Urbanisme, aménagement et foncier
le 15/06/2023

Précisions sur le régime juridique de la convention de projet urbain partenarial (PUP)

CE, 12 mai 2023, n° 464062

Rappel des faits :

Dans cette affaire, une convention de PUP a été conclue entre une communauté de communes – devenue communauté d’agglomération – et la société Eurocommercial Properties Taverny, cette dernière souhaitant réaliser l’extension d’un centre commercial et créer un commerce de moyenne surface.

La SCI Massonex, agissant en qualité de contribuable local, a saisi le tribunal administratif d’une demande d’annulation de cette convention. Le tribunal a fait droit à sa demande en tant seulement que la convention de PUP portait sur les travaux de dévoiement du réseau d’eau potable et prévoyait une contribution de la société Eurocommercial Properties Taverny à ce titre, ainsi que l’obligation pour la collectivité de réaliser le réseau correspondant.

La SCI Massonex a ensuite interjeté appel de ce jugement en ce qu’il ne faisait pas intégralement droit à ses demandes de première instance. Mais la cour administrative d’appel a rejeté son appel et, consécutivement, le surplus des conclusions de sa demande.

Enfin, la SCI Massonex a exercé un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt de la Cour. C’est donc dans ce cadre que le Conseil d’État a été saisi.

Précisions du Conseil d’État sur la nature de la convention de PUP et les recours ouverts à son encontre :

Le Conseil d’État a eu à se prononcer sur le cadre juridique applicable à la contestation de la validité d’une convention du PUP.

Sur ce point, il a rappelé la distinction à opérer entre les recours ouverts aux parties à un contrat administratif et les recours ouverts aux tiers à ce contrat, tant devant le juge du contrat que devant le juge du référé contractuel.

Et, s’agissant des recours des tiers à un contrat administratif, il a distingué les tiers qui doivent démontrer avoir été « lésé[s] dans leurs intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses » (cf. CE, 4 avril 2014, Tarn et Garonne, n° 358994), des tiers dits « privilégiés », à savoir les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale – ou du groupement de collectivités territoriales – concerné, ainsi que le préfet du département, ces derniers n’ayant pas besoin d’opérer une telle démonstration.

De même, le Conseil d’État a distingué les vices pouvant être invoqués par les tiers et ceux pouvant être invoqués par les tiers « privilégiés » : les premiers ne peuvent invoquer que des « vices en rapport direct avec l’intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d’une gravité telle que le juge devrait les relever d’office », tandis que les seconds peuvent invoquer tout moyen à l’appui de leur recours.

Tout cela étant posé, le Conseil d’État ne fait donc ici que rappeler les personnes et interventions autorisées, ainsi que les moyens pouvant être soulevés selon leur qualité, à l’encontre d’un contrat administratif.

Seulement, et c’est ce qui nous intéresse ici, le Conseil d’État vise l’article L. 332-11-3 du Code de l’urbanisme, relatif aux participations à la réalisation d’équipements publics exigibles à l’occasion de la délivrance d’une autorisation d’urbanisme par le biais d’une convention de PUP, pour en déduire qu’une telle convention de PUP « présente le caractère d’un contrat administratif dont la validité peut être contestée par un tiers » conformément aux modalités détaillées ci-avant.

Motifs du rejet du pourvoi par le Conseil d’État :

Enfin, le Conseil d’État s’est précisément prononcé sur le pourvoi de la SCI Massonex.

En premier lieu, le SCI Massonex a soutenu que les articles L. 2121-12 et L. 2121-13 du Code général des collectivités territoriales relatif au fonctionnement de l’organe délibérant avait été méconnu.

Or, le Conseil d’État a considéré que la Cour avait suffisamment motivé son arrêt et n’avait pas commis d’erreur de droit s’agissant de l’information donnée aux membres de l’organe délibérant lors de la réunion autorisant le président de la communauté de communes à signer la convention de PUP. En effet, le Conseil d’État a rappelé que la Cour a, dans le cadre de son pouvoir souverain et sans dénaturer les pièces du dossier, pu juger que le projet de convention de PUP transmis « permettait aux membres du conseil communautaire de disposer d’une information suffisante sur l’objet de cette convention et son équilibre financier et les mettait à même de délibérer de façon éclairée et de solliciter, le cas échéant, des explications supplémentaires ».

