- Droit administratif
le 15/09/2022

Le Conseil d’État rappelle les conditions dans lesquelles un référé mesures utiles peut être accueilli

CE, 27 juillet 2022, n° 459159

Dans cette affaire, une administrée de la commune de Fréjus soutient avoir été victime d’une chute sur une voie communale en lien avec un défaut d’entretien connu des services municipaux, lesquels n’auraient pas pris les mesures nécessaires pour remédier à ce problème malgré une pétition en ce sens.

En parallèle d’un recours au fond tendant à l’indemnisation de son préjudice, elle saisit le Juge des référés du Tribunal administratif de Toulon, lui demandant de prescrire une mesure d’expertise aux fins d’évaluer le préjudice qu’elle aurait subi, mais la juridiction refuse de faire droit à cette demande. De même, la Cour administrative de Marseille a rejeté l’appel formée par la riveraine contre cette ordonnance de première instance.

Ainsi saisi d’un pourvoi en cassation contre l’ordonnance rendue par la Cour administrative d’appel de Marseille, le Conseil d’Etat commence par rappeler les dispositions de l’article R. 532-1 du Code de justice administrative relatives au référé mesures utiles puis les éléments d’appréciation de l’utilité de la mesure d’instruction ou d’expertise qu’il est demandé au juge des référés d’ordonner sur ce fondement, permettant ou non, de l’accueillir.

A ce titre, la Haute juridiction rappelle, tel que cela ressort d’une jurisprudence constante[1] que l’utilité d’une telle mesure est appréciée :

  • D’une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d’autres moyens ;
  • D’autre part, au regard de l’intérêt que la mesure présente dans la perspective, d’un litige principal au fond, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher.

Au titre de cette seconde condition, le Conseil d’Etat précise[2]  qu’en l’absence manifeste de fait générateur, de préjudice ou de lien de causalité entre celui-ci et le fait générateur le juge des référés ne peut accéder à une demande d’expertise permettant d’évaluer un préjudice.

C’est dans ce cadre que le Conseil d’Etat considère que la Cour administrative d’appel de Marseille ayant statué avant lui a commis une erreur de droit en justifiant le défaut d’utilité de la mesure demandée par la requérante par le caractère insuffisamment probable du fait générateur (défaut d’entretien normal de l’ouvrage public), alors qu’elle ne pouvait donc le faire qu’en l’absence manifeste d’un tel fait générateur.

Sur le fond, le Conseil d’Etat considère qu’en l’espèce, la requérante ne se prévaut d’aucune circonstance particulière qui serait de nature à conférer à la mesure qu’il est demandé au juge des référés d’ordonner un caractère d’une utilité différent de celui de la mesure que pourra prononcer le juge du fond également saisi d’un recours de cette-dernière. Il rejette donc la demande d’expertise sollicitée dans le cadre de ce référé mesures utiles.

 

 

[1] Voir notamment en ce sens CE, 11 juillet 20128, 416635 ; CE, 14 février 2017, n° 401514 ; CAA Bordeaux, 13 juillet 2022, n° 22BX00934 ou encore CAA Nancy 20 juin 2022, n° 22NC01517.

[2] Voir également en ce sens plus récemment, CAA Bordeaux, 8 août 2022, n° 22BX01010.