L’article L. 622-14 du Code de commerce prévoit, dans l’hypothèse où un preneur à bail commercial fait l’objet d’une procédure collective, que le bailleur peut demander « la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture, le bailleur ne pouvant agir qu’au terme d’un délai de trois mois à compter dudit jugement ».
L’alinéa 4 du même article précise que « si le paiement des sommes dues intervient avant l’expiration de ce délai [de trois mois], il n’y a pas lieu à résiliation ».
Dans l’arrêt commenté, la Cour de cassation s’est prononcée sur le fait de savoir si cette résiliation était de plein droit, ou si la situation pouvait faire l’objet d’une régularisation après l’expiration du délai de trois mois et avant que le juge-commissaire ne statue sur cette résiliation.
En l’espèce, une société preneuse d’un bail commercial est placée en redressement judiciaire le 28 avril 2020.
Le 10 septembre suivant, son bailleur saisit le juge-commissaire d’une requête aux fins de voir constater la résiliation du bail, faute de paiement des loyers depuis l’ouverture du redressement judiciaire.
La veille du dépôt de cette requête, les sommes dues par le preneur depuis le jugement d’ouverture sont versées entre les mains du bailleur.
Le bailleur est débouté de sa demande par le juge-commissaire puis par le Tribunal de commerce. En cause d’appel, il persiste à demander que soit constatée la résiliation de plein droit du bail à compter du 28 juillet 2020, terme du délai de trois mois à compter du jugement d’ouverture, faute de paiement avant cette date des loyers échus postérieurement au jugement d’ouverture. La Cour d’appel ne fait pas droit à ses demandes et confirme le jugement rendu par le Tribunal de commerce.
Par arrêt du 12 juin 2024, la Cour de cassation rejette le pourvoi dont elle est saisie :
« Le juge-commissaire, saisi par le bailleur d’une demande de constat de la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture, doit s’assurer, au jour où il statue, que des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture demeurent impayés.
Ayant constaté que la société X avait payé, le 9 septembre 2020, les loyers échus postérieurement au jugement d’ouverture de la procédure collective, que ce paiement avait été reçu le 10 septembre 2020 par le bailleur, qui, le même jour, avait saisi le juge-commissaire d’une demande de constatation de la résiliation de plein droit, l’arrêt retient exactement que la créance de loyers postérieurs à l’ouverture de la procédure collective étant éteinte pour avoir été acquittée par le preneur, la requête du bailleur doit être rejetée. »
Le non-paiement des loyers postérieurs au jugement d’ouverture pendant trois mois ne peut donc entrainer la résiliation de plein droit du bail, et le juge-commissaire doit se prononcer au regard de la dette au jour où il statue sur cette demande de résiliation.