Environnement, eau et déchet
le 07/09/2023

QPC : vers la reconnaissance d’un droit des générations futures de vivre dans un environnement sain et de principes de solidarité et fraternité entre les générations ?

CE, 2 août 2023, Association Meuse Nature Environnement et autres, n° 467370

Le Conseil constitutionnel pourrait-il reconnaitre l’existence d’un droit des générations futures de vivre dans un environnement sain et de principes de solidarité et fraternité entre les générations ? Il en aura à tout le moins l’opportunité lors de l’examen de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) lui ayant été transmise le 2 août 2023 par le Conseil d’Etat.

Plusieurs associations et particuliers ont en effet formé un recours contre le décret déclarant d’utilité publique le centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs de haute activité et de moyenne activité à vie longue Cigéo et mettant en compatibilité les plans locaux d’urbanisme afférents.

Au soutien de leur requête, les requérants ont invoqué que ce décret méconnaitrait plusieurs principes, qui n’ont à ce stade pas encore été consacrés par des décisions du Conseil constitutionnel :

  • Le droit des générations futures de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, qui découlerait de l’article 1er de la Charte de l’environnement consacrant le droit de vivre dans un tel environnement et le 7ème alinéa de son Préambule, qui évoque la nécessité de ne pas compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins ;
  • Le principe de solidarité intergénérationnelle, qui serait garanti par les articles 2 (devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement), 3 (principe de prévention) et 4 (contribution à la réparation des dommages) de la Charte de l’environnement éclairés par son Préambule ;
  • Le principe de fraternité transgénérationnelle, qui serait garanti par le Préambule et les articles 2 (définissant la devise de la République comme « Liberté, Égalité, Fraternité ») et 72-3 de la Constitution (énonçant que « la République reconnaît, au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité »).

Les requérants ont ainsi demandé la transmission d’une QPC. Afin que le Conseil d’Etat renvoie la QPC au Conseil constitutionnel, il est nécessaire que trois conditions cumulatives soient remplies : la disposition contestée doit être applicable au litige ou à la procédure, elle ne doit pas avoir déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et la question doit être nouvelle ou présenter un caractère sérieux.

Les dispositions du décret contesté sont applicables au litige et n’ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution. Le débat portait donc sur le caractère nouveau, qui peut être reconnu si la question soulevée va potentiellement donner lieu à la découverte d’un nouveau principe constitutionnel, ou sérieux de la QPC.

Et le Conseil d’Etat, estimant que la question est nouvelle, renvoie la QPC au Conseil constitutionnel, qui dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer sur celle-ci.