Vie des acteurs publics
le 16/03/2023
Camille LANGLADE DEMOYENCamille LANGLADE DEMOYEN

L’absence de tribunes libres de l’opposition dans le bilan municipal annuel, joint au bulletin municipal, n’est pas de nature à caractériser une situation d’urgence au sens de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative (référé liberté)

CE, 8 février 2023, n° 470804

Par une ordonnance récente en date du 8 février 2023, le Juge du référé liberté du Conseil d’Etat a confirmé la jurisprudence établie en matière de refus de réserver un emplacement aux élus de l’opposition dans les outils de communication de la municipalité.

En effet, en application de l’article L. 2121-27-1 du Code général des collectivités territoriales :

« Dans les communes de 1 000 habitants et plus, lorsque des informations générales sur les réalisations et sur la gestion du conseil municipal sont diffusées par la commune, un espace est réservé à l’expression des conseillers élus sur une liste autre que celle ayant obtenu le plus de voix lors du dernier renouvellement du conseil municipal ou ayant déclaré ne pas appartenir à la majorité municipale.

Les modalités d’application du présent article sont définies par le règlement intérieur du conseil municipal ».

Dans la présente affaire, la majorité municipale a édicté, en sus du bulletin mensuel d’information municipal, un supplément portant sur les actions menées par la municipalité durant l’année 2022, sans que celui-ci ne prévoit un emplacement réservé aux tribunes de l’opposition.

C’est dans ce contexte qu’une élue de l’opposition a saisi le Juge du référé liberté afin qu’il soit ordonné à la commune de suspendre la distribution de ce document et de procéder à un nouveau tirage comprenant un espace d’expression réservé aux élus de l’opposition.

Ainsi, il revenait au Juge du référé liberté de se demander si l’omission ponctuelle d’une tribune dans un supplément du bulletin municipal et non dans la publication mensuelle du magazine d’information municipale, était de nature à porter une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’expression de l’élue, justifiant qu’il prononce dans un délai de 48 heures, des mesures pour sauvegarder cette liberté fondamentale.

Le Juge du référé liberté du Conseil d’Etat a déjà eu l’occasion de se prononcer à ce sujet, en considérant qu’il n’existait pas d’urgence particulière, à insérer un article de l’opposition dans un bulletin municipal, dans la mesure où le bulletin est publié tous les mois (CE, ord., 6 avril 2007, n° 304361) et que les élus de l’opposition, disposeraient de la possibilité d’exprimer leur point de vue dans le prochain numéro de la publication mensuelle (CE, ord., 29 avril 2011, n° 348653).

Enfin, très récemment le Juge des référés du Tribunal administratif d’Orléans a statué dans le même sens que le Conseil d’Etat en jugeant que le refus du maire de publier un libre-propos d’un conseiller municipal dans le bulletin d’information municipal n’est pas de nature à caractériser une situation d’urgence au sens de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative (TA Orléans, 15 juillet 2022, n° 2202414 ).

C’est donc dans la lignée jurisprudentielle que le Conseil d’Etat a considéré que l’absence d’espace réservé à l’expression des élus de l’opposition dans le supplément litigieux ne caractérise pas, « en l’absence de circonstances particulières exigeant que ses lecteurs aient connaissance de l’expression des groupes d’opposition dans les jours suivants sa distribution, une situation d’urgence impliquant qu’une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale doive être prise dans un très bref délai ».