le 03/04/2017

Les impacts des évolutions du droit de l’environnement sur les opérations d’aménagement

Récemment, le droit de l’environnement a connu des évolutions qui ont notamment des effets, directs ou indirects, sur les opérations d’aménagement.

C’est en ce sens qu’il est apparu nécessaire de mettre en exergue les évolutions les plus marquantes en cette matière. L’objectif ne visant pas à l’exhaustivité mais simplement à attirer l’attention sur les nombreuses modifications du droit, imposant toujours plus de vigilance pour les praticiens.

1. Les conséquences de la réforme des évaluations environnementales sur les zones d’aménagement concertées

L’ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes, ainsi que son décret d’application n° 2016-1110 du 11 août 2016, ont vocation à simplifier les règles et assurer leur conformité au droit de l’Union Européenne.

L’ordonnance met fin à la distinction en droit français entre « évaluation environnementale » et « étude d’impact ». Désormais, la notion d’évaluation environnementale recouvre l’ensemble de la procédure concourant à la prise de décision, laquelle inclut notamment la réalisation d’un rapport d’évaluation sur les incidences sur l’environnement et les consultations (article L. 122-1 III du Code de l’environnement).

Sans reprendre l’article de la lettre d’actualité du Cabinet du mois de septembre 2016 relative aux précisions sur la réforme de l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes, il nous paraissait important de souligner ici que l’application de ces textes mérite une attention particulière en matière d’opérations d’aménagement et, plus particulièrement, concernant les zones d’aménagement concertées (ZAC).

En premier lieu, si l’article 1er de l’ordonnance vise à clarifier différentes notions propres à l’évaluation environnementale, l’application de ces dernières en matière de ZAC mérite encore quelques éclaircissements.

La notion « d’autorisation », notamment, est définie comme la décision de l’autorité ou des autorités compétentes qui ouvre le droit au maître d’ouvrage de réaliser le projet. Or, cette notion est difficilement transposable en matière de ZAC, puisque le Code de l’urbanisme ne prévoit pas d’acte de la procédure constituant une « décision ouvrant le droit au maître d’ouvrage de réaliser le projet ».

Précisément, ni l’acte de création de la ZAC, ni celui d’approbation du dossier de réalisation ne constituent une « autorisation » au sens de l’article 1er de l’ordonnance. Une analyse stricte du texte pourrait ainsi laisser supposer que la ZAC n’est pas soumise aux règles relatives aux projets soumis à évaluation environnementale.

Toutefois, cette analyse n’est pas satisfaisante, dès lors que la ZAC figure expressément au sein de la nomenclature (numéro 39) des « projets soumis à évaluation environnementale », de façon systématique ou au cas par cas, suivant l’ampleur de l’opération (annexe à l’article R. 122-2 du Code de l’environnement).

Par conséquent, il nous semble que les définitions posées à l’article L. 122-1 appliquées à la ZAC peuvent être entendues comme suit :

  • la décision créant la ZAC peut être entendue comme la première « autorisation» du projet ;
  • l’acte d’approbation du dossier de réalisation de la ZAC, lorsque ce dernier comprend des compléments à l’étude d’impact est également une « autorisation» ;
  • le « projet» est l’opération d’aménagement ;
  • le « maître d’ouvrage» est la personne qui a pris l’initiative de la ZAC ;
  • « L’autorité compétente» est la personne compétente pour créer la ZAC.

En deuxième lieu, le champ d’application de l’évaluation environnementale en matière de ZAC a été modifié et le décret du 11 août 2016 supprime toute condition relative à l’existence d’un document d’urbanisme applicable sur le territoire de la commune où se situe la ZAC.

