Le 12 avril 2024, les Etats membres ont entériné l’accord conclu en trilogue avec le Parlement européen sur la révision de la directive 2010/31/UE performance énergétique des bâtiments (EPBD, en anglais) dans le cadre d’une réunion des ministres de l’Économie et des Finances.
Cette révision est l’une des mesures du paquet législatif « ajustement à l’objectif 55 » qui vise à réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990.
Plus particulièrement, l’objectif de cette refonte est de réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre (GES) et la consommation d’énergie dans le secteur du bâtiment d’ici 2030, et à le rendre climatiquement neutre d’ici 2050.
En effet, les bâtiments de l’Union européenne, dont 75 % sont inefficaces sur le plan énergétique, représentent 40 % de la consommation énergétique finale de l’Union et 36 % des émissions de gaz à effet de serre liées à l’énergie.
Afin d’atteindre les objectifs précités, la directive prévoit que chaque État membre doit établir un plan national de rénovation des bâtiments pour garantir la rénovation du parc national de bâtiments résidentiels et non résidentiels, tant publics que privés, en vue de la constitution d’un parc immobilier à haute efficacité énergétique et décarboné d’ici à 2050, en vue de transformer les bâtiments existants en bâtiments à émissions nulles. A ce titre, la Commission évaluera les projets de plans nationaux de rénovation des bâtiments, soumis tous les 5 ans, et adressera des recommandations aux Etats (article 3).
Surtout, la directive établit un dispositif visant à engager les Etats membres dans l’augmentation de la performance énergétique des bâtiments.
A cette fin, la directive retient que la performance énergétique des bâtiments est calculée sur la base d’une méthode, pouvant être différenciée d’un pays et d’une région à l’autre, sous réserve de respecter le cadre général commun établi à l’annexe 1 de la directive (article 4).
Par la suite, les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour garantir que des exigences minimales de performance énergétique des bâtiments ou des unités de bâtiment soient fixées en vue de parvenir au moins à des niveaux optimaux (de performance) en fonction des coûts et, le cas échéant, à des valeurs de référence plus strictes – telles que les exigences relatives aux bâtiments dont la consommation d’énergie est quasi nulle et aux bâtiments à émissions nulles (article 5). Lorsqu’ils fixent ces exigences, les États membres peuvent faire une distinction entre bâtiments neufs et bâtiments existants et entre différentes catégories de bâtiments.
Toutefois, en application de l’article 6 de la directive, si les Etats fixent les exigences minimales, la Commission établira un cadre méthodologique comparatif (annexe VII de la directive) pour calculer les niveaux optimaux en fonction des coûts des exigences minimales de performance énergétique. Ces niveaux devront être conformes aux trajectoires nationales définies dans les plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat. Ils seront distincts entre les bâtiments neufs et les bâtiments existants et entre différentes catégories de bâtiments.
Ainsi, les États membres devront utiliser ce cadre pour calculer les niveaux optimaux en fonction des coûts des exigences minimales de performance énergétique, puis comparer les résultats de ce calcul aux exigences minimales de performance énergétique qu’ils ont adoptées.
Si le résultat de la comparaison ainsi effectuée montre que les exigences minimales de performance énergétique en vigueur dans un État membre ont une efficacité énergétique inférieure de plus de 15 % aux niveaux optimaux en fonction des coûts des exigences minimales de performance énergétique, l’État membre concerné devra adapter les exigences minimales de performance énergétique en vigueur dans les vingt-quatre mois suivant la disponibilité des résultats de cette comparaison.
Plus particulièrement en ce qui concerne les objectifs à atteindre, il ressort de l’article 7 que les bâtiments neufs construits à compter du 1er janvier 2030 devront être à émission nulle[1]. Cette date est avancée au 1er janvier 2028 pour les bâtiments neufs appartenant à des organismes publics.
De même, conformément à l’article 8 de la directive, les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour garantir que, lorsque des bâtiments font l’objet d’une rénovation importante, la performance énergétique du bâtiment ou de sa partie rénovée soit améliorée de manière à pouvoir satisfaire aux exigences minimales de performance énergétique fixées dans la mesure où cela est techniquement, fonctionnellement et économiquement réalisable.
