Contrats publics
le 09/02/2023

Retour en images sur les récentes précisions de la Cour de justice de l’Union européenne concernant le régime de la quasi-régie conjointe

CJUE, 22 décembre 2022, Sambre & Biesme SCRL et Commune de Farciennes, aff. C 383/21 et C 384/21

Par une décision en date du 22 décembre 2022, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) est venue compléter les règles encadrant la quasi-régie, notamment celles applicables au contrôle analogue, en considérant que l’exigence tenant à ce qu’un pouvoir adjudicateur (A) soit représenté au sein des organes décisionnels de la personne morale contrôlée (C) n’est en principe pas réunie du seul fait que siège au conseil d’administration de la personne morale contrôlée le représentant d’un autre pouvoir adjudicateur (B) qui fait également partie du conseil d’administration de ce premier pouvoir adjudicateur (A).

Cet arrêt est l’occasion de revenir en images sur différentes déclinaisons de la quasi-régie évoquées dans l’arrêt, afin de mieux les distinguer du cas soumis à la CJUE auquel elle refuse, donc, le bénéfice du régime de la quasi-régie.

 

I. La quasi-régie conjointe descendante

Rappelée au § 55 de l’arrêt et prévue par l’article 12, § 3 de la directive 2014/24 (et les articles L. 2511-3 et L. 2511-4 du Code de la commande publique, en droit national), qui permet à des pouvoirs adjudicateurs (A et B) d’avoir une relation de quasi-régie avec une entité (C) qu’ils contrôlent conjointement (ils siègent au conseil d’administration, par exemple), et sous certaines conditions supplémentaires (influence décisive sur les objectifs stratégiques et les décisions importantes de la personne morale contrôlée…).

En vert, les relations de quasi-régie : attribution de contrats par A et B au profit de C sans mise en concurrence préalable, chacune de ces entités étant représentée au sein de C.

 

II. La quasi-régie conjointe descendante avec un ou plusieurs représentant(s) commun(s) de plusieurs pouvoirs adjudicateurs

Rappelée au § 56-57 de l’arrêt et prévue par l’article 12, § 3, alinéa 2, point i) de la directive 2014/24 (et l’article L. 2511-4, 1° du Code de la commande publique), cette déclinaison de la quasi-régie conjointe descendante permet à plusieurs pouvoirs adjudicateurs (A, B et C) d’être représentés par une ou plusieurs personne(s) commune(s) dans les organes décisionnels (conseil d’administration par exemple) de l’entité contrôlée (E) et d’entretenir avec elle un lien de quasi-régie (et sous la condition notamment d’exercer une influence décisive sur les objectifs stratégiques et les décisions importantes de la personne contrôlée). Cette faculté est par exemple mise en œuvre dans le cadre de l’assemblée spéciale des SEM et des SPL prévue par l’article L. 1524-5 du Code général des collectivités territoriales.

En vert, les relations de quasi-régie : attribution de contrats par A, B, C et D au profit de E sans mise en concurrence préalable, toutes ces entités donneuses d’ordres étant représentées (le cas échéant par un ou des représentants communs) au sein de E.

 

III. La quasi-régie (simple) descendante indirecte ou « en cascade »

Rappelée au § 60 de l’arrêt et prévue par l’article 12, § 2 de la directive 2014/24 (et l’article L. 2511-1, dernier alinéa, du Code de la commande publique), cette variation de la quasi-régie simple descendante permet à un pouvoir adjudicateur (A) d’entretenir une relation de quasi-régie avec une entité (C) par l’intermédiaire d’un pouvoir adjudicateur (B) avec lequel il entretient une relation de quasi-régie.

En vert, les relations de quasi-régie : les relations de quasi-régie A/B et B/C permettent une relation de quasi-régie A/C.

 

IV. La quasi-régie horizontale ou collatérale (ou « entre sœurs »)

Rappelée au § 60 de l’arrêt et prévue par l’article 12, § 2 de la directive 2014/24 (et l’article L. 2511-2, 2° du Code de la commande publique), cette variation de la quasi-régie simple permet à un pouvoir adjudicateur (A) d’entretenir une relation de quasi-régie avec une entité (C) dès lors que ces deux entités sont contrôlées par un même pouvoir adjudicateur (B) avec lequel ils entretiennent une relation de quasi-régie. Notons que cette quasi-régie ne semble pas pouvoir être cumulée avec un contrôle exercé conjointement par B avec d’autres entités sur A et C.

En vert, la relation de quasi-régie entre A et C eu égard au contrôle de B sur ces deux entités.

 

V. Ce que la Cour a jugé : absence de lien de quasi-régie entre A et C

« L’article 12, paragraphe 3, second alinéa, sous i), de la directive 2014/24 doit être interprété en ce sens que, afin d’établir qu’un pouvoir adjudicateur exerce, conjointement avec d’autres pouvoirs adjudicateurs, un contrôle sur la personne morale adjudicataire analogue à celui qu’ils exercent sur leurs propres services, l’exigence visée à cette disposition, tenant à ce qu’un pouvoir adjudicateur soit représenté dans les organes décisionnels de la personne morale contrôlée, n’est pas satisfaite au seul motif que siège au conseil d’administration de cette personne morale le représentant d’un autre pouvoir adjudicateur qui fait également partie du conseil d’administration du premier pouvoir adjudicateur ».

En rouge, l’absence de relation de quasi-régie eu égard à l’absence de représentation de A dans C, qui est une des conditions de la quasi-régie ; la circonstance que B soit représentée (parmi d’autres entités) à la fois dans A et dans C par un même représentant ne permet pas réputer une représentation de A dans C. Il ne s’agit ni d’une quasi-régie conjointe ni d’une quasi-régie simple indirecte, ni d’une quasi-régie horizontale.