Désormais, pour s’assurer de la soumission de la procédure de ZAC à l’évaluation environnementale, il suffira de vérifier les éléments suivants, tels qu’ils figurent à l’annexe à l’article R. 122-2 du Code de l’environnement, dans la rubrique 39 : (Dictionnaire permanent, Contr-Urb, La ZAC, n° 48, fév. 2017) :

  Terrain d’assiette inférieur à 5 ha Terrain d’assiette ≥ 5 ha et inférieure à 10 ha Terrain d’assiette ≥ 10 ha
Surface de plancher inférieure à 10.000 m² Pas d’étude d’impact Cas par cas Obligatoire
Surface de plancher ≥ à 10.000 m² et inférieure à 40.000 m² Cas par cas Cas par cas Obligatoire
Surface de plancher ≥ 40.000 m² Obligatoire Obligatoire Obligatoire

Les composantes d’un projet donnant lieu à une procédure de ZAC ne sont pas concernées par la présente rubrique si le projet dont elles font partie fait l’objet d’une étude d’impact ou en a été dispensé à l’issue d’un examen au cas par cas.
Sur ce point, il convient de relever la volonté louable d’éviter les redondances entre les études d’impact successives sur un même territoire.   

En troisième lieu, en application de l’article 6 de l’ordonnance du 3 août 2016, les nouvelles dispositions ont différentes dates d’entrées en vigueur qu’il apparaît nécessaire de balayer.

Il convient de relever plus particulièrement concernant les procédures de ZAC que :

  • Les ZAC relevant d’un examen au cas par cas devront faire application de la réforme dès lors que la demande d’examen est déposée à compter du 1er janvier 2017 ;
  • Les ZAC relevant d’une évaluation environnementale obligatoire devront faire application de la réforme dès lors que la première demande d’examen est déposée à compter du 16 mai 2017.

Sur ce deuxième point, il convient de relever que l’ordonnance prévoit une autre date d’entrée en vigueur lorsque l’autorité compétente est également le maître d’ouvrage (hypothèse la plus fréquente en matière de ZAC). Cette entrée en vigueur est soumise aux projets dont l’enquête publique est ouverte à compter du 1er février 2017. Or, aucune enquête publique n’est obligatoire en ZAC. Aussi, en matière de ZAC, nous ne sommes pas certains que cette distinction de date d’entrée en vigueur propre aux projets pour lesquels l’autorité compétente est également le maître d’ouvrage soit applicable. Dans le doute, il nous semble possible de considérer que les ZAC devant faire l’objet d’une évaluation environnementale systématique sont toutes soumises à la réforme de l’évaluation environnementale dès lors que la décision de créer la ZAC est adoptée à compter du 16 mai 2017 – cette décision pouvant être entendue comme la « première demande d’autorisation » (position adoptée également par les auteurs du Dictionnaire permanent, Constr-Urb, La ZAC, n° 47 et s.).

En quatrième et dernier lieu, il convient de relever que le décret du 11 août 2016 créé des procédures dites « communes ou coordonnées » d’évaluation environnementale permettant à l’étude des incidences du projet de planification de valoir étude d’impact du projet. Selon un auteur, cette articulation peut avoir un intérêt notamment lorsqu’un PLU doit être adopté pour rendre possible un projet lui-même soumis à étude d’impact (Steve Herce, Les études d’impact revisitées par l’ordonnance du 3 août 2016, BDEI, déc. 2016).

En matière de ZAC, cette procédure pose question. En effet, d’une part, en théorie, la jurisprudence estime que les procédures de création et de réalisation de la ZAC sont dissociées de la procédure d’évolution du document d’urbanisme (CE, 26 juillet 2011, Société Innov Immo, n° 320457 ; CE, Avis, 4 juillet 2012, Commune de Marseille, n° 356221). D’autre part, en pratique, un projet d’aménagement réalisé en ZAC est bien souvent précisé en cours de réalisation. Il est donc rare qu’il soit possible de faire évoluer un PLU pour y introduire des règles nouvelles induites par une opération d’aménagement au stade de la création ou de l’approbation du dossier de réalisation de la ZAC.

En conclusion, si la réforme de l’évaluation environnementale vise à clarifier et simplifier les procédures, quelques points posent encore question et les praticiens devront trancher à défaut de jurisprudence encore rendue sur ces sujets.

