Urbanisme, aménagement et foncier
le 21/04/2022

L’exproprié ne peut pas être indemnisé de la plus-value née de la revente ultérieure du bien

Cass. Com., 3ème, 2 mars 2022, n° 20-17.133

Par un arrêt en date du 26 mai 2020, la Cour d’appel de Lyon a fixé les indemnités revenant aux propriétaires expropriés, au profit de la société publique local Territoire d’innovation, de plusieurs parcelles leur appartenant.

Seulement, les biens objet de l’expropriation ont été revendus pour un projet déclaré d’utilité publique et, ce faisant, l’autorité expropriante a fait une plus-value. Les expropriés réclamaient une indemnisation de la plus-value.

Les expropriés ont exercé un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt au sujet de la fixation de l’indemnité principale d’expropriation et de l’indemnité de remploi.

Selon les requérants, le juge de l’expropriation doit ménager un juste équilibre entre les exigences de l’intérêt général et les impératifs de sauvegarde des droits fondamentaux, conformément à l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Concrètement, il est reproché à la Cour d’avoir refusé, par principe de procéder à un contrôle concret de proportionnalité et de tenir compte, dans le calcul du montant de l’indemnité d’expropriation, de la plus-value considérable que l’expropriant s’était d’ores et déjà assuré de réaliser en revendant immédiatement les parcelles aux conditions du marché.

En réponse à ce moyen, la Cour de cassation a considéré que :

« La Cour d’appel, devant qui il n’était pas contesté que les biens expropriés avaient été revendus pour la réalisation du projet déclaré d’utilité publique, a retenu, d’une part, que la plus-value, que devaient générer ces ventes en raison de l’opération d’utilité publique conduite par l’expropriant, n’avait pas à être prise en compte pour déterminer l’indemnité réparant la dépossession, ce dont il résultait que l’indemnité de « privation de plus-value » revendiquée par les expropriés n’était pas en lien direct avec le préjudice résultant de la dépossession, qui seul pouvait être indemnisé par le juge de l’expropriation, d’autre part, que l’indemnisation était en rapport avec la valeur du bien exproprié, enfin, que la valorisation de leurs biens avait été faite sur la base d’éléments de comparaison sur des biens comparables.

Dès lors, elle n’était pas tenue de procéder à un contrôle inopérant relatif à l’atteinte disproportionnée au droit au respect des biens des consorts, qui résulterait de la plus-value bénéficiant à l’expropriant lors de la revente des parcelles ».

Cette décision n’est pas surprenante car est conforme à la jurisprudence du Conseil Constitutionnel, aux termes de laquelle il a considéré que la hausse de la valeur vénale d’un bien qui avait fait l’objet d’une expropriation n’a pas vocation à être prise en compte dans le calcul de l’indemnité revenant au propriétaire exproprié, et ce, alors même que l’expropriant entendait vendre le bien à un prix déjà déterminé et comprenant cette hausse (C.Constit., Décision QPC n° 2021-915, 11 juin 2021).