Le 31 août 2023, le ministre de l’Education Nationale et de la jeunesse a adressé aux chefs d’établissements, inspectrices et inspecteurs et de l’Education nationale et aux directrices et directeurs d’établissements une note de service intitulée « Principe de laïcité à l’Ecole – Respect des valeurs de la République ».
Le préambule de cette note de service revient sur la montée en puissance du port de l’abaya ou qamis dans les établissements scolaires, qu’il qualifie de manifestation ostensible d’une appartenance religieuse en milieu scolaire.
A cet égard, rappelons qu’une abaya est un vêtement féminin ample couvrant l’ensemble du corps à l’exception du visage et des mains et est porté par des femmes ou jeunes filles de confession musulmane.
Le port de cette tenue, utilisée dans une logique d’affirmation religieuse, avait fait l’objet de très nombreux signalements des rectorats, de sorte que, dans la note de service susmentionnée, le Ministre y préconisait d’interdire ces tenues et, en cas de refus d’un élève d’y renoncer au sein de l’établissement scolaire ou durant les activités scolaires, d’engager une procédure disciplinaire.
Plusieurs recours ont été introduits contre cette note de service, dont deux en référé liberté et suspension.
Le Conseil d’Etat avait déjà rejeté les requêtes en référé (ordonnances n° 487891 du 7 septembre 2023 et n° 487896 du 25 septembre 2023).
Par une décision en date du 27 septembre 2024, il a confirmé, au fond, la validité de l’interdiction de l’abaya dans les établissements scolaires, au motif que « le port de tenues de type abaya par les élèves dans les établissements d’enseignement publics pouvait être regardé, à la date d’édiction de la note de service contestée, comme manifestant ostensiblement, par lui-même, une appartenance religieuse ».
A cet égard, il convient de rappeler que la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics a introduit un article L. 141-5-1 au sien du Code de l’éducation, aux termes duquel « le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit ».
Le Conseil d’Etat juge qu’il résulte de ces dispositions que, si les élèves des écoles, collèges et lycées publics peuvent porter des signes religieux discrets, sont en revanche interdits, d’une part, les signes ou tenues, tels notamment un voile ou un foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui-même, manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, d’autre part, ceux dont le port ne manifeste ostensiblement une appartenance religieuse qu’en raison du comportement de l’élève (CE, 5 décembre 2007, n° 295671).
En intégrant l’abaya au sein de la première catégorie des tenues interdites, le Conseil d’Etat en a rendu légale son interdiction de principe.
En effet, il n’y a ainsi pas lieu d’apprécier, au cas par cas, si la tenue manifeste ostensiblement une appartenance religieuse en raison du comportement de l’élève.
Le Conseil d’Etat a également écarté les moyens tirés de l’atteinte à la vie privée et familiale et du droit à l’instruction dès lors que, pour les élèves refusant de cesser de porter l’abaya, d’autres voies de scolarisation sont possibles (établissements privés, scolarisation à domicile notamment).
Enfin, dans la mesure où l’objectif poursuivi était d’assurer le respect du principe de laïcité, la Haute juridiction a également écarté les moyens pris de la méconnaissance du principe d’égalité et de l’interdiction des discriminations.