2. La réforme de la participation du public sur les décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement

Par une ordonnance n° 2016-1060 du 3 août 2016, le Législateur a réformé les procédures de participation du public aux différentes étapes précédant la prise de décision relative aux opérations susceptibles d’avoir une influence sur l’environnement.

La réforme apporte plusieurs évolutions concernant les procédures d’information et de participation du public, afin de renforcer leur effectivité mais également de les simplifier.

Jugée encore bien trop timide par certains auteurs, il n’en demeure pas moins que cette réforme a le mérite de renforcer et de consolider certains principes (Fl. JAMAY, L’ordonnance du 3 août 2016, un dialogue environnemental encore bien timide, Energie – Environnement – Infrastructure n°12, déc. 2016, comm. 82).

Ses dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2017. 

En premier lieu, il convient de retenir que la réforme vise à définir les principes de la participation du public en définissant ses objectifs et les garanties apportées au public.

L’objectif premier est ainsi d’améliorer la qualité de la décision publique et de contribuer à la légitimité démocratique, l’idée étant sans doute de limiter les risques contentieux (Dictionnaire permanent, La participation du public se démocratise, 10 février 2017).

A ce titre, sur le plan du contentieux, il convient de relever que sur le modèle de l’article L. 600-1 du Code de l’urbanisme, l’ordonnance prévoit, aux termes d’un nouvel article L. 121-22 du Code de l’environnement, que l’illégalité pour vice de forme ou de procédure des décisions prises en application du chapitre Ier relatif à la participation du public à l’élaboration des plans, programmes et projets ayant une incidence sur le droit de l’environnement ne peut être invoquée, par voie d’exception, après l’expiration d’un délai de quatre mois à compter de leur prise d’effet, à l’encontre de la décision d’autorisation du projet. 

En deuxième lieu, les missions de la Commission nationale du débat public se voient renforcées. Le champ du débat public est élargi et, notamment, cette procédure peut désormais être mise en œuvre pour l’organisation de concertations préalables pouvant concerner les plans et programmes.

En troisième lieu, l’article L. 121-17 du Code de l’environnement prévoit la possibilité d’une concertation préalable organisée à l’initiative des administrés lorsque le projet n’est soumis ni à évaluation environnementale, ni à débat public, ni à concertation préalable ouverte sur décision de la CNDP, du maître d’ouvrage ou de l’autorité administrative. Le droit d’initiative du public implique certaines conditions prévues par les textes ainsi qu’une demande expresse au Préfet, lequel est chargé d’étudier la recevabilité et l’opportunité de la demande.

En quatrième lieu, l’Ordonnance vise à moderniser les procédures d’enquête publiques en accélérant leur dématérialisation.

Par ailleurs, l’Ordonnance favorise le recours à une procédure d’enquête publique unique et commune pour les projets, plans ou programmes nécessitant la réalisation de plusieurs enquêtes (article L. 123-6 du Code de l’environnement).

Enfin, l’Ordonnance crée également une procédure de « participation du public par voie électronique » pour les plans, programmes et projets non soumis à enquête publique.

Elle correspond à l’actuelle procédure de « mise à disposition du public », s’effectuera par voie électronique et sera ouverte et organisée par l’autorité compétente pour autoriser les projets ou approuver les plans et programmes (article L. 123-19 du Code de l’environnement ; voir également analyse de JC ZARKA, La réforme du dialogue environnemental, JCP, n° 41, 17 octobre 2016, 2271).

3. Le renforcement attendu du contrôle administratif sur les installations polluantes

Les récentes évolutions du droit de l’environnement ont également concerné le droit des installations polluantes, intéressant également, là encore, les opérations d’aménagement.

Indépendamment des poursuites pénales qui sont susceptibles d’être engagées à son encontre, il doit être rappelé que l’exploitant d’une installation classée pour la protection de l’environnement (« ICPE » ci-après) peut se voir infliger des sanctions administratives, dans deux hypothèses :

  • l’inobservation par l’exploitant des conditions d’exploitation de son installation (article L.171-8 du Code de l’environnement) ;
  • l’exploitation d’une installation en l’absence de déclaration, d’enregistrement ou d’autorisation requise au titre du Code de l’environnement (article L. 171-7).