En deuxième lieu, la SCI Massonex soutenait que la commune ou l’établissement public compétent en matière de plan local d’urbanisme devrait déterminer, préalablement, à la conclusions d’une première convention de PUP, et donc par une convention distincte, les modalités de partage des coûts des équipements ainsi que la délimitation d’un périmètre à l’intérieur duquel les propriétaires fonciers, les aménageurs ou les constructeurs qui se livrent à des opérations d’aménagement ou de construction seront le cas échéant appelés à participer, dans le cadre d’autres conventions, à la prise en charge des équipements publics concernés.

Or, le Conseil d’État a considéré que, dès lors que les conditions du I de l’article L. 332-11-3 du Code de l’urbanisme sont remplies, et dans l’hypothèse où les équipements public ayant vocation à faire l’objet d’une telle convention sont susceptibles de desservir des terrains autres que ceux qui y sont mentionnés, une convention de PUP peut être conclue sans qu’il ne soit besoin de signer préalablement une convention déterminant les modalités de partage des coûts des équipements ainsi que la délimitation d’un périmètre à l’intérieur duquel les propriétaires fonciers, les aménageurs ou les constructeurs qui se livrent à des opérations d’aménagement ou de construction seront le cas échéant appelés à participer, dans le cadre d’autres conventions, à la prise en charge des équipements publics concernés.

Partant, le Conseil d’État a jugé que :

« 8. Il suit de là qu’en jugeant qu’à supposer que les équipements partiellement financés par la société Eurocommercial Properties Taverny puissent desservir d’autres terrains que ceux mentionnés par la convention de projet urbain partenarial litigieuse, la circonstance que la communauté de communes n’ait pas, avant de la conclure sur le fondement du I de l’article L. 332-11-3 du code de l’urbanisme, délimité le périmètre prévu par le II de cet article à l’intérieur duquel les propriétaires, aménageurs ou constructeurs se livrant à des opérations participeraient à la prise en charge des équipements publics desservant plusieurs terrains était sans incidence sur la légalité de cette convention, la cour, qui a relevé à titre surabondant que l’incidence du vice allégué sur les finances de la communauté de communes n’était pas démontrée et qu’il ne résultait pas de l’instruction que la quote-part des travaux mise à la charge de la société cocontractante ne correspondrait pas à l’utilité des équipements pour le projet qu’elle envisage, n’a pas commis d’erreur de droit ».

En dernier lieu, combinant les articles L. 1331-7 du Code de la santé publique et de l’article L. 332-1-3 du Code de l’urbanisme, le Conseil d’État a rappelé que « le propriétaire de l’immeuble qui contribue auprès de l’autorité compétente, compte tenu des stipulations d’une convention de PUP, au financement d’installations collectives d’évacuation ou d’épuration pour un montant égal ou supérieur au maximum légal prévu par l’article L. 1331-7 du code de la santé publique ne saurait être astreint, sur le fondement de cet article, à verser une participation pour le financement de l’assainissement collectif ayant le même objet ».

D’ailleurs, dans notre espèce, le Conseil d’État a relevé que c’est à bon droit que les juges d’appel avaient relevé que la société Eurocommercial Properties Taverny a bien été exonérée, au sein de la convention de PUP litigieuse, de la participation prévue à l’article L. 1331-7 du Code de la santé publique, car la convention de PUP prévoyait que ladite Société « participe au financement des installations collectives d’évacuation ou d’épuration des eaux usées pour un montant déterminé, conformément au calcul effectué par la régie gessienne des eaux annexé à cette convention, en fonction du pourcentage des débits futurs provenant des ouvrages projetés par cette société sur le poste de refoulement des eaux devant être réalisé », de sorte que les juges d’appel n’ont pas commis d’erreur de droit.