S’agissant des bâtiments non résidentiels, l’article 9 de la directive prévoit que les États membres établissent des normes minimales de performance énergétique des bâtiments non résidentiels qui garantissent au minimum que ces bâtiments ne dépassent pas le seuil maximal pour la performance énergétique, que chaque Etat définit comme le seuil à partir duquel 16 % de son parc immobilier non résidentiel national se trouve au-dessus de ce seuil en 2030, puis 26 % en 2033.
S’agissant du parc immobilier résidentiel, l’article 9 de la directive oblige les Etats membres à établir une trajectoire nationale de rénovation conforme aux objectifs 2030, 2040 et 2050 figurant dans le plan national de rénovation des bâtiments de l’État membre et à la transformation du parc immobilier national en un parc immobilier à émissions nulles à l’horizon 2050.
Les États membres veillent à ce que la consommation moyenne d’énergie primaire en kWh/(m².an) pour l’ensemble du parc immobilier résidentiel diminue d’au moins 16 % par rapport à 2020 d’ici à 2030 ; d’au moins 20 à 22 % par rapport à 2020 d’ici à 2035 ; et enfin d’ici à 2040, et tous les cinq ans par la suite, que cette consommation soit équivalente ou inférieure à la valeur déterminée au niveau national établie sur la base d’une diminution progressive de la consommation moyenne d’énergie primaire de 2030 à 2050, conformément à la transformation du parc immobilier résidentiel en un parc immobilier à émissions nulles.
Les États membres veillent à ce qu’au moins 55 % de la diminution de la consommation moyenne d’énergie primaire visée au troisième alinéa, soit obtenue grâce à la rénovation de 43 % des bâtiments résidentiels les moins performants (article 9). A cette fin, outre des normes minimales de performance énergétique, ils doivent mettre en place une assistance technique (guichets uniques) et des mesures de soutien financier notamment en faveur des ménages vulnérables.
Par ailleurs et conformément à l’article 10 de la directive, les États membres devront progressivement déployer des installations d’énergie solaire appropriées, si elles conviennent techniquement et sont économiquement et fonctionnellement réalisables, dans les bâtiments publics et non résidentiels, en fonction de leur taille, et d’ici 2030 dans tous les nouveaux bâtiments résidentiels neufs et tous les parcs de stationnement couverts neufs qui jouxtent un bâtiment. Il en ira notamment ainsi de tous les bâtiments publics existants dont la surface de plancher utile est supérieure à 2 000 m2 au plus tard le 31 décembre 2027, à 750 m2 au plus tard le 31 décembre 2028, et à 250 m2 au plus tard le 31 décembre 2030.
La directive rappelle également que les bâtiments occupés par des organismes publics et les bâtiments très fréquentés par le public devraient donner l’exemple en montrant que les préoccupations d’ordre environnemental et énergétique sont prises en compte et, par conséquent, ces bâtiments devraient être soumis régulièrement à un processus de certification en matière de performance énergétique.
Enfin et conformément à l’article 17 de la directive, les Etats membres ne devront plus fournir d’incitation financière à l’installation de chaudières autonomes utilisant des combustibles fossiles à compter du 1er janvier 2025. Ils pourront cependant adopter de nouvelles incitations et de nouveaux financements visant à encourager l’abandon des systèmes de chauffage et de refroidissement à combustibles fossiles au profit de systèmes hybrides utilisant une part considérable d’énergies renouvelables, tels que la combinaison d’une chaudière avec le solaire thermique ou avec une pompe à chaleur (article 13).
La directive sera publiée au plus tard en septembre 2024 au Journal officiel de l’Union européenne. Les États membres devront ensuite la transposer dans leur droit national dans un délai de deux ans.
Au regard du caractère d’ores et déjà contraignant de la réglementation française en matière de performance énergétique des bâtiments, cette directive ne devrait toutefois avoir que peu d’impact sur cette dernière.
___
[1] Les bâtiments à émissions nulles présentent une demande énergétique très faible, ne génèrent sur place aucune émission de carbone provenant de combustibles fossiles et ne produisent aucune émission opérationnelle de gaz à effet de serre ou seulement de très faibles émissions.