Afin d’assurer la conformité du droit interne avec le droit de l’Union européenne, l’ordonnance n° 2017-124 du 2 février 2017, publiée au Journal Officiel du 3 février, renforce ce dispositif de mesures et de sanctions administratives applicables en cas d’installations irrégulières.

Précisément, la Commission européenne avait estimé que ce dispositif n’était pas en conformité avec la Directive 2001-92 relative à l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement.

Jusqu’alors, lorsqu’une installation classée était exploitée sans l’autorisation requise, le Préfet pouvait mettre en demeure l’exploitant de déposer, suivant la catégorie d’installation, une déclaration, une demande d’enregistrement ou une demande d’autorisation dans un délai librement fixé.

Toutefois, aucun délai maximum n’était prévu pour contraindre l’exploitant à régulariser sa situation.

L’ordonnance susmentionnée vise à encadrer plus strictement les modalités de régularisation d’une ICPE exploitée sans la formalité requise par le Code de l’environnement.

De première part, le texte prévoit que l’exploitant dispose d’un délai d’un an maximum pour régulariser sa situation.

De deuxième part, pendant ce délai laissé à l’exploitant, l’autorité administrative pourra désormais suspendre le fonctionnement des installations jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la demande d’autorisation requise par le Code de l’environnement, sauf à ce que des motifs d’intérêt général, et plus précisément, les intérêts protégés par le Code de l’environnement, ne s’y opposent.

Comme avant, pendant le délai de régularisation, l’autorité administrative conserve la faculté d’édicter des mesures conservatoires au frais de l’exploitant mis en demeure.

De troisième part, à l’expiration du délai d’un an, en cas de non-respect de la mise en demeure ou de rejet de la demande de régularisation, le Préfet devra ordonner la fermeture ou la suppression de l’installation illégale.

L’ordonnance précise que l’autorité administrative conservera par ailleurs la possibilité de faire usage des autres sanctions administratives prévues par l’article L. 171-8 du Code de l’environnement, à savoir la consignation, les travaux d’office, la suspension du fonctionnement de l’installation comme elle disposera désormais d’un délai de trois ans, au lieu d’un, pour prononcer une amende à l’égard de l’exploitant à compter de la constatation des manquements.

Prise sur le fondement de l’article 106 de la loi dite « Macron » du 6 août 2015 qui habilite le Gouvernement à modifier par voie d’ordonnance les règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, l’ordonnance du 2 février 2017 renforce ainsi le contrôle administratif sur les installations polluantes, dans l’optique de limiter les dangers et les inconvénients générés par leur exploitation irrégulière.

4. La généralisation bienvenue du dispositif de l’autorisation environnementale unique

Pour rappel, en matière de projets d’ICPE et d’installations, ouvrages, travaux et activités (« IOTA » ci-après) soumises à la législation sur l’eau, l’autorisation environnementale unique était expérimentée depuis 2014 dans certaines régions.

Prises en application de loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises, l’ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014, pour les ICPE, et l’ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014, pour les IOTA, avaient instauré ces expérimentations dans l’objectif de remédier à la multiplication des procédures distinctes pour un même projet, source de complexité inutile tant pour les entreprises que pour les services de l’État.

Le succès de l’expérimentation menée a conduit le Gouvernement à vouloir pérenniser le dispositif d’autorisation environnementale unique. C’est l’objet de l’ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 et des deux décrets d’application du même jour (décret n° 2017-81 et n° 2017-82). Sans prétendre à l’exhaustivité, voici une brève présentation de son régime juridique, rappelée dans la précédente LAJEE.

De première part, le dispositif d’autorisation environnementale unique est entré en vigueur le 1er mars 2017 pour les projets déposés à compter de cette date. Toutefois, le porteur de projet peut encore choisir jusqu’au 30 juin 2017 entre la demande d’autorisation unique ou plusieurs demandes d’autorisations.

