Energie
le 10/03/2022

Précision sur le calcul du Terme T de la redevance de Concession de distribution d’électricité

CE, 14 février 2022, Sté Enedis, n° 440086

Dans une décision du 14 février 2022, le Conseil d’Etat a apporté une intéressante précision sur la détermination du terme T de la formule de calcul de la redevance d’investissement dite « R2 » contenue dans les contrats de concession de distribution d’électricité conclus entre les Autorités Organisatrices de la Distribution d’Electricité (AODE) et les sociétés Enedis et EDF établis sur la base du modèle négocié en 1992 par EDF et la Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et des Régies (modèle applicable dans l’affaire ici jugée ainsi qu’aujourd’hui encore sur plusieurs territoires, quoique ce modèle ait été révisé en décembre 2017 en supprimant, notamment, le terme « T » objet de la présente affaire).

Ces contrats comportent en effet une redevance R2 versée par le concessionnaire à l’autorité concédante en contrepartie des travaux réalisés sur le réseau de distribution publique d’électricité, et dans l’intérêt dudit réseau, sous maîtrise d’ouvrage de l’autorité concédante. Cette redevance R2 est calculée par l’application d’une formule mathématique constituée de plusieurs termes et figure à l’annexe 1 du cahier des charges des contrats de concession.

Ladite formule comporte un terme « T » contractuellement défini comme le « produit net des taxes municipales sur l’électricité sur le territoire de la concession, ayant fait l’objet de titres de recettes de l’autorité concédante l’année pénultième ; T ne peut toutefois être inférieur au produit net des taxes municipales sur l’électricité sur le territoire des communes rurales de la concession ». Le terme T vient en déduction de la formule de calcul de la redevance R 2 puisqu’il est soustrait aux autres termes de calcul de la cette redevance. Ainsi plus le terme « T » est faible, plus la part « R2 » de la redevance est élevée.

La taxe visée par le terme T en cause est, actuellement, la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (ci-après, TCCFE) mentionnée à l’article L. 2333-2 du Code général des collectivités territoriales (ci-après, CGCT). Dans les communes de plus de 2.000 habitants, sauf délibération contraire, la taxe est perçue et conservée par la commune, et ce, même si elle a transféré sa compétence d’AODE à un Syndicat ou à un établissement public de coopération communale à fiscalité propre et ne l’exerce donc plus. La commune et l’AODE pouvant néanmoins, par délibérations concordantes, autoriser l’AODE à percevoir ladite TCCFE et à la conserver en tout ou partie.

Dans les affaires qui avaient été soumises au Tribunal administratif de Nantes, puis à la Cour administrative d’appel de Nantes (avant de parvenir au Conseil d’Etat), étaient en cause trois contrats de concession conclus par trois communes ayant, ensuite, transféré leur compétence d’AODE ainsi que les contrats de distribution publique d’électricité à Nantes Métropole. Cependant, ces trois communes, de plus de 2.000 habitants, avaient, malgré le transfert de leur compétence d’AODE à Nantes Métropole, décidé de continuer à percevoir elle-même et de conserver la TCCFE correspondant à leur territoire.

Ne percevant aucun montant de TCCFE au titre de ces trois communes, Nantes Métropole avait décidé, au titre de la redevance R2 des années 2015 et 2016, de ne déduire de la redevance R2 aucune somme au titre du terme T. La société Enedis a contesté ce raisonnement et introduit des recours en annulation contre ces deux titres exécutoires auprès du Tribunal administratif de Nantes.

Si le Tribunal administratif de Nantes a censuré la position de Nantes Métropole, la Cour administrative d’appel de Nantes, a au contraire considéré que l’AODE avait valablement estimé que le terme T devait être nul.

La Cour avait en effet relevé que le fait pour les trois communes d’avoir transféré la compétence d’AODE à Nantes Métropole tout en décidant de conserver la perception de la TCCFE avait eu pour conséquence une dissociation entre le bénéficiaire de la taxe et l’autorité concédante. Or, pour la Cour, il y avait lieu de s’en tenir à la lettre et à l’esprit du contrat qui définit le terme T comme visant le montant de TCCFE effectivement perçu par l’autorité concédante, soit Nantes Métropole en l’occurrence.

Ce raisonnement est confirmé par le Conseil d’Etat dans sa décision du 14 février 2022, celui-ci jugeant « que le produit net de la taxe communale sur la consommation finale d’électricité sur le territoire de la concession n’est imputé, à hauteur de 50 %, sur le montant de cette redevance, que s’il a fait l’objet de titres de recettes de l’autorité concédante». Or, en l’espèce, « la taxe communale sur la consommation finale d’électricité ayant fait l’objet de titres de recettes émis par les communes de Nantes, Rezé et Indre qui avaient perdu la qualité d’autorité concédante, le terme  » T  » de la part  » R2  » de la redevance était nul ».

Le Conseil d’Etat censure toutefois l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes du 13 février 2020, celle-ci ayant omis de statuer sur les conclusions de l’appel incident qu’avait formé Enedis. L’affaire est renvoyée sur ce point en Cour administrative d’appel.