Projets immobiliers publics privés
le 15/09/2022

Sur l’appréciation du caractère disproportionné de la démolition d’un immeuble d’habitation collective au sein d’un lotissement en cas de violation du cahier des charges et de ressenti négatif du propriétaire voisin.

Cass. Civ., 3ème, 13 juillet 2022, n° 21-16.408

Au sein d’un lotissement, le cahier des charges peut fixer certaines règles de construction devant être respectées par les colotis.

Suivant un arrêt en date du 13 juillet 2022, la troisième chambre civile de la Cour de cassation entend apprécier la proportionnalité de la sanction tendant à la démolition de l’édifice construit en violation des règles du cahier des charges et l’éventuel préjudice subi par les propriétaires colotis.

Dans cet arrêt, des personnes ont acquis un lot constitué d’une villa au sein d’un lotissement. Quelques années plus tard, une société civile immobilière a acquis un lot voisin au sein de ce lotissement et a obtenu un permis de construire afin d’y réaliser la construction d’un immeuble de six logements avec piscine.

Il s’est avéré que la construction édifiée violait l’article 8 du cahier des charges du lotissement, dès lors qu’elle n’était pas implantée dans un carré de trente mètres sur trente mètres.

Dans ces conditions, les propriétaires voisins ont sollicité, à titre principal, la démolition de l’ouvrage édifié et à titre subsidiaire, l’allocation de dommages et intérêts, se prévalant de la violation du cahier des charges du lotissement.

Bien que la Cour d’appel constate que la construction contrevient au cahier des charges du lotissement, elle rejette la demande principale aux fins de démolition de l’édifice, retenant que la SCI ne leur a causé qu’un préjudice, dont elle leur doit réparation à hauteur de 20.000 euros.

La Cour d’appel retient que le juge peut apprécier si la sanction tendant à la démolition de l’immeuble est adaptée au préjudice allégué par la partie demanderesse.

En l’occurrence, les juges du fond considèrent qu’il existe une disproportion entre la démolition d’un immeuble d’habitation collective et le désagrément subi par le voisinage, dès lors que l’ensemble immobilier avait été construit dans l’esprit du règlement du lotissement et qu’il n’occasionnait aucune perte de vue ou aucun vis-à-vis.

 La Cour de cassation confirme la position de la Cour d’appel, qui a « fait ressortir l’existence d’une disproportion manifeste entre le coût de la démolition pour le débiteur et son intérêt pour les créanciers ».

Ainsi, aux termes de cet arrêt, la Cour de cassation entend valider le raisonnement des juges du fond fondé sur l’appréciation de la proportionnalité entre la sanction tendant à la démolition d’une construction et le préjudice subi par les colotis.

Force est de constater que la Cour de cassation tend à tempérer sa position traditionnelle suivant laquelle elle considérait rigoureusement que toute construction édifiée en violation du cahier des charges devait faire l’objet d’une démolition.

Dès lors, la violation du cahier des charges d’un lotissement pourra être sanctionnée par l’allocation de dommages et intérêts, dans l’hypothèse où la démolition de la construction se révèlera disproportionnée.