Energie
le 08/06/2023

Précisions sur les conditions d’application de l’article L. 171-4 du Code de la construction et de l’habitation : trois projets de texte en consultation

Consultation concernant un décret et deux arrêtés précisant les conditions d’application de l’article L.171-4 du Code de la construction et de l’habitation relatif à l’installation d’énergies renouvelables ou de végétalisation en toiture de bâtiment.

Le Gouvernement a ouvert une consultation sur trois projets de textes portant application de l’article L. 171-4 du Code de la construction et de l’habitation (ci-après, CCH). Cet article impose à certaines constructions de disposer sur leur toit d’une surface végétalisée ou d’un procédé de production d’énergie renouvelable.

La consultation porte sur trois projets de texte :

  • Projet de décret définissant les rénovations lourdes et exonérations associées aux bâtiments ;
  • Projet d’arrêté fixant les caractéristiques minimales que doivent respecter les systèmes de végétalisation installés en toiture ;
  • Projet d’arrêté fixant la proportion de la toiture du bâtiment couverte par un système de végétalisation ou de production d’énergies renouvelables, et précisant les conditions économiquement acceptables liées à l’installation de ces systèmes.

Ces projets viennent modifier et compléter de dispositions déjà existantes.

Pour mémoire, l’article L. 111-18-1 du Code de l’urbanisme prévoyait déjà, depuis 2019, l’obligation d’installer un système de végétalisation ou un procédé de production d’énergie renouvelable. La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a déplacé cet article dans le CCH, à l’article L. 171-4 du CCH, précisé cette obligation et l’a étendue aux rénovations lourdes.

Dans ce cadre, et en premier lieu, le I. de l’article L. 171-4 du CCH précise l’obligation imposée aux aménageurs. Il dispose : « dans le respect des objectifs généraux de performance énergétique et environnementale des bâtiments énoncés à l’article L. 171-1, les bâtiments ou parties de bâtiments mentionnés au II du présent article doivent intégrer soit un procédé de production d’énergies renouvelables, soit un système de végétalisation basé sur un mode cultural ne recourant à l’eau potable qu’en complément des eaux de récupération, garantissant un haut degré d’efficacité thermique et d’isolation et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité, soit tout autre dispositif aboutissant au même résultat ».

Et le III. de l’article L. 171-4 du CCH prévoit que l’obligation s’applique à une certaine proportion de la toiture, définie par arrêté. L’article prévoit des seuils minimums. Ainsi, la proportion de la toiture correspondant à la surface minimale devant être végétalisée ou équipée de procédé de production d’énergie renouvelable est d’« au moins de 30 % à compter du 1er juillet 2023, puis de 40 % à compter du 1er juillet 2026, puis de 50 % à compter du 1er juillet 2027 ».

L’un des projets d’arrêtés reprend ces seuils, sans les modifier.

En deuxième lieu, le II. de l’article L. 171-4 du CCH précise les constructions concernées par l’obligation.

De première part, sont ainsi obligées de prévoir une surface végétalisé ou un procédé de production d’énergie renouvelable les « constructions de bâtiments ou parties de bâtiment à usage commercial, industriel ou artisanal, aux constructions de bâtiments à usage d’entrepôt, aux constructions de hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale et aux constructions de parcs de stationnement couverts accessibles au public, lorsqu’elles créent plus de 500 mètres carrés d’emprise au sol ».

Il convient de souligner la liste des constructions concernées par l’obligation va être étendue à partir du 1er janvier 2025. Aux termes de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergie renouvelable, devront inclure une surface végétalisée ou un procédé de production d’énergie renouvelable sur leur toit les bâtiments administratifs, les hôpitaux, les équipements sportifs, récréatifs ou de loisir et les bâtiments ou parties de bâtiments scolaires et universitaire.

De seconde part, outre les constructions, sont également concernées les « rénovations lourdes ». L’article L. 171-4 du CCH prévoit que cette notion est précisée par décret en Conseil d’Etat, précision prévue par le décret en consultation.

L’article 1er du projet de décret prévoit ainsi la création d’un article R. 174-32 dans le CCH. Cet article devrait disposer que « les travaux de rénovation lourde visés à l’article L. 171-4 sont ceux qui ont pour objet le renforcement ou le remplacement d’éléments porteurs concourant à la stabilité ou à la solidité du bâtiment, y compris de la charpente ». Ne seront ainsi concernées que les travaux portant sur les éléments porteurs des bâtiments.

En troisième lieu, l’article 171-4 du CCH prévoit également des exceptions à l’obligation d’installer des surfaces végétalisées ou des dispositifs de production d’énergie renouvelable.

Le IV. de l’article précité donne à l’autorité compétente en matière d’urbanisme le pouvoir de prévoir que l’obligation ne s’applique pas :

  • « Aux constructions et extensions ou rénovations lourdes de bâtiments ou de parties de bâtiment qui, en raison de contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales, ne permettent pas l’installation des procédés et dispositifs mentionnés au I, notamment si l’installation est de nature à aggraver un risque ou présente une difficulté technique insurmontable » ;
  • « Aux constructions et extensions ou rénovations lourdes de bâtiments ou parties de bâtiment pour lesquels les travaux permettant de satisfaire cette obligation ne peuvent être réalisés dans des conditions économiquement acceptables ».

