- Droit pénal de l'environnement
le 15/02/2023
Marlène JOUBIER
Guillaume HÉLIAS

Défrichement illégal : les souches d’arbres qui cachent la forêt

Cass. Crim. 4 janvier 2023, FS-B, n° 22-80.393

Dans un arrêt en date du 4 janvier 2023, la Chambre criminelle de la Cour de cassation cassait l’arrêt confirmant l’ordonnance de non-lieu dans une affaire de défrichement illégal de parcelles boisées, estimant que la seule présence de souches d’arbres conférait au site une destination forestière et exigeait dès lors une autorisation préfectorale pour y procéder.

En l’espèce, une association avait porté plainte et s’était constituée partie civile du chef de défrichement sans autorisation de bois ou de forêt – exigée par les dispositions des articles L. 341-1 et L. 341-3 du Code forestier et réprimée par l’article L. 363-1 du Code forestier – de parcelles forestières alors destinées à la réalisation d’une zone d’activité commerciale.

A l’issue de l’information, le juge d’instruction rendait une ordonnance de non-lieu dont appel était interjeté par l’association plaignante. La Chambre de l’instruction confirmait l’ordonnance de non-lieu estimant que l’absence d’arbres sur la parcelle au moment des faits, en 2014, en raison d’un précédent défrichement via une autorisation préfectorale en 2003, faisait échec à sa dénomination de parcelle boisée et à destination forestière.

Ainsi, selon les juges du fond, le délit de l’article L. 363-1 du Code forestier n’était pas caractérisé, faute d’identification d’une parcelle boisée et à destination forestière à défricher.

L’association formait un pourvoi en cassation « notamment au regard de la circonstance que les souches des chênes, coupés lors d’une intervention en 2003, étaient restées » sur la parcelle, et avaient survécu au précédent défrichement.

Elle invoquait également une décision du Tribunal administratif rendu dans l’affaire en 2006 qui avait annulé l’autorisation préfectorale de 2003 et estimait, à ce titre, qu’une nouvelle autorisation préfectorale était nécessaire afin de procéder au défrichement de la parcelle.

Après avoir rappelé « qu’est punissable le défrichement, effectué sans autorisation, consistant en toute opération volontaire ayant pour effet de détruire l’état boisé d’un terrain et de mettre fin à sa destination forestière », la Cour de cassation cassait l’arrêt de la Chambre de l’instruction considérant qu’en dépit de l’intervention de 2003, « les souches de tous les arbres rasés étaient restées, de sorte qu’il n’avait été mis fin ni à l’état boisé ni à la destination forestière des parcelles ».

Par cet arrêt, la Cour de cassation vient ainsi préciser les contours du délit de défrichement forestier sans autorisation en retenant une définition extensive de la notion d’état boisé et de destination forestière d’une parcelle.