Propriété intellectuelle
le 15/11/2023

Les limites de prise en charge de l’assurance en matière de contrefaçon

Cass. Civ., 3ème, 30 mars 2023, n° 21-21.084

En l’espèce, une société prestataire a été chargée de la décoration des restaurants de la célèbre enseigne McDonald’s. Considérant qu’il y avait contrefaçon en raison de la présence d’images semblables aux œuvres d’un designer dans les restaurants McDonald’s, son ayant droit a formulé des réclamations et les parties ont conclu un protocole transactionnel. La société prestataire a ainsi déclaré le sinistre auprès de son assureur qui lui a opposé un refus de toute prise en charge au motif qu’il s’agissait d’une faute dolosive au vu du caractère « flagrant et massif » de la contrefaçon. La société prestataire a donc assigné son assureur.

La juridiction de première instance s’est fondée sur l’article L. 113-1 du Code des assurances, disposition d’ordre public aux termes de laquelle « l’assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d’une faute intentionnelle ou dolosive de l’assuré », pour retenir l’exclusion de garantie légale en cas de faute intentionnelle ou dolosive, et a débouté la société prestataire de l’ensemble de ses demandes.

Ce raisonnement a été confirmé par la Cour d’appel d’Aix en Provence dans un arrêt du 20 mai 2021[1], puis par la Cour de cassation le 30 mars dernier. Elle a rappelé que la faute dolosive, définie comme « un acte délibéré de l’assuré commis avec la conscience du caractère inéluctable de ses conséquences dommageables »[2], était caractérisée en l’espèce. Elle a considéré que la société prestataire avait parfaitement conscience de prendre un risque avéré puisqu’elle ne pouvait méconnaitre ni la clause contractuelle d’originalité la liant à la société McDonald’s, ni la similitude incontestable de ses œuvres avec celles du designer trop connu pour être ignorées d’un professionnel du milieu de la décoration intérieure.

Il en ressort qu’une analyse objective du comportement [délibéré] de l’assuré, sans que les critères ne soient pour autant bien définis, permet de retenir la faute dolosive et ainsi l’exclusion de la garantie légale.

Si les critères objectifs semblent remplis en l’espèce, il est fort probablement que la situation ne soit pas aussi évidente dans d’autres cas. En effet, la marge d’appréciation est grande en matière de droits d’auteur et, comme le rappelle justement la société prestataire aux soutiens de ses demandes, « l’aléa en la matière est d’autant plus fort lorsque les créations artistiques sont diffusées à travers le monde […] ».

 

[1]Cour d’appel, Aix-en-Provence, 1re et 3e chambres réunies, 20 mai 2021 – n° 18/08231

[2] Cass. Civ., 2ème, 20 janvier 2022, pourvoi n° 20-13.245