Energie
le 09/06/2022
Sharmila JOSEPH Sharmila JOSEPH

Rejet des référés suspension contre les mesures réglementaires relatives au volume additionnel d’ARENH

CE, 5 mai 2022, n° 462841

CE, 17 mai 2022, n° 463531

 

Le Conseil d’Etat s’est récemment prononcé sur des demandes de suspension de l’exécution :

  • du décret n° 2022-342 du 11 mars 2022 définissant les modalités spécifiques d’attribution d’un volume additionnel d’électricité pouvant être alloué en 2022, à titre exceptionnel, dans le cadre de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH),
  • et, d’autre part, de l’arrêté du 11 mars 2022 fixant à 20 TWh le volume global maximal d’électricité devant être cédé par Electricité de France au titre de l’ARENH, en complément du volume global maximal fixé à 100 TWh par un précédent arrêté du 28 avril 2011.

Pour démontrer l’urgence, les requérants se sont notamment prévalus d’une atteinte à la situation d’EDF ainsi qu’aux intérêts publics qui s’attachent à la pérennité de cette société et au financement de ses investissements à venir. Le Conseil d’Etat rejette ce moyen en considérant que les requérants n’apportent aucun élément permettant de caractériser l’ampleur de l’atteinte portée par les mesures qu’ils contestent au regard de l’ensemble de l’équilibre financier de la société (affaire n° 463531).

En réponse à un argument similaire dans la seconde affaire (n° 462841), le Conseil d’Etat a considéré qu’il « résulte de l’instruction et des échanges au cours de l’audience que le coût du rachat aux fournisseurs bénéficiaires des volumes d’électricité correspondant à l’ARENH cédé en application des dispositions contestées est estimé à 4,2 milliards d’euros pour EDF. Les requérants ne justifient pas des pertes de bénéfice qui seraient liées également selon eux aux effets indirects de cette mesure sur les tarifs pratiqués par EDF vis-à-vis de ses propres clients ».

Le Conseil d’Etat valide ainsi les textes réglementaires en considérant que « les mesures contestées ont été prises dans le contexte d’une forte hausse des prix sur le marché de gros de l’électricité, à l’origine d’importantes répercussions tant pour les particuliers que pour les professionnels, et qui a d’ailleurs conduit la Commission européenne à adopter plusieurs communications sur les mesures de réduction des coûts de l’énergie susceptibles d’être prises par les Etats membres. Le Gouvernement a, dans un premier temps, cherché à limiter les effets de cette augmentation du coût de l’électricité en plafonnant à 4 % la hausse des tarifs réglementés de vente de l’électricité pour les consommateurs qui y sont éligibles, puis en réduisant à 1 euro le MWh pour les particuliers et assimilés et à 0,5 euro pour les professionnels le taux de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité, devenue l’accise sur l’électricité ».

C’est donc en complétant ces premières solutions mises en œuvre qu’ont été prises les mesures tenant à l’augmentation du volume additionnel d’ARENH.

Le Conseil d’Etat relève ensuite l’efficacité de cette nouvelle mesure, observant que, « selon les estimations du Gouvernement, qui ne sont pas contestées, l’attribution du volume additionnel d’ARENH devrait limiter l’augmentation du prix de l’électricité à une fourchette comprise entre 14 et 16 % pour les professionnels peu consommateurs, à environ 20 % pour les autres entreprises et collectivités et à une fourchette comprise entre 60 et 100 % pour les industriels dits électro-intensifs, alors que, en l’absence de cette mesure ces augmentations s’établiraient respectivement à 23 %, 40 % et une fourchette comprise entre 100 et 130 % ».

Le Conseil d’Etat écarte également l’argument tenant à l’inefficacité de ces mesures dès lors que les fournisseurs pourraient ne pas répercuter sur leurs clients l’avantage économique qu’ils en ont obtenu. Le Conseil d’Etat retient à cet effet qu’un suivi de ces mesures a été confié à la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) et que ce suivi a fait l’objet d’une délibération de la CRE du 31 mars 2022.

Ce faisant, le Conseil d’Etat rejette les demandes de suspension dès lors que l’incidence des mesures contestées sur les prix de l’électricité est de nature à caractériser un intérêt public à poursuivre leur exécution.