Urbanisme, aménagement et foncier
le 18/09/2025

Sur les conditions d’indemnisation de la perte de la plus-value en cas de rétrocession en nature impossible

Cass. civ., 3ème, 10 juillet 2025, n° 24-10.964

Dans un arrêt rendu le 10 juillet 2025, la Cour de cassation s’est prononcée sur les conditions d’indemnisation d’un propriétaire au titre de la rétrocession de son bien (lorsque cette dernière est impossible en nature).

Prévue à l’article L. 421-1 du Code de l’expropriation, la rétrocession permet à l’ancien propriétaire exproprié de procéder au rachat de son bien lorsque « les immeubles expropriés n’ont pas reçu, dans le délai de cinq ans à compter de l’ordonnance d’expropriation, la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination ».

De jurisprudence constante, il était considéré que le rachat du bien intervenait au regard de sa qualification à la date à laquelle le droit de rétrocession a été reconnu, au prix estimé à la date de la décision de première instance statuant sur le prix de l’immeuble rétrocédé (Cass. 3e civ., 26 févr. 1997, n° 95-17.530).

Ainsi, la rétrocession d’un bien ne s’analyse pas en une annulation de l’expropriation, mais bien en nouvelle vente opérée entre l’expropriant (actuel propriétaire) et l’exproprié (ancien propriétaire), sans effet sur l’indemnité versée dans le cadre de l’expropriation.

Dans l’hypothèse d’une rétrocession impossible du bien en nature, le droit de rétrocession se traduit par l’octroi de dommages et intérêts.

Il convenait alors de déterminer la période prise en compte pour le calcul de la période préjudicielle pour laquelle l’ancien propriétaire peut obtenir l’indemnisation de la perte de la plus-value du bien dont la rétrocession est impossible :

« 7. Il découle de ces règles, s’agissant de la perte de plus-value du bien dont la rétrocession est devenue impossible, que :

    • la rétrocession n’étant qu’une faculté, sans incidence sur la régularité de l’expropriation, le point de départ de la période préjudicielle est, non pas la date à laquelle le bien a été exproprié, mais celle de l’assignation aux fins de rétrocession, qui constitue la mise en demeure de l’autorité expropriante de restituer son bien à l’exproprié (3e Civ., 17 juillet 1997, pourvoi n° 95-17.530, publié) ;
    • la rétrocession, lorsqu’elle est possible, supposant le rachat par l’exproprié de son bien à sa valeur résultant de sa qualification à la date à laquelle le droit de rétrocession a été définitivement reconnu, cette date constitue, lorsque la rétrocession est impossible, le terme de la période préjudicielle ».

Ainsi, la période indemnisée ne s’ouvre pas à compter ni de l’expropriation, ni de la naissance du droit de rétrocession mais bien à compter de l’assignation du propriétaire car, comme le rappelle la Cour, la rétrocession est une simple faculté ouverte au propriétaire sans incidence sur l’expropriation (qui ne saurait donc donner lieu à indemnisation qu’une fois que le propriétaire a pris la décision d’exercer son droit).

Par son arrêt du 10 juillet 2025, lorsque le droit de rétrocession ne peut être exercé en nature, l’ancien propriétaire exproprié peut obtenir une indemnisation de la perte de plus-value sur la période allant de l’assignation aux fins de rétrocession (début) à la date de reconnaissance définitive de ce droit (fin).