De deuxième part, le champ d’application de cette autorisation est précisé par le nouvel article L.181-1 du Code de l’environnement. Ainsi, sont désormais soumis à la nouvelle procédure :

  • les installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) soumis à la législation sur l’eau et les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), lorsqu’ils relèvent du régime d’autorisation ;
  • les projets soumis à évaluation environnementale et qui ne sont pas soumis à une autorisation administrative susceptible de porter les mesures d’évitement, de réduction ou de compensation.

Les procédures d’autorisation ICPE et IOTA disparaissent donc en tant que telles. Les procédures de déclaration et d’enregistrement restent inchangées.

De troisième part, l’autorisation environnementale unique se substitue à d’autres régimes et, précisément, aux termes de l’article L. 181-2, elle vaut également :

– autorisation spéciale au titre des réserves naturelles nationales et des réserves naturelles classées en Corse par l’Etat ;

– autorisation spéciale au titre des sites classés ou en instance de classement ;

– dérogation aux mesures de protection de la faune et de la flore sauvage ;

– absence d’opposition au titre des sites Natura 2000 ;

– déclaration ou agrément pour l’utilisation d’organismes génétiquement modifiés ;

– agrément pour le traitement de déchets ;

– autorisation d’exploiter une installation de production d’électricité ;

– autorisation d’émission de gaz à effet de serre ;

– autorisation de défrichement ;

– pour les éoliennes terrestres, autorisations au titre des obstacles à la navigation aérienne, des servitudes militaires et des abords des monuments historiques et sites patrimoniaux remarquables ;

– déclaration IOTA, enregistrement ou déclaration ICPE.

De quatrième part, la procédure est sécurisée puisque le porteur de projet pourra désormais,  en amont de sa demande d’autorisation, solliciter du Préfet toute information utile ou, encore, la délivrance d’un certificat de projet indiquant  les régimes, décisions et procédures applicables à son projet  (article L.181-5 et L.181-6).

De cinquième part, s’agissant de l’articulation avec les autorisations d’urbanisme, l’autorisation environnementale unique ne dispense pas le pétitionnaire de solliciter les permis de construire nécessaires à son projet, sauf en ce qui concerne les éoliennes.

Néanmoins, l’ordonnance précise l’articulation entre les deux procédures d’autorisation (art. L. 181-9 et L. 181-30). Ainsi, l’autorisation d’urbanisme peut être délivrée avant l’autorisation environnementale. En revanche, elle ne peut être exécutée qu’après la délivrance de celle-ci.

De sixième part, lorsque plusieurs pétitionnaires souhaiteront réaliser sur un même site plusieurs projets, ils pourront solliciter une autorisation environnementale unique. En revanche, pour les projets complexes et de grande ampleur, la demande pourra s’effectuer par tranches, ces dernières devant tout de même comporter une certaine cohérence du point de vue de leurs enjeux environnementaux (article L. 181-7).

De septième part, s’agissant du délai d’instruction de la demande d’autorisation, il est réduit à 9 mois contre 15 mois environ auparavant (article L. 181-9 du même Code et sauf cas particuliers prévus par l’ordonnance). Il se décompose comme tel :

– une phase d’examen du projet fixée à quatre mois (R. 181-17 du Code) ;

– une phase d’enquête publique fixée à trois mois (R. 181-36, R. 123-5 et R. 123-6 du Code) ;

– une phase de décision fixée également à deux mois (R. 181-41 du Code).

De huitième part, les textes précisent que la demande d’autorisation environnementale sera déposée auprès du préfet du département dans lequel se situe le projet (R. 181-12 du même Code) qui est seule autorité compétente pour la délivrer (R. 181-2 du même Code).

