Urbanisme, aménagement et foncier
le 24/01/2023
Arthur GAYETArthur GAYET

L’astreinte administrative peut impliquer la démolition d’un bien

CE, 22 décembre 2022, n° 463331

Par une décision en date du 22 décembre dernier publiée au Recueil, le Conseil d’Etat vient de préciser le champ d’application de l’astreinte administrative.

La procédure d’astreinte administrative, créée par la loi du 27 décembre 2019 « engagement et proximité », est venue renforcer les pouvoirs des maires en leur attribuant de nouveaux outils en matière de police administrative. A ce titre, les Communes disposent désormais de la possibilité d’engager une procédure d’astreinte administrative à l’encontre de toute personne ayant entrepris des travaux en méconnaissance de la règlementation d’urbanisme en vigueur.

Cette procédure est encadrée par les dispositions des articles L. 481-1 à L. 481-3 du Code de l’urbanisme et permet, lorsque des travaux soumis à autorisation d’urbanisme ont été réalisés en méconnaissance des dispositions du Code de l’urbanisme, de mettre en demeure l’intéressé de :

  • Procéder aux opérations nécessaires à la mise en conformité de la construction, de l’aménagement, de l’installation ou des travaux en cause ;

ou

  • Déposer une demande d’autorisation ou une déclaration préalable visant à leur régularisation.

Plusieurs juridictions de première instance avaient considéré que ces dispositions ne permettaient pas de régulièrement mettre en demeure le contrevenant de démolir, la démolition nécessitant l’intervention du juge judiciaire (TA Poitiers, 16 décembre 2021, n° 2001547 ; TA Lyon, 19 juillet 2022, req. n° 2106307). Selon ces juridictions du fond, la procédure d’astreinte administrative ne pouvait être mise en œuvre que pour les infractions les moins graves. C’est cette position qui est ici sanctionnée par le Conseil d’Etat qui considère que :

« 3. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires préalables à l’adoption de la loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique dont elles sont issues, que, dans le but de renforcer le respect des règles d’utilisation des sols et des autorisations d’urbanisme, le législateur a entendu, que, lorsqu’a été dressé un procès-verbal constatant que des travaux soumis à permis de construire, permis d’aménager, permis de démolir ou déclaration préalable ou dispensés, à titre dérogatoire, d’une telle formalité ont été entrepris ou exécutés irrégulièrement, l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme puisse, dans le cadre de ses pouvoirs de police spéciale et indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées pour réprimer l’infraction constatée, mettre en demeure l’intéressé, après avoir recueilli ses observations, selon la nature de l’irrégularité constatée et les moyens permettant d’y remédier, soit de solliciter l’autorisation ou la déclaration nécessaire, soit de mettre la construction, l’aménagement, l’installation ou les travaux en cause en conformité avec les dispositions dont la méconnaissance a été constatée, y compris, si la mise en conformité l’impose, en procédant aux démolitions nécessaires. Cette mise en demeure peut être assortie d’une astreinte, prononcée dès l’origine ou à tout moment après l’expiration du délai imparti par la mise en demeure, s’il n’y a pas été satisfait, en ce cas après que l’intéressé a de nouveau été invité à présenter ses observations ».

Autrement dit, la procédure d’astreinte administrative peut être mise en œuvre indépendamment des poursuites pénales et ce, quel que soit le degré de gravité de l’infraction ou l’étendue des mesures à prendre pour régulariser la situation.