C’est à l’occasion d’un recours indemnitaire que la Cour administrative d’appel de Paris a apporté quelques précisions sur les implications du transfert de compétences funéraires du Préfet de Paris vers le maire (parachevé par le récent décret du 17 janvier 2025 commenté ici).
Dans cette affaire, le requérant demandait au Tribunal administratif de Paris de condamner solidairement la Ville de Paris et l’Etat (Préfecture de police) à lui verser la somme de 30.000 euros en réparation du préjudice moral résultant de l’exhumation de la dépouille de son grand père et de son transfert en Israël, autorisés le 27 janvier 2016 par le préfet de police.
En première instance, le tribunal administratif a condamné l’Etat à lui verser 6.000 euros en réparation de ce préjudice.
Jugement dont le ministre de l’Intérieur relève appel en contestant la responsabilité de l’Etat dans cette affaire en raison du transfert de compétences au profit de la ville en matière funéraire.
À titre incident, le requérant de première instance demande en appel la réformation du jugement, en sollicitant que son indemnisation soit portée à 20.000 euros, ou, à titre subsidiaire, la condamnation de la Ville de Paris à lui verser cette somme, éventuellement de manière solidaire avec l’État.
La Cour administrative d’appel rejette l’appel principal comme l’appel incident :
- Elle considère que les juges de première instance ont fait une juste appréciation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d’existence subis par l’intéressé en fixant son indemnisation à 6.000 euros et rejette donc l’appel incident formé par ce dernier ;
- Concernant l’appel principal du ministre de l’Intérieur – et c’est là l’intérêt de cet arrêt à notre sens, – elle rappelle en quoi il est impossible d’engager la responsabilité de la Ville de Paris pour les faits d’espèce :
Si désormais, depuis le décret du 17 janvier 2025 (commenté ici), le Maire de Paris est pleinement compétent en matière funéraire, tel n’était pas le cas au moment des faits.
En effet, la capitale s’est longtemps distinguée par un particularisme local : les compétences funéraires y étaient partagées entre le Maire de Paris et le préfet (alors qu’elles relèvent entièrement du maire dans les autres communes).
Ainsi, au moment des faits, le Maire de Paris ne disposait alors que « d’une compétence résiduelle en matière de police des cimetières, particulièrement en ce qui concerne les monuments funéraires menaçant ruine », et « seul le préfet de police était compétent pour autoriser l’exhumation et le transport du corps d’une personne décédée » en vertu de l’article R. 22512-35 du Code général des collectivités territoriales (CGCT).
Ce n’est que par la suite que la loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris a transféré à compter du 1er juillet 2017 la compétence en matière de police des funérailles au Maire de Paris, sans avoir eu pour objectif de transférer l’ensemble des droits et obligations, passés ou futurs, liés à l’exercice de cette compétence.
Il aura fallu attendre le récent décret susvisé du 17 janvier 2025 et son abrogation de l’article R. 22512-35 du CGCT pour que ce transfert de compétence soit finalisé.
L’arrêt commenté confirme ainsi que la responsabilité de la Ville de Paris ne peut être recherchée pour des faits ne relevant pas de compétences funéraires lui ayant été transférées à cette date (par l’effet de la loi du 28 février 2017 ou le décret du décret du 17 janvier 2025). Seule la responsabilité du Préfet de Police de Paris pourra alors être engagée.