De neuvième part, le contenu du dossier est précisé. Ainsi, le dossier d’autorisation, qui doit porter sur l’ensemble des autorisations intégrées auxquelles le projet est soumis, comporte une étude d’impact ou une étude d’incidence environnementale (art. R. 181-12 à R. 181-15). Le décret n°2017-82 du 26 janvier 2017 complète le décret précité n° 2017-81 du même jour afin de préciser le contenu du dossier de demande d’autorisation environnementale en fonction des intérêts à protéger (art. D.181-15-1 à D.181-15-9).

Un arrêté fournira ultérieurement un modèle de formulaire de demande d’autorisation.

De dixième part, en cas de modification substantielle du projet ou des modalités de sa mise en œuvre, une nouvelle autorisation environnementale sera requise. Par ailleurs, si le projet est modifié, ou si son exécution ne respecte pas les prescriptions édictées, le Préfet peut, de sa propre initiative ou sur demande du bénéficiaire, imposer toute prescription complémentaire nécessaire au respect de ces dispositions (art. L.181-14).

De onzième part, le régime contentieux de cette autorisation unique est clarifié et unifié. Ainsi, les délais de recours contentieux sont fixés à deux mois pour le pétitionnaire, et à quatre mois pour les tiers (art. R. 181 45). Ce dernier délai peut être prorogé de deux mois en cas de recours des tiers qui disposent d’un droit de réclamation s’ils estiment que les prescriptions fixées sont insuffisantes (art. R. 181 47).

L’ordonnance précise que l’autorisation environnementale est soumise au régime du plein contentieux (article L. 181-17) ce qui permettra au Juge administratif de n’annuler qu’une partie de la procédure d’autorisation environnementale, ou de l’autorisation, et de surseoir à statuer jusqu’à régularisation.

En généralisant l’autorisation environnementale unique, il est permis d’espérer de cette réforme un réel allègement des formalités pour les porteurs de projet et une réduction attendue des délais d’instruction.

5. Le verdissement des PLU renforcé par la loi pour la reconquête de la biodiversité

La loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a également fait évoluer, comme presque chacune des lois votées au Parlement, le droit de l’urbanisme et a des impacts sur la réalisation des opérations d’aménagement. Précisons d’emblée que cette loi est entrée en vigueur le 10 août 2016, lendemain de sa publication au journal officiel.

Plusieurs modifications doivent être mises en exergue car elles donnent aux autorités compétentes de nouveaux outils juridiques pour respecter des exigences environnementales dans la création architecturale.

De première part, la loi biodiversité permet aux plans locaux d’urbanisme de classer certains éléments des trames vertes et bleues, nécessaires à la préservation ou à la remise en état des continuités écologiques, en Espaces de continuités écologiques (nouveaux articles L. 113-29 et L. 113-30 du Code de l’urbanisme).

Ces espaces de continuités pourront être protégés grâce à plusieurs outils :

  • par le classement en zone Agricole (R. 151-22 et R. 151-23) ;
  • au sein du Règlement de la zone, par la délimitation des terrains nécessaires aux continuités écologiques (R. 151-41) ;
  • ou encore par l’élaboration d’orientations d’aménagement et de programmation (ci-après OAP) spécifiques (L. 151-7).

De deuxième part, la loi biodiversité complète l’article L. 111-19 du Code de l’urbanisme en prévoyant que les nouvelles constructions soumises à une autorisation d’exploitation commerciale sur le fondement des dispositions de l’article L. 752-1 du Code de commerce ne pourront être autorisées qu’aux deux conditions suivantes :

  • si ces constructions intègrent « sur tout ou partie de leurs toitures, et de façon non exclusive, soit des procédés de production d’énergies renouvelables, soit un système de végétalisation basé sur un mode cultural garantissant un haut degré d’efficacité thermique et d’isolation et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité, soit d’autres dispositifs aboutissant au même résultat » ;
  • si elles intègrent, sur les aires de stationnement, « des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation et préservant les fonctions écologiques des sols ».

Ces dispositions sont applicables aux permis de construire dont la demande a été déposée à compter du 1er mars 2017.

