Fonction publique
le 14/09/2023

Sanction disciplinaire et congé maladie

CE, 3 juillet 2023, n° 459472

Le Conseil d’Etat vient enfin de siffler la fin de la récréation sur la question de l’effet du congé maladie sur les sanctions d’exclusion temporaire de fonctions.

Jusqu’à présent, il était établi que l’employeur public pouvait engager et poursuivre une procédure disciplinaire lorsque le fonctionnaire était en congé maladie, ce qui était logique au regard de la prescription des poursuites disciplinaires fixée à 3 ans depuis la loi déontologie de 2016 et codifiée aujourd’hui sous l’article L. 532-2 CGFP, le congé maladie n’étant pas une cause interruptive de prescription.

Donc ce point-là était clair.

En revanche, ce qui l’était moins, c’était de savoir si la décision d’exclusion temporaire de fonctions pouvait entrer en vigueur alors que le fonctionnaire était en congé maladie, car des divergences jurisprudentielles étaient apparues entre plusieurs cours administratives d’appel : parfois oui, parfois non.

Nous conseillions donc jusque-là à nos clients, afin de sécuriser leur procédure disciplinaire, de prendre la sanction mais de prévoir qu’elle n’entrerait en vigueur qu’au terme du congé maladie de l’agent : nous les préservions ainsi de la prescription, la sanction était infligée dans un temps raisonnable et compréhensible par rapport à la procédure disciplinaire, et les droits de l’agent à congé maladie était respectés. Mais il s’agissait d’une gymnastique au final peu satisfaisante : la sanction pouvait s’appliquer quelques mois voire années après la procédure, avec d’une part le risque de pousser l’agent à demeurer en arrêt maladie, et d’autre part une certaine perte de sens de la sanction.

En outre, côté agent, c’était piégeux : la sanction était prise, et s’il ne l’attaquait pas dans les deux mois de sa notification devant le tribunal administratif, le délai de recours était expiré au moment de son application concrète.

Dans sa décision en date du 3 juillet, une fois de plus très didactique, le Conseil d’Etat affirme :
« la procédure disciplinaire et la procédure de mise en congé de maladie sont des procédures distinctes et indépendantes, et la circonstance qu’un agent soit placé en congé de maladie ne fait pas obstacle à l’exercice de l’action disciplinaire à son égard ni, le cas échéant, à l’entrée en vigueur d’une décision de sanction ». Et il précise qu’à défaut, l’agent en congé maladie aurait plus de droits à rémunération que l’agent en fonctions, qui se serait lui vu privé de rémunération du fait de l’ETF.

En conclusion, le congé maladie n’est plus la « maison magique » (du nom de ce jeu de cour de récréation) de la discipline, et c’est une bonne chose.

J’en déduis que nous devrions assister prochainement à un revirement sur l’effet « miroir magique » de l’arrêt maladie sur la suspension conservatoire, non ?