CAA Marseille, 20 janvier 2025, n° 23MA01617
Par un arrêt en date du 20 janvier 2025, la Cour administrative d’appel de Marseille confirme la légalité de la résiliation d’une convention de délégation de service public d’exploitation d’un réseau de haut débit (HD) et de très haut débit (THD), dans un contexte d’importants retards et de difficultés budgétaires liées à la suppression de toute perspective de financement étatique.
Dans le cadre du programme national de déploiement du THD en France, un syndicat mixte a, par un contrat d’affermage du 5 décembre 2015, fait le choix de déléguer au secteur privé l’exploitation, sur le territoire de ses membres, d’un réseau HD et THD.
Aux termes de cette convention, le syndicat mixte s’engageait, en deux phases, à remettre progressivement en affermage des prises « fiber to the home » (FTTH) à l’opérateur de sorte à parvenir, à l’issue de ces phases, à une couverture totale de trois départements membres.
Or, en raison de retards d’exécution lors de la première phase et de difficultés budgétaires pour le financement de la deuxième phase, le syndicat mixte a décidé de :
- lancer un « appel à manifestation d’engagement locaux» à l’issu duquel l’offre d’un autre opérateur a été retenu ;
- supprimer le service public ;
- de résilier la délégation de service public pour un motif d’intérêt général ;
- et de céder le réseau à un opérateur privé ;
Face à ces décisions, l’opérateur initial a, sur le fondement de la jurisprudence Béziers II[1], saisi le Tribunal administratif de Marseille, lequel a refusé d’annuler la délibération prononçant la résiliation du contrat, et condamné le syndicat mixte à verser à son ancien délégataire la somme de 87.779 euros[2].
C’est dans ce cadre que la Cour administrative de Marseille a été saisie, par l’opérateur débouté, d’une requête tendant notamment à l’annulation du jugement en tant qu’il rejette sa demande de requalification de la résiliation en résiliation aux torts exclusifs du syndicat mixte.
Pour rappel et conformément aux règles générales applicables aux contrats administratifs, une personne morale de droit public peut, pour un motif d’intérêt général, résilier unilatéralement un contrat administratif, à condition de verser à son cocontractant une indemnisation, dont l’étendue et les modalités peuvent être déterminées par les stipulations du contrat.
Appréciant la légalité de la décision de résiliation, la Cour a considéré que constituent des motifs d’intérêt général justifiant la résiliation de la convention :
- « la volonté de supprimer un service public » du fait de « l’inutilité de l’intervention publique dans le déploiement des réseaux très haut débit, compte tenu du développement d’une initiative privée rendant envisageable un déploiement sans financement public intégral des infrastructures» ;
- « le défaut des cofinancements publics » résultant de « la décision du Gouvernement, intervenue au cours de l’année 2017, de suspendre le financement des réseaux d’initiative publique par le Fonds national pour la Société numérique (FSN) géré par la Caisse des dépôts et consignations, en privilégiant le recours à des opérateurs privés dans le cadre d’appels à manifestation d’intérêts» ;
- et « la volonté du syndicat mixte d’économiser des fonds publics en cédant le réseau existant à un opérateur privé» ;
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[1] CE, Sect., 21 mars 2011, Commune de Béziers, n° 304806.
[2] TA de Marseille, 3e ch., 27 avril 2023, n° 1906318.