Enfin, outre la ratification de l’ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015, cette loi permet de pallier deux oublis de la recodification du Code de l’urbanisme par ladite Ordonnance. 

Précisément, d’une part, la loi n° 2014-366 dite loi ALUR avait intégré dans le Code de l’urbanisme une nouvelle obligation de procéder à la révision du Plan local d’urbanisme pour ouvrir à l’urbanisation une zone classée en AU et qui, dans les neuf ans de sa création, n’avait pas encore été ouverte à l’urbanisation ni fait l’objet d’acquisitions foncières significatives de la part de la Commune ou de l’EPCI compétent, directement ou par l’intermédiaire d’un opérateur foncier.

Toutefois, cette disposition n’avait pas été reprise par l’Ordonnance susmentionnée portant recodification du livre I du Code de l’urbanisme.

La loi biodiversité pallie cette erreur en ajoutant un 4° à l’article L. 153-31 du Code de l’urbanisme.

D’autre part, l’Ordonnance susmentionnée avait supprimé par erreur les servitudes de localisation.

La loi biodiversité, grâce à un amendement inséré en cours de discussion parlementaire, corrige cet oubli en insérant un dernier alinéa à l’article L. 151-41 du Code de l’urbanisme, permettant la création de servitudes « pouvant être instituées dans les zones urbaines et dans les zones à urbaniser, pour indiquer la localisation prévue et les caractéristiques des voies et ouvrages publics, ainsi que les installations d’intérêt général et les espaces verts à créer ou à modifier, en délimitant les terrains qui peuvent être concernés par ces équipements ».

6. L’exigence tenant à la Grenellisation des PLU repoussée

En vertu des dispositions du V de l’article 19 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, dite « Grenelle II », telles que modifiées par l’article 20 de la loi du 5 janvier 2011, puis par l’article 126 de la loi ALUR du 24 mars 2014, il était prévu que les plans locaux d’urbanisme approuvés avant le mois de juin 2011 « intègrent les dispositions de la présente loi lors de leur prochaine révision et au plus tard le 1er janvier 2017 ».

Toutefois, nombreuses étaient les communes ne disposant pas d’un plan local d’urbanisme ayant fait l’objet d’une procédure de révision générale depuis l’entrée en vigueur des dispositions de cette loi.

Or, en ce début d’année, malgré l’échéance de cette date butoir, la question des conséquences que pourrait avoir cette absence de révision générale pour lesdits documents d’urbanisme n’avait toujours pas reçu de réponse par la doctrine administrative (plusieurs parlementaires ont, depuis de nombreux mois, interrogé le gouvernement sur ce point : Q. n° 16651, JO Sénat 5 juin 2015 ; Q. n° 82538, JOAN du 23 juin 2015 ; Q. écrite n° 21750, JO Sénat du 12 mai 2016, p. 1981).

Dans cette attente, les communes se trouvaient ainsi face à une problématique lourde de conséquences.

C’est donc avec un immense soulagement qu’elles ont vu l’adoption, le 22 décembre 2016, de la loi relative à l’Egalité et la Citoyenneté.

Celle-ci a ainsi permis de repousser les dates fixées par la loi « Grenelle II » pour le verdissement des PLU et, conséquemment, de repousser les difficultés posées – et non résolues en l’absence de réponse du gouvernement – par l’absence de « grenellisation » de certains PLU. Les dispositions des articles 17 et 19 de la Loi Grenelle II sont ainsi modifiées, imposant désormais que les PLU non grenellisé devront intégrer ces dispositions au plus tard lors de leur prochaine révision, sans qu’aucune date précise ne soit plus fixée.

En considération de tout ce qui précède, force est de constater que l’interaction entre le droit de l’environnement et l’aménagement est devenue une véritable évidence. L’interpénétration de ces deux matières est prégnante et impose aux acteurs de l’aménagement de prendre en considération ces exigences au moment d’élaborer leurs projets.

Elina ASIKA
Valentine TESSIER
Morgan BUNEL
Avocats à la Cour