Le projet de décret apporte utilement des précisions supplémentaires. Ainsi, il est envisagé que l’exception à l’obligation soit accordée lors de l’examen de la demande d’autorisation d’urbanisme. Le pétitionnaire devra pour ce faire joindre à sa demande une attestation motivée et accompagnée des pièces justificatives le cas échéant, justifiant son exonération.

Le projet de décret détaille également les cas d’exonération :

  • Sur l’impossibilité de réaliser les travaux dans des conditions économiquement acceptables: le projet de décret précise que l’absence de conditions économiquement acceptables sera caractérisée en cas de disproportion manifeste entre le coût permettant la satisfaction des obligations de l’article L. 171-4 du CCH et le coût global des travaux de construction, d’extension ou de rénovation.

Le projet de décret fixe les méthodes de calcul de cette disproportion. Il renvoie à un arrêté le soin de définir certaines valeurs. Cet arrêté est l’un des deux arrêtés soumis à consultation.

Aux termes du projet de décret, cette disproportion sera caractérisée lorsque « le rapport entre coût des travaux liés à l’installation d’un système de végétalisation ou d’un système de production d’énergies renouvelables, et le coût global des travaux de construction, d’extension ou de rénovation, dépasse une valeur seuil fixée par arrêté ». Cette valeur seuil sera fixée, selon le projet d’arrêté, à 15 % du coût global des travaux.

Concernant plus spécifiquement les dispositifs de production d’énergie renouvelable, le projet de décret prévoit encore un cas d’exonération. Ainsi, lorsque le coût actualisé de l’énergie produite par le système sur une durée de 20 ans dépasse une valeur fixée par arrêté, l’obligation ne sera pas applicable. Cette valeur est précisée par le projet d’arrêté précité. Ainsi, aux termes de son article 3, ce projet d’arrêt prévoit que « la disproportion des coûts est justifiée dès lors que le coût actualisé de l’énergie produite par le système sur une durée de 20 ans est supérieur à la valeur du tarif d’achat ou du tarif de référence utilisé pour le calcul des revenus pouvant être obtenus par la vente de l’électricité produite par l’installation, tel que défini à l’article 4, multiplié par un coefficient égal à 1,5 ».

  • Sur l’impossibilité de satisfaire les obligations en raison de contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales : le projet de décret prévoit une série d’hypothèses :
  • Présence d’une sur-toiture ventilée consistant en une paroi horizontale surimposée faisant office de pare-soleil ne permettant pas l’installation d’un système végétalisé ou d’un système de production d’énergies renouvelables : le projet de décret précise que cette exonération concerne les rénovations lourdes ;
  • Mise en cause de la pérennité des ouvrages initiaux, ou l’impossibilité de réalisation technique des systèmes : le projet de décret indique également que cette exonération concerne les rénovations lourdes ;
  • Présence d’installations techniques en toiture ne permettant pas d’atteindre le pourcentage de couverture : de même, le projet de décret envisage que cette exonération concerne les seules rénovations lourdes ;
  • Pente de la toiture supérieure à 20 % dans le cas de l’obligation d’installation d’une surface végétalisée ;
  • Hypothèse où les systèmes existants ne permettent pas d’atteindre les objectifs de sécurité définis aux titres III et IV du livre Ier de la partie législative du CCH, ou créent un risque inacceptable relatif à la sécurité civile.

Le projet de décret souligne également que ces exonérations sont accordées « sans préjudice des décisions, avis conformes, accords prévus au titre des autres législations que le Code de l’urbanisme, [notamment celles portant sur les monuments historiques et leurs abords, les sites patrimoniaux remarquables, les sites classés ou inscrits] ».

Enfin, le projet de décret procède à une mise en cohérence du Code de l’urbanisme avec les modifications apportées au CCH. Les attestations d’exonérations à l’obligation prévue par l’article L. 171-4 du CCH feront notamment partie des documents composant le dossier de demande de permis de construire (modification de l’article R. 431-16), le dossier de déclaration préalable (modification de l’article R. 431-36) et le dossier de demande de permis d’aménager (nouvel article R. 441-8-4).

En quatrième et dernier lieu, l’un des deux projets d’arrêtés fixe les caractéristiques techniques devant être respectées par les toitures végétalisées. Les caractéristiques techniques minimales portent sur l’épaisseur de substrat, la capacité de rétention en eau, le nombre et les types de végétaux, l’alimentation en eau et le contrat d’entretien. Certaines caractéristiques minimales sont adaptées lorsqu’il s’agit d’une construction neuve ou d’une extension et lorsqu’il s’agit d’une rénovation lourde.

Au total, ce sont là de nombreuses précisions qui sont apportées et qui gagneront en lisibilité lorsque, les textes adoptés, elles seront consolidées dans les dispositions codifiées.