groupement de collectivités dans une société de production d’énergies renouvelables.

La Cour administrative d’appel de Nantes ouvre donc la voie à une prise de participation conjointes des communes et de leurs groupements de collectivités dans des sociétés anonymes ou dans des sociétés par actions simplifiée dont l’objet social est la production d’énergies renouvelables.

Cette décision, tout à fait fondée en droit, soutient opportunément les initiatives publiques locales en faveur du développement des énergies renouvelables par toutes les collectivités et groupements de collectivités.

Certes, cette décision ne statue pas sur le caractère partagé de la compétence définie à l’article L. 2224-32 du Code général des collectivités territoriales.

Autrement dit, elle ne remet pas directement en cause la doctrine administrative et certains jugements administratifs (TA Rennes, 25 janvier 2024, préfet du Finistère, n° 2300530) en ce qu’ils retiennent qu’un groupement de collectivités ne peut exercer la compétence prévue à l’article L. 2224-32 que si elle lui a été préalablement transférée par ses membres, et qu’à l’inverse, dès lors que la commune a transféré cette compétence audit groupement, elle se trouve dessaisie de la compétence. Cette position est toutefois très contestable d’un point de vue juridique, comme déjà indiqué dans notre précédente lettre d’actualités, de mars 2024.