Fonction publique
le 13/12/2023

Nécessité de publicité de la vacance d’emploi avant le recrutement d’un directeur de régie

CE, 4 décembre 2023, n° 462867

La jurisprudence commentée illustre une nouvelle fois la difficulté à appréhender le cadre juridique applicable aux directeurs de services publics industriels et commerciaux, en venant confirmer l’annulation d’un recrutement d’un tel directeur, en l’occurrence contractuel, qui n’avait pas été précédé d’une publication de vacances préalable au recrutement.

On sait qu’à l’inverse des personnels employés par un tel service, il a la qualité d’agent public (CE, 26 janvier 1923, Robert Lafrégeyre, n° 62529).

Lorsque ces régies sont dotées de la personnalité morale, et donc sous la forme d’un établissement public industriel et commercial, il est classiquement considéré que cet emploi de directeur, malgré son caractère public, n’est pas un emploi permanent, relevant du statut de la fonction publique : les seuls emplois permanents sont en effet ceux créés par délibération d’une collectivité territoriale ou de leurs établissements publics administratifs (Cf. L. 313-1 et L. 4 du CGFP).

Il est dans ces cas bien difficile de déterminer quel statut appliquer aux agents nommés sur de tels emplois, puisqu’ils ne relèvent alors, ni du droit de la fonction publique (puisque l’emploi sur lequel ils sont nommés n’en fait pas partie), ni du droit du travail (puisqu’il s’agit d’un emploi public).

Plusieurs réponses ministérielles considéraient ainsi classiquement que « l’emploi de directeur d’une régie chargée de l’exploitation d’un service public industriel et commercial (SPIC) ne relève pas du statut de la fonction publique territoriale fixé par la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Le poste de directeur ne peut donc être assuré que par un contractuel de droit public ou par un fonctionnaire en position de détachement » (Rep. min. n° 37483 publiée au JOAN le 22 juin 2021 p.5058 ; Réponse du ministre en charge des collectivités territoriales au JO Sénat du 24 juin 2021, p. 3978 ; V. également rep. min. n° 23997 publiée au JO du Sénat le 2 novembre 2006 ; rep. min. à la question n° 353 publiée au JOAN le 30 juin 2003).

L’arrêt commenté remet en partie en question cette position, s’agissant des régies non personnalisées. Il est vrai que, pour ces dernières, l’emploi de directeur de régie est bien un emploi d’une collectivité ou d’un établissement public administratif, puisque le SPIC n’est institué que comme une activité autonome mais accomplie par la collectivité ou l’établissement lui-même. Il n’est donc pas exclu du champ défini par les dispositions des articles L. 313-1 et L. 4 du CGFP.

Selon le Conseil d’Etat, un tel emploi constitue bien un emploi permanent d’une collectivité territoriale, au sens de l’article L. 313-1 du CGFP, et est bien, contrairement à ce qu’affirmaient les réponses ministérielles précitées, un emploi qui relève de la fonction publique.

La Haute juridiction en déduit une conséquence : l’emploi doit être créé par l’organe délibérant de la collectivité ou de l’établissement, et, lorsqu’il l’a été et doit être pourvu, il doit faire l’objet de la publication d’une vacance préalable, à défaut de quoi, le recrutement de l’agent, contractuel ou non, sera illégal et par conséquent censuré.

Il n’est pas possible d’en déduire si cette obligation de forme s’imposera également aux directeurs de régie SPIC dotées de la personnalité morale (qui ne relèvent a priori pas du statut), mais, tant que la jurisprudence ne l’aura pas confirmé, la prudence impliquerait sans doute cette publication préalable.