Vie des acteurs publics
le 29/08/2024

Subventions aux associations : pas d’extension des obligations prévues par le contrat d’engagement républicain

TA Lyon, 24 juillet 2024, n° 2203793

Par un jugement en date du 24 juillet 2024, le Tribunal administratif de Lyon a retenu qu’une collectivité territoriale ne pouvait accroître les obligations du « contrat d’engagement républicain » en interdisant aux bénéficiaires d’une subvention le port de tenues « traduisant une quelconque forme de prosélytisme religieux » dans l’espace public.

Pour mémoire, la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021[1], dite loi « séparatisme », a inséré dans la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations[2] un article 10-1, qui subordonne, pour les associations et fondations, le bénéfice de subventions publiques à un ensemble de conditions qualifié de « contrat d’engagement républicain ».

Le législateur a renvoyé à un décret en Conseil d’Etat le soin de déterminer les modalités d’application de l’article 10-1 précité de la loi du 12 avril 2000. Le décret n° 2021-1947 du 31 décembre 2021, pris pour l’application de ces dispositions, fixe ainsi le contenu du contrat d’engagement républicain, dont l’exemplaire type figure en annexe. Très concrètement, est visée une série de sept engagements reprenant un certain nombre de principes de la République : le respect des lois de la République, la liberté de conscience, la liberté des membres de l’association, l’égalité et la non-discrimination, la fraternité et la prévention de la violence, le respect de la dignité de la personne ainsi que le respect des symboles de la République.

En l’occurrence, par une délibération en date du 17 mars 2022, le conseil régional d’Auvergne Rhône-Alpes avait, notamment, approuvé le contrat d’engagement républicain qui serait demandé lors du dépôt d’une demande de subvention auprès de la région, dont le contenu différait du contrat d’engagement républicain approuvé par l’article 1er du 31 décembre 2021 précité, et donné délégation à sa commission permanente pour faire évoluer ce document. Par une délibération du 30 juin 2022, la commission permanente avait modifié la troisième phrase de l’engagement n° 1 du contrat d’engagement républicain approuvé le 17 mars 2022. Très concrètement, cette obligation non prévue par le décret tenait à l’interdiction, par le bénéficiaire de la subvention, du « port de tenues vestimentaires traduisant une quelconque forme de prosélytisme religieux dans un espace public, à l’exception des représentants des cultes ».  L’on précisera que c’est d’ailleurs la teneur de cette modification qui « soulève des questions qui excèdent les seules circonstances locales en raison de ses implications dans le domaine des libertés publiques » qui a conduit le juge administratif à admettre l’intérêt à agir de l’association La Ligue des droits de l’homme, alors même qu’elle présente un champ d’action national.

Sur le fond, l’amendement apporté par la région au contrat d’engagement républicain a été censuré. Sans examiner son contenu – c’est-à-dire la légalité de la nouvelle obligation ainsi posée par la région – le tribunal administratif a considéré que le principe même de la modification était illégal. En clair, il a estimé que le contenu du contrat d’engagement républicain, fixé par décret, ne pouvait être modifié par les collectivités territoriales. Ainsi, l’adaptation du contenu du contrat avait été incompétemment décidée par la région Auvergne Rhône-Alpes : « le conseil régional […] n’était pas compétent pour adapter le contenu de ce contrat, qui est entièrement déterminé par le décret n° 2021-1947 du 31 décembre 2021 […] ».

 

[1] Loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République